Mercredi 28 février 2024

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 8 h 35.

Audition de M. Franck Leroy, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit-France)

M. Jean-François Longeot, président. - Nous entendons ce matin M. Franck Leroy, actuel président du conseil régional du Grand Est et candidat proposé par le Président de la République pour occuper les fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit-France), en application de l'article 13 de la Constitution.

Je vous rappelle que ce poste est vacant depuis la nomination de M. Patrice Vergriete en tant que ministre délégué chargé du logement auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en juillet 2023, alors qu'il n'occupait ce poste que depuis le 24 janvier 2023, soit depuis sept mois. M. Vergriete remplaçait d'ailleurs M. Jean Castex, nommé président-directeur général de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), qui n'avait lui-même occupé ce poste que cinq mois après sa nomination.

Pour mémoire, vous avez été entendu une première fois par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale en décembre dernier, tandis que nous avions, pour notre part, décidé de reporter cette audition. En tout état de cause, le mandat qui aurait pu vous être confié si votre candidature avait été validée par les deux commissions en décembre dernier se serait achevé après un délai de seulement trois mois, et nous aurions dû procéder à une nouvelle audition pour le mandat suivant. Nous avons alors estimé, indépendamment de toute considération sur la qualité de votre candidature, que l'exercice consistant à demander au Parlement de se prononcer deux fois en moins de trois mois sur une même nomination témoignait de la part du Gouvernement au mieux d'une forme d'impréparation, au pire d'un manque de considération pour le Parlement et laissait entendre que les auditions parlementaires au titre de l'article 13 de notre Constitution ne seraient qu'une formalité, voire un échauffement.

Nous sommes donc réunis ce jour pour nous prononcer sur votre candidature pour un nouveau mandat de président du conseil d'administration de l'Afit-France.

Monsieur Leroy, vous êtes membre du conseil d'administration de l'Afit-France, comme c'est l'usage, en qualité de personnalité qualifiée et en remplacement de M. Vergriete par un décret du 27 novembre 2023.

Votre possible nomination à la tête de l'Agence ne pourrait pas intervenir si l'addition des votes négatifs de chaque commission représentait au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.

À l'issue de cette audition et après le départ du candidat, nous procéderons au vote à bulletin secret. Je rappelle qu'il ne peut y avoir de délégation de vote et que le dépouillement sera effectué simultanément à l'Assemblée nationale et au Sénat. Votre audition devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de nos collègues de l'Assemblée nationale aura lieu ce jour à onze heures, à l'issue de notre réunion.

Je cède sans plus tarder la parole à notre rapporteur, Damien Michallet. Vous pourrez ensuite nous présenter votre candidature et nous faire part de vos motivations, avant de répondre aux premières questions du rapporteur. Puis, mes collègues sénateurs vous interrogeront à leur tour.

M. Damien Michallet, rapporteur. - Monsieur Leroy, je suis heureux de vous retrouver ce matin pour cette audition en application de l'article 13 de la Constitution.

Il s'agit d'une audition attendue, qui présente un caractère inédit. Ainsi que l'a rappelé le président, nous devions initialement vous entendre en décembre dernier, la semaine suivant votre audition du 13 décembre à l'Assemblée nationale. Or, compte tenu des nouvelles informations portées à notre connaissance, à savoir le fait que le mandat pour lequel vous faisiez acte de candidature ne courait que pour trois mois et qu'il faudrait, à l'issue de cette période, vous entendre à nouveau, notre bureau avait alors décidé d'annuler l'audition.

N'y voyez aucune malice de notre part à votre encontre : la situation témoignait surtout, à notre sens, d'une forme d'impréparation du Gouvernement, alors même que le poste était vacant depuis plusieurs mois, et, pire, sous-entendait que les auditions dites « article 13 » ne seraient qu'un galop d'essai. Croyez-nous, ces auditions représentent bien plus à nos yeux : ce sont des temps forts de l'expression des pouvoirs de contrôle du Parlement. C'est pourquoi je me réjouis de vous entendre ce jour pour ce qui sera, je l'espère, bien plus qu'une simple « formalité ».

Au-delà de ce report de quelques semaines de votre audition, celle-ci présente un caractère assez inédit. Pour ne rien vous cacher, en tant que sénateur récemment élu, j'interviens pour la première fois comme rapporteur de cette commission - je remercie d'ailleurs ses membres et son président de m'avoir confié cette tâche importante. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'ai commencé à préparer cette audition !

J'ai en effet découvert qu'elle s'inscrivait dans une suite que l'on pourrait qualifier d'heureuse ou de malheureuse - c'est sans doute une question de point de vue -, puisqu'il s'agit de la troisième audition pour le même poste en un an et demi seulement. La troisième sera-t-elle la bonne ? C'est ce que nous allons déterminer ensemble aujourd'hui.

