Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-sept questions orales. M. Bernard Laporte, je me réjouis avec vous des succès obtenus lors des matchs de rugby de ces derniers jours... mais vous nous manquez dans les tribunes ! (Sourires)

Prise en charge des enfants autistes

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - La prise en charge des enfants atteints d'autisme ou de troubles envahissants du développement (TED) n'est pas délaissée par le Gouvernement puisque vous avez annoncé le 16 mai dernier, avec Xavier Bertrand et Valérie Létard, le plan autisme pour 2008-2010, dans la continuité du premier plan de 2005-2007. Toutefois, la mise en place et le renouvellement de ces plans témoignent de l'absence d'une politique continue dans ce domaine. Du fait de l'absence de reconnaissance de l'autisme infantile spécifique à notre pays, la France est en retard pour la prise en charge de ce handicap.

Malgré les progrès que ces annonces laissent espérer, les interrogations qui subsistent inquiètent de nombreuses associations de familles. Ne trouvant pas de structures d'accueil adéquates, beaucoup de parents sont contraints de chercher une solution en Belgique. L'approche éducative de l'autisme est, en outre, insuffisamment développée. Certaines méthodes très connues à l'étranger mais non validées en France, telle l'analyse appliquée du comportement (ABA), ne peuvent être expérimentées. Les études neurologiques révèlent pourtant la plasticité du cerveau de l'enfant et ses possibilités d'évolution.

Vous avez annoncé le renforcement de la place des familles dans la réflexion sur l'autisme, la création de structures de prise en charge de taille humaine ainsi que l'expérimentation de nouveaux modèles d'accompagnement. Quels sont les critères déterminant les projets financés par le plan autisme ? Pourquoi la France, condamnée par le Conseil de l'Europe en 2004, ne reconnaît-elle toujours pas l'autisme conformément aux critères de l'OMS ? Pourquoi le diagnostic de psychose infantile n'a-t-il toujours pas été aboli, comme le préconise la Haute autorité de santé depuis 2005 ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.  - Le financement de projets dans le cadre du plan autisme permettra de diversifier l'offre d'accueil et d'accompagnement. 4 100 places supplémentaires et de nouveaux modèles d'intervention, inspirés d'approches menées à l'étranger, seront créés d'ici cinq ans.

Les services de l'État ont été chargés d'instruire les projets innovants dans une approche constructive, au besoin selon des procédures expérimentales. Compte tenu du décalage encore important entre l'offre et la demande de prise en charge, ils ont été incités à faire preuve d'ouverture et de célérité tout en veillant au respect de la dignité et de l'intégrité des personnes et à la qualité et l'évaluation des prises en charge.

Un cahier des charges national avec les professionnels concernés, en cours d'élaboration, permettra d'assouplir le cadre réglementaire et de mieux répondre aux aspirations des familles. L'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux doit rédiger une recommandation sur les critères de qualité des interventions en direction des autistes afin d'éviter les dérives et pratiques dangereuses.

En 2005, la Fédération française de psychiatrie, avec la Haute autorité de santé, a recommandé d'adopter la classification internationale des maladies intégrant l'autisme parmi les troubles envahissants du développement. Les professionnels en ont été informés par le ministère chargé de la santé en 2006. En décembre 2008, des recommandations « courtes » ont été adressées aux professionnels de santé dits de première ligne -médecin généralistes, pédiatres, etc.

Le Gouvernement a pris la mesure de l'urgence à proposer des solutions aux patients et à leurs familles. Le ministère de la santé et des sports, en collaboration avec le secrétariat d'État chargé de la solidarité, poursuivra ses efforts dans cette voie.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Les élus locaux, comme les familles, espèrent que les projets seront étudiés avec célérité et souplesse ; il ne faut pas être trop procédurier, même si des critères de qualité sont nécessaires.

Devenir du Creps de Franche-Comté

M. Gérard Bailly.  - Je suis heureux que vous soyez là pour me répondre, monsieur le secrétaire d'État, car la disparition du Centre régional d'éducation populaire et de sport (Creps) de Franche-Comté suscite localement beaucoup d'inquiétude. Cette décision annoncée en décembre dernier, sans concertation préalable avec les élus locaux, le mouvement sportif ou le personnel, sera effective le 1er septembre 2009. Ce délai est trop court pour envisager le reclassement de la quarantaine d'agents du Creps afin que les agents de Chalain puissent rejoindre le site de Prémanon.

Ces deux sites ont fait l'objet, ces dernières années, d'importants investissements des conseils généraux, du conseil régional et de l'État. Monsieur le ministre, si vous confirmez la fermeture du centre de Chalain, qu'envisagez-vous pour son transfert ? Il y a urgence : en juillet-août, ce magnifique site risque de ressembler à une friche car son directeur, ne sachant s'il disposera de personnel, ne prend aucune inscription de stagiaires pour cet été.

Nous souhaitons que le centre de Prémanon perdure comme un établissement autonome. Les élus sont fortement opposés à son éventuel transfert sous la tutelle juridique de l'École nationale de ski et d'alpinisme de Chamonix car cela reviendrait à gommer les spécificités et l'excellence de la filière de ski de fond et serait défavorable pour le Jura et la Franche-Comté. Le Centre national de ski nordique de Prémanon reçoit des athlètes de haut niveau en séjours d'entraînement et le Jura a accueilli en 2008 deux manifestations importantes : sélections du championnat du monde et championnat de France. La région et les départements ont contribué à la rénovation et à la construction d'équipements, à hauteur de 10 millions d'euros sur deux ans, et le conseil général du Jura a voté pour 2009 une participation financière à l'extension du stade de biathlon des Tuffes.

Sachant combien sont lourdes pour le département les conséquences en termes d'économie, d'emplois et de rayonnement sportif, j'aimerais avoir toutes les assurances d'une part, sur le devenir du site de Chalain et les mesures envisagées pour les personnels et d'autre part, sur les perspectives envisagées pour le site de Prémanon.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - La restructuration que vous évoquez entre dans le cadre plus large de la réorganisation du réseau des établissements du ministère décidée par le comité de coordination des politiques publiques et tient compte des orientations pour le sport de haut niveau que j'ai annoncées en décembre dernier dans la perspective des Jeux olympiques de Londres, en 2012, et qui visent à former une élite sportive plus resserrée mais plus performante. Les Creps ayant principalement vocation à accueillir ces athlètes, il aurait été incohérent de ne pas prévoir le resserrement d'un réseau recentré sur son coeur de métier, soit les formations dites « en environnement spécifique », dans des secteurs où n'existe aucune offre venant du secteur privé, marchand ou associatif.

Le site de Chalain, quelles que soient la qualité du travail réalisé au cours des dernières années par les personnels et la qualité des infrastructures, n'accueillant aucun pôle sportif de haut niveau, ne répond plus à ces objectifs nouveaux. Une concertation a été conduite sous l'égide du préfet de région pour réfléchir à son avenir. Le conseil général du Jura a indiqué qu'il était susceptible de reprendre le site et d'y maintenir une activité. Il souhaite, dans ce cadre, bénéficier de conditions financières particulières. J'ai demandé à mes services, en coordination avec ceux d'autres ministères, d'étudier cette hypothèse au regard des règles nouvelles de gestion du patrimoine de l'État. J'espère pouvoir disposer d'éléments de réponse dans les prochains jours. Quant au personnel de Chalain, il bénéficiera de l'appui des structures d'aide individualisée au reclassement que j'ai mises en place en janvier.

Concernant le site de Prémanon, qui accueille le Centre national du ski nordique, il est effectivement envisagé d'en faire, avec l'École nationale de Chamonix et le site de Vallon-Pont-d'Arc l'un des piliers d'un ensemble plus large dédié au secteur de la montagne. Prémanon a tout à gagner à ce rapprochement. Mon intention n'est en aucun cas de transférer l'activité de ski de fond en Rhône-Alpes, mais bien de renforcer le site. Nous sommes conscients de l'effort consenti par les collectivités pour doter la région d'équipements de ski nordique modernes. Notre partenariat va se poursuivre et Prémanon disposera d'une large autonomie de gestion et de décision dans ses domaines d'excellence. Nous pourrons présenter l'ensemble du projet aux élus et partenaires de la région Franche-Comté en avril prochain.

J'ajoute que la restructuration sera l'occasion de pourvoir certains postes restés depuis plusieurs années vacants au sein des services « jeunesse et sports » de la région et de remettre ainsi les effectifs à niveau. Prémanon est un site excellent, il mérite d'être mieux connu. Il n'est pas normal que certains athlètes partent faire leur stage à l'étranger alors que l'on dispose de telles infrastructures.

