Jeudi 5 octobre 2023

- Présidence de M. Alain Chatillon, président d'âge -

La réunion est ouverte à 10 h 00.

Réunion constitutive

M. Alain Chatillon, président. - Notre ordre du jour appelle l'élection du président de la commission des affaires économiques et la constitution du Bureau.

Avant de passer au scrutin, je souhaite remercier chaleureusement notre collègue Sophie Primas, qui a présidé cette commission durant les six dernières années. (Applaudissements.)

Mme Sophie Primas. - Je vous remercie, mes chers collègues.

M. Alain Chatillon, président. - Je salue nos nouveaux collègues et adresse une pensée à ceux qui nous ont quittés.

Mes chers collègues, conformément à l'alinéa 4 de l'article 13 du Règlement du Sénat, l'élection du président se déroule au scrutin secret.

La majorité absolue des suffrages exprimés est requise aux deux premiers tours, la majorité relative au troisième tour.

Vous inscrirez le nom du candidat que vous souhaitez voir élu sur un bulletin que je vous prie de bien vouloir plier.

À l'appel de votre nom, vous voudrez bien vous signaler à l'attention du fonctionnaire porteur de l'urne qui se déplacera jusqu'à vous.

Si vous êtes titulaire d'une délégation, vous procéderez aux deux votes simultanément à l'appel du premier des deux noms, et en énonçant successivement les deux noms afin de faciliter la tenue de la liste d'émargement.

M. le président donne lecture des délégations.

M. Alain Chatillon, président. - J'appelle nos deux collègues les plus jeunes, M. Rémi Cardon et M. Fabien Gay, pour procéder au contrôle des opérations de vote et au dépouillement.

J'invite les candidats aux fonctions de président de la commission des affaires économiques à se faire connaître.

Mme Dominique Estrosi Sassone. - Je suis candidate.

M. Alain Chatillon, président. - L'unique candidate s'étant fait connaître, je déclare le scrutin ouvert.

Le scrutin est ouvert. Puis les scrutateurs procèdent au dépouillement.

M. Alain Chatillon, président. - Les résultats du premier tour sont les suivants :

Nombre de votants : 51

Bulletins blancs : 16

Bulletins nuls : 0

Suffrages exprimés : 35

Majorité absolue : 26

Mme Dominique Estrosi Sassone ayant obtenu 35 voix, je la proclame élue présidente de la commission des affaires économiques. (Applaudissements.)

- Présidence de Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente -

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Je vous remercie chaleureusement, mes chers collègues. Je souhaite bien sûr vous dire quelques mots, ce que je ferai dans un instant, mais pour des raisons pratiques, je vous propose de procéder sans attendre à la constitution du Bureau de notre commission.

Nous procédons, dans un premier temps, à la désignation des vice-présidents.

L'alinéa 6 de l'article 13 du Règlement du Sénat dispose que : « Pour la désignation des vice-présidents, les groupes établissent une liste de candidats selon le principe de la représentation proportionnelle, en tenant compte de la représentation déjà acquise à un groupe pour les postes de président et de rapporteur général. Le nombre des vice-présidents est, le cas échéant, augmenté pour assurer l'attribution d'au moins un poste de président ou de vice-président à chaque groupe. »

En application de ces règles, nous devons nommer dix vice-présidents selon la répartition suivante : pour le groupe Les Républicains, deux vice-présidents ; pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, deux vice-présidents ; pour le groupe Union Centriste, un vice-président ; pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, un vice-président ; pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, un vice-président ; pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires, un vice-président ; pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, un vice-président ; et pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, un vice-président.

Compte tenu des propositions formulées par les différents groupes, je vous propose de désigner comme vice-présidents : pour le groupe Les Républicains, M. Alain Chatillon et M. Daniel Gremillet ; pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, Mme Viviane Artigalas et M. Franck Montaugé ; pour le groupe Union Centriste, M. Franck Menonville ; pour le groupe Rassemblement des Démocrates, Progressistes et Indépendants, M. Bernard Buis ; pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, M. Fabien Gay ; pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires, M. Pierre Médevielle ; pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, Mme Antoinette Guhl ; et pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. - Je souhaite que mon collègue Philippe Grosvalet me remplace à la vice-présidence.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous procédons à cette rectification si chacun en est d'accord.

