Mercredi 22 novembre 2023

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 08 h 30.

Projet de loi de finances pour 2024 - Crédits relatifs à la transition énergétique et au climat - Examen du rapport pour avis

M. Jean-François Longeot, président - Mes chers collègues, avant de commencer notre copieux ordre du jour de ce matin, je tiens au préalable à vous communiquer deux informations.

La première concerne le déplacement d'une délégation de la commission prévu ce jeudi dans le Pas-de-Calais, que nous sommes contraints d'annuler en raison de la difficulté pour les commissaires de libérer une journée en cette période budgétaire bien chargée et en plein congrès des maires. Néanmoins, je vous informe que nous reprogrammerons ce déplacement dont l'objet initial, je vous le rappelle, était d'exprimer la solidarité de la commission avec ce territoire qui vient de faire face à des inondations d'une ampleur tout à fait exceptionnelle, de constater le déploiement et l'engagement des services de l'État aux côtés des communes affectées par cette catastrophe naturelle et d'être à l'écoute à la fois des habitants, des élus locaux et des acteurs économiques. Nous aurons en outre l'opportunité de mesurer la manière dont ont été pris en charge les sinistrés et de tirer un bilan de la réponse de l'État face à cette catastrophe naturelle.

La seconde information concerne le point 5 de notre ordre du jour de ce matin. En effet, à l'issue de l'examen du rapport de Fabien Genet sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat, je vous propose d'examiner dans la foulée les amendements sur la première partie du projet de loi de finances pour 2024. Cette intervention permettra en effet à Philippe Tabarot, qui en a exprimé la demande, d'assister à la réunion de la commission des finances au cours de laquelle les rapporteurs spéciaux présenteront leur rapport sur les infrastructures et services de transports. Nous reprendrons le fil de notre ordre du jour à l'issue de l'examen des amendements concernés.

Avant de commencer l'examen des avis de la commission sur le projet de loi de finances, je donne la parole à notre collègue Jean-Pierre Corbisez qui souhaite intervenir.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Comme vous le savez, je suis sénateur du Pas-de-Calais et je voulais vous exprimer mes remerciements, M. le président, pour avoir pensé à envoyer une mission sénatoriale de notre commission. Cette mission est reportée et c'est une bonne chose car point trop n'en faut. Mon collègue Stéphane Demilly, qui a vécu une situation analogue il y a quelques années lorsqu'il y a eu des inondations dans la Somme, pourra en témoigner. On recense, aujourd'hui, entre deux et trois visites ministérielles par semaine, alors que les élus locaux et les populations sont très fatigués et que le niveau de l'eau ne baisse que très lentement. Si je devais faire de l'humour, je dirais que l'on n'est pas à Beauval et que les populations goûtent de moins en moins ces visites.

Six sénateurs sur sept du Pas-de-Calais ont adressé un courrier au Président du Sénat pour l'inviter à venir dans le département. Il faudrait que notre commission puisse l'accompagner, mais surtout, que ce déplacement n'intervienne qu'après la décrue car nous ne sommes pas encore en mesure d'évaluer l'ampleur des dégâts.

Je ne peux vous dire que ce que j'ai pu constater à titre personnel, en accueillant une famille, avec deux enfants, qui a tout perdu. C'est une situation qui requiert la puissance sénatoriale.

Cette famille a perdu ses deux voitures mais lorsque l'assurance les a remboursés, une franchise a été retranchée. Le maire de la commune d'Arques que l'on a pu voir aux côtés du Président de la République et de M. Bruno Lemaire vit une situation analogue. Il doit refaire son école de musique et la franchise s'élève à 300 000 euros.

Nous connaissons tous le fonctionnement des assurances mais je pense qu'à situation exceptionnelle, il faut une réponse exceptionnelle.

Certes, la présidente de France Assureurs a été présente. Le nombre d'experts va doubler, voire tripler, pour aller plus vite dans l'intérêt des familles et des communes, mais ce n'est pas suffisant.

Il faudra être au côté des maires. Comme vous le savez tous, et beaucoup d'entre vous ont été maires, lorsqu'il y a un incident, l'élu d'astreinte ou le maire est le directeur des opérations de secours. Or dans une petite commune rurale, il est aussi salarié et il doit prendre des congés car son entreprise ne prend pas en compte ces fonctions de directeur des opérations de secours.

Il faudra être attentif à la situation financière des communes. Il ne faut pas que les assurances ou les services de l'État s'exonèrent de leurs responsabilités en demandant des comptes sur l'utilisation de la taxe sur la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) et sur le respect des engagements de travaux. Beaucoup de communes rurales ont utilisé cette ressource pour faire des travaux mais souvent le produit de la taxe n'est pas suffisant et il faut trouver des moyens supplémentaires.

J'insiste, les maires ont besoin de nous. Je vous remercie à nouveau de vouloir venir dans mon département pour voir l'ampleur des dégâts mais peut être au printemps après la décrue et lorsque les murs des bâtiments auront eu le temps de sécher.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci pour ce témoignage et ces précisions car nous n'avons pas toujours conscience de la charge et de la fatigue que représentent de tels évènements.

Concernant le courrier d'invitation adressé au Président du Sénat, nous restons à sa disposition s'il souhaite que notre commission l'accompagne.

Enfin concernant la GEMAPI, comme je l'indiquais à un de vos collègues récemment, la problématique relève de la compétence de la commission des lois. En revanche, une action est envisageable sous l'angle de la gestion des catastrophes naturelles qui relève, elle, de notre commission. Je partage totalement ce que tu nous as dit, les ressources générées par la taxe GEMAPI peuvent s'avérer très insuffisantes quand les besoins sont importants.

Je donne, à présent, la parole à notre collègue Fabien Genet, pour qu'il nous présente son rapport pour avis.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat. - Il me revient ce matin de vous présenter le fruit de mes travaux en ma qualité de rapporteur pour avis des crédits « Transition énergétique et climat ». C'est une première pour moi et vous remercie pour votre bienveillance.

Cet avis portera, comme à l'accoutumée, sur trois thèmes : le verdissement des finances publiques, en lien avec mes collègues rapporteurs Guillaume Chevrollier et Pascal Martin, le développement des énergies renouvelables et la rénovation énergétique des bâtiments.

Commençons par le verdissement des finances publiques, mis en exergue par la quatrième édition du « budget vert » de l'État. Les dépenses « favorables à l'environnement » s'élèvent à 39,7 milliards d'euros, soit une hausse d'environ 7 milliards d'euros par rapport à 2023. Les dépenses dites « défavorables » s'établissent à 13,1 milliards, en baisse de 20 milliards d'euros. Par ailleurs, pour la première fois depuis de nombreuses années, les effectifs des ministères en charge de la transition écologique verront leurs effectifs augmenter (+ 307 équivalents temps plein).

Ce verdissement doit cependant être nuancé. Tout d'abord, car, en écartant l'extinction des boucliers tarifaires, les « dépenses brunes » restent globalement stables, comme l'a d'ailleurs reconnu Bercy. Par ailleurs, 90 % du budget s'inscrit dans la catégorie des dépenses « neutres » ou « non cotées ». Enfin, concernant les moyens des ministères en charge de la transition, l'augmentation, bien réelle, est cependant loin de compenser les suppressions de postes intervenues depuis le début du premier quinquennat du Président Macron.

Concernant le verdissement des finances publiques, les collectivités territoriales, à l'origine de 70 % de l'investissement public, sont également amenées à jouer un rôle essentiel dans la hausse des dépenses nécessaires à l'atteinte de nos objectifs énergétiques et climatiques d'ici 2030 : selon l'Institut de l'Économie pour le Climat (I4CE), au moins 12 milliards d'euros d'investissements dédiés au climat devraient être réalisés par les collectivités chaque année, soit presque 20 % de leur budget d'investissement. C'est deux fois plus que les montants actuellement mobilisés (5,5 milliards). Il est donc urgent de mieux outiller et de mieux accompagner les collectivités territoriales pour faire face au « mur » d'investissements verts qui se présente devant elles.

Face à ce « mur », la mise en place d'un « budget vert » doit être encouragée, notamment par l'élaboration d'une méthodologie harmonisée. La publication obligatoire d'un « budget vert » pour les collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants, dès 2024, votée par l'Assemblée nationale semble toutefois prématurée ; il est préférable de rendre sa mise en place facultative, tout en encourageant l'État et les associations de collectivités territoriales à élaborer une méthode adéquate. Tel est le sens de l'amendement que nous vous soumettrons avec Guillaume Chevrollier et Pascal Martin.

Par ailleurs, je partage les constats de l'excellent rapport de la délégation aux collectivités territoriales consacré à la transition écologique dans les territoires, dont notre collègue Pascal Martin était co-rapporteur. La méthode de soutien financier de l'État est aujourd'hui incompatible avec les exigences de la transition écologique. Un changement de méthode s'impose donc. Ce changement pourrait être amorcé dès 2024 : le Gouvernement devra remettre au Parlement une stratégie pluriannuelle définissant les financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale. Cette publication devra servir de support à une programmation pluriannuelle du soutien apporté par l'État aux collectivités territoriales. Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) devront, par la suite, constituer la traduction territoriale de cette pluriannualité.

J'en viens au deuxième thème de cet avis budgétaire : le développement des énergies renouvelables.

Quelques mois après la promulgation de la loi d'accélération de la production d'énergies renouvelables (loi « AER »), je vous proposerai d'amplifier, dans ce projet de loi de finances, la dynamique initiée par ce texte, en remerciant au passage Didier Mandelli, rapporteur de cette loi, pour les échanges préparatoires. Nous pourrions compenser le coût cumulé des amendements que je vous présenterai, que j'estime à 390 millions d'euros, par un rétablissement du taux de la contribution infra-marginale (CRIM) à 90 %, permettant de taxer les superprofits réalisés par les producteurs d'électricité dans un contexte d'envolée des prix de vente, pour une recette additionnelle estimée à 400 millions d'euros.

Dans la continuité des avancées de la loi « AER » visant à libérer des surfaces de déploiement artificialisées pour le développement du photovoltaïque, je vous proposerai tout d'abord deux amendements de soutien à l'autoconsommation photovoltaïque, cohérents avec les travaux menés par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), en ouvrant l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) à ces installations et en faisant bénéficier ces équipements du taux de TVA de 5,5 %.

Il me semble, par ailleurs, nécessaire de renforcer les moyens dédiés à la chaleur et au froid renouvelables. Le montant actuel du Fonds Chaleur ne permettra pas de répondre à la dynamique de terrain observée depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et de la crise énergétique : le portefeuille de projets, pour l'ensemble de l'année en cours, est 2,2 fois plus élevé que les crédits disponibles ! Nous pourrions ainsi augmenter les moyens du Fonds Chaleur de 820 millions à 1 milliard d'euros, montant recommandé par le récent rapport de la commission d'enquête sénatoriale sur la rénovation énergétique.

M'inspirant une nouvelle fois d'une recommandation formulée par le SGPE, je vous proposerai également de créer un fonds de garantie doté de 50 millions d'euros, géré par l'Ademe, pour encourager la valorisation de la chaleur fatale.

Troisième et dernière piste d'amendement sur le sujet : l'extension aux abonnements et à la fourniture de froid renouvelable du taux de TVA de 5,5 % actuellement applicable à la chaleur renouvelable. Le développement des réseaux de froid doit en effet être plus largement soutenu pour adapter les territoires et protéger les populations face au réchauffement climatique, tout en limitant le recours à la climatisation individuelle, source d'îlots de chaleur et émettrice de gaz à effet de serre.

Enfin, j'aimerais que nous prolongions la dynamique initiée par la loi « AER » afin d'accroître les retombées économiques des projets d'énergies renouvelables dans les territoires pour en renforcer l'acceptabilité.

Je vous présenterai donc deux amendements :

- le premier pour faire bénéficier les communes d'une fraction (20 %) de l'impôt forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) pour les éoliennes faisant l'objet d'un projet de rééquipement (repowering), cette répartition ne s'appliquant pour l'heure que pour les nouvelles installations  ;

- le second pour supprimer l'article 27 quinquies, introduit à l'Assemblée nationale, exonérant de taxe foncière sur les propriétés bâties l'ensemble des mâts d'éoliennes. Cet article conduirait en effet à réduire les recettes perçues par les collectivités territoriales au titre du déploiement des énergies renouvelables, à rebours de la logique instaurée par la loi « AER ». Supprimer le bénéfice de la taxe foncière enverrait également un mauvais signal aux communes, chargées d'identifier des zones d'accélération des énergies renouvelables en application de la même loi « AER ».

J'aborderai enfin le dernier thème de cet avis budgétaire : la rénovation énergétique des bâtiments.

L'effort budgétaire consenti par la loi de finances initiale en faveur de la rénovation énergétique des logements via le dispositif MaPrimeRénov' a été salué par les acteurs associatifs que j'ai entendus : la hausse affichée - 1,6 milliard supplémentaire pour atteindre 4 milliards d'euros - laissait en effet présager d'un changement d'échelle attendu, les résultats obtenus étant jusqu'ici largement insuffisants pour honorer nos objectifs énergétiques et climatiques. Mais cette hausse doit malheureusement être relativisée. D'une part, car les montants annoncés découlent pour partie d'une habile distorsion de périmètre : des reliquats de la trésorerie de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), une valorisation directe de certificats d'économie d'énergie par cette agence, et des recettes de la vente aux enchères des quotas carbone sont en effet intégrés dans le total annoncé ! D'autre part, un amendement retenu par le Gouvernement est venu ponctionner MaPrimeRénov' de 400 millions d'euros pour le financement de la rénovation des logements sociaux. Au total, en retranchant ces effets de périmètre et ces 400 millions d'euros, l'effort budgétaire est deux fois moindre que celui affiché par le Gouvernement (soit 885 millions d'euros).

Au-delà de ces considérations sur le volume d'aides, la refonte annoncée de MaPrimeRénov' constitue un motif de satisfaction, les orientations de cette refonte reprenant d'ailleurs en partie les recommandations du rapport de la commission d'enquête sénatoriale.

La réorganisation de MaPrimeRénov' autour de deux piliers devrait contribuer à accroître l'efficacité des aides versées.

Le pilier « performance », dédié aux travaux de rénovation du bâtiment, sera désormais soumis à une obligation de moyens et de résultats, ce qui devrait encourager les ménages à privilégier des rénovations performantes. Le bénéfice de ces aides sera, de surcroît, conditionné à une assistance par un Accompagnateur Rénov' public ou privé, agréé par l'Anah ; cet accompagnement - qui fera l'objet d'une aide spécifique - est de nature, si on trouve suffisamment d'agents, à renforcer la cohérence des travaux engagés, tout en limitant les risques de fraude. Par ailleurs, l'accroissement substantiel du taux et du plafond de prise en charge, progressifs en fonction du niveau de revenu, contribuera à réduire le « reste à charge » des ménages aux revenus médians et modestes.

Le pilier « efficacité », consacré au remplacement des modes de chauffage, sera enfin conditionné, pour les habitats individuels, à la présentation d'un diagnostic de performance énergétique. Aussi, les propriétaires de passoires thermiques ne pourront plus bénéficier de ce pilier et seront obligatoirement réorientés vers le pilier « performance ».

Si les améliorations sont donc notables, le projet gouvernemental ne lève toutefois pas l'ensemble des inquiétudes.

Un temps envisagé, le conditionnement du pilier « performance » à l'atteinte d'une étiquette A, B ou C a finalement été abandonné, au profit d'un gain de deux classes énergétiques. D'où le choix fait par le Gouvernement d'afficher un objectif de 200 000 rénovations « d'ampleur », et non de 200 000 rénovations « performantes », lesquelles impliquent d'atteindre a minima la classe C du diagnostic de performance énergétique (DPE) ! Derrière ce tour de passe-passe sémantique se cache donc une baisse notable de l'ambition du Gouvernement.

