Travaux de la commission des affaires étrangères



Mardi 15 novembre 2005

- Présidence de M. Serge Vinçon, président -

Audition de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères

La commission a procédé à l'audition de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a tout d'abord rappelé le contexte dans lequel s'inscrit le projet de loi de finances pour 2006 avec la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, la modernisation de l'outil diplomatique et la poursuite des objectifs assignés par le Président de la République et le Gouvernement.

Le ministre des affaires étrangères a rappelé l'architecture des deux missions : « Action extérieure de l'Etat » et « Aide publique au développement », au sein desquelles figurent les crédits gérés par le ministère des affaires étrangères. Il a souligné que ces deux missions n'englobaient cependant pas la totalité des crédits engagés par l'action extérieure de la France, à laquelle concourent quelque 27 programmes. Il a considéré qu'une vision complète des moyens engagés par l'Etat, offerte désormais par les documents de politique transversale, était fondamentale.

Il a ensuite appelé l'attention de la commission sur le caractère délicat de la gestion 2006, estimant que des difficultés demeureraient dans la gestion quotidienne des postes.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a souligné la modernisation entreprise par le ministère et sa contribution à l'effort de maîtrise des finances publiques. La mission « Action extérieure de l'Etat » est ainsi stabilisée en volume, à hauteur de 2,36 milliards d'euros de crédits de paiement, mais la masse salariale et les effectifs diminuent. Le ministre a rappelé que le ministère avait réduit ses effectifs de 11 % en dix ans, en respectant scrupuleusement la règle du non-remplacement de la moitié des départs en retraite. Estimant que les effectifs devaient désormais être stabilisés, il a considéré que de nouvelles baisses mettraient en cause l'efficacité des politiques menées. Il a souligné que les moyens alloués au fonctionnement s'inscrivaient une nouvelle fois en baisse, le coût de structure du Quai d'Orsay étant revenu de 33 à 25 % du budget en six ans. Les efforts portent également sur la gestion de l'immobilier et l'aménagement du réseau consulaire et culturel. Il a par ailleurs précisé que le ministère avait décidé d'accroître ses investissements dans les systèmes de communication et d'information, dans le cadre d'une réflexion globale sur l'informatisation. Un contrat de modernisation est en cours de négociation avec le ministère du budget, afin que le ministère des affaires étrangères puisse bénéficier du produit d'une partie des gains de productivité qu'il réalise.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a ensuite détaillé les différents programmes confiés au ministère des affaires étrangères.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » comporte 1.420 million d'euros de crédits de paiement. Il couvre une large partie de l'action diplomatique de l'Etat et comprend l'essentiel des moyens dévolus aux ambassades, les contributions internationales obligatoires et les crédits de la coopération militaire et de défense. Evoquant les opérations de maintien de la paix, il a signalé que leur financement était un des principaux enjeux de ce programme et que les crédits qui y sont consacrés devraient être réévalués dans le cadre de la discussion sur le futur contrat de modernisation.

Le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » représente 603 millions d'euros de crédits de paiement, consacrés à l'animation du réseau consulaire français, à l'enseignement français à l'étranger et au traitement des demandes d'asile et la protection des réfugiés. Cet ensemble de services publics fait l'objet d'une modernisation substantielle avec le redéploiement du réseau consulaire en Europe et la modernisation des procédures. Le ministre des affaires étrangères a indiqué que la subvention de fonctionnement de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger marquait une pause, dans le projet de loi de finances pour 2006, qui nécessiterait un recours exceptionnel au fonds de roulement de l'établissement. Il s'est déclaré attentif au fait que l'Agence puisse accomplir ses missions dans des conditions satisfaisantes et s'est engagé à ce que le transfert des compétences immobilières soit effectué de façon à lui permettre de financer ses dépenses prioritaires. Il a précisé que les crédits nécessaires au développement des visas biométriques seraient apportés par les recettes provenant des frais de dossier payés par les demandeurs, dont la part qui revient au ministère des affaires étrangères fait l'objet de discussions dans le cadre du contrat de modernisation. Au niveau européen, la France négocie l'augmentation des frais de dossier, pour les porter de 35 à 60 euros.

Le programme « Rayonnement culturel et scientifique », qui comprend 334 millions d'euros de crédits de paiement, ne concerne que les pays développés. Il vise à promouvoir l'attractivité de la France pour les étudiants et chercheurs, la promotion des idées françaises, la diffusion de la création culturelle contemporaine et la promotion de la langue française. Les moyens mobilisés dépassent les dotations budgétaires grâce aux partenariats et aux cofinancements. Le ministre des affaires étrangères a précisé que les centres d'études en France, actuellement en place dans six pays, seraient développés. Il a indiqué que les subventions aux opérateurs audiovisuels étaient reconduites en dépit des contraintes budgétaires, et que la chaîne d'information internationale était rattachée à la mission « Médias », sous l'égide du Premier ministre. Il a précisé qu'une réflexion était actuellement menée sur la lisibilité et la visibilité de l'action culturelle française et qu'une organisation nouvelle serait mise en place dans l'année à venir.

M. Philippe Douste-Blazy, évoquant enfin les crédits du programme « Solidarité à l'égard des pays en développement », doté de 2 milliards d'euros, a rappelé que l'aide française demeurait concentrée sur la zone de solidarité prioritaire, qui continuerait de recevoir deux tiers de l'aide bilatérale. Les crédits de ce programme progressent de 9,8 %, traduisant les engagements pris par le Président de la République en faveur de l'augmentation de l'aide française. Il a précisé que l'augmentation des crédits était concentrée sur les organismes multilatéraux, mais qu'une réflexion serait engagée sur la visibilité de l'action française dans ce cadre, singulièrement à l'échelon communautaire. Pour ce qui concerne l'aide bilatérale, le ministre a souligné l'augmentation des crédits d'engagement en faveur de l'aide-projet, ainsi que l'augmentation des crédits mis en oeuvre par les opérateurs de la société civile, ONG et collectivités territoriales.

Le ministre des affaires étrangères a ensuite abordé les amendements votés par les commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale.

Il a estimé que l'imputation budgétaire des crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger pouvait effectivement être discutée, mais que sa mission première restait l'enseignement délivré aux enfants français et qu'il soutiendrait en conséquence le maintien de l'imputation budgétaire proposée par le gouvernement.

Evoquant la demande de suppression, formulée par la commission des finances du Sénat, des crédits du portail Internet « Idées de France », au profit de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) et du programme « Personnalités d'avenir », M. Philippe Douste-Blazy a considéré qu'il serait regrettable de supprimer une activité en plein démarrage, pour laquelle Canal France International a déjà recruté une quinzaine de personnes. Il a reconnu que le programme « Personnalités d'avenir » avait permis d'accueillir, pour un coût très faible, des personnalités importantes et qu'il s'agissait effectivement d'un outil important pour notre influence. Pour ce qui concerne l'AEFE, il a rappelé qu'elle avait dégagé des excédents d'exploitation ces dernières années et a déclaré partager le souci de son développement. Le ministère contribue encore en 2006 au programme de construction et d'entretien de l'Agence pour un montant de 11,3 millions d'euros.

M. Philippe Douste-Blazy a par ailleurs indiqué que le vice-président du groupe d'études sur les Français à l'étranger de l'Assemblée nationale avait proposé un amendement visant à octroyer une indemnité annuelle de 18.000 euros à chacun des 155 conseillers élus de l'Assemblée des Français de l'étranger. Tout en se déclarant favorable au principe d'une telle indemnité, le ministre a souhaité qu'elle puisse être financée autrement que par un prélèvement sur les crédits de fonctionnement du ministère.

Le ministre des affaires étrangères a enfin considéré comme un amendement « d'interpellation » du gouvernement la proposition de la commission des finances du Sénat d'annuler 75 millions d'euros sur les crédits de l'audiovisuel public, afin d'améliorer la couverture du coût des opérations de maintien de la paix. Il a confirmé sa détermination à obtenir le rebasage des contributions internationales pour le budget 2007, en souhaitant que la subvention à Radio France Internationale ne soit pas supprimée. Il a considéré, en conclusion, que le projet de loi de finances était ambitieux et s'est déclaré attaché à ce que les postes à l'étranger dégagent des synergies en rassemblant l'ensemble des moyens de l'Etat.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite évoqué cinq dossiers d'actualité internationale.

Evoquant l'application de la résolution 1636 du Conseil de sécurité, le ministre des affaires étrangères a observé qu'en dépit des allégations de la Syrie sur sa volonté de coopération, ce pays n'avait pas donné suite, pour l'heure, aux demandes d'auditions adressées par le juge Mehlis. Il a considéré que l'heure n'était plus aux tergiversations pour la Syrie mais à une coopération totale, sans délai et sans condition, à peine de sanctions individuelles dans le cadre des dispositions prévues par la résolution adoptée par le Conseil de sécurité.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite abordé les questions européennes, réitérant les interrogations du Gouvernement quant au respect du mandat donné à la Commission par les Etats membres sur la dernière offre agricole présentée dans le cadre des négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce. La France attend toujours des avancées de la part des autres grands acteurs de l'OMC, tant sur le volet agricole que dans les autres domaines, pour parvenir à un résultat équilibré. Le ministre a considéré que l'issue des négociations était essentielle au développement des pays les plus pauvres, et pas uniquement à celui des grands pays émergents qui, pour leur part, disposent d'un fort potentiel d'exportations agricoles. La France souhaite un accord à Hong Kong, mais elle n'acceptera pas un accord qui remettrait en cause la réforme de la Politique Agricole Commune adoptée en 2003 par le Conseil, y compris par les Britanniques.

Le dernier conseil « Affaires générales » a permis que s'amorce la toute première discussion à 25, sous présidence britannique, sur le dossier des perspectives financières, et ce, à un mois du Conseil européen de décembre. La présidence britannique a confirmé l'objectif d'un accord, mais rien ne laisse penser qu'elle soit disposée aux nécessaires concessions refusées par le Royaume-Uni en juin. La seule base sérieuse de discussion pour la reprise de négociations en vue d'un accord rapide est constituée des propositions de la présidence luxembourgeoise de juin 2005.