M. Gérard Bailly.  - Je vous remercie de ces précisions, qui rassureront les élus jurassiens. Un mot sur le site de Chalain, que je connais bien puisqu'il est situé dans mon canton : ses équipements sportifs, s'ils restent en fonction, peuvent apporter beaucoup à l'économie et à l'emploi. Il serait bon qu'ils puissent fonctionner cet été sans rupture, fût-ce avec le personnel de l'État, le temps que la collectivité, sachant que le conseil général a déjà beaucoup investi, prenne le relai.

Habilitation à la maîtrise d'oeuvre en nom propre

M. Bernard Piras.  - Le décret du 30 juin 2005 relatif aux études d'architecture et l'arrêté du 20 juillet 2005, complété par l'arrêté du 10 avril 2007, définissent, pour les architectes diplômés d'État, les conditions d'habilitation à la maîtrise d'oeuvre en nom propre, qui permet à ses titulaires d'endosser personnellement les responsabilités de l'architecte, prévues aux articles 3 et 10 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture, et de s'inscrire à l'ordre des architectes. Délivrée aux titulaires d'un diplôme d'État d'architecte au terme d'une formation d'un an organisée par les écoles nationales d'architecture, elle demande, sauf dispense expresse, une mise en situation professionnelle d'au moins six mois faisant l'objet d'un contrat tripartite passé entre la structure d'accueil, l'architecte diplômé d'État et l'école d'architecture.

Ma question est double. Les architectes diplômés issus de la formation continue diplômante, donc déjà en situation professionnelle, peuvent-ils, lorsqu'ils travaillent en milieu public, qu'ils soient titulaires on non de la fonction publique, effectuer leur mise en situation au sein de leur structure publique ? Les architectes diplômés d'État issus de la formation initiale peuvent-ils effectuer leur mise en situation dans un milieu public ? La question est bien de la qualification des agents du secteur public : la possibilité leur est-elle offerte de se former en école nationale d'architecture et d'obtenir l'habilitation ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - L'article 10 du décret concerné dispose que la formation conduisant à l'habilitation de l'architecte diplômé d'État à exercer la maîtrise d'oeuvre en son nom propre comprend et associe des enseignements théoriques, des enseignements pratiques et techniques délivrés au sein de l'école d'architecture et une mise en situation professionnelle encadrée, qui s'effectue dans les secteurs de la maîtrise d'oeuvre architecturale et urbaine. Son article 12, s'il précise que cette mise en situation professionnelle encadrée doit s'effectuer dans les milieux de la maîtrise d'oeuvre, plaçant ainsi l'architecte en situation de maître d'oeuvre, ne précise pas, en revanche, la nature de l'organisme, privé ou public, chargé d'accueillir l'architecte dans ce cadre.

En l'absence de cette précision, l'exercice de la mise en situation professionnelle est préconisé dans le cadre d'une agence d'architecture privée, les différents services publics n'étant généralement pas maîtres d'oeuvre mais plutôt maîtres d'ouvrage. Cependant, il appartient aux écoles nationales supérieures d'architecture d'apprécier, par l'intermédiaire de leur commission ad hoc, la conformité des fonctions exercées, dans le cadre de la mise en situation professionnelle, par l'architecte avant la signature du contrat tripartite.

M. Bernard Piras.  - Votre réponse me satisfait. Il faudrait adresser un courrier aux directeurs des écoles d'architecture afin de bien clarifier les choses en amont, dès l'entrée en formation.

Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles

Mme Esther Sittler.  - Les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) doivent être titulaires d'un CAP petite enfance et sont sélectionnés sur concours. Cette double condition pose problème dans les petites communes.

Le nombre de concours organisés ne leur permet pas de faire face à leurs besoins de recrutement. Ainsi, dans le Bas-Rhin, aucun concours n'est prévu en 2009 et aucun n'a été organisé en 2008. Or, pour être titularisées, les personnes recrutées par les communes doivent passer ce concours dans les deux ans suivant leur embauche. Les maires sont donc contraints de se séparer de personnels qui leur donnent pourtant entière satisfaction.

En outre, pour des personnes bien souvent mères de famille et exerçant une activité d'assistante maternelle agréée mais sans qualification, certaines épreuves du concours telles que la connaissance de l'organisation administrative de la France se révèlent bien trop difficiles. Or, la compétence et l'expérience professionnelles de ces personnes seraient tout à fait utiles dans les communes rurales.

Ne conviendrait-il pas, monsieur le ministre, d'accroître la fréquence des concours et d'aménager les épreuves afin de les rendre plus accessibles ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.  - Comme pour tous les cadres d'emplois de catégorie C accessibles par concours, la réglementation prévoit que le concours d'ATSEM est organisé soit par les centres de gestion, soit par les collectivités et établissements non affiliés à ces centres. Dans les faits, il est cependant le plus souvent organisé par les centres de gestion non seulement pour les collectivités affiliées mais également par convention pour celles qui ne le sont pas. Des règles particulières régissent l'organisation des concours, notamment en ce qui concerne le nombre de postes à ouvrir.

Conformément à l'article 43 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, le nombre de postes ouvert au concours est déterminé par le centre de gestion en fonction du nombre de nominations de candidats inscrits sur la liste d'aptitude établie à l'issue du précédent concours, du nombre de fonctionnaires du même cadre d'emplois pris en charge par le centre de gestion et des besoins prévisionnels des collectivités territoriales. Les concours peuvent donc ne pas être organisés de façon régulière.

Si certaines communes ont recruté sans concours des agents contractuels pour faire face aux besoins immédiats, il leur appartient de déclarer leurs vacances d'emplois et leurs créations de postes au centre de gestion afin que celui-ci puisse organiser un concours.

Le groupe de travail chargé, au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, du réaménagement des concours et des mécanismes de recrutement dans la fonction publique territoriale a engagé depuis plusieurs mois une réflexion tendant à adapter les épreuves des concours du secteur médico-social aux besoins des employeurs locaux. Il s'agit de mettre l'accent sur la vérification des aptitudes et des motivations des candidats. En ce qui concerne le recrutement des ATSEM, le groupe de travail poursuit plusieurs pistes de réflexion afin d'élargir le vivier des candidats. L'une consisterait à conserver l'architecture actuelle des épreuves du concours externe -une épreuve écrite d'admissibilité sous forme de QCM et une épreuve orale d'admission consistant en un entretien avec un jury- tout en professionnalisant leur contenu. Les questions relatives à l'organisation institutionnelle de la France ne porteraient que sur quelques sujets simples. Les agents seraient informés de l'environnement institutionnel de leur profession au cours de la formation d'intégration et de professionnalisation à laquelle tous les fonctionnaires de catégorie C ont désormais accès. Une autre piste consisterait à mettre en place un second concours externe réservé aux candidats titulaires du diplôme requis et justifiant d'une expérience professionnelle dans le domaine de la petite enfance ; ce concours consisterait en une seule épreuve d'entretien, qui pourrait comporter une première phase de conversation avec le jury portant sur les connaissances du candidat dans le domaine de la petite enfance et sur ses motivations et une seconde phase de mise en situation afin d'apprécier son aptitude.

Mme Esther Sittler.  - J'espère que ces réflexions, qui vont dans le bon sens, déboucheront sur des mesures concrètes. Veuillez transmettre mes remerciements à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

Situation de l'entreprise Marbot-Bata

M. Claude Bérit-Débat.  - Le ministère de la défense a décidé de ne plus faire appel à la société Marbot-Bata, implantée dans la commune de Neuvic en Dordogne, pour la fabrication de brodequins destinés à l'armée de terre. Les raisons avancées pour justifier cette décision qui condamne une usine et pénalise toute une région ne sont pas convaincantes : l'armée a reconnu depuis longtemps le savoir-faire breveté de l'entreprise périgourdine. Le ministère veut faire appel désormais à une société allemande, Meindl, et à la société Argueyrolles qui sous-traite une partie de sa production en Tunisie.

Vous imaginez l'incompréhension de la direction et le désarroi des salariés de Marbot-Bata. L'appel de cette décision auprès du tribunal administratif de Versailles vient d'être rejeté, ce qui sonne le glas d'une entreprise qui vend 70 % de sa production à l'armée. Déjà en chômage partiel, les salariés de l'entreprise vont bientôt connaître le chômage tout court. Voilà comment un obscur raisonnement sur l'ergonomie de brodequins met en péril la survie d'une entreprise et le maintien de 75 emplois dans un bassin économique déjà affecté par le recul de l'industrie de la chaussure.

Cette décision vient après l'annonce de la fermeture, en 2014, de l'Escat 24 à Bergerac, qui emploie 124 personnes dont 113 civils, dans le cadre de la restructuration des activités de défense nationale et de la révision de la carte militaire. Certes, l'armée n'a pas pour mission de créer des emplois mais le Gouvernement pourrait s'abstenir d'en faire un outil à délocaliser !

