Service public de l'emploi (Urgence - Suite)

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Je tiens à saluer le travail remarquable accompli en un temps très court par Mme le rapporteur ainsi que tous les autres sénateurs. Lorsque ce projet a été évoqué le 12 décembre, je ne doutais pas que vous ne réussissiez, mais je suis épatée par les résultats ! (Applaudissements à droite)

Je dois aussi témoigner ma reconnaissance à M. Larcher : ce projet prolonge l'action qu'il a conduite ces trois dernières années. Il m'a aussi encouragée à travailler sur le sujet dans un esprit de concertation.

Pour ce qui est de l'impact de la fusion en termes de coût, je fournirai lors de la discussion des articles des éléments précis, mais j'indique d'emblée qu'il n'est pas question de chercher la réduction des coûts et des effectifs, mais bien d'améliorer l'efficacité du service public de l'emploi. Les statuts collectifs des personnels de l'Unedic et de l'ANPE sont différents et présentent des avantages divers. La nouvelle convention collective qui régira le personnel au terme de la période d'option, ainsi que le personnel engagé après la fusion, entraînera des coûts dont le chiffrage -et je rends aussi hommage sur ce point au travail de Mme le rapporteur- varie, à cause d'un grand nombre de paramètres, entre 350 et 500 millions d'euros. L'ajustement se fera par le haut en prenant le meilleur des deux statuts.

Sur le maillage du réseau, Mme David a souhaité savoir combien de sites disparaîtraient. Si certains des mille six cents sites actuels seront supprimés pour éviter les doublons, l'objectif est de fournir le meilleur service de l'emploi possible. La logique n'est donc pas de réduire à tout prix le nombre de sites et je n'ai aucun plan dissimulé dans un tiroir à Bercy ! (Sourires)

M. Guy Fischer.  - Est-ce bien vrai ?

Mme Christine Lagarde, ministre.  - En zone urbaine comme en zone rurale, nous serons conduits par le souci d'élaborer un bon réseau. M. Larcher parlait d'un « maillage moléculaire suivi d'une fusion » ; j'évoquerai pour ma part une fusion des particules de la mosaïque. (Sourires)

La « stigmatisation » et la « culpabilisation » ont été évoquées à propos de ce projet, mais il ne s'agit pas de cela : nous voulons créer un service prenant par la main les usagers et les conduisant à l'emploi, dans une logique de contrat et de partenariat. Certes, ceux qui n'accepteront pas cette démarche devront en assumer les conséquences.

Un changement de nom de la nouvelle institution, correspondant à un nouveau cadre juridique, au développement d'une nouvelle culture, d'une nouvelle offre et à l'élaboration d'une nouvelle identité -d'une sorte d'humus culturel commun- ne serait pas une mauvaise chose. La nature juridique du nouvel établissement ne fait aucun doute : il s'agira d'un établissement public assurant le service public de l'emploi.

Les tensions observées entre les personnels de l'ANPE et des Assedic sont inhérentes à toute fusion. Votre rôle -et le nôtre- est de pallier les difficultés, de calmer les angoisses en se concentrant sur les usagers et sur l'objectif poursuivi : parvenir à un meilleur service public de l'emploi. (Applaudissements à droite)

Question préalable

M. le président.  - Motion n°65, présentée par M. Fischer et les membres du groupe CRC.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif à la réforme du service public de l'emploi (N° 141, 2007-2008).

M. Guy Fischer.  - A n'en pas douter, ce nouveau projet fera le bonheur du Medef, des libéraux et de ceux qui, dans vos rangs, attendent depuis des années la fin du dernier monopole d'État, celui de l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Il constitue une nouvelle pierre apportée à l'édifice législatif par lequel vous démantelez le service public de l'emploi. Certes, il ne le parachève pas, mais je mesure le chemin parcouru pour offrir en totalité au privé ce service. La dernière étape -le désengagement total de l'État- ne saurait tarder. Ce texte est un stratagème qui joue la montre pour habituer les agents du défunt service public de l'emploi et les chômeurs à la mainmise du privé- à la grande satisfaction de Mme Parisot !

Au cours des dernières années, votre majorité a engagé une privatisation rampante du placement des chômeurs pour parvenir à la structure unique, et bientôt totalement privée, que vous nous présentez aujourd'hui, chargée de l'accueil, de l'inscription, du placement et du contrôle des chômeurs.

Et demain, ce sera, comme vous l'avez fait en matière de santé, comme vous voulez le faire en matière de dépendance, la privatisation totale du placement et de l'indemnisation. Ce sera aux sociétés privées d'organiser le placement des demandeurs d'emplois, en prenant bien soin de respecter les attentes du patronat et, aux chômeurs, de payer leur indemnité s'ils ont pu, dans les années d'emploi, cotiser à des assurances privées, destinées à financer la perte éventuelle d'emploi. J'en veux pour preuve le transfert de cotisations à l'Urssaf.

Pourquoi, alors, devrions-nous débattre d'un projet de loi qui n'est qu'une manoeuvre visant à dissimuler un projet plus grave encore et à faire croire aux Français qu'il n'y a pas d'autre choix possible qu'une anti-réforme de plus ?

Souvenez-vous de la loi appelée, non sans ironie, la loi « de cohésion sociale ». Déjà, ce texte entamait le monopole du service public de l'emploi en précisant que les associations, les sociétés d'intérim et les entreprises privées de placement de type Maatwerk -d'ailleurs fermée depuis- contribuaient au service public de l'emploi. Vous avez fait entrer le loup dans la bergerie. Dans les départements où la droite était au pouvoir, vous avez fait le choix idéologique d'expérimenter et de recourir régulièrement à ces sociétés de placement. Je ne prendrai qu'un exemple, celui des Hauts-de-Seine, dont le président de l'exécutif, qui ne cachait pas ses ambitions élyséennes, voulait faire son laboratoire d'essai. En guise d'essai, le recours aux sociétés privées de placements est plutôt synonyme d'échecs ! Pour l'année 2007, la majorité UMP-UDF du conseil général des Hauts-de-Seine a donné 6 800 000 euros à une société de placement, Ingeus. Avec quels résultats ? En 2001, pour la dernière séance de formation et de placement, composée de vingt jeunes cadres demandeurs d'emplois, quatre seulement ont eu un CDI et trois un CDD. Les treize autres, rien. Les contribuables des Hauts-de-Seine auront donc déboursé 38 460 euros pour un résultat bien mitigé. Voilà votre choix idéologique, dogmatique : privilégier le privé, même inefficace, contre le service public de l'emploi.

Vous qui parlez souvent de mesures de « bon sens », de mesures « utiles », vous ne pouvez le faire aujourd'hui car, ne vous en déplaise, ce n'est pas le recours à des sociétés de placements qui résoudra le problème du chômage, ni même votre fusion de l'ANPE et des Assedic. Ce qui diminuera le nombre de demandeurs d'emplois, c'est une toute autre politique de l'emploi, qui reviendrait sur le Pare, sur la privatisation de l'ANPE, sur les trappes à bas salaires, sur les contrats précaires. Mais une telle loi, vous n'en voulez pas. Car ce serait revenir sur les exonérations de cotisations sociales octroyées au patronat, en finir avec les contrats précaires et avec vos politiques libérales qui n'ont eu d'autre effet que de culpabiliser les sans-emploi, d'en exclure un certain nombre des mécanismes de solidarité, de faire peser un climat d'angoisse sur les salariés qui ne doivent avoir d'autre choix que de plier sous peine d'être licenciés. S'il en est pour se réjouir, soyez sûrs que vous les trouverez du côté du patronat. Vous êtes en train de faire naître un volant de travailleurs pauvres, comme il en existe dans les pays anglo-saxons.

Votre fusion aggravera cela, elle permettra au Medef, déjà très présent dans la gestion de l'Unedic, de participer à la gestion de la future institution que vous voulez créer, et ainsi de gérer aussi le placement. Avec la participation de deux ou de trois de vos ministres -on a même parlé du ministre de l'immigration- et le Medef, la présence des partenaires sociaux sera amoindrie. Cela aura de lourdes conséquences sur les politiques de l'emploi. Je ne doute pas que demain, une fois votre projet adopté, les patrons feront connaître leurs exigences sur le placement, en usant de la notion d'offre valable d'emploi. De ce côté là encore, votre Gouvernement les satisfait déjà, quand il précise qu'un salarié ne pourra, sans risque de sanction, refuser plus de deux propositions.

Votre fusion aura-t-elle des effets sur le chômage ? À n'en pas douter, puisque vous allez radier les demandeurs d'emplois et les contraindre à accepter n'importe quel travail ! Les récentes déclarations du Président de la République ne manquent pas de sel, quand il annonce vouloir sanctionner les demandeurs d'emplois qui refuseraient deux offres valables. Une négociation doit bientôt s'ouvrir pour que les partenaires sociaux définissent cette offre valable d'emploi. Une définition existe déjà, dans une convention de l'OIT. En ferez-vous un point d'ancrage à la négociation ? Qu'adviendrait-il si les partenaires sociaux ne s'entendaient pas sur une définition ? Le Gouvernement interviendrait et, comme toujours avec votre majorité, dans le sens souhaité par le Medef. Il aurait été plus logique d'attendre la fin des négociations sur ce sujet pour dessiner la structure nouvelle capable de répondre à une exigence définie sur de nouveaux critères. Car cela aura des incidences sur les missions de conseil, d'orientation et d'information en matière de formation, sur le travail des agents et leurs missions principales, placement ou radiation. Mais, de cela, vous n'avez cure. À preuve la déclaration urgence. Seul compte à vos yeux l'affichage : ce texte n'est qu'un trompe-l'oeil.