M. Philippe Douste-Blazy a ensuite évoqué la situation en Côte d'Ivoire. La résolution 1633 du Conseil de sécurité du 22 octobre 2005 a confirmé les décisions prises par l'Union africaine au début du mois d'octobre : report d'un an des élections présidentielles, qui devront avoir lieu au plus tard le 31 octobre 2006, maintien du président Gbagbo comme chef de l'Etat et mise en place d'un nouveau Premier ministre, acceptable pour tous, chargé de préparer les élections, de procéder au désarmement des rebelles, au démantèlement des milices et au retour de l'administration sur l'ensemble du territoire. L'échéance du 30 octobre n'a pas provoqué les troubles redoutés. Le président de l'Union africaine, M. Olusegun Obasanjo s'est rendu à Abidjan pour consulter les responsables ivoiriens sur le choix du premier ministre et s'est engagé à ce que cette nomination intervienne d'ici à la mi-novembre. La nomination du Premier ministre devrait intervenir rapidement, afin de passer à la mise en oeuvre effective des engagements pris. Le ministre a déclaré que la France continuerait, avec la même détermination, à accompagner le processus de sortie de crise entamé il y a trois ans, tout en se déclarant convaincu de la possibilité d'une évolution positive dans ce dossier.

M. Philippe Douste Blazy, ministre des affaires étrangères, est ensuite revenu sur les déclarations du Président iranien, M. Mahmoud Ahmadinejad, au sujet d'Israël, en les qualifiant d'inacceptables et en rappelant qu'elles avaient été condamnées très fermement par la France, par les Etats membres de l'Union européenne, ainsi que par le Conseil de sécurité des Nations unies. Sur le dossier nucléaire, M. Ali Laridjani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, a fait part aux ministres de la troïka de la volonté de l'Iran de reprendre les négociations, interrompues en août dernier, à son initiative, par le rejet de l'offre européenne et la décision de reprendre les opérations de conversion d'uranium dans son usine d'Ispahan. Le ministre a rappelé que la France restait disposée à discuter des détails de l'offre européenne et qu'elle attendait de l'Iran qu'il réponde aux demandes répétées du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale pour l'énergie atomique. Seuls les gestes concrets des iraniens détermineront la position des Européens lors du prochain conseil de l'AIEA, qui se tiendra le 24 novembre prochain.

Le ministre des affaires étrangères a enfin évoqué la résolution 1637 du Conseil de sécurité, qui prévoit la prorogation du mandat de la Force multinationale en Irak jusqu'au 31 décembre 2006. L'accord de la France a été motivé par les risques sécuritaires liés à l'hypothèse d'un retrait précipité du territoire irakien, ainsi que par la demande des autorités irakiennes. La France a cependant souligné la nécessité de préserver un lien, dans la résolution, entre le mandat de la force multinationale et le processus politique qui doit conduire le peuple irakien à recouvrer sa pleine souveraineté. Le ministre a considéré qu'au-delà d'une logique sécuritaire, il était essentiel, à un mois des élections législatives irakiennes, de relancer une dynamique politique pour inverser l'engrenage des violences. Il s'est félicité de l'initiative prise par la Ligue arabe, qui devrait déboucher, à terme, sur l'organisation d'une conférence réunissant les Etats voisins et les principaux acteurs du dossier irakien.

Après avoir remercié le ministre de sa présentation, M. Serge Vinçon, président, a indiqué que lors d'un récent séjour au siège de l'ONU à New York, ses interlocuteurs avaient tous tenu à saluer la qualité de l'action diplomatique conduite par la France au sein de l'Organisation.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat (réseau diplomatique et consulaire) » a souhaité être informé du montant et de l'affectation des crédits immobiliers prévus dans le projet de budget pour 2006. Il a interrogé le ministre sur le financement du nombre croissant d'opérations de maintien de la paix (OMP), conduites sous l'égide de l'ONU, et a souhaité disposer d'éléments permettant d'apprécier l'action des ambassadeurs en mission. Il s'est inquiété des moyens permettant d'assurer une meilleure promotion de la langue française à l'étranger. Evoquant, à ce propos, une récente mission en Azerbaïdjan, il a regretté que les bourses d'études destinées aux étudiants étrangers souhaitant apprendre le français n'y soient pas plus nombreuses, de même qu'en Russie ou en Ukraine.

M. Jean-Pierre Plancade, suppléant Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat » (relations culturelles extérieures) a souhaité obtenir des éclaircissements sur les capacités de gestion immobilière conférées à l'AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger) par le décret du 23 décembre 2003, relevant que l'Agence ne pouvait recourir à l'emprunt. Il s'est inquiété des crédits affectés à la chaîne de télévision TV5, insuffisants pour lui permettre de développer le sous-titrage, ainsi que de ceux destinés à RFI (Radio France Internationale). Il a souhaité être informé du différend qui oppose actuellement RFI à Télédiffusion de France (TDF) pour l'utilisation de ses émetteurs.

Puis M. Jean-Pierre Plancade a relevé l'inquiétante dégradation de la situation des Droits de l'homme en Tunisie, à l'occasion du Sommet mondial sur la société de l'information, et a plaidé pour une réaction plus marquée de la France sur ce point. Il s'est félicité que la diffusion, en France, de la chaîne de télévision du Hezbollah « Al Manar » ait été interrompue sur le canal Glob-Cast, mais s'est alarmé de voir cette diffusion poursuivie grâce à deux chaînes du bouquet TPS. Evoquant, plus largement, la position de la France à l'égard du Hezbollah, il a regretté que notre pays ne s'implique pas davantage dans la logique de désarmement de cette milice libanaise terroriste, prévue par la résolution 1559. Enfin, à propos de la Côte d'Ivoire, il s'est interrogé sur l'opportunité, pour la France, de repenser l'ensemble de sa politique africaine.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a apporté les éléments d'information suivants :

- les crédits affectés à l'immobilier seront, en 2006, de 14,5 millions d'euros, soit une baisse de 50 % par rapport à 2005 ; le besoin de financement ainsi créé devra être satisfait par des ressources extra budgétaires comme les produits de cession et les fonds de concours. Les recours aux partenariats publics privés seront accrus ; les ventes de terrains et immeubles devraient rapporter, en 2005, 23 millions d'euros, et les loyers domaniaux 11,6 millions d'euros. Des regroupements de nos sites diplomatiques seront effectués à Pékin et à Djakarta, et des implantations seront rénovées à Bagdad et à New Delhi, permettant ainsi une rationalisation des moyens ;

- la fonction d'ambassadeur en mission a été créée par le Président de la République en 1998 pour l'examen de sujets transversaux. Au nombre de 14, ces postes sont, pour l'essentiel, dévolus à des diplomates ou des fonctionnaires expérimentés et n'induisent pas de surcoût budgétaire. Ils offrent une meilleure visibilité de l'action diplomatique de notre pays dans des domaines sensibles comme l'environnement, les Droits de l'homme, la lutte contre le sida ou contre la drogue et le crime organisé ;

- les OMP bénéficieront, avec les contributions versées par la France à l'OTAN et à l'AIEA, de 226 millions d'euros en 2006 ; l'enjeu du prochain exercice budgétaire sera la mutation du mode de gestion de ces crédits ;

- l'AEFE disposera, en 2006, d'un budget de fonctionnement de 323 millions d'euros, dont 11,3 consacrés aux investissements proviennent du ministère des affaires étrangères. Le ministère des finances étant hostile à ce que l'Agence recoure à l'emprunt, celle-ci devra puiser dans son fonds de roulement pour financer certaines rénovations urgentes ;

- le ministère des affaires étrangères doit, en effet, s'engager plus activement en faveur de la promotion de la langue française à l'étranger, particulièrement au sein de l'enseignement primaire et secondaire. Le français, couramment pratiqué actuellement par les élites de nos pays partenaires, ne le sera plus à l'avenir si une action vigoureuse n'est pas entreprise. Le rôle des écoles françaises à l'étranger est essentiel à cet égard ; une action nouvelle pourrait ainsi prendre la forme de partenariats publics privés (PPP), associant le ministère des affaires étrangères à la Caisse des dépôts. De nouveaux établissements d'enseignement français à l'étranger pourraient être créés grâce à l'achat de terrains, dont une partie ferait l'objet d'un projet immobilier qui financerait l'établissement d'enseignement. Par ailleurs, la politique des bourses doit être développée, comme doit être amélioré l'accueil des étudiants étrangers au sein de nos universités ;

- la France finance plus de 77 % du budget de TV5, qui a crû de 80 % de 1998 à 2002. Il est resté stable depuis cette date ; seul un effort en gestion permettra de dégager les crédits nécessaires au sous-titrage, enjeu majeur pour la chaîne, éventuellement appuyé par nos partenaires au sein de cette chaîne ;

- RFI et TDF développent des analyses divergentes sur l'avenir des ondes courtes. Une négociation sur ce point est en cours entre ces sociétés, mais toute rupture du contrat entraînerait le paiement d'indemnités de dédit ;

- la France a fait part publiquement ce jour de sa préoccupation face aux atteintes à la liberté de la presse constatées en Tunisie ;

- le ministère va examiner sans délai la situation liée à la diffusion d'émissions de la chaîne Al Manar par le bouquet TPS ;

- la France, comme l'ensemble de la communauté internationale, a pour objectif, conformément à la résolution 1559, le désarmement du Hezbollah, mais estime qu'il incombe au gouvernement libanais de mener à bien ce processus. Des entretiens récents avec le Premier ministre libanais Fouad Siniora, dont certains des ministres sont issus des rangs du Hezbollah, ont été menés en ce sens. De même, le rapport de l'envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, M. Roed Larsen, souligne l'intégration progressive du Hezbollah dans la vie politique libanaise, qui est de nature à l'écarter du recours à la violence. La résolution 1636 ne comporte pas d'ingérence politique à l'égard de la Syrie, elle porte sur une question de justice et d'Etat de droit. C'est pour cette raison qu'elle a pu être adoptée à l'unanimité du Conseil de sécurité ; quant à la résolution 1559 relative aux rapports entre la Syrie et le Liban, son but n'est autre que la préservation de l'indépendance du Liban, à l'abri de l'ingérence de tout autre pays ;

- la politique de la France à l'égard de l'Afrique est appelée à évoluer, ne serait-ce que parce que ce continent lui même évolue : il est ainsi marqué par l'irruption de nouveaux acteurs, dont la Chine, comme par de nouveaux enjeux touchant à la démographie, à la menace terroriste et aux mouvements migratoires. Le caractère indissociable de la sécurité et du développement, le renforcement de l'intégration régionale, le rôle accru du secteur privé, la coopération avec l'ONU et l'Union européenne sont autant d'éléments qui guident la France dans son rapport à l'Afrique, qui évoluera de plus en plus de « l'assistanat », dépassé, vers un nouveau partenariat.