Les élus et les citoyens de Dordogne s'interrogent sur la stratégie de l'État : n'ont-ils pas entendu le Président de la République affirmer que les usines devaient rester en France ? C'est un comble de voir qu'alors que le chef de l'État en appelle au patriotisme économique, l'armée française délocalise ses commandes !

La crise fait sentir ses effets en Dordogne, où le taux de chômage a augmenté de 17 % en un an. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour sauver cette entreprise et mettre en concordance ses paroles et ses actes ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.  - Le ministère de la défense, par l'intermédiaire de l'état-major de l'armée de terre, a annoncé sa volonté d'équiper son personnel de nouvelles chaussures de combat mieux adaptées aux conditions d'engagement actuelles des unités. Il était temps ! L'armée française est moins bien équipée que celles des pays voisins et j'ai pu constater, lors de mes visites auprès des unités, que cette réforme était attendue.

Un appel d'offres a été lancé au niveau européen : c'est la loi, et il n'y a rien à y redire. Plusieurs entreprises ont soumissionné, y compris Marbot-Bata. Mais le ministère de la défense n'a pas encore annoncé son choix car l'ouverture du marché public n'a toujours pas été officiellement notifiée : cette phase de la procédure a été suspendue à cause d'un recours précontractuel introduit par l'entreprise Marbot-Bata auprès du tribunal administratif de Versailles. Mais le tribunal vient de rejeter ce recours et la notification du marché peut désormais avoir lieu.

Devant ces marques de mécontentement, M. le ministre de la défense a reçu personnellement mercredi 28 janvier 2009 le directeur de Marbot-Bata, M. Jean-Claude Jégou, et le maire de la commune de Neuvic-sur-l'Isle. Il est vrai que cette entreprise est très fortement dépendante des marchés de la défense, faute d'avoir suffisamment diversifié ses activités ; M. le ministre, soucieux de cette situation, a demandé que l'on prête une attention particulière aux autres commandes de la marine et de l'armée de terre dont l'entreprise pourrait bénéficier.

En ce qui concerne la restructuration des implantations militaires, le ministère de la défense, en liaison avec le ministère chargé de l'aménagement du territoire et avec les acteurs locaux, veille à ce que les sites concernés fassent l'objet de mesures d'accompagnement et de redynamisation adéquates.

M. le ministre de la défense est attentif à ce que la transition soit la plus douce possible pour l'entreprise Marbot-Bata, qui doit diversifier ses activités mais qui continuera à bénéficier de marchés publics.

M. Claude Bérit-Débat.  - L'entreprise Marbot-Bata comptait près de 2 000 salariés dans les années 1980 mais elle a subi de plein fouet la crise de la chaussure et n'en emploie plus aujourd'hui que 75. Elle a recentré ses activités sur les marchés de l'armée, et les chaussures qu'elle produit satisfont les soldats. (M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État, se montre dubitatif)

Certes, l'entreprise est capable de s'adapter. Mais aujourd'hui, 70 % de sa production sont mis en péril ! Si l'on ajoute aux 75 emplois ainsi menacés les 130 postes supprimés du fait de la fermeture annoncée de l'Escat 24, c'est un coup dur pour notre département !

A l'heure où l'on prône le « patriotisme économique », l'État devrait s'appliquer ce principe.

Commémorations publiques

M. Jean-Jacques Mirassou.  - La commission de réflexion sur la modernisation des commémorations publiques, présidée par M. Kaspi, a constaté que les commémorations connaissent en France une véritable désaffection. Il est important de réfléchir à l'avenir de notre politique mémorielle afin d'accompagner l'évolution de notre société et de répondre aux attentes des jeunes, qui considèrent trop souvent ces commémorations comme une tradition passéiste. Elles sont pourtant un outil pédagogique indispensable et le moyen de transmettre d'une génération à l'autre les leçons de l'Histoire.

Certains errements ont contribué à cette désaffection : je pense par exemple au choix parfaitement arbitraire de la date du 5 décembre pour rendre hommage aux morts des combats d'Afrique du Nord, alors que la date du 19 mars eût été beaucoup plus pertinente.

Le rapport de la commission Kaspi a été rendu public. Dans une lettre d'accompagnement vous écrivez, monsieur le ministre, que la commission a sollicité l'avis de tous les acteurs. Or ses conclusions suscitent des interrogations, voire des contestations, au sein du monde combattant. La commission propose de réduire de douze à trois le nombre des journées de commémoration nationale : ne subsisteraient plus que le 8 mai, le 14 juillet et le 11 novembre.

Les autres dates seraient laissées à la discrétion des collectivités territoriales, ce qui revient à instaurer une hiérarchie entre les dates à portée nationale et celles qui ne seraient qu'à portée locale. Le monde combattant y voit une dévalorisation. J'étais récemment à une assemblée générale des anciens combattants de Haute-Garonne ; tous les orateurs ont dit leur hostilité à une telle hiérarchisation. Le monde combattant souhaite même que l'on ajoute au calendrier mémoriel la création du Conseil national de la Résistance, le 27 mai 1943.

Quel sort réservez-vous au rapport Kaspi ? Allez-vous enfin consulter toutes les parties prenantes ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.  - Le rapport de la commission de réflexion sur la modernisation des commémorations publiques, présidée par l'historien André Kaspi, a été remis au Gouvernement le 12 novembre 2008, à l'issue d'une année de réflexion et de larges consultations effectuées au sein du monde combattant. Ce rapport a mis en évidence la conjonction d'une augmentation significative du nombre de commémorations nationales entre 1999 et 2003 et de la désaffection du public vis-à-vis de ces commémorations. Alors que six dates commémoratives avaient été crées entre 1880 et 1999, six nouvelles dates ont enrichi notre calendrier commémoratif entre 1999 et 2003. Et des associations demandent la création de nouvelles dates commémoratives nationales, pour honorer l'armée d'Afrique ou la première réunion du Conseil national de la Résistance. Chaque fois que des personnes veulent commémorer un événement, une tragédie, un combat, ce souhait doit être respecté ; encore faut-il que le public se sente concerné. Les difficultés d'organisation sont réelles !

La commission Kaspi s'est légitimement inquiétée de cette inflation mémorielle qui va de pair avec la difficulté des autorités publiques à mobiliser un public large et renouvelé autour des commémorations publiques existantes. C'est pourquoi elle a proposé de mieux valoriser les trois commémorations les plus fédératrices de notre communauté nationale et de renouveler les rites commémoratifs afin de pérenniser et de renouveler le public assistant à ces commémorations.

Dans ma commune, j'ai engagé un renouvellement des pratiques commémoratives, qui implique les jeunes générations. Le 11 novembre, j'ai réussi à entraîner des centaines de jeunes, ce qui a donné une autre dimension à ces manifestations.

Le Gouvernement a clairement affirmé qu'il n'était pas dans son intention de supprimer, ni même de hiérarchiser, les commémorations nationales existantes. Il n'est pas non plus dans ses intentions d'introduire une quelconque concurrence des mémoires. Son rôle est au contraire de valoriser tous les pans de notre mémoire nationale, sans exclusive, en s'assurant également de la bonne transmission de ces mémoires plurielles en direction des jeunes générations. J'ai été très clair là-dessus quand le rapport Kaspi a été rendu public : notre intention est seulement d'en garder le meilleur, c'est-à-dire ce qui peut renforcer nos commémorations nationales et valoriser la démarche mémorielle.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Vos propos relèvent de la déclaration d'intentions, même si celles-ci sont bonnes. Reste que disparaissent les commémorations de l'appel du 18 juin, des victimes de la déportation ou de l'action des Justes. Ce n'est pas bienvenu à un moment où, entre les discours des négationnistes et les actes répugnants de ceux qui profanent les cimetières, le racisme et la xénophobie reviennent en force. Je ne connais sans doute pas le monde combattant aussi bien que vous mais je le connais assez pour mesurer son inquiétude. Ses réactions seront vives, si les choix du rapport Kaspi sont maintenus.

Indemnisation des calamités agricoles

M. Daniel Raoul.  - M. Guillaume, retenu lui aussi dans la Drôme pour les raisons que chacun devine, m'a chargé de vous poser sa question, monsieur le ministre. Je suis d'ailleurs très sensible à votre présence personnelle parmi nous ce matin.