Voilà quelques semaines, à l'occasion de l'audition de Thierry Guimbaud, candidat proposé à la tête de l'Autorité de régulation des transports (ART), nous nous alarmions des plus de seize mois de vacance à la tête de cet organisme. Le cas de figure est bien différent, mais tout aussi préoccupant pour ce qui concerne l'Afit-France : pour celle-ci, c'est, me semble-t-il, l'instabilité de la gouvernance qui dessert grandement son action. Le deuxième mandat de Christophe Béchu, qui avait été reconduit dans ses fonctions à la tête de l'Agence en mai 2021, s'est d'abord vu considérablement raccourci lorsque ce dernier a été nommé ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires à l'été 2022. La désignation quelques semaines plus tard de Jean Castex à ce poste n'avait été que de courte durée - cinq mois -, ce dernier étant finalement nommé président-directeur général de la RATP. Enfin, le dernier président en date, Patrice Vergriete, n'aura exercé un mandat que de sept mois, puisqu'il a lui aussi été appelé à occuper d'autres fonctions, en l'espèce celles de ministre délégué chargé du logement.

Vous le comprendrez aisément, monsieur Leroy, pour les parlementaires que nous sommes, l'exercice quelque peu répétitif consistant à nous soumettre une candidature pour, quelques mois plus tard, confier d'autres missions à la personne concernée est source d'agacement... En tout état de cause, cela donne l'impression que l'Afit-France est en quelque sorte, pour ses présidents successifs, l'antichambre de futures fonctions plus prestigieuses. À mes yeux, l'Agence mérite mieux que d'être une simple ligne de plus sur un CV !

Vous n'êtes bien évidemment pas responsable des parcours de vos illustres prédécesseurs. Cela étant, pouvez-vous nous préciser en toute sincérité la manière dont vous entendez conduire votre mandat ? Les expériences passées nous suggèrent d'attendre du candidat une forme d'engagement moral à conduire l'intégralité de son mandat. En d'autres termes, doit-on vous appeler « Monsieur le ministre » par anticipation ou êtes-vous réellement candidat à la présidence du conseil d'administration de l'Afit-France et à cette seule agence ?

Cette question étant posée, je vous propose d'en venir plus précisément à votre profil et à son adéquation avec le poste, d'une part, et à votre vision pour l'Afit-France, d'autre part. Pourquoi votre profil, plus politique qu'administratif, est-il, selon vous, le plus adapté pour prendre la tête de cette agence ?

Pourriez-vous également nous indiquer lesquels de vos mandats actuels vous conserveriez si vous étiez nommé président du conseil d'administration ? À cet égard, et dans un contexte de négociation des volets mobilités des prochaines générations de contrat de plan État-régions, comment envisagez-vous de concilier la présidence du conseil régional du Grand Est et celle du conseil d'administration de l'Afit-France, avec toute l'objectivité nécessaire pour que l'ensemble du territoire français soit bien couvert par vos décisions ?

J'en viens à votre vision pour l'avenir de l'Afit-France.

Sur le volet « recettes », celle-ci a connu un certain nombre de déconvenues ; nous en sommes tous pleinement conscients. L'abandon de l'écotaxe, qui devait lui bénéficier, le caractère incertain de plusieurs de ses recettes, le refus des sociétés concessionnaires d'autoroutes de s'acquitter de la contribution volontaire exceptionnelle (CVE) depuis trois ans et, à plus long terme, la perspective de tarissement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sont autant de difficultés qui mettent à mal la soutenabilité du financement de nos infrastructures, au moment où nous en avons, et où nous en aurons sans doute le plus besoin.

Si le projet de loi de finances pour 2024 prévoit l'allocation à l'Agence du produit de la nouvelle taxe sur les infrastructures de transport de longue distance, les contentieux envisagés par les sociétés concessionnaires d'autoroutes ne sont pas de nature à nous rassurer...

Pour franchir le « mur d'investissements » qui est devant nous, pour reprendre l'expression du Conseil d'orientation des infrastructures (COI), nous devrons à n'en pas douter reposer l'équation du financement des infrastructures de transport. Quelle est votre vision en la matière ? De façon prospective, identifiez-vous des sources de financement plus opportunes que d'autres ? Disposez-vous à cet égard d'exemples européens dont nous pourrions nous inspirer ?

Sur le volet « dépenses », on peut également déplorer un manque de visibilité. Des annonces ont bien été faites ces derniers mois ; je pense en particulier à la « nouvelle donne ferroviaire », dotée de 100 milliards d'euros d'ici à 2040, ou encore au déploiement des services express régionaux métropolitains (Serm), sur lesquels nous nous sommes dernièrement penchés dans le cadre de l'examen d'une proposition de loi.

Pour autant, la loi d'orientation des mobilités, qui avait permis d'inscrire dans la loi la trajectoire de dépenses et de recettes de l'Agence, et dont je salue le rapporteur Didier Mandelli, n'a toujours pas été révisée, alors même qu'elle devait l'être avant le 30 juin 2023. Les dépenses de l'Agence pourraient en outre considérablement augmenter dans les décennies à venir, notamment compte tenu des investissements relatifs à la résilience et à l'adaptation de nos réseaux de transports, pour lesquelles, ainsi que l'a souligné le COI, aucun véritable plan structurel d'ensemble n'existe. Si vous étiez nommé président du conseil d'administration de l'Afit-France, soutiendriez-vous l'examen d'une nouvelle loi de programmation dans les infrastructures de transports ?