Il en est ainsi décidé.

Les vice-présidents sont désignés.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. Nous procédons, dans un second temps, à la désignation des cinq secrétaires à la représentation proportionnelle.

L'alinéa 3 de l'article 13 de notre Règlement dispose que : « Après la désignation des vice-présidents, les groupes établissent la liste des candidats aux fonctions de secrétaire selon le principe de la représentation proportionnelle et compte tenu de leur représentation déjà acquise pour les autres postes du bureau. »

En l'espèce, l'application de la représentation proportionnelle permet d'attribuer les cinq postes selon la répartition suivante : pour le groupe Les Républicains, trois secrétaires ; pour le groupe Socialiste Écologiste et Républicain, un secrétaire ; et pour le groupe Union Centriste, un secrétaire.

Compte tenu des propositions formulées par les différents groupes, je vous propose de désigner comme secrétaires : pour le groupe Les Républicains, M. Laurent Duplomb, M. Daniel Laurent et Mme Sylviane Noël ; pour le groupe Socialiste Écologiste et Républicain, Rémi Cardon ; et pour le groupe Union Centriste, Mme Anne-Catherine Loisier.

Les secrétaires sont désignés.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Mes chers collègues, je vous propose que pour chacune des catégories de membres du Bureau - vice-présidents et secrétaires -, l'ordre de nomination soit alphabétique.

Il en est ainsi décidé.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Le Bureau de la commission est donc ainsi constitué :

Présidente : Mme Dominique Estrosi Sassone ; vice-présidents : Mme Viviane Artigalas, M. Bernard Buis, M. Alain Chatillon, M. Fabien Gay, M. Daniel Gremillet, M. Philippe Grosvalet, Mme Antoinette Guhl, M. Pierre Médevielle, M. Franck Menonville et M. Franck Montaugé ; secrétaires : M. Rémi Cardon, M. Laurent Duplomb, M. Daniel Laurent, Mme Anne-Catherine Loisier et Mme Sylviane Noël. (Applaudissements.)

Mes chers collègues, au moment de prendre cette présidence, je souhaite à mon tour remercier Sophie Primas pour le travail accompli au cours des six dernières années avec l'ensemble des membres de la commission.

Je souhaite continuer à faire de cette commission un lieu où il fait bon travailler, où, par-delà les différences politiques, nous réfléchissons ensemble aux défis économiques auxquels est confronté notre pays et où nous essayons ensemble de définir une législation et des politiques publiques adaptées aux besoins de nos concitoyens et très souvent inspirées par nos expériences d'élus locaux de terrain.

Bien sûr, il y aura toujours une majorité et une opposition - c'est d'ailleurs une bonne chose, en démocratie - mais sachez que je mettrai un point d'honneur à être la présidente de toute la commission et de tous les commissaires. Je resterai fidèle à la tradition d'écoute mutuelle et de convivialité entretenue par mes prédécesseurs Sophie Primas, Jean-Claude Lenoir, Daniel Raoul, Jean Paul Émorine, ainsi que le président Gérard Larcher.

Sans renoncer à nos convictions respectives, nous continuerons de travailler en bonne intelligence entre majorité et minorité, de former des binômes de rapporteurs et de nommer, pour les textes qui s'y prêteront, des rapporteurs de la minorité ou de l'opposition sénatoriale. L'intérêt général, l'intérêt des Français est la boussole qui nous guidera, c'est la culture du Sénat.

Je souhaite également saluer Daniel Gremillet qui a été mon compétiteur au sein du groupe Les Républicains pour ce poste. Je veux lui dire combien nous comptons sur lui et sur ses compétences.

J'ai également une pensée amicale pour ceux de nos collègues qui ne se représentaient pas ou qui n'ont pas été réélus. Sur quatorze collègues renouvelables, douze ont été réélus - je les en félicite -, et sept autres sénateurs avaient décidé de ne pas se représenter. Je salue également les nouveaux collègues - les sénateurs nouvellement élus comme les sénateurs qui nous rejoignent en cours de mandat - qui intègrent la commission des affaires économiques.

Je vous propose de prendre le temps de nous présenter les uns aux autres.

Un tour de table est effectué.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - La commission des affaires économiques a un large champ de compétences et les sujets qu'elle traite intéressent au premier chef nos concitoyens. Je souhaite que nous soyons tous très impliqués dans ses travaux et capables d'initiative.