A la suite du gel du printemps 2008, les arboriculteurs drômois sinistrés ont déposé des dossiers de demande d'indemnisation au titre des calamités agricoles auprès de la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt. La demande de certains d'entre eux a été rejetée parce qu'ils étaient indemnisés par une assurance privée souscrite pour se prémunir du risque de perte d'exploitation consécutive à des événements climatiques. De plus en plus d'agriculteurs, encouragés par le ministère de l'agriculture, souscrivent de telles assurances individuelles. Cela nous rappelle une proposition de loi de nos collègues du RDSE.

Or l'indemnisation liée à ces contrats est parfois très inférieure à la compensation financière que ces arboriculteurs auraient reçue de l'État au titre des calamités agricoles s'ils n'avaient pas été assurés à titre individuel. Un arboriculteur drômois ayant versé 9 000 euros de cotisation annuelle à son assureur a été indemnisé par celui-ci, pour le gel du printemps 2008, à hauteur de 47 000 euros alors que, sans assurance, il aurait perçu 62 500 euros au titre des calamités agricoles tout en économisant les 9 000 euros de la cotisation d'assurance. Dans la Drôme, une quarantaine d'arboriculteurs sont ainsi punis pour avoir été trop prudents et avoir suivi vos conseils, alors que le ministère de l'agriculture encourage le monde agricole à une généralisation de l'assurance récolte !

Je sais bien que, dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, vous avez attribué 100 millions aux calamités climatiques et 40 aux risques sanitaires. Nous attendons du Gouvernement un réexamen de la situation des arboriculteurs drômois pénalisés afin qu'au minimum, l'indemnité pour calamités agricoles complète l'indemnisation versée par l'assureur et qu'il y ait équité entre les exploitants assurés et les autres. Je sais que vous avez fait des propositions en ce sens dans le cadre de l'article 68...

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.  - Je n'oublie pas que j'ai eu l'honneur de siéger au Sénat !

Je me suis rendu dans la Drôme au printemps 2008 pour mesurer sur place la détresse de ces agriculteurs qui, outre le gel, avaient subi tempête et grêle.

Les arboriculteurs drômois touchés par le gel du printemps 2008, qui étaient couverts par un contrat d'assurance multirisque climatique, n'ont pas bénéficié des indemnisations du Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA). Or, dans certains cas, l'indemnisation de leur assurance s'est avérée inférieure à l'indemnisation publique à laquelle ils auraient pu prétendre s'ils n'avaient pas souscrit d'assurance, du fait notamment des clauses librement et contractuellement choisies. Vous avez dit qu'ils ont suivi mes conseils : en fait, ces contrats ont été souscrits avant mon arrivée au ministère...

Cette situation exceptionnelle s'explique par la conjonction de plusieurs facteurs. Le caractère forfaitaire de l'indemnisation du Fonds national ne permet pas de prendre en compte les spécificités de chaque situation personnelle. De plus, cette indemnisation est calculée sur l'ensemble des pertes déclarées par l'exploitant sur les cultures reconnues sinistrées au titre des calamités tandis que, dans le dispositif assurantiel, les pertes directement liées à l'événement climatique en cause sont clairement déterminées et font, seules, l'objet d'une indemnisation. Enfin, le taux d'indemnisation par le Fonds national des pertes liées au gel de printemps 2008 a été exceptionnellement majoré de dix points. Ce niveau exceptionnel de l'indemnisation publique contribue à expliquer qu'elle ait pu, dans certains cas, dépasser l'indemnisation versée par l'assurance.

La couverture des exploitants contre les aléas climatiques étant une priorité de mon ministère, les exploitants concernés ont été identifiés et leur situation fait l'objet d'un examen attentif. Je souhaite qu'ils ne soient pas découragés de s'assurer et je prendrai des décisions à leur égard dès que l'inventaire en cours sera achevé.

L'actuel système assurantiel n'est pas attractif et je donne un coup de chapeau à ceux qui ont eu le mérite d'y avoir recours. Le budget pour 2009 prévoit de financer un premier système de mutualisation des assurances récoltes et, dans la révision actuelle de la PAC, nous avons provisionné 100 millions pour prendre en charge une partie des primes d'assurances. Nous sommes donc dans une période de transition, ce qui explique l'intervention temporaire du Fonds national, en attendant le système général d'assurances que nous voulons créer, dans le cadre de la PAC, pour les récoltes mais aussi pour les risques sanitaires ; et nous envisageons aussi un système d'assurances revenus ou chiffre d'affaires. Mais dans l'immédiat, je vais examiner les cas dont vous parlez.

M. Daniel Raoul.  - Je prends acte de votre engagement d'examiner la quarantaine de cas en question. Ne pas le faire serait contradictoire avec votre volonté de généraliser les assurances agricoles.

Conditions d'emprunt des collectivités territoriales

M. Louis Nègre.  - Malgré le plan de sauvetage d'octobre dernier et malgré les garanties apportées au système bancaire, les élus, et particulièrement les maires des villes moyennes, s'interrogent sur la trop grande différence existant entre le taux de refinancement interbancaire de la BCE -2 % et bientôt, semble-t-il, 1,5 %- et les taux proposés actuellement au secteur local. Là où il était possible d'obtenir, il y a six mois, pour des prêts « simples » -à taux fixe ou à taux variable- des marges sur encours de quelques dizaines de points de base au-dessus de l'euribor, un niveau bien supérieur, de 150 à 200 points de base, est aujourd'hui proposé aux collectivités territoriales. C'est paradoxal puisque l'euribor à un an baisse de 60 % sur la même période, de 5,5 % à 2,2 %.

Faute de prêts à des taux raisonnables, on s'expose à un risque d'attentisme des décideurs locaux et, finalement, de grippage de la relance et des efforts d'investissements demandés aux collectivités. Faut-il envisager, à l'instar de ce qui existe en Suède, au Danemark, en Norvège, en Finlande ou aux Pays-Bas, la mise en place d'une Agence publique de financement pour le secteur public local ? Afin que nous puissions boucler dans des conditions optimales nos projets pour 2009, quelles mesures Mme la ministre de l'économie compte-t-elle prendre vis-à-vis des banques pour opérer les changements profonds indispensables ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.  - Le Gouvernement partage vos préoccupations car le contexte impose de ne surtout pas entraver l'investissement, notamment celui des collectivités territoriales et de leurs groupements, qui représente les deux tiers du total. Cependant, alors qu'il revient au Gouvernement de veiller au bon accès au crédit des collectivités territoriales, c'est à elles seules de choisir leur mode de financement.

Le Gouvernement s'est engagé dans le soutien du crédit à l'économie notamment aux collectivités locales. Ainsi, la loi de finances rectificative pour 2008 pour le financement de l'économie a mis en place la Société de financement de l'économie française qui a permis de lever des financements sur les marchés avec la garantie de l'État. Ces financements sont ensuite distribués aux établissements de crédit en contrepartie d'engagements de prêts aux agents économiques et notamment aux collectivités territoriales. A ce jour, 33 milliards ont été prêtés aux banques pour qu'elles financent l'économie.

Le Gouvernement a en outre ouvert en novembre 2008 une enveloppe exceptionnelle de 5 milliards de prêts sur fonds d'épargne à destination des collectivités territoriales afin de financer leurs investissements de la fin de l'année 2008.

Le Gouvernement met donc en place des moyens mais il contrôle également que ceux-ci sont bien utilisés pour financer l'économie. La progression des encours de crédit aux collectivités locales est un des indicateurs suivis pour évaluer la contribution des banques au financement de l'économie. En contrepartie des dispositifs de soutien du crédit à l'économie, les banques se sont engagées à augmenter leurs encours de ce crédit de 3 à 4 % en rythme annuel. Christine Lagarde a mis en place un Observatoire du crédit chargé de vérifier chaque mois que les banques respectent leurs engagements.

Les derniers chiffres disponibles montrent que le crédit aux collectivités locales est aujourd'hui le plus dynamique, avec une croissance des encours de prêts de 4,9 % entre septembre et décembre 2008 contre 1,4 % en moyenne pour tous les types de crédit. Les collectivités locales profitent donc de leur bon profil de risque et conservent un bon accès au crédit.

Sur l'évolution des marges bancaires, l'analyse reste délicate pour plusieurs raisons. D'abord les collectivités territoriales ont, en raison d'une forte concurrence entre les réseaux bancaires, bénéficié jusqu'à une période récente de conditions de prêts favorables, caractérisées par des marges relativement faibles. Plus généralement, la fixation de ces marges par les banques résulte de plusieurs facteurs qui tiennent aux conditions financières supportées lors des opérations de refinancement, aux politiques commerciales des différents réseaux bancaires mais également à la situation financière de chaque emprunteur. Il est donc difficile de tirer des conclusions définitives des conditions de prêts actuelles, d'autant que les collectivités territoriales ne recourent à l'emprunt que pour 25 % de leurs dépenses d'investissement si bien que les intérêts qu'elles supportent ne représentent que 4 % de leur budget de fonctionnement.