Puis Mme Josette Durrieu a regretté que nos actions à l'étranger soient nombreuses à manquer de visibilité par rapport à celles de nos partenaires. Elle s'est ensuite inquiétée du sort des infirmières bulgares et du médecin palestinien détenus en Libye. Elle a par ailleurs souligné l'intérêt que représenterait, pour le développement de la langue française, la gratuité des établissements français à l'étranger. Elle a ensuite exprimé ses vives préoccupations sur le développement du programme nucléaire iranien, estimant qu'il bénéficiait cependant d'une solidarité de fait du monde musulman en apparaissant comme un contrepoids à la détention, par Israël, de l'arme nucléaire, et a estimé que seule la dénucléarisation de la région permettrait de régler pacifiquement ce problème.

M. André Dulait s'est inquiété des risques d'éclatement de l'Irak, à quelques semaines des élections législatives, qui cristalliseront les aspirations à l'indépendance des Kurdes, au nord, et des Chiites, au sud. Cette situation marginalise les sunnites, et pourrait conduire à une dislocation du pays sur des critères qui ne seraient plus seulement religieux.

M. Robert Del Picchia a souligné l'apport des stations de RFI en modulation de fréquence, très écoutées dans les villes où elles sont implantées. Il s'est prononcé en faveur d'une augmentation sensible des bourses attribuées aux enfants français scolarisés à l'étranger. Il s'est dit favorable au maintien du portail Internet « Idées de France », qui pourrait être ultérieurement relayé par celui dont ne manquera pas de se doter la future chaîne d'information internationale. Evoquant l'indemnité prévue pour les élus siégeant à l'Assemblée des Français de l'étranger, il a suggéré qu'elle soit modulée en fonction des contraintes géographiques spécifiques de chacun d'eux. Sur le dossier iranien, il s'est interrogé d'une éventuelle saisine du Conseil de sécurité de l'ONU où le risque d'un veto de la Chine et de la Russie apparaîtrait probablement.

M. Robert Bret a déploré les diminutions successives de la masse salariale du ministère des affaires étrangères qui avaient désormais atteint une limite infranchissable. Il a souhaité qu'une évaluation politique de l'action des ONG complète les seuls critères comptables utilisés pour les apprécier dans le cadre de la LOLF. Il a par ailleurs regretté que la France apparaisse par trop discrète dans son soutien à la lutte menée par les démocrates tunisiens pour les Droits de l'homme, et que notre pays, comme l'Union européenne, soit trop absent sur le dossier israélo-palestinien face à l'omniprésence de la diplomatie américaine.

M. Jean-Louis Carrère a décrit l'important travail effectué par plusieurs régions françaises en faveur de l'usage de la langue française à l'étranger, et a souhaité qu'une coordination s'instaure sur ce point avec le ministère des affaires étrangères. Il a regretté que les récents changements au sein du personnel de la Commission européenne aient été défavorables à la présence de hauts fonctionnaires français, et a souhaité savoir quelles initiatives comptait prendre le ministre sur ce point.

Mme Paulette Brisepierre s'est interrogée sur les perspectives concrètes de réconciliation entre les deux parties en conflit en Côte d'Ivoire.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam a estimé qu'un effort vigoureux devait être accompli en faveur des bourses destinées aux enfants français scolarisés à l'étranger. Elle a attiré l'attention du ministre sur le soutien qu'il convenait d'accorder aux établissements créés par des initiatives privées locales n'appartenant pas à l'ensemble « AEFE » et qui dispensent l'enseignement de la langue française. Elle s'est interrogée sur la négociation en cours du traité avec l'Algérie, jugeant que dans son intitulé, le terme de « coopération » devrait être préféré au terme « d'amitié » compte tenu du contexte.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, a apporté les précisions suivantes :

- il serait souhaitable de créer en France une Agence comparable au British Council, permettant une meilleure visibilité de notre action culturelle, scientifique et technique ; une réflexion est en cours à ce sujet ;

- la France, comme l'Union européenne, a constamment appelé à la libération des six infirmières bulgares et du médecin palestinien jugés en Libye, et a oeuvré pour qu'ils puissent être défendus, notamment par des avocats français. Les contacts se poursuivent avec les autorités libyennes sur cette affaire difficile ;

- la dénucléarisation du Moyen-Orient constitue bien sûr un objectif idéal qu'il sera difficile d'atteindre. Il faut, par ailleurs, prendre en compte le besoin croissant de nouvelles énergies dans l'avenir, au premier rang desquelles se trouve le nucléaire civil, dont la maîtrise fait courir le risque que certains pays se dotent du cycle complet du combustible, y compris l'enrichissement d'uranium ;

- la Russie a récemment essuyé un refus public de l'Iran à propos de sa proposition d'enrichir le nucléaire iranien sur son sol. Cette intransigeance pourrait peut-être, à terme, conduire la Chine et la Russie à se montrer plus réservés à l'égard de l'Iran et au risque régional qu'il induit ;

- la saisine du Conseil de sécurité reste une possibilité après la réunion prochaine du Conseil de l'AIEA. Celui-ci a réclamé de l'Iran la suspension de l'intégralité de ses activités sensibles et la pleine coopération de ce pays. L'Agence restera, en tout état de cause, compétente sur ce dossier, même en cas de saisine du Conseil de sécurité de l'ONU ;

- l'unité irakienne est effectivement menacée par un projet fédéraliste qui peut aller très loin. Les divisions de l'Irak entre le nord Kurde et le sud chiite, au détriment des sunnites, sont sources d'inquiétudes. Pour prévenir cette dérive, la France soutient la position de la Ligue arabe et poursuit un double objectif en Irak : assurer le plein exercice de la souveraineté nationale par tous les Irakiens et maintenir l'intégrité territoriale du pays ;

- il serait bon que l'AEFE dégage des ressources pour l'augmentation des bourses scolaires. Les établissements scolaires qui seraient construits à l'étranger grâce au partenariat public-privé devraient comprendre 20 % d'élèves boursiers.

Le ministre des affaires étrangères a rappelé qu'au cours d'un récent voyage en Tunisie, effectué le 1er octobre dernier, il avait évoqué très clairement la question des Droits de l'homme à l'occasion d'une conférence de presse. Il avait également rencontré, à cette occasion, le président de la Ligue tunisienne des Droits de l'homme et des intellectuels tunisiens ;

- l'Union européenne vient de se voir confier le contrôle du point de passage de Rafah, entre l'Egypte et la Bande de Gaza, avec l'accord des deux parties intéressées, israélienne et palestinienne. Elle y effectuera ainsi une tâche primordiale pour assurer le redémarrage économique de cette zone. On ne peut donc plus dire que l'Union est absente au Proche-Orient. La France se félicite, par ailleurs, des récentes déclarations du nouveau responsable du parti travailliste, M. Peretz, invitant Israël à retirer ses colonies de Cisjordanie ;

- le Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement (CICID) a rappelé, lors de sa réunion du 18 mai 2005, le concours essentiel des ONG à la réalisation de la politique française de solidarité internationale. Elles bénéficieront, de la part du ministère des affaires étrangères, de crédits en augmentation de 18 %, en 2006 ;

- les hauts fonctionnaires français sont toujours les plus nombreux au niveau des directeurs au sein des services de la Commission européenne. Ce sont des compatriotes qui dirigent désormais la Direction générale de l'agriculture et celle de l'audiovisuel. Au sein des instances européennes, sur les thèmes touchant au commerce international, aux perspectives financières, à l'élargissement, les analyses françaises sont toujours très attendues et perçues positivement. Ainsi, les propositions touchant à la capacité d'absorption par la Turquie de l'acquis communautaire ont été développées par la France ;

- le choix du futur Premier ministre ivoirien relève de l'action du président nigérian, en sa qualité de président en exercice de l'Union africaine ; cette mission est délicate. Cependant, au-delà de cette nomination, la priorité, pour la Côte d'Ivoire, est une réelle sortie de crise, fondée sur la préparation des élections, le démarrage du désarmement et le retour de l'administration sur l'ensemble du territoire, comme l'exige la récente résolution du Conseil de sécurité, qui prévoit des possibilités de sanction ;

- le traité d'amitié et de coopération en cours d'élaboration avec l'Algérie est un texte ambitieux, qui doit donner un nouvel élan aux relations bilatérales. Par delà une histoire commune souvent douloureuse, il importe de regarder ensemble l'avenir, pour l'Algérie comme pour l'ensemble du Maghreb.

Mercredi 16 novembre 2005

- Présidence de M. Serge Vinçon, président -

PJLF pour 2006 - Mission « Sécurité » - « Gendarmerie » - Examen du rapport pour avis

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean Faure sur les crédits relatifs au programme « Gendarmerie nationale », inscrits au sein de la mission interministérielle « Sécurité » du projet de loi de finances pour 2006.

Cette mission, a rappelé le rapporteur pour avis, se compose du programme « Police nationale », rattaché au ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et placé sous la responsabilité du directeur général de la Police nationale, et du programme « Gendarmerie nationale», rattaché au ministère de la défense et dont le responsable est le directeur général de la Gendarmerie nationale. Pour l'ensemble de ces deux programmes, si l'on raisonne en fonction des périmètres fixés par le projet de budget pour 2006, les crédits de paiement augmentent d'environ 3,25 %, ce qui est méritoire dans un contexte budgétaire difficile, et illustre l'importance de la mission « Sécurité », en permettant notamment la mise en oeuvre de la quatrième tranche de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI).

M. Jean Faure, rapporteur pour avis, s'est félicité de l'excellente initiative que constituait la réunion des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » au sein d'une même mission interministérielle, ce qui traduit le caractère global de la lutte contre l'insécurité et favorise une coordination accrue des interventions des forces de police et de gendarmerie. Il a souligné que le programme 152 de la gendarmerie nationale bénéficiait de l'augmentation de 6,41 % en crédits de paiement et de 8,97 % en autorisations d'engagement. Le projet de loi de finances initiale avait prévu de rattacher au programme 212 « Soutien de la politique de défense » des crédits d'infrastructure immobilière et d'informatique de gestion pour 602,3 millions d'euros : le rapatriement de ces crédits au sein du programme « Gendarmerie », par un amendement adopté à l'Assemblée nationale, semble légitime et ne posera pas de problème de fond, puisque ces crédits seront gérés dans un esprit de synergie par le secrétaire général de l'administration de la défense et le directeur général de la Gendarmerie nationale. Le rapporteur pour avis a indiqué que les dépenses de personnels s'élèveraient à 5,8 milliards d'euros pour 2006, soit une augmentation de 6,56 %, qui permettra la création, au titre de la LOPSI, de 2.000 emplois (56 officiers de gendarmerie, 26 officiers du corps technique et administratif, 1.835 sous-officiers de gendarmerie et 83 sous-officiers du corps de soutien technique et administratif), compensant le retard accusé en 2005. Cet effort devra se poursuivre en 2007, année au cours de laquelle 1.900 emplois devront être créés pour atteindre l'objectif de 7.000 emplois supplémentaires pendant la période couverte par la LOPSI. Les dépenses en personnels prévues pour 2006 permettront également de poursuivre le déroulement du Plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE).