Nous sommes à un moment politique important : la France est confrontée à des défis majeurs ; je pense à la transition énergétique, à la crise du logement ou aux questions de souveraineté industrielle ou alimentaire, pour n'évoquer que ces quelques sujets. Nous sommes à un moment où le Sénat, en l'absence de majorité à l'Assemblée nationale, peut peser de tout son poids dans le débat politique et législatif. Je pense notamment aux textes à venir comme le projet de loi d'orientation agricole, le projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat ou le projet de loi annoncé sur le logement. Nous avons donc du pain sur la planche...

Je vous remercie encore de votre confiance et vous assure de ma totale disponibilité et de mon entier dévouement. Je serai à l'écoute de chacun d'entre vous. J'espère que nous continuerons de bien travailler ensemble, comme durant les six années de la présidence de Mme Sophie Primas, dans le respect des uns et des autres, qui est la marque de fabrique du Sénat, sans rien gommer de nos convictions et des valeurs qui nous sont chères, en poursuivant comme objectif principal la recherche de l'intérêt général. Nous avons prouvé sur un certain nombre de sujets que nous pouvions y arriver. (Applaudissements.)

Je vous propose de réunir le Bureau de la commission cet après-midi, jeudi 5 octobre à 15 heures, afin de débattre du programme de travail jusqu'à la fin de l'année.

Mercredi prochain, le 11 octobre, nous entendrons en audition le directeur général de Saint-Gobain, M. Benoit Bazin, qui viendra nous parler des enjeux de décarbonation de l'industrie et de la stratégie de son groupe en la matière.

Afin d'accueillir au mieux les nouveaux sénateurs ayant rejoint notre commission, une réunion d'information aura eu lieu le même jour à 9 heures. Elle visera à présenter le mode de fonctionnement de la commission. Le chef de service de la commission vous indiquera ce que vous pouvez attendre des administrateurs et des administrateurs adjoints du service. On vous présentera également les applications Ameli et Demeter, mises à votre disposition pour l'examen des textes législatifs.

Un calendrier prévisionnel vous sera adressé par le secrétariat de la commission dans les meilleurs délais.

Proposition de loi visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux - Désignation d'un rapporteur

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Entrons immédiatement dans le vif du sujet avec l'examen de la proposition de loi de notre collègue Sophie Primas visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux. Je vous prie d'excuser les délais dans lesquels nous sommes contraints d'instruire ce texte, mais, en l'espèce, nous sommes tributaires du calendrier des niches parlementaires. Le passage en séance publique de cette proposition de loi intervenant dès mardi prochain, nous n'avions d'autre choix que d'examiner le rapport et le texte de la commission dès ce matin.

La commission désigne Mme Dominique Estrosi Sassone rapporteur sur la proposition de loi n° 494 (2022-2023) visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux présentée par Mme Sophie Primas et plusieurs de ses collègues.

Projet de loi dit « Égalim 4 » - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne Mme Anne-Catherine Loisier rapporteure sur le projet de loi n° 1679 (A.N., XVe lég.) portant mesures d'urgence pour adapter les dispositions du code de commerce relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution, sous réserve de sa transmission.

Projet de loi relatif à l'industrie verte - Désignation des candidats pour faire partie de la commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Laurent Somon, M. Fabien Genet, M. Patrick Chauvet, Mme Isabelle Briquet, M. Franck Montaugé et M. Bernard Buis comme membres titulaires, et de Mme Christine Lavarde, M. Didier Mandelli, M. Jean-François Longeot, M. Serge Mérillou, M. Fabien Gay, M. Pierre Médevielle et M. Daniel Salmon comme membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'industrie verte.

Proposition de loi visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux - Examen du rapport et du texte de la commission

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente, rapporteur. - Nous passons maintenant à l'examen de la proposition de loi de Mme Sophie Primas visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux. Ce texte, déposé début avril 2023, a été signé par plus de quatre-vingts de nos collègues. Le groupe Les Républicains en a demandé l'inscription à l'ordre du jour de la Haute Assemblée le mardi 10 octobre prochain, à seize heures trente.

