Mercredi 27 mars 2024

- Présidence de Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente -

La réunion est ouverte à 9 h 35.

Audition de Mme Marianne Laigneau, présidente du directoire d'Enedis

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui Mme Marianne Laigneau, présidente du directoire d'Enedis.

Je rappelle qu'il s'agit du principal gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité, dont la propriété incombe aux communes et à leurs groupements : 95 % de ce réseau est géré par Enedis, contre 5 % pour une vingtaine d'entreprises locales de distribution.

Nous sommes très heureux de vous recevoir ce matin, dans la droite ligne de nos précédentes auditions du président du directoire de Réseau de transport d'électricité (RTE), en octobre, et du président-directeur général du groupe EDF, en novembre.

La transition énergétique représente un véritable défi pour les réseaux électriques. La décarbonation et la réindustrialisation de notre économie impliquent en effet des investissements massifs pour accélérer le raccordement des projets d'électricité nucléaire comme renouvelable et accompagner l'électrification des usages, dont l'alimentation des véhicules électriques et des électrolyseurs d'hydrogène. Enedis, pour le réseau de distribution, tout comme RTE pour le réseau de transport, ont annoncé des investissements, de l'ordre de 100 milliards d'euros d'ici à 2040.

Sous l'égide de notre rapporteur Patrick Chauvet, notre commission a adopté, dans le cadre de la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi Aper, une réforme technique mais importante visant à accélérer les raccordements aux réseaux électriques des projets d'électricité renouvelable et, plus largement, des projets industriels nécessaires à la transition énergétique.

Dans ce contexte, je souhaite vous interroger sur plusieurs sujets.

Tout d'abord, je voudrais échanger avec vous sur la stratégie d'investissement de votre groupe en direction de la transition énergétique. Quels sont les montants que vous envisagez de mobiliser pour faire évoluer les réseaux publics de distribution d'électricité ? En quoi consistent votre projet industriel et humain pour la période 2020-2025 et vos « écoles des réseaux pour la transition énergétique » ? Anticipez-vous une hausse des coûts pour les gestionnaires et pour les utilisateurs de ces réseaux et, in fine, pour les consommateurs d'électricité ?

Un autre sujet sur lequel je souhaiterais recueillir votre avis est celui de la place des réseaux électriques dans la future programmation énergétique. Nous le savons, le Gouvernement est très hésitant - c'est le moins que l'on puisse dire ! - sur ce dossier, puisqu'il a annoncé la réouverture de consultations sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)... consultations pourtant déjà engagées en 2021 !

La semaine dernière, lors d'une séance de questions d'actualité au Gouvernement, j'ai d'ailleurs interrogé le ministre chargé de l'énergie sur le devenir de la loi quinquennale sur l'énergie, car il faudra bien décider et légiférer ! Or les réseaux électriques nous semblent constituer les « parents pauvres » de l'avant-projet de PPE dévoilé par le Gouvernement en novembre dernier. Certes, quelques objectifs généraux y figurent, tels que l'adaptation des réseaux, l'accélération des raccordements, la révision des tarifs, la sécurisation des chaînes de valeur ou encore la prise en compte des solutions numériques ou du changement climatique. Ces objectifs vous paraissent-ils pertinents ? Faut-il les compléter par d'autres ? Faut-il les assortir d'un chiffrage ou de moyens financiers ou humains ?

Enfin, j'aimerais connaître votre opinion sur l'état de vos relations avec les collectivités territoriales - le Sénat étant l'assemblée des territoires, cette préoccupation est bien naturelle. Quel bilan faites-vous du renouvellement du modèle concessif liant votre groupe à ces collectivités, réalisé entre 2017 et 2023 ? Quelles sont les évolutions notables qui ont eu lieu dans la période récente en matière de mission ou de gouvernance ? Certaines collectivités doivent-elles encore renouveler leurs contrats ? Plus largement, faut-il moderniser le financement des investissements des collectivités dans les réseaux électriques, et notamment le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (CAS Facé) ?

Madame Laigneau, je vous laisse maintenant la parole pour un propos liminaire d'une quinzaine de minutes, en vous remerciant à nouveau d'avoir accepté notre invitation - c'est la première fois que nous vous accueillons au sein de la commission des affaires économiques. Puis mes collègues vous interrogeront, à commencer par ceux qui, parmi nous, sont des spécialistes de la question de l'énergie.

Mme Marianne Laigneau, présidente du directoire d'Enedis. - Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse de l'occasion qui m'est donnée d'échanger avec vous ce matin.

Le réseau public de distribution opéré par Enedis est la plus grande infrastructure de distribution en Europe : nous couvrons 95 % du territoire via 1,4 million de kilomètres de lignes, soit 35 fois le tour de la Terre. Il appartient aux collectivités locales, qui en sont propriétaires ; cela se manifeste par la conclusion et le renouvellement périodique de contrats de concession.

Dans le secteur de l'énergie, et celui de l'électricité en particulier, et face aux défis que nous avons à relever, les réseaux ont un rôle crucial à jouer, qui n'est pas toujours suffisamment mis en valeur. Je partage votre appréciation sur ce point. J'ai d'ailleurs eu l'occasion d'échanger à ce sujet avec la commission d'enquête sur la production, la consommation et le prix de l'électricité aux horizons 2035 et 2050 présidée par le sénateur Franck Montaugé.

Quels sont les défis qui sont devant nous ? Quels sont les moyens que nous mobilisons pour y répondre ?

Notre premier grand défi est un défi écologique et industriel : il s'agit de permettre ce que nous appelons, sans emphase, la seconde électrification de la France. C'est bien à cela que nous devons nous préparer : sortir des énergies fossiles pour faire baisser notre consommation d'énergie de 40 % à l'horizon 2050 tout en accroissant la part de l'électricité, qui représente aujourd'hui 25 % de ladite consommation d'énergie, à 50 % ou 60 %, suivant les scénarios.

Au moment où nous nous parlons, 842 000 producteurs d'énergie renouvelable sont connectés au réseau géré par Enedis, qui les y a raccordés, car ni les bornes de recharge ni les énergies renouvelables ne « flottent en l'air ». La moitié de ces producteurs, plus de 430 000, sont des autoconsommateurs, essentiellement des individuels, mais aussi des entreprises, essentiellement équipés de panneaux solaires d'une puissance faible ou moyenne.

En 2019, nous avions raccordé 2 gigawatts (GW) d'énergies renouvelables, principalement du solaire et de l'éolien ainsi qu'une petite proportion de biomasse et d'hydraulique. L'année dernière, en 2023, nous en avons raccordé 4,2 GW, soit une multiplication par plus de deux. La hausse est frappante non seulement en puissance, mais aussi en nombre de sites : 30 000 installations raccordées en 2019, 200 000 en 2023. Nous nous préparons à raccorder durablement 5 GW d'énergies renouvelables chaque année, la part du solaire étant devenue prépondérante par rapport à l'éolien.

Au coeur du projet industriel et humain de l'entreprise Enedis et de ses 40 000 salariés, la question des délais de raccordement est prioritaire. Nous travaillons évidemment à les diminuer, ce qui pose la question de la planification des coûts et de l'anticipation. D'ailleurs, la loi Aper de 2023 fixe des délais de raccordement que nous respectons.

