N° 128

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2023

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 11c

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES
(Programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie »)


BUDGET ANNEXE : CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

Rapporteur spécial : M. Vincent CAPO-CANELLAS

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) : 1680, 1715, 1719, 1723, 1745, 1778, 1781, 1805, 1808, 1820 et T.A. 178

Sénat : 127 et 128 à 134 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

I. LE PROGRAMME 159 « EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET MÉTÉOROLOGIE »1(*) DE LA MISSION « ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES »

La décennie de baisse ininterrompue de la subvention pour charges de service public (SCSP) de Météo France a pris fin en 2023. Ce renversement est confirmé en 2024 puisque la SCSP historique de l'établissement doit progresser à nouveau pour atteindre 198 millions d'euros. En 2024, la SCSP de Météo-France serait complétée par une dotation de 9,3 millions d'euros pour le financement des supercalculateurs mis en service en 2021.

Après une augmentation de 33 ETPT en 2023, les effectifs de Météo-France vont de nouveau progresser de 25 ETPT en 2024. Ces évolutions apparaissent là encore comme une rupture après plus d'une décennie de constantes réductions d'effectifs.

Évolution du plafond d'emplois de Météo-France depuis 2012

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Mis sous tension par les bouleversements du paysage de la donnée géolocalisée, concurrencé par l'émergence de nouveaux acteurs, affecté par l'essor des démarches collaboratives, l'IGN s'est engagé dans une profonde refondation de son modèle.

En 2024, les équilibres budgétaires de l'opérateur restent encadrés par l'engagement pluriannuel d'objectifs et de moyens (EPOM) conclu en 2022 pour la période 2022-2024. La SCSP de l'institut doit progresser de 4 % pour tenir compte notamment de la revalorisation du point d'indice. En matière d'effectifs, le projet de loi de finances (PLF) assouplit la trajectoire prévue par l'EPOM en prévoyant un schéma d'emplois négatif de 25 ETP au lieu de 35 ETP.

Le nouveau modèle de l'établissement repose principalement sur de grands projets d'accompagnement de politiques publiques financés par leurs commanditaires. En 2023, les ressources propres de l'IGN provenant du financement de ces grands projets pourraient ainsi s'établir à 55,1 millions d'euros.

Évolution des recettes de l'IGN tirées des grands projets depuis 2016

(en millions d'euros)

Lidar HD : laser Detection and ranging (système de mesure à distance par laser) haute densité

OCS GE : occupation du sol à grande échelle

RPG : registre parcellaire graphique, un programme mené pour le ministère de l'agriculture

Trex et Geomaps : programmes menés pour le ministère des armées

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Dans un rapport d'information publié en novembre 2022, le rapporteur spécial n'avait pas caché son inquiétude quant à la fragilité du nouveau modèle économique de l'IGN, l'une des principales incertitudes inhérentes à la logique de projets étant la survenue d'un « trou d'air », c'est-à-dire, un volume de grands marchés insuffisant pour assurer la viabilité économique de l'institut. Le rapporteur spécial ajoutait dans ce même rapport que si ce phénomène devait advenir, l'État devrait prendre ses responsabilités en ajustant la SCSP de l'établissement afin de préserver un outil de référence au service de la maîtrise de données souveraines stratégiques.

S'il estimait à l'époque que le risque était plus susceptible de se matérialiser à compter de l'année 2025, au terme de la période couverte par l'EPOM, le directeur général de l'institut lui a annoncé que cela pourrait advenir dès l'année 2024. En effet, alors que l'IGN attend encore des confirmations de financement pour certains projets, les simulations de sa direction financière prévoient à ce jour une trésorerie négative en fin d'année 2024.

En 2024, après de nombreuses années de réductions d'effectifs, le Cerema devrait voir ses emplois augmenter (à hauteur de 10 ETP) pour la première fois de son histoire. Sa SCSP doit également progresser pour couvrir la nouvelle hausse du point d'indice de la fonction publique ainsi que les autres mesures sociales décidées au bénéfice des agents publics.