Cette proposition de loi a pris une actualité nouvelle après les émeutes de juin dernier. En effet, le Président de la République a indiqué, devant les 220 maires qu'il recevait le 25 juin à l'Élysée, vouloir travailler sur les attributions de logements sociaux afin de laisser une plus grande marge de manoeuvre aux maires et de leur donner une meilleure maîtrise du peuplement de leur commune, selon l'expression habituellement utilisée.

Cette proposition de loi ne contient qu'un seul article, qui conduirait à deux modifications. En premier lieu, le maire deviendrait le président de la commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements (Caleol), en lieu et place d'un représentant de l'organisme de logement social. En second lieu, la représentation de la commune serait renforcée et portée au même niveau que celle de l'organisme de logement social, soit à six membres, choisis parmi les élus du conseil municipal.

L'objectif de ces deux changements est de renforcer le poids des communes en les rendant incontournables dans le processus d'attribution des logements puisque, depuis la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan), les maires disposent à nouveau d'une voix prépondérante dans ces commissions.

Comme vise à le souligner l'exposé des motifs de la proposition de loi, les maires ont un rôle central dans le développement du logement social au travers des permis de construire et de la garantie des emprunts, mais cette centralité ne leur est pas reconnue dans l'attribution des logements, qui leur échappe largement. Ils pèsent peu dans les commissions d'attribution à côté de l'État ou des organismes HLM, étant chacun seul parmi une dizaine de membres.

Lors des auditions que j'ai menées, j'ai constaté qu'un assez large consensus se dégageait autour de l'idée qu'il fallait renforcer la place des maires. Au-delà, nombreux sont ceux, à commencer par l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui déplorent leur sentiment de dépossession concernant l'attribution des logements sociaux. Cette perception semble alimentée par plusieurs facteurs.

Le premier facteur est le manque de logements sociaux face à une demande croissante, alors que le parcours résidentiel est bloqué.

Le deuxième facteur est la montée en puissance de politiques publiques conduisant à des relogements prioritaires, comme le renouvellement urbain, la politique du Logement d'abord ou du droit au logement opposable (Dalo), qui préemptent les logements disponibles.

Le troisième facteur est la très grande complexité et l'incompréhension qui en découlent, au sujet de la gestion en flux et de la cotation des demandes.

Le quatrième facteur est la montée en puissance des intercommunalités, qui est sans doute nécessaire mais qui contribue à complexifier encore plus les modalités de la décision.

Face à ce constat partagé se pose la question de savoir comment redonner des marges de manoeuvre et une meilleure maîtrise aux élus en la matière. Leur place dans les commissions d'attribution est bien identifiée comme un élément aussi symbolique que central.

Pratiquement, plusieurs ont souligné la difficulté d'augmenter de manière importante la représentation des élus dans ces commissions, qui ne sont pas forcément comparables à d'autres instances locales en raison de leur fréquence. Il peut en effet y avoir plusieurs réunions par mois et cela pourrait rapidement poser des problèmes de disponibilité et donc de quorum et de fonctionnement de ces instances.

En revanche, tant l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) que l'association Ville et Banlieue ont jugé très positive l'idée que le maire en prenne la présidence. L'association France Urbaine, comme d'ailleurs l'USH, a souligné toutefois que ces commissions ont souvent un caractère intercommunal, qu'il ne faut pas ignorer. Il peut alors être cohérent de prévoir qu'elles soient présidées par le représentant de l'établissement de coopération intercommunale, l'EPCI, responsable de la politique du logement sur un territoire donné.

Ainsi, à défaut de l'égalité numérique entre la délégation de l'organisme de logement social et celle de la commune, émerge des auditions la proposition de donner au maire un droit de veto plutôt qu'une voix prépondérante en cas de partage. Naturellement, ce veto devrait être motivé au regard des règles d'attribution, mais il pourrait par exemple s'appuyer sur la qualification du parc social et de son occupation établie par le bailleur et d'ores et déjà prévue par les textes.