De plus, la problématique cruciale du « reste à charge » n'est pas complètement écartée, en dépit des améliorations permises par le projet de loi de finances. Pour les ménages modestes, le « reste à charge » reste trop important, comme l'ont mis en avant les travaux d'I4CE. Pour les classes moyennes, l'accès aux financements bancaires via l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) reste trop limité, faute notamment d'une mobilisation suffisante du secteur bancaire, comme l'a récemment révélé la Cour des comptes.

Dans l'attente des nouveaux contours du service public de la rénovation énergétique - attendus pour 2025 - on peut également craindre que le nombre d'Accompagnateurs Rénov' disponibles sur le terrain soit insuffisant, ce qui pourrait entraver le déploiement du pilier « performance ».

Enfin, au-delà des questions budgétaires, une montée en puissance de la filière s'avère nécessaire pour relever le défi de la rénovation énergétique des bâtiments.

Je terminerai cette présentation par un rapide développement sur la rénovation des bâtiments publics. Selon le rapport Pisani-Ferry & Mahfouz, l'atteinte des objectifs énergétiques et climatiques de la France nécessitera le fléchage de 10 milliards d'euros supplémentaires d'ici la fin de la décennie pour la rénovation énergétique du bâti public. Une part essentielle de ce montant devra être orientée en direction des collectivités territoriales, propriétaires d'une part majoritaire du parc public national. En tenant compte de la proportion des bâtiments détenus par ces collectivités, c'est 1 milliard d'euros par an qui devra être mobilisé localement.

Le «  fonds vert » met à disposition des collectivités territoriales des crédits pour faire face à ce « mur » d'investissements. Toutefois, cette action n'est pas seulement dédiée à la rénovation énergétique du bâti : ses crédits soutiennent également le tri à la source et la valorisation des bio-déchets, ainsi qu'un soutien à la modernisation de l'éclairage public. On peut donc craindre que le soutien de l'État soit insuffisant pour répondre aux besoins, ce que n'ont pas manqué de relever les associations de collectivités territoriales que j'ai entendues.

Afin de soutenir plus massivement la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales, je soumettrai donc à votre vote un amendement visant à accroître les moyens du « fonds vert » de 100 millions d'euros.

En définitive, j'émettrai donc, mes chers collègues, un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la transition énergétique et climatique, inscrits au projet de loi de finances pour 2024, sous réserve de l'adoption des amendements présentés.

M. Jacques Fernique. - La liasse d'amendements proposés nous semble tout à fait cohérente. Un équilibre a été trouvé grâce au maintien du taux de prélèvement de la contribution sur la rente infra-marginale (CRIM) à 90 %. L'Assemblée proposait de maintenir cette contribution sur les superprofits réalisés par les producteurs d'électricité lors de l'envolée des prix, mais à un taux de 50 %.

Nous partageons les remarques du rapporteur concernant la rénovation thermique des bâtiments et notamment MaPrimeRénov'. Elles correspondent à ce que proposait la commission d'enquête sénatoriale sur l'efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique.

Je relève toutefois qu'une partie importante des crédits de MaPrimeRénov' n'est pas consommée. Il faut certes augmenter les moyens. C'est réalisé en partie, même si une part de l'augmentation est en trompe l'oeil : je souscris à la formule du rapporteur qui évoque une habile distorsion du périmètre. Il s'agit d'une hausse notable qu'il faut saluer, mais, si je ne me trompe pas, c'est près d'un milliard de crédits de paiement qui n'ont pas été consommés en 2023 et qui ont été annulés. Cela montre qu'il y a un problème de moyens mais aussi de conditions de leurs consommations.

M. Hervé Gillé. - Je partage tout à fait l'analyse qui a été faite. J'ajouterai seulement que la faible consommation des crédits doit être étudiée au regard de la crise du logement. Cette problématique mérite d'être approfondie. Il faut trouver comment dynamiser le système d'aides et d'accompagnements à la rénovation et l'adaptation des logements dans un contexte de crise du logement.

On parle aujourd'hui d'une des crises les plus importantes depuis l'après-guerre, similaire à celle de 1992. Il nous faut apporter une réponse forte, identifier les potentiels effets de levier et poursuivre notre réflexion notamment dans le cadre d'autres travaux parlementaires.

Mme Marie-Claude Varaillas. - Je tenais à évoquer le problème du « reste à charge » pour les familles, en particulier pour les familles modestes et très modestes. Nous faisons face à une double difficulté, celle de trouver des artisans et celle du « reste à charge » pour les rénovations globales. Il faut diminuer le « reste à charge » pour les familles modestes si l'on veut atteindre l'objectif des 200 000 rénovations globales au lieu des 60 000 à 70 000 actuellement.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Nous venons d'évoquer les certificats d'économie d'énergie (CEE). Je tenais à rappeler qu'à partir du 1er janvier de l'année prochaine, les CEE seront gérés par l'Anah.

Jusqu'à présent, c'était ceux que l'on appelait les « grands industriels pollueurs », ceux qui avaient besoin de rembourser leur dette carbone, qui portaient les CEE.

Dans quelques semaines, compte tenu du fonctionnement de l'Anah, on peut craindre des délais de remboursement très importants pénalisant pour les familles qui entreprennent des travaux et qui supportent déjà un « reste à charge ».

Les candidats ne voudront plus s'engager sur des rénovations globales parce que l'avance de trésorerie serait trop importante.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - Je remercie mes collègues pour leurs remarques que je partage.

Concernant MaPrimeRenov', les choses peuvent être améliorées aux différentes étapes de la procédure. Il faut créer une vraie mobilisation d'ensemble qu'il s'agisse d'informer nos concitoyens sur les moyens qui sont mis à leur disposition ou de leur rappeler l'impérieuse nécessité de faire ces travaux.

Le conditionnement des aides à l'assistance par un Accompagnateur Rénov' me semble une bonne idée. Il faudra toutefois être attentif lors de l'application de cette mesure et vérifier qu'il n'y a pas d'effets de bord contreproductifs. En effet, si le nombre d'Accompagnateurs était insuffisant, on pourrait craindre un ralentissement des rénovations, ce qui serait très dommageable.

Concernant le « reste à charge », je partage vos préoccupations et je crois que les dispositions contenues dans le projet de loi de finances vont dans le sens de leur diminution.

Enfin, et cela a été dit, la mobilisation des artisans et des entreprises est déterminante. Je retiens toutefois des entretiens que j'ai eus lors de ces travaux préparatoires que si la crise du logement est très préoccupante, elle peut également créer de nouvelles opportunités. Puisqu'il y a un recul de la construction neuve, un certain nombre d'artisans et d'entrepreneurs vont vouloir suivre des formations et obtenir les labels nécessaires afin d'orienter l'activité de leur entreprise vers la rénovation. Cela pourrait être une conséquence positive en faveur des travaux nécessaires de rénovation.

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, s'il n'y a plus de demande de prise de parole, je vais demander au rapporteur de présenter ses amendements.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 6

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement I-1073 vise à ouvrir l'éco-PTZ aux travaux d'installation de panneaux photovoltaïques d'une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatts-crête, dans le cadre d'une opération d'autoconsommation.

L'amendement  I-1073 est adopté.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement I-1074 vise à étendre le taux de TVA réduit à 5,5 %, dont disposent aujourd'hui les travaux de rénovation énergétique, à la pose et à l'installation de panneaux photovoltaïques d'une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatts-crête (KWc), dans le cadre d'une opération d'autoconsommation. 

L'amendement  I-1074 est adopté.

Article 8 bis

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement I-1071 vise à rétablir le taux de la contribution sur la rente infra-marginale (CRIM) de 90 %, afin d'optimiser la contribution du prélèvement au budget de l'État.

L'amendement  I-1071 est adopté.

Après l'article 12

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement I-1075 vise à étendre aux abonnements et à la fourniture de froid renouvelable le taux réduit de TVA réduit de 5,5 % actuellement applicable aux abonnements et à la fourniture de chaleur renouvelable.

L'amendement  I-1075 est adopté.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - Le fléchage d'une part de l'impôt forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) en direction des communes n'est pas prévu dans le cas des éoliennes installées avant le 1er janvier 2019. Les communes devraient pourtant pouvoir bénéficier des retombées des projets de rééquipement (repowering), qui engagent leur territoire pour une nouvelle période d'au moins quinze ans. L'amendement I-1076 corrige cette anomalie, en étendant la répartition de l'Ifer applicable aux nouvelles éoliennes, issue de la loi de finances pour 2019, aux éoliennes faisant l'objet d'un projet de rééquipement.

L'amendement  I-1076 est adopté.

Article 27 quinquies

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement I-1072 vise à supprimer l'article 27 quinquies, introduit à l'Assemblée nationale, visant à exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) l'ensemble des mâts d'éoliennes.

L'amendement  I-1072 est adopté.

Article 35

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - L'amendement vise à accroître les moyens du Fonds Chaleur de 820 millions à 1 milliard d'euros.

L'amendement  II-293 est adopté.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - Cet amendement vise à créer un fonds de garantie de 50 millions d'euros géré par l'Ademe pour encourager la valorisation de la chaleur fatale.

L'amendement  II-294 est adopté.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - Afin de soutenir plus massivement la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales, l'amendement vise à accroître les moyens du « fonds vert » de 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

L'amendement  II-292 est adopté.

Article 49 decies

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. - Comme indiqué dans mon intervention, l'amendement vise à rendre facultative la mise en place d'un « budget vert » pour les collectivités territoriales, tout en encourageant l'État et les associations de collectivités territoriales à élaborer une méthode adéquate.

L'amendement  II-291 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la transition énergétique et climatique de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sous réserve de l'adoption de ses amendements.

Projet de loi de finances pour 2024 - Première partie - Examen des amendements de séance

M. Jean-François Longeot, président. - Nous passons à l'examen des amendements sur la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

TRANSPORTS FERROVIAIRES, FLUVIAUX ET MARITIMES

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Juste avant de présenter les amendements, je souhaite partager avec vous ma position sur les modalités de notre travail avec la commission des finances. Je vous rappelle que la plupart d'entre nous, ici, sont rapporteurs pour avis, un titre qui a du sens, qui représente un travail considérable.

Je souhaite vous faire part de mon souhait de voir évoluer les relations de notre commission avec la commission des finances dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances : l'élaboration d'une méthode de travail partagée avec la commission des finances serait des plus pertinentes et permettrait, grâce à l'organisation d'auditions communes, de ne pas convier un même interlocuteur au Sénat à de multiples reprises. Il me semble aussi que, chaque année, il serait de bonne pratique de renforcer les échanges sur ce texte en amont de son examen en séance publique. Nous pourrions définir une méthode de travail pour les prochains PLF.

Je souhaiterais que les échanges avec la commission des finances soient les plus fructueux possible, et pour ce faire, nous devons faire preuve au sein de la commission de solidarité et de cohérence dans nos positions.

Après l'article 5 octies (nouveau)

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1078 vise à rehausser le plafond concernant l'exonération des plus-values sur la cession de bateaux de navigation intérieure affectés au transport de marchandises. Ce plafond, aujourd'hui fixé à 100 000 euros, constitue une exception par rapport aux régimes applicables dans d'autres pays européens directement en concurrence avec nous sur ce thème, comme l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas, où les régimes d'exonération ne prévoient pas de plafond.

Pour autant, le Gouvernement s'oppose depuis plusieurs années à la suppression de ce plafond, au motif qu'une telle mesure ne serait pas conforme au cadre européen sur les aides d'État. On s'aperçoit cependant que cette suppression est possible pour les autres pays de l'Union européenne. Il semble donc essentiel d'assurer à nos entreprises fluviales des conditions de concurrences équivalentes et ce, d'autant plus avec la mise en service du Canal Seine-Nord Europe prévue dans les prochaines années.

Je vous propose donc de doubler le plafond sur l'exonération des plus-values pour qu'il s'établisse à 200 000 euros, pour favoriser la compétitivité de ces entreprises et le renouvellement de leur flotte.

L'amendement n° I-1078 est adopté.

Après l'article 5 nonies (nouveau)

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1079 vise à instituer un mécanisme de suramortissement fiscal au bénéfice des entreprises ferroviaires qui acquièrent du matériel roulant peu polluant, comme les wagons et locomotives décarbonés. Vous le savez, le transport ferroviaire est un levier important de la décarbonation du secteur des transports. Si le ferroviaire est le moyen de transport le plus décarboné, il reste pourtant 45 % du réseau qui n'est, à ce jour, pas électrifié. Le dispositif proposé incitera à la décarbonation du transport ferroviaire. Il a fait l'objet d'échanges avec la fédération des industries ferroviaires.

L'amendement n° I-1079 est adopté.

Après l'article 10 septies (nouveau)

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1077, que je présente avec Hervé Gillé, est un marronnier ! Il vise à appliquer un taux de TVA réduit de 10 % à 5,5 %, comme ce fut le cas par le passé, aux transports collectifs de voyageurs, qu'ils soient routiers, guidés ou ferroviaires, hormis les services librement organisés.

Dans cette commission, nous considérons en effet les transports du quotidien comme un produit de première nécessité. Il s'agit là à la fois d'un message fort et d'une réalité. La présentation de ce PLF a montré que quelques entorses avaient été faites à la règle de ne pas toucher à la TVA, dans des domaines qui me semblent moins prioritaires que le transport quotidien.

Cet amendement aidera également les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) en difficulté financière à proposer une offre élargie et plus qualitative, notamment avec le renouvellement des flottes de bus et leur décarbonation, laquelle a un certain coût, particulièrement dans un contexte d'inflation et de hausse des coûts de l'énergie. Ce message est important et je me réjouis que l'Assemblée nationale, au travers d'une niche parlementaire, s'intéresse à ce sujet que nous avons fait voter depuis plus de trois ans au Sénat, et qui a maintenant enfin trouvé un écho dans l'autre chambre. Il est bon que nous puissions réaffirmer, grâce à cet amendement, notre volonté de voir baisser la TVA sur les transports du quotidien.

M. Jacques Fernique. - Je suis tout à fait favorable à cet amendement, mais je souhaite ajouter une remarque. Vous dites que cette baisse de TVA est un marronnier ; notre travail ici consiste non pas à examiner les mêmes textes tous les ans, mais à obtenir des avancées !

Sur ce sujet, on brandit souvent comme contre-exemple le secteur de la restauration, où la baisse de la TVA n'a ni profité à l'emploi ni fait baisser le coût pour les clients. Mais cet amendement est intéressant car il tend non pas à baisser mécaniquement le tarif du billet pour les usagers, mais à donner de l'oxygène aux AOM, lesquelles restent à mon sens libres de décider de manière autonome du fléchage de la somme dégagée - charges d'exploitation, investissements, signal en direction des usagers. Il est dénué de cette démagogie consistant à faire croire que l'on va baisser le ratio du prix payé par les usagers dans le modèle économique des transports collectifs.

Un autre argument, souvent avancé par le Gouvernement, pour s'opposer à cette proposition consiste à brandir des directives européennes ou la notion de distorsion de la concurrence. Il n'est pas question de cela ici. L'ensemble des transports collectifs de voyageurs routiers et ferroviaires sont concernés par cette mesure. Cet amendement n'introduit aucune préférence et représenterait 280 millions d'euros pour le budget du pays.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - Compte tenu des travaux de M. Tabarot et de son engagement, il est le premier signataire de cet amendement, que nous soutenons, bien évidemment. Nous sommes bien dans la perspective, qu'évoquait M. Fernique, de mobiliser des moyens pour essayer de susciter un choc d'offre.

Les conditions d'intermodalité nécessitent d'être travaillées dans tous les aspects de nos politiques publiques. La mobilisation des crédits pour provoquer ce choix d'offre fait aussi partie du coeur de nos travaux.

L'amendement n° I-1077 est adopté.

TRANSPORTS ROUTIERS

Après l'article 5 sexies (nouveau)

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - L'amendement n°  I-1080 est présenté en commun avec M. Tabarot, que je salue pour la qualité de nos échanges et de nos travaux. Je me réjouis que nous avancions ensemble sur des lignes de crête partagées, pour tenter de renforcer l'impact de nos travaux sur le PLF.