Cette projection nous conduit vers la mise en oeuvre d'un scénario de référence, celui de RTE, l'objectif étant que 110 GW d'énergies renouvelables soient raccordés au réseau de distribution en 2040. Je précise que 90 % des énergies renouvelables produites en France sont raccordées au réseau de distribution et que 60 % des installations de production de ces énergies sont situées dans des communes de moins de 2 000 habitants.

Du côté de la production, nous nous préparons donc à être au rendez-vous de notre ambition.

Du côté des usages, les défis sont tout aussi majeurs.

Aujourd'hui, le parc de véhicules électriques, hybrides compris, compte 1,6 million de véhicules, la moitié des ventes du flux ayant eu lieu en 2023. Les chiffres qui sont devant nous sont vertigineux, à réglementation constante : il va falloir passer à 8 millions de véhicules électriques en 2030 et à 17 millions en 2035. Il faudra bien sûr travailler également sur le développement des mobilités douces et de l'autopartage, qui est intégré dans les projections. Ces véhicules, et notamment ces camions - car l'électrification des camions, mais aussi des engins de chantier, est désormais à l'ordre du jour -, vont devoir être raccordés, sur autoroute - nous avons équipé 95 % des aires d'autoroute -, en voirie et à domicile - 90 % de la recharge se fait à domicile.

Toujours au chapitre des usages, il va falloir accompagner également la construction, dans les prochaines années, de plusieurs centaines de milliers de logements neufs.

Tout cela doit s'accompagner de sobriété. Or nous sommes aussi un acteur important de la sobriété, grâce aux données dont nous disposons. Nous couvrons 95 % du territoire et près de 37 millions de foyers français sont équipés d'un compteur Linky, ce qui leur permet de suivre leur consommation d'électricité, ce que font 70 % de nos usagers, qui se disent suffisamment informés et équipés à cet effet.

Nous constatons un « effet sobriété » durable, donc une baisse de la consommation, qui est intégrée dans nos scénarios. Cette baisse est-elle subie, pour des raisons économiques, ou choisie, pour des raisons écologiques ? Je vous renvoie au très récent rapport d'analyse de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) sur cette question : il y est montré qu'elle est aux deux tiers subie et au tiers choisie, selon les usages. Même baisse du côté de l'éclairage public, grâce aux solutions que nous proposons aux collectivités locales, notamment la possibilité d'extinction nocturne : la consommation d'électricité liée à l'éclairage public, qui représente en moyenne 40 % de la facture d'énergie d'une commune, a diminué de 17 %.

Pour relever ce défi de la sobriété, nous nous appuyons sur la donnée. Nous mettons à la disposition des collectivités locales - cela fait partie de nos missions de service public - un portail de suivi de la consommation et, le cas échéant, de la production qu'elles sont la moitié à utiliser : on recense 18 000 comptes. Cet outil leur permet, par exemple, de savoir si tel bâtiment public consomme plus qu'il ne le devrait étant donné la démographie de la commune, sa situation géographique, la nature du bâtiment, et donc de flécher des opérations de rénovation énergétique.

Le second défi que nous avons à relever consiste à faire en sorte que notre réseau soit de plus en plus résilient aux aléas climatiques et qu'il puisse fournir à chaque Français une électricité de qualité - telle est l'autre grande orientation de nos investissements. Notre réseau, qui, je l'ai dit, est long comme 35 fois le tour de la Terre, est exposé à des aléas climatiques très variés, tempêtes, canicules, inondations ; vous avez tous en tête les dégâts de la tempête Ciarán qui a frappé la Bretagne et la Normandie en novembre dernier. Nous avons connu, en dehors des épisodes exceptionnels Ciarán et Domingos, seize tempêtes en 2023 : sans surprise, nous constatons une hausse de la fréquence des aléas climatiques, que nous avons intégrée dans nos prévisions. Nous travaillons sur le fondement des scénarios du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), que nous avons modélisés, pour nous préparer à des vents forts, à des précipitations extrêmes, à de la neige collante - phénomène dévastateur pour les réseaux que connaissent bien les élus de l'Ardèche et de la Drôme -, à des canicules, à des incendies.

Que faisons-nous pour rendre le réseau plus résistant ? Nous lançons des programmes d'enfouissement des lignes les plus exposées au vent, à la neige, au givre. Et nous remplaçons les câbles les plus susceptibles d'être frappés par des incidents, notamment ceux qui furent posés au début des années 1980.

Tous les trois ans, nous construisons un nouveau tour de Terre pour répondre aux enjeux de l'électrification du pays ; tous les quatre ans, nous rénovons et modernisons un nouveau tour de Terre pour répondre aux enjeux de la résilience climatique.

J'en viens à la question des moyens.

Nous mobilisons avant tout des moyens financiers et une stratégie d'investissement qui est planifiée à long terme : 96 milliards d'euros constants de 2021 seront investis d'ici à 2040, soit 5 milliards d'euros par an. En matière d'investissements dans les réseaux, l'effort a progressivement augmenté, décennie après décennie, pour faire face à ces enjeux de plus en plus prégnants. Voici comment se déclinent ces 96 milliards d'euros : 54 milliards pour la transition écologique, 10 milliards pour les énergies renouvelables, 7,5 milliards pour la mobilité électrique, 23 milliards pour le raccordement des consommateurs.

Ces investissements sont financés en très grande partie par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe) : quand un client s'acquitte du tarif réglementé de vente d'électricité (TRVE), un quart environ de sa facture - ce chiffre a baissé ces dernières années - est consacré à rémunérer le réseau de transport et le réseau de distribution, le reste servant à rémunérer la production et la fourniture - 50 % - et à payer les taxes - 25 %.

Nous sommes très attentifs à la soutenabilité de ce tarif, qui est fixé pour quatre ans. Cela suppose que nous soyons une entreprise performante, donc que nous travaillions à faire des gains de productivité, à simplifier nos processus, à satisfaire nos clients. Les discussions vont commencer avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) sur la future période de tarification, qui s'ouvrira mi-2025.

Nos investissements augmentent à mesure qu'augmentent les consommateurs et les points de livraison : il y a là un cercle équilibré, qui garantit durablement la soutenabilité de la part du tarif revenant au distributeur.

J'en viens à un deuxième levier : la simplification et la fluidification des processus.

Mener à bien un projet de développement d'énergies renouvelables ira toujours plus vite, par définition, que de construire une infrastructure. Il faut donc anticiper, programmer, planifier, d'autant que les territoires dans lesquels nous opérons avec les collectivités vont être « déformés » sous l'effet du changement climatique. C'est bien pourquoi nous parlons non pas de transition « énergétique », mais de transition « écologique » : il nous faut également prendre en compte l'impact social, sociétal et environnemental de nos activités sur lesdits territoires. Nous sommes d'ailleurs devenus, l'année dernière, la première entreprise à mission parmi les grandes entreprises du secteur de l'énergie, car nous pensons que nous avons une responsabilité particulière à assumer.

Nous devons travailler tous ensemble à simplifier les procédures de concertation - je vous renvoie à ce propos aux discussions sur la circulaire dite Fontaine, la circulaire du 9 septembre 2002 relative au développement des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité - ou le partage des compétences - il serait bon que certaines compétences passent du ministre au préfet afin de raccourcir les délais. Il faut aussi simplifier les modalités d'autorisation et se doter d'une vision globale des demandes de permis de construire, afin d'anticiper les phases d'étude préalable. L'infrastructure dont nous parlons est une infrastructure maillée, solidaire - c'est là toute sa beauté -, qui repose sur la péréquation : chaque client bénéficie du même service au même prix, quelle que soit son niveau de revenu et sa situation par rapport au réseau : en Lozère, où il y a plus de moutons que de clients, comme en région parisienne.