Parviendrez-vous à garantir le plein emploi ? J'en doute, car d'une certaine manière, le chômage vous est utile. Un chômage résiduel permet aux employeurs de faire pression sur les salariés, ce qui va s'accentuer avec la fin de la durée légale du travail -mais il semble que le Président de la République soit revenu sur ce projet. En renvoyant la durée du travail aux négociations par branches ou, comme le voudrait le patronat, à la négociation individuelle, il ne fait pas de doute que l'employeur choisira le salarié faussement volontaire pour travailler plus.

Deux économistes, Franco Modigliani et Lucas Papademos, ont démontré que les mesures conjoncturelles étaient inefficaces pour combattre ce que l'on appelle le « chômage naturel » depuis les années soixante-dix et les travaux du chef de l'école de pensée néolibérale, Milton Friedman. Celui-ci explique que le chômage traduit un mauvais fonctionnement du marché du travail, si bien qu'il y aurait pour chaque pays un niveau de chômage normal, habituel, « naturel », qui reflète la qualité du marché du travail. L'utilité véritable de ce concept est ailleurs, dans la relation entre taux de chômage et inflation. Ces économistes démontrent en effet, non sans malice, que plus le taux de chômage est faible, plus l'inflation est importante. Il faut donc, puisque vous refusez une réforme non libérale de notre économie, arbitrer entre chômage et inflation. Vous, libéraux, avez fait le choix d'un chômage compris entre 5 et 9 % pour limiter une inflation que vos politiques comptables ne sauraient compenser. Demandez aux retraités si la généreuse revalorisation de leurs pensions suffira à compenser la hausse des prix !

Sans illusion sur le sort que vous réserverez à cette question préalable, je vous demande toutefois de l'adopter pour éviter une fusion inutile et dangereuse. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Je ne partage pas l'analyse de M. Fischer ; je ne crois nullement que l'État se désengagerait. M. Fischer parle beaucoup d'idéologie, nous n'avons d'autre ambition que l'efficacité au service des demandeurs d'emploi. Seule compte l'efficacité, qu'elle vienne du public ou du privé. Ce projet de loi ne fait courir aucun risque aux chômeurs.

Notre souci est de rapprocher l'offre et la demande d'emplois, nous voulons que les plus faibles, ceux qui sont au chômage depuis longtemps, soient en situation plus favorable pour retrouver un travail. La position de la commission, elle, n'est pas idéologique : défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Défavorable, bien sûr. C'est bien ce gouvernement qui a encouragé les partenaires sociaux à examiner les trappes à bas salaires  et qui a envisagé la conditionnalité des allègements de charges, afin d'inciter les entreprises à négocier annuellement sur les salaires. Vous nous faites un mauvais procès en affirmant que nous voulons maintenir un chômage « utile » ; et comment imaginer que nous ne nous intéressons pas aux travailleurs pauvres ?

La motion n°65 n'est pas adoptée.

Renvoi en commission

M. le président.  - Motion n°67, présentée par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales le projet de loi relatif à la réforme du service public de l'emploi (n° 141, 2007-2008) (Urgence déclarée).

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Ce texte devait être examiné en premier lieu par l'Assemblée nationale fin 2007. Nous avons appris juste avant les vacances parlementaires le transfert au Sénat, non sans précipitation. Les auditions ont dû être conduites durant les congés de Noël. Elles étaient ouvertes à tous les membres de la commission, j'en remercie Mme le rapporteur. Mais en cette période où chacun a ses contraintes, notre participation a été compliquée à organiser. De même, c'est seulement hier matin que nous avons examiné les propositions de Mme le rapporteur en commission. Le rapport intégral n'est disponible que depuis ce matin ; et nos amendements ont été examinés à 20 h 30, après les voeux présidentiels... Ce ne sont pas là les conditions d'un examen attentif ni d'un débat approfondi. La commission Balladur propose de discuter désormais en séance publique sur les textes tels qu'amendés par les rapporteurs. Si cette proposition de réforme était retenue, les pratiques actuelles devraient impérativement changer !

Le renvoi en commission est d'autant plus justifié qu'il y aura une seule lecture dans chaque assemblée, comme pour la plupart des textes inscrits en janvier. Le projet de loir sur les OGM était urgent : il a été encore plus urgemment retiré du circuit ! Le pouvoir d'achat pourrait certes justifier une procédure d'urgence, tant se dégradent rapidement les conditions de vie de nos concitoyens. Malheureusement, ce ne sont pas les mesures que vous préconisez qui apporteront une solution efficace ; du reste nous avons entendu l'aveu d'incapacité du Président de la République lors de sa conférence de presse d'hier matin : « Qu'attendez-vous de moi ? », demandait-il. Il a confirmé l'annonce de son Premier ministre : « Les caisses sont déjà vides ». Mais votre majorité est aux responsabilités depuis six ans ! Le Président se refuse à donner des ordres aux entreprises : pourtant il ne se prive pas de dispenser aux salariés ses conseils péremptoires... « Vous croyez que le seul boulot d'un président, c'est d'augmenter le Smic ? » s'interrogeait encore M. Sarkozy. C'est tout de même la responsabilité du Gouvernement qu'il dirige de fait !

Le recours généralisé à l'urgence n'est pas respectueux de nos assemblées ; et encore moins des citoyens. M. Raffarin l'a dit lui-même : « On ne réforme pas en klaxonnant ». Aujourd'hui, c'est toutes sirènes hurlantes que vous prétendez avancer, l'effet d'annonce tenant lieu de raisonnement. Le volontarisme ne suffit pas et la précipitation est souvent mauvaise conseillère. Tirez donc les leçons des mois passés : à fabriquer des lois dans la hâte, on est parfois obligé de les détricoter aussi vite. Depuis le vote de la loi Borloo, défendue avec fougue par Gérard Larcher, de nombreuses modifications sont déjà intervenues, contrôle accru des chômeurs, aggravation des sanctions, intervention d'agences de placement privées, création des maisons de l'emploi. Et de nombreux rapprochements ont eu lieu entre l'ANPE et les Assedic ; le guichet unique se met en place -il y en a deux cent vingts- et l'inscription peut y être réalisée par un conseiller ANPE ou Assedic. Les deux institutions ont créé un GIE pour intégrer les services informatiques. Sans qu'il soit besoin de fusion juridique, le rapprochement opérationnel est déjà une réalité. Il n'y a aucune urgence à voter ce projet avant la fin janvier et la nouvelle institution n'a pas à être en place impérativement au 1er mars.

En revanche, il y a nécessité d'approfondir le contenu du texte. Nous demandons le renvoi en commission de ce projet de loi largement inabouti. L'unique consultation du comité supérieur de l'emploi n'a pas permis d'évacuer toutes les questions techniques induites par cette fusion. Les organisations syndicales unanimes se plaignent du calendrier « abominable » qui leur a été imposé ; elles ont néanmoins joué le jeu de la concertation mais les inquiétudes, loin de s'apaiser, se sont aggravées. Cette fusion n'apporte pas autant de simplifications que vous le dites, madame la ministre. C'est bien pourquoi l'Igas a été chargée de dresser la liste des « questions techniques » qui se posent. Ses conclusions sont attendues pour la fin du mois de janvier : après le vote de la loi par le Parlement !

Un sujet comme celui-ci se prête bien à une étude d'impact, mais le Gouvernement ne s'embarrasse pas de telles procédures. Or il s'agit tout de même de modifier des institutions qui emploient plus de 40 000 salariés et reçoivent chaque année plusieurs millions de demandeurs d'emploi. Leur situation sera-t-elle améliorée ? En quoi ce texte transforme-t-il la politique sociale ? Quelle est la plus-value du nouveau système par rapport à l'actuel ? Nous l'ignorons. Quant aux questions de personnel, comment nous contenter de vos déclarations imprécises ? « On prendra le meilleur des deux statuts », annoncez-vous. Mais les particularités de chacun ne peuvent pas être mixées si simplement ! Salaires et autres éléments de rémunération, protection sociale, retraites, oeuvres sociales ou encore règles de représentation du personnel : autant de sujets à étudier de près, ne serait-ce que pour apaiser les inquiétudes des agents, qui ont encore manifesté hier devant le Sénat.

Une mission d'évaluation a été confiée au député M. Anciaux, qui devrait rendre son rapport en avril. Ses conclusions nous seraient utiles, tant vos propos sur l'avenir des maisons de l'emploi nourrissent nos inquiétudes. Un an et demi après leur lancement, elles ne sont plus une priorité -vous vous êtes prononcée pour leur gel. A Cherbourg, nous avons depuis une dizaine d'années une maison de l'emploi et de la formation, très efficace ! Les collectivités territoriales sont éliminées de l'économie globale du projet de loi alors que leur rôle va croissant en matière d'emploi, d'insertion, de formation professionnelle et de développement économique. Pourquoi cette mise à l'écart ?

Ni les objectifs ni l'organisation de l'opérateur unique ne sont encore tout à fait définis. Votre précipitation à faire adopter ce texte est telle que vous êtes contrainte de prévoir une instance provisoire chargée de préparer la suite... Le nom de la future institution n'est toujours pas connu, mais celui de son futur directeur circule déjà... Ne serait-ce pas plutôt au conseil d'administration de désigner son directeur général ? Plus largement, il eût été préférable de fixer le contenu avant la structure. Or ce texte ne contient rien sur le type d'accueil à prévoir pour chaque catégorie de demandeurs. Un référent pour trente chômeurs très éloignés de l'emploi, fort bien : mais il faudra alors créer des milliers de postes, ce qui n'est certainement pas dans vos intentions. Rien non plus sur la formation : l'Afpa est la grande oubliée ! Rien sur l'organisation dans les territoires : la déclinaison régionale est bien floue. Or ce sont là des paramètres importants pour la réussite de cette réforme.