Cet amendement vise à élargir le champ de l'expérimentation du prêt à taux zéro pour l'acquisition de véhicules peu polluants, prévue à l'article 107 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et à en prolonger la durée.

Il s'agit d'un dispositif dont le périmètre est, pour l'heure, circonscrit aux personnes physiques et morales domiciliées ou travaillant dans l'une des zones à faibles émissions mobilité en dépassement des seuils de qualité de l'air. Ce champ est trop réduit : c'est pourquoi l'amendement tend à l'élargir à l'ensemble des personnes physiques et morales.

En outre, les décrets d'application ont malheureusement été publiés très tardivement, en mai dernier, alors même que l'expérimentation, prévue pour une durée de deux ans seulement, était supposée débuter au 1er janvier 2023. Compte tenu du retard pris, cet amendement propose de prolonger la durée de l'expérimentation.

L'amendement n° I-1080 est adopté.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1081, également présenté avec M. Tabarot, vise à créer un prêt à taux zéro pour l'acquisition de véhicules lourds de transport de marchandises peu polluants ou pour l'acquisition d'autobus peu polluants.

L'objectif est de répondre à l'impératif de décarbonation des flottes des transporteurs, mais aussi - et c'est là un point central de l'amendement - de faciliter l'acquisition par les AOM d'autobus peu polluants, dans la perspective de la fin de vente des bus urbains thermiques d'ici à 2035. Cette proposition nous semble d'autant plus nécessaire, dans le contexte actuel de taux d'intérêt élevés, que la France est très en retrait sur ces politiques d'accompagnement par rapport à d'autres pays européens.

L'amendement n° I-1081 est adopté.

Après l'article 27 bis (nouveau)

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1083, présenté en commun avec M. Tabarot, a pour objectif d'augmenter le taux maximum de versement mobilité de 1,75 % à 1,85 % des salaires dans les communes et établissements publics de coopération intercommunale ayant mis en place une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m) et dont les normes de qualité de l'air ne sont pas respectées au 1er janvier 2024.

Dans ces ZFE-m, le calendrier fixé par la loi impose en effet l'interdiction de circulation des véhicules classés Crit'Air 3 d'ici au 1er janvier 2025. Cette situation concerne cinq métropoles : Paris, Lyon, Aix-Marseille, Rouen et Strasbourg. Elle implique, pour les agglomérations concernées, d'importants investissements pour le développement de solutions alternatives à l'automobile.

C'est pourquoi cet amendement prévoit d'augmenter, à un niveau acceptable, le taux maximum du versement mobilité, hormis à Paris, puisque les taux fixés en Île-de-France sont par ailleurs accrus dans le cadre de ce PLF. Cette hausse est toutefois conditionnée à l'accélération du déploiement d'infrastructures de transport et à la mise en oeuvre de services d'accompagnement des usagers dans le renouvellement de leur véhicule.

L'amendement n° I-1083 est adopté.

Article 28

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-1082, toujours présenté en commun avec M. Tabarot, a pour objet d'affecter 100 millions d'euros supplémentaires de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France).

Il vise à tenir compte de la volonté exprimée par la commission des finances d'affecter aux départements et aux communes 100 millions d'euros issus du produit de la taxe créée par l'article 15 du PLF pour 2024. La commission des finances propose que, sur ces 100 millions d'euros, 50 millions d'euros soient réaffectés aux départements, et 50 millions d'euros aux communes. Cette somme ne pourra pas, de fait, bénéficier à l'Afit France. C'est pourquoi le présent amendement tend à conforter le financement de l'Afit France pour financer le choc d'offre dont nous parlions précédemment.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Cet amendement illustre notre volonté commune d'avoir un meilleur fléchage des sommes prélevées au secteur des transports par les différentes taxes : TICPE, TVA... Le retour dans le domaine du transport est très faible. Or ce domaine est l'un des seuls qui n'enregistrent aucune baisse de ses émissions : il a donc besoin d'être soutenu dans sa décarbonation.

Il est de notre mission d'obtenir un meilleur fléchage de ces ponctions, de ces crédits, qui sont alloués aux transports de manière presque symbolique, alors que tout part dans le budget de l'État, lequel a évidemment des besoins dans d'autres nombreux domaines. Mais il semble logique que ce qui est prélevé sur le transport permette en grande partie de financer notre politique de transport. Cette mesure va totalement dans ce sens.

L'amendement n° I-1082 est adopté.

TRANSPORTS FERROVIAIRES, FLUVIAUX ET MARITIMES
TRANSPORTS ROUTIERS
TRANSPORTS AÉRIENS

M. Jean-François Longeot, président. - Nous allons à présent évoquer l'article 15 du projet de loi de finances pour 2024, sur lequel plusieurs de nos collègues souhaitent intervenir.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports aériens. - J'avais eu l'occasion d'exprimer mon sentiment sur l'article 15 du PLF lors de la présentation de mon rapport pour avis. Je ne peux que qualifier cette disposition de « frappadingue », tant sur le fond que sur la forme.

Sur la forme, il a fallu trouver un deuxième « larron », car on ne pouvait pas taxer les seules sociétés d'autoroutes qui étaient ultrabénéficiaires. Le Conseil d'État a donc imposé que l'on trouve un second financeur, et le choix s'est porté sur le secteur aérien.

Sur le fond, je rappelle que tant les plateformes que les compagnies aériennes, comme Air France, sont très déficitaires. Elles ont toutes deux des milliards à investir pour assurer la décarbonation du transport aérien. Les taxer en cette période compliquée pour elles me paraît parfaitement ubuesque.

Surtout, cette mesure laisse le champ libre aux compagnies low cost étrangères qui ne paient pas d'impôts chez nous, et qui ne sont pas installées sur les cinq plateformes concernées. Je ne comprends donc pas du tout le sens de cet article 15, même si je trouve judicieux de taxer les sociétés d'autoroute. C'est l'obligation de trouver un deuxième larron, déjà en difficulté, qui ne me convainc guère, et c'est pourquoi je cosignerai l'amendement que présentera Vincent Capo-Canellas pour supprimer cet article.

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis. - Nous avons eu l'occasion d'échanger en détail sur le sujet pour définir les arbitrages les plus pertinents dans le contexte actuel. Il faut cependant faire attention car, si la pandémie de covid a eu un fort impact sur les déplacements, les conditions structurelles du fonctionnement du marché du transport aérien sont aujourd'hui de nouveau réunies pour une évolution particulièrement dynamique du secteur.

C'est le coût du billet qui, en fin de compte, permet le développement ou non du marché. En tout état de cause, il n'impacte pas aujourd'hui l'évolution du transport aérien - bien au contraire, d'ailleurs, si l'on en croit le dynamisme actuel. L'analyse de fond devrait donc porter sur ce coût. Quel impact aurait une augmentation de 5 %, 10 % ou 15 % sur le transport aérien ? Les plateformes aéroportuaires le supportent ; elles sont dans des situations financières très tendues, parfois déficitaires, mais le système tient, pour le moment. Je suis donc beaucoup plus prudent que notre collègue rapporteur Stéphane Demilly dans mes conclusions. La fenêtre de tir actuelle paraît intéressante.

Se pose aussi la question de la qualité des relations avec les sociétés concessionnaires et de la préparation future du renouvellement des concessions. Faire peser une pression supplémentaire sur les concessions d'autoroute semble permettre de poser un cadre pour de futures négociations, ce qui pourrait favoriser la clarification du système général s'agissant des productions d'excédents et de leur répartition.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Certes, il s'agit bel et bien d'une nouvelle taxe mise en place par le Gouvernement, et je partage le constat qu'elle est injuste pour l'aérien. À la différence de M. Gillé, cependant, j'estime qu'elle fragilise notre position dans les rapports contractuels avec les concessions autoroutières, dont il a beaucoup été question au sein de cette commission. Le Gouvernement pourrait profiter de cette nouvelle taxe, dans le cadre du renouvellement des concessions, pour laisser penser qu'on ne respecterait pas nos conditions contractuelles avec les opérateurs autoroutiers. Ces derniers ne manqueront sans doute pas de mettre cette taxe en cause dans le cadre de futurs contentieux.

En définitive, les usagers risquent de payer. Le Gouvernement taxe les aéroports, qui répercuteront la taxe sur les compagnies, lesquelles la répercuteront à l'identique sur les clients, à la différence des contrats des concessions autoroutières qui fixent la hausse des prix des péages de manière contractuelle. Les sociétés d'autoroute pourront donc demander à augmenter les tarifs de leurs péages pour financer la nouvelle taxe instaurée par le Gouvernement.

Mon propos pourrait faire croire que je suis de l'avis de Stéphane Demilly et que je vais donc soutenir la suppression de l'article 15. Pour autant, je suis de ceux qui demandent des moyens supplémentaires pour l'Afit France. Celle-ci, dont 80 % des dépenses sont fléchées vers le mode ferroviaire, disposerait d'une enveloppe supplémentaire de 600 millions d'euros - 500 millions d'euros, peut-être, si la commission des finances décide d'en récupérer une partie pour les départements et les communes. J'espère cependant que l'amendement de mon collègue Hervé Gillé permettra de retrouver ces 100 millions d'euros par un nouveau fléchage de la TICPE. C'est la raison pour laquelle je ne voterai pas la suppression de l'article 15, tout en faisant part de mes réserves.

M. Ronan Dantec. - Je tiens à vous rassurer sur la santé d'Air France-KLM. Chaque matin, je lis Les Échos, et j'y ai appris que la plus grande marge opérationnelle de toute l'histoire de l'entreprise fut enregistrée au deuxième trimestre 2023. Autrement dit, jamais Air France n'a fait autant de marge !

Par ailleurs, je rappelle que la totalité des exonérations fiscales du transport aérien pèse pour environ 5 milliards d'euros dans le budget de l'État. Ces exonérations sont très nombreuses et la convention de Chicago a bon dos pour justifier l'immobilisme. Je précise également que le transport aérien capte autant sur le transport ferroviaire précisément parce qu'il est sursoutenu par l'État et que la concurrence est faussée.

Mme Marie-Claude Varaillas. - Pour mettre tout le monde d'accord, nous pourrions aussi décider de nationaliser les autoroutes, ce qui permettra de faire rentrer de l'argent !

M. Jacques Fernique. - En votant un amendement de suppression, le Sénat enverrait un très mauvais signal, car cet article 15 est un levier proportionné et nécessaire pour les politiques de décarbonation des transports. Je rappelle que cette taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance porte sur la fraction de revenus de l'exploitation qui excède 120 millions d'euros, avec un taux à 4,6 %. Il faut encore que le niveau moyen de rentabilité excède 10 %. Elle ne constitue donc pas un étranglement.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Oui, les acteurs de l'aérien renouent aujourd'hui avec les bénéfices. Ils n'en sont pas moins confrontés à plusieurs milliards d'euros de dettes, car le secteur s'est arrêté pendant de nombreux mois. De plus, nous devons les aider dans leur décarbonation : 70 % de leurs appareils doivent être renouvelés, ce qui suppose 1 milliard d'euros d'investissement pour Air France, et 500 millions d'euros pour Transavia. Je ne pense pas qu'une surtaxation soit un bon signal à envoyer. En définitive, le client va payer, sous réserve néanmoins qu'il n'aille pas sur d'autres plateformes.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Sur ce sujet, on peut avoir des avis divergents. Je me félicite qu'Air France retrouve des marges, car l'entreprise doit renouveler sa flotte pour passer à des avions moins polluants. Néanmoins, je ne vois rien dans ce budget qui aide l'aviation à se décarboner et permette d'atteindre les objectifs de 2050.

M. Didier Mandelli. - Il faut recadrer le débat. La question n'est pas de savoir quelle est la santé financière d'Air France, puisque seules les plateformes sont touchées directement. Celles-ci devront répercuter, ou pas, ces nouveaux prélèvements sur l'ensemble des compagnies utilisatrices.

Cette discussion traduit surtout l'incapacité de l'État à assumer le financement des besoins de l'ensemble des secteurs, autoroutier, aérien ou ferroviaire, découlant des enjeux de décarbonation. L'État n'a pas les moyens d'investir et tente donc de prendre dans la poche des uns pour financer les autres sans passer par des investissements publics. Le Sénat est à ce titre chargé de statuer sur les 600 millions d'euros de taxes. Je rappelle que les concessions autoroutières sont une propriété d'État ; nous allons donc récupérer une partie des sommes. La question est non pas de savoir s'il faut nationaliser aujourd'hui - la question a été tranchée -, mais de définir nos actions pour demain. Il convient aussi de souligner que les sociétés autoroutières financent déjà très largement l'Afit France par les redevances domaniales ou via le chiffre d'affaires.

Par principe, je ne suis pas favorable à la création de nouvelles taxes. La question des 600 millions d'euros a été tranchée par un amendement du rapporteur général de la commission des finances, Jean-François Husson, qui vise à la réaffectation de 100 millions d'euros aux collectivités. Supprimer cet article enverrait un mauvais signal. Bien sûr, il ne résout rien tant les besoins sont immenses, bien supérieurs à 600 millions d'euros. Nous sommes condamnés, tous les ans, à tenter de grappiller une TVA à 5,5 %, de réaffecter quelques millions d'euros, car nous manquons d'une vision stratégique de long terme sur ces sujets. Je vous donne donc rendez-vous l'année prochaine pour débattre d'autres taxes, d'autres financements croisés, d'autres baisses de dotation... Le débat d'hier avec M. Béchu a d'ailleurs prouvé ce manque de stratégie globale. Globalement, nous ne sommes pas collectivement à la hauteur des enjeux et ce sujet en témoigne une fois de plus.

M. Jean-François Longeot, président. - Pour conclure ces débats autour de l'article 15, la commission a décidé de retenir une position d'équilibre. Libre à chacun de cosigner à titre personnel un amendement sur ce sujet. Nous savons que les besoins de financement de l'Afit France sont immenses, et notre commission ne souhaite pas être responsable de la suppression d'une source précieuse de financements qui sont nécessaires à nos infrastructures de transport. Chacun peut, s'il le souhaite, déposer ou des amendements sur l'article 15.

PRÉVENTION DES RISQUES

Article 3 quaterdecies (nouveau)

M. Pascal Martin, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la prévention des risques. - La loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a prévu un dispositif permettant la réalisation des travaux de mise en sécurité des habitations incluses dans les périmètres des zones de danger des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Ces travaux font l'objet d'un cofinancement par l'État, les collectivités territoriales et l'industriel à l'origine du risque. La clé de répartition est la suivante : 40 % à la charge de l'État par un crédit d'impôt, 25 % à celle de la collectivité territoriale d'implantation de l'installation, et 25 % à celle de l'industriel à l'origine du risque. Restent 10 % à la charge du propriétaire de l'habitation concernée.

Depuis 2013, ces travaux prescrits font l'objet d'un double plafond : le montant ne peut excéder 20 000 euros, ou 10 % de la valeur vénale du bien. Ce plafond n'a pas été revisité depuis 2013, malgré une augmentation d'environ 25 % des prix des bâtiments. Selon l'indice du prix du bâtiment de l'Insee, l'augmentation s'est accentuée depuis deux ans en raison de tensions sur l'offre de matériaux.

L'amendement n°  I-1084 vise donc à augmenter le montant maximal des travaux prescrits de 20 000 euros à 25 000 euros, afin de suivre l'évolution des prix des matériaux et de renforcer les incitations à l'exécution des travaux alors que, malheureusement, au 1er novembre 2023, 75 % des logements privés exposés n'ont pas fait l'objet de travaux de mise en sécurité.

L'Assemblée nationale a retenu une prolongation pour trois ans supplémentaires du crédit d'impôt en faveur des particuliers dont les logements sont inclus dans les périmètres des zones de danger des PPRT. Je salue cette prolongation, puisque le crédit d'impôt devait s'achever en cette fin d'année 2023, laissant de côté les trois quarts des logements privés.