Troisième levier : la planification. Où installe-t-on les bornes de recharge électrique ? Où engage-t-on les projets de développement d'énergies renouvelables ? Il faut une visibilité à court et à moyen terme, donc une planification chiffrée avec un scénario de référence, mais également un travail zone par zone ; c'est pourquoi nous sommes membres des comités régionaux de l'énergie, qui viennent d'être créés en application de la loi Aper de 2023. La plupart de ces comités en sont déjà à leur deuxième réunion ; ils sont en train d'engager leurs travaux en détail. L'idée est de mettre en adéquation l'offre et la demande de projets d'énergies renouvelables ; nous travaillons par exemple avec RTE à rendre possible la visualisation des zones où il sera plus rapide et moins cher qu'ailleurs d'installer des unités de production d'énergies renouvelables, car le réseau y est bien dimensionné.

J'ai dit que 60 % des installations étaient situées dans des communes de moins de 2 000 habitants. Évidemment, ces communes ont l'électricité - nous sommes en France ! -, mais le réseau n'avait pas été dimensionné, en bout de ligne, pour accueillir autant d'installations : c'eût été gâcher l'argent public. Le défi est donc désormais de le mettre à niveau.

Cela a été souligné, le défi n'est pas seulement financier, technique et technologique ; il est également humain. Nous avons besoin d'attirer de futurs salariés vers nos métiers d'avenir. C'est pourquoi nous avons lancé, avec l'ensemble de notre filière des réseaux électriques - qui regroupe 1 600 entreprises et 100 000 emplois -, les écoles des réseaux pour la transition énergétique. Nous y accueillons, en stage, des élèves de première et de terminale de bac professionnel. Nous avons aujourd'hui 100 lycées partenaires, partout en France ; dès l'année prochaine, le dispositif sera étendu aux élèves en brevet de technicien supérieur (BTS), et le nombre de lycées concernés sera doublé.

Nos relations avec les collectivités locales propriétaires des réseaux sont consubstantielles à notre activité, donc extrêmement étroites. Chaque maire a la ligne directe d'un interlocuteur privilégié Enedis. Je constate lors de chaque congrès des maires l'efficacité d'un tel maillage territorial. Nous n'avons procédé à aucune mutualisation ou réduction car nous continuons de croire à la proximité des échanges humains.

À ce jour, les contrats de concession sont renouvelés à 95 %. Le modèle de cahier des charges que nous avons élaboré avec la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) et France Urbaine en 2017 est un grand succès ; il a permis le renouvellement des contrats, qui sont très souvent assortis d'une convention de transition écologique.

Le rôle du CAS Facé dans l'électrification rurale - vous y avez fait référence - est évidemment très important. Nous souhaitons que cet outil remplisse pleinement ses missions et soit totalement centré sur l'électrification, la résilience et la qualité des réseaux.

M. Patrick Chauvet. - J'aimerais avoir votre avis sur l'application des dispositions de la loi Aper de 2023 qui concernent les réseaux électriques. La réforme des raccordements au réseau des projets d'électricité renouvelable prévue par l'ordonnance prise en application de l'article 26 de cette loi vous paraît-elle satisfaisante ? Les délais de raccordement qui, en vertu des articles 105 et 106 de la loi, sont d'un mois pour les petites installations dont la puissance ne dépasse pas trois kilovoltampères (kVA) et de douze mois pour les autres, sont-ils tenables ? Je rappelle que ces délais avaient été institués dans cette loi à l'initiative de l'Assemblée nationale.

Est-ce au gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité de se charger de la répartition du développement de la production des énergies renouvelables ? N'y a-t-il pas plutôt là un enjeu d'aménagement du territoire ? Si le développement de la production devait dépendre du nombre de consommateurs, voilà qui serait une très mauvaise nouvelle, une de plus, pour les territoires les plus ruraux. Avez-vous les moyens de garantir une répartition équitable de l'implantation de la production d'énergies renouvelables sur l'ensemble du territoire français ?

M. Daniel Gremillet- La Cour des comptes a publié cette année un rapport portant pour partie sur l'adaptation au changement climatique des réseaux de transport et de distribution d'électricité. Vous avez évoqué les investissements, et nous avons pu toucher du doigt le coût exorbitant d'un système entièrement enterré. Quelles sont, selon vous, les perspectives ?

Vous l'avez indiqué, un « ripage » va avoir lieu de la consommation fossile vers le « tout électrique ». Dès lors, les coupures d'électricité risquent de prendre des proportions énormes. La responsabilité du gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité sera donc bien plus grande. Quel regard portez-vous sur les innovations qui permettraient de renforcer la résistance des réseaux et de mieux répondre aux attentes des territoires ?

Parmi ses préconisations, la Cour a appelé à publier le décret d'application des plans de développement de réseau, issus de l'ordonnance du 3 mars 2021, prise en application de l'article 39 de la loi « Energie-Climat » de 2019, et à instituer un contrat de service public entre l'État et Enedis, sur le même modèle que celui de RTE. Partagez-vous ces préconisations ? Les plans précités présentent-ils effectivement des difficultés en termes d'adaptation ou d'application ?

Vous avez beaucoup insisté sur les énergies renouvelables et sur l'autoconsommation. Or le succès du modèle français de distribution d'électricité dans tous les territoires s'explique par la mutualisation. Qu'en sera-t-il demain, eu égard notamment au développement de l'autoconsommation ?

M. Pierre Cuypers. - Quels sont les objectifs et les résultats du déploiement des compteurs communicants Linky ? En quoi ces derniers peuvent-ils nous aider à atteindre nos objectifs de sobriété et d'efficacité énergétiques ?

Quel est votre avis sur le projet de décret présenté l'an dernier devant le Conseil supérieur de l'énergie, sur le fondement de l'article 30 de la loi Aper de 2023, pour autoriser la réduction à distance de la puissance des compteurs en cas de difficultés pesant sur la sécurité d'approvisionnement ?

M. Franck Menonville. - Pouvez-vous nous présenter vos projets en matière de développement des réseaux électriques intelligents, ou smart grids, qui combinent le numérique et l'électricité ? En quoi ceux-ci peuvent-ils permettre de mieux maîtriser la demande, sécuriser la fourniture, intégrer les énergies renouvelables et répondre aux nouveaux usages, et notamment à la généralisation des véhicules électriques ?

Quels projets de démonstrateurs pilotez-vous ou accompagnez-vous en tant que partenaire ? Quels en sont les objectifs, les coûts, les sites d'implantation et le calendrier ?

M. Jean-Jacques Michau. - Quel est votre point de vue sur la place des réseaux électriques dans les réformes nationales et européennes en cours ?

Dans l'avant-projet de loi sur la souveraineté énergétique, en suspens, les réseaux électriques ne figurent ni au chapitre des objectifs programmatiques, ni à celui des souplesses administratives, ni à celui des soutiens financiers. Ils sont également largement omis des textes européens, comme la taxonomie verte, le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » (Fit for 55), la réforme du marché européen de l'électricité ou le projet de règlement « Industrie à zéro émission ». Faut-il corriger le tir ? Si oui, comment ?