Auront également un impact sur la politique du futur organisme les négociations entre l'État et les partenaires sociaux relatives au contrat de travail, à la sécurisation des parcours professionnels, à l'indemnisation du chômage, à la réforme de la formation professionnelle continue, ou encore le « Grenelle de l'insertion ».

Ce texte n'est qu'une opération de communication qui permettra à l'exécutif de déclarer qu'il a effectué la réforme du service public de l'emploi. Or, une réforme institutionnelle ne permettra pas de faire baisser le chômage et ne remplacera pas une politique économique capable d'engendrer la croissance et des créations d'emplois. Dans un contexte plus que morose, votre politique a montré ses limites. Les sondages, qui reflètent les désillusions de nos concitoyens, devraient vous inciter à changer de cap, ce que n'annoncent pas les déclarations faites hier par le Président de la République.

Nous craignons que cette fusion ne vise qu'à réaliser de nouvelles économies sur le dos des agents et des demandeurs d'emploi, et cette crainte est renforcée par l'annonce par le Président de la République de sanctions en cas de refus de deux offres acceptables. Pourriez-vous définir la différence entre une offre valable, concept connu depuis 1934, et une offre acceptable ?

Nous vous demandons de voter ce renvoi en commission afin d'approfondir notre travail et d'explorer toutes les dimensions de la réforme. (Applaudissements à gauche)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Si nous avons travaillé dans des délais très courts, et durant une semaine que nous aurions dû passer en famille, ce n'est pas une raison pour nous réunir à nouveau en commission -même si l'ambiance est excellente à la commission des affaires sociales. (Sourires)

Certes, ce texte devait initialement être examiné par l'Assemblée nationale en première lecture, et nous pensions avoir plus de temps pour y travailler. Cela n'a pas empêché la commission d'effectuer seize auditions, d'entendre les responsables de l'Unedic et de l'ANPE, et même de recevoir hier une délégation de manifestants. Nous devrions plutôt nous réjouir d'avoir examiné en priorité un texte aussi important, comme nous l'avons fait pour la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports.

Je suis donc défavorable à cette motion.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Je reprends à mon compte une partie des arguments du rapporteur. Le travail a été accompli dans des conditions remarquables et toutes les parties concernées ont été auditionnées.

Pour ce qui est du rythme, il y a effectivement urgence car les chômeurs ne peuvent attendre. Le processus de concertation et de réflexion a été engagé dès juillet avec les instances représentatives, syndicales et patronales. Il fallait lui donner un sens, et apaiser les appréhensions et les inquiétudes des employés de l'ANPE et de l'Assedic, où l'on parle depuis longtemps de la réforme. Celle-ci fait suite à un travail de grande qualité effectué par l'Igas. L'instance de préfiguration ne pourra agir qu'une fois la loi votée. Il faut mettre en place de nouvelles représentations du personnel et négocier la future convention collective. Cela ne peut se faire qu'en aval de la loi, pas en amont.

Le Gouvernement est donc défavorable à la motion de renvoi en commission.

La motion n°67 n'est pas adoptée.

Discussion des articles

Article 1er

La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail est ainsi modifiée :

1° L'article L. 311-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « l'Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » et les mots : « les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 351-21 dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres » sont remplacés par les mots : « l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 351-21 dans le cadre des dispositions légales qui lui sont propres » ;

b) Les huit derniers alinéas sont supprimés ;

2° Après l'article L. 311-1, sont insérés deux articles L. 311-1-1 et L. 311-1-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 311-1-1. - Le Conseil national de l'emploi est présidé par le ministre chargé de l'emploi et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, des collectivités territoriales, des administrations intéressées, des principaux opérateurs du service public de l'emploi, notamment l'institution mentionnée à l'article L. 311-7, l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 351-21 et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, et des personnalités qualifiées.

« Le Conseil national de l'emploi concourt à la définition des orientations stratégiques des politiques de l'emploi. Il veille à la mise en cohérence des actions des différentes institutions et organismes mentionnés à l'article L. 311-1 et à l'évaluation des actions engagées.

« À cette fin, il émet un avis :

« 1° Sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs à l'emploi ;

« 2° Sur le projet de convention pluriannuelle d'objectifs et de gestion définie à l'article L. 311-1-2 ;

« 3° Sur l'agrément de l'accord d'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-8, dans des conditions fixées par décret ;

« 4° Sur l'adaptation et la cohérence des systèmes d'information du service public de l'emploi.

« Art. L. 311-1-2 - Une convention pluriannuelle conclue entre l'État, l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 351-21 et l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 définit les objectifs assignés à celle-ci au regard de la situation de l'emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage et l'État.

« Elle précise notamment :

« 1° Les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 ;

« 2° Les objectifs d'amélioration des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises ;

« 3° L'évolution de l'organisation territoriale de l'institution ;

« 4° Les conditions de recours aux organismes privés exerçant une activité de placement mentionnés à l'article L. 311-1 ;

« 5° Les conditions dans lesquelles les actions de l'institution sont évaluées, à partir d'indicateurs de performance qu'elle définit.

« Un comité de suivi veille à l'application de la convention et en évalue la mise en oeuvre.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article et de l'article L. 311-1-1. »

M. le président. - Amendement n°37, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Annie David.  - C'est avec un certain cynisme que vous avez intitulé ce texte : « Réforme du service public de l'emploi ». Je n'y trouve rien qui réforme le service public de l'emploi, rien qui puisse contribuer à la création d'emplois stables et justement rémunérés permettant à un demandeur d'emploi de trouver un poste équivalent à celui perdu. J'y trouve plutôt des éléments pour limiter le service public de l'emploi et le privatiser.

Il aurait été plus délicat, mais plus juste, d'intituler ce texte « Privatisation du service public de l'emploi » car il s'inscrit dans la continuité des politiques de casse des services publics. Avec la fusion de l'ANPE et des Assedic, pour la première fois, ce sera la même institution qui sera chargée de l'indemnisation et du placement des demandeurs d'emplois, qui les contrôlera et les sanctionnera. Il y aura fusion entre le prescripteur, le payeur et le contrôleur. Le même agent devra assumer des charges qu'il faudrait répartir afin que celui-ci ne soit pas juge et partie. Telle était la volonté des législateurs passés, bien mieux inspirés.

Ce n'est pas une réforme, mais une régression. Ce n'est pas non plus une rupture avec les politiques précédentes, la fusion ANPE-Assedic étant bien avancée sous le Gouvernement de M. de Villepin. Selon vous, elle simplifiera les démarches des demandeurs d'emplois. Nous ne sommes pas opposés à des rapprochements opérationnels entre l'ANPE et les Assedic élaborés en amont et avec les partenaires sociaux, mais tel n'est pas le cas. L'un des objectifs de ce projet est de réaliser des économies sur le dos des demandeurs d'emplois. Si vous souhaitiez réellement faciliter leurs démarches, vous auriez dû plutôt permettre la multiplication des lieux où les deux entités pourraient siéger, dans le respect de leurs missions et en toute indépendance. Vous auriez mis fin à la procédure actuelle, aux radiations excessives et au double contrôle des Assedic et de la DDE. Et vous auriez donné comme mission aux agents de cette nouvelle institution d'assumer un réel accompagnement du salarié privé d'emploi, conformément à la mission initiale de l'agence créée en 1967.

Les objectifs annoncés ne sont pas ceux qui sont recherchés, d'où cette demande de suppression de l'article premier.

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le troisième alinéa (a du 1°) de cet article, remplacer les mots :

institution mentionnée

par les mots :

établissement public national doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière mentionné

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Notre amendement propose de donner une qualification précise à ce qui va naître de la fusion ANPE-Assedic et que le projet de loi appelle « institution ». Nous pensions que ce mot était réservé aux institutions de la République, décrites dans la Constitution. Il semble promis à une nouvelle fortune puisqu'il désignerait une « chose » issue de la fusion d'une association et d'un établissement public. Le choix de ce mot n'est pas anodin : iI évite de définir la nature exacte de cette institution.

Juridiquement, c'est le mariage de la carpe et du lapin. Pourquoi ne pas qualifier cet organisme d'établissement public, chargé d'une mission de service public ? Cette ambiguïté, que l'on retrouve tout au long de ce projet de loi, ne laisse pas d'être inquiétante, d'autant plus que rien n'indique que cette institution aura un rôle primordial dans la politique de l'emploi. Elle ne sera qu'une institution, ce qui sous-entend qu'il y en aura d'autres -entreprises privées de placement et d'intérim. Comment cette structure va-t-elle évoluer face aux opérateurs privés auxquels elle aura recours ? Comment vont être traités les demandeurs d'emploi ? Cette institution ne risque-t-elle pas de se voir confier les publics les plus éloignés de l'emploi alors que d'autres organismes géreront les autres ?

S'agissant du contrôle, nous avons vu récemment comment le Gouvernement envisage de régler celui des arrêts maladie des salariés : la dernière loi de financement de la sécurité sociale a prévu que des médecins mandatés et payés par l'employeur pourront adresser leurs conclusions au médecin contrôleur de la sécurité sociale, qui devra s'y conformer sans autre formalité. Déjà, les officines privées de placement avec lesquelles l'ANPE a contracté conseillent aux personnes en difficulté d'accepter l'emploi proposé sous peine de suspension de l'allocation. Il suffira d'inscrire dans un prochain texte que la décision de suspension ne fait pas l'objet d'une contre-expertise mais est prise sur proposition de l'agent de contrôle, quel que soit le statut de son organisme, et le secteur privé aurait la haute main sur l'ensemble de la protection sociale.