Evoquant la diminution des dépenses de fonctionnement de 4,24 %, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a souhaité appeler l'attention de la commission sur deux postes de dépenses directement liées à l'activité des forces de gendarmerie : d'une part, les produits pétroliers permettent à la Gendarmerie la mobilité indispensable aux interventions, au contrôle de l'espace et à la surveillance générale du territoire. Malheureusement, la forte augmentation du prix du pétrole brut a pour conséquence une incertitude prévisionnelle pour ce poste budgétaire ; d'autre part, le maintien en condition opérationnelle (MCO) des hélicoptères et du réseau Rubis qui doit impérativement être financé. Il couvre, pour les hélicoptères de type Ecureuil, une visite périodique toutes les 1.000 heures et une grande visite toutes les 4.000 heures. Pour le réseau opérationnel de communication RUBIS, qui assure le maillage territorial de l'ensemble des unités de la gendarmerie, le MCO permet de faire évoluer ce réseau et de faire progresser sa compatibilité avec le réseau ACROPOL des forces de la police nationale, ce qui est essentiel dans le cadre de la nouvelle mission interministérielle consacrée à la sécurité.

Après avoir détaillé les matériels que permettront d'acquérir les crédits d'investissement (hélicoptères, véhicules, équipement informatique, armements légers, gilets pare-balles), M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits d'infrastructure immobilière permettraient d'améliorer un parc immobilier dont la vétusté a été constatée et stigmatisée à de multiples reprises, tant pour les logements personnels que pour les locaux professionnels.

Puis le rapporteur pour avis a défini les cinq actions qui composent le programme « Gendarmerie », qui se déclineront jusqu'à l'échelon départemental et auxquelles participeront l'ensemble des unités de gendarmerie : l'action « Ordre et sécurité publics » intègre la sécurité publique, la protection des personnes et des biens, l'ordre public, la protection des institutions et le renfort des unités territoriales. L'un des principaux indicateurs destinés à mesurer son efficacité est le taux de criminalité de voie publique ; dans le domaine de l'action « Sécurité routière », de très bons résultats ont marqué l'année 2004 : diminution de 10,45 % du nombre d'accidents, de 9,25 % du nombre de tués et de 10,71 % du nombre de blessés. L'année 2005 doit permettre de prolonger ces évolutions, notamment grâce aux progrès technologiques (au 30 juin 2005, 185 radars embarqués, sur les 189 prévus, étaient livrés), à la coopération avec les pays frontaliers et à l'amélioration des moyens de communication entre les unités ; l'action « Police judiciaire et concours à la justice » se mesure par des indicateurs correspondant aux taux d'élucidation obtenus ; l'action « Commandement, ressources humaines et logistique » a pour objectif d'optimiser l'emploi des moyens et des personnels. Ces derniers constituant un élément stratégique de l'efficacité de la Gendarmerie, tant au niveau national (direction et conception) qu'au niveau déconcentré (états-majors, régions) ; enfin l'action « Exercice des missions militaires » n'a bien entendu pas d'équivalent dans le programme 176 de la Police nationale. Elle correspond à l'activité de la Gendarmerie hors du territoire métropolitain sous commandement militaire ou civil. Les OPEX peuvent entraîner des surcoûts budgétaires non négligeables. Il conviendrait, a estimé le rapporteur pour avis, que celles de la Gendarmerie fassent l'objet d'une provision, comme c'est le cas pour les autres armées, pour lesquelles 250 millions d'euros sont prévus, en 2006, à ce titre, dans la mission interministérielle « Défense ».

M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a indiqué que des aménagements des 1.068 communautés de brigade, proposés par les commandants de région, étaient en cours d'étude ou d'exécution afin d'ajuster, autant que nécessaire, les effectifs et la taille des secteurs aux nécessités opérationnelles et qu'il demanderait à Mme le ministre de la défense, lors de la séance publique consacrée à la mission « Sécurité », que les élus locaux soient systématiquement associés à ces opérations.

En conclusion, le rapporteur pour avis a proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission interministérielle « Sécurité ».

PJLF pour 2006 - Mission « Défense » : « Environnement et soutien de la politique » - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Didier Boulaud sur les crédits relatifs à l'environnement et au soutien de la politique de défense inscrits au sein de lamission « Défense » dans le projet de loi de finances pour 2006.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que les deux programmes « Environnement et prospective de la politique de défense » et « Soutien de la politique de défense » regroupaient, au sein de la mission « Défense », les actions qui ne sont pas directement rattachées aux forces. Ils représentent environ 12 % des crédits de cette mission, soit 4,5 milliards d'euros, et concernent près de 20.000 emplois, majoritairement civils, soit moins de 6 % des effectifs de la mission.

Après avoir détaillé les actions qui composent le programme « Environnement et prospective de la politique de défense », le rapporteur a mentionné plusieurs interrogations tenant à son périmètre, puisque, par exemple, l'action « Renseignement », rattachée à ce programme, ne comporte pas la direction du renseignement militaire (DRM), sur son hétérogénéité ensuite, puisqu'il y a peu de points communs et de fongibilité potentielle entre la recherche technologique et le renseignement et enfin sur la marge de manoeuvre du directeur chargé des affaires stratégiques, responsable du programme, mais dépourvu de structure d'autorité hiérarchique sur les différents responsables d'action, ainsi que de structure de gestion.

Il s'est toutefois félicité de l'identification beaucoup plus claire, grâce à ce programme, des crédits de recherche et technologie, estimant que les dotations correspondantes devraient ainsi être mieux protégées.

S'agissant du programme « Soutien de la politique de défense », il a estimé que sa caractéristique principale était de regrouper les crédits d'infrastructure, dans une logique d'optimisation des moyens. Il a précisé qu'un service d'infrastructure de la défense avait été créé en fusionnant les trois services propres à chaque armée. Il a toutefois souligné qu'à la suite d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale, les crédits d'infrastructure de la gendarmerie avaient été retirés de la mission « Défense » et transférés à la mission interministérielle « Sécurité », le montant des crédits d'infrastructure du programme « Soutien » revenant ainsi de 2,4 à 1,6 milliard d'euros. Le rapporteur pour avis a cité le secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense, qui a assuré devant la commission que son rôle de coordination dans la programmation des opérations n'était pas remis en cause par ce transfert de crédits.

Abordant le contenu du projet de loi de finances pour 2006, M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a tout d'abord évoqué les crédits d'infrastructure. Il a précisé qu'outre les crédits de la gendarmerie, près de 500 millions d'euros d'opérations d'infrastructure ne figuraient pas dans le programme « Soutien », ces crédits correspondant à des opérations étroitement liées aux programmes d'équipement nucléaires ou aéronautiques.

Les crédits inscrits au programme « Soutien » permettront la poursuite des grandes opérations d'infrastructure de la défense, notamment la reconstruction de l'hôpital militaire Sainte-Anne et l'installation de l'école des personnels paramédicaux à Toulon, qui mobilisera près de 80 millions d'euros en 2006, ou encore la réalisation des infrastructures opérationnelles du Tigre, qui représentera quant à elle 30 millions d'euros. Par ailleurs, le projet de « pôle stratégique de Paris », qui vise à moderniser toutes les infrastructures de commandement stratégique autour de l'état-major des armées, impliquera des financements croissants dans les prochaines années.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a estimé que la priorité donnée aux grosses opérations avait entraîné le ralentissement d'autres programmes d'infrastructure. Il s'est particulièrement inquiété du retard du plan de valorisation des infrastructures de vie des engagés (VIVIEN) auquel l'armée de terre consacrait initialement 90 millions d'euros par an et dont le financement est tombé à 50 millions d'euros en 2004, alors que 24 millions d'euros seulement sont prévus pour 2006. Il a précisé que les objectifs n'étaient réalisés qu'à environ 60 %, alors que ce plan touche directement à la condition militaire, au moral et à la bonne marche de la professionnalisation.

Le rapporteur pour avis a également évoqué l'accélération des cessions d'emprises immobilières de la défense prévue en 2006. Il s'est félicité de la création d'un fonds pour la dépollution des sites militaires, doté de 15 millions d'euros, et a insisté sur la nécessité de hâter la parution du décret préparé par le ministère de la défense destiné à faciliter le recours à des prestataires privés pour ces opérations.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a ensuite abordé les actions relatives à l'analyse stratégique, à la prospective et à la recherche de défense, qui sont agrégées sous la notion de « recherche et technologie » et qui connaîtront, en 2006, une progression notable, passant de 1,38 à 1,47 milliard d'euros, soit une augmentation de 6 %. Il a relevé que les études dans le domaine nucléaire expliquaient une partie de cette progression. Il a également estimé que l'effort réel accompli sur les crédits d'études-amont en 2006 était en grande partie destiné à compenser le retard pris depuis le début de la loi de programmation militaire. La dotation prévue en 2006, soit 600 millions d'euros, reste inférieure à l'annuité moyenne de 630 millions d'euros prévue par la loi de programmation. Par ailleurs, si l'objectif des 700 millions d'euros en 2008, annoncé par le Gouvernement, était atteint, il subsisterait tout de même un retard de 300 à 400 millions d'euros par rapport à l'enveloppe prévue par la loi de programmation sur la totalité de sa durée.

Le rapporteur pour avis a indiqué qu'au-delà d'une analyse strictement financière, les indicateurs mis en place ou envisagés dans le cadre de la nouvelle présentation des crédits permettraient d'évaluer l'avancement des objectifs en matière de progression des capacités technologiques.

Il a ajouté qu'environ 40 % des engagements au titre des études-amont concernaient la mise au point de démonstrateurs technologiques. Parmi les nouveaux démonstrateurs prévus en 2006, il a cité un démonstrateur de liaison optique entre satellite et drone, un hélicoptère furtif et apte au vol tout temps, un missile de combat terrestre pour le tir au-delà de la vue directe, ainsi que le projet de drone moyenne altitude et longue endurance Euromale. Il a rappelé les incertitudes qui pèsent encore sur ce dernier projet.