Enfin, les auditions ont mis en évidence que, comme le rend déjà possible une lecture souple du décret de 2020 qui régit la mise en oeuvre de la cotation, de la gestion en flux et des conventions de réservation, il serait souhaitable de généraliser la délégation des droits de réservation de l'État au maire lors de la première mise en location d'un programme neuf. Cela se pratique déjà dans les Yvelines et dans d'autres territoires, selon les témoignages que j'ai recueillis. Non seulement cela redonnerait une vraie capacité au maire pour maîtriser le peuplement d'une résidence en lui donnant la possibilité d'attribuer environ la moitié des nouveaux logements, mais cela me paraît également de nature à soutenir la construction de nouveaux logements sociaux et l'application de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), en permettant de répondre à la demande locale, et donc de légitimer ce type de construction par rapport aux critiques récurrentes que nous connaissons.

Vous retrouverez ces différents points dans l'amendement que je vous proposerai d'adopter, en accord avec l'auteur de la proposition de loi, Mme Sophie Primas.

Enfin, je tiens à souligner que ce texte ne modifie pas les règles définissant les publics prioritaires découlant de la mise en oeuvre du droit au logement opposable ou encore la future mise en oeuvre de la gestion en flux et de la cotation des demandes à partir de la fin de cette année.

En revanche, et c'est pour moi un point essentiel, elle a pour objectif de redonner la main aux maires et de les reconnaître comme des acteurs centraux de ces politiques, dont la responsabilité échoit, selon nos concitoyens, à leur maire.

Mme Sophie Primas, auteur de la proposition de loi. - Le logement dans notre pays est sans doute, avec l'insécurité, à l'origine de la pire des inégalités. Les problématiques tenant à la construction de logements, notamment sociaux, sont actuellement fortes. Nous allons connaître la pire des crises en la matière.

Les maires tentent d'apporter des réponses, malgré les injonctions contradictoires auxquelles ils sont soumis - construire sans densifier, foncier limité, peuplement équilibré -, mais ils ont très largement perdu la main sur cette question, notamment en ce qui concerne l'attribution des logements sociaux.

Tout cela débouche sur l'incompréhension des administrés, qui voient arriver des populations travaillant parfois très loin, et qui ne s'intègrent donc pas dans le tissu urbain où elles logent. Face à ce problème, les maires se trouvent en porte-à-faux. Ils sont de surcroît frappés de plein fouet par une baisse de leurs recettes fiscales.

Avec cette proposition de loi, je me suis efforcée de redonner la main aux maires, sans bouleverser les conditions d'attribution. Je juge fondamental de faire confiance à la connaissance de proximité des élus locaux pour loger convenablement leurs concitoyens. Au sortir de cette campagne électorale, aucun de nous ne peut rester insensible au désarroi des maires face à ce problème.

Je remercie Mme Dominique Estrosi Sassone d'avoir travaillé sur ce texte durant l'été et j'accepte les modifications qu'elle en a proposées.

M. Bernard Buis. - Ce texte a pour objet d'augmenter la présence des représentants de la commune au sein des commissions d'attribution des logements sociaux et d'en confier la présidence au maire. Nous ne sommes pas contre le principe, mais nous regrettons que ne soient pas pris en compte les intercommunalités et les départements. Le groupe RDPI proposera un amendement pour y remédier.

En revanche, nous sommes sceptiques sur la réécriture proposée par Mme le rapporteur. Le veto n'est qu'un refus et nous ne voyons de toute façon pas en quoi il améliorerait les problèmes de construction en France.

M. Franck Montaugé. - La question du logement doit être abordée dans un cadre beaucoup plus large compte tenu des difficultés auxquelles doit faire face notre pays actuellement. Nous avons besoin d'un grand texte et d'un important débat au Parlement pour embrasser toutes les problématiques.

La question du peuplement est centrale, mais elle ne peut être traitée à l'échelle d'une commune ou d'une intercommunalité. Elle n'est de surcroît pas définie juridiquement. Seule la loi peut poser des principes objectifs et républicains en la matière.

Le groupe SER s'opposera à cette proposition de loi.

Mme Viviane Artigalas. - Cette proposition de loi est peu compatible avec la nouvelle gestion en flux qui sera applicable au 24 novembre 2023. La faible construction de logements reste le problème principal : les commissions d'attribution sont de plus en plus en difficulté. Les maires, qui présideront ces commissions avec un droit de veto, feront face à de nombreux recours.

Les personnes en grande précarité doivent être logées et mieux accompagnées quand elles accèdent à des logements sociaux.