Schémas d'emplois du Cerema depuis 2017

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

L'article 159 de la loi dite « 3DS », a ouvert la voie à une nouvelle ère et à un nouveau modèle économique pour l'opérateur. La loi prévoit de faire de l'établissement un outil partagé entre l'État et les collectivités territoriales à travers un dispositif juridique dit de « quasi-régie conjointe ». Au printemps 2023, les instances de la nouvelle gouvernance du Cerema ont été instituées. Les objectifs volontaristes du Cerema en lien avec le déploiement de son nouveau modèle économique le conduisent à anticiper de nouvelles hausses substantielles de ses ressources propres jusqu'à ce qu'elles approchent la barre des 60 millions d'euros en 2027 dont 50 % pourraient provenir des collectivités territoriales.

Évolution prévisionnelle des ressources propres, y compris les recettes
provenant des collectivités territoriales

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

II. REPRISE DU TRAFIC, INVESTISSEMENTS, ORGANISATION DU TRAVAIL ET GESTION PRÉVISIONNELLLE DES EFFECTIFS : LES PRINCIPAUX DÉFIS DU BUDGET ANNEXE « CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS »

Le trafic aérien rebondit fortement en 2023 à la faveur de la progression observée sur les vols internationaux et en dépit d'une stagnation de la fréquentation des liaisons domestiques. Le trafic aérien de passagers en France a augmenté progressivement depuis 2021 pour revenir à 96 % de son niveau de 2019 au cours des mois de juillet et d'août 2023. D'après les scénarios envisagés par la direction générale de l'aviation civile (DGAC), en France, le niveau de trafic pré-crise (2019) devrait être dépassé en 2025. En moyenne, sur la période 2018-2025, la DGAC s'attend à une croissance du trafic de 0,6 % à 1,1 % par an.

Pour l'année 2024, le rendement total des redevances de navigation aérienne pourrait atteindre 1,9 milliard d'euros, soit une hausse d'un peu plus de 100 millions d'euros (+ 6 %). Ce montant serait supérieur de 260 millions d'euros au rendement constaté en 2019, une différence qui a pour principale origine le mécanisme de lissage du rattrapage des conséquences économiques de l'effondrement du trafic aérien au cours des années 2020 et 2021 dont l'effet annuel est évalué à environ 250 millions d'euros.

Évolution des recettes tirées des redevances de navigation aérienne
depuis 2010

(en millions d'euros)

RSTCA-OM : redevance pour services terminaux de la circulation aérienne - outre-mer

RSTCA-M : redevance pour services terminaux de la circulation aérienne - métropole

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2022, pour la première fois depuis cinq ans, du fait de la crise du transport aérien, les effectifs de la DGAC avait été réduits (de 72 ETP), ce qui avait eu pour conséquence une diminution des recrutements d'ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA). En raison de la reprise du trafic et de la perspective d'une vague de départs à la retraite qui touchera les contrôleurs aériens à la fin de la décennie, un schéma d'emploi nul avait été adopté en LFI pour 2023.

En 2024, les effectifs de la DGAC doivent augmenter de 28 ETP. L'évolution à la hausse des effectifs de la DGAC en 2024 et l'effort de recrutement de nouveaux ICNA s'inscrivent dans une trajectoire pluriannuelle qui doit permettre au contrôle aérien de disposer des capacités suffisantes afin de parvenir à faire passer le trafic aérien à l'horizon de la fin de la décennie.

Au début de l'année 2023, la DGAC a relancé les négociations avec les partenaires sociaux pour définir le cadre d'un nouveau protocole social. Ces accords pluriannuels, ayant notamment vocation à assurer une certaine forme de paix sociale, devaient garantir aux personnels de la DGAC des avantages catégoriels en contrepartie de l'adoption de mesures de productivité, notamment en matière d'organisation du temps de travail, visant à améliorer la performance du contrôle aérien.

Depuis de nombreuses années, le rapporteur spécial ne cache pas son scepticisme quant à l'équilibre et à l'intérêt de ces accords. Il est impératif que le futur accord transcrive réellement le principe de « donnant-donnant » qui fonde la légitimité de cette pratique. Contrairement à ses prédécesseurs, le futur protocole devra absolument se traduire par une amélioration substantielle et mesurable de la performance des services de la navigation aérienne. Cela doit nécessairement passer par une révision du cadre de l'organisation du temps de travail des contrôleurs aériens.