La création d'une agence publique de financement du secteur public local, qui recourrait elle-même aux marchés financiers et apporterait des financements aux collectivités territoriales, ne saurait constituer une voie exclusive pour répondre à la demande immédiate des collectivités territoriales. Les émissions obligataires, menées sous l'égide de l'association des communautés urbaines de France ces dernières années, se sont bien déroulées sans le recours à une telle agence.

Le Gouvernement restera attentif à l'évolution de la situation et si celle-ci se dégradait, nous regarderions de plus près les solutions que vous proposez.

M. Louis Nègre.  - Je me réjouis que les efforts du Gouvernement aient permis d'augmenter l'encours des prêts aux collectivités locales. Reste qu'il faudra réagir si la situation se dégrade. Et le problème de fond demeure le différentiel -200 points de base- malgré les efforts du Gouvernement en faveur des banques. Ces efforts sont incontestables, la BCE en est à deux points, bientôt moins encore, et nous continuons à subir un important différentiel. Les élus ont du mal à comprendre !

Résidences pour seniors

M. Rémy Pointereau.  - Le régime fiscal applicable aux loueurs de meublées non professionnels -ou, pour faire plus simple, LMNP- et aux loueurs de meublés professionnels -LNP- en vigueur depuis le 1er janvier est limité aux Ehpad, aux résidences d'étudiants, aux résidences de tourisme et aux résidences d'affaires. Cette restriction pénalise les zones rurales, alors que la loi Scellier, qui aménage les dispositifs Robien et Borloo, exclut déjà toutes celles qui sont classées en zone C du bénéfice de la réduction d'impôt.

Cela risque d'empêcher la réalisation de résidences spécialisées pour l'accueil des seniors, pourtant bien nécessaires dans nos départements ruraux. Les projets portés par des investisseurs privés offrent de nombreux avantages pour les communes rurales : logements de qualité dans un environnement adapté et convivial, protection des personnes âgées contre le déracinement ou la solitude, services offerts aux résidents, maintien ou création d'emplois...

Les seniors seront-ils obligés de s'installer dans les communes les plus peuplées ? Cela accélèrerait le déclin démographique des autres. Avec les nouveaux textes, les investisseurs auront tendance à se désengager : je le vois dans mon département où un promoteur, qui avait déjà acquis le terrain, semble renoncer à la résidence qu'il envisageait de construire dans une commune de 600 habitants ayant gardé des commerces, un médecin et un pharmacien. Pourquoi cette exclusion des zones C et que compte faire le Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.  - Je connais votre attachement aux zones rurales, monsieur Pointereau, et je comprends votre inquiétude. Cependant, les récentes réformes n'ont pas remis en cause les dispositifs de soutien à l'investissement privé : des mesures fiscales existent en faveur des résidences pour seniors. La LMP reste une incitation puissante, même si elle a été réservée aux investisseurs qui agissent réellement en professionnels : on avait constaté certains dérapages ; l'imputation du déficit sur le revenu global demeure, ainsi que l'amortissement de l'investissement, et ce régime s'applique sur tout le territoire. Le régime LMNP n'est pas davantage zoné, puisque les bénéfices correspondants sont imposés comme industriels et commerciaux.

En revanche, la réduction d'impôt complétant le régime d'amortissement est réservée à certains investissements : accueil des personnes les plus fragiles, soins, accueil familial, résidences avec services pour étudiants ou personnes âgées. Trois types de résidences pour seniors y sont donc éligibles : établissements sociaux et médico-sociaux apportant une assistance dans les actes quotidiens, des soins ou une aide à l'insertion ; les logements affectés à l'accueil familial salarié dès qu'ils associent logement de la personne âgée et de l'accueillant ; les établissements de soins de longue durée ou exerçant une surveillance médicale constante.

La construction de résidences pour seniors est également encouragée par la mesure adoptée dans le collectif 2008 à l'initiative de MM. Carrez et Scellier : les règles du Robien et du Borloo sont reconduites pour autant que le bailleur soit distinct du fournisseur de service. Contrairement aux LMP et LMNP, ce régime est ciblé sur les zones sous tension afin d'éviter des effets de surconstruction. Il y va de la protection des investisseurs particuliers : on a constaté des dérives contre lesquelles nous devons nous prémunir.

M. Rémy Pointereau.  - Je vous remercie de cette réponse qui me satisfait en partie. Ne serait-il pas souhaitable que ces résidences s'installent en zone de revitalisation rurale ? Plutôt que de multiplier les dispositifs dérogatoires dont on n'a pas la même lecture à Bercy et dans les départements, il faudrait les mettre à plat et faire en sorte qu'ils répondent aux besoins constatés sur place. Cela simplifierait beaucoup les choses.

Site Wabco à Claye-Souilly

M. Michel Billout.  - Le site Wabco, à Claye-Souilly, appartient à l'un des plus grands équipementiers mondiaux pour les véhicules industriels ; tous les grands constructeurs de poids lourds, de remorques et d'autocars sont ses clients. Aussi cette entreprise, la première de la commune et la vingt-deuxième de Seine-et-Marne, est un site important pour l'industrie de la région. Elle s'est déjà séparée de 50 intérimaires en décembre dernier et a annoncé 84 licenciements en faisant état d'une chute importante de ses commandes.

On aurait pu croire l'entreprise solide : le groupe auquel elle appartient a son siège à Bruxelles et emploie 7 700 personnes dans 31 pays. Son chiffre d'affaires a augmenté de 20 % en 2007, la progression s'établissant à 8 % l'an sur cinq ans. L'entreprise est à l'origine de quelques-unes des plus importantes innovations du secteur du premier ABS poids-lourds en 1981 aux premiers systèmes avec freinage actif et de freinage industriel en 2008, en passant par le premier système de suspension pneumatique à pilotage automatique pour les véhicules industriels en 1986.

Les employés de Claye-Souilly sont donc hautement qualifiés et leur savoir-faire ne doit pas être à la merci de la conjoncture, à moins que celle-ci ne soit qu'un prétexte pour accélérer une réduction des effectifs -ils ont déjà diminué d'un tiers-, voire préparer une délocalisation. Si l'entreprise est fragilisée par la crise, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre, au-delà de son plan pour le secteur automobile, afin de défendre l'emploi ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.  - Votre question est double, qui porte à la fois sur le secteur de l'automobile et sur le cas de Wabco. Le secteur de la construction de véhicules traverse une crise mondiale et subit les conséquences de la crise financière. Tous les constructeurs doivent faire face à un effondrement des ventes et à une crise de liquidités. Ils ont ralenti les cadences et recouru au chômage partiel, ce qui impacte fortement les équipementiers. Le Gouvernement s'est mobilisé et le Président de la République a annoncé, le 9 février, un ensemble de mesures jouant sur de multiples leviers.

L'objectif de ce plan est de conforter la compétitivité de la filière automobile. Des prêts seront octroyés aux constructeurs implantés en France pour soutenir la création de nouveaux modèles plus respectueux de l'environnement et moins consommateurs d'énergie, ce qui mobilisera largement les sous-traitants.

Enfin, les organisations professionnelles représentatives de la filière ont signé le 9 février dernier un code de performance et de bonnes pratiques qui crée une nouvelle relation entre les clients et les fournisseurs, fondée sur le partenariat.

S'agissant du groupe Wabco, son chiffre d'affaires a certes progressé de 7 % en 2008, mais, durant le dernier trimestre 2008, son activité a diminué de 33 % par rapport à la même période l'an passé, d'un quart sur le seul marché européen -c'est dire la profondeur de la crise qui affecte la filière ! En 2009, les ventes de camions en Europe devraient reculer d'au moins 100 000 unités. Pour faire face à cette situation, le groupe a supprimé 1 400 emplois, soit 20 % de ses effectifs, et la filière française, située en Seine-et-Marne, a lancé, le 1er décembre 2008, une procédure de licenciement collectif pour motif économique concernant 84 emplois, sur 374 personnes en 2007. L'entreprise, à notre demande, a amélioré le plan social présenté, notamment en augmentant le budget prévisionnel consacré à la formation, et elle ne conteste pas l'obligation de revitalisation à laquelle elle est soumise. Enfin, nous avons accepté, au vu de son carnet de commandes, sa demande de chômage partiel pour 300 salariés durant le premier trimestre 2009, afin d'éviter des licenciements.

Monsieur Billout, vous le voyez, l'État prend ses responsabilités et attend que les acteurs privés fassent de même. La France n'abandonnera pas son industrie automobile ! Nous l'aiderons à surmonter la crise pour maintenir la production sur notre territoire !