Par ailleurs, les commissions d'attribution sont organisées non commune par commune, mais à une échelle plus large. Convoquer l'ensemble des maires lors de chaque réunion de la commission d'attribution n'est pas opérationnel.

Enfin, les commissions intercommunales d'attribution sont certes perfectibles, mais, épaulées par des plans partenariaux de gestion, elles permettent de mieux orienter les attributions. Voilà la voie que je souhaiterais privilégier.

M. Yannick Jadot. - J'ai un grand plaisir à rejoindre le Sénat et cette commission en particulier.

Encore 2,5 millions de familles attendent un logement social, la pression est considérable. Les conditions d'attribution ont évolué, car pesaient de lourds soupçons de clientélisme. Heureusement, la loi a organisé la contrainte sur les maires qui ne voulaient pas créer de logements sociaux. Il existe encore des mairies qui ne respectent pas la loi.

La collégialité et l'objectivité des critères pour attribuer les logements sociaux sont fondamentales. Nous risquons de faire peser une pression encore plus forte sur le maire et de le mettre en difficulté. Eu égard aux exigences de protection des élus, cette proposition de loi ne me semble pas être la meilleure des idées. Cette objectivité des critères, liée à la forte représentativité des bailleurs sociaux, est nécessaire pour éviter clientélisme et discriminations.

J'ai interprété les propos du Président de la République, qui parlait de « peuplement », en termes de mixité sociale. Il serait très grave d'autoriser toute forme de discrimination par le nom ou l'origine, ce serait contraire à nos principes républicains. Nous nous opposerons à ce droit d'exclure que vous proposez.

Mme Amel Gacquerre. - Je salue votre volonté de redonner aux maires un pouvoir d'agir et de choisir leur population dans leur commune, sujet essentiel. Les maires sont désemparés de ne pas pouvoir accompagner leurs habitants. Madame Primas, vous assumez le fait de dire qu'il y a un lien direct avec les événements de juillet ; je suis d'accord. Nous soutiendrons votre texte.

L'intercommunalité joue aujourd'hui un rôle prépondérant en matière de logement : quelle place lui accordez-vous dans ce texte ?

Vous disiez ne pas vouloir toucher aux critères d'attribution, notamment pour les personnes prioritaires. Cependant, le contingent préfectoral pose problème, car il fait passer le maire à côté de son objectif de mixité sociale. Il faudra mettre le sujet sur la table.

Quant à la mise en oeuvre opérationnelle de vos propositions, j'ai encore des interrogations.

M. Fabien Gay. - Je salue notre présidente, qui organisera - j'en suis sûr - des débats contradictoires apaisés et constructifs, car les défis sont grands.

Cette proposition de loi est une première étape, avant un débat très large sur le logement.

Nous ne réglerons pas la question des violences urbaines et des révoltes - question très politique - seulement en donnant un pouvoir au maire d'attribution des logements. Les crédits votés en juillet dernier ne régleront rien non plus. La colère perdure : le chômage est endémique, le mal-logement est une réalité, les services publics reculent. Accorder 20 logements sur 8 000 demandes laissera 7 980 familles sur le carreau. On ne va pas régler les problèmes par la pénurie. Le Gouvernement a ponctionné le secteur du logement social de 10 milliards d'euros. Les maires risquent d'être mis en très grande difficulté. Pourtant, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste - Kanaky défend la commune comme échelon prioritaire pour répondre aux besoins humains.

J'en viens à la mixité. Je suis un enfant des quartiers populaires. Sans services publics, sans débat sur le mal-logement et la rénovation urbaine, la mixité sociale restera un leurre. Qui veut habiter dans un quartier très dégradé ? Personne.

Enfin, je m'oppose au droit de veto, bien différent de la notion de voix prépondérante. Où iront les familles refusées ? Quel sera leur parcours résidentiel ensuite ? À quelle porte iront-elles frapper ?

M. Denis Bouad. - Le Président du Sénat nous demande de moins légiférer pour mieux légiférer. Or cette proposition de loi ne servira pas à régler les difficultés des mal-logés et elle est inapplicable.

Je suis favorable à la voix prépondérante pour les maires ; mais comment penser qu'un Gouvernement, qui a ponctionné plusieurs dizaines de milliards d'euros aux bailleurs sociaux, pourra réussir une politique de peuplement ? La difficulté est bien de choisir les familles qui obtiendront un logement, dans ce contexte de grande pénurie.