Nous souhaitons donc que soit créé un établissement public national qui gère l'ensemble des actes de placement, d'indemnisation et de contrôle, dans le cadre du service public de l'emploi.

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 311-1-1 dans le code du travail :

« Le Conseil national de l'emploi est présidé par le ministre chargé de l'emploi et comprend des représentants des organisations syndicales de salariés, des organisations professionnelles d'employeurs, des représentants du ministère du travail, des collectivités territoriales, des administrations intéressées, des représentants des institutions mentionnées à l'article L. 311-7, l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 351-21, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes et des représentants des missions locales, et, -titre consultatif, des représentants des organisations de demandeurs d'emplois

Mme Annie David.  - Cette fausse réorganisation, qui représente une véritable casse du service public de l'emploi substitue au Conseil supérieur de l'emploi un Conseil national de l'emploi (CNE), qui reçoit déjà des partenaires sociaux le même accueil qu'un autre CNE. Souvenez-vous !

Cette instance devrait définir les orientations stratégiques des politiques de l'emploi, mettre en cohérence l'action des diverses institutions et -c'est à la mode- évaluer les actions engagées. Or, ces orientations stratégiques relèvent du Gouvernement, plus particulièrement du ministère de M. Xavier Bertrand, en principe chargé du travail. Il est vrai que cette mission est toute théorique, puisque c'est le Medef qui inspire votre politique de l'emploi. Pourquoi d'ailleurs avez-vous déclaré l'urgence, puisque la proposition de loi était largement développée dans un livre de Mme Parisot intitulé Besoin d'air ? Ce parfait manifeste de l'économie libérale comporte presque toutes les mesures actuellement défendues par le Gouvernement...

Bien qu'opposés au CNE, nous voulons au moins éviter d'y faire participer ceux que vous appelez « les principaux opérateurs », c'est-à-dire les sociétés privées de placement et d'intérim, friandes de dérégulation et de casse des droits collectifs. Nous proposons également d'intégrer des représentants des demandeurs d'emploi, afin qu'ils puissent faire connaître la réalité de leurs difficultés.

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Jégou et les membres du groupe UC-UDF.

Au premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-1-1 du code du travail, supprimer les mots :

et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

Mme Muguette Dini.  - Nous voulons faire sortir l'Afpa du service public de l'emploi en tant que simple prestataire de services.

M. le président.  - Amendement n°88 rectifié, présenté par MM. Carle, Gournac et Humbert, Mme Debré, M. Mortemousque, Mmes Dumas et Hermange et M. Girod.

I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 311-1-1 du code du travail, remplacer les mots :

et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

par les mots :

, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes et les organismes mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 311-1

II. - En conséquence, procéder à la même modification dans le texte proposé par le 16° de l'article 11 pour l'article L. 5112-1 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail, en remplaçant la référence à l'article L. 311-1 par une référence à l'article L. 5311-4.

M. Jean-Claude Carle.  - Il faut améliorer la représentativité du CNE, cet organisme très important qui réunira tous les partenaires de l'emploi, notamment ceux de la formation professionnelle. Le Président de la République a souligné l'importance de cette formation, dont l'Afpa n'a cependant pas le monopole : n'oublions pas le « troisième cercle ».

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission.

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 311-1-1 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans chaque région, un conseil régional de l'emploi est présidé par le préfet de région et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, des collectivités territoriales, des administrations intéressées, des représentants d'organisations participant au service public local de l'emploi, notamment des maisons de l'emploi, ainsi que le représentant de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7. Il est consulté sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi en région et émet un avis sur la convention prévue à l'article L. 311-7-9.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Le Sénat représente les collectivités territoriales. La commission propose donc de créer des conseils régionaux de l'emploi, dont la composition serait analogue à celle du CNE, mais avec des représentants locaux, notamment des maisons de l'emploi.

Ces organismes seraient consultés sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi.

M. le président. - Amendement n°39, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Remplacer le premier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 311-1-2 du code du travail par deux alinéas ainsi rédigés :

« Une loi de programmation pluriannuelle définit les axes de développement du service public de l'emploi.

« Une convention pluriannuelle conclue entre l'État et l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 définit les objectifs assignés à celle-ci au regard de la situation de l'emploi et des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l'État.

M. Guy Fischer. - Une loi pluriannuelle de programmation devrait définir les axes de développement et le financement par l'État du service public de l'emploi.

Comme je l'ai dit en présentant la question préalable, seule une politique ambitieuse d'emploi et de formation pourra diminuer considérablement le chômage en procurant du travail aux demandeurs âgés, aux jeunes et aux chômeurs de longue durée.

Pour que la nouvelle institution trouve une place dans cette politique ambitieuse, il importe qu'une loi de programmation pluriannuelle complète la convention pluriannuelle fixant ses missions et objectifs.

Gouverner c'est prévoir, dit-on. Les conséquences économiques des politiques de dérégulation sont connues et les outils statistiques permettent de connaître avec exactitude les besoins existants ou à venir.

Certes, une loi de programmation pluriannuelle n'est pas figée dans le marbre, mais la négociation avec les partenaires sociaux qui doit fixer les missions assignées au service public de l'emploi doit être prolongée par l'attribution des moyens correspondants. En définitive, il faut sortir de ce que le Gouvernement appelle fièrement « la culture d'entreprise » et cesser d'imposer des objectifs quantifiés irréalisables, car pour les sénateurs communistes tout comme pour les agents qui manifestaient hier devant le Sénat, les demandeurs d'emploi ne sont pas des marchandises et l'ANPE n'est pas une société de placement : c'est un service public de l'emploi.

Il paraît que lorsque M. Charpy -actuel président de l'ANPE et candidat à la direction de la nouvelle agence- vante la culture d'entreprise, il pense à maximiser le service rendu. Je préfère évoquer la qualité du service, qui reste effectivement perfectible malgré la formidable mobilisation des agents de l'ANPE. Cela suppose de revenir sur le plan d'aide au retour à l'emploi (Pare) et sur la loi de cohésion sociale qui transforme les conseillers de l'ANPE en simples agents de conseil et de contrôle, car faire d'un même individu le conseiller, l'agent de placement et la personne devant contrôler et sanctionner, revient à introduire l'arbitraire dans le système tout en faisant peser sur les agents une pression incessante.

M. le président. - Amendement n°69, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 311-1-2 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Une annexe à la convention signée par l'association pour la formation professionnelle des adultes détermine les conditions dans lesquelles celle-ci participe aux objectifs de l'établissement public ainsi que les modalités d'évaluation de cette participation.

Mme Christiane Demontès. - Il faut maintenir la participation explicite de l'Afpa aux objectifs et interventions de la nouvelle institution. J'observe que Mme Procaccia écrit dans son rapport : « Il aurait été souhaitable d'associer l'Afpa à la fusion ». La voici donc exaucée ! Mais nos collègues Jean-Claude Carle et Bernard Seillier ont également proposé, dans leur rapport, d'intégrer les services d'orientation de l'Afpa dans la fusion ANPE-Unedic.

En effet, le bon sens veut qu'une institution censée rassembler la gestion de l'emploi ne laisse pas de côté la formation.

Au demeurant, l'article 2 du projet de loi dispose que la convention pluriannuelle précisera « les objectifs d'amélioration des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises ». Or, le premier service dont peut bénéficier un chômeur n'est-il pas de retrouver un emploi dans des conditions satisfaisantes ? Et le premier service à rendre à une entreprise n'est-il pas de lui envoyer des candidats bien formés ?

Si le nombre de demandeurs d'emploi continue mécaniquement à diminuer pour des raisons démographiques, ceux qui ne trouvent pas d'emploi devront bénéficier d'une formation accrue, à moins que la nouvelle institution ne doive se réduire à un organisme de placement et de contrôle des gens les moins qualifiés. Parallèlement, les autres salariés bénéficieraient comme aujourd'hui d'une formation étoffée, dispensée par des organismes privés sous le régime dit du « co-investissement ». Ni l'économie française ni les entreprises n'auraient à gagner à pareille orientation.

M. le président. - Amendement n°70 rectifié, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Avant le dernier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 311-1-2 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans chaque région, le comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) élargi au directeur régional de l'établissement public est consulté sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi dans la région et émet un avis sur la convention prévue à l'article L. 311-7-9.

Mme Christiane Demontès. - Nous voulons améliorer l'amendement n°2 présenté par la commission.

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a créé des comités consultatifs régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle, les CCREFP, où siègent tous les partenaires concernés. Nous proposons que ces instances soient consultées sur l'organisation régionale du service public de l'emploi.

Coprésidé par le préfet de région et le président du conseil régional, le CCREFP réunit des représentants de services régionaux de l'État, désignés par le préfet de région, des élus régionaux désignés par le président du conseil régional, le président du conseil économique et social régional ainsi que des représentants des salariés et des employeurs. Il doit favoriser la concertation entre acteurs régionaux, afin de mieux coordonner les politiques de formation professionnelle et d'emploi.

Il paraît indispensable que les comités de coordination régionaux soient consultés sur l'organisation territoriale du service public parce que, depuis leur création, ces instances ont accumulé des connaissances et un savoir-faire précieux dans les domaines de l'orientation, de la formation, de l'insertion des jeunes, du maintien et du retour à l'emploi, de la validation des acquis de l'expérience, des réseaux d'information-conseil, de l'accompagnement, de l'efficacité des financements, du suivi, de la mobilité professionnelle ou de l'anticipation des mutations économiques.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Avis défavorable, bien entendu, au n°37 qui supprime un article auquel nous sommes favorables.