Ce rendez-vous pourrait en outre constituer une nouvelle occasion de réfléchir au positionnement institutionnel de l'Agence. Comme vous le savez, la Cour des comptes s'était montrée, dans un référé de 2016, particulièrement critique sur le rôle de l'Afit-France, qu'elle qualifiait de « quasi-coquille vide », sans feuille de route ni marge de manoeuvre. Fort de votre expérience de président de région, quel regard portez-vous sur le rôle actuel de l'Agence, mais aussi, de façon prospective, sur le rôle qu'elle pourrait jouer à l'avenir ? Avez-vous identifié de possibles évolutions ? Je sais, par exemple, que le président de l'Afit-France est membre de droit du COI. Comment voyez-vous l'articulation entre les deux instances ?

Nous avons entendu votre prédécesseur Patrice Vergriete, devenu ministre des transports, annoncer sur France Inter qu'il souhaitait organiser une convention citoyenne sur les transports. Que vous inspire une telle idée, sachant que le Gouvernement vient de supprimer près de 340 millions d'euros sur le programme 203 « Infrastructures et services de transports » ?

Enfin, et ce sera ma dernière question, l'Afit-France connaît une véritable montée en puissance, puisque son budget pour 2024 s'élève, comme cela a été acté lors du dernier conseil d'administration de janvier 2024, à un montant record de près de 4,62 milliards d'euros de crédits de paiement. Pour autant, ses moyens humains restent extrêmement limités, avec seulement quatre équivalents temps pleins travaillés. Vous mobiliserez-vous pour accroître ses moyens humains ?

M. Franck Leroy, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France. - Je tiens à vous faire part du plaisir que j'ai à me trouver devant vous aujourd'hui.

Âgé de 61 ans, je suis né à Boulogne-sur-Mer. J'ai commencé ma carrière comme chargé de mission au conseil régional de Champagne-Ardenne. J'ai ensuite été directeur de cabinet du maire d'Épernay, Bernard Stasi, puis du maire de Troyes, François Baroin. J'ai été élu adjoint au maire d'Épernay en 1995, puis maire en 2000. L'année dernière, je suis devenu président du conseil régional du Grand Est, à la suite de la démission inattendue de mon prédécesseur, Jean Rottner, dont j'étais le premier vice-président chargé de la transition écologique. Depuis que je suis président de région, je préside la commission mobilité de Régions de France.

Les mobilités occupent une place majeure dans la vie de nos concitoyens. Dans les années 1960 ou 1970, on travaillait en général à 3 kilomètres de chez soi. Aujourd'hui, un Français fait en moyenne 26 kilomètres aller-retour pour se rendre sur son lieu de travail, sachant que l'agression de la Russie contre l'Ukraine a a fortiori entraîné une hausse des coûts. De surcroît, les transports, facteur d'aménagement du territoire, jouent un rôle important dans l'empreinte carbone de notre société. Il s'agit donc, à mes yeux, d'un enjeu essentiel.

J'ai accueilli avec beaucoup d'honneur la proposition du Président de la République ; c'est surtout, je pense, au président de la commission mobilité de Régions de France que celui-ci a fait appel.

Je siège à l'Afit-France depuis quelques mois. Il n'est pas question de manquer d'objectivité dans mes fonctions. J'ai demandé que des dispositions soient prises au sein de l'Afit-France pour que je ne puisse en aucun cas prendre parti sur des dossiers concernant ma région. Pour éviter tout conflit d'intérêts, je me déporterai donc sur chaque dossier impliquant le Grand Est.

J'entends continuer à exercer mon mandat régional. D'abord, j'ai été choisi en ma qualité de président de région pour exercer cette fonction. Ensuite, les régions occupent une place majeure dans le financement des infrastructures de transport dans notre pays. Le fait que le choix se porte sur un élu régional m'apparaît comme un signal fort, à la portée symbolique.

Malheureusement, il y a eu une succession de titulaires un peu rapide à ce poste. Mais, vous avez eu la gentillesse de le rappeler, celle-ci n'est pas de mon fait.

Il me paraît également souhaitable qu'une instance chargée d'assurer le financement des infrastructures par l'État soit présidée par un élu, car nous avons tous été confrontés à des désengagements de la part de ce dernier, souvent très coûteux pour les territoires.

Il va de soi qu'en cas de nomination à la tête de l'Afit-France, j'abandonnerais mon mandat de premier adjoint au maire d'Épernay. J'ai évidemment l'intention de consacrer du temps à l'Agence, même s'il s'agit - nous le savons tous - d'une petite structure, par comparaison avec des structures comme l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Mais au fond, le rôle de son président, certes important, n'est qu'un rôle de président de conseil d'administration ; Patrice Vergriete parlait même de présidence de conseil de surveillance...

Cela a été souligné, les budgets que l'Afit-France doit gérer sont en hausse. Il faut s'en réjouir, car cet engagement budgétaire croissant démontre tout l'intérêt de l'Agence : mettre les infrastructures de transport à l'abri des potentiels coups de rabot. Gérer les transports, c'est gérer des infrastructures qui demanderont cinq, huit, voire des dizaines d'années pour aboutir. Sans une certaine stabilité dans les financements de l'État, nous ne serons pas au rendez-vous des échéances pour notre pays.

Le développement du TGV, grande réussite industrielle française, s'est malheureusement fait au détriment d'un certain nombre de territoires, tant urbains que ruraux. Des drames ont témoigné de l'état de vétusté de certaines infrastructures de communication. Je crois important de mettre l'accent sur les lignes de desserte fine et d'aménagement du territoire, qui sont absolument indispensables.