Mme Marianne Laigneau. - Comme vous avez certainement dû le sentir dans mon propos liminaire, nous estimons que la place des réseaux est extrêmement importante. Le réseau n'est peut-être pas l'alpha et l'oméga de tout débat sur l'énergie. Ce débat est extrêmement focalisé sur le mix électrique, avec le nucléaire versus le renouvelable ; c'est bien sûr important, reste que rien ne peut se faire sans le réseau.

À l'échelle nationale, nous nous félicitons donc que les réseaux soient mentionnés parmi les cinq objectifs de la stratégie française énergie-climat (SFEC). À notre connaissance, c'est une première, et le signe d'une prise de conscience.

Quant à l'Europe, si elle est en effet passée complètement à côté de l'enjeu des réseaux dans tous ses derniers paquets législatifs, les choses ont bien changé récemment : le EU Action Plan for Grids, ou plan d'action pour les réseaux, a été élaboré voilà quelques mois par la Commission européenne et il va donner lieu à des textes. Nous bénéficions de la taxonomie verte, qui fait mention des réseaux. Cela nous permet d'accéder aux financements de la Banque européenne d'investissement (BEI).

Pour ce qui est de la part intelligente des réseaux, nous n'en sommes plus au stade des démonstrateurs : nous en sommes à la phase industrielle. Pour la deuxième année, Enedis a été désigné gestionnaire de réseau de distribution le plus « intelligent » au monde par l'indice de Singapour, précisément pour sa capacité à accueillir des énergies renouvelables dotées d'une bonne empreinte environnementale, à utiliser les données et les outils technologiques, dont l'intelligence artificielle, à satisfaire ses clients, à fournir une électricité de qualité. Je donne un exemple : sachant qu'une tempête très forte allait arriver en Bretagne, nous avons combiné les modèles de Météo-France avec les nôtres, ce qui nous a permis d'identifier par anticipation, avec une faible marge d'erreur - de 5 % environ -, les points où des cassures risquaient de se produire, d'y prépositionner nos techniciens d'intervention et, in fine, d'être plus efficaces dans les réparations.

Nous réformons notre outil de conduite pour faciliter l'intégration des énergies renouvelables. Il faut piloter le réseau comme une grande infrastructure, c'est-à-dire à base de données, d'intelligence artificielle, de technologies de communication.

Linky, c'est un grand projet industriel, livré dans le délai fixé et en dessous du budget prévu. Nous devions équiper plus de 30 millions de compteurs entre 2016 et 2021. Nous l'avons fait, et à un coût inférieur : 4 Mds d'euros in fine, contre 4,7 Mds initialement. Les bénéfices sont doubles. D'une part, cela nous permet de piloter le réseau de manière beaucoup plus prédictive et agile, car nous voyons ce qui se passe grâce aux données collectées par les comptes, notamment sur la basse tension. D'autre part, selon l'Ademe, le compteur Linky, combiné à des offres adéquates des fournisseurs, permet une baisse de la consommation du client pouvant aller jusqu'à 12 %. C'est donc un facteur d'économies, d'autant que tout se fait à distance : relevé de consommation, déménagement, augmentation de puissance, etc.

En cas de déséquilibre entre ce que la France produit et ce qu'elle consomme, le réseau n'est pas en cause, mais c'est à lui d'agir pour éviter ce que l'on appelle le délestage. Des mesures de sauvegarde ont été mises en place avec RTE. Parmi ces mesures, nous avons mené une expérimentation, consistant en une baisse de puissance jusqu'à 3 kVA, plutôt qu'en une coupure d'électricité de deux heures, après une grande campagne d'information des clients, afin qu'ils adaptent leurs usages à cette perspective. Cette expérimentation a été conduite auprès de 120 000 clients dans le Puy-de-Dôme voilà quelques semaines. Elle a constitué un succès sur le plan de la technique, de l'information et du résultat, avec des baisses de consommation de 20 à 25 %, par anticipation. Il faudrait généraliser cette expérimentation, pour répondre à des besoins plus larges.

La question de l'autoconsommation est très importante, étant entendu que l'autoconsommation a besoin du réseau. Dans le cas de l'autoconsommation collective, les bâtiments sont connectés entre eux par le réseau, qui certifie les flux d'énergie produite et d'énergie consommée. De manière générale, nous sommes très favorables à l'autoconsommation, individuelle comme collective ; d'ailleurs, nous accompagnons l'autoconsommation collective. Il y a aujourd'hui 350 opérations d'autoconsommation collective en France, et 400 sont en cours de développement. Il y en avait beaucoup moins il y a trois ans. Nous y sommes favorables, je l'ai dit, mais à trois conditions. Tout d'abord, de telles opérations doivent se faire avec le réseau. Ensuite, tout doit rester fondé sur la péréquation, ce qui exclut les tarifs locaux avec leurs conséquences sociales, économiques et techniques. Cela ne correspondrait pas au « modèle français ». Enfin, il faut une capacité de comptage et de certification. Il me paraît important qu'un acteur comme Enedis ait toute sa place dans ce genre de démarches pour certifier, via le compteur Linky, les flux échangés entre les acteurs des projets d'autoconsommation.

Monsieur le sénateur Daniel Gremillet, les coûts liés à la résilience des réseaux électriques au changement climatique ne sont pas « exorbitants » ; ils sont simplement en progression, de 4,9 Mds en 2023 à 5 ou 5,5 Mds en 2024. Le coût serait exorbitant si l'on voulait enfouir tous les réseaux.

M. Daniel Gremillet. - C'est précisément ce dont je parlais !

Mme Marianne Laigneau. - Le coût d'un enfouissement total serait bel et bien exorbitant, de l'ordre de 120 milliards d'euros à 150 milliards d'euros. Le réseau est aujourd'hui à moitié souterrain et à moitié aérien ; nous l'entretenons et nous le modernisons. En revanche, ce que nous construisons, c'est-à-dire le neuf, est enfoui à 95 %.

Le réseau est évidemment aussi un levier de l'aménagement du territoire. Les projets en la matière sont le fait d'acteurs qui ont leurs propres contraintes. Nous sommes là pour les accompagner et pour tenir compte de leurs besoins, tout comme eux doivent tenir compte des capacités actuelles des réseaux, que nous nous efforçons de renforcer.

Nous avons construit trois postes source en 2023 et allons en construire six en 2024. Puis nous en construirons huit par an jusqu'en 2030, puis quatorze par an. Nous mettons les moyens nécessaires mais certains postes source sont déjà saturés du fait de schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR) déjà un peu anciens.

Par ailleurs, nous avons du mal à faire valoir la nécessité d'une exemption de nos postes source au titre de l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN), alors que RTE en bénéficie quant à lui. Voilà quelque chose de très concret que nous souhaiterions voir évoluer.

Ma conviction est en tout cas que les objectifs sont tenables et les défis relevables, à condition de se doter d'une planification beaucoup plus volontariste, assumée et collaborative.

M. Laurent Duplomb. - Il est de plus en plus difficile d'investir dans le photovoltaïque.

D'abord, les délais de raccordement sont de plus en plus longs : six ou sept mois en moyenne, quand il est question de trois mois pour la complétude du dossier dans vos documents. Cela a nécessairement un impact sur le tarif de rachat de l'électricité.