Précisant que la part des recherches réalisées en coopération européenne ne représentait que 9,5 % des études de prospective et 20 % des études-amont, il a insisté sur le rôle central que devrait à ses yeux jouer l'Agence européenne de défense, tout en soulignant l'ambition inégale de nos partenaires dans ce domaine.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a ensuite présenté l'action « Renseignement », qui représente, dans le projet de budget pour 2006, 540 millions d'euros, soit environ 20 millions d'euros de plus qu'en 2005, et regroupe les crédits de deux services, la direction de la protection et de la sécurité de défense (DPSD) et la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

Rappelant que la DPSD était chargée d'acquérir le renseignement de sécurité intéressant les personnels et les installations de la défense, il a souligné que sa vocation évoluait avec la prise en compte croissante de la protection des systèmes d'information et des données classifiées, et surtout de la lutte contre le terrorisme. Il a précisé que la DPSD employait environ 1.400 personnes et que son budget se limitait à 90 millions d'euros et avait peu varié ces dernières années. Il a estimé que, compte tenu des menaces sur la sécurité intérieure, la DPSD mériterait une attention un peu plus soutenue que jusqu'à présent.

Le budget de la DGSE représentera quant à lui en 2006 près de 450 millions d'euros, soit une progression de 20 millions d'euros par rapport à 2005, à cette dotation s'ajoutant 36 millions d'euros provenant des fonds spéciaux du Premier ministre.

Sur le plan des effectifs, la DGSE bénéficiera de la création de 20 postes, soit 10 équivalents temps plein, pour des emplois dans la fonction cryptologie. Les effectifs atteindront ainsi 4.770 personnels, dont 70 % de civils. Ces créations de postes s'inscrivent dans une tendance au renforcement, lent mais continu, des moyens humains d'un service qui s'est étoffé de près de 900 personnes en 10 ans.

Les dépenses d'investissement de la DGSE progresseront de 16 % en 2006. Elles iront prioritairement aux équipements d'interception des télécommunications et aux ordinateurs permettant le traitement de l'information, en vue de faire face à l'accroissement considérable du volume de données recueillies et de s'adapter aux nouvelles technologies de communication.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, s'est félicité des efforts budgétaires réalisés au profit de la DGSE tout en soulignant que l'ampleur des besoins restait considérable au regard des priorités du service, notamment la lutte contre le terrorisme, la prolifération et les différents théâtres de crises. Il a indiqué que la France consacrait proportionnellement moins de moyens au renseignement extérieur que d'autres pays, notamment le Royaume-Uni.

Il a également évoqué la nécessaire coordination du renseignement, généralement considérée comme satisfaisante par les responsables des services. Il a précisé que ? dans cette optique, il aurait été logique de regrouper les crédits de la DRM avec les deux autres services, même si celle-ci a une vocation plus spécifiquement liée aux opérations militaires. Il a ajouté que sur le plan international, le terrorisme et la prolifération avaient donné lieu à un développement considérable des échanges entre services ces dernières années, cette coopération s'effectuant toutefois de manière quasi exclusive dans le cadre de relations bilatérales. Il a souligné la forte réticence des responsables des services à toute idée de structures de coordination à l'échelle européenne. Il s'est toutefois demandé s'il fallait pour autant abandonner toute perspective en la matière. Enfin, il a évoqué la question d'un contrôle parlementaire des services de renseignement, en regrettant que des propositions précises émises en ce sens ces dernières années n'aient pas abouti.

En conclusion, M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a estimé que les crédits prévus en 2006 pour les programmes « soutien » et « environnement » de la politique de défense comportaient des éléments positifs, comme l'effort réalisé sur les études-amont ou le renseignement, mais aussi certaines insuffisances ou sources d'interrogations. Il a en outre considéré que le contexte financier général laissait planer un doute sur la sincérité du budget présenté par le gouvernement. Il s'en est remis à la sagesse de la commission sur le projet de budget de la mission « Défense ».

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Serge Vinçon, président, s'est félicité de la progression notable des crédits de recherche et technologie. S'agissant de la part de ces dotations consacrées aux recherches dans le domaine nucléaire, il a rappelé les enjeux du programme de simulation ainsi que les importantes retombées de ce dernier sur la recherche civile. En ce qui concerne les crédits du renseignement, il a rappelé que des parlementaires siégeaient dans la commission instaurée en vue de contrôler l'utilisation des fonds spéciaux alloués à la DGSE. Enfin, il s'est étonné des écarts entre le Royaume-Uni et la France, mentionnés par le rapporteur pour avis, concernant les moyens dévolus au renseignement extérieur. Il s'est demandé dans quelle mesure ces écarts pouvaient se traduire dans l'efficacité des services.

M. Josselin de Rohan a évoqué le recrutement des personnels de la DGSE en s'interrogeant sur ses modalités et les difficultés éventuellement rencontrées. Il a également souhaité connaître les exemples étrangers de structure parlementaire de contrôle des services de renseignement.

M. Philippe Nogrix a interrogé le rapporteur pour avis sur le rôle des armées dans la promotion des exportations d'armement et sur les difficultés à promouvoir les matériels européens au sein même des armées européennes.

M. Charles Pasqua a estimé que la notion de contrôle parlementaire des services de renseignement était très extensive dans certains pays. Il a notamment cité les Etats-Unis où les instances parlementaires peuvent intervenir sur les questions touchant aux opérations. Il a souligné qu'un contrôle trop étroit comportait le risque d'entraver la bonne marche des services et de créer la tentation de mener des actions parallèles.

M. Jean François-Poncet a estimé qu'au-delà de la question du contrôle parlementaire des services de renseignement se posait celle de l'évaluation de leur efficacité. Il a soulignait que le Parlement était dépourvu d'élément d'appréciation sur ce point et il a exprimé son scepticisme sur la possibilité de réaliser une telle évaluation.

En réponse à ces différentes interventions, M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- le délégué général pour l'armement a fait état de l'élaboration d'un plan stratégique pour promouvoir les exportations d'armement ; il est clair que l'acquisition d'équipements par les forces françaises constitue souvent un élément décisif pour l'exportation vers des armées étrangères ;

- la question du contrôle parlementaire des services de renseignement a déjà fait l'objet, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, de plusieurs études, rapports ou propositions ; à cette occasion avaient été présentés les systèmes en vigueur chez nos principaux partenaires ou alliés qui, pour la plupart, ont prévu une forme d'association du Parlement dans le domaine du renseignement ; les propositions émises, notamment la proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale par MM. Paul Quilès et Arthur Paecht, ne visaient en rien à permettre un contrôle sur les opérations conduites par les services, mais à pouvoir apprécier les orientations générales de leur action et les moyens dont ils disposent ; la mise en place d'un contrôle sur l'utilisation des fonds spéciaux accordés à la DGSE, confié à une commission où siègent des parlementaires, a semble-t-il conduit à écarter, pour le moment, la perspective d'une instance de contrôle dont l'objet aurait été plus général ;

- pour les personnels civils, qui représentent 70 % de l'effectif de la DGSE, près de 80 % des recrutements sont effectués par concours, dans le cadre de procédures qui respectent bien entendu les impératifs propres du service ; dans l'ensemble, le nombre de candidatures est élevé et le taux de sélection satisfaisant ; les difficultés sont en revanche réelles pour certains profils extrêmement spécialisés, en particulier dans le domaine linguistique ; l'intérêt de la DGSE s'est déplacé vers des zones géographiques impliquant la maîtrise de langues rares ;

- il reste délicat d'évaluer dans l'absolu l'efficacité des services de renseignement, mais il n'est pas douteux que ceux-ci effectuent un travail très utile, notamment dans le domaine de la lutte anti-terroriste ; par ailleurs, la nécessité de la coordination entre services semble être pleinement prise en compte.

PJLF pour 2006 - Mission « Action extérieure de l'Etat » : « Moyens de l'action internationale » - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Guy Branger, sur les crédits relatifs aux« Moyens de l'action internationale » inscrits au sein de la mission « Action extérieure de l'Etat » dans le projet de loi de finances pour 2006.

Après avoir décrit les modifications induites par l'entrée en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, a précisé que la mission « Action extérieure de l'Etat » regroupait, en personnel, 13.590 équivalents temps plein (ETP), devenue l'unité de mesure des emplois, et bénéficiait de 2,4 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, soit près d'1 % des autorisations du budget général de l'Etat. C'est le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le Monde » qui dispose des moyens les plus importants, avec 60 % des crédits de paiement et 66 % des dépenses en personnel de la mission. La part du ministère des affaires étrangères serait, en 2006, en progression, a poursuivi M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, dans le budget de l'Etat, de 1,33 % (crédits du Fonds européen de développement exclus), par rapport à 2005, où elle était de 1,27 %.

Puis le rapporteur pour avis a évoqué l'emploi qui serait fait de ressources en 2006. Il a rappelé que la France disposait du deuxième réseau diplomatique au monde avec 156 ambassades bilatérales, auxquelles s'ajoutent 17 représentations et 4 délégations permanentes. Notre pays se situe ainsi derrière les Etats-Unis, qui disposent de 162 ambassades bilatérales, et avant la Grande-Bretagne, qui en possède 144. Il a rappelé que le ministre des affaires étrangères avait récemment réaffirmé les bénéfices pour notre pays d'un réseau diplomatique aussi dense, et en a conclu que le nécessaire resserrement de notre réseau extérieur devrait se porter davantage sur les établissements consulaires et culturels. Il a rappelé que des efforts avaient déjà été accomplis en ce sens, les postes consulaires étant réduits de 116 en 1996 à 95 en 2006. Il a jugé que cette restructuration devrait particulièrement se poursuivre dans les pays de l'Union européenne avant son dernier élargissement, estimant que le statut de nos compatriotes n'y est plus comparable à celui des étrangers extra-communautaires. Seul cet effort, a-t-il déclaré, permettra de renforcer ceux de nos consulats où la délivrance de nombreux visas s'effectue dans des conditions souvent difficiles.

Puis M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, a évoqué l'impact financier croissant des opérations de maintien de la paix (OMP) menées sous l'égide de l'ONU. Il a estimé que cette montée en puissance découlait de la reprise de l'action internationale de l'ONU due à la fin de la guerre froide, mais, également, de la montée de l'instabilité dans le monde. Saluant la création en 2005 d'une nouvelle opération au bénéfice de la région du Darfour, au Soudan, il a constaté que les sommes inscrites dans le projet de budget pour 2006 laissaient subsister un besoin de financement d'une centaine de millions d'euros, sur un total de 244 millions d'euros, et a rappelé que la contribution française avait considérablement augmenté depuis 1998, date à laquelle elle était de 52 millions d'euros.

En conclusion, le rapporteur pour avis a estimé que le ministère des affaires étrangères avait accompli des efforts marqués d'adaptation au nouveau cadre financier imposé par la LOLF, et a proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption de la mission « Action extérieure de l'Etat ».