On sent aujourd'hui une grande souffrance en milieu rural, avec un sentiment d'abandon prenant essentiellement racine dans les domaines de la santé et des mobilités. Nous devons trouver dans les années à venir des solutions à l'absence d'offre de transport public, qui a notamment expliqué - c'est l'une des causes - la crise des « gilets jaunes ». Nombre de Français se sont sentis oubliés, et la perspective d'une taxe carbone venant en quelque sorte sanctionner les mobilités routières leur est apparue insupportable. S'il est hors de question de promettre que le train ira partout, il existe aujourd'hui des formes de déplacement parfaitement adaptées aux territoires.

Il faut donc voir, dans la forte hausse du budget de l'Afit-France, environ 20 % par rapport à 2023, un signal positif. D'une manière générale, on n'a jamais autant investi dans des infrastructures qu'en ce moment, alors même que, pendant trente à quarante ans, on a délaissé en nombre les infrastructures de transport sur des pans entiers de notre territoire.

M. Jacques Fernique- L'Afit-France mérite effectivement mieux qu'un tourniquet de présidents éphémères.

Le scénario de planification écologique du Conseil d'orientation des infrastructures - je pense notamment à l'engagement des 100 milliards d'euros d'ici à 2040 pour l'essor du ferroviaire - nécessite plus que jamais une conduite affermie des investissements de transport. Ce scénario sera-t-il clairement la feuille de route de l'Afit-France ? Marque-t-il, à vos yeux, une continuité ou une rupture avec la logique passée ? Implique-t-il de renoncer à de nouvelles infrastructures routières capacitaires favorisant l'autosolisme et à des projets routiers conçus dans des contextes antérieurs ? Si oui, ne faudrait-il pas préciser lesquels ?

Pour que les dépenses de l'Afit-France puissent monter en puissance, comme cela est envisagé, il faudra bien compenser l'attrition inévitable de la TICPE. Votre prédécesseur m'avait répondu plutôt positivement sur le levier que pourrait constituer une taxe poids lourds. Votre région, le Grand Est, a fait ce choix. La majorité sénatoriale avait déposé un amendement au projet de loi de finances de flécher vers les investissements de mobilité dans les territoires une part du produit des enchères des quotas carbone. La logique est d'une certaine façon la même, celle du pollueur-payeur. C'est ce qui sous-tend d'ailleurs la taxe nouvelle sur les secteurs aéroportuaire et autoroutier. Ne faudrait-il pas avancer plus franchement dans ce sens pour que l'Afit-France ait les moyens de sa mission ?

Mme Jocelyne Antoine. - Je suis une représentante et une fidèle défenseuse de la ruralité et même de « l'ultraruralité ». Dans nos territoires ruraux, 80 % des habitants dépendent de la voiture pour se rendre sur leur lieu de travail et le manque d'offres de mobilité n'incite pas les jeunes, qui n'ont parfois pas le permis de conduire, à s'installer à la campagne.

Vous avez esquissé quelques pistes - mobilité partagée, intermodalité, vélo, train, véhicule à faible émission... Pourriez-vous être plus précis sur ce que vous envisagez pour permettre aux habitants de la ruralité de continuer à se déplacer ?

M. Stéphane Demilly. - Il existe une forte inquiétude du monde économique vis-à-vis des taxes kilométriques sur les transports routiers de marchandises. Plusieurs collectivités territoriales, dont la région Grand Est, réfléchissent à l'instauration d'une telle taxe. Vous le savez, les entreprises françaises sont parmi les plus imposées en Europe. Est-il vraiment opportun de relancer, à l'échelle régionale, l'ancien projet d'écotaxe nationale, jadis défendu par Mme Royal ? Une telle mesure pénaliserait nécessairement la compétitivité des entreprises du territoire.

M. Olivier Jacquin. - Comme vous êtes mon président de région, je peux témoigner de votre engagement au service des mobilités. Serez-vous aussi engagé pour l'Afit-France ? Pensez-vous que la fonction soit compatible avec celle que vous exercez actuellement au sein de Régions de France ? Comment comptez-vous améliorer les engagements de l'Afit-France au quotidien ? Appuierez-vous une nouvelle loi de programmation des infrastructures ? Quel moteur économique pour la mobilité dans les espaces peu denses ? Y a-t-il urgence, selon vous, à imaginer un avenir aux contrats de concessions autoroutières ? Ce dossier doit-il être une priorité ? Où voyez-vous les 100 milliards d'euros du ferroviaire ? Et quelles nouvelles ressources peut-on imaginer pour les mobilités ?

M. Franck Leroy. - L'Afit-France n'est pas un organisme de décision politique - les choix politiques relèvent du Gouvernement et du Parlement - ; son rôle est d'oeuvrer à ce que les engagements pris soient tenus. Si je suis personnellement convaincu qu'il faudra investir massivement dans les infrastructures de transport, le président de l'Afit-France ne sera jamais décisionnaire en la matière.

Nous savons tous que les recettes de TICPE sont amenées à diminuer. Des choix devront être faits pour savoir si les concessions autoroutières ne devraient pas financer les infrastructures de communication plus amplement qu'aujourd'hui.