D'un point de vue opérationnel, allons-nous changer de président tous les quarts d'heure au sein des commissions d'attribution, en fonction de la commune concernée ?

Il nous faut une vraie politique, un « plan Marshall » pour la construction de logements. Voyez la précarité des populations, l'insalubrité de certains logements ou encore la situation des Restos du coeur. Il nous faut être force de proposition, pour que le Gouvernement enfin nous entende.

M. Henri Cabanel. - Dans cette commission, nous dressons le même constat face à cette politique du logement peu ambitieuse, pour ne pas dire inexistante. Cette proposition de loi contient des mesures avec lesquelles nous pouvons être d'accord, malgré des difficultés opérationnelles ; mais nous nous opposons au droit de veto : il représente une trop grande responsabilité pour les maires.

Sur le papier, élargir la commission d'attribution à des conseillers municipaux peut sembler pertinent, mais comment trouver les conseillers ? Les absents seront nombreux.

M. Philippe Grosvalet. - La question du logement social se gère sur un temps très long. Or c'est le sujet numéro un pour nos maires et nos populations. En la matière, les inégalités territoriales sont immenses. À Saint-Nazaire, un tiers des habitants est logé en logement social, alors que La Baule paie de très fortes amendes car elle ne respecte pas les quotas de logement social. Nous héritons de très grandes disparités sociales historiques ; or les politiques du logement ont été menées par les maires. Assumons cette histoire. Sur le logement social, il faudra une loi plus importante. Tout sénateur a une grande confiance envers les maires, mais concernant le logement social, ma confiance n'est pas absolue envers certains maires de notre pays.

M. Daniel Gremillet. - Notre commission aura de très grands défis à traiter : énergie, alimentation et logement notamment. Je remercie Mme Primas d'avoir eu le courage de déposer ce texte. Traitons enfin la question, car nous sommes face à un mur. Commencer ce nouveau mandat par le logement est un signal fort adressé aux maires, qui seuls ont la connaissance si précieuse du terrain et des habitants. Mettons le pied dans la porte : ce texte nous permet d'ouvrir les débats.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente, rapporteur. - Le Sénat fut précurseur pour alerter sur la crise du logement. Nous avons tiré la sonnette d'alarme très souvent auprès du Gouvernement, notamment lors de l'examen des lois de finances et grâce à de nombreux véhicules législatifs. Depuis 2017, le Président de la République et la majorité présidentielle n'ont jamais fait du logement leur priorité.

Le Conseil national de la refondation (CNR) sur le logement est un échec : il a mobilisé tous les acteurs, de la Fondation Abbé Pierre à la Fondation des promoteurs immobiliers (FPI), contre ses conclusions, à savoir un grand vide.

Nous avons tous dit que cette crise du logement serait sans précédent. Le nombre de constructions de logements neufs n'a jamais été aussi bas et la situation empirera en 2024. Tous les chefs d'entreprise du secteur du bâtiment s'inquiètent : des entreprises risquent de fermer, comme le craignent la Fédération française du bâtiment (FFB) ou la FPI. Quant aux dernières mesures annoncées, comme le dramatique recentrage du prêt à taux zéro (PTZ), elles vont laisser sur le bord du chemin 80 % de nos concitoyens.

On nous a promis une grande loi sur le logement, grâce à la décentralisation de la politique du logement, mais nous n'avons aucune visibilité. Quant à ce premier outil législatif, il a été balayé d'un revers de la main par le ministre, au nom même de cette décentralisation. Aujourd'hui, le Président de la République et la Première ministre n'ont que ce mot à la bouche : « décentralisation ». Cependant, mettre toutes les charges sur les épaules des collectivités, dès le printemps 2024, ne fera pas une politique du logement. On a aussi entendu dire que plusieurs petits textes traiteraient la question avec le risque d'un saucissonnage illisible et inefficace. Nous sommes dans le flou le plus complet.

Ce texte de Mme Primas rappelle que le logement est un sujet prioritaire. Il permet de lancer le débat, notamment avec le nouveau ministre chargé du logement.

L'échelon intercommunal est chef de file en matière de politique du logement. Or très peu de commissions intercommunales existent ; dans ce cas, c'est bien le président de l'intercommunalité qui présidera. Par ailleurs, le président de l'intercommunalité ou son représentant est déjà membre des commissions d'attribution.