L'année 2024 doit marquer une nouvelle impulsion budgétaire pluriannuelle en faveur des investissements de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA). Elle explique la hausse des dépenses d'investissement du BACEA programmées en 2024.

Les dépenses d'investissement de la DGAC depuis 2013

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Cette impulsion s'inscrit dans une nouvelle trajectoire d'investissements pluriannuelle en hausse significative par rapport à celle qui avait été programmée à la fin de l'année 2022. Dans son rapport d'information de juin 2023 intitulé « la navigation aérienne fait atterrir en urgence son programme de modernisation », le rapporteur spécial avait mis en évidence les raisons qui rendaient nécessaires ce nouvel effort d'investissement. Cette nouvelle trajectoire doit ainsi intégrer les coûts prévisionnels de la transition du programme 4-Flight vers un système susceptible d'être mutualisé avec d'autres prestataires de services de la navigation aérienne (PSNA) ainsi que les investissements indispensables pour traiter des situations d'obsolescence d'infrastructures de la DSNA. Deux nouveaux programmes d'investissement ont ainsi pour vocation de répondre à ces enjeux :

- premièrement le programme « 4-Flight révolution », pour un coût de 342 millions d'euros d'ici à 2030, est le prolongement du programme « 4-Flight » qui consiste en la conception d'un nouvel outil d'assistance au contrôle aérien, dont le déploiement, lancé en 2022 doit s'achever d'ici 2027 ;

- deuxièmement, un programme « infrastructures bas carbone » doit remédier à l'obsolescence des emprises immobilières de la DSNA pour 140 millions d'euros d'ici à 2029.

En raison de l'effondrement du trafic aérien provoqué par la pandémie de Covid 19, la dette du BACEA s'est considérablement accrue pour culminer à 2,7 milliards d'euros au 31 décembre 2021. Après une stabilisation en 2022, l'encours de dette du budget annexe devrait commencer à se résorber cette année pour s'établir à 2,5 milliards d'euros au 31 décembre 2023.

La DGAC considère que le BACEA pourrait devoir emprunter 238 millions d'euros en 2024 ce qui permettrait à son encours de dette de poursuivre son repli à environ 2,4 milliards d'euros au 31 décembre 2024.

Selon les prévisions de trafic retenues à ce jour par la DGAC, le désendettement du BACEA devrait se poursuivre après 2024 à une moyenne d'environ 300 millions d'euros par an, pour un encours de dette de 1,5 milliard d'euros à horizon 2027.

Évolution de l'endettement du budget annexe depuis 2008

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Le rapporteur spécial a déjà alerté à plusieurs reprises le Gouvernement sur cette question mais il devient désormais plus urgent que jamais de résoudre le déséquilibre structurel du système de financement des missions régaliennes de sûreté et de sécurité aéroportuaires. Cette nécessité est d'autant plus urgente que d'importants investissements en la matière sont programmés et que la France prend un retard préoccupant dans le déploiement des nouveaux systèmes de contrôle des passagers et des bagages de cabine (« EDS cabine »).

Le rapporteur a appris que des scénarios d'effacement partiel ou total des 700 millions d'euros d'avances accordées ces dernières années aux aéroports étaient actuellement étudiés. Il lui semble impératif que ces réflexions aboutissent rapidement.

Réunie le mercredi 22 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision.

Au 10 octobre 2023, date limite fixée par la LOLF, 38 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues au rapporteur spécial.

PROGRAMME 159
« EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE
ET MÉTÉOROLOGIE »

Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » regroupe les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertises pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Céréma), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

I. FACE AUX RISQUES CLIMATIQUES, LES MOYENS DE MÉTÉO FRANCE SONT RENFORCÉS

En tant que service météorologique national (SMN) Météo-France surveille les conditions météorologiques, les prévoit et diffuse les informations qui s'y rapportent. Il doit aussi conserver la mémoire des climats passés et prévoir les climats futurs. Les missions de Météo-France deviennent de plus en plus sensibles en raison des conséquences des dérèglements climatiques sur la survenue de phénomènes météorologiques extrêmes. L'opérateur joue également un rôle stratégique dans son appui aux forces armées et comme prestataire de services météo à l'aviation civile.

Depuis 2021, les activités de l'opérateur s'inscrivent dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2022-2026.