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Didier Boulaud a souhaité obtenir des informations sur le projet de regroupement, sur un site unique, à Paris, des différentes implantations du ministère des affaires étrangères. M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, a précisé que l'avancement de ce projet se heurtait à la difficulté de trouver, dans la capitale, un site adéquat où seraient concentrées ces diverses implantations.

M. Philippe Nogrix s'est interrogé sur les critères d'appréciation contenus dans la LOLF, permettant d'évaluer les performances de notre réseau diplomatique. M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, a déclaré que de tels critères existaient dans les documents budgétaires, mais que leur caractère très général nécessiterait un affinement ultérieur.

M. André Dulait a évoqué les projets de rapprochement entre ambassades européennes, d'une part, et consulats européens, d'autre part, à l'extérieur des frontières de l'Union européenne. M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, a précisé que les rapprochements fonctionnels entre ambassades ou consulats avaient été écartés, mais que la perspective de locaux communs était en revanche retenue.

Nations unies - 60e Assemblée générale des Nations unies - Communication

La commission a ensuite entendu le compte rendu, par M. Serge Vinçon, président, du déplacement effectué à Londres, les 30 et 31 octobre 2005, dans le cadre de la réunion des présidents des commissions des affaires étrangères des parlements de l'Union européenne, puis à New York, du 31 octobre au 3 novembre 2005, dans le cadre de la60e Assemblée générale des Nations unies.

M. Serge Vinçon, président, a tout d'abord précisé que son intervention n'avait pas pour objet de dresser un compte rendu exhaustif des travaux de la conférence des présidents des commissions des affaires étrangères des parlements de l'Union européenne, mais bien plutôt de livrer quelques éléments d'ambiance.

Il a indiqué que la présidence britannique avait défini deux thèmes de travail : la lutte contre le terrorisme et la politique de voisinage, et qu'un consensus s'était rapidement dégagé sur le premier thème, sur la nécessité d'une coopération accrue.

Un véritable débat s'est, en revanche, instauré sur la question de la politique de voisinage, à la suite de l'exposé du commissaire européen chargé de ce dossier, Mme Benita Ferrero-Waldner. Le commissaire européen a souligné l'importance des frontières, en insistant tout particulièrement sur les limites de l'acceptation des citoyens européens à l'égard de nouveaux élargissements. Elle a insisté sur le fait que la politique de voisinage était destinée à assurer la stabilité aux frontières de l'Europe, à soutenir les pays en transition, sans entrer pour autant dans un processus d'adhésion.

M. Serge Vinçon, président, a signalé qu'en réponse à son interrogation sur les frontières ultimes de l'Europe, la commissaire avait estimé qu'il s'agissait encore d'une question tabou, tout en considérant qu'elle devrait être posée, faute de quoi les citoyens européens « ne nous suivraient plus ». Elle avait souligné que, dans l'immédiat, cette question n'était pas tranchée et il était apparu évident que, pour nombre de participants, la politique de voisinage était l'antichambre de l'Union européenne, notamment à l'égard de pays comme l'Ukraine, ou même la Biélorussie. M. Serge Vinçon, président, a considéré qu'il était sensible qu'après l'élargissement, la place et le rôle de l'Europe dans le monde n'étaient plus directement au coeur du débat. Il a affirmé que cette question des frontières devait être posée et débattue afin de lever les ambiguïtés qui persistent sur la politique de voisinage.

Il a fait état du débat sur la nature de l'Union et ses objectifs qui s'était ensuite engagé, sur fond de pronostic sur le sort des négociations relatives aux perspectives financières. La présidence britannique, par la voix de son ministre chargé des Affaires européennes, M. Douglas Alexander, a considéré, sur ce point, qu'un accord restait possible à l'horizon du mois de décembre, mais que le problème était celui de la structure du budget européen, pour lequel une revue d'ensemble était nécessaire. M. Serge Vinçon, président, a estimé que, dans cet exercice plutôt formel, que représentait la Conférence des présidents des commissions des affaires étrangères, un travail d'explication et d'influence des positions françaises était apparu nécessaire. Il a indiqué, en conclusion, que seul le président de la commission de la Grande assemblée nationale turque s'était exprimé en français.

Puis M. Serge Vinçon, président, a indiqué qu'avec une délégation de sénateurs composée également de MM. Jacques Legendre, Jean-Pierre Plancade, Didier Boulaud et Robert Hue, il s'était rendu au siège de l'ONU, à New York, du 31 octobre au 3 novembre dernier, dans le cadre de la 60e Assemblée générale de l'organisation.

Les entretiens ont porté sur la réforme de l'Organisation et les principaux sujets de l'actualité internationale. Outre les séances de travail avec le représentant permanent de la France, M. Jean-Marc de la Sablière, la délégation a notamment rencontré le Secrétaire général, M. Kofi Annan, les représentants permanents des Etats-Unis, de l'Allemagne, du Japon, du Brésil, d'Israël, ainsi que l'observateur permanent de Palestine.

L'ordre du jour principal de cette 60e Assemblée générale, et du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qui l'avait ouverte, a été la réforme de l'ONU. Les résultats sont loin d'être négligeables : le mouvement est engagé et fait désormais l'objet de discussions, dans le cadre de l'Assemblée générale, dont la session en cours s'achèvera en septembre prochain.

Le sommet a ainsi permis les principaux résultats suivants. Sur l'atteinte des objectifs du millénaire et l'objectif prioritaire du développement, tout d'abord, le document final du sommet fait une place importante à l'ambition proclamée en 2000 et tendant à réduire de moitié la pauvreté d'ici 2015. En particulier, l'engagement a été renouvelé de porter, à 0,5 % du PNB, en 2010, et à 0,7 %, en 2015, la part de la contribution des pays développés au profit des pays en développement. De même, comme la proposition britannique de facilité financière internationale, l'initiative française de contribution de solidarité sur les billets d'avion figure dans le document final du sommet, même si elle ne pourrait être mise en oeuvre qu'à titre volontaire.

D'autres décisions importantes ont également été prises sur la réforme de l'Organisation, conformément d'ailleurs au rapport préparatoire du « groupe de haut niveau », sur lequel la commission avait entendu M. Robert Badinter ; un Conseil des Droits de l'homme sera créé, se substituant à l'actuelle Commission de l'ONU pour les Droits de l'homme, dont les modalités de désignation aboutissaient à la présence, dans cette enceinte, de représentants des pays dont les pratiques, en la matière, étaient plus que choquantes ; création également d'une « commission de consolidation de la paix», destinée à aider les pays en sortie de conflits, en assurant une meilleure cohérence et une coordination accrue de l'action internationale à leur endroit ; ensuite l'acceptation, par tous les gouvernements, du concept de la « responsabilité de protéger » les populations des crimes de génocide, crimes de guerre, guerres ethniques ou crimes contre l'humanité. Le Conseil de sécurité pourra éventuellement décider, à l'égard de tel ou tel Etat, d'une action collective en vue d'exercer cette responsabilité de protéger, en cas d'échec des moyens diplomatiques.

De même a été engagée la réforme du « management » des Nations unies, l'une des priorités des Etats-Unis. Elle portera, entre autres, sur le mode de recrutement des personnels, l'élaboration d'un code de déontologie, une gestion générale plus efficace, plus transparente et mieux contrôlée par le recours à des audits extérieurs indépendants. L'Assemblée générale devra également réviser la pertinence des mandats et des opérations de l'ONU datant de plus de cinq ans pour, soit les réorienter, soit en alléger le coût, voire les supprimer.

M. Serge Vinçon, président, a précisé que plusieurs sujets importants restaient cependant encore en débat : d'abord une définition du terrorisme, agréée par tous, pour pouvoir conclure enfin une convention globale contre le terrorisme.

De même, la question de la réforme du Conseil de sécurité reste ouverte : la proposition dite du G4 (groupe de pays rassemblant le Japon, l'Inde, le Brésil et l'Allemagne) n'a pas réuni de consensus. Cette proposition, a rappelé M. Serge Vinçon, président, tendait à porter à 11 le nombre de permanents (+ 6) et celui des non-permanents à 14 (+ 4). M. John R. Bolton, représentant permanent des Etats-Unis, a indiqué que le Japon était le seul Etat que son pays avait explicitement soutenu et que, en tout état de cause, un élargissement de plus de 4 à 5 membres ne serait pas, à ses yeux, un gage d'efficacité.

Cette réforme de l'ONU, a poursuivi M. Serge Vinçon, président, est donc désormais en route sur des sujets importants, mais elle intervient dans un contexte tendu. L'action du secrétaire général, voire sa personne même, est mise en cause au Congrès américain et par certains membres de l'administration américaine. Les différents scandales de gestion, l'impression d'un manque de rigueur dans la gestion des ressources financières, la multiplication des organes, instances, agences relevant de l'Organisation, donnent, à tort ou à raison, un sentiment de désordre qui incite les Etats-Unis, premier contributeur, à émettre des exigences de résultats rapides. Mais une telle ambition, dans une enceinte où s'expriment 191 Etats et où chacun d'entre eux, chaque région, au-delà même des 5 permanents, entend garder sa part d'influence, ne sera pas facile à mettre en oeuvre.

Mais le débat sur la réforme a révélé une ligne de fracture entre Nord et Sud : le Sud entend privilégier le rôle de l'ONU dans le développement, d'autres souhaitent le recentrer sur la lutte contre le terrorisme et sur les questions de sécurité ; le Nord met l'accent sur la lutte contre la prolifération, d'autres dénoncent le surarmement nucléaire ; il y a enfin ceux qui considèrent la réforme de la gestion comme une priorité et d'autres qui estiment que cette question vient après celles du développement ou du maintien de la paix.

Parmi les différents entretiens, a poursuivi M. Serge Vinçon, président, plusieurs avaient porté sur les principales crises internationales en cours, à commencer par la Syrie, après l'adoption unanime, le 31 octobre dernier, de la résolution 1636 « invitant » la Syrie à se conformer aux demandes formulées dans le rapport de M. Detlev Mehlis, dans le cadre de son enquête sur l'assassinat du Premier ministre libanais, M. Rafic Hariri.

La conversation de la délégation avec M. Roed Larsen, responsable, au nom du Secrétaire général, pour l'application de la résolution 1559 sur le Liban, a été particulièrement éclairante sur la gravité potentielle de la situation, la Syrie ayant, en effet, jusqu'au 15 décembre pour répondre aux demandes pressantes du Conseil.