L'amendement n°68 pose le problème du statut de l'institution : le projet de loi la qualifie d' « institution nationale », catégorie juridique à laquelle nous ne sommes pas habitués. Avant de se prononcer, la commission aimerait connaître l'avis du Gouvernement. Faut-il préciser cette notion ?

Avis défavorable au n°38 qui introduit les associations de chômeurs et écarte les opérateurs privés : je ne vois pas la raison d'instituer une telle ségrégation. Les associations de chômeurs contactées par la commission ne sont pas venues aux auditions et je ne suis pas sûre qu'elles soient aussi représentatives que les organisations syndicales. Nous n'avons pas non plus auditionné l'Apec.

Avis défavorable au n°31 : il n'est pas opportun de sortir l'Afpa du service public de l'emploi. Nous aurons d'autres occasions de revenir sur la formation, puisqu'un texte a été annoncé.

Sur le n°88 rectifié, la commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement. Est-il opportun d'augmenter le nombre d'organismes représentés ? Si on le fait, il faut les intégrer tous, ce qui rendrait difficile le bon fonctionnement de ce Conseil national.

Avis défavorable au n°39 qui, étant une injonction au Gouvernement, est contraire à la Constitution.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le n°69 ? Un amendement similaire a déjà été adopté par le Sénat à la fin de 2004 dans la loi de cohésion sociale. J'indique qu'à la page 71 du rapport il faut lire qu'il serait bon d'associer l'Afpa non pas « à la fusion », mais « à la réflexion ». Mes propos ont été mal compris.

Avis défavorable au n°70 rectifié, incompatible avec l'amendement n°2 de la commission. En outre, ces comités de coordination régionaux ne fonctionnent pas partout efficacement, semble-t-il.

Mme Christine Lagarde, ministre. - Avis défavorable à tous ces amendements, à l'exception de celui de la commission.

Avis défavorable au n°37 : le Gouvernement propose ce texte et il y tient. Avis défavorable au n°68 : il serait plus opportun de faire figurer cette qualification spécifique de la nouvelle institution à l'article 2 et nous en discuterons à l'occasion de l'amendement 35.

Avis défavorable au n°38 : les demandeurs d'emploi sont déjà représentés par les organisations syndicales. On veillera à ce qu'ils soient aussi représentés par une ou plusieurs des cinq personnalités qualifiées.

Avis défavorable au n°31 parce que l'Afpa, acteur majeur de la politique de l'emploi et qui exerce une mission de service public, a toute sa place dans « le premier cercle »

Pour être efficace, le Conseil national de l'emploi doit avoir une composition limitée ; de plus, la liste des organismes de formation susceptibles d'y être intégrés ne pourrait être exhaustive. S'il n'est pas retiré, sagesse plutôt défavorable au n°88 rectifié.

Avis favorable au n°2 : nous souhaitons que toutes les parties prenantes participent aux conseils régionaux de l'emploi, ce qui justifie notre opposition au n°70 rectifié, redondant avec celui-ci ; de plus, il nous est apparu, après consultation, que ces comités de coordination régionaux ne fonctionnent pas partout et ne rassemblent pas toutes les parties concernées.

Sans préjudice de la constitutionnalité ou de l'inconstitutionnalité de la mesure, l'avis est défavorable sur l'amendement n°39. Je souhaite que la convention soit bien l'instrument juridique qui permette au paritarisme de se mettre en place.

Je suis enfin défavorable à l'amendement n°69 car l'Afpa ne peut pas être partie prenante à la convention tripartite entre l'État, les régions et le nouvel opérateur.

L'amendement n°37 n'est pas adopté.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Ayant entendu les arguments de Mme la ministre, nous retirons notre amendement pour mieux le représenter à l'article 2.

L'amendement n°68 est retiré.

L'amendement n°38 n'est pas adopté.

L'amendement n°31 est retiré.

M. Jean-Claude Carle.  - Loin de moi l'idée de vouloir créer un « gros machin » où siègerait trop de monde. Mais il ne s'agissait ici que de nommer un nouveau représentant.

J'ai bien compris que nous examinions un texte cadre et qu'il ne faut pas tout vouloir régler jusqu'à la virgule. Dans une dizaine de jours, nous débattrons d'une question orale que j'ai déposée sur la formation professionnelle et dans quelque mois, vous nous soumettrez un texte sur le même sujet. Je reviendrai donc à la charge avec ma coutumière obstination.

L'amendement n°88 rectifié est retiré.

L'amendement n°2 est adopté.

L'amendement n°39 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°69.

Mme Christiane Demontès.  - L'amendement de la commission ayant été adopté, le mien tombe. Il faudra quand même m'expliquer en quoi la création d'une nouvelle instance régionale contribue à la simplification !

L'amendement n°70 rectifié devient sans objet.

L'article premier, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Jégou et les membres du groupe UC-UDF.

Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé une Commission nationale d'évaluation de l'emploi, de la formation et de l'insertion. Celle-ci est chargée de l'évaluation de l'ensemble des politiques publiques de formation et d'orientation professionnelles à destination des demandeurs d'emploi.

Elle établit tous les ans un rapport sur l'utilisation des ressources financières affectées à la formation et à l'orientation professionnelles des demandeurs d'emploi indemnisés.

Elle est composée de représentants de l'État et du Parlement et de représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, des collectivités territoriales, des administrations intéressées, de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail, de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 5424-7 du même code, ainsi que de représentants des organismes spécialisés dans le domaine de la formation et de l'insertion.

Un décret en conseil d'État précise les conditions d'application du présent article.

Mme Muguette Dini.  - La mission d'information sénatoriale sur les dispositifs de formation a constaté que l'effort considérable de la Nation en faveur de la formation professionnelle n'était absolument pas évalué. Il convient donc d'instituer une commission nationale d'évaluation de l'emploi, de la formation et de l'insertion qui établirait un rapport annuel sur l'utilisation des ressources financières affectées à la formation et à l'orientation professionnelles des demandeurs d'emploi indemnisés.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Je ne suis pas persuadée qu'il faille créer encore une nouvelle instance. Avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Avis identique, même si je partage vos préoccupations, madame Dini. Votre amendement est en grande partie satisfait puisque le comité de suivi au sein du CNE sera chargé d'évaluer la loi en fonction d'indicateurs de performance. En outre, deux organisations syndicales représentatives ont obtenu qu'au sein même du nouvel opérateur un comité d'évaluation soit mis en place. Il n'est donc pas utile de créer une troisième instance d'évaluation.

L'amendement n°32 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°71, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 13 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice des dispositions du premier alinéa, la convention mentionnée au 1° est prorogée de vingt-quatre mois à compter du 31 décembre 2008. »

Mme Christiane Demontès.  - Cet amendement peut sembler être à la marge du texte, mais il est important. L'État a prévu de transférer aux régions l'organisation et le financement des stages de l'Afpa avant le 1er janvier 2009. Une période transitoire court jusqu'à cette date de façon que les régions puissent anticiper ce transfert et nous proposons de proroger de vingt-quatre mois les conventions conclues entre le représentant de l'État en région, la région et l'Afpa. Nous avions déposé un amendement en ce sens lors de la loi de finances pour 2008. Mon collègue, Claude Haut, avait indiqué que les relations juridiques entre les régions et l'Afpa à l'issue de la période transitoire n'étaient pas clarifiées, en dépit de nombreuses sollicitations, par l'État, de sorte que les régions s'inquiétaient, car les délais de consultation pour la passation des marchés ou des délégations de services publics sont très longs.

En outre, on ne connaît toujours pas les conclusions de la Commission européenne sur les services d'intérêt général. Si la formation des personnes en difficulté était reconnue comme un service social d'intérêt général (SSIG), le contexte juridique serait enfin clarifié à la satisfaction des régions et de l'Afpa. Compte tenu des délais nécessaires à cette décision, puis à sa transcription en droit français, il faut donc proroger la période transitoire.

En outre, l'État souhaite céder le patrimoine immobilier de l'Afpa. Or, l'hébergement est considéré comme un élément décisif pour la réussite des parcours de formation et il fait partie de l'offre de l'Afpa. En fonction des décisions qui seront prises, il faudra tenir compte, ou non, de la valeur de ce patrimoine. Ce sujet est particulièrement complexe car la situation de chaque centre Afpa devra faire l'objet d'un examen minutieux.

Enfin, l'impact financier d'une prorogation de deux ans sera nul pour les régions qu'elles aient, ou non, signé une convention de transfert de l'Afpa. Lors du débat sur la loi de finances, M. le ministre du budget a estimé qu'il serait préférable d'aborder ce sujet dans le cadre d'un texte ultérieur et que le Gouvernement envisageait « de procéder à un report d'un an ». Il étudierait « au cours de l'année 2008, les possibilités de prendre des mesures allant dans le sens » que nous souhaitions. Un responsable de votre cabinet, madame la ministre, a récemment confirmé cet engagement au président de l'Association des régions de France. Nous vous proposons donc de proroger de deux ans la période transitoire afin de stabiliser juridiquement les relations que l'État et les régions entendent nouer avec l'Afpa.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Nous suivrons l'avis du Gouvernement sur cet amendement, qui ne me semble toutefois pas à sa place dans ce texte.

Mme Christine Lagarde, ministre. - L'avis est défavorable. Nous sommes vraiment à la périphérie du texte... Seules deux régions sur vingt-deux n'ont pas encore mis en oeuvre le transfert ; il leur reste onze mois et demi pour se conformer. Les transferts ont été anticipés grâce aux conventions tripartites, qui ont permis l'appropriation de l'offre de services de l'Afpa par les collectivités territoriales et la sécurisation juridique des relations entre les régions et l'Afpa.