Ensuite, il est impossible de connaître la méthode de calcul qui détermine quel sera le tarif de rachat de l'électricité trimestre après trimestre : le barème n'est pas public.

Enfin, il n'est pas non plus possible de savoir comment est calculé le coefficient KN, qui permet l'indexation du tarif définitif.

Tous ceux qui veulent investir dans le photovoltaïque sont dans une forme de flou artistique. Nous sommes en pleine injonction contradictoire : d'un côté, on nous exhorte à faire des investissements lourds en faveur des énergies vertes ; de l'autre, on nous met des boulets aux pieds qui nous empêchent d'avancer.

M. Philippe Grosvalet. - En Loire-Atlantique, nous sommes pionniers en matière de transition énergétique, grâce à notre parc éolien offshore. Vous avez évoqué les événements climatiques qui ont frappé notre région ; l'ouest de la France, me semble-t-il, est toujours en première ligne face aux grandes tempêtes.

Vous avez énuméré vos objectifs, qui sont ambitieux : recrutement de jeunes dans les métiers du futur ; présence partout sur le territoire ; mise à disposition de votre expertise au service de nos collectivités ; réduction par deux des délais de raccordement des clients ; rétablissement de 90 % des clients en 48 heures, etc.

Mais vous avez omis de nous parler de votre principal patrimoine : le patrimoine humain, c'est-à-dire les quelque 40 000 femmes et hommes qui sont les dépositaires de votre premier capital, j'ai nommé les savoir-faire. Ces métiers sont sensibles, difficiles et dangereux. Comment expliquer à cet égard que, le 16 décembre 2022, on nous ait annoncé en votre nom et sans aucune concertation avec les élus locaux la fermeture en 2025 du centre de formation de Saint-Étienne-de-Montluc, sous prétexte que les locaux seraient vétustes et les loyers élevés ? Vous venez de dire que lorsqu'un réseau est vétuste vous investissez pour le moderniser... Pourquoi refusez-vous de vous asseoir autour de la table et de vous associer à l'ambitieux projet territorial que défendent la communauté de communes et toutes les parties prenantes locales, celui d'un campus de la transition énergétique réunissant les principaux acteurs de l'énergie ? Pourquoi refusez-vous ce dialogue ? Pourquoi ne répondez-vous pas aux sollicitations multiples qui vous sont adressées ? Pourquoi nous abandonnez-vous ?

M. Gilbert Favreau. - Je suis élu d'un département rural, les Deux-Sèvres, dans lequel la distribution de l'électricité est opérée pour partie par Enedis et pour partie par un syndicat intercommunal : le syndicat intercommunal d'énergie des Deux-Sèvres (SIEDS). La question est de savoir comment l'accord peut être passé avec Enedis sur la distribution d'électricité. Quid des réseaux qui approvisionneront le syndicat intercommunal ? Tout cela a-t-il été prévu dans votre programme des années à venir ?

Mme Marianne Laigneau. - Les tarifs de rachat de l'électricité, qui sont évidemment cruciaux pour apprécier la rentabilité d'un projet photovoltaïque, ne sont pas du ressort d'Enedis. Ce qui relève de notre responsabilité, ce sont les délais de raccordement.

Je vous incite à aller sur notre application Le Mix, disponible en open data ; y sont recensés de manière très transparente l'ensemble de nos projets d'énergies renouvelables en développement qui sont entrés dans « la file ». Comme je vous l'ai indiqué, nous raccordons environ 5 GW chaque année, contre 2 GW voilà trois ans. Or on compte 20 GW dans cette file. Même si 10 à 15 % des projets étaient abandonnés en cours de route, c'est un défi industriel et technique, qui représente quatre ans de travail.

La loi Aper de 2023 a réduit de moitié les délais, qui sont passés de deux à un mois pour les petits producteurs et de dix-huit à douze mois pour les grands producteurs. Le début de l'année 2023 a été difficile, marqué par un afflux de petits producteurs et il y a évidemment des différences entre les territoires, mais nous sommes à un mois dans le premier cas et à 275 jours dans l'autre, en moyenne.

Je connais bien la situation particulière du centre de formation de Saint-Étienne-de-Montluc. Je vous rassure, monsieur le sénateur Philippe Grosvallet : nous ne refusons pas le dialogue. Je rencontrerai Mme la présidente de région et l'ensemble des parties prenantes dans quelques jours. C'est également une question portée, de manière très forte, par les syndicats de notre entreprise. Enedis consacre 7 % de sa masse salariale à la formation, donc au capital humain ; peu d'entreprises en font autant. Nous avons seulement 15 % de cadres, dont la moitié n'étaient pas cadres en entrant chez Enedis. Et 50 % des agents d'exécution deviennent des agents de maîtrise après dix ans. Nous sommes de ces entreprises qui font fonctionner l'ascenseur social. Cela fait partie de notre rôle et nous y consacrons des moyens.

Et nous devons également être un acteur efficace : nous rendons compte de nos coûts, car nos coûts, ce sont les factures des clients. Nous avons mis en place voilà quelques années un programme de réorganisation et d'amélioration de la performance de nos actions de formation consistant à regrouper des campus plutôt qu'à laisser subsister des pôles plus locaux, indépendamment des questions de vétusté ; mais le sujet est en cours de discussion.

Nos relations avec Gérédis, le gestionnaire du réseau de distribution d'électricité des Deux-Sèvres, sont tout à fait excellentes. Nous prenons en compte leurs besoins et nous les secourons quand ils subissent des avaries sur leur réseau ; nous pouvons aussi compter sur leur solidarité. Comme cela a été rappelé, 5 % du territoire est couvert par des régies, le reste par Enedis.

M. Daniel Salmon. - La sobriété énergétique suppose un consommateur éclairé. Or une large méconnaissance de la réalité des consommations règne aujourd'hui chez nos concitoyens. La loi du 17 août 2015 de transition énergétique pour la croissance verte, dite « Transition énergétique », prévoyait la mise en place d'afficheurs déportés pour les compteurs Linky ; le décret est arrivé cinq ans plus tard, accouchant d'une souris. Les afficheurs déportés sont réservés à une infime minorité de ménages, qui doivent en faire la demande et bénéficier du chèque énergie.

Avez-vous des retours quant aux installations de compteurs Linky ? En tant qu'élu local, j'ai entendu s'exprimer beaucoup d'inquiétudes, voire d'oppositions. Sont-elles levées ?

Le cuivre, qui est une denrée de plus en plus rare, va se renchérir. A-t-on des estimations des besoins à venir et des coûts induits ?

On parle beaucoup des « courants fantômes » sur certaines installations. J'ai visité récemment un parc éolien et des éleveurs m'ont dit être confrontés à ce problème. Or je ne crois pas beaucoup aux fantômes. Y a-t-il vraiment des courants ? Des études sont-elles réalisées à ce propos ?

M. Fabien Gay. - Si l'on a pu développer le réseau électrique, le mutualiser et réussir la péréquation tarifaire, c'est parce qu'il y avait un service public de l'énergie au lendemain de la guerre ; il est parfois bon de le rappeler... Pour sortir des énergies fossiles, il faudra déployer les réseaux. Pourra-t-on le faire en continuant à éclater le service public et à autoriser que les plus riches contractent directement des contrats de long terme (Power Purchase Agreements) en abandonnant le réseau aux plus pauvres ?