A. UNE SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC EN PROGRESSION

En 2023 la subvention pour charges de service public (SCSP) versée par l'État à Météo-France devrait représenter 44 % de ses recettes. En retraitant la subvention destinée à la contribution de la France à l'organisation Eumetsat qui ne fait que transiter par le budget de l'opérateur, cette dotation compte même pour plus de 53 % de ses ressources. Cette subvention correspond à la compensation des missions de service public de Météo-France :

- la fourniture d'informations nécessaires à assurer la sécurité météorologique des personnes et des biens dans un contexte où le territoire est de plus en plus régulièrement frappé par des phénomènes météorologiques extrêmes ;

- un travail de recherche pour améliorer les modèles de prévision et mieux appréhender le changement climatique, ses conséquences et les moyens de s'y adapter ;

- le soutien aux forces armées, notamment sur des théâtres d'opérations extérieures.

La décennie de baisse ininterrompue de la subvention pour charges de service public (SCSP) de Météo France a pris fin en 2023. Alors qu'il avait objectivé la nécessité de cette inflexion dans son rapport du 22 septembre 2021 « temps instable sur Météo-France : quand le refroidissement budgétaire se confronte au réchauffement climatique »2(*), le rapporteur spécial avait eu l'occasion de la saluer lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2023.

Ce renversement est confirmé en 2024 puisque la SCSP historique de l'établissement doit progresser une nouvelle fois de 9 % (16 millions d'euros) pour s'établir à 198 millions d'euros3(*).

Cette progression doit cependant être lue avec précaution dans la mesure où, afin de prendre en compte les effets en 2023 du relèvement du point d'indice de la fonction publique et, surtout, pour couvrir la hausse de plus de 10 millions d'euros des charges de l'opérateur relatives à la hausse des prix de l'électricité, Météo-France avait perçu, en toute fin de gestion 2022, un versement de 12 millions d'euros. Cette décision de pure opportunité budgétaire conduit ainsi à biaiser l'analyse de l'évolution de la SCSP de l'opérateur en 2024. En réintégrant ce versement à la SCSP octroyée en 2023, la hausse réelle constatée en 2024 n'est plus que de 4 millions d'euros, soit 2 %.

Par ailleurs, il est utile de noter qu'un certain nombre de mesures sociales décidées par l'État vont impacter les frais de fonctionnement de Météo-France en 2024, à hauteur d'un peu plus de 4 millions d'euros :

- 2,7 millions d'euros liés à la revalorisation de 1,5 % du point d'indice de la fonction publique opérée en juillet 2023 ;

- 1,5 million d'euros pour la hausse de 5 points d'indice pour les agents publics à compter du 1er janvier 2024 ;

- ou encore 0,1 million d'euros pour la hausse du remboursement des abonnements de transport en commun.

Aussi, en prenant en compte l'ensemble de ces phénomènes, la SCSP de Météo-France afficherait une relative stabilité en 2024.

Évolution de la SCSP entre 2012 et 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

En 2024, la SCSP de Météo-France doit être complétée par une dotation de 9,3 millions d'euros consacrée au financement des supercalculateurs mis en service en 2021.

Évolution de la dotation complémentaire dédiée au financement
du supercalculateur 2019-2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

En plus des crédits relevant du programme 159, Météo-France doit également bénéficier en 2024, à l'instar des années précédentes, de 3,9 millions d'euros attribués par la direction générale de la prévention des risques (DGPR) à partir des crédits du programme 181 « Prévention des risques » pour participer à l'entretien du réseau d'observation hydrométéorologique.

Une subvention, accordée par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et portée par le programme 193 « Recherche spatiale », transite par le budget de l'opérateur. Elle correspond à la part principale de la contribution de la France à l'organisme européen Eumetsat. Neutre pour le budget de Météo-France par lequel elle ne fait que transiter, elle devrait s'élever à 62 millions d'euros en 2024.