S'agissant de l'application du code des marchés publics, les analyses convergent : l'achat de prestations de formation relève de la mise en concurrence. J'ai proposé à l'Association des régions de France d'étudier avec mes services les meilleures conditions de passation des commandes, de façon à concilier droit de la concurrence et réactivité. Tout sera mis en oeuvre avant le 31 décembre 2008. Il n'est donc pas justifié de prolonger de deux ans la période transitoire.

Mme Christiane Demontès.  - J'entends bien, mais j'insiste sur l'engagement pris de prolonger d'un an au moins cette période pour permettre au nouveau dispositif de se mettre en place. Pour être prêt au 1er janvier 2009, il aurait fallu avoir tout réglé avant fin 2007 ! Si vous confirmez cet engagement, j'accepte de retirer mon amendement.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Ma proposition tient : nous nous mettons au travail dès la semaine prochaine avec les représentants de l'ARF. La balle est dans leur camp. Nous leur fournirons toutes les compétences nécessaires pour les aider à trouver le meilleur mécanisme. Si rien n'aboutit avant la fin 2008, il sera temps de prévoir une extension.

Mme Christiane Demontès.  - Il y a suffisamment de projets de lois sur la formation professionnelle en préparation pour que nous ayons l'occasion d'y revenir si nécessaire ! (Mme le ministre le confirme)

L'amendement n°71 est retiré.

Article 2

I. - La section 4 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail est remplacée par les dispositions suivantes :

« Section 4

« Placement et accompagnement des demandeurs d'emploi

« Art. L. 311-7. - Une institution nationale dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière a pour mission de :

« 1° Prospecter le marché du travail, procéder à la collecte des offres d'emploi, aider les employeurs à les pourvoir, assurer la mise en relation entre l'offre et la demande, et veiller au respect des règles relatives à la lutte contre les discriminations à l'embauche ;

« 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toutes actions utiles pour développer leurs compétences professionnelles et améliorer leur employabilité, favoriser leur reclassement et faciliter leur mobilité ;

« 3° Procéder aux inscriptions sur la liste des demandeurs d'emploi, tenir celle-ci à jour dans les conditions prévues aux articles L. 311-5 et L. 311-5-1 et assurer à ce titre le contrôle de la recherche d'emploi dans les conditions prévues à l'article L. 351-18 ;

« 4° Assurer, pour le compte de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage, le versement de l'allocation d'assurance, et, pour le compte de l'État ou du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982, le service des allocations de solidarité mentionnées aux articles L. 351-9, L. 351-10, L. 351-10-1, L. 351-10-2, L. 351-13-1, de la prime de retour à l'emploi mentionnée à l'article L. 322-12 pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique, de la prime forfaitaire mentionnée à l'article L. 351-20, ainsi que de toute autre allocation ou aide dont l'État lui confierait le versement par convention ;

« 5° Recueillir, traiter, diffuser et mettre à la disposition des services de l'État et de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage les données relatives au marché du travail et à l'indemnisation des demandeurs d'emploi ;

« 6° Mettre en oeuvre toutes autres actions qui lui sont confiées par l'État, les collectivités territoriales et l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage en relation avec sa mission.

« Art. L. 311-7-1. - L'institution mentionnée à l'article L. 311-7 est administrée par un conseil d'administration et dirigée par un directeur général.

« Art. L. 311-7-2. - Le conseil d'administration comprend :

« 1° Cinq représentants de l'État ;

« 2° Cinq représentants des employeurs et cinq représentants des salariés ;

« 3° Trois personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines d'activités de l'institution.

« Les représentants des employeurs et les représentants des salariés sont désignés par les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, mentionnées à l'article L. 352-2.

« Les personnalités qualifiées sont désignées par le ministre chargé de l'emploi.

« Le président est élu par le conseil d'administration en son sein.

« Art. L. 311-7-3. - Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires relatives à l'objet de l'institution.

« Les décisions relatives au budget et aux emprunts, ainsi qu'aux encours maximum des crédits de trésorerie, sont prises à la majorité des deux tiers des membres présents.

« Le conseil d'administration désigne en son sein un comité d'audit et un comité d'évaluation.

« Art. L. 311-7-4. - Le directeur général exerce la direction de l'institution dans le cadre des orientations définies par le conseil d'administration ; il prépare les délibérations de ce conseil et en assure l'exécution.

« Le directeur général est nommé par décret, après avis du conseil d'administration.

« Art. L. 311-7-5. - Le budget de l'institution comporte trois sections non fongibles qui doivent chacune être présentées à l'équilibre :

« 1° La section « assurance chômage » retrace en dépenses les allocations d'assurance prévues aux articles L. 351-3 et suivants, qui sont versées pour le compte de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur et en recettes une contribution de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage, dans les conditions déterminées par la convention d'assurance chômage prévue à l'article L. 351-8, permettant d'assurer l'équilibre ;

« 2° La section « solidarité » retrace en dépenses les allocations et aides versées pour le compte de l'État ou du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur, et en recettes une contribution de l'État permettant d'assurer l'équilibre ;

« 3° La section « fonctionnement, intervention et investissement » comporte en dépenses les charges de personnel et de fonctionnement, les charges financières et les charges exceptionnelles, les dépenses d'investissement ainsi que les dépenses d'intervention concourant au placement, à l'orientation, à l'insertion professionnelle, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi, et en recettes une contribution de l'État et une contribution de l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage dans les conditions prévues à l'article L. 354-1, ainsi que, le cas échéant, les subventions des collectivités territoriales et autres organismes publics, les produits reçus au titre des prestations pour services rendus, toutes autres recettes autorisées par les lois et règlements en vigueur, les produits financiers et les produits exceptionnels.

« L'institution est autorisée à placer ses fonds disponibles dans des conditions fixées par les ministres chargés de l'emploi et du budget.

« Art. L. 311-7-6. - L'institution est soumise en matière de gestion financière et comptable aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales.

« Art. L. 311-7-7. - Les agents de l'institution nationale, qui sont chargés d'une mission de service public, sont régis par le code du travail dans les conditions particulières prévues par une convention collective agréée par les ministres chargés de l'emploi et du budget. Cette convention comporte des stipulations, notamment en matière de stabilité de l'emploi et de protection à l'égard des influences extérieures, nécessaires à l'accomplissement de cette mission.

« Les règles de représentation des salariés prévues par le code du travail s'appliquent à tous les agents de l'institution, quel que soit leur régime d'emploi.

« Art. L. 311-7-8. - L'institution est organisée en une direction générale et des directions régionales.

« Au sein de chaque direction régionale, une instance paritaire, composée de représentants des employeurs et des salariés désignés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, mentionnées à l'article L. 352-2, veille à la bonne application de l'accord d'assurance chômage prévu à l'article L. 351-8 et est consultée sur la programmation des interventions au niveau territorial.

« Art. L. 311-7-9. - Une convention annuelle est conclue au nom de l'État par l'autorité administrative et le représentant régional de l'institution.

« Cette convention, compte tenu des objectifs définis par la convention prévue à l'article L. 311-1-2, détermine la programmation des interventions de l'institution au regard de la situation locale de l'emploi et du marché du travail et précise les conditions dans lesquelles elle participe à la mise en oeuvre des actions prévues à l'article L. 322-1. Elle fixe également les conditions d'évaluation de son action.

« Art. L. 311-7-10. - Les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l'institution, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage, de l'État ou du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982, sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution.

« Art. L. 311-7-11. - Les biens immobiliers de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail relèvent en totalité de son domaine privé. Sont déclassés les biens immobiliers qui lui sont transférés, lorsqu'ils appartiennent au domaine public. Lorsqu'un ouvrage ou terrain appartenant à l'institution est nécessaire à la bonne exécution de ses missions de service public ou au développement de celles-ci, l'État peut s'opposer à sa cession, à son apport, sous quelque forme que ce soit, à la création d'une sûreté sur cet ouvrage ou terrain, ou subordonner la cession, la réalisation de l'apport ou la création de la sûreté à la condition qu'elle ne soit pas susceptible de porter préjudice à l'accomplissement de ces missions. Est nul de plein droit tout acte de cession, apport ou création de sûreté réalisé sans que l'État ait été mis à même de s'y opposer, en violation de son opposition ou en méconnaissance des conditions fixées à la réalisation de l'opération.

« Art. L. 311-7-12. - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application de la présente section. »

II. - Aux articles L. 311-5, L. 311-5-1 et L. 311-6 du même code, les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 311-7 ».

III. - À l'article L. 311-10-1 du même code, les mots : « l'Agence nationale pour l'emploi, les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 ».

IV. - Au premier alinéa de l'article L. 351-17 du même code, après  les mots : « de l'article L. 311-5 » sont insérés les mots : « par l'autorité de l'État ».

V. - L'article L. 351-18 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 351-18. - Le contrôle de la recherche d'emploi est exercé par les agents de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article, notamment les conditions dans lesquelles les agents chargés du contrôle ont accès, pour l'exercice de leur mission, aux renseignements détenus par les administrations sociales et fiscales. »

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par M. Mercier et les membres du groupe UC-UDF.

Au premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail, après les mots :

Une institution nationale

insérer le mot :

publique

Mme Muguette Dini.  - Nous précisons que le nouvel opérateur sera bien une personne morale de droit public. Le texte actuel, qui évoque « une institution nationale dotée de la personnalité morale », sans autre précision, laisse penser qu'il s'agit d'un établissement public administratif. Mais une précision s'impose.