Cette question syrienne, sur laquelle la France coopère étroitement avec les Etats-Unis, de même que l'action diplomatique conduite dans le cadre des négociations européennes sur le programme nucléaire iranien, ont été jugées par M. John R. Bolton, représentant permanent des Etats-Unis, comme les deux principaux dossiers sur lesquels se reconstruisaient progressivement les relations bilatérales, après avoir « tourné la page irakienne ».

L'Iran a été le deuxième sujet d'importance évoqué par les interlocuteurs de la délégation. L'obstination iranienne, jointe aux récentes déclarations anti-israéliennes, unanimement condamnées, du président Ahmadinejad est en effet un enjeu majeur de sécurité internationale. La question centrale étant désormais, après la réunion prochaine du Conseil de l'AIEA, la saisine éventuelle du Conseil de sécurité.

Concluant son propos, qui ne prétend pas résumer la totalité des entretiens conduits par la délégation, M. Serge Vinçon, président, a indiqué que tous ses interlocuteurs avaient salué l'efficacité de la diplomatie française conduite à l'ONU : la proposition française de compromis sur la résolution 1636 sur la Syrie avait ainsi permis de réunir l'unanimité au Conseil, ce qui était loin d'être acquis au départ. Il se joue, à New York, a-t-il estimé, à cet endroit stratégique où remontent toutes les crises internationales, une part essentielle de la diplomatie française.

Se référant au débat sur la politique de voisinage de l'Union européenne, évoquée par le président, lors de la réunion de Londres, M. Didier Boulaud a émis les plus vives réserves sur tout accord qui serait passé en ce domaine avec la Biélorussie, dont les plus hauts responsables adoptent des comportements politiques inacceptables et sur lesquels la communauté internationale se devrait de réagir plus vigoureusement.

M. Robert Hue a souligné tout l'intérêt du récent déplacement effectué au siège de l'ONU à New York, qui avait permis d'aborder l'ensemble des questions internationales à l'endroit même où elles sont traitées. Il s'est dit frappé par l'autorité de notre diplomatie au sein de l'Organisation, caractérisée par une position d'initiative constante et que, d'ailleurs, les interlocuteurs de la délégation avaient en effet tous saluée.

Il a relevé qu'une partie des entretiens avait porté sur la situation du continent africain, en général, et sur celle de la Côte d'Ivoire, en particulier, autant de sujets qui justifieraient un approfondissement dans le cadre de la commission. Le rôle et les ressources de l'ONU doivent ainsi être mis en regard de l'importance de l'enjeu des objectifs du millénaire, singulièrement vis-à-vis de l'Afrique.

M. Jean-Pierre Plancade a, à son tour, salué le dynamisme de nos représentants en poste à New York, qui reflétait une culture et une tradition diplomatiques de haut niveau. Si le récent sommet et la 60e Assemblée générale n'avait, pour l'heure, pas permis d'avancer sur la question de la réforme du Conseil de sécurité, des décisions très importantes avaient néanmoins été prises : qu'il s'agisse de la réitération des objectifs du Millénaire et des moyens à consacrer pour les atteindre, de la création d'un Conseil des Droits de l'homme, d'une commission de consolidation de la paix ou de la mise en oeuvre du concept de « responsabilité de protéger » qui se substitue à celui d' « ingérence humanitaire ».

M. Philippe Nogrix a fait observer que, de retour de la session annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN à Copenhague, il avait ressenti un sentiment inverse de celui de ses collègues à l'ONU : au sein de cette assemblée parlementaire, dominée par les Etats-Unis, les thèmes traités, qui dépassent largement les compétences formelles attribuées à l'Organisation atlantique (comme les négociations commerciales multilatérales), plaçaient souvent la France en situation d'isolement.

En réponse à M. Jean François-Poncet, qui l'interrogeait sur le scandale du programme « pétrole contre nourriture » et l'implication d'anciens diplomates français, M. Serge Vinçon, président, a indiqué que cette question n'avait pas été directement abordée, sauf dans le cadre des débats sur la réforme qui venait d'être engagée sur les mécanismes de gestion et de contrôle de l'Organisation.

M. Robert Del Picchia a estimé qu'une partie des problèmes provoqués par le programme « pétrole contre nourriture » de l'ONU était liée à la difficulté pour l'Organisation de trouver, en son sein, les compétences nécessaires à la gestion technique d'un programme d'une telle ampleur.

Revenant sur l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, M. Didier Boulaud a rappelé qu'elle était présidée par un Français. Il n'en était que plus étonné du fait que l'on recourre plus souvent à l'anglais qu'au français dans les travaux de cette assemblée.

M. Serge Vinçon, président, a conclu en relevant que le représentant permanent du Brésil, dont le pays était plus que réservé sur la proposition de création d'une Organisation des Nations unies pour l'Environnement, avait néanmoins, y compris sur cette question, reconnu la capacité d'influence et de persuasion du représentant permanent de la France.

PJLF pour 2006 - Mission « Aide publique au développement » - Audition de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur les crédits pour 2006 du programme « Solidarité avec les pays en développement » de la mission interministérielle « Aide publique au développement ».

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, a rappelé que depuis 2002, le développement des pays du Sud constituait une priorité centrale du gouvernement, le Président de la République ayant fixé des objectifs ambitieux.

Ainsi, l'aide publique au développement sera portée à 0,5 % de notre revenu national brut en 2007 en vue d'atteindre les 0,7 % en 2012. Pour 2006, le projet de loi de finances est construit sur un objectif de 0,47 %, soit 8,2 milliards d'euros.

Mme Brigitte Girardin, se référant au sommet des Nations unies de septembre dernier, a précisé que la communauté internationale se rangeait désormais derrière cet objectif d'augmentation de l'aide, comme cela a été confirmé en juillet dernier lors du G8 de Gleneagles, tout comme elle partage l'approche française sur les buts ultimes de l'aide, les Objectifs du Millénaire pour le développement, qui visent à réduire la pauvreté de moitié dans le monde d'ici à 2015, ainsi que sur l'accent à mettre sur l'Afrique, continent qui ne bénéficie pas assez des effets positifs de la mondialisation.

La ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie a indiqué que la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) se traduisait par deux innovations : la création d'une mission budgétaire « Aide publique au développement » regroupant des crédits des ministères des affaires étrangères et de l'économie, des finances et de l'industrie ; la réalisation d'un document intitulé « Politique française en faveur du développement », qui vise à clarifier les objectifs de notre aide, à savoir la mise en oeuvre des objectifs du Millénaire, la promotion du développement à travers les idées et le savoir-faire français et une gestion plus efficiente de l'aide publique au développement. Ce document comporte, comme le souhaitait le Parlement, un tableau établissant le lien entre les crédits budgétaires votés et le chiffre déclaré pour notre aide publique au développement, en l'occurrence 0,47 % du revenu national brut pour 2006.

S'agissant des crédits de la mission « Aide publique au développement », ils connaîtront en 2006 une augmentation sensible de 200 millions d'euros, soit 7 %.

Comme les années précédentes, la majeure partie de cet accroissement bénéficiera à nos engagements multilatéraux, notamment à travers les Nations unies et la Banque mondiale. La décision de porter notre contribution au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose, et le paludisme, de 150 millions d'euros en 2005 à 300 millions d'euros en 2007, fait de la France le premier contributeur mondial à ce Fonds, devant les Etats-Unis. La France est également depuis janvier le premier contributeur au Fonds africain de développement, tout comme elle est aussi le premier contributeur au Fonds européen de développement.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, a considéré que le recours à l'aide multilatérale permettait d'obtenir des résultats tangibles sur le terrain. Ainsi, en ce qui concerne la lutte contre le Sida, le nombre de malades sous traitement anti-rétroviraux, quasi nul il y a quelques années pour le monde en développement, est passé à 1,6 million grâce au Fonds mondial.

L'aide bilatérale n'est pas pour autant oubliée. Les autorisations d'engagement pour les projets bilatéraux, essentiellement le Fonds de solidarité prioritaire et les concours sous forme de dons de l'Agence française de développement, qui étaient de 300 millions d'euros en 2002, atteindront 450 millions d'euros en 2006. Les prêts de l'Agence française de développement passeront pour leur part de 370 millions d'euros en 2002 à plus de 1.200 millions d'euros en 2006. En quatre ans, le volume des projets bilatéraux lancés aura ainsi été multiplié par 2,5.

La ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie a ensuite souligné la nécessité de renforcer l'efficacité de l'aide. Elle a précisé que les charges de personnel diminueraient, ce qui libèrera près de 50 millions d'euros pour des projets.

Mme Brigitte Girardin a estimé que cet effort devrait être poursuivi, la France disposant dans ce domaine d'une marge de manoeuvre plus limitée que ses voisins britanniques ou allemands, alors même que ceux-ci consacrent une part plus faible de leur richesse nationale à l'aide au développement.

La ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie a souligné que, parallèlement, la prévisibilité de notre aide devait être renforcée, ce qui passera par une augmentation des volumes d'autorisations d'engagement. Elle a mentionné les progrès permis par le regroupement des crédits relatifs à l'aide alimentaire sur le budget du ministère des affaires étrangères. Ainsi, en 2005, 60 % de celle-ci a été achetée dans l'environnement régional, contre seulement 30 % en 2004. Des coûts de transports inutiles ont pu être économisés, tout en aidant davantage ces pays.

Mme Brigitte Girardin a estimé, qu'au-delà d'une efficacité accrue, ce déliement de notre aide alimentaire permettait d'en éliminer les effets négatifs pour les économies des pays bénéficiaires. Elle a tenu à souligner cet impact positif au moment où la politique agricole commune de l'Union européenne est critiquée par des pays qui déversent leurs excédents alimentaires sous forme d'aide dans les pays les plus pauvres ou qui dépriment leurs cours mondiaux du coton par des exportations massivement subventionnées.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, a indiqué que dans un objectif d'efficacité, notre dispositif d'aide publique avait connu depuis 2004 une réforme importante visant à améliorer le pilotage stratégique de l'aide, sous la coordination du ministre en charge de la Coopération, ainsi que la lisibilité de notre action en confiant la mise en oeuvre des projets à l'Agence française de développement sur la base d'instructions précises de l'Etat.

Elle a précisé qu'elle réunissait régulièrement les ministères concernés dans le cadre d'une conférence d'orientation stratégique et de programmation, et qu'étaient également mis en place dans chaque pays des documents-cadres de partenariat constituant de véritables plans d'action conclus entre la France et les pays aidés, assortis d'engagements mutuels pour une période de trois à cinq ans. Ces documents doivent respecter quatre priorités : une meilleure lisibilité sur le terrain en mettant notamment un accent sur la francophonie ou la lutte contre l'immigration clandestine ; une plus grande cohérence, afin de rendre nos projets plus percutants et d'être chef de file dans nos domaines d'intervention ; une meilleure coordination avec le pays aidé, avec les autres intervenants français comme les collectivités territoriales, les entreprises ou les ONG et avec les autres bailleurs de fonds internationaux, en particulier les Européens ; enfin une plus grande prévisibilité, afin d'inscrire notre action dans la durée de trois ou cinq ans.