B. LES RECETTES COMMERCIALES DE MÉTÉO-FRANCE SE SONT STABILISÉES

Météo-France est le prestataire exclusif de l'assistance météorologique pour la navigation dans l'espace aérien français. La redevance versée par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) au titre des services météorologiques rendus à la navigation aérienne représente près du quart des ressources de Météo-France. Stable en euros courants depuis 2012, elle s'élève à 85,55 millions d'euros. Cette stabilité en euros courants signifie que cette ressource se dévalue chaque année du niveau de l'inflation. Ce phénomène est d'autant plus prononcé dans le contexte actuel d'évolution des prix.

Dans son rapport d'information précité, le rapporteur spécial soulignait à quel point cette situation n'était pas satisfaisante et avait formulé une recommandation visant à, dans les délais les plus brefs, « s'assurer que la redevance versée par la direction générale de l'aviation civile couvre les coûts des prestations délivrées à l'aviation civile et, le cas échéant, en réévaluer le montant » (recommandation n° 8 du rapport). Il a été satisfait d'apprendre que la recommandation qu'il avait portée en 2021 soit sur le point d'être mise en oeuvre puisque Météo-France doit conduire un exercice de mise à jour de sa comptabilité analytique en 2024 visant à objectiver le degré de couverture des coûts réels des prestations délivrées par le montant de redevance annuelle versée. Cette analyse devra permettre d'ajuster le niveau de cette redevance à compter de l'exercice budgétaire 2025.

Depuis 2022, le niveau des recettes commerciales perçues par Météo-France affiche une relative stabilité. D'après les prévisions les plus actualisées, elles pourraient atteindre 35 millions d'euros en 2024, soit 10 % des ressources de l'établissement4(*).

À compter du 1er janvier 2024, Météo-France ne pourra plus percevoir de redevances sur la vente de données publiques. Cette évolution se traduira par une diminution de recettes de 1,8 million d'euros au regard des montants perçus en 2023.

C. APRÈS UNE DÉCENNIE DE DIMINUTION, LES EFFECTIFS DE L'OPÉRATEUR PROGRESSENT DEPUIS 2023

Après une augmentation de 33 ETPT en 20235(*), le plafond d'emplois de Météo-France, en raison d'un schéma d'emplois positif (voir infra), doit de nouveau progresser de 25 ETPT en 2024.

Évolution du plafond d'emplois de Météo-France de 2012 à 2024

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les schémas d'emplois successifs demandés à l'établissement Météo-France avaient été particulièrement exigeants jusqu'en 2022, se traduisant par des diminutions d'effectifs annuelles moyennes de 78 ETP.

À compter de 2023, le phénomène s'est inversé. En 2023, ses effectifs ont progressé à hauteur de 23 ETP6(*) et en 2024, 25 ETP supplémentaires doivent lui être attribués. Ces nouveaux effectifs doivent permettre, tout à la fois d'augmenter le nombre d'élèves à l'École nationale de la météorologie (ENM), de dédier des moyens pérennes aux projections et services climatiques outre-mer7(*), de compléter les moyens existants pour l'appui opérationnel à la lutte contre les incendies, pour l'installation de bouées au large de la Corse ainsi que pour les travaux de mise à disposition des données publiques.

Schéma d'emplois notifié et réalisé depuis 2012

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses de Météo-France au questionnaire du rapporteur spécial

Le rapporteur spécial se félicite de ces évolutions nécessaires qui vont dans le sens des recommandations qu'il avait formulées dans son rapport de 2021 précité. Il constate cependant que, du fait notamment du délai de formation de trois ans des ingénieurs des travaux de la météorologie, le retard dans les recrutements se traduit par des situations qui restent parfois tendues dans les services et par le besoin de recruter ponctuellement des agents contractuels. Cette situation devrait néanmoins s'améliorer progressivement à compter des années 2025 et 2026.

Si l'enveloppe des emplois hors plafond de l'établissement devrait se stabiliser à hauteur de 100 ETPT en 2024, la présidente directrice générale de Météo-France a signalé au rapporteur spécial les difficultés que rencontrait l'établissement pour recruter des effectifs dans ce cadre.

Cette difficulté provient notamment de la doctrine d'application de la circulaire du 11 juillet 2010 qui encadre le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) comptabilisés dans les effectifs hors plafond des opérateurs. La direction du budget considère en effet que ces effectifs hors plafond ne peuvent concerner des contrats signés avec des personnes publiques sans mise en concurrence, c'est-à-dire des contrats dits en « quasi-régie » ou « in house ».