Cette proposition a fait l'objet d'un travail conjoint avec l'Association des communes pour la maîtrise des risques technologiques majeurs (Amaris). Après étude des questions restant en suspens, il apparaît clairement que c'est souvent la présence d'une volonté politique locale qui rend possible la réalisation des travaux. Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou une commune volontariste propose une démarche auprès des propriétaires privés, les travaux sont effectués. L'objectif de cet amendement est donc d'augmenter le montant maximal des travaux.

L'amendement n° I-1084 est adopté.

Projet de loi de finances pour 2024 - Crédits relatifs à l'aménagement numérique du territoire - Examen du rapport pour avis

M. Sébastien Fagnen, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à l'aménagement numérique du territoire. - J'ai le plaisir de vous présenter ce matin, pour la première fois, mon avis sur les crédits du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 relatifs à l'aménagement numérique du territoire, un sujet d'attention pour notre commission et un enjeu stratégique pour notre pays.

Mon propos portera à la fois sur les enjeux relatifs aux infrastructures numériques déployées dans les territoires, et sur les usages du numérique par nos concitoyens et les collectivités territoriales. Ces deux sujets ne peuvent pas s'apprécier sans prendre en compte le contexte général de changement climatique, qui pose des questions relatives à l'adaptation et à la résilience des réseaux, ainsi qu'au potentiel du numérique comme atout pour la transition environnementale dans nos territoires.

Le plan France Très haut débit, lancé en 2013, a pour objectif la généralisation de la connexion internet à très haut débit sur le territoire national. Un premier objectif de généralisation de cette connexion très haut débit a été fixé pour 2022. Aujourd'hui, force est de constater que l'objectif n'est pas pleinement atteint puisque seulement 87 % des Français sont raccordables à un réseau très haut débit au deuxième trimestre 2023. Il faut toutefois souligner la part majeure de la fibre optique très haut débit, à laquelle 83 % des Français sont raccordables, et qui doit être généralisée à l'horizon 2025.

Je tiens à appeler votre attention sur trois points concernant la couverture du territoire par les réseaux de fibre optique.

Tout d'abord, deux constats sur le rythme des raccordements peuvent être dressés. Le premier est qu'il ralentit. D'ici à la fin de l'année, ce sont un peu plus de 3 millions de locaux qui devraient être rendus raccordables à la fibre, contre 6 millions en 2020, en pleine crise sanitaire. Autrement dit, le rythme était bien plus soutenu dans un contexte pourtant très dégradé. Le second est celui des divergences territoriales quant au dynamisme du déploiement, puisque de fortes disparités s'observent sur le territoire national. Plus des deux tiers des nouveaux raccordements en 2023 devraient être menés par les collectivités territoriales, qui déploient des réseaux dans des zones peu denses, dites d'initiative publique, zones qui sont les plus difficiles à couvrir. Nous pouvons saluer le dynamisme et l'esprit de responsabilité de l'ensemble des collectivités qui ne relâchent pas leurs efforts pour assurer la couverture numérique du territoire national.

En revanche, nous ne pouvons pas délivrer le même satisfecit aux opérateurs télécoms privés, qui n'ont toujours pas achevé le déploiement du réseau dans les zones très denses. L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) juge d'ailleurs leur rythme de progression très insuffisant.

Dans les zones moins denses d'initiative privée, dans lesquelles deux opérateurs, Orange et SFR, ont préempté la possibilité de déployer les réseaux, le rythme de déploiement est également à la traîne. Des villes moyennes, structurantes pour leur territoire, comme La Roche-sur-Yon, Les Sables-d'Olonne, Brive-la-Gaillarde ou encore Besançon sont pénalisées par une telle situation.

L'opérateur Orange a d'ailleurs été récemment condamné par l'Arcep à payer une amende record de 26 millions d'euros il y a quelques jours pour non-respect de ses engagements de déploiement dans ces zones moins denses. La veille de cette décision, l'opérateur prenait de nouveaux engagements auprès de l'État dans ce domaine. Espérons qu'il les respectera cette fois-ci.

Je tiens en outre à appeler votre attention sur un cas particulier : celui de Mayotte. La fibre optique n'y est en effet toujours pas déployée. J'espère donc que le Gouvernement et l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) vont agir vite et fort sur ce sujet. C'est un enjeu fondamental d'équité territoriale. Je vous proposerai donc d'adopter un amendement visant à abonder les crédits dévolus au déploiement de la fibre optique et du très haut débit à Mayotte. L'abondement prévu est d'un peu plus de 50 millions d'euros, car l'île souffre aujourd'hui d'une sous-affectation majeure de crédits.

Même si Mayotte est aujourd'hui confrontée à bien d'autres difficultés, il n'en demeure pas moins que dans le soutien que nous devons à la population mahoraise et pour assurer l'équité territoriale, il est indispensable que nous puissions porter collectivement cet effort au travers de cet amendement. Aujourd'hui, le taux de couverture internet fixe à très haut débit est de 40 % seulement, soit deux fois moins que sur le territoire national. La fibre n'y est tout simplement pas déployée. Il serait logique que Mayotte puisse bénéficier des mêmes engagements financiers de la part de l'État que d'autres territoires.

Mon deuxième point concerne les réseaux fibres et leur résilience. L'année passée, les incendies dévastateurs en Gironde avaient mis à nu la vulnérabilité d'une infrastructure rarement enterrée. Cette année, de nouveaux événements météorologiques extrêmes ont causé des dégâts considérables sur les réseaux. Je pense en particulier à la tempête Ciaran. Ces événements vont devenir plus fréquents compte tenu du dérèglement climatique. Or notre société est de plus en plus dépendante à ces technologies, y compris les secours pour leurs interventions au cours de telles situations. Les exemples locaux se multiplient, notamment les différentes tempêtes auxquelles nous avons été confrontés ces dernières semaines et qui ont privé certains centres de secours de tout moyen de communication.

Si Enedis a déployé des moyens considérables pour rétablir les réseaux d'électricité, le même effort n'a pu être constaté concernant les réseaux internet. La remise en service par Orange a beaucoup tardé, et se fait même encore attendre dans certaines zones. Dans la Manche, plus de quinze jours après le passage de la tempête Ciaran, certaines exploitations agricoles, parfois très dépendantes des outils numériques, n'ont toujours pas vu leur connexion internet rétablie. La Banque des territoires, que j'ai entendue dans le cadre de mes travaux préparatoires la semaine dernière, a insisté sur ce point. Les conseils départementaux de Vendée et de Gironde ont, de leur côté, mis en oeuvre des plans de résilience des réseaux très ambitieux.

La Banque des territoires chiffre aujourd'hui entre 7 milliards et 17 milliards d'euros les crédits nécessaires à la sécurisation et à la résilience des réseaux, notamment, et même si ce n'est pas une solution pour tous les problèmes, pour leur enfouissement. Ce rapport budgétaire permet d'ailleurs d'insister sur la nécessité de lancer un plan national en faveur de la résilience des réseaux de fibre optique.

Mon dernier point concernant la couverture du territoire en fibre optique se rapporte à la qualité du raccordement. Vous savez combien cet enjeu est essentiel pour nos concitoyens. Vous avez tous entendu dans vos territoires des récits parfois ubuesques de malfaçons dans le raccordement liées à la mauvaise maîtrise de la sous-traitance par l'opérateur gestionnaire de l'infrastructure à l'opérateur commercial. C'est ce que l'on appelle le mode « sous-traitance opérateur commercial » (Stoc), qu'il faut mieux encadrer. C'est d'ailleurs tout l'objectif de la proposition de loi de Patrick Chaize visant à assurer la qualité et la pérennité des raccordements aux réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, qui a été adoptée par le Sénat à l'unanimité en mai dernier.

Ce texte, qui a été transmis à l'Assemblée nationale, où aucune date d'examen n'est pour l'heure envisagée, prévoit de nombreuses mesures dans ce but, comme la création d'un socle d'exigences minimales de qualité pour la réalisation des raccordements à la fibre que les contrats et cahiers de charges liant les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants devront respecter. Il prévoit également qu'un certificat d'intervention sera remis par chaque intervenant à l'abonné attestant de la conformité de l'intervention au cahier des charges qui lui est imposé. Le texte comprend aussi un volet de dispositions tendant à renforcer les pouvoirs de sanction dont dispose l'Arcep. Lors de l'audition de la présidente de l'Arcep la semaine dernière, il a été évoqué des cas de figure allant jusqu'à huit ou neuf sous-traitants pour assurer le raccordement à la fibre chez l'usager, avec tous les désagréments qui peuvent s'y rattacher.

J'insiste sur le sujet de la qualité du raccordement final. Il y a en effet urgence puisque l'année 2024 marquera le lancement de la fermeture du réseau cuivre historique d'Orange, au travers duquel nos concitoyens sont connectés à l'internet haut débit, l'ADSL. Cette fermeture devrait s'étaler jusqu'en 2030. Elle va obliger de nombreux abonnés à l'ADSL à migrer vers la fibre. Une mauvaise qualité de service serait encore plus inacceptable pour ces usagers captifs qui n'ont plus de possibilité de choix. Il nous faudra d'ailleurs examiner, au-delà de ce rapport budgétaire, la manière dont nous pourrons accompagner nos concitoyens, et notamment les plus fragiles, vers la fibre. Cette question a d'ailleurs été abordée lors de l'audition de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), puisqu'il est évident que les collectivités territoriales auront un rôle majeur à jouer dans l'accompagnement des usagers pour que la migration du cuivre vers la fibre soit réalisée sans trop d'encombres.

J'ai, pour l'instant, été plutôt sévère avec nos opérateurs télécoms, tant sur la vitesse du déploiement de la fibre optique que sur la qualité des raccordements finaux. Je tiens cependant à mettre en avant un motif de satisfaction. Le New Deal Mobile lancé en 2018, dont l'objectif est d'assurer une meilleure connexion mobile sur tout le territoire, montre des résultats plutôt probants. À titre d'exemple, le plan a identifié une série d'axes routiers et ferrés à couvrir en réseau mobile, qui le sont désormais à hauteur de 99,8 %.

J'en viens maintenant à la deuxième partie de mon avis, consacrée aux usages du numérique. Nous avons une infrastructure de qualité, même si nous constatons que les « derniers kilomètres » sont particulièrement difficiles à mettre en oeuvre. Il reste cependant nécessaire d'interroger les usages. Si nos infrastructures permettent une meilleure connectivité, encore faut-il que nos concitoyens puissent disposer des compétences nécessaires pour les utiliser.

Pour cela, il faut apporter une réponse à l'illectronisme, c'est-à-dire à l'incapacité d'utiliser des appareils numériques, qui toucherait environ 14 millions de nos concitoyens. Contrairement aux idées reçues, ce n'est pas un phénomène générationnel. L'illectronisme ne disparaîtra pas avec le temps, et il ne sert à rien d'attendre en croisant les bras. L'attentisme serait la pire des réponses. Toutes les générations, y compris les plus jeunes, sont concernées. Les nouvelles évolutions technologiques de plus en plus rapides - nous constatons au quotidien les mutations majeures sur les outils à notre disposition - exigent de nos concitoyens de s'adapter continuellement au même rythme. L'usager à l'aise d'aujourd'hui pourra être demain en situation d'illectronisme s'il ne bénéficie pas de l'accompagnement idoine. À ce titre, lutter contre l'illectronisme pourrait apparaître comme un travail digne de Sisyphe : les efforts sont toujours à recommencer.

Je me réjouis donc de la décision du Gouvernement de prolonger pour trois ans le soutien financier en faveur de l'embauche de conseillers numériques France Services. Ces 3 300 conseillers, sur un objectif de 4 000, initialement embauchés dans le cadre du plan France Relance sont en poste dans les territoires, notamment dans les zones de revitalisation rurales et les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Ils appuient nos concitoyens les plus fragiles, mais pas seulement, dans leurs démarches administratives et les forment aux usages numériques.

Nous pouvons cependant regretter que cette prolongation du soutien financier de l'État ne se fasse pas avec la même ambition qu'auparavant. La subvention va en effet diminuer de 50 000 euros sur deux ans à 42 500 euros sur trois ans pour les collectivités territoriales, qui emploient 60 % des conseillers. Nous connaissons toutes et tous la situation budgétaire des collectivités territoriales, et il faut donc être particulièrement vigilant à ne pas créer un nouveau transfert de charges insidieux. Certaines collectivités, comme l'ont indiqué les différentes personnes entendues la semaine dernière, vont malheureusement devoir réduire le nombre de conseillers face aux surcoûts induits par ce changement, alors même qu'elles ont été invitées par l'État à mettre en place ces postes. Elles ont donc créé une demande de plus en plus forte, mais sont aujourd'hui incapables de pérenniser l'offre, voire sont contraintes de la réduire assez largement.

En outre, le ministre chargé du numérique a dévoilé en octobre dernier une nouvelle feuille de route en faveur de l'inclusion numérique, intitulée « France Numérique Ensemble ». C'est une bonne nouvelle. Espérons toutefois que les moyens seront à la hauteur de l'ambition.

Avant de conclure mon propos, je tiens à évoquer un dernier sujet. Je vous ai alerté sur la nécessité d'assurer la résilience de nos réseaux dans un contexte d'adaptation au changement climatique. Il me semble aussi que le numérique peut être utilisé par nos collectivités dans les territoires pour assurer leur transition environnementale. Toutefois, elles manquent parfois de l'ingénierie nécessaire pour identifier ces usages vertueux et les mettre en pratique.

C'est pourquoi il m'apparaît opportun de réfléchir aux moyens dont pourront bénéficier les collectivités sur ce point, tout en gardant bien à l'esprit l'enjeu de l'empreinte environnementale du numérique, sujet sur lequel notre commission a beaucoup travaillé - je pense notamment à Guillaume Chevrollier en étroite collaboration avec notre ancien collègue Jean-Michel Houllegatte. La semaine dernière, nous avons eu l'opportunité d'entendre la vice-présidente du département de la Manche, Valérie Nouvel, qui a remis un rapport à ce propos aux ministres chargés du numérique et des collectivités territoriales et de la ruralité. Un chapitre est notamment dédié à la prévention des risques et à la résilience des réseaux. J'espère qu'il ne restera pas lettre morte.

Vous l'avez compris, que ce soit du côté de l'infrastructure ou des usages, une nouvelle ambition est nécessaire en faveur du numérique dans nos territoires. Le plan France Très haut débit a apporté de nombreux résultats, mais je tiens à insister sur ce point : la « première mi-temps » a été réussie, il ne faut pas rater la seconde, qui risque d'être la plus complexe. Il faut donc poursuivre plus fermement les efforts de déploiement de la fibre ; résoudre les problèmes de mauvaise qualité du raccordement et se projeter d'ores et déjà sur la question de la résilience des réseaux, une réflexion qui est à mener concomitamment avec la fin du déploiement pour ne pas prendre un retard qui pourrait être préjudiciable à la pérennité de nos infrastructures de télécommunication, sans oublier la question centrale de l'usage du numérique par nos concitoyens.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci, monsieur le rapporteur, pour votre excellent rapport. Vous estimez avoir été sévère : je n'en suis pas certain ; en revanche, je suis sûr de votre lucidité sur certains sujets, notamment celui de la sous-traitance. Nous l'évoquons depuis plusieurs années car elle pose de nombreux problèmes : cette question exige donc une grande vigilance de notre part.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Je tiens à féliciter et remercier monsieur le rapporteur pour la clarté et l'exhaustivité de son rapport. Je souhaitais cependant exprimer une alerte au sujet de la fermeture du réseau cuivre haut débit d'ici 2030. Il nous faut faire preuve de fermeté envers les opérateurs, notamment Orange, qui vont sans doute se précipiter pour supprimer le cuivre en omettant les prérequis nécessaires à son démantèlement. Notre action doit être forte. Nous ne pouvons pas accepter, notamment dans les petites communes rurales isolées, que le cuivre disparaisse sans que soit garantie la sécurité totale du fonctionnement de la fibre optique. Je crains que la suppression du cuivre ne soit devenue une priorité pour certains opérateurs qui souhaitent récupérer le métal, et donc un peu d'argent...