M. le président.  - Amendement identique n°40, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - Votre notion d'« institution » suscite beaucoup d'inquiétudes. En droit comme en politique, les mots ont un sens ! Je me suis donc plongée dans un dictionnaire juridique. Selon M. Hauriou, une « institution » est « une réalité que constitue un organisme existant, par exemple un établissement administratif, lorsque s'y dégagent la conscience d'une mission et la volonté de la remplir en agissant comme une personne morale ». Mais le terme existe aussi en droit privé ! Il recouvre alors « une théorie utilisée pour rendre compte du phénomène de la personnalité morale à l'exemple des associations, des syndicats et des sociétés ».

Notre amendement précise donc que cette institution est publique et nationale. Nationale d'abord, car trop de services publics sont aujourd'hui confiés à la gestion et au financement des collectivités territoriales -sans compensation systématique, d'ailleurs... Un statut national garantit l'égalité de traitement entre demandeurs d'emploi ainsi qu'une politique de l'emploi homogène sur tout le territoire. Publique ensuite, car les missions d'accueil, de conseil, de placement et d'indemnisation ne peuvent relever que d'un service public administratif. L'objectif ne doit pas être la recherche du profit mais du plein emploi !

M. le président.  - Amendement n°72, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Au début du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail, remplacer les mots :

institution nationale

par les mots :

établissement public national

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - La convention 88 de l'Organisation internationale du travail dispose que les agents d'un service public de l'emploi bénéficient d'un statut qui les rend indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue.

Le service de l'emploi que vous créez est-il encore un service public d'intérêt général ? Si les agents sont chargés d'une mission de service public, ce n'est pas le cas de l'institution elle-même. Celle-ci sera en revanche soumise aux règles de la comptabilité industrielle et commerciale, et ses biens, éventuellement déclassés, relèveront du domaine privé. Preuve qu'il s'agit d'une institution ad hoc, dérivant vers une gestion privée et une politique de résultats purement comptables.

Mme Catherine Procaccia.  - Les amendements n°35 et 40 posent une vraie question, qui a souvent été soulevée au cours de nos auditions. Nous suivrons l'avis du Gouvernement, notamment s'il est favorable. Défavorable à l'amendement n°72.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Le Gouvernement est favorable à l'amendement n°35, qui apporte une précision importante. Il s'agit bien, comme l'a clairement indiqué le Conseil d'État, d'une personne publique qui remplit une mission de service public. L'amendement n°40 est identique.

M. le président.  - C'est un amendement d'ouverture, UC-CRC. (Sourires)

M. Guy Fischer.  - Quand c'est pour la bonne cause...

M. le président.  - Je vois que vous avez entendu le Président de la République !

Mme Christine Lagarde, ministre.  - L'amendement n°72 deviendrait sans objet.

L'amendement n°35, identique à l'amendement n°40, est adopté.

L'amendement n°35, identique à l'amendement n°40, est adopté.

L'amendement n°72 devient sans objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°42 rectifié, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail :

«1° Prospecter le marché du travail, procéder à la collecte des offres d'emplois, aider et conseiller les entreprises dans leur recrutement, assurer la mise en relation entre l'offre et la demande, participer activement à la lutte contre les discriminations à l'embauche et pour l'égalité professionnelle ;

Mme Annie David. - Ma présentation de l'amendement n°42 rectifié vaudra aussi pour les amendements n°s43, 44 et 45. Le ministère de l'économie est chargé de réaliser la fusion entre l'Assedic et l'Anpe ; le partage des compétences ainsi réalisé par le Premier ministre est pour le moins étrange et révèle sans doute une conception du demandeur d'emploi différente de la nôtre. Selon nous, il s'agit d'un salarié privé temporairement d'emploi et contre sa volonté, que l'État doit accompagner dans sa recherche en l'aidant à se réinsérer sur le marché du travail. Cette compétence, qui ne peut en aucun cas être dévolue au privé -ce que vous faites déjà et souhaitez accentuer aujourd'hui- devrait relever du même ministère, celui de M. Bertrand. En vous confiant cette réforme, François Fillon avoue que celle-ci n'aura pas pour objectif de réduire le chômage en fournissant des emplois stables et bien rémunérés, mais de pourvoir les emplois vacants mal rémunérés, pénibles ou dangereux. Dans votre ministère, l'emploi fait allégeance à l'économie ; sa compétence pour la présente réforme ne sera donc pas sans conséquence sur les missions de la future institution.

C'est pourquoi, après audition des organisations syndicales, nous vous proposons une série d'amendements visant à préciser ces missions. Il s'agit de développer la communication positive de l'institution en direction des entreprises, et plus particulièrement des très petites et des moyennes entreprises, qui hésitent souvent à recourir à l'emploi, notamment en raison du manque d'information ; les entreprises doivent participer à l'élaboration de stratégies de créations et de gestions d'emplois.

L'amendement n°42 rectifié vise à faire de la nouvelle institution un outil performant de lutte contre les discriminations à l'emploi, notamment par une information de qualité à destination des employeurs, ce qui va dans le sens du Gouvernement et constituera un changement considérable par rapport à la situation actuelle, certaines sociétés d'intérims qui, depuis la loi de cohésion sociale, participent au service public de l'emploi, ayant été condamnées pour pratiques discriminatoires. En considérant le placement des travailleurs comme un marché ordinaire, vous avez contraint les opérateurs privés à employer des pratiques odieuses.

Il est apparu, lors de son examen en commission, que l'amendement n°45, était explicite et qu'il serait peut-être plus à sa place dans un décret ou le règlement intérieur, mais il faut qu'apparaisse le fait que la nouvelle institution conserve une mission statistique fournissant à l'État, aux employeurs et aux citoyens des éléments toujours utiles. La rectification ne conserve que la première phrase du 5°.

M. le président.  - Amendement n°73, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail par les mots :

et pour l'égalité professionnelle

Mme Patricia Schillinger.  - L'égalité professionnelle est un sujet aussi consensuel que la lutte contre les discriminations. L'amendement vise donc à réparer ce qui est sans doute un oubli.

Sur la lutte contre les discriminations, discours et promesses se succèdent à l'envie, mais, sur le plan législatif, ils se résument à un projet de loi d'adaptation de mesures communautaires qui ne modifieront pas vraiment la notre législation.

En ce qui concerne l'égalité professionnelle, la loi du 23 mars 2006 avait pour but de supprimer les écarts de rémunération entre hommes et femmes d'ici à 2010. Or, les femmes gagnent toujours en moyenne 20 % de moins que les hommes ; elles représentent 80 % des salariés à temps partiel -le plus souvent contraint- et 77 % des travailleurs à bas salaire, cumulant ainsi les handicaps. La loi de 2006 prévoyait aussi la prise en compte de l'égalité des sexes au sein du service public de l'emploi, des maisons de l'emploi et des services de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Après la conférence tripartite tenue à l'automne dernier, Xavier Bertrand a présenté des pistes d'action pour l'égalité professionnelle qui devraient être traduites avant la fin du premier semestre 2008 dans un projet de loi : accompagnement des entreprises pour les aider à utiliser les outils existants, mise en place de référents dans les DDTEFP, mise en place d'accords salariaux comportant des mesures d'égalité sous peine de refus d'agrément, sanctions financières pour les employeurs n'ayant pas prévu au plus tard à la fin de l'année 2009 un plan de rattrapage pour les salaires des femmes. Où en êtes-vous exactement ?

Les salariés de la nouvelle institution ne rendraient-ils pas service aux salariés comme aux employeurs en les informant des évolutions législatives dans ce domaine, ce qui permettrait notamment d'anticiper les sanctions financières ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Avis favorable à l'amendement n°42 rectifié ; s'il est adopté, l'amendement n°73 est satisfait.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - J'aurais aimé pouvoir m'en remettre à la sagesse du Sénat, mais la mission de la nouvelle institution est décrite de façon exhaustive par six alinéas dans la nouvelle rédaction de l'article L. 311-7 résultant de l'article 2 du projet de loi. L'intitulé fait notamment référence au libellé des offres d'embauche, auquel la Halde est sensible. Si nous délayons la sauce en ajoutant la lutte contre toutes les inégalités, où nous arrêterons-nous et que ferons-nous figurer dans les décrets ? Un tel travail de dentelière a-t-il sa place dans une loi ? Avis défavorable, car ce ne serait pas rendre service à la nécessaire concision du travail législatif que d'accepter ces amendements et les suivants.

Je ne suis bien sûr pas insensible à votre argument sur l'égalité entre hommes et femmes : il s'agit d'un combat que je mène aux côtés de Xavier Bertrand, en charge de la question. Le fait que l'économie figure à côté de l'emploi me semble de bon augure : c'est une manière de reconnaître que la création d'emplois résulte de l'activité économique.

Mme Annie David.  - Il n'est pas possible de rallonger sans fin un texte de loi, mais il s'agit ici simplement d'ajouter dans le premier alinéa une référence à l'égalité professionnelle.

La seule chose nouvelle, c'est l'égalité professionnelle. Le reste est déjà dans le texte, il n'y a pas de nouvel alinéa.

M. Jean-Pierre Godefroy. - J'espérais que la ministre donnerait, sinon un avis favorable, du moins un avis de sagesse.

Mentionner l'égalité professionnelle n'est pas alourdir un texte de loi ! D'autant que la garantir relève évidemment des missions d'un tel institut.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Je me rends à vos arguments conjugués. C'est sans regret que je change d'avis pour m'en remettre à la sagesse du Sénat. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°42 rectifié est adopté.

L'amendement n°73 est satisfait.