Les charges de personnel de Météo-France devraient se stabiliser à environ 246 millions d'euros en 2024.

Évolution de la masse salariale de Météo-France de 2012 à 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses de Météo-France au questionnaire du rapporteur spécial

D. LE COÛT DES MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DE LA RESTRUCTURATION DE SON RÉSEAU TERRITORIAL N'EST PAS ANODIN POUR LE BUDGET DE L'OPÉRATEUR

Depuis plus de dix ans, Météo-France a entrepris une profonde restructuration de son réseau territorial. Ainsi, depuis 2022, Météo-France ne dispose-t-il plus que de 39 implantations territoriales en métropole8(*) contre 115 en 2011, soit une réduction des deux tiers en dix ans. Cette transformation de grande ampleur doit s'achever en novembre 2023 avec la suppression des fonctions de prévisionniste amont régional9(*) du fait de l'automatisation de leurs missions.

Pour accompagner les transformations de l'établissement et tout particulièrement la restructuration de son réseau territorial, un dispositif d'indemnité de départ volontaire (IDV)10(*) a été proposé aux agents. Cette mesure a rencontré un vif succès qui a dépassé les prévisions de l'opérateur. Jusqu'en 2022, le coût de ce dispositif était couvert à 50 % par une subvention du fonds d'accompagnement interministériel des ressources humaines (FAIRH). Cependant, depuis 2023, Météo-France l'assume entièrement. En 2023, le coût de ce dispositif pour l'opérateur devrait dépasser les 8 millions d'euros et une nouvelle charge de 1,8 million d'euros est anticipée en 2024.

Coût constaté ou prévisionnel des dispositifs d'IDV
(2020-2024)

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses de Météo-France au questionnaire du rapporteur spécial

E. 350 MILLIONS D'EUROS POUR DE NOUVEAUX SUPERCALCULATEURS À HORIZON 2026

En 2024, les dépenses d'investissement de Météo-France devraient dépasser légèrement les 25 millions d'euros, soit un niveau équivalent aux dépenses prévues en 2023.

Évolution des dépenses d'investissement (2012-2024)

(en milliers d'euros)

HPC : calcul intensif

Source : Météo-France

Si, comme l'illustre le graphique ci-dessus, il représente une part significative de celles-ci, les dépenses d'investissement de Météo-France ne se limitent pas au calcul intensif.

Essentielles, les autres dépenses d'investissement11(*) ne doivent en aucun cas être négligées et le rapporteur spécial a insisté dans son rapport de 2021 précité sur la nécessité de se prémunir du risque d'un phénomène d'éviction à leur détriment. Depuis 2012, elles oscillent entre 15 et 18 millions d'euros. D'après les dernières estimations, en 2024, elles devraient se situer plutôt en haut de cette fourchette.

Le projet « calcul 2020 » devait permettre à Météo-France de multiplier par cinq sa puissance de calcul intensif. L'objectif a été rempli puisqu'après la bascule de la production opérationnelle sur ses deux nouveaux supercalculateurs au mois de février 2021, la capacité de calcul du SMN français a été multipliée par 5,5. Le coût total du projet « Calcul 2020 » atteint 142 millions d'euros sur la période 2019-2026. Il inclut le paiement de la redevance à la société ATOS pour les supercalculateurs, le coût de leur consommation électrique, ainsi que les dépenses connexes nécessaires au fonctionnement et à l'exploitation des données produites.

La course à la puissance de calcul continue de battre son plein entre services météorologiques. Les capacités de calcul intensif ont des traductions très concrètes sur la performance des modèles de prévision numérique du temps (PNT), elles sont incontournables pour permettre une prévision plus fine des phénomènes météorologiques extrêmes. Ainsi, et alors même que les nouveaux supercalculateurs n'étaient pas encore pleinement opérationnels, Météo-France avait d'ores et déjà engagé une réflexion avec ses tutelles sur les besoins de renouvellement de sa capacité de calcul intensif.

Compte-tenu des évolutions technologiques et d'un paysage concurrentiel actuellement limité sur ce marché, le coût de cet investissement devrait plus que doubler par rapport à celui du plan « calcul 2020 ». Le nouveau projet « calcul 2026 » pourrait ainsi coûter près de 350 millions d'euros. Il est prévu que le premier des deux nouveaux supercalculateurs soit mis en service à la fin de l'année 2026.