M. Ronan Dantec. - Beaucoup de polémiques ont éclaté après la tempête Ciaran. Il faudrait discuter avec les opérateurs d'une méthodologie qui leur permettrait d'analyser, en amont, les risques d'une installation souterraine ou aérienne. Il n'est pas difficile, par exemple, de classer les zones très boisées comme des territoires présentant de forts risques de coupure. Cette analyse devrait être incluse dans les procédures de déploiement des réseaux, qui pourraient être mieux définies. De là les polémiques qui retombent parfois sur les collectivités territoriales, comme ce fut le cas en Bretagne.

M. Jean-François Longeot, président. - Ce point est central. J'ai présidé pendant plusieurs années le syndicat mixte d'électricité du Doubs. Lors de l'enfouissement d'un réseau, des gaines étaient installées, suivant une obligation fixée par la loi. La semaine dernière, le directeur d'Enedis pour le Doubs a demandé à me rencontrer pour échanger sur le sujet, car il est intervenu dans le Finistère où les dégâts sont immenses. Certaines personnes sont parfois restées quinze jours sans électricité, les arbres arrachés ayant coupé les réseaux. Il est donc crucial de sensibiliser les opérateurs à ce sujet.

M. Pierre Barros. - Il est regrettable d'observer régulièrement la tendance des opérateurs d'infrastructure et commerciaux à se renvoyer la responsabilité des difficultés. Ils se défaussent également sur la sous-traitance, estimant que l'infrastructure est parfaitement opérationnelle, ce qui est faux. De là une réflexion sur la sécurité. La qualité et l'accessibilité de nos réseaux sont source d'un risque pour nos concitoyens. Le tissu économique français est largement porté par des PME, qui sont raccordées à un réseau domestique, installé de manière visible et accessible sur l'ensemble du territoire. En cas d'actions de sabotage, des accidents, des aléas climatiques qui dégradent ce réseau, leur situation économique, et donc celle du pays, peut être dégradée.

M. Olivier Jacquin. - Je souhaite tout d'abord saluer la qualité du rapport de Sébastien Fagnen. Celui-ci présente un niveau d'excellence digne de Jean-Michel Houllegatte, un hommage que monsieur le rapporteur mérite pour ce galop d'essai parfaitement réussi.

Comme l'a souligné monsieur le président Longeot, il faut insister sur la problématique de la sous-traitance. Nous sommes pressés d'installer le réseau de la fibre, mais on constate dans tous nos départements des excès liés à des problèmes de qualité de pose du réseau terminal. Un maire d'une commune moyenne de 15 000 habitants a récemment fait des efforts considérables pour enfouir ses réseaux et rénover son centre-ville, patrimoine historique. Il vient de décider de couper les lignes disgracieuses fixées en extérieur sur les façades, ce qui l'expose à un rude conflit avec les habitants et les opérateurs. Je comprends sa position, et il faudrait pouvoir soutenir ces communes de manière résolue. Nous devrions donc imaginer un dispositif donnant davantage d'autorité aux collectivités.

M. Damien Michallet. - Le rapport pour avis qui vient d'être présenté est effectivement de grande qualité. Les maires qui enfouissent les réseaux aériens soulèvent une vraie problématique liée aux opérateurs d'infrastructures, qui est celle du coût. Qui paie ? Dans les zones d'initiative publique, ce sont les collectivités qui ont financé le déploiement de la fibre et doivent désormais de nouveau payer pour son enfouissement.

Par ailleurs, la maintenabilité de nos réseaux est aussi un sujet important. Une fois la fibre déployée, toutes les déconnexions sauvages liées aux modes de sous-traitance posent de nouveaux problèmes. Les élus locaux rencontrent presque plus de difficultés, une fois la fibre installée, à gérer ces déconnexions sauvages. L'excellente proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize qui a été votée à l'unanimité au Sénat en mai dernier répondait à ces problématiques, si seulement l'Assemblée nationale s'y intéressait.

Mme Kristina Pluchet. - On parle de la fibre, des opérateurs... Mais laissez-moi vous rappeler que dans de nombreux départements français, il n'y a même pas le téléphone ! Le territoire compte en effet énormément de zones blanches. Ne serait-il pas prioritaire de commencer par régler cette question ? Je ne sais pas s'il est possible de calculer la surface totale de nos zones blanches, qui doit être considérable. Avoir une bonne connexion téléphonique dans chaque département me paraît être un préalable nécessaire, une question de sécurité en cette période de retrait du cuivre.

Par ailleurs, les zones disposant d'un réseau téléphonique de qualité le voient se dégrader considérablement. Beaucoup de pylônes arrivent à saturation. La France compte donc à la fois des zones dépourvues de réseaux, mais aussi des réseaux qui perdent en qualité.

Enfin, le déploiement de la fibre a été catastrophique, comme j'ai pu le constater au sein de mon département, l'Eure. Nous avons eu affaire à des sous-traitants de sous-traitants qui ont témoigné d'un manque criant de conscience professionnelle. La fibre va donc poser de grands problèmes de maintenance dans les années à venir.

M. Michaël Weber. - Je ne dénoterai pas par rapport à ce qu'ont dit les intervenants précédents. Nous avons le sentiment que les opérateurs sont des filous, car la qualité du réseau, mobile ou filaire, n'est pas assurée.

Je souhaite rebondir sur la question des zones blanches, qui sont en effet trop nombreuses sur le territoire français. Certains pays en sont dépourvus, malgré un niveau de développement moindre. Il s'agit peut-être d'un choix fait par la France à un moment donné. Reste que lorsqu'on voit la manière dont notre pays revendique son accessibilité aux réseaux numériques, filaires ou mobiles, on se dit que du chemin reste à faire.

De plus, j'ai trouvé scandaleux le fait que, pour installer la fibre, on dédouble des réseaux de fibre à côté de réseaux déjà existants. Les maires connaissent bien ce débat, difficile pour eux : ils se sont vu imposer l'installation de poteaux en bois à côté des poteaux en béton d'Enedis pour déployer la fibre. Cette décision n'a fait l'objet d'aucune négociation, ce qui est tout à fait regrettable et crée des problèmes dans ces communes qui essaient d'assurer la qualité paysagère de leur territoire, et rend difficile par la suite l'enfouissement des réseaux. Je suis donc assez sceptique sur le déploiement et sur la qualité de service des opérateurs.

M. Jean-François Longeot, président. - Quand on enfouit les réseaux électriques, qu'on enlève les poteaux avant de remettre des poteaux en bois, il y a fort à parier que nos concitoyens peinent à comprendre notre action !

M. Alexandre Ouizille. - Pour revenir sur les quelques sujets qui nous occupent, il convient de rappeler que, historiquement, le mode « Stoc » était la traduction d'une logique concurrentielle selon laquelle l'opérateur d'infrastructures ne devait pas être en mesure d'empêcher un tiers de se connecter. C'est la raison pour laquelle nous jouissons de tarifs très bas par rapport à ceux pratiqués aux États-Unis ou dans d'autres espaces économiques.

Je considère que les dysfonctionnements propres au mode « Stoc » soulèvent plusieurs problématiques. L'une d'entre elles est la manière dont est construite la rémunération des sous-traitants. Tout est fait pour que le sous-traitant arrache une fibre pour y brancher la sienne, sans même retirer celle de l'opérateur précédent, car aucune incitation ne le pousse à le faire. Voilà qui pose des questions très concrètes : une photo avant-après est-elle prise ? À partir de quel moment un opérateur a-t-il l'obligation de remettre son point de mutualisation en état ?

Globalement, le mode « Stoc » fonctionne partout avec de simples clés à empreinte triangulaire, voire même des points de mutualisation souvent ouverts. N'importe qui peut donc arracher plusieurs lignes.

Enfin, je ne sais pas si vous avez déjà étudié la situation en Espagne. De nombreuses façades sont ornées d'installations filaires, y compris dans les quartiers historiques. J'estime que la France s'en sort plutôt bien. Le problème du génie civil est donc surtout qu'il coûte extrêmement cher.

M. Stéphane Demilly. - Je souhaite revenir sur les propos de notre collègue Kristina Pluchet. En effet, nous avons le sentiment que nous n'avançons que très lentement sur le sujet des zones blanches de téléphonie mobile. Je me souviens d'un reportage que j'avais vu lorsque j'étais député, il y a vingt-deux ans, et qui traitait déjà des zones blanches... La région évoquée dans ce reportage est encore aujourd'hui en zone blanche ! Ce sujet est très préoccupant et mériterait d'être, un jour, porté par notre commission.

Par ailleurs, je voudrais évoquer la question de la mutualisation des pylônes par les opérateurs téléphoniques. Parfois, vous vous trouvez en zone blanche, sauf si vous êtes un client Orange ou SFR, selon la région. Il serait intelligent de forcer les opérateurs à mutualiser les pylônes, ce qui serait bénéfique à l'environnement et à la qualité des réseaux dans le monde rural.

M. Sébastien Fagnen, rapporteur pour avis. - Mes réponses seront rapides, car je suis en accord avec la totalité des points soulevés par mes collègues dans leurs interventions.

En effet, la téléphonie a été abordée de façon très laconique, mais elle aussi souffre d'un retard de déploiement. Sur les 5 000 zones qui doivent être couvertes d'ici à 2025 dans le cadre du volet « couverture ciblée » du New Deal Mobile, seule la moitié l'est aujourd'hui. Un effort considérable reste donc à mener pour atteindre notre objectif.

L'une des principales difficultés notées par les différents acteurs que nous avons entendus la semaine dernière est que les opérateurs se réfugient derrière l'excuse du déploiement pour ne pas traiter d'autres sujets, notamment celui de la sécurisation. « Déployons d'abord, nous sécuriserons ensuite. » Cette stratégie n'a pas de sens, puisque les raccordements qui restent à faire sont parfois complexes, notamment du fait de la nécessité de réaliser des travaux de génie civil. C'est dès à présent qu'il faut porter cet effort et mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour assurer un plan de reprise des réseaux, d'autant que les réseaux déployés en aérien sont souvent à la charge des collectivités, et représentent donc des coûts qui peuvent être particulièrement lourds dans la période budgétaire actuelle. Mutualiser avec d'autres opérateurs pourrait donc éviter de nombreuses interventions successives, qui peuvent interpeller nos concitoyens.

Nous pouvons aussi nous interroger sur l'acceptabilité, par ces mêmes concitoyens, des installations qui fleurissent sur nos façades, y compris dans les zones relevant des architectes des bâtiments de France (ABF). Dans celles-ci, ils sont soumis à des autorisations d'urbanisme particulièrement contraignantes mais voient des réseaux se déployer en dépit de tout bon sens par le jeu de la sous-traitance en cascade.

Article 35 

M. Sébastien Fagnen, rapporteur pour avis. - Mayotte n'est aujourd'hui couverte qu'à 40 % concernant l'ADSL. La fibre n'est purement et simplement pas déployée à l'heure actuelle. Seulement 4,5 millions d'euros seront alloués à l'île dans le cadre du plan France Très haut débit, ce qui est insuffisant. C'est la raison pour laquelle cet amendement prévoit d'abonder ces crédits à hauteur de 50,5 millions d'euros, pour que Mayotte puisse bénéficier du même soutien financier que les autres territoires, notamment la Guyane. Sur l'île de Mayotte, c'est le département qui a arrêté un projet de réseau d'initiative publique ; il est donc urgent de pouvoir soutenir les collectivités territoriales, mais aussi d'assurer l'équité entre les territoires.

L'amendement est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'aménagement numérique du territoire, sous réserve de l'adoption de son amendement.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci, monsieur le rapporteur, pour ce premier rapport. Il fut bien étayé, ce qui a donné lieu à des prises de parole passionnées et intéressantes.

Projet de loi de finances pour 2024 - Crédits relatifs à la politique des territoires - Examen du rapport pour avis

M. Jean-François Longeot, président. - Nous passons à l'examen des crédits relatifs à la politique des territoires.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux politiques des territoires. - Comme chaque année, je vous présente mon rapport pour avis sur les crédits relatifs aux politiques des territoires, répartis sur les missions « Cohésion des territoires » et « Relations avec les collectivités territoriales ».

Je dirai d'abord un mot sur l'évolution générale des crédits budgétaires affectés à ces politiques, avant de vous faire part de plusieurs remarques thématiques.

Je commence par vous présenter les crédits. D'emblée, je tiens à dire, comme je l'ai fait l'an dernier, que la dispersion des crédits concourant pourtant aux mêmes politiques dans des programmes budgétaires distincts ne facilite pas le travail du Parlement et relativise fortement la portée de l'autorisation que nous accordons au Gouvernement. J'irais même plus loin, cette dispersion peut créer un effet d'optique qui nous amènerait à méconnaître l'évolution des moyens accordés par l'État aux territoires.

Les crédits du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Cohésion des territoires » sont en augmentation de 17,8 % en autorisations d'engagement et de 29,0 % en crédits de paiement. Le programme 112 est principalement marqué par deux évolutions pour 2024 : d'abord, le déploiement du plan France Ruralités, qui conduit notamment à la création de 100 postes de chefs de projets « ruralités », pour un coût budgétaire de 6 millions d'euros, et au doublement de la dotation d'ingénierie « sur mesure » de l'ANCT, qui atteindrait 40 millions d'euros.

Ensuite la poursuite du déploiement du programme France Services, afin d'augmenter la contribution de l'État, d'améliorer le service proposé aux usagers, d'augmenter le nombre de structures labellisées et de renforcer l'animation départementale, pour un montant de 9 millions d'euros.

L'an dernier, je vous avais indiqué constater un manque de crédits sur le programme 112. Avec une augmentation de 76 millions d'euros, le programme atteint cette année 338 millions d'euros de crédits de paiement. Je ne peux que constater que ce manque a été comblé, le programme 112 atteint aujourd'hui son rythme de croisière.

Malheureusement, cette évolution positive est largement contrebalancée par l'évolution du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements ». Autrement plus conséquent en termes de crédit, ce programme regroupe notamment les trois principales dotations d'investissement aux collectivités territoriales : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ; la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID). Ces trois dotations restent stables en autorisations d'engagement. Mais, comme vous le savez, une stabilité nominale en période de forte inflation équivaut de fait à une réduction en valeur réelle... Ce d'autant plus que les taux d'intérêt élevés renchérissent le coût des investissements pour les collectivités territoriales.

Pourtant, les collectivités territoriales, premiers investisseurs publics, ont plus que jamais besoin du soutien de l'État pour répondre à leurs besoins d'investissement après le désinvestissement consécutif à la crise sanitaire. Je considère que, pour soutenir l'investissement local, une hausse des dotations d'investissement aurait été préférable à une hausse des crédits d'ingénierie : il est plus urgent de donner les moyens aux collectivités territoriales d'investir que de les aider à concevoir leurs projets d'investissement !

Dans l'ensemble, malgré l'augmentation des crédits d'ingénierie locale, l'évolution des crédits des politiques des territoires est donc globalement problématique. Je vous proposerai d'ailleurs un amendement sur ce sujet.

J'en viens maintenant à mes remarques thématiques. L'année dernière, j'ai concentré mon travail sur 4 sujets principaux : les moyens de l'ANCT et la coordination avec ses opérateurs partenaires, l'amplification du réseau des maisons France Services, la reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire et les zones de revitalisation rurale.

Cette année, je concentrerai mon propos sur quatre remarques. D'abord, le temps me paraît venu d'ouvrir une réflexion sur les périmètres de l'ANCT et de ses partenaires. J'avais évoqué l'année dernière l'existence d'une multiplicité d'agences en charge de l'aménagement du territoire, formant ce qu'on pourrait appeler un « archipel des agences ». Je constate que les critiques formulées sur la nécessité d'une coordination entre ANCT et opérateurs ont été entendues puisque l'ANCT a entrepris, dans le cadre de la rédaction de la deuxième génération des conventions de coordination entre ANCT et cinq autres opérateurs, un travail de clarification : la création d'une plateforme unique d'accès aux élus et d'un portail d'entrée commun de l'ingénierie auprès des préfets de département est prévue.