Suis-je là pour quelques mois ou pour longtemps ? Mon parcours politique plaide pour une grande stabilité. J'ai toujours été au bout de mes mandats. Et j'ai pris l'engagement d'aller au bout de celui de président de région. Je refuserai toute promotion éventuelle. Ma région me convient parfaitement. Toute ma vie publique, j'ai été un élu local. Je suis profondément décentralisateur. Je n'aspire pas à une carrière politique nationale. J'entends donc bien aller au bout du mandat.

Il y a effectivement une contradiction entre une trajectoire de dépenses à la hausse et une incertitude croissante quant aux financements qui permettront demain à l'État de supporter des coûts d'infrastructures qui sont extrêmement élevés. La question devra être tranchée dans les deux ou trois ans à venir. Le président de l'Afit-France aura un rôle important pour animer le débat. Les décisions seront évidemment politiques et législatives. Je compte bien associer étroitement le Parlement aux réflexions.

Si la ruralité a aujourd'hui tendance à voter pour des partis extrêmes, c'est parce qu'elle se sent profondément oubliée. Reconnaissons collectivement que les politiques d'aménagement du territoire menées depuis quarante ou cinquante ans l'ont très largement oubliée. Les choses doivent changer. Les pistes sont nombreuses : mobilité zéro émission, transport à la demande, covoiturage, autopartage, etc.

Si je suis nommé à la tête de l'Afit-France, j'abandonnerai mes fonctions de président de la commission mobilité de Régions de France ; j'ai déjà prévenu Carole Delga. Dans ces fonctions, j'ai eu la chance d'auditionner les candidats à l'appel à projets lancé par l'Ademe sur les transports du futur. Certaines pistes sont extrêmement intéressantes - je pense aux trains légers, qui nécessitent moins de travaux d'infrastructures que la remise en route de trains traditionnels sur nos lignes rurales - pour nous permettre d'aller à la reconquête des territoires ruraux par les transports.

Voilà une dizaine d'années, le Parlement avait voté à la quasi-unanimité la mise en oeuvre de l'écotaxe. Puis, les « bonnets rouges », qui venaient de Bretagne, avaient enflammé le débat politique et conduit à l'abandon de la mesure. J'en garde un souvenir douloureux : le débat actuel ne se poserait sans doute pas dans les mêmes termes si l'écotaxe avait existé.

Ma région, le Grand Est, a la particularité d'être frontalière sur 750 kilomètres avec quatre pays ayant tous mis en place une telle taxe. Nous avons, sur certains axes de transport de notre région, 95 % de trafic poids lourds venant de ces pays qui aujourd'hui choisissent de rouler côté français pour échapper à l'écotaxe. Cette situation génère un surtrafic et une dégradation des infrastructures de communication. Il nous faut très certainement repenser cette question de la circulation libre des poids lourds sur nos routes, notamment lorsque nous sommes en bordure de frontière et que nous subissons des phénomènes de déport. L'objectif pour nous, si nous mettons une écotaxe en place, est de faire en sorte qu'elle soit pensée de manière intelligente, et qu'elle épargne un certain nombre de trafics locaux. Les recettes de cette écotaxe seront affectées à la modernisation des axes de transport ainsi que sur des solutions d'intermodalité. Cette stratégie inquiète, je l'entends, un certain nombre d'acteurs économiques qui sont, dans notre région, assez partagés. Cela étant, nous allons soutenir les entreprises de transport routier de nos régions à décarboner leurs flottes. Mais nous n'arriverons pas à la neutralité carbone avec autant de camions sur nos routes et sans un système de fret ferroviaire performant. Je pense que l'écotaxe, si elle avait été créée, aurait permis de développer des solutions de ferroutage.

Je suis pour une loi de programmation sur les infrastructures de communication, sous réserve qu'il y ait d'abord une feuille de route élaborée en commun, territoire par territoire, faute de quoi on donnerait l'impression que l'État décide pour les territoires. Ne nous précipitons pas sur une loi de programmation sans cette phase de concertation préalable.

Clément Beaune a souligné voilà quelques mois que l'État serait amené à prendre position sur l'abandon de certains projets routiers. Là encore, la décision est politique et n'incombe pas au président de l'Afit-France. L'idéal serait que l'État la prenne en lien avec les territoires concernés. Je souhaite que l'Agence soit plutôt mise à l'écart de ce débat, car elle n'est pas une instance décisionnaire : ce n'est pas à elle d'arbitrer des choix par essence politiques.

M. Rémy Pointereau- Nous avons bien compris que la présidence de l'Afit-France était réservée à la région Grand Est...

Vous nous assurez de votre objectivité, et vous vous engagez à mettre l'accent sur la rénovation des lignes existantes parce que nous avons tout misé sur le TGV il y a quelques années. C'est facile de dire cela quand on vient d'une région desservie par le TGV. Mais il existe encore nombre de territoires oubliés de la grande vitesse. Serez-vous un grand défenseur de la ligne en gestation Paris Orléans Clermont-Ferrand Lyon (POCL) - je préside une association qui défend ce projet -, qui permettrait à mon territoire d'être connecté au réseau européen de la grande vitesse ?