Raccorder les équipements d'autoconsommation, cela coûte cher, sans compter que de telles installations sont propices aux arnaques aux panneaux solaires. Il y a, me semble-t-il, du ménage à faire en la matière.

L'entreprise Enedis va-t-elle rester à 100 % filiale d'EDF, qui a été réétatisée et pas renationalisée ? Le Gouvernement veut faire rentrer par la fenêtre ce qui est sorti par la porte, en l'occurrence le projet Hercule, c'est-à-dire scinder l'entreprise en deux ou trois entités distinctes, afin de pouvoir ouvrir certaines de ces entités à des capitaux privés. Avez-vous l'assurance que le capital d'Enedis n'évoluera pas, car votre entité est rentable ? Cette question intéresse la représentation nationale et les collectivités territoriales.

Dans une belle entreprise comme Enedis, le capital humain, c'est extrêmement important. Je sais qu'il y a actuellement des discussions salariales, comme dans toutes les entreprises. Pour l'instant, l'intéressement, pour les salariés d'Enedis, c'est zéro ! Les négociations vont-elles continuer ? Les salariés sont évidemment touchés par l'inflation.

M. Christian Redon-Sarrazy. - Les compteurs Linky étant communicants, des flux de données importants circulent. J'imagine que les incidents de 2022 relèvent du passé et que tout est maintenant réglé.

Où sont hébergées les données que vous collectez ? Où en êtes-vous en matière d'utilisation de l'intelligence artificielle ? Cette technologie ouvre sans doute des perspectives intéressantes du point de vue des économies d'énergie et de l'optimisation des dépenses pour le consommateur...

Mme Marianne Laigneau. - Les Français sont désormais équipés à près de 95 % de compteurs Linky, et le taux de satisfaction est bon, après des débuts - cela a été rappelé - difficiles. Beaucoup d'inquiétudes étaient infondées autour de la question des ondes et de la protection des données. En termes d'émissions d'ondes, un compteur Linky, c'est l'équivalent d'un volet roulant ou d'un babyphone. Et non, le compteur Linky ne nous permet pas de savoir à quel moment nos clients prennent leur douche ! Cette période est derrière nous. Aujourd'hui, les bénéfices pour le client, notamment sur la facture, sont beaucoup plus perceptibles car il existe désormais une vingtaine d'offres de fournisseurs calées sur les fonctionnalités du compteur Linky. Il reste quand même des opposants irréductibles, comme face à toute technologie nouvelle ; nous discutons avec eux. Je précise que nous avons gagné tous les contentieux sur ces questions.

La question de l'électrosensibilité concerne plus les réseaux publics de transport d'électricité que ceux de distribution. Pour ce qui concerne les atteintes aux élevages, les études sérieuses réalisées par des organismes externes peuvent également, me semble-t-il, dissiper les craintes.

Les compteurs Linky n'occasionnent aucune fuite de données : vous vous doutez bien que l'infrastructure, eu égard à son importance stratégique, est protégée par des dispositifs de cybersécurité sophistiqués. Nous manipulons chaque jour 500 millions de données de consommation, notamment auprès des fournisseurs - il en existe 80 au total en France - qui nous en font la demande.

Monsieur le sénateur Fabien Gay, je partage votre attachement au service public, qui est au coeur du projet d'entreprise des 40 000 salariés d'Enedis. Nous considérons le service public comme une notion moderne. Nous agissons - telle est notre mission - comme un service public de distribution d'électricité innovant, performant et solidaire.

Les questions qui ont trait à la propriété du capital relèvent davantage de mon actionnaire, le groupe EDF, voire de l'État, qui est l'actionnaire suprême en quelque sorte. Mais je pense que les textes, y compris de niveau constitutionnel, sont clairs : compte tenu de ses missions et des droits exclusifs qui lui sont confiés, Enedis doit rester une entreprise publique. Je n'ai connaissance, à l'heure actuelle, d'aucun projet d'ouverture de son capital. Nous avons les moyens de nous développer au sein d'EDF, qui consacre chaque année 25 % de ses investissements aux réseaux de distribution.

L'intéressement, chez Enedis, n'est pas de zéro euro : il est de 1 800 euros - tout comme ces dernières années, en moyenne. La baisse constatée par rapport à l'année dernière est liée à nos résultats opérationnels, dans un contexte où nous avons été confrontés à seize tempêtes, ce qui est tout à fait exceptionnel.

Notre politique salariale est responsable, mais ambitieuse. Nous réservons une bonne part de la valeur ajoutée dégagée par Enedis à nos salariés, qui exercent vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, des missions de service public. En 2022-2023, nous avons fait plus que largement couvrir l'inflation, en consentant des augmentations salariales de 13,5 %. Et c'est la même chose ces quinze dernières années. J'ajoute qu'en quatre ans, le taux d'engagement des salariés d'Enedis a progressé de quinze points. Nous utilisons d'ores et déjà beaucoup l'intelligence artificielle, par exemple pour identifier les besoins de réparation. Il s'agit évidemment d'une technologie très prometteuse du point de vue du pilotage de la consommation.

Mme Amel Gacquerre. - Dans son rapport publié le 12 mars, la Cour des comptes insiste sur la nécessaire adaptation des réseaux de distribution d'électricité au changement climatique. Les réseaux sont particulièrement sensibles aux épisodes de plus en plus intenses que nous connaissons. Lors des récentes inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais, 10 000 foyers ont été privés d'électricité. Comment anticipez-vous de tels risques ou situations d'urgence ?

M. Daniel Laurent. - Quels sont les investissements prévus par Enedis en matière de stockage de l'énergie ? Cette question est importante là où il s'agit d'optimiser la gestion des réseaux.

Lors du dernier congrès de la FNCCR, qui s'est tenu à Rennes au mois de septembre 2022, vous avez déclaré qu'« Enedis n'oublie pas le réseau basse tension » et que vous serez conduits à « éradiquer les fils nus » : vous avez annoncé vouloir supprimer plus de 25 000 kilomètres de fils nus, soit la quasi-totalité du stock, d'ici à 2035.

S'il paraît envisageable que ce résultat soit obtenu dans les territoires ruraux, grâce aux syndicats d'énergie et au CAS Facé, comment pensez-vous atteindre un tel objectif dans les communes situées en site urbain, où l'enfouissement de l'ensemble des réseaux aériens peut coûter jusqu'à 500 000 euros par kilomètre ? Les subventions accordées par Enedis dans le cadre de l'article 8 du contrat de concession - le taux retenu est de 40 % - n'y suffiront pas...

M. Bernard Buis. - Combien de bornes événementielles avez-vous installées sur les sites olympiques parisiens ? Comment vont-elles fonctionner ? Et qu'allez-vous en faire une fois l'événement passé ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Notre collègue Daniel Salmon m'indique qu'il n'a pas obtenu de réponse à deux de ses questions, sur les afficheurs déportés et sur le cuivre.

Mme Marianne Laigneau. - L'approvisionnement, ou supply chain, est une question clé pour Enedis. Nous faisons travailler toute une filière qui nous livre des câbles, des tôles, des postes de distribution, des matériaux, et qui effectue pour nous des travaux. Je suis heureuse de constater que ce sujet de la supply chain industrielle, mais aussi celui des compétences, sont davantage présents dans notre environnement de réflexion, tant en France qu'en Europe. Cela vaut aussi pour les réseaux.