Ne serait-il cependant pas temps d'aller plus loin ? Il me semble que cette deuxième génération de conventions de coordination doit être l'opportunité d'engager une réflexion plus large. Quatre ans après la création de l'agence, il convient de s'interroger sur les périmètres respectifs de l'ANCT et de ses partenaires : l'opportunité d'un rapprochement, voire d'une fusion d'opérateurs pourrait être étudiée, afin de renforcer la lisibilité de l'action, d'assurer une utilisation optimale des financements alloués et de mettre en oeuvre enfin une politique globale d'aménagement du territoire.

Ma deuxième remarque porte sur le bilan des contrats de relance et de transition écologique (CRTE). Je partage l'ambition de ces contrats, qui avaient pour vocation de rationaliser la contractualisation. J'ai cependant constaté que le CRTE n'a pas rempli sa promesse d'un contrat intégrateur. Bien souvent le CRTE, qui est conçu au niveau intercommunal, n'est pas l'expression d'un projet de territoire, mais un simple inventaire des projets locaux. La Cour des comptes, dans un rapport paru en octobre 2023, dresse d'ailleurs le même constat, observant que les CRTE se chevauchent avec d'autres contrats et ne jouent pas le rôle d'agrégateur espéré.

La reconduction des CRTE, désormais appelés contrats de réussite de la transition écologique, est prévue. Ils reprennent, pour l'essentiel, les éléments de la première génération de contrats. J'appelle l'attention de la commission sur la nécessité de faire en sorte que les CRTE deviennent de réels plans stratégiques et prospectifs et ne finissent pas par simplement ajouter une couche au mille-feuille des documents d'aménagement du territoire.

J'évoquerai ensuite un troisième sujet, la réforme des zones de revitalisation rurale. Ce dispositif d'exonération fiscale, auquel les élus sont particulièrement attachés, a fait l'objet d'un rapport d'information de mon collègue Rémy Pointereau adopté à l'unanimité par notre commission en janvier de cette année. Ce travail, qui s'est concrétisé par le dépôt d'une proposition de loi, proposait un zonage plus juste et mieux ciblé, avec des critères adaptés, travaillés avec les associations représentatives d'élus locaux, et une application à la maille communale.

Le Gouvernement n'a malheureusement pas suivi nos propositions pourtant de bon sens : le projet de réforme proposé à l'article 7 du projet de loi de finances ne résout en rien les deux défauts identifiés par le Sénat : le zonage, baptisé « France Ruralités Revitalisation », conserve la maille intercommunale ainsi que les critères existants. Dans la copie proposée par le Gouvernement, le nombre de communes classées diminuerait : le zonage bénéficierait à seulement 13 900 communes contre 17 700 communes aujourd'hui.

De plus, six départements entiers seraient intégrés à ce nouveau zonage, rendant plusieurs aires urbaines de plus de 25 000 habitants éligibles à un dispositif de soutien à la ruralité, ce qui est contraire au bon sens et va à rebours de la philosophie du dispositif d'origine : aider les communes rurales les plus fragiles. Je vous proposerai donc un amendement sur ce sujet, qui reprend les propositions de mon collègue Rémy Pointereau.

Enfin, un mot sur le Programme national ponts. À la suite du travail de la commission mené en 2019 par Hervé Maurey, Patrick Chaize et Michel Dagbert, le Gouvernement a lancé en 2020 un Programme national Ponts, visant à soutenir les collectivités en recensant et en évaluant l'état des ouvrages d'art. En 2023, un nouveau souffle a été donné au programme, avec l'extension à de nouvelles communes dans le cadre du Programme national Ponts 2 et la création d'un fonds d'aide à l'entretien et à la réparation des ponts avec le Programme national Ponts « travaux ».

Les moyens mobilisés restent cependant bien loin de l'objectif fixé par notre commission : au total, depuis 2021, 90 millions d'euros ont été engagés alors que notre commission préconise un effort de l'État de 130 millions d'euros par an !

Dès lors, je vous proposerai, avec mon collègue Hervé Gillé, rapporteur sur les crédits relatifs au transport routier, deux amendements renforçant les crédits attribués au Programme national Ponts.

En conséquence, j'invite la commission à s'abstenir sur les crédits des programmes 112, 162, 119, 122 et du compte d'affectation spéciale « Facé » relatifs aux politiques des territoires, compte tenu de la stabilité des principales dotations d'investissement aux collectivités territoriales.

M. Ronan Dantec. - Je souligne la pertinence de l'analyse du rapporteur, notamment sur le CRTE, qui ne joue en effet pas son rôle. Le CRTE a été renommé, il serait temps que l'État se mette en cohérence avec les noms qu'il donne aux dispositifs. Afin de réussir la transition écologique, une véritable stratégie des territoires est nécessaire, permise notamment par les Plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET). Le PCAET doit cependant mieux intégrer les communes, afin que les intercommunalités soient plus clairement en soutien des communes. Je rejoins donc tout à fait le rapporteur sur le sujet des CRTE.

En revanche, je ne partage pas totalement l'affirmation selon laquelle les communes auraient besoin de plus de budgets d'investissements que d'ingénierie. Les faiblesses en ingénierie ont deux conséquences : d'une part, de petites communes et intercommunalités n'arrivent pas à monter des projets et n'ont pas accès aux financements qui existent par ailleurs. D'autre part, comme le CRTE n'est pas intégrateur, il n'y a pas de hiérarchisation des projets sans ingénierie. En l'absence de hiérarchie, le Fonds vert, qui permet de distribuer l'argent, mais de manière discrétionnaire, pourrait financer un empilement de projets sans cohérence, et sans hiérarchisation en termes d'impact. Il faudra être attentif à la manière dont les préfets distribuent la manne.

J'aimerais que nous arrivions à obtenir une position commune de la commission, voire du Sénat sur ce point, ce qui fait écho à notre proposition de dotation climat pour les collectivités qui est adoptée chaque année, généralement à l'unanimité, et que nous allons à nouveau présenter cette année.

En deuxième partie du projet de loi de finances pour 2024, je pense qu'un consensus pourrait être à trouver sur un amendement qui préciserait qu'une part du Fonds vert doit être allouée à la stratégie territoriale des intercommunalités, pour soutenir leurs dépenses de fonctionnement et pour introduire une hiérarchisation. Nous avons chiffré cette mesure à 650 millions d'euros, soit une partie seulement du Fonds vert. Dans la logique d'un tel amendement, il pourrait être proposé que les intercommunalités fournissent de l'ingénierie aux communes, plutôt que de passer par une multitude d'opérateurs. Une telle démarche ferait écho à l'avis du rapporteur et au rapport de la Cour des comptes qui considère également que le CRTE ne joue pas son rôle.

M. Rémy Pointereau. - L'avis du rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ est crucial pour nos collectivités et nos territoires fragiles.

Vous avez évoqué la DETR et de la DSIL tout à l'heure. Les montants sont ce qu'ils sont, mais ce que je regrette, c'est que les parlementaires ne sont consultés que sur l'attribution de dotations aux projets de plus de 100 000 euros de subventions, alors que les crédits sont votés au Sénat et à l'Assemblée. Je ne trouve pas cela très logique, il serait tout à fait normal que les parlementaires puissent avoir connaissance de l'ensemble des projets, du plus petit au plus important. À partir du moment où la réserve parlementaire a été supprimée, il me paraît logique que nous puissions accéder à ces informations.

Sur les ZRR, c'est un sujet très sensible. Elles existent depuis 1995, elles sont parfois méconnues, la communication est assez faible sur ce sujet. Beaucoup d'entreprises passent à côté par manque de connaissance du dispositif. Nous avions fait un rapport à ce propos. Il était évident que les ZRR devaient être réformées. Depuis trois ans, le Sénat se bat pour repousser leur disparition. Ce que je trouve illogique, c'est que ces ZRR soient traitées par un article du projet de loi de finances écrit sur le coin d'une table. Il y a quinze jours, un article aberrant, l'article 7, a été présenté, sans qu'aucune association d'élus locaux n'ait été consultée. Nous avions pourtant réalisé un travail avec Jean-François Longeot, Didier Mandelli et Louis-Jean de Nicolaÿ, qui avait abouti à un accord sur la maille communale et à l'ajout de nouveaux critères, notamment celui des logements vacants.

Finalement, le Gouvernement n'a écouté ni le Sénat ni les associations d'élus, et a présenté un article 7, qui ne correspond pas à la réalité, et inclut même des départements entiers, avec des aires urbaines de plus de 25 000, voire 40 000 habitants. Six départements sont concernés par cette anomalie, avec des villes importantes.

C'est tout à fait anormal et contraire au bon sens, il était donc évident que nous devions présenter un amendement pour corriger la copie du Gouvernement. Je suis convaincu que nous ne pouvons pas traiter la revitalisation rurale par un simple amendement, et qu'il faudra passer par une proposition de loi. Nous verrons comment cela va aboutir, nous avons fait un retour à la ministre Dominique Faure, mais aux dernières nouvelles, le Gouvernement envisagerait de faire évoluer et de faire passer de 6 à 12 le nombre de départements entièrement zonés, c'est encore une augmentation, au détriment des zones les plus fragiles.

Dans la proposition qui pourrait être faite par le Gouvernement, une commune accueillant une centrale nucléaire pourrait par exemple être classée en ZRR. Ce n'est pas du tout logique, j'espère que cet article va être modifié, nous allons essayer de rectifier les choses et j'espère que notre proposition d'amendement sera votée à l'unanimité.

M. Jean-François Longeot, président. -Je rappelle que le rapport d'information sur les ZRR que nous avons présenté a été adopté à l'unanimité en commission. Ce n'est pas chercher la polémique que de remettre en cause l'article 7 du projet de loi de finances présenté par le Gouvernement.

L'objet de notre démarche est de remettre en place des ZRR pour quelques années, ce projet doit concerner les seules zones rurales. Nous n'opposons pas l'urbain au rural, mais il n'est pas imaginable qu'une commune de 25 000 habitants se retrouve classée en ZRR. Pourquoi un médecin ou un artisan irait-il s'installer dans une commune de 1 000 habitants, alors que la commune chef-lieu du département est également en ZRR et qu'il bénéficierait des mêmes avantages ? Il ne s'agit plus d'aménagement du territoire, mais de déménagement du territoire.

Je vous invite tous à soutenir la proposition d'amendement du rapporteur pour avis. Je remercie Didier Mandelli, Louis-Jean de Nicolaÿ et Rémy Pointereau pour avoir proposé cet amendement. Je vous invite à le voter et à le cosigner.

Je souhaite d'ailleurs préciser que j'ai proposé la semaine dernière en Conférence des Présidents l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de loi portant sur les ZRR évoquée par Rémy Pointereau. Cette proposition de loi pourrait être inscrite à l'ordre du jour en janvier prochain.

M. Simon Uzenat. - Je partage très largement les points de vigilance sur lesquels vous avez insisté. S'agissant des zones de revitalisation rurale, nous avons en effet reçu l'amendement très récemment. Je considère que la démarche est intéressante et opportune pour un certain nombre de territoires.

J'approuve également l'amendement allouant 26 millions d'euros à la DETR plutôt qu'à l'ingénierie, ce qui nous est remonté par les élus municipaux, c'est qu'on parle d'ingénierie sans savoir réaliser concrètement les projets, surtout en matière de transition écologique.

Même s'il existe des évolutions positives dans cette mission, nous devons rester vigilants sur l'ANCT. Les crédits sont renforcés, la cible du nombre de projets accompagnés pour 2024 est fixée à 800, en hausse par rapport à 2023, mais je rappelle que notre pays compte 25 000 communes de moins de 1 000 habitants.

Concernant le programme Villages d'avenir, cela va dans le bon sens, mais de nombreux élus ont découvert ce dispositif il y a seulement 3 à 4 semaines, avec des appels à projets dans des temps très contraints.

Concernant les espaces France Services, des annonces de crédits supplémentaires ont été faites dans le projet de loi de finances pour 2024, mais rappelons que 40 % seulement des dépenses des collectivités sont compensées, le reste à charge reste très lourd pour elles. J'ai de nombreux exemples de communes où les espaces France Service sont des intermédiaires en matière de santé, les élus envoient les citoyens vers France Services pour essayer d'obtenir des rendez-vous.

Concernant le programme Territoires d'industrie, la dynamique est également intéressante, mais nous appelions à ce que ce dispositif puisse bénéficier à l'ensemble des territoires. Or, la nouvelle sélection de bénéficiaires écarte plusieurs intercommunalités, surtout rurales, alors même qu'elles sont dotées d'industries.

Enfin, sur le programme 162, l'action 2 concernant l'eau et l'agriculture en Bretagne crée pour le coup un véritable point de désaccord sur lequel nous reviendrons en séance. Le projet acte un rabot de 5 % alors même que la justice administrative a reconnu la défaillance et la responsabilité de l'État en matière de lutte contre les algues vertes en Bretagne. Nous observons que tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, une baisse de 5 % est actée, nous y reviendrons donc en séance, car ce projet n'est absolument pas à la hauteur de l'enjeu.

Mme Nicole Bonnefoy. - Je souhaite ajouter un mot sur le programme Villages d'avenir. Dans mon département, cette politique vient de se mettre en oeuvre. Je rejoins mon collègue sur les délais trop courts accordés aux élus. Je voudrais évoquer, en tant qu'élue départementale, la mise en place d'un dispositif expérimental, en lien avec la région, vers la ruralité : Grand village de demain, qui a d'ailleurs servi à l'État pour créer Villages d'avenir. La différence, c'est que dans notre dispositif, ce sont les collectivités territoriales qui s'associent : la région, qui a une vision prospective et stratégique, les départements, qui ont un lien de proximité, et les intercommunalités. Nous l'avons fait en lien avec l'ingénierie locale, puisque nous avons fait travailler les conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE), qui ont des compétences multiples en matière d'urbanisme, de paysages et de lutte contre le réchauffement climatique. Nous avons une politique de fond, vers la ruralité, de manière à soutenir en proximité, en connaissance de cause, les communes les plus fragiles. Nous aidons également les communes à réfléchir à des plans de transition, à réaliser des plans-guides sur plusieurs années, et à assurer le suivi de la prospective et du développement des communes rurales. 

Je vous présente cette action en contrepoint à Villages d'avenir, qui repose sur une logique verticale et dépend des préfectures. Nous avons évidemment associé l'État, qui nous a, de fait, associés à la conception du programme Villages d'avenir, mais nous voyons vraiment la différence entre les deux dispositifs. Si nous voulons soutenir les communes rurales, où nous voyons les extrêmes fortement monter, il est nécessaire d'associer les collectivités territoriales, qui ont les compétences en matière d'aménagement du territoire, et de donner des moyens supplémentaires à l'ingénierie locale, afin de sortir des projets de qualité. Il faut agir non pas sur le nombre de projets, mais sur leur qualité.

Mme Marie-Claude Varaillas. - Je souhaite intervenir sur les ZRR. Le travail réalisé par la commission et par Rémy Pointereau est remarquable. Nous soutiendrons donc cet amendement.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - Je vais conforter les propos de Nicole Bonnefoy et répondre à Ronan Dantec. En effet, sur les 6 millions et les 100 chefs de projets qui pourraient être mobilisés dans les préfectures, on peut se demander s'il est nécessaire de mettre autant de moyens dans les préfectures pour Villages d'avenir, alors qu'il se trouve déjà, dans les territoires, des personnes compétentes et capables de mettre en place des politiques utiles pour quelques centaines ou quelques milliers d'habitants.

Il s'agit pour nous de présenter un amendement d'appel, puisque nous savons que le Gouvernement engagera sûrement sa responsabilité sur le projet de loi de finances pour 2024 à l'Assemblée nationale. Nous voulons simplement faire réfléchir le Gouvernement : ne serait-il pas plus utile d'investir ces 6 millions d'euros en DSIL et DETR pour ces Villages d'avenir plutôt que de financer des postes aidant à la mise en place de ces dispositifs ? À défaut, nous pourrions directement utiliser ces 6 millions d'euros pour financer les investissements des collectivités.