Mme Nadège Havet- En Bretagne, des camions partent du Finistère, traversent toute la région, puis se répartissent un peu partout. Le fret ferroviaire est en grande difficulté. Quelles solutions préconisez-vous - vous avez évoqué l'écotaxe - pour que nous puissions véritablement relancer ce mode de transport ?

Comment voyez-vous la coordination entre l'Afit-France et les collectivités pour permettre une mise en oeuvre efficace des services express régionaux métropolitains ?

Mme Audrey Bélim. - Le rapport d'activité 2022 de l'Afit-France consacre une page entière au projet de nouvelle route du littoral à La Réunion, soulignant qu'il s'agit d'un axe majeur essentiel au fonctionnement de l'économie réunionnaise. Est-il prévu de tenir compte de l'inflation pour l'année 2024 et les années suivantes dans le soutien de l'État et de l'Afit-France à ce projet structurant pour La Réunion ?

En moyenne, les Réunionnais passent deux heures quinze par jour, soit un mois de leur vie par an, dans les embouteillages. Quelle est votre ambition pour le développement des transports en commun et des mobilités douces à La Réunion et, plus généralement, dans les outre-mer ?

M. Franck Leroy. - Monsieur Pointereau, je pense que vous avez raison de défendre la ligne POCL. Mais il serait démagogique de ma part de prétendre que mes futures fonctions au sein de l'Afit-France me permettront de garantir sa réalisation. D'abord, cela relève d'une décision politique. Ensuite, la création de nouvelles lignes de grande vitesse suscite des oppositions. Pour autant, Clément Beaune a pris des engagements de modernisation de la ligne, une modernisation que l'Afit-France finance. Je pense que nos lignes d'équilibre du territoire sont extrêmement importantes et pourraient fortement progresser en termes de performance sans forcément atteindre la grande vitesse.

La ligne TGV de la région Grand Est a été la première à être cofinancée par les collectivités territoriales, qu'elles ont mis quinze ou vingt ans à rembourser. Il a parfois fallu se battre pour que les engagements de l'État soient tenus.

Les territoires que vous avez évoqués ont besoin de fiabilité en termes d'infrastructures de transport. Je doute sincèrement que l'on aille vers une ligne à grande vitesse, mais le niveau de performance peut s'améliorer si les investissements sont réalisés.

Madame Havet, compte tenu de ce que nous avons vécu voilà une dizaine d'années, une écotaxe nationale me paraît assez peu envisageable. La décision que nous avons prise en responsabilité concerne le Grand Est, où le contexte est spécifique.

La mise en oeuvre des Serm est une exigence. Ces services sont aujourd'hui organisés autour des métropoles. Il n'y a pas que du ferroviaire ; différents modes de transport se combinent. Pour parvenir à satisfaire aux exigences de qualité de l'air et aux exigences liées à la réduction de notre empreinte carbone, il faut absolument faire basculer un certain nombre de nos concitoyens du transport individuel et de l'autosolisme vers des modes de transports collectifs. Le premier Serm créé en France l'a été à Strasbourg. Au début, cela a été un peu douloureux. Mais nous voyons aujourd'hui que le basculement de nos concitoyens du transport individuel vers le transport public sous diverses formes fonctionne, même si c'est compliqué. Pour la première fois, les niveaux de qualité de l'air de Strasbourg sont descendus sous les seuils justifiant la mise en place d'une zone à faibles émissions mobilités. Nous attendons de savoir si l'impact sera durable.

J'invite d'ailleurs le Sénat à envoyer une délégation en Belgique ou aux Pays-Bas pour y observer les systèmes de transport : la combinaison vélo-train est absolument redoutable. Nous avons certainement vingt-cinq ans de retard sur nos voisins. Je suis intimement persuadé que le vélo et les mobilités actives ne doivent pas être oubliés.

La nouvelle route du littoral est essentielle pour La Réunion. L'Afit-France, qui a financé les premières phases, continuera de le faire. Les coûts de l'inflation seront pris en considération car ils correspondent à la réalité des coûts.

L'efficacité des transports collectifs en site propre est démontrée dans nombre d'agglomérations. Ils font partie de la batterie de solutions que nous devons apporter à nos concitoyens.

Mme Christine Herzog- Monsieur le président de notre région Grand Est, cher Franck Leroy, l'enjeu du financement du réseau ferroviaire est crucial.

Les régions qui ont contesté la hausse du tarif des péages d'infrastructures ferroviaires par SNCF Réseau ont été déboutées par le Conseil d'État.

La SNCF est confrontée à deux enjeux majeurs : d'une part, moderniser son réseau en favorisant une mobilité verte ; d'autre part, entretenir son réseau et maintenir les petites lignes de trains déficitaires pour garantir une offre de mobilité ferroviaire sur tous les territoires français. Comment allez-vous procéder pour flécher les budgets par rapport à ces deux enjeux ?

M. Michaël Weber. - Les jeunes en âge de passer leur permis de conduire sont de moins en moins nombreux à le faire, parfois par choix, ce qui a des répercussions inquiétantes sur la mobilité et l'accès à l'emploi dans les territoires ruraux. Je ne suis pas certain que le partage et le covoiturage soient les seules réponses. Il y a aussi un sujet sur les infrastructures offertes. La question de l'équilibre financier va être difficile à traiter compte tenu des attentes et des demandes de lignes à grande vitesse.