Nous utilisons du cuivre, dont le prix a énormément augmenté ; cela fait partie des hausses de coûts que nous devons absorber. Vous auriez pu aussi citer la tôle, mais également l'aluminium, que nous utilisons beaucoup dans la fabrication des câbles. Au sujet du prix s'ajoute celui de la disponibilité : de manière générale, nous sommes pris dans une compétition internationale pour l'accès à ces matériaux, qui deviennent plus chers et plus rares. Enedis réalise 6 milliards d'euros d'achats par an, dont 90 % en France, et à 50 % auprès de TPE et de PME - nous sommes pleinement, ce faisant, dans notre mission sociale et de service public.

Je vous ferai ultérieurement une réponse plus précise sur les afficheurs déportés, car je dois procéder à quelques vérifications pour vous répondre exactement.

Dans le Nord-Pas-de-Calais, des postes sources ont été inondés, qui ne l'avaient jamais été auparavant. Nous prenons en compte ces évolutions dans la définition des risques climatiques auxquels nous sommes exposés et dans la planification de nos nouveaux investissements : nous ne localisons pas d'installations sur le trait de côte, qui est appelé à reculer dans cinq ou dix ans. L'installation d'un poste source - qui coûte 5 millions d'euros - se fait pour quarante ou pour cinquante ans...

Le risque d'inondation existe aussi à Paris ; il est pris en compte et modélisé. Le poste source du pont de l'Alma est ainsi équipé de systèmes anti-inondations.

Le stockage relève plutôt du volet concurrentiel, mais nous raccordons les installations de stockage - c'est néanmoins assez marginal. Nous avons raccordé 400 mégawatts (MW) l'année dernière : nous ne sommes donc pas à la hauteur des 4 GW d'énergies renouvelables. Nous travaillons évidemment avec les stockeurs, tant à l'échelle nationale qu'à l'échelle locale, sur l'équilibre du réseau, dont l'évolution va tendre, demain, vers plus d'énergies renouvelables, plus de batteries, plus de stockage. Dans ce contexte, le pilotage de la boucle locale devient absolument crucial, autant que l'est l'équilibre global - national - du système électrique.

L'article 8 du contrat-cadre de concession concerne les spécialistes de ce contrat...

M. Daniel Laurent. - Je suis un ancien président de syndicat d'énergie !

Mme Marianne Laigneau. - Nous en débattons actuellement avec la FNCCR. J'ai bon espoir que nous aboutissions à un accord dans le cadre du prochain congrès, qui se tiendra à Besançon en juin 2024.

Je vous remercie d'avoir mentionné les jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), qui sont un bon exemple du changement de mentalité auquel nous devons nous préparer, et auquel nous contribuons. Sachez que lorsque vous assistez à un grand événement sportif ou culturel, le stade fonctionne sur groupe électrogène diesel. Évidemment, il y a de l'électricité au Stade de France, mais, par culture et pour éviter les microcoupures dans des retransmissions télévisées d'envergure mondiale, les opérateurs avaient l'habitude d'utiliser des groupes électrogènes diesel. Nous avons travaillé avec le Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) et le Comité international olympique (CIO), pour passer du diesel à une utilisation du réseau en premier recours. Aussi avons-nous réalisé 100 millions d'euros de travaux sur 8 000 chantiers, toutes les installations sportives des jeux Olympiques étant concernées, pour rendre possible ce changement d'habitude. À titre de solution de secours, des groupes électrogènes seront bel et bien disponibles, mais ils seront majoritairement à batterie - sans émissions de soufre ni de CO2.

Autre dispositif visant à faire des JOP de Paris des Jeux verts et responsables : les bornes événementielles. Si le responsable du Cojop peut estimer que ces Jeux seront responsables, c'est, du reste, pour les trois raisons suivantes : les logements des athlètes seront réutilisés ; les déplacements se feront majoritairement en transports en commun ; Enedis fournira une énergie décarbonée.

Les bornes événementielles seront placées dans des lieux particuliers où se tiendront des manifestations éphémères, comme le centre de la place de la Concorde, étant entendu que le réseau n'y est pas dimensionné pour accueillir une immense compétition ou un immense concert. Avec la Mairie de Paris et grâce au soutien financier de l'Ademe, nous allons enfouir dans le sol des bornes de branchement qui pourront être rendues accessibles par télécommande afin de raccorder ces événements ponctuels au réseau, leur offrant la puissance électrique requise. Cette innovation permet de se passer d'investissements lourds et chers pour raccorder des lieux où, ordinairement, nul ne consomme ni n'habite ! Nous avons d'ores et déjà installé plus d'une dizaine de ces bornes, et d'autres sont en projet. Nous souhaitons généraliser ce dispositif à d'autres localités, y compris en dehors des JOP.

M. Patrick Chaize. - Linky était un dispositif important et attendu. En tant qu'utilisateur, je suis assez surpris du manque de formation et d'information qui l'entoure, s'agissant d'expliquer tout l'intérêt de ce compteur en tant qu'outil domotique de gestion et d'accompagnement de la consommation.

La résilience est un sujet de toute première importance pour nos réseaux de communication : dès lors qu'il n'y a plus d'énergie, il n'y a plus de téléphonie mobile ni de fibre optique... Disposez-vous d'un plan structuré pour garantir la viabilité des réseaux de communication de demain ?

M. Franck Montaugé. - J'ai une pensée pour Frédéric Despeaux, agent d'Enedis mort en service pendant le rétablissement des réseaux électriques en Bretagne il y a quelques mois, ainsi que pour sa famille. Son histoire dit la grandeur et la servitude du service public.

Je m'associe aux propos de Philippe Grosvalet à propos du site de Saint-Étienne-de-Montluc : il serait dommage que ferme une école qui a contribué à la formation de sénateurs... Vous avez eu raison de dire qu'au Sénat une place importante est donnée à la promotion sociale ; certains d'entre nous en sont des exemples.

Envisagez-vous que puissent se multiplier les zones d'autoconsommation totalement déconnectées du réseau de distribution ? Des solutions de stockage pourraient permettre de faire face à des coupures totales. L'avenir est-il à ce genre d'installations ? Le cas échéant, quelles seraient les conséquences d'une telle évolution sur ce qu'il reste de péréquation tarifaire en matière de transport et de distribution d'électricité ?

Quelles relations entretenez-vous avec l'écosystème dense, touffu, des start-up qui travaillent sur la résilience et la flexibilité du réseau ? Il fut un temps où la direction de la recherche d'EDF « challengeait » les entreprises privées dans le développement de certaines solutions techniques. Est-ce toujours le cas, ou êtes-vous seulement en mesure désormais de choisir parmi les solutions que vous propose cet écosystème ? Les liens sont-ils étroits entre Enedis et les start-up ?

M. Guislain Cambier. - Je serai taquin, à l'instar de notre collègue Fabien Gay. À Hellemmes, dans le Nord, pour quelques centaines de mètres, le coût du raccordement d'un projet de consommation et de production d'énergies renouvelables atteint 112 000 euros, en l'absence de toute difficulté technique particulière. Or Enedis récupérera son investissement, car la consommation sera au rendez-vous.