Sur la remarque de Rémy Pointereau et les ZRR, j'espère que l'amendement sera adopté, puisqu'il reprend des propositions issues de discussions menées avec le Gouvernement, et d'autres acteurs, afin que des communes ne soient pas oubliées dans le cadre de ce dispositif.

Je rejoins ce qu'a dit Simon Uzenat, sur la problématique du programme 162. Les programmes liés à la qualité de l'eau, dans les Pays de la Loire par exemple, ne sont pas assez accompagnés par l'État. Les crédits du programme 162 ne reflètent pas une réelle volonté politique s'agissant de l'aménagement du territoire et ses problématiques. Il faut alerter le Gouvernement et mener un travail de fond sur les politiques qu'il a initiées, et auxquelles il met un terme.

Sur les espaces France Service, cela fonctionne tout de même bien dans les territoires. Les collectivités participent en effet fortement, mais je suis assez favorable à cette politique, puisqu'elle répond réellement à des besoins des habitants. Dans ma commune, dans la Sarthe, nous avons mis en place ce service, et on dénombre 350 personnes par mois en moyenne, qui se présentent pour obtenir un soutien aux problèmes qu'ils rencontrent. Ils peuvent entrer en contact avec les services de l'État, mais également du département et de la région. C'est une bonne politique, il faut la poursuivre et l'adapter. Je crois que le lien avec France Travail sera important. Il faut créer des liens entre France Services et France Travail, afin de permettre la formation des personnes, la recherche d'entreprises pour les demandeurs d'emploi et le soutien aux entreprises.

M. Olivier Jacquin. - Je salue l'expertise bien connue de Louis-Jean de Nicolaÿ dans le domaine de l'appui aux collectivités. Je partage tout à fait ses propos au sujet du programme Villages d'avenir, qui semble être un saupoudrage mal placé qui pourrait être amélioré.

L'amendement sur le Programme national ponts est également très utile. Notre commission doit continuer son travail, nous avons été des défricheurs grâce à la mission d'information sur ce sujet il y a quelques années. J'ai quelques remarques complémentaires. Dans mon département, j'ai mené un travail sur la simplification administrative avec un panel d'élus, qui a mené à proposer aux services déconcentrés de l'État un certain nombre de mesures, dont la simplification du site mal nommé « Démarches simplifiées », passage obligé des collectivités pour enregistrer les dossiers DETR, DSIL et Fonds vert. Ce site est calamiteux, nous avons les moyens technologiques de faire nettement mieux au niveau du numérique.

Je souhaite également aborder un potentiel point de désaccord avec le rapporteur, concernant l'ingénierie. Je rejoins Ronan Dantec : le soutien aux dépenses de fonctionnement est crucial dans le cas de collectivités qui n'ont pas suffisamment d'excédents budgétaires pour financer de l'ingénierie. Je souhaiterais que nous travaillions sur un amendement qui orienterait une partie du Fonds vert sur de l'ingénierie à l'appui des collectivités qui répondraient à des critères financiers précis.

Enfin, je continue mon travail sur la question spécifique des mobilités dans les espaces peu denses, qui présentent un problème d'ingénierie assez considérable pour les collectivités qui n'ont pas le tissu d'entreprises suffisant pour récupérer le versement mobilité. Seules les entreprises de plus de 11 personnes peuvent payer cette taxe. Je proposerais donc d'orienter une nouvelle dotation à destination des communes dépourvues de la ressource du versement mobilité.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - Sur le problème de l'ingénierie, je pense qu'il faut que l'État et les collectivités territoriales se coordonnent pour que chaque échelon ne propose pas le même service.

Concernant le programme Village d'avenir, je trouve que 6 millions d'euros alloués à l'ingénierie, ça n'est pas raisonnable. Il y a ce qu'il faut dans les territoires. Je rejoins Ronan Dantec, il est possible d'assigner une part du Fonds vert à l'ingénierie liée à la transition écologique portée par les CRTE, afin d'éviter un « inventaire à la Prévert » de projets dépourvus d'un travail d'ingénierie préalable. Sur les Villages d'avenir, il me paraît inutile que l'État crée cent postes alors que les collectivités territoriales ont ce qu'il faut.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Après l'article 7

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - Cet amendement reprend sous une forme retravaillée, notamment avec les associations représentatives d'élus locaux, les dispositions de la proposition de loi n° 642 (2022-2023) visant à rendre le zonage de revitalisation rurale plus juste et mieux ciblé, déposée par Rémy Pointereau et plusieurs de ses collègues, qui concrétisait les recommandations du rapport d'information du 17 janvier 2023 de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Le présent amendement propose une réforme du zonage de bon sens au service de la ruralité, avec une révision en profondeur des critères de classement, dans le cadre d'une approche plus fine et territorialisée : il prévoit que le classement s'effectue dorénavant à la maille communale, ce qui constitue un changement d'approche plébiscité par les associations d'élus. La maille intercommunale que le Gouvernement propose de conserver, par facilité administrative, n'apparaît en effet plus en phase avec les réalités territoriales.

Les critères qui sont ici proposés, plus ciblés pour répondre à l'impératif de revitalisation et plus nombreux pour limiter les effets de bords, ont été concertés avec l'Association des maires de France (AMF) et l'Association des maires ruraux de France (AMRF).

Les communes situées en zone de montagne de moins de 15 000 habitants et dont le potentiel fiscal est faible sont classées en zone de revitalisation rurale, afin de prendre en compte la spécificité de ces territoires.

Le classement de départements entiers proposé par le Gouvernement serait supprimé dans notre proposition en raison de son caractère anormal : il présente un biais disqualificatif avec le classement en ZRR d'aires urbaines de plus de 25 000 habitants alors même que plus de 3 000 communes rurales sortent du zonage.

Enfin, l'amendement prévoit le maintien de la dénomination actuelle des zones de revitalisation rurale, bien identifiée par les parties prenantes, alors que le Gouvernement propose une nouvelle appellation « zones France Ruralités Revitalisation », de nature à créer de la confusion.

M. Hervé Gillé. - Sur ce sujet particulièrement sensible, nous sommes tous d'accord pour défendre le principe des ZRR, et les initiatives parlementaires prises allaient dans ce sens. Mais l'angle et la stratégie peuvent être différenciés. En tout état de cause, lors du débat que nous avons eu lors de l'examen du rapport d'information de Rémy Pointereau en commission en janvier, nous avons approuvé les grandes orientations qui avaient été retenues. Le débat politique est ouvert et cette question est discutée. Nous avons besoin d'avoir un éclairage sur le sujet, pour qu'il soit tranché politiquement.

Je vais donc proposer une abstention de la part du groupe, compte tenu du contexte, pour essayer d'éclairer au mieux les débats et d'avoir la position la plus partagée possible. En termes d'étude d'impact, nous voulons analyser ce qui est proposé. Nous craignons que le Gouvernement ne s'arcboute sur sa position au niveau de l'intercommunalité. Si c'est le cas, il faut s'assurer que ce dispositif bénéficie au nombre le plus large de communes.

C'est l'esprit de la proposition de loi soutenue par Frédérique Espagnac et Bernard Delcros. Nous sommes sur des stratégies d'atterrissage : qu'est-ce qui est susceptible d'être le plus bénéfique pour nos territoires ? Je reste prudent, nous avons besoin d'une étude d'impact approfondie pour analyser l'importance de notre décision.

M. Didier Mandelli. - Je voudrais simplement dire que le débat est tranché, à travers la prise de position sur le rapport d'information de Rémy Pointereau, puis à travers la décision du Président du Sénat il y a une quinzaine de jours, qui a d'ailleurs envoyé un courrier à la Première ministre à ce sujet.

Ce qui nous met en difficulté aujourd'hui, c'est que le Sénat ne parle pas d'une seule voix. La politique de la ministre est de solliciter un certain nombre de sénateurs en amont, de construire un texte avec ces élus, qui cherchent à tirer un avantage pour leur département. Nous sommes certes représentants d'un territoire et d'un département, mais nous travaillons avant tout pour l'intérêt général.

Je peux vous assurer que la Première ministre fera, demain, des annonces au Congrès des maires, et annoncera non pas 6, mais 12 départements intégralement classés en ZRR, sans tenir compte de ce qui a pu être dit depuis plusieurs mois par les élus. Nous avons des voix discordantes au sein de nos groupes politiques, avec des élus qui ont obtenu que leur département soit zoné en intégralité. Or, ce n'est pas ma conception de l'engagement et de la vie politique. La ministre, par des atermoiements successifs, nous a indiqué avoir perdu ses arbitrages avec Matignon. Elle a proposé néanmoins de poursuivre le travail, j'ai personnellement préféré engager un travail avec le Président du Sénat, qui a envoyé une lettre à la Première ministre. C'est la position du Président du Sénat qui acte la position du Sénat.

Qu'un certain nombre de nos collègues déposent des amendements, c'est leur droit, la confusion est complète sur ce sujet. De mon côté, je soutiendrais l'amendement du rapporteur et la position de Rémy Pointereau. J'aimerais que nous gardions à l'esprit que le travail avec le Gouvernement est normal, mais que participer très en amont à la conception de textes sans mandat du Sénat ou d'un groupe politique, cela mène à ce genre de situation complexe.

M. Jean-François Longeot, président. - Je rejoins les propos de Didier Mandelli. J'ai effectivement reçu la ministre Dominique Faure avec Didier Mandelli, Rémy Pointereau et Louis-Jean de Nicolaÿ. Elle nous a indiqué que la solidarité gouvernementale l'obligeait à défendre l'article 7 du projet de loi de finances tel qu'il est présenté, mais qu'elle avait perdu ses arbitrages, tranchés par la Première ministre. Elle nous a également affirmé qu'il revenait au président du Sénat d'intervenir auprès de la Première ministre. C'est pour cette raison que nous avons demandé au président Larcher d'écrire à la Première ministre afin de la convaincre du bien-fondé d'un retour au principe de maille communale.

Si je prends un territoire que je connais bien, le mien, nous avons une communauté de communes composée de 95 % de communes classées en zone de revitalisation rurale. Mais comme cette communauté de communes est entrée dans une communauté de communes plus « riche » - je préfère le terme « bien gérée » - elle risque de n'avoir dans son périmètre aucune commune classée en ZRR.

Les chiffres en sont la meilleure preuve, puisque nous passerions de 17 600 communes à 13 000 communes. Que des communes sortent ne me dérange pas. Cela signifie que la politique des ZRR est une bonne politique et qu'elle a permis une amélioration de la situation. Mais qu'elles sortent parce qu'elles ont intégré une communauté de communes plus riche crée des difficultés et les place dans une situation fragile.

M. Rémy Pointereau. - Je regrette que nous n'ayons pas d'unanimité sur un tel sujet. Nous travaillons sur les ZRR depuis plus de 3 ans, nous avertissons le Gouvernement depuis longtemps sur la nécessité de rendre ce dispositif plus juste et plus efficace. Nous demandons un texte de loi.

Il y a trois ans, nous avons rendu un rapport d'information appelant à sauver les ZRR. Dans ce texte, nous avons repris exactement ce que nous proposons aujourd'hui : maille communale, critères nouveaux, zone de montagne. Ce rapport d'information a été adopté à l'unanimité, et je ne comprends pas que certains fassent désormais volte-face pour des questions d'intérêts locaux. C'est une aberration complète.

Certains présidents de départements concernés m'ont confirmé que cette mesure les inquiétait, que ce projet était inutile, puisqu'il allait provoquer un déménagement du territoire. Les professions de santé iront forcément plus volontiers dans une aire urbaine que dans une commune rurale, si la ZRR est étendue à tout le département.

Nous étions d'accord avec le premier rapport d'information que j'avais porté avec Bernard Delcros et Frédérique Espagnac. Aujourd'hui, nous allons dans une direction contraire au bon sens. J'espère que les choses vont évoluer, la maille intercommunale n'est vraiment pas une maille satisfaisante. Avec les regroupements de communes qui ont été effectués, des communes pauvres ne pourront pas bénéficier des ZRR, quand d'autres communes très riches pourront bénéficier des ZRR grâce au regroupement avec des communes plus pauvres.

La maille communale est la meilleure possibilité. Il est réellement dommage que nous n'ayons pas cette unité, qu'il s'agisse des zones de montagnes ou des zones de plaines, nous avons tous à y gagner. D'autant que nous avons ajouté les zones de montagnes en excluant celles au potentiel fiscal le plus élevé, afin d'exclure de grandes stations de sports d'hiver.

M. Hervé Gillé. - Notre position est délicate. Notre abstention aujourd'hui a vocation à faire vivre le débat démocratique au sein de notre groupe politique et à porter un certain nombre d'arguments. Si nous avions suivi la logique de la seule position de notre groupe politique, nous aurions voté contre, ce n'est pas ce que nous faisons. Ceci étant, n'oublions pas quelle serait la position d'atterrissage au niveau gouvernemental la plus favorable au plus grand nombre de communes. C'est un vrai point d'attention. C'est également cette vigilance qui doit motiver notre décision. Il faut peut-être avoir une stratégie en ce sens-là.

M. Jean-François Longeot, président. - Ce point d'alerte n'est d'ailleurs pas incompatible avec la position défendue par la commission, les évolutions de la position du Gouvernement ont, il faut le signaler, un lien de cause à effet avec la pression que nous avons fait peser.

L'amendement n°  I-1092 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - Dans le cadre du plan France Ruralités, les crédits d'ingénierie augmenteraient de 26 millions d'euros dans ce projet de loi de finances, dont 20 millions d'euros au titre de l'ingénierie de l'ANCT et 6 millions d'euros dans le cadre de la création de postes de chefs de projets Villages d'Avenir.

En parallèle, la DETR reste stable en autorisations d'engagement en 2023. Je vous rappelle quand même que les taxes sur les valeurs foncières ont augmenté de 7,1 % en 2023 et de 4,5 % en 2024, ce qui fait que les impôts locaux sont les seuls à augmenter. Dans un contexte d'inflation et de hausse des taux d'intérêt sans précédent, le Gouvernement ne soutient pas l'investissement local, mais se contente d'ajouter une nouvelle couche d'ingénierie.

Cet amendement vise ainsi à rediriger les 26 millions de hausse d'ingénierie vers le soutien à l'investissement local, en augmentant d'autant la DETR. L'article 40 de la Constitution et l'article 47 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) interdisant aux parlementaires d'augmenter les crédits de la mission, la mesure est gagée sur les crédits du programme 122 « Concours spécifiques et administrations ». L'objectif est que le Gouvernement puisse lever ce gage.

L'amendement est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - Le Programme national ponts (PNP), piloté par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) et déployé dans le cadre du Plan France relance, a permis la réalisation d'un premier travail considérable de recensement des ponts de plus de 11 500 communes volontaires en métropoles et de 24 communes en outre-mer, et, pour certains d'entre eux, d'évaluation approfondie de leur état. Compte tenu de son succès, le programme a été étendu à de nouvelles communes, avec une dotation supplémentaire de 10 millions d'euros.

L'annonce du Programme national ponts travaux, en septembre 2023, marque l'entrée dans la deuxième phase du programme : un dispositif d'aide au financement des travaux des ouvrages les plus dégradés est créé, doté de 30 millions d'euros.

Dans ce contexte, le présent amendement, déposé avec Hervé Gillé en sa qualité de rapporteur, vise à soutenir les collectivités dans l'entretien et la réparation de leurs ponts, dans le droit fil du PNP, afin de permettre un co-financement par l'État des travaux de mise en sécurité et de réparation des ouvrages d'art en moins bon état. En l'espèce, le présent amendement tend à créer un programme dédié au sein de la mission « Cohésion des territoires », abondé de 90 millions d'euros. En retenant un coût de réparation moyen de 120 000 euros par pont, ce montant permettrait déjà d'entretenir et de réparer environ 750 ponts.