Le fret ferroviaire n'a, me semble-t-il, pas été suffisamment abordé ce matin. Comment avoir demain plus de fret ferroviaire avec des moyens adaptés et une vraie cohérence en matière de transport de marchandises et de personnes ?

M. Philippe Tabarot. - Monsieur Leroy, l'Afit-France a besoin d'un président compétent - vous l'êtes à l'évidence -, mais aussi présent.

Vous avez été très clair s'agissant de votre mandat de premier adjoint au maire d'Épernay, mais peut-être un peu moins s'agissant de votre présidence de la communauté d'agglomération Épernay, Coteaux et Plaine de Champagne. Quel sera votre choix à cet égard ?

Vous avez été très clair sur votre intention de vous déporter lorsque l'Afit-France sera saisie de dossiers relatifs au Grand Est. Votre région a, en outre, récupéré la gestion de lignes ferroviaires, comme le permet désormais la loi. Est-ce à dire que vous n'aurez plus confiance en SNCF Réseau, qui sera votre principal partenaire lorsque vous serez à la tête de l'Afit-France ?

Que pensez-vous de cet « enfumage » du ministre des transports, qui a proposé ce matin une convention citoyenne sur les mobilités ? Quand on voit les suites apportées à la Convention citoyenne sur le climat... Ne trouvez-vous pas cette annonce curieuse, précisément la semaine où le Gouvernement a décidé de réduire le budget des transports de 340 millions d'euros ?

Enfin, et je m'adresse plus au président de région qu'au candidat à la présidence de l'Afit-France, quelle est votre position sur les mouvements sociaux à répétition dans les transports en commun, notamment dans le ferroviaire ? Êtes-vous favorable à un encadrement du droit de grève pour éviter un certain nombre d'abus comme on a pu le voir encore récemment ?

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Un million de poids lourds transitent chaque année dans les vallées alpines. Nous sommes nombreux à souhaiter que le fret ferroviaire se développe pour l'amélioration de la qualité de vie et pour la santé.

Le Lyon-Turin avance. Côté italien, les accès sont en cours de réalisation. Côté français, on est enfin arrivé à se mettre d'accord sur le financement des études.

J'ai bien compris que l'Afit-France ne faisait pas de choix politiques. Mais vous avez tout de même exprimé votre souhait d'une réorientation de la politique ferroviaire pour satisfaire les demandes des villes moyennes et du milieu rural. Cette réorientation peut-elle être de nature à remettre en cause le financement des accès côté français au tunnel du Fréjus ?

Vous avez évoqué les futures motorisations et énergies possibles pour les poids lourds. Quelle est votre réflexion sur l'autoroute électrique que Veolia cherche à développer ?

Mme Marie-Laure Phinera-Horth- Quelles seront vos perspectives pour la Guyane, où, au XXIe siècle, il n'existe aucune autoroute, aucun réseau ferroviaire ? Nous avons le transport aérien, mais il reste insuffisant, ce qui empêche le développement économique sur tout le territoire. Nous avions rencontré l'ancien ministre des transports, Clément Beaune, qui avait été sensibilisé à ces problématiques. Je n'ai pas encore rencontré le nouveau ministre, mais j'espère qu'il aura les mêmes positions que l'ancien.

M. Georges Naturel- Élu de la Nouvelle-Calédonie, je pourrais vous interroger sur la ligne Nouméa-Koumac, mais ma question sera plus simple : entre tous vos mandats, quelle part de votre temps de travail entendez-vous consacrer à l'Afit-France ?

M. Franck Leroy. - Madame Herzog, dans le litige qui nous oppose à SNCF Réseau, les régions ont été déboutées en référé, c'est-à-dire sur la notion d'urgence, mais le sujet n'est pas tranché au fond. Nous restons persuadés que l'augmentation de 8 % des tarifs des péages n'est pas justifiée. Nous avons bon espoir que l'on nous donne raison sur le fond.

Notre région a fait le choix de reprendre la main sur un certain nombre de voies, car les moyens humains et d'ingénierie de SNCF Réseau sont, nous le savons, limités. Nous avons décidé de nous porter acquéreurs d'un certain nombre de lignes de desserte fine du territoire. Nous allons y entreprendre des travaux dans le cadre de l'ouverture à la concurrence.

Les choix des jeunes s'agissant du permis de conduire sont inquiétants pour les territoires ruraux. Nous devons faire preuve d'imagination et trouver des solutions.

Nous voyons les acteurs du fret routier investir dans le fret ferroviaire. C'est positif. Pour la première fois, on constate une demande des acteurs économiques de rebasculer sur le fret - encore faut-il que l'offre soit performante - ou sur le transport public. Cela posera la question du versement mobilités et de ses évolutions.

Il faut envisager des solutions de fret ferroviaire dans les vallées alpines : la dégradation de la qualité de l'air et de l'environnement liée à la circulation d'autant de camions est très préjudiciable pour les territoires concernés.

Nous avons peut-être raté une occasion avec l'écotaxe voilà quelques années. Il est vrai que l'empreinte carbone, dont personne ne se souciait voilà dix ans, devient une priorité à tous les échelons. Et basculer du camion vers le ferroutage me semble relever du bon sens.