M. Michel Billout.  - Laissez-moi vous dire ma perplexité. Si le plan de sauvetage de la filière ne concerne pas des grands équipementiers tels que la société Wabco, quels seront ses effets sur les plus petits sous-traitants ? Demander à Wabco d'améliorer son plan social est insuffisant. Rien n'a été tenté pour dissuader l'entreprise de licencier et garantir la pérennisation du site. Or, avec la suppression de 200 emplois depuis 2000, l'entreprise semble vouloir se désengager, malgré la hausse régulière de la productivité du site. Bref, il convient donc d'examiner de plus près ce dossier. Le Gouvernement devrait s'employer davantage à sauvegarder les emplois. Nous en aurons besoin demain !

Gestion des impôts locaux

M. Claude Biwer.  - La Cour des comptes, dans son dernier rapport annuel, a souligné la gestion opaque des impôts fonciers par l'État. Tout d'abord, elle a regretté la complexité du calcul de la valeur cadastrale d'un bien -pas moins de treize étapes sont nécessaires pour déterminer le montant de l'impôt foncier d'un particulier- ; calcul qui, de surcroît, n'est pas transmis au contribuable, ce qui explique, sans doute, le faible nombre de réclamations concernant les impôts locaux par rapport aux impôts d'État. La Cour des comptes déplore également l'absence de révision des bases locatives, qui entraîne un classement des biens peu équitable. De fait, les bases locatives n'ont pas été révisées depuis 1970 pour le foncier bâti et depuis 1962 pour le foncier non bâti !

Mais surtout, la Cour des comptes s'interroge sur les coûts de gestion de la fiscalité locale. La réduction du coût de gestion des taxes foncières à un taux de 1,75 %, pour laquelle elle délivre un satisfecit à l'administration, ne s'est pas répercutée, note-t-elle, sur le taux prélevé sur les contribuables, maintenu à 4,4 %. Autrement dit, les gains de productivité réalisés par l'administration fiscale ne profitent nullement aux contribuables locaux, d'autant qu'à ces 4,4 % s'ajoutent 3,6 % prélevés par l'administration fiscale au titre des frais de dégrèvements et d'admission en non-valeur, soit un prélèvement total de 8 % pour les taxes foncières.

Monsieur le ministre, vous me répondrez certainement que ces frais de gestion constituent la contrepartie du financement par l'État des 13 milliards de dégrèvements...

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.  - Exactement !

M. Claude Biwer.  - Certes, mais à condition que l'on ne tienne pas compte des dégrèvements législatifs, qui doivent être compensées par l'État. Monsieur le ministre, quand diminuerez-vous le prélèvement de 4,4 % opéré sur les contribuables locaux, conformément à la recommandation de la Cour des Comptes ? Quand réformerez-vous les commissions communales des impôts directs dont la formation pose de grandes difficultés aux petites communes ? En effet, la population n'est pas assez nombreuse, parfois, pour que l'on parvienne à sélectionner 24 personnes pour en retenir six. En un mot, ces opérations sont si complexes que personne n'y comprend rien et, passez-moi l'expression, que tout le monde s'en fiche !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.  - Monsieur Biwer, la technicité de cette question témoigne de votre profonde connaissance de la fiscalité locale.

M. Claude Biwer.  - Merci !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État.  - M. Woerth, dont je vous prie d'excuser l'absence, partage votre point de vue : les valeurs locatives doivent être révisées et la fiscalité locale réformée. Au reste, le Président de la République l'a souhaité lors du Congrès des maires et présidents de communautés de France, fin 2007, de même que le Premier ministre lors de la Conférence nationale des exécutifs et nous avons clarifié, dès le dernier budget, les relations avec les collectivités territoriales, conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

Monsieur le sénateur, vous avez donné une vision partielle de la réalité. « Si les coûts de gestion sont surfacturés », note la Cour des comptes, « les coûts réels pour l'État des dégrèvements et des admissions en non-valeur représentent, en revanche, beaucoup plus que 3,6 % des taxes locales. La surfacturation vient compenser une sous-facturation. » Par ailleurs, l'État supporte plus que les dégrèvements ordinaires et les admissions en non-valeur mentionnés dans le rapport puisqu'il prend également en charge le coût de trésorerie lié au fait qu'il verse mensuellement le produit des recettes locales aux collectivités bien qu'il ne perçoive les impôts qu'en fin d'année, il assure des activités de conseil auprès des collectivités territoriales et autorise les collectivités territoriales à déposer gratuitement leurs fonds au Trésor public, ce qui représente une garantie de sécurité. Au total, ces ressources ont représenté 5 milliards de 2001 à 2007 pour une charge de 5 milliards. L'État ne s'enrichit donc nullement au détriment des contribuables ou des collectivités locales. L'équilibre entre recettes et dépenses est parfait, comme le montre de manière détaillée l'annexe à la loi de finances pour 2009.

De plus, ce calcul ne prend pas en compte les dégrèvements législatifs. Or ce coût n'est pas nul. Si l'État ne prenait pas à sa charge les 2,2 milliards de dégrèvements sur la taxe d'habitation pour les plus modestes, les collectivités territoriales dont le potentiel fiscal est faible ne pourraient accorder à leurs contribuables des mesures d'allégement équivalentes. Sans ces dégrèvements, un grand nombre de contribuables ne pourraient acquitter leur impôt, ce qui se traduirait par une augmentation des admissions en non-valeur.

Il n'y a pas lieu en conséquence de modifier les frais d'assiette et de recouvrement.

M. Claude Biwer.  - Je vous remercie de ces précisions. Si je vous donne acte du fait que l'État ne s'enrichit pas, je sais aussi que le contribuable s'appauvrit... Il faut, dans cette affaire, de la clarté et davantage d'explication.

Maïs Mon 810

M. Christian Demuynck.  - A l'issue du Grenelle de l'environnement, la France a décidé, au nom du principe de précaution, d'activer la clause de sauvegarde concernant la seule plante transgénique cultivée dans notre pays, le maïs Mon 810. L'Agence européenne de sécurité des aliments (Aesa) a pourtant écarté tout risque pour la santé humaine ou animale, ou pour l'environnement ; l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) vient de confirmer cette absence de risque. Au vu des avis de ces deux organismes à l'expertise reconnue, la clause de sauvegarde pourrait être levée.

Le maïs Mon 810 est cultivé sur 20 millions d'hectares dans le monde, en Espagne depuis 1998. Pourquoi la France refuse-t-elle encore toute expérimentation et toute mise en culture ? Sa position actuelle entretient la suspicion autour des OGM, alors que nous en mangeons tous les jours, et lui fait prendre un retard considérable dans le domaine des biotechnologies, notamment vis-à-vis des États-Unis. C'est d'autant plus dommage que notre pays est le deuxième producteur mondial de semences et a une expertise agronomique de grande qualité. Si cette position est maintenue, il est à craindre qu'il ne perde son indépendance dans ce domaine et ne voie ses chercheurs s'expatrier. Bayer a déjà quitté la France.

Je souhaite aussi interroger le Gouvernement sur la nomination du président du Haut conseil des biotechnologies. Après l'avis défavorable des deux commissions parlementaires sur le nom qu'il avait proposé, aucune autre candidature n'a été soumise, même si le nom de Mme Catherine Bréchignac circule. Ce retard fait qu'il sera impossible d'expérimenter les OGM en 2009.

Au-delà, que compte faire le Gouvernement pour développer la recherche dans les biotechnologies ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - A la suite de l'avis du Haut comité de préfiguration, le Gouvernement a décidé, en février 2008, d'interdire la culture du Mon 810 et ce en raison d'incertitudes sur les impacts non pas sanitaires mais environnementaux de la culture de ce maïs pour les cultures non cibles et les sols. L'Aesa a reconnu elle-même ces incertitudes et demandé à Monsanto des informations supplémentaires.

La procédure d'autorisation au niveau européen est encore en cours, les analyses étant menées par l'Espagne ; ses résultats sont attendus pour cette année. Le Conseil européen de décembre 2008 a d'ailleurs affirmé la nécessité de revoir les procédures d'expertise, notamment celles conduites par l'Aesa ; la Commission n'a à ce jour fait aucune proposition en ce sens. Il paraît dès lors prématuré de lever la clause de sauvegarde. La question a été soumise hier au Conseil « environnement » pour l'Autriche et la Hongrie ; 22 des 27 États membres ont voté contre la Commission... même l'Espagne.

Au-delà, il est clair que nous ne devons pas renoncer à la recherche sur les biotechnologies ; le Gouvernement y consacrera 45 millions d'euros sur trois ans.

