D. LARGEMENT DÉPENDANT DES RESSOURCES PROPRES QU'IL TIRE DES GRANDS PROJETS AUXQUELS IL CONTRIBUE, L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE L'IGN SE TROUVE DÉJÀ MENACÉ

Essentiellement porté par la vente de cartes papier, le marché dit « grand public » s'est contracté de plus de 30 % depuis 2017. En 2023, il devrait poursuivre son fléchissement régulier en atteignant 7,5 millions d'euros. Résultante du processus d'ouverture et de gratuité des données publiques, l'érosion des recettes issues du marché dit « professionnel » se poursuit également. Elles ont été divisées par trois depuis 2017 et devraient passer sous la barre des 4 millions d'euros en 2023. À contrario, le marché « défense-espace » reste dynamique grâce au partenariat historique noué par l'opérateur avec le ministère des armées. 15 millions d'euros de recettes sont attendues par l'IGN en 2023 à ce titre.

Évolution du chiffre d'affaires de l'IGN (2017-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Le nouveau modèle de l'établissement repose principalement sur de grands projets d'accompagnement de politiques publiques financés par leurs commanditaires. En 2023, les ressources propres de l'IGN provenant du financement de ces grands projets pourrait ainsi s'établir à 55,1 millions d'euros.

Évolution des recettes tirées des grands projets (2016-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Les programmes financés par le ministère des armées (Geomaps et Trex) devraient rapporter à l'IGN 21,4 millions d'euros en 2023. S'agissant des prestations effectuées en faveur du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, 11 millions d'euros sont attendus par l'opérateur au titre de la mise à jour du référentiel parcellaire graphique (RPG).

Comme il l'a fait dans son rapport d'information de novembre 2022, le rapporteur spécial réitère ses préoccupations quant à la trop grande dépendance financière de l'IGN à ses deux principaux donneurs d'ordre que sont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et le ministère des armées.

Dans ce même rapport, le rapporteur spécial n'avait pas caché son inquiétude quant à la fragilité du nouveau modèle économique de l'IGN. Il avait à ce titre souligné qu'une des principales incertitudes inhérentes à la logique de projets intrinsèquement associée au nouveau modèle de l'opérateur était celle du « trou d'air », c'est-à-dire, à un moment donné, un volume de grands marchés insuffisant pour assurer la viabilité économique et l'équilibre budgétaire de l'institut. Les missions essentielles de l'établissement, telles que la production de données souveraines socles, pourraient alors s'en trouver menacées.

Le rapporteur spécial ajoutait dans ce même rapport que si ce phénomène devait, advenir l'État devrait nécessairement prendre ses responsabilités et intervenir, en ajustant, au moins temporairement, la subvention pour charges de service public (SCSP) de l'établissement et ce, afin de préserver un outil d'une part de référence au service de la maîtrise de données souveraines stratégiques et d'autre part essentiel à la conduite de la stratégie environnementale du pays.

S'il estimait à l'époque que le risque était plus susceptible de se matérialiser à compter de l'année 2025, au terme de la période couverte par l'EPOM, le directeur général de l'institut lui a annoncé que cela pourrait advenir dès l'année 2024. En effet, alors que l'IGN attend encore des confirmations de financement pour des projets tels que le Lidar HD ou celui visant à créer un jumeau numérique du territoire national, les simulations de sa direction financière prévoient en l'état une trésorerie négative à horizon de la fin de l'année 2024.

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