M. Hervé Gillé. - Vous avez tous en tête les travaux menés sur ce sujet au travers des études préalables et des études consolidées, il s'agit maintenant d'assurer que les travaux puissent se réaliser. Compte tenu de l'ampleur des montants, il est important que l'État puisse accompagner les collectivités territoriales dans les meilleures conditions, à travers des partenariats et un suivi précis.

L'amendement est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis. - C'est un amendement également déposé avec Hervé Gillé. Le « Programme national ponts 2 », annoncé le 12 avril 2023 et doté de 10 millions d'euros, a permis d'étendre ce programme aux communes éligibles qui ne se sont pas inscrites en 2021. Les moyens mobilisés par ces deux programmes restent cependant insuffisants : le retard accumulé par rapport à l'objectif fixé par la commission dans son rapport d'information de 2019 de consacrer 130 millions d'euros par an aux ouvrages d'art des collectivités territoriales atteint déjà plus de 400 millions d'euros sur la période 2021-2024.

Le présent amendement, qui crée un nouveau programme « Recensement et évaluation des ouvrages d'art du bloc communal » abondé à hauteur de 40 millions d'euros, vise à combler cet écart en prenant en compte l'amendement précédent portant sur l'aide à la réparation et à l'entretien des ouvrages d'art, un total de 130 millions d'euros aux ouvrages d'art des collectivités territoriales.

L'amendement est adopté.

La commission s'abstient sur les crédits des programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État » de la mission « Cohésion des territoires », des programmes 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » et 122 « Concours spécifiques et administration » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ainsi qu'à ceux du Compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » relatifs aux politiques des territoires.

Projet de loi de finances pour 2024 - Crédits relatifs aux paysages, à l'eau et à la biodiversité et à l'expertise, l'information géographique et à la météorologie - Examen du rapport pour avis

M. Jean-François Longeot. - Mes chers collègues, je cède désormais la parole à Guillaume Chevrollier pour la suite de nos travaux budgétaires, avec la présentation de son rapport pour avis.

M. Guillaume Chevrollier. - Dernier orateur de la matinée, il me revient l'honneur de vous présenter mon rapport sur les crédits relatifs aux paysages, à l'eau et à la biodiversité - programme 113 - et les crédits relatifs à l'expertise, à l'information géographique et à la météorologie - programme 159.

Plusieurs évolutions notables pour 2024 méritent d'être signalées en préambule : le doublement des crédits budgétaires consacrés à la biodiversité, le relèvement de 150 M€ du « plafond mordant » des recettes des agences de l'eau et la réforme des redevances dues pour les prélèvements et consommations d'eau, afin d'accompagner le déploiement des 53 mesures du « plan eau » présenté par le Gouvernement en mars dernier.

Ma présentation s'articulera en trois parties, avec dans un premier temps la biodiversité, suivi des mesures budgétaires en soutien à la politique de gestion de l'eau et enfin l'expertise technique et scientifique en appui à l'action de l'État et des collectivités.

Cadre de pilotage des actions environnementales pour les années à venir, la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) 2030 devrait être finalisée ces prochaines semaines, après une présentation partielle en juillet dernier et de multiples reports. Elle a vocation à décliner au niveau national les 23 cibles de l'Accord de Kunming à Montréal, adopté lors de la COP15 Biodiversité, afin d'enrayer le déclin du vivant, restaurer les fonctionnalités des écosystèmes et favoriser, dans la mesure du possible, la biodiversité dans toutes les politiques.

Ce projet de loi de finances consacre donc 264 M€ de crédits budgétaires nouveaux pour le déploiement des mesures de la SNB et renforce les moyens humains dédiés à la biodiversité, grâce à 47 équivalents temps plein travaillé (ETPT) supplémentaires pour l'Office français de la biodiversité (OFB), 15 pour les parcs nationaux et 13 pour le conservatoire du littoral. Ces moyens permettront par ailleurs de soutenir la stratégie nationale pour les aires protégées, dont un des objectifs est la couverture de 10 % du territoire terrestre et maritime sous protection forte.

Comme l'a montré la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), qui constitue l'équivalent du GIEC pour la biodiversité, les cinq grandes pressions qui s'exercent sur la biodiversité sont protéiformes et cumulatives : les politiques publiques pour enrayer son déclin doivent à la fois veiller à limiter le changement d'usage des terres, la surexploitation des ressources, le changement climatique, les pollutions de toute nature et l'introduction des espèces exotiques envahissantes.

Pour être efficaces, la cohérence et la concertation en amont des politiques environnementales sont essentielles, à la fois avec les territoires et les élus locaux, mais également au niveau européen, pour harmoniser les cadres d'action et limiter les distorsions concurrentielles grâce à des réglementations harmonisées entre les États membres. Je tiens d'ailleurs à souligner que l'action de la France en faveur de la biodiversité ne se laisse pas uniquement appréhender par l'analyse des crédits du programme 113, mais également en tenant compte du « fonds vert », dont nous avons déjà parlé ce matin, et dont une partie des crédits - environ 150 M€ - est fléchée vers la biodiversité, la restauration de la nature ou encore la réduction de l'artificialisation des sols. Il faut rappeler à cet égard le rôle éminent des collectivités territoriales, qui mobilisent les premiers leviers d'action en faveur de la biodiversité par leur engagement au quotidien. Leur rôle de gardiens de la biodiversité et de sentinelles du vivant n'est pas suffisamment mis en avant, notamment dans le débat public.

Le pacte en faveur de la haie me paraît intéressant à mentionner et nous en avons parlé avec le ministre Christophe Béchu la semaine dernière : l'objectif de restauration d'un linéaire de 50 000 km de haies d'ici à 2030 est non seulement propice à la préservation de la biodiversité, mais contribue également à la séquestration de carbone, à la production de biomasse, à la protection contre le vent et à l'aménité paysagère des bocages. Après une époque d'arrachages massifs des haies non compensés par des plantations équivalentes, une stratégie nationale s'imposait. Celle-ci doit à mon sens renforcer les incitations au maintien des haies existantes, favoriser les plantations de haies fonctionnelles et garantir une concertation de qualité avec les agriculteurs pour mieux valoriser économiquement l'entretien des haies. Pour cela, il me paraît essentiel de simplifier la réglementation applicable aux haies, dans un souci de lisibilité et de clarification du rôle de chacun, alors qu'aujourd'hui le régime juridique des haies est défini au sein de six codes différents : le code de l'urbanisme, le code de l'environnement, le code rural, le code de la santé publique, le code du patrimoine et le code civil.

Je souhaite également appeler l'attention de la commission sur les complexités de gestion des haies du fait du développement de la fibre en réseau aérien, sujet qui a d'ailleurs été évoqué plus tôt dans la matinée dans le cadre de l'examen du rapport pour avis de notre collègue Sébastien Fagnen. Le déploiement aérien du réseau fibre n'est pas neutre pour le bocage, il a généré des surcoûts d'entretien, car il est plus fragile que quand il est enfoui. Or, les gestionnaires sont responsables des dégâts causés par les haies, en application d'un régime de responsabilité du fait des choses. Cette contrainte, en conduisant de nombreux gestionnaires à abattre certaines haies de manière préventive, mériterait une prise en compte spécifique pour favoriser une meilleure cohérence des politiques publiques.

Cette cohérence constitue un prérequis indispensable, afin que les efforts pour la préservation de la biodiversité ne soient pas neutralisés par des dépenses aux effets contraires. Cela a souvent été répété devant cette commission : l'environnement ne doit pas être une politique publique sectorielle parmi d'autres, mais une préoccupation à prendre en compte dans toutes les politiques. Il ne s'agit pas de protéger la biodiversité pour sa valeur intrinsèque, mais de la préserver car les services écosystémiques qu'elle rend à l'homme et aux activités humaines sont incomparables : pour ne citer qu'un seul exemple, n'oublions pas qu'une bouchée sur trois de ce que nous consommons dépend des pollinisateurs. De même, on n'insistera jamais assez sur le fait que l'évaluation des stratégies et l'accompagnement des acteurs sont essentiels pour l'atteinte des objectifs climatiques et environnementaux de la France.

J'en viens maintenant aux mesures budgétaires consacrées à l'eau et au déploiement du « plan eau ». La centralité des agences de l'eau en matière de politique hydrique est réaffirmée par ce PLF : elles ont la délicate mission de répondre aux défis auxquels font face les acteurs chargés de la gestion de l'eau et d'accompagner l'adaptation des territoires aux effets du changement climatique. Les enjeux quantitatifs, avec des sécheresses plus intenses et des inondations plus dramatiques du fait de la modification du régime des pluies, mais également les enjeux qualitatifs, avec les pressions que génèrent les pollutions de toute nature, les micropolluants et le réchauffement des eaux, font peser des menaces sur la gestion durable de l'eau dont nous appréhendons à peine l'ampleur.

La prise de conscience budgétaire des enjeux commence à s'amorcer : relèvement du plafond de recettes de 150 M€, hausse du plafond de dépenses de 475 M€ et progression du plafond d'emplois de 66 ETPT pour les six agences de l'eau, afin d'accompagner le déploiement du plan eau, dont le coût des mesures a été estimé à 475 M€ en année pleine. Le desserrement des contraintes pesant sur les agences de l'eau est complété par une réforme des redevances, à l'article 16 du PLF, dont les objectifs consistent à simplifier et améliorer la lisibilité des mécanismes de taxation, accroître le signal-prix des prélèvements et des atteintes aux milieux aquatiques et rééquilibrer la part contributive des usagers de l'eau afin de réduire le surfinancement des abonnés domestiques.

Cette réforme permettra de sécuriser 167 M€ de recettes nouvelles au niveau national, avec 100 M€ provenant des énergéticiens, 20 M€ des industriels, 10 M€ des irrigants et 37 M€ issus de la redevance pour pollutions diffuses via des augmentations tarifaires des produits phytosanitaires. Les 308 M€ restants seront perçus, par subsidiarité, à travers les augmentations des taux votés par les comités de bassin. Au-delà de ces évolutions fiscales, il me semble essentiel de favoriser la protection des aires d'alimentation des captages d'eau potable et d'accompagner de manière plus volontaire l'investissement patrimonial des collectivités dans leurs réseaux d'eau et d'assainissement.

J'en viens enfin aux opérateurs chargés de conforter l'expertise de l'État et d'accompagner les collectivités pour surmonter les défis qui se posent à elles en raison du changement climatique. Il s'agit principalement de Météo-France, dont nous avons entendu la présidente-directrice générale en ce début de session, de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), que notre commission a eu l'occasion de visiter au printemps dernier, et du Cerema, bien connu de chacun d'entre nous, qui sont financés à travers des subventions pour charges de service public, au sein du programme 159.

Ces opérateurs apportent une expertise de premier ordre pour sensibiliser les acteurs aux mutations induites par le changement climatique et aux contraintes nouvelles pesant sur l'action publique territoriale. Ces acteurs développent de nouveaux outils, modélisent les changements à l'oeuvre et veillent à ce que les solutions mises en oeuvre ne conduisent pas à une impasse du fait d'une mal-adaptation. Ce PLF augmente la subvention de 10 M€ pour Météo-France, afin d'accompagner l'augmentation de la puissance de calcul pour améliorer l'anticipation météorologique de phénomènes extrêmes, et de 4 M€ pour l'IGN et le Cerema, pour renforcer la connaissance géocartographique du territoire, offrir un référentiel pour appréhender l'artificialisation des sols et disposer de données géographiques souveraines, s'agissant de l'IGN, et pour le Cerema dans le cadre de la quasi-régie instaurée par la loi dite « 3DS » pour améliorer la qualité de l'appui en ingénierie aux collectivités adhérentes. Ce sont des évolutions bienvenues, dans un contexte inflationniste et de gratuité de la donnée publique, qui pousse ces établissements publics à devoir repenser leur modèle économique.

Nous le savons, la transition écologique sollicitera énormément les moyens humains de ces opérateurs, et plus généralement ceux de l'État et des territoires : pour résumer, il nous faudra surmonter des défis inédits et apporter des réponses à des questions complexes qui ne sont jamais posées jusqu'ici. Pour cela, nous disposons d'atouts, grâce à des établissements de pointe en matière d'expertise, aux collectivités engagées et à l'imagination territoriale, qui est sans limites. Anticiper le plus en amont possible le recul du trait de côte, les orages ou tempêtes extrêmes ou encore les dynamiques hydriques à l'échelle d'un territoire sont essentiels pour mettre en oeuvre les mesures adéquates et assurer une réponse préventive proportionnée.

Nous avons besoin de boussoles pour comprendre les phénomènes à l'oeuvre, qui ne peuvent s'appréhender à l'échelle de ce qui s'est déjà produit car ils sont inédits. L'action publique en matière climatique et environnementale devient plus incertaine et moins prévisible : en ces domaines, l'agilité politique découle de l'expertise scientifique. Les investissements publics pour intensifier et élargir le savoir-faire en matière d'aménagement du territoire ainsi que l'ingénierie locale sont toujours rentables quand ils sont animés du souci de l'efficacité de la dépense publique et sont réalisés à bon escient. Les opérateurs que j'ai entendus lors de mes auditions budgétaires, ouvertes à l'ensemble de mes collègues, me paraissent satisfaire à ces critères.

Pour ces raisons, je vous propose d'émettre un avis favorable aux crédits inscrits aux programmes 113 et 159 et ne vous propose aucun amendement.

M. Jean-François Longeot. - Merci Monsieur le rapporteur pour cette présentation complète du rapport et des enjeux qui sous-tendent l'action publique en matière de biodiversité, d'eau et d'expertise scientifique pour réussir la transition écologique. S'il n'y a pas de demande de prise de parole, je vais le mettre aux voix. Y a-t-il des oppositions sur ce rapport ? Des abstentions ? Je n'en vois aucune.

La commission émet à l'unanimité un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Paysages, eau et biodiversité » et « Expertise, information géographique et météorologie ».

Proposition de loi relative visant à aménager la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés - Examen des amendements au texte de la commission

M. Jean-François Longeot, président. - Nous examinons maintenant les amendements de séance sur la proposition de loi visant à aménager la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :

Article unique

Auteur

N° 

Objet

Avis de la commission

M. FERNIQUE

5

Suppression de l'article

Défavorable

Mme VARAILLAS

1

Avis du Conseil national du bruit sur le décret fixant des prescriptions particulières applicables aux sports mécaniques

Défavorable

Mme BONNEFOY

2

Avis du Conseil national du bruit sur le décret fixant des prescriptions particulières applicables aux sports mécaniques

Défavorable

Mme HAVET

7

Avis du Conseil national du bruit sur le décret fixant des prescriptions particulières applicables aux sports mécaniques

Défavorable

Article additionnel après Article unique

Mme BONNEFOY

3

Demande de rapport sur le décret fixant des prescriptions particulières applicables aux sports mécaniques

Défavorable

Intitulé de la proposition de loi

Mme BONNEFOY

4

Ajout dans l'intitulé de l'expression « régime dérogatoire »

Défavorable

M. FERNIQUE

6

Ajout de l'expression « court-circuiter » dans l'objet de l'amendement

Défavorable

Proposition de nomination de M. Franck Leroy, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFIT France) - Désignation d'un rapporteur

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, j'en viens au dernier point inscrit à l'ordre du jour. Nous devons en effet désigner, en application de l'article 19 bis du Règlement du Sénat, un rapporteur sur la proposition de nomination par le président de la République de M. Franck Leroy aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), en application de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010 838 du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. Le poste est vacant depuis la nomination, le 20 juillet dernier, de Patrice Vergriete aux fonctions de ministre délégué chargé du Logement. Quelques mois auparavant, en novembre 2022, le poste avait déjà été laissé vacant, après que Jean Castex, qui avait été désigné président de l'agence en juillet 2022, a été désigné président-directeur général de la RATP.

J'ai reçu la candidature de notre collègue Damien Michallet pour être rapporteur de la conduite de cette audition au titre de l'article 13.

Il n'y a pas d'opposition ?

Il en est ainsi décidé.

La réunion est close à 12 heures.