M. Christian Demuynck.  - Il faut redire que l'Aesa comme l'Afssa ont écarté tout risque pour la santé humaine ou animale. Le maïs Mon 810 est cultivé sans problème dans le monde depuis dix ans. L'inquiétude vient de la pollinisation, mais il n'y a aucun risque dès lors qu'on s'en tient aux bonnes pratiques.

Il est impératif que la France ne prenne pas de retard et investisse massivement dans les biotechnologies ; la planète est confrontée à de graves problèmes alimentaires, nous serons neuf milliards sur terre en 2050 et 800 millions de personnes meurent de faim aujourd'hui...

Produits contenant de l'amiante

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je m'exprime ici comme co-rapporteur du rapport sénatorial sur l'amiante. L'amiante est interdit dans l'Union européenne depuis le 1er janvier 2005. Cette interdiction devrait permettre, à terme, d'arrêter l'hécatombe, même si je ne n'oublie pas les milliers de morts à venir en raison des pratiques passées. Mais le lobby de l'amiante et les intérêts de certains États de l'Union s'accommodent mal de cette interdiction et tentent d'obtenir une dérogation les autorisant à mettre sur le marché européen des articles contenant de l'amiante, par le biais de l'annexe XVII du règlement Reach, et plus particulièrement de son article 6-2.

Si ces dérogations étaient acceptées, des pièces détachées contenant de l'amiante, y compris de la crocidolite -garnitures de freins ou d'embrayages, articles en amiante, ciment- pourraient de nouveau circuler en Europe ; la liste est longue puisque que l'amiante est entré, à un moment ou à un autre, dans la composition de plus de 3 000 produits. Ces articles pouvant être importés de pays où l'amiante n'est pas interdit, cette circulation exposerait la population européenne à un risque mortel, en particulier les travailleurs chargés des opérations de maintenance.

Après une tentative infructueuse en décembre 2008, la Commission européenne devait présenter aux États membres de nouvelles propositions de dérogations ; je crois savoir qu'elle l'a fait la semaine dernière et que plusieurs délégations ne l'ont pas soutenue. Qu'a fait la France ? En avril prochain, le Parlement européen contraindra-t-il la Commission à renoncer à ces dérogations ? L'Union appliquera-t-elle enfin une politique cohérente d'interdiction de l'amiante ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Lors de la réunion du comité réglementaire compétent sur Reach le 20 février dernier, les États membres ont réaffirmé le principe d'une interdiction de l'amiante sur le territoire de l'Union mais ont maintenu deux dérogations. La première, qui concerne les diaphragmes à base d'amiante chrysotile produits par trois entreprises, sera révisée au 1er juin 2011. Les États membres qui en font usage ont l'obligation de prouver qu'il n'y a pas de solutions alternatives, notamment en transmettant les rapports des industriels.

La décision du 20 février interdit par ailleurs l'utilisation et la mise sur le marché des articles contenant de l'amiante installés ou mis en service avant le 1er janvier 2005 ; les États peuvent accorder des dérogations dans des conditions restrictives, chacune d'elles n'étant valable que pour l'État qui l'aura adoptée. Le risque d'importation incontrôlée de ces produits est donc écarté.

La France souhaite voir l'amiante totalement interdit le plus tôt possible.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je vous remercie.

Transports ferroviaires de proximité

M. Jacques Mézard.  - Le rapport de la Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire sur l'équipement de la France en infrastructures de transport relève que « les moyens financiers mis en oeuvre ont essentiellement profité au renforcement des grands réseaux existants et ce, au détriment des infrastructures permettant de relier des territoires à ces grands réseaux structurants, c'est-à-dire de les désenclaver ».

Dans le Cantal, nous avons perdu le train de nuit et toute liaison directe avec Paris. Les temps de trajet y sont supérieurs à ce qu'ils étaient à la fin du XIXe siècle !

Madame la ministre, j'ai apprécié votre écoute lors du débat sur le Grenelle de l'environnement. Sachez que la situation de l'entretien sur ces lignes est telle que des arbres sont tombés sur des trains circulant et que les chutes de neige de décembre dernier ont provoqué des blocages de plusieurs jours. L'instrument de dégagement n'est plus le chasse-neige mais la tronçonneuse ! En vingt ans, le nombre d'agents des services d'équipement de la SNCF dans le Cantal est passé de 120 à 38. A l'automne, le trajet entre Vic-sur-Cère et Le Lioran dure parfois 56 minutes au lieu de 20 à cause des feuilles mortes...

Le président de la SNCF m'a indiqué que la remise à niveau coûterait 513 millions d'euros. Certes, le contrat de performance signé en novembre dernier par l'État et Réseau ferré de France (RFF) permet d'espérer des améliorations importantes et le plan rail prévoit un financement de 213 millions, mais existe-t-il une véritable volonté de préserver les lignes ferroviaires de second niveau ? Ce mode de transport représente, selon moi, une solution d'avenir.

Que prévoit le Gouvernement pour faire face aux problèmes immédiats d'entretien et de sécurité, accélérer la remise à niveau des infrastructures et conserver des liaisons directes entre Paris et les territoires les plus enclavés, notamment par des trains de nuit ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Je vous prie d'excuser l'absence de Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.

La rénovation du réseau ferré est une priorité du Grenelle. Le contrat de performance signé entre l'État et RFF prévoit un financement de 13 milliards pour 2008-2015, dont plus d'un milliard pour le réseau régional. Le plan rail pour l'Auvergne ajoute 213 millions d'euros à l'enveloppe de 196 millions du contrat de plan État-région et, lors de sa signature par Dominique Bussereau, Brice Hortefeux a défendu la nécessité de désenclaver le Cantal. Le contrat de projets État-région et le plan rail consacreront 125 millions aux lignes reliant Aurillac à Clermont-Ferrand, Figeac et Lamativie, auxquels s'ajouteront 17 millions dans le cadre du plan de relance.

En outre, la desserte TER mise en place à Figeac pour compenser la disparition des trains de nuit n'étant pas satisfaisante, la SNCF doit organiser une navette routière. Et, depuis décembre 2008, le train doit atteindre les 200 km/h entre Paris et Clermont-Ferrand.

Comme vous, le Gouvernement considère la rénovation des lignes et le transport ferroviaire comme une priorité pour l'avenir.

M. Jacques Mézard.  - Je vous remercie de votre réponse, mais le remplacement du train de nuit par une navette routière ne me semble pas constituer un progrès. Et vous ne dites rien du problème de l'entretien, qui crée des risques graves pour la sécurité.

Barreau de Gonesse

Mme Raymonde Le Texier.  - Avec environ 60 000 emplois, la plate-forme aéroportuaire de Roissy est un pôle majeur de développement économique. 250 000 personnes vivent dans un périmètre de dix kilomètres, essentiellement à Sarcelles, Garges, Villiers-le-Bel, Amouville et Gonesse. Si le taux de chômage y est plus élevé que dans l'ensemble du département, alors que le profil des demandeurs d'emploi correspond aux postes proposés à Roissy, c'est par manque de transport en commun pour s'y rendre, sauf à passer par Paris et à allonger le temps de transport d'environ deux heures et demie. La liaison RER entre la ligne D et la ligne B, dite barreau de Gonesse, est un enjeu déterminant pour l'emploi dans ce secteur, qui mobilise depuis longtemps les élus de l'est du Val-d'Oise.

La réalisation de cette liaison, inscrite au contrat de plan 2000-2006, reprise pour 2007-2013 et citée comme un investissement majeur par le Président de la République dans le cadre du plan « Espoir banlieue » en février 2008, semble aujourd'hui menacée. Aucune étude de faisabilité n'a été lancée. En outre, le Stif envisage la création d'une ligne de bus à haut niveau de service, ce qui risque de reporter sine die la réalisation du barreau ferroviaire. Dans le même temps, des investissements ferroviaires sont programmés sur d'autres territoires, telle la liaison Creil-Roissy. Pourquoi ce traitement différentiel ? Pourquoi ne pas programmer au plus tôt la réalisation d'un équipement structurant qui répondrait aux critères du plan de relance : effet sur l'emploi, réaménagement du territoire, désenclavement des banlieues, impact socio-économique pour les habitants des quartiers en difficulté ?