Vous évoquez des difficultés opérationnelles, mais les commissions d'attribution concernent déjà un grand nombre de communes. Les maires ou leurs représentants y sont bien présents, le maire concerné pourra parfaitement prendre la présidence.

La voix prépondérante du maire reste très peu utilisée ; elle ne concerne que les cas d'égalité de voix. Nous ne voulons pas mettre les maires en porte-à-faux. Cependant, nous voulons qu'il puisse exercer ce droit de veto quand il pense que les conditions ne sont pas réunies par un ménage pour l'attribution de tel logement. Les maires sont des personnes responsables qui avant tout savent négocier. Tout veto doit être dûment motivé, il ne s'agit pas d'un droit discrétionnaire. De plus, des recours sont possibles.

Monsieur Jadot, j'entends vos remarques sur le clientélisme, mais c'est du passé et cela relève de la caricature. Le maire doit répondre avant tout aux demandes de ses habitants, de ceux qui vivent dans sa commune.

Concernant les logements neufs, il faut que le contingent de l'État soit dévolu au maire. C'est un encouragement et une marque de confiance envers lui. Cela permettra au maire de distribuer plus de logements aux habitants de sa commune. Ces mesures sont déjà appliquées par Mme Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vignes : grâce à cette mesure, les problèmes sont évités dans les logements neufs de sa commune. En effet, un seul ménage peut contribuer à rompre les équilibres trouvés.

Enfin, monsieur Montaugé, l'USH fournit un document présentant les indicateurs, des critères républicains, permettant de qualifier la demande déterminer l'occupation du parc social. Ce document est la feuille de route de l'ensemble des bailleurs sociaux pour analyser les dossiers. Cette proposition de loi n'a pas pour objet de modifier ces critères mais au contraire de s'appuyer sur ce travail.

Il nous faut prendre rapidement la mesure de la crise du logement qui se profile et organiser rapidement, au-delà des futures dispositions du projet de loi de finances, une table ronde avec tous les acteurs du secteur, de la Fondation Abbé Pierre jusqu'aux fédérations de promoteurs et de constructeurs.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la conférence des présidents, je vous propose d'adopter le périmètre suivant : sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives aux prérogatives des maires et des communes dans l'attribution des logements sociaux et à l'organisation et au fonctionnement des commissions d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements définis à l'article L. 441-2 du code de la construction et de l'habitation.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique

L'amendement  COM-1 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. L'amendement  COM-2 vise à ne pas retenir l'augmentation du nombre de membres de la délégation communale au sein de la commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements, car elle présentait des difficultés pratiques tant de disponibilité des élus que de quorum.

En compensation, l'amendement tend à instaurer un droit de veto du maire en lieu et place de l'actuelle voix prépondérante en cas de partage des voix, qui est rarement utilisée et peu utilisable compte tenu de la composition de la commission. Ce veto devra être motivé puisque la décision de refus doit elle-même être explicitée au demandeur.

S'il retient le principe d'une présidence de la Caleol par le maire, l'amendement a également pour objet de permettre que cette fonction soit exercée par l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dès lors qu'il est à l'origine de la constitution d'une Caleol intercommunale.

L'amendement vise enfin à systématiser et à inscrire dans la loi une pratique d'ores et déjà autorisée dans le cadre des conventions de réservation et usuelle, à savoir la délégation des droits de réservation de l'État au maire lors de la première location d'un programme neuf. Cela permettrait donc au maire d'attribuer de droit environ la moitié des nouveaux logements, ce qui lui assurerait une réelle maîtrise du peuplement et, en outre, constituerait une véritable incitation à la construction de nouveaux logements sociaux.

L'amendement COM-2 est adopté.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article unique

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme ESTROSI SASSONE, rapporteur

2

Suppression de l'augmentation de la délégation du conseil municipal et de la voix prépondérante du maire mais création d'un droit de veto du maire sur les attributions et généralisation de la délégation au maire des droits de réservation de l'État lors de la première attribution d'un programme.

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article unique

M. WATTEBLED

1

Non prise en compte de la population carcérale dans le cadre de l'application de l'article 55 de la loi SRU.

Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier)

La réunion est close à midi.