Je suis incapable de vous dire si la convention citoyenne est un exercice utile ou non. Il y a très certainement un message politique derrière. À mon sens, il est très difficile de demander à 150 de nos concitoyens de s'exprimer sur un sujet aussi complexe que les transports. Je ne suis pas certain que la pertinence soit totale sur la partie infrastructures En revanche, sur les aspirations en matière de mobilité, cela peut avoir une pertinence. Nous ne parviendrons à convaincre nos concitoyens de basculer vers un transport public que si celui-ci est fiable. La question des mobilités étant centrale, il n'est pas anormal de les consulter.

Sur les mouvements sociaux, il n'est pas admissible qu'à chaque départ en vacances, une partie de nos concitoyens soient pris en otage - je pèse mes mots -, souvent d'ailleurs par des organisations syndicales assez marginales. Sans porter atteinte au droit de grève, qui est un droit constitutionnel, il faut essayer de trouver des solutions face à ce phénomène.

J'ai l'intention de consacrer le temps nécessaire à mes fonctions à l'Afit-France. J'ai indiqué qu'en cas de nomination, je démissionnerais de mon mandat de premier adjoint au maire. J'aimerais conserver ma présidence d'agglomération. Mais, pour cela, j'ai besoin d'avoir l'aval des maires des quarante-six communes concernées, que je n'ai pas encore consultés.

M. Philippe Tabarot. - Vous devez bien savoir si vous resterez ou pas...

M. Franck Leroy. - La décision doit être prise avec eux. Mais, encore une fois, cela ne portera pas atteinte à ma conception du rôle de président de l'Afit-France. J'ai toujours honoré mes engagements. Permettez-moi de prendre du temps pour en discuter avec les élus concernés.

M. Philippe Tabarot- Cela fait quatre mois que vous êtes pressenti.

M. Franck Leroy. - Précisément, à ce stade, je ne suis que pressenti. Mais, croyez-moi, je n'ai pas l'intention de traiter la présidence de l'Afit-France avec désinvolture ; je suis conscient de la responsabilité qui m'incombera si je suis confirmé dans une telle fonction.

Je ne connais pas encore parfaitement le dossier du Lyon-Turin. Je compte bien me rendre sur place.

Les autoroutes électriques font partie des innovations qu'il va falloir encourager. J'ai entendu parler de ce projet, mais je ne le connais pas suffisamment pour pouvoir me prononcer.

La situation des transports en Guyane doit être, je l'imagine, assez problématique. Les choix politiques appartiennent à la fois à la région et à l'État. Bien entendu, si des décisions sont prises en matière d'investissements, l'Afit-France aura pour mission de veiller à leur application et à la mobilisation des fonds nécessaires. Mais ce n'est pas l'instance décisionnaire.

M. Jean-François Longeot, président. - Monsieur Leroy, nous vous remercions de vos réponses.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo, disponible en ligne sur le site du Sénat.

Vote sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Franck Leroy aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit-France)

M. Jean-François Longeot, président. - Nous avons achevé l'audition de M. Franck Leroy, candidat proposé par le Président de la République pour exercer les fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France. Nous allons maintenant procéder au vote sur cette proposition.

Le vote se déroulera à bulletin secret, comme le prévoit l'article 19 bis de notre Règlement. En application de l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote, les délégations de vote ne sont pas autorisées.

Je vous rappelle que le Président de la République ne pourrait procéder à cette nomination si l'addition des votes négatifs des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat représentait au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.

Il est procédé au vote.

Proposition de loi visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève - Désignation d'un rapporteur

Nous devons procéder à la désignation d'un rapporteur sur la proposition de loi visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève.

Ce texte déposé le 14 février dernier par notre collègue Hervé Marseille et plusieurs de ses collègues du groupe Union centriste vise à assurer l'effectivité et la continuité du service public des transports au cours de certaines périodes marquées par de nombreux grands départs. Il permet ainsi au Gouvernement de définir chaque année des périodes, qui peuvent durer jusqu'à quinze jours, et dont la durée cumulée ne peut excéder soixante jours, au cours desquelles l'exercice du droit de grève pour l'ensemble de personnels concourant à la mise en oeuvre du service public de transports pourrait être suspendu.

Cette proposition de loi devrait être examinée dans le courant du mois d'avril et fait écho à d'autres initiatives parlementaires ayant un objet similaire. - ?La prochaine Conférence des Présidents, qui se tiendra le 20 mars, nous donnera des indications plus précises sur ce calendrier.

En vue de cet examen, j'ai reçu la candidature de Philippe Tabarot. Je vous propose donc de le désigner en qualité de rapporteur.

La commission désigne M. Philippe Tabarot rapporteur sur la proposition de loi n° 344 (2023-2024), de M. Hervé Marseille et plusieurs de ses collègues, visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève, dont la commission est saisie au fond (sous réserve de son inscription à l'ordre du jour).

Dépouillement sur la proposition de nomination, par le Président de la République de M. Franck Leroy aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France)

La commission procède au dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination, par le président de la République de M. Franck Leroy aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), simultanément à celui de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale.

Résultat du scrutin :

Nombre de votants : 37

Nombre de bulletins blancs : 10

Nombre de bulletins nuls : 1

Nombre de suffrages exprimés : 26, dont 14 voix pour et 12 voix contre.

La réunion est close à 10 h 05.