Alors que les annonces du Gouvernement se multiplient et que les grands travaux d'infrastructure sont plus que jamais à l'ordre du jour, le silence autour de la réalisation du barreau de Gonesse suscite de légitimes inquiétudes. Les villes concernées et la majorité du conseil général souhaitent que les études sur ce projet débutent cette année, que le schéma de principe soit rapidement lancé et qu'un calendrier de réalisation soit arrêté. Élue de ce territoire depuis plus de trente ans, je sais à quel point la réalisation d'une liaison ferrée entre les RER D et B est un enjeu stratégique. J'entends parler de ce projet depuis vingt ans : ne sacrifions pas une nouvelle génération faute de mobilisation de l'État. Je ne doute pas du soutien de Mme la ministre dans ce dossier.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - La création de la liaison dite « barreau de Gonesse », qui améliorera l'accessibilité à la plate-forme de Roissy, est une priorité pour le Gouvernement. Afin de gagner trois ans par rapport au calendrier initial, l'État et la région Ile-de-France ont décidé d'y contribuer pour 50 millions d'euros au titre du plan « Espoir banlieues », en plus des 30 millions prévus par le contrat de projets. Cette desserte doit être mise en service en 2015. Dans cette attente, un transport en commun en site propre, de type bus à haut niveau de service, assurera rapidement la liaison.

Mme Raymonde Le Texier.  - Ce sont plutôt de bonnes nouvelles, mais 2015, c'est demain. Or rien n'a été fait pour la maîtrise des terrains et le lancement de la déclaration d'utilité publique.

Situation du planning familial

Mme Bernadette Bourzai.  - Madame la ministre, ma question s'adressait à M. Hortefeux, mais je vous remercie de me répondre.

La loi de finances pour 2009 prévoit une forte et brutale diminution du soutien financier de l'État aux structures oeuvrant pour le planning familial, avec pour conséquence inévitable la fermeture d'au moins un tiers des centres du Mouvement français pour le planning familial. Ce dernier a lancé une pétition qui a recueilli en quelques jours plus de 100 000 signatures. Face à cette mobilisation citoyenne, M. Hortefeux a annoncé une réévaluation des moyens alloués au planning familial. Pouvez-vous nous donner des détails sur ce point afin d'apaiser les craintes ?

M. Hortefeux a eu l'amabilité de m'adresser la semaine dernière une longue lettre à ce sujet, mais je ne suis pas totalement convaincue. Si le M. le ministre s'est engagé à « maintenir l'effort budgétaire permettant au planning familial d'assurer ses missions » sans « fermeture ni abandon des centres », pouvez-vous nous garantir que les effectifs en personnels ne diminueront pas ?

Pouvez-vous nous assurer que le montant des subventions de l'État n'affectera pas la disponibilité du planning familial, sur l'ensemble du territoire ?

Après leur rencontre avec vous-même, M. Hortefeux et Mme Létard, les responsables du Mouvement français pour le planning familial s'interrogeaient sur la transcription des orientations données aux DDASS et la traduction que celles-ci en feront dans le cadre des conventions avec les associations. Que pouvez-vous leur répondre ? Quelles directives seront données aux DDASS ?

Au-delà du maintien des actions existantes, ce qui serait le minimum du minimum, il convient de renforcer des moyens qui font depuis longtemps défaut. Je pense à mon département, la Corrèze. La seule structure, pour tout le Limousin, se trouve à Limoges. Asphyxiée, depuis plusieurs années, par le défaut d'aide financière de l'État, elle n'est maintenue en vie que grâce au conseil général de la Haute-Vienne. Un apport de l'État, alors que les collectivités sont de plus en plus sollicitées, permettrait d'assurer l'avenir, en un temps où les conséquences sociales de la crise économique ne manqueront de solliciter les structures du planning familial.

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.  - Le Mouvement français pour le planning familial joue un rôle fondamental dans l'information sur la contraception et l'IVG, la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes, la lutte active contre les violences faites aux femmes. Il doit disposer des moyens de son action. C'est pourquoi M. Hortefeux a rappelé, lors d'une question au Gouvernement posée à l'Assemblée nationale le 4 février, comme je l'ai fait ensuite le 11 février, qu'au contraire de ce que certains affirment, l'État maintiendra son effort financier en faveur des établissements assurant informations, consultations et conseil familial. Le 19 février, nous avons, M. Hortefeux, Mme Létard et moi-même, rencontré la présidente du mouvement pour lui confirmer qu'aucune fermeture d'établissement n'interviendra du fait de l'État et lui proposer un protocole garantissant le maintien, entre 2009 et 2011, des crédits destinés au conseil conjugal, à la lutte contre les violences faites aux femmes et à la prévention des risques sexuels. Nous attendons très prochainement sa réponse. Aux termes de cet accord, 3 461 800 euros de crédits seraient alloués chaque année pour soutenir l'action de l'association et de ses 250 établissements.

Deux ministères sont concernés. Le ministère du travail, qui lui consacre 2 580 000 euros, dont 2 150 000 destinés au conseil conjugal et 430 000 à la promotion de l'égalité et aux droits des femmes, à quoi s'ajoutent 500 000 euros de crédits au titre de la politique de la ville, tandis que le ministère de la santé consacre 381 800 euros à la prévention des risques sexuels et à la contraception.

La politique familiale, vous le voyez, est bien au coeur de l'action gouvernementale.

Mme Bernadette Bourzai.  - Je vous remercie de cette réponse claire. J'appartiens à une génération de femmes dont la jeunesse a été un peu compliquée par l'absence de loi sur la contraception et sais par conséquent le rôle irremplaçable que joue le planning familial. Nous serons très vigilantes pour garantir que les jeunes femmes bénéficient, dans leur vie sexuelle et familiale, des meilleurs conseils et du meilleur suivi, y compris dans le cadre de la lutte contre les violences.

Avenir des associations agissant dans les champs scolaire et périscolaire

M. Jean-Paul Amoudry.  - Je m'inquiète de l'avenir des associations oeuvrant dans les champs scolaire et périscolaire aux côtés des enseignants, des parents et des élus. Sont en effet annoncées des mesures de suppression de 25 % du financement des activités conventionnées au bénéfice de ces associations et la non-reconduction, dès la rentrée scolaire 2009, des emplois aidés d'enseignants détachés dans ces structures.

En Haute-Savoie, ces associations accompagnent près de 80 000 élèves, dans des champs aussi divers que le sport, l'éducation à l'image, les ateliers d'écriture ou l'aide à l'intégration scolaire, autant d'actions qui illustrent la richesse de leur activité

Une remise en cause des conventions pluriannuelles mettrait en péril des activités éducatives qui participent substantiellement à l'accomplissement du service public d'éducation de la jeunesse, auquel je sais votre attachement, madame la ministre, comme celui de M. Darcos. Quels moyens le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour assurer la pérennité de ces interventions ?

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.  - Les associations auxquelles vous faites référence sont des prestataires liés à l'État, en particulier au ministère de l'éducation nationale, par un partenariat très ancien. M. Darcos l'a récemment confirmé en invitant les prestataires du monde associatif à s'engager de manière pleine et entière en faveur de la politique éducative du Gouvernement, dont l'objectif est la réussite de tous les élèves. Il s'est engagé à augmenter de 50 % les crédits d'intervention en direction des acteurs du monde associatif, qui passeront de 75 millions en 2008 à 114 millions en 2009.

Les représentants des principales associations éducatives, reçus à de nombreuses reprises au ministère de l'éducation nationale, ont été invités à inscrire résolument les activités de leurs structures dans le domaine de la lutte contre l'échec scolaire et de l'aide aux élèves les plus en difficulté.

S'agissant du partenariat poursuivi avec les huit associations éducatives complémentaires de l'enseignement public, un avenant aux conventions pluriannuelles sur objectifs sera signé prochainement pour les années 2009 et 2010. Il s'agit de répondre à une exigence de transparence des crédits de l'État en se conformant à une logique nouvelle de financement du ministère.

Pour garantir la mise en oeuvre opérationnelle des actions projetées et pour assurer une meilleure collaboration des services déconcentrés du ministère, des conventions seront conclues dans chaque académie entre les rectorats et les associations. Une subvention correspondant à 50 % des montants prévisionnels de financement des projets sera versée au premier semestre 2009, le second versement devant intervenir au cours du second semestre au vu des bilans des actions certifiés par les recteurs.

Le nouveau cadre législatif et réglementaire interdisant désormais aux associations de bénéficier de l'exonération du remboursement des salaires afférents, les personnels mis à disposition de ces structures verront leur statut évoluer vers celui du détachement à compter de la prochaine rentrée scolaire.

Les associations désireuses de s'investir dans ce domaine prioritaire de la réduction de l'échec scolaire et le soutien aux élèves en difficulté trouveront toujours le soutien de l'État pour développer leurs projets.

M. Jean-Paul Amoudry.  - Je vous remercie de ces précisions tant sur les orientations du Gouvernement que sur leur mise en oeuvre. Je suis activement engagé, dans mon département, en faveur du soutien sportif et culturel, qui apporte les meilleurs résultats. Les collectivités méritent d'être accompagnées dans leur effort de soutien aux associations.

La séance est suspendue à midi trente.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 15 heures.