Comparaison du coût total de financement
des supercalculateurs et des futurs supercalculateurs

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Une étude de la société Citizing de septembre 2021 portant sur « l'évaluation socioéconomique du renouvellement des supercalculateurs de Météo-France en 2025 » estime qu'une nouvelle multiplication par six de la puissance de calcul pourrait générer des gains socio-économiques de l'ordre de 1,4 milliard d'euros pour une valeur actuelle nette d'environ 1,1 milliard d'euros, soit un retour sur investissement proche de cinq euros pour un euro investi.

II. L'IGN : UN NOUVEAU MODÈLE DÉJÀ EN SURSIS

Établissement public administratif placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts, le nouvel Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) est issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national (IFN) intervenue le 1er janvier 201212(*).

Les missions de l'IGN se partagent entre ses tâches dites « traditionnelles » et des activités émergentes. La collecte et la production de données géolocalisées souveraines dites « socles »13(*) constituent ainsi le coeur de ses missions de service public. Par ailleurs, l'IGN conçoit et met à jour différents référentiels géographiques publics14(*). Il a aussi en charge la réalisation de l'inventaire forestier.

Au-delà de ces activités « traditionnelles », l'IGN se tourne de plus en plus vers des missions nouvelles telles que des activités d'expertise et de conseil, d'assistance à maîtrise d'ouvrage, d'agrégation de données produites par d'autres acteurs ou de diffusion et de valorisation de l'information géographique publique. L'IGN est aussi amené à devenir le pilote de l'écosystème de la donnée géolocalisée.

Dans son rapport d'information publié au mois de novembre 2022 et intitulé « acteur de référence de la donnée géolocalisée souveraine, l'IGN avance sur un chemin à baliser »15(*), le rapporteur spécial a analysé les enjeux du renouvellement en cours du modèle économique de l'établissement. Mis sous tension par les bouleversements du paysage de la donnée géolocalisée, concurrencé par l'émergence d'acteurs publics comme privés, affecté par l'essor des démarches collaboratives, l'IGN était, il y a quelques années, remis en cause dans son identité et contesté dans sa légitimité. Le processus d'ouverture et de gratuité des données publiques, s'il lui ouvre de nouvelles perspectives de collaborations, implique une transformation du modèle d'un institut dont l'équilibre financier dépendait de la vente de ses données. Pour toutes ces raisons, l'IGN devait se transformer.

Aussi, à partir de 2019, l'IGN a-t-il entrepris de refonder son modèle. D'une mission de production-diffusion d'information géographique, l'IGN évolue vers des rôles d'agrégateur de données, d'expert, de coordinateur ou de certificateur. Il recentre son action sur la production des données socles souveraines ainsi que sur le pilotage de vastes projets d'accompagnement de grandes politiques publiques directement financés par leurs commanditaires.

A. SON NOUVEAU MODÈLE A FAIT CROÎTRE L'ACTIVITÉ DE L'IGN

Dépenses et recettes de l'IGN (2017-2023)

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Le nouveau modèle de l'IGN a généré une croissance de son activité et de son budget. Alors que ce dernier avoisinait les 150 millions d'euros jusqu'en 2020, moyennant le décalage entre la perception des recettes issues des financements des grands projets et l'exécution des dépenses pour leur réalisation effective, il se situe désormais à un niveau supérieur à 180 millions d'euros. Ainsi, pour l'exercice 2023, les dépenses de l'IGN sont-elles estimées à 191 millions d'euros pour des recettes attendues de 176 millions d'euros.

Cet accroissement d'activité à effectifs constants, et même en diminution, est permis par l'effet de levier lié au recours à la sous-traitance. Il signale aussi que la multiplication des projets auxquels contribue l'IGN a placé l'opérateur dans une situation de « saturation » de ses moyens humains.