En conclusion, Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, a évoqué les sources innovantes de financement, comme la Facilité financière internationale pour la vaccination. Par ailleurs, la mise en place d'une contribution de solidarité sur les billets d'avion est engagée. Au mois de septembre, à l'ONU, 79 pays se sont engagés sur une déclaration mentionnant cette contribution proposée depuis près de deux ans par le Président de la République. Trois pays, la France, le Royaume-Uni et le Chili, sont prêts à appliquer immédiatement un tel dispositif, que la France souhaite affecter en priorité au secteur de la santé. L'adoption du dispositif législatif correspondant sera un atout pour convaincre d'autres pays lors de la conférence ministérielle que le Président de la République a lancée pour les 28 février et 1er mars prochains.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga a souligné l'importance, pour l'image de la France, d'une forte présence dans l'aide publique internationale, mais s'est inquiétée de l'aspect un peu trop technocratique, sur le terrain, des programmes de l'ONU et des modalités de fonctionnement de l'Agence française pour le développement (AFD) dans les domaines de l'éducation et de la santé. Elle a indiqué que les baisses actuelles de charges de personnels impliquaient à terme une forte augmentation de ces coûts, en rendant indispensable le recours à une expertise technique privée plus onéreuse et avaient également pour conséquence une perte de savoir-faire dans l'ingénierie éducative et le développement rural. Elle a regretté que la francophonie, et en particulier l'alphabétisation pratique, ne fassent pas partie des préoccupations de l'AFD.

M. Serge Vinçon, président, a demandé des précisions sur la part du budget d'aide publique au développement correspondant au montant de l'annulation de la dette irakienne et sur l'état des négociations relatives au prochain Fonds européen de développement (FED).

M. Jacques Pelletier a demandé quelle était la part de l'ensemble des annulations de dettes dans le budget d'aide au développement, quel était le nombre d'assistants techniques prévus pour 2006 et quelle serait l'éventuelle augmentation de notre subvention au Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Il a regretté que l'île Maurice, mais surtout la Zambie, ne fassent pas partie de la Zone de solidarité prioritaire, empêchant l'intervention de l'AFD dans ces pays.

Mme Hélène Luc a souhaité connaître la date de mise en oeuvre de l'imputation de la contribution de solidarité sur les billets d'avions. Elle a souligné l'indispensable effort à fournir en matière de bourses d'études pour favoriser le développement de la langue française à l'étranger. Elle s'est inquiétée de l'éventuelle lourdeur de fonctionnement de l'AFD et a souhaité des précisions sur le concours de l'Etat français au fonctionnement de l'hôpital « Mère-enfant » de Kaboul.

M. Michel Guerry a demandé quel rapport on pouvait établir entre les 300 millions d'euros consacrés à la lutte contre le Sida et le nombre de personnes, 1,2 million traitées par trithérapie, et a souhaité connaître les principaux pays bénéficiaires de l'aide française contre cette maladie.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, se disant optimiste sur les effets positifs à attendre de la mise en oeuvre progressive de la réforme du dispositif de coopération, a apporté les éléments de réponse suivants :

- l'AFD, opérateur pivot de l'aide au développement, a pour rôle de mettre en oeuvre les décisions du gouvernement en la matière, pour lesquelles le ministère délégué à la coopération exerce une fonction de pilotage et qui exerce sur l'Agence une tutelle vigilante ;

- les documents cadres de partenariat pourront mentionner les domaines de l'éducation et de la santé, secteurs nouveaux d'intervention ; une attention particulière sera portée à ce que ces secteurs bénéficient de l'assistance technique nécessaire ;

- le recours aux canaux de l'aide multilatérale est indispensable, afin en particulier de rendre plus efficace, par une coordination des financements, la lutte contre les grandes pandémies ;

- l'Agence française pour le développement peut agir en faveur de l'alphabétisation, si sa tutelle le lui demande ;

- 80 % de l'aide française sont concentrés sur les trois secteurs prioritaires définis dans chacun des documents cadres de partenariat, mais 20 % peuvent être alloués aux autres secteurs ;

- le document-cadre de partenariat concerne les cinq années à venir, ce qui accroît la lisibilité de notre action. Celle-ci s'appuie sur les aides bilatérales, multilatérales, européennes, sur les organisations non gouvernementales et la coopération décentralisée. Le secteur privé doit également être impliqué ;

- l'impact de la remise de la dette irakienne sur l'aide publique au développement a été étalé sur une période de quatre ans : 500 millions d'euros en 2005, 200 en 2006, 550 en 2007 et 570 en 2008, les chiffres de ces deux dernières années étant susceptibles de varier, notamment en fonction du taux de change ;

- la participation française au FED s'élève à 25 %, contre 16 % si elle était établie selon la clé de répartition budgétaire, mais le principe d'une budgétisation de cette participation ne réunit guère de consensus auprès de nos partenaires ;

- les annulations de dettes s'élèvent, pour 2006, à 1,9 milliard d'euros, soit environ 25 % de notre aide publique au développement (8,2 Md€) ;

- en ce qui concerne les effectifs d'assistants techniques, 92 postes ont été transférés à l'AFD. L'objectif est de maintenir en 2006 le niveau atteint en 2005 et d'affecter 1.318 postes au programme « Solidarité » et 230 au programme « Environnement ». Nos partenaires africains souhaiteraient une augmentation de ces effectifs, mais il est préférable de s'orienter vers une formation des populations locales, plutôt que d'en revenir à une coopération de substitution qui contredit la nécessité d'une appropriation de l'aide par ses bénéficiaires. Par ailleurs, dans des domaines tels que la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, l'assistance technique, si elle est sans doute moins visible, n'en est pas moins réellement efficace et saluée par les partenaires. La rationalisation des charges de personnel a aussi permis de reporter 50 millions d'euros au profit de l'aide-projets. Le recours aux missions de courte durée est également apprécié, en particulier dans le cadre du Groupement d'intérêt public France Coopération Internationale ;

- les fonds français d'aide au développement transitant par les Nations unies ne se sont élevés ces dernières années qu'à 2 %, contre une moyenne des pays OCDE de 7 %. Cette contribution, à la demande du Président de la République, doublera d'ici à 2007, afin d'intensifier notre coopération avec cet organisme qui joue un rôle central ;

- la Zambie et l'Ile Maurice ne font pas partie de la zone de solidarité prioritaire (ZSP) et l'AFD ne peut donc opérer dans ces pays. Le souci de la France est actuellement de concentrer les bénéfices du classement en ZSP sur les pays les plus démunis ;

- la France mettra en place, dès 2006, l'imputation de la contribution de solidarité sur les billets d'avions, dans le cadre des financements innovants pour le développement. Avec le Chili, le Royaume-Uni et le Brésil, une réunion internationale se tiendra à Paris fin février pour inciter d'autres pays à participer à cette action. Les besoins financiers pour le développement s'élèvent en effet chaque année à 50 milliards de dollars, dont 25 pour l'Afrique, et les financements publics traditionnels ne peuvent suffire. La taxe sur les billets d'avions est une solution intéressante, par sa simplicité, la stabilité et la prévisibilité des ressources qu'elle permet de dégager ;

- l'utilisation de la langue française à l'étranger est un élément important de notre influence extérieure et la demande est forte dans de nombreux pays pour la création d'écoles à cette fin et pour la formation d'enseignants. Il faut veiller à répondre à cette demande, sans s'engager dans une nouvelle coopération de substitution. A cet égard, le recours accru aux bourses est un outil pertinent ;

- l'AFD agit sous la tutelle vigilante du ministère délégué à la coopération en recourant aux différents instruments existants : les documents-cadres de partenariat, les 7 secteurs stratégiques d'intervention retenus par la conférence d'orientation stratégique et de programmation, et les contrats d'objectifs en cours de négociation avec le ministère des affaires étrangères et avec le ministère des finances ;

- la France a déjà mobilisé 10 millions d'euros pour le Pakistan, auxquels s'ajoute sa contribution logistique dans le cadre de l'OTAN. Une réflexion est engagée pour mobiliser l'AFD pour la phase de reconstruction ;

- l'hôpital « Mère-enfant » de Kaboul va être inauguré prochainement et sera en mesure de fonctionner normalement ;

- la contribution française à la lutte contre le Sida va passer de 150 à 300 millions d'euros. Au total 640 millions de dollars seront versés en 2006-2007 au Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme. L'objectif est de doter ce fonds de 7 milliards de dollars, contre 4 milliards actuellement, montant qui permet de poursuivre les programmes en cours, mais pas d'entreprendre d'actions nouvelles. Sur les 6 millions de personnes qui ont actuellement besoin d'un traitement contre le Sida, 3 millions vivent en Afrique. Ainsi, en République centrafricaine, 1 million d'habitants ont disparu, l'espérance de vie est tombée à 39 ans, et 30 % des fonctionnaires sont atteints de cette maladie. Dans ces conditions, aucune stratégie de développement n'est possible.

Mme Paulette Brisepierre, évoquant les contrats de désendettement-développement, a réaffirmé son souhait que ce type d'aide soit conditionné au respect par les gouvernements bénéficiaires de leurs engagements envers nos compatriotes pour le versement de leurs retraites.

M. Robert Del Picchia a souligné que le terme de « taxe » sur les billets d'avions était souvent mal compris, notamment par les pays nordiques. Il a rappelé que l'Union européenne avait besoin, elle aussi, d'assistants techniques, ce qui devrait constituer une opportunité pour les assistants techniques français expérimentés. Il a indiqué par ailleurs que le Sénat venait de signer un accord de coopération avec le PNUD pour favoriser la bonne gouvernance et la démocratie.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, s'associant au souci de Mme Paulette Brisepierre, a indiqué que la France ne ménageait pas ses efforts pour obtenir le respect des engagements pris par les pays bénéficiaires des contrats de désendettement-développement.

Elle a indiqué que c'est l'appellation de « contribution de solidarité sur les billets d'avions » qui avait été retenue pour ce système de financement innovant du développement. Au sujet des assistants techniques européens ou multilatéraux, le ministre a rappelé que la France proposait des candidats rémunérés sur des financements multilatéraux, et que les chiffres qu'elle avait cités ne concernait que les assistants techniques rémunérés directement sur les crédits du ministère.