Comment s'assurer qu'un tel coût ne comprend que le raccordement et ne sert pas également à la rénovation du réseau ? Menez-vous une politique volontariste pour développer les énergies renouvelables, notamment dans les unités agricoles ?

Mme Marianne Laigneau. - Nous donnons à nos clients toutes les informations nécessaires sur le fonctionnement et l'utilité du compteur Linky, par contact téléphonique ou via la mise à disposition d'un site internet grand public, l'Observatoire français de la transition écologique, qui rassemble de nombreux articles et des données déclinées jusqu'à l'échelle de la commune ; on y trouve, pour chaque territoire, le niveau de consommation et de production, le nombre de compteurs Linky installés, le profil global de consommation. Nous nous efforçons de renforcer notre communication autour des bénéfices de Linky, mais un tel effort incombe aussi aux fournisseurs.

Monsieur le sénateur Patrick Chaize, électricité et communication sont de plus en plus liées. La fiabilité de la partie « télécoms » de notre activité, dans laquelle nous investissions beaucoup, est cruciale. Plus largement, nous travaillons intensément, depuis plusieurs années, à l'élaboration de plans de délestage - j'ai évoqué le cas d'une pénurie de la production d'électricité par rapport à la consommation. Nous avons beaucoup travaillé avec les opérateurs télécoms pour identifier leurs besoins, dans le cadre des tempêtes Ciarán et Domingos notamment. Nous avons ainsi recensé leurs « points critiques », ou « backbones », qui doivent être alimentés en priorité en cas d'incident climatique ou de délestage. Ce travail, encouragé par les services ministériels chargés de l'énergie et du numérique, nous a aidés à mieux comprendre tant les besoins des opérateurs que les contraintes avec lesquelles nous devons composer. Ces opérateurs ont eux aussi des missions de service public, qu'ils doivent remplir pour assurer la résilience de leurs propres installations.

Monsieur le sénateur Franck Montaugé, je vous remercie de votre hommage à notre collègue. Nous avons eu l'occasion d'échanger en ces circonstances dramatiques.

Nous avons expérimenté, dans différents territoires, autour d'installations d'autoconsommation complètement déconnectées du réseau. Cette solution nous intéresse en cas de crise ou d'événement climatique d'ampleur, mais telle n'est pas la solution que nous prônons. À nos yeux, l'autoconsommation va de pair avec le réseau : quand il n'y a ni vent ni soleil, il y a besoin du réseau, des compteurs Linky et de toute la chaîne communicante pour partager les flux.

Se pose aussi, à cet égard, la question de la péréquation. Si chacun se construit son petit système électrique doté de tarifs locaux, il n'y a plus ni péréquation ni solidarité. Or, actuellement, si je peux envoyer 2 000 techniciens en Bretagne et en Normandie pour réparer le plus vite possible les réseaux, en leur faisant faire onze heures de camion depuis Montpellier ou depuis l'Alsace, c'est parce que je dispose d'une vision globale de mes ressources et que j'ai les moyens de les affecter à tel ou tel endroit pour parer à une situation exceptionnelle, sans avoir besoin de relire le contrat de concession pour savoir si j'avais bien prévu de dépenser autant dans de telles circonstances dramatiques... C'est là toute la force d'un modèle péréqué, qui globalise, qui mutualise, qui organise la solidarité. Nous n'envisageons donc pas à proprement parler l'autoconsommation déconnectée du réseau.

Nous continuons par ailleurs à travailler avec les start-up : nous nous nourrissons de nos échanges avec elles et avons besoin de leurs innovations. Du reste, en tant que grande entreprise, Enedis se doit d'être « challengée ». Tout cela est formalisé dans le cadre d'un programme de recherche et développement (R&D) dont le financement est couvert par le Turpe, et auquel nous consacrons d'importants moyens. Ainsi sommes-nous partenaires, par exemple, de deux chaires sur l'intelligence artificielle abritées par de grandes universités françaises, dont Aix-Marseille Université. Nous sommes donc en interaction non seulement avec les start-up, mais avec l'ensemble du monde académique.

Quant aux coûts de raccordement, ils font partie d'un triptyque « magique » : délais, satisfaction du client, coût unitaire de raccordement. Ce coût, nous le pilotons, tant pour nous que pour le client, dans le cadre notamment de la rénovation programmée, c'est-à-dire de nos programmes de résilience : combien cela coûte-t-il, au kilomètre ou à la centaine de mètres, de remplacer ou d'enfouir une ligne ? Il y a là un point clé de la planification que nous élaborons.

Il y va aussi d'une question de politique publique. Force est de constater qu'en agriculture, par exemple, les coûts du solaire en autoconsommation sont trois fois plus élevés que ceux des grandes installations de panneaux au sol. L'autoconsommation se pratique en majorité dans des communes rurales, en bout de ligne, où le réseau n'a pas été dimensionné. Pour la rendre possible, il faut faire des travaux de renforcement ou d'extension du réseau. Quelle est en définitive la rationalité de cette politique ? Au bout du compte, ces coûts trois fois supérieurs sont supportés par le client, lequel est non seulement consommateur, mais aussi contribuable. En dépit de nos efforts pour réduire ces coûts, voilà quels sont les faits.

Tous les textes d'application de la loi Aper de 2023 ne sont pas sortis. L'un d'entre eux nous permettra de rendre public notre schéma de développement des réseaux à cinq, à dix et à quinze ans, document dans lequel, précisément, nous abordons cette question des différences de coûts. Un réseau est par essence une infrastructure mutualisée, c'est-à-dire dimensionnée pour permettre, selon les cas, l'injection ou le soutirage au bénéfice des consommateurs. Reste que la question des coûts mérite d'être examinée dans la durée, notre ambition étant d'aller vers toujours plus de solaire, notamment en agriculture, pour des raisons à la fois évidentes et tout à fait valables.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Je vous remercie d'avoir répondu à nos questions avec tant d'engagement, de précision et de détermination ; cette première ne sera assurément pas une dernière.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif - Désignation d'un rapporteur

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - La proposition de loi n° 292 (2023-2024) visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif a été adoptée par l'Assemblée nationale à la fin du mois de janvier, après engagement de la procédure accélérée.

Nous étions inquiets de ne pas voir ce texte inscrit à l'ordre du jour du Sénat. J'avais interrogé le ministre à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement ; il m'avait répondu que cela allait venir... Las ! à l'issue de la réunion de la conférence des présidents la semaine dernière, l'ordre du jour prévisionnel ne le mentionnait toujours pas. Patrick Kanner, Guillaume Gontard et moi-même avons insisté, de même que les députés auteurs de cette proposition de loi, pour que la navette suive son cours. Ce texte sera finalement examiné en séance publique durant la semaine du 20 mai ; nous l'examinerons en commission le 15 mai.

La commission désigne Mme Sylviane Noël rapporteure sur la proposition de loi n° 292 (2023-2024), adoptée par l'Assemblée nationale, visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif.

Projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement - Examen de l'amendement au texte de la commission mixte paritaire

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous examinerons cet après-midi, en séance publique, les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement. Le Gouvernement nous a transmis un amendement rédactionnel.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT AU TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Article 8 bis

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. - Cet amendement n°  1 corrige une erreur de référence à l'article 8 bis. Avis favorable.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 1.

La réunion est close à 11 h 30.