M. le Président.  - Amendement n°43, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail :

« 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toute action utile pour développer leurs qualifications professionnelles, favoriser leur reclassement et faciliter leur mobilité en se fondant sur le libre choix et volontaire de l'individu.

Mme Annie David. - Je l'ai présenté.

M. le Président. - Amendement n°74, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après les mots :

compétences professionnelles

rédiger comme suit la fin du troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour le l'article L. 311-7 du code du travail :

, et leurs qualifications, favoriser leur reclassement et faciliter leur mobilité en préservant leur faculté de choix ;

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Derrière cet amendement se profile une question majeure : en quoi ce texte va-t-il être utile aux demandeurs d'emploi ? S'il ne saurait conduire à des créations d'emplois, en quoi va-t-il améliorer la situation des chômeurs et leur permettre de retrouver un emploi stable, correctement rémunéré et dans des conditions décentes ?

II est dangereux d'employer dans un texte de loi une notion aussi imprécise que celle d'employabilité. La définir serait peut-être le rôle des agents d'un service public de l'emploi, à ceci près qu'un demandeur d'emploi, selon son âge, sa qualification, ses possibilités d'adaptation tant professionnelles que personnelles sera considéré comme employable ici et pas dans telle autre branche ou entreprise. Jamais aucun critère objectif ne pourra être établi sur cette notion dangereuse.

Un nouveau pas a été franchi en passant de la notion d'offre valable d'emploi, sur laquelle le débat était déjà vif, à celle d'offre acceptable d'emploi. Notion qui est pour nous, sans jeu de mot, inacceptable, car elle sous-entend clairement que ce n'est plus l'offre d'emploi qui est qualifiée ou non comme valable. Ce qui n'est déjà pas facile à établir, les experts sont intarissables sur le sujet. C'est maintenant l'acceptabilité qui est considérée. Ce qui signifie que l'offre est acceptable par telle personne, et doit donc être acceptée puisque les caractéristiques de la personne doivent la conduire à accepter ce qui lui est proposé. Que cela lui plaise ou non.

Bref, ce qui se cache derrière l'offre acceptable, c'est une acceptation contrainte. C'est pourquoi il nous paraît indispensable de préciser que ce sont les qualifications des demandeurs d'emploi qui doivent être améliorées, car les qualifications sont répertoriées depuis longtemps, et que leur liberté de choix doit être préservée. Ils doivent pouvoir refuser une offre qui ne tient pas compte de leur formation et des qualifications acquises, pour laquelle le salaire proposé est trop inférieur à leur ancien salaire, ou qui porte un grave préjudice à leurs conditions de vie.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Défavorable à ces amendements qui alourdissent énormément le texte et traitent plus de la politique de l'emploi que de cette institution.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Défavorable à l'amendement n°43, qui alourdit inutilement le texte, et au n°74. La définition de « l'offre valable d'emploi » fait actuellement l'objet d'une négociation entre les partenaires sociaux, qui devrait aboutir très prochainement. Si elle devait échouer, nous convoquerions une nouvelle conférence sur le sujet fin mars et, en cas de nouvel échec, proposerions un texte législatif. Cette définition doit être fondée sur une série de critères, qui vont des textes de l'OIT aux expériences étrangères.

En tout état de cause, la définition de l'offre valable d'emploi ne relève donc pas de ce projet de loi.

Mme Annie David.  - Nous n'alourdissons pas le texte, nous l'allégeons ; et « employabilité » est un terme barbare !

La mobilité doit pouvoir être refusée. Va-t-on imposer à un Grenoblois de partir pour Lille, si cela signifie contraindre son épouse à perdre son emploi ?

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - L'argument de « l'employabilité », les ouvrières de Moulinex ne l'ont que trop entendu : elles ne sont « employables » nulle part et nombre d'entre elles n'ont toujours pas retrouvé d'emploi.

L'amendement n°74 n'est pas adopté.

M. le Président.  - Amendement n°44, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« ...°Contribuer à l'élaboration et à l'évolution de l'offre de formation professionnelle à partir du constat découlant des besoins des demandeurs d'emploi ;

« ...°Développer une expertise sur l'évolution prospective des emplois et des qualifications ;

« ...°Développer une expertise et capacité de conseil en matière de stratégie  de gestion de l'emploi auprès des entreprises en particulier des très petites et petites et moyennes entreprises ;

« ...°Recueillir les données relatives à l'adéquation locale des offres et des demandes d'emploi, à l'évolution des qualifications, de l'évolution de la situation de l'emploi sous toutes ses formes et participer au schéma de développement national, régional, local de formation et de reconnaissance des qualifications ;

Mme Annie David. - Je l'ai défendu.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Cet amendement crée une difficulté : nous sommes attachés aux maisons pour l'emploi, à l'action des chambres de commerce et d'industrie, et nous ne voudrions pas courir un risque de chevauchement. C'est la raison de notre avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°44 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°45 rectifié présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le sixième alinéa (5°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail :

« 5° Participer, au sein d'un service public national des statistiques, au recueil et à l'élaboration de données relatives à l'emploi, à l'indemnisation des demandeurs d'emploi, à la récurrence des demandes d'emploi, et aux demandes d'emploi de longue durée ;

Mme Annie David. - Il est défendu.

M. le président. - Amendement n°92, présenté par Mme Garriaud-Maylam.

Compléter le 5° du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Créer une base de données des Français à la recherche d'un emploi à l'étranger ou y travaillant déjà.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Dans un environnement de mondialisation et de compétitivité exacerbée, il importe de mieux canaliser la mobilité trans-frontières, afin que celle-ci soit vraiment un atout pour notre pays. Une base de données, qui pourrait être mise en place par le réseau ANPE-Anaem, spécialisé dans le placement et la réinsertion des Français à l'étranger, serait très utile : elle améliorerait la coordination administrative, la connaissance de la mobilité, l'adéquation entre les offres d'emploi et les profils de nos ressortissants à l'étranger. Une veille serait assurée sur les possibilités d'emploi dans les différents pays et secteurs d'activité. Les fraudes, en nombre croissant, seraient également mieux détectées. Les expatriés rentrant en France seraient mieux orientés. Actuellement, expérience et compétences internationales sont rarement valorisées au retour !

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - La commission avait donné un avis défavorable à l'amendement n°45. Il a été rectifié, et j'en remercie Mme David ; je demanderai l'avis du Gouvernement.

J'ai été convaincue par les explications de Mme Garriaud-Maylam, mais la commission, réservée, souhaitait connaître la position du Gouvernement sur le n°92.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Défavorable au n°45 rectifié, qui alourdit la rédaction -la commission tripartite règlera cela. Sur le n°92, l'alinéa 6 de l'article n'entre pas dans le détail mais il autorise un tel instrument spécifique. Il faut d'abord en étudier la faisabilité opérationnelle, mais ce serait une vraie réponse à une vraie question ! Je songe notamment à la lutte contre la fraude.

Mme Annie David. - Je ne comprends pas en quoi notre amendement, dans sa version rectifiée, est plus lourd que la rédaction actuelle. Collecter des chiffres, très bien ; mais participer à l'élaboration des statistiques garantit la qualité de celles-ci.

L'amendement n°45 rectifié n'est pas adopté.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Je comprends la prudence de Mme la ministre et connais son souci des Français de l'étranger. Je lui demande de tenir son engagement en étudiant la possibilité d'une telle base de données, car nous en avons besoin, aussi bien pour les jeunes expatriés que les seniors. Savez-vous que ceux-ci sont très demandés en Chine ?

L'amendement n°92 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le mot :

État

rédiger comme suit la fin du dernier alinéa (6°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail :

et les collectivités territoriales

M. Guy Fischer. - Vous voulez la fusion pour ne pas créer un monstre à deux têtes : dont acte, même si je doute que ce soit là votre seul objectif. Quoi qu'il en soit, notre amendement est cohérent avec notre position sur le Conseil national de l'emploi.

L'État insuffle les politiques de l'emploi, mais régions et départements y contribuent et ils connaissent leurs bassins d'activité. Il y a donc lieu de les intégrer -nous veillerons à ce que ne soit pas créées de nouvelles charges sans compensation financière. Avec les radiations massives, les demandeurs d'emploi sont de plus en plus contraints à se tourner vers les collectivités locales pour obtenir le RMI, demain le RSA.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Défavorable ; les liens seront forts entre le gestionnaire de l'assurance chômage et la nouvelle institution : il n'y a pas lieu d'interdire au premier de confier des missions à la seconde.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°46 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°41, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 311-7 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :

« La nouvelle institution créée pour l'accomplissement du service public de l'emploi est constituée sous forme d'établissement public administratif.

Mme Annie David.  - Lorsqu'en 1967 Jacques Chirac crée l'ANPE, il s'agit d'un service public administratif, doté de l'autonomie de gestion et financière. De même, nous proposons que la nouvelle institution chargée du service public de l'emploi prenne la forme d'un établissement public administratif. Les législateurs d'alors avaient compris que le placement des demandeurs d'emplois appelle des règles particulières. J'aurais souhaité que vous fassiez preuve de la même sagesse.

Les trois critères traditionnellement exigés par la jurisprudence administrative pour un service public administratif sont réunis. La mission de cette future institution ne relève pas d'une entreprise industrielle et du secteur marchand. Elle tirera principalement ses ressources de recettes fiscales directes et indirectes, et non pas d'une redevance ou d'une contribution volontaire. Son mode de fonctionnement correspond également à celui d'un service public administratif. Le faisceau d'indices converge, mais la loi peut qualifier directement cette institution, ce que propose cet amendement.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - En adoptant l'amendement n°35, nous avons donné un caractère public à cette institution. Cet amendement semble satisfait, sinon avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°41 est retiré.