B. EN 2024, LES ÉQUILIBRES BUDGÉTAIRES DE L'IGN RESTENT ENCADRÉS PAR SON ENGAGEMENT PLURIANNUEL D'OBJECTIFS ET DE MOYENS

L'IGN, ses autorités de tutelle et la direction du budget (DB) ont conclu, le 25 janvier 2022, un engagement pluriannuel d'objectifs et de moyens (EPOM)16(*) sur la période 2022-2024 qui formalise des engagements réciproques entre l'opérateur et l'État. Pour l'accompagner dans sa refondation, et plus particulièrement pour lui permettre d'engager un ambitieux programme de recrutement et de promotion de son attractivité, l'opérateur avait besoin d'un assouplissement de sa trajectoire budgétaire doublé d'une visibilité pluriannuelle.

Dans ce cadre, l'État s'est engagé à stabiliser la SCSP de l'IGN jusqu'en 2024 et à assouplir le schéma d'emplois de l'opérateur. Nul en 2023, ce schéma devait ensuite retrouver, à partir de 2024, sa trajectoire antérieure à 2022, une réduction de 35 ETP. Les engagements de l'IGN reposent notamment sur le respect d'une trajectoire d'évolution de sa masse salariale, le maintien d'un niveau de trésorerie prudentiel, le développement de ses partenariats financiers ou encore la concrétisation de son programme de recrutement.

Le rapporteur spécial avait eu l'occasion de saluer la conclusion de cet EPOM dans son rapport d'information de novembre 2022. En effet, il devait donner à l'IGN, jusqu'en 2024, les moyens budgétaires de mener son ambitieuse refondation. Cependant, le rapporteur spécial notait aussi dans ce même rapport que la viabilité économique du nouveau modèle de l'IGN dépendra des équilibres budgétaires qui seront déterminés à l'issue de l'EPOM.

C. LA SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'IGN PROGRESSE DE 4 % POUR TENIR COMPTE DE LA REVALORISATION DU POINT D'INDICE DE LA FONCTION PUBLIQUE

L'action 12 « Information géographique et cartographique » du programme 159 retrace la subvention pour charges de service public (SCSP) de l'IGN qui devrait s'établir à 92,3 millions d'euros (AE=CP) en 2024, correspondant à une augmentation de 3,4 millions d'euros (+ 3,8 %) destinée à tenir compte de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Suite à la conclusion de l'EPOM en 2022, l'inflexion constatée en 2023 est donc confirmée en 2024 et la trajectoire baissière de la SCSP historique de l'institut a bel et bien été stoppée. Le graphique ci-après présente la SCSP réellement versée à l'IGN depuis 201617(*).

Évolution de la SCSP effectivement perçue par l'IGN (2012-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

D. LARGEMENT DÉPENDANT DES RESSOURCES PROPRES QU'IL TIRE DES GRANDS PROJETS AUXQUELS IL CONTRIBUE, L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE L'IGN SE TROUVE DÉJÀ MENACÉ

Essentiellement porté par la vente de cartes papier, le marché dit « grand public » s'est contracté de plus de 30 % depuis 2017. En 2023, il devrait poursuivre son fléchissement régulier en atteignant 7,5 millions d'euros. Résultante du processus d'ouverture et de gratuité des données publiques, l'érosion des recettes issues du marché dit « professionnel » se poursuit également. Elles ont été divisées par trois depuis 2017 et devraient passer sous la barre des 4 millions d'euros en 2023. À contrario, le marché « défense-espace » reste dynamique grâce au partenariat historique noué par l'opérateur avec le ministère des armées. 15 millions d'euros de recettes sont attendues par l'IGN en 2023 à ce titre.

Évolution du chiffre d'affaires de l'IGN (2017-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Le nouveau modèle de l'établissement repose principalement sur de grands projets d'accompagnement de politiques publiques financés par leurs commanditaires. En 2023, les ressources propres de l'IGN provenant du financement de ces grands projets pourrait ainsi s'établir à 55,1 millions d'euros.

Évolution des recettes tirées des grands projets (2016-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Les programmes financés par le ministère des armées (Geomaps et Trex) devraient rapporter à l'IGN 21,4 millions d'euros en 2023. S'agissant des prestations effectuées en faveur du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, 11 millions d'euros sont attendus par l'opérateur au titre de la mise à jour du référentiel parcellaire graphique (RPG).

Comme il l'a fait dans son rapport d'information de novembre 2022, le rapporteur spécial réitère ses préoccupations quant à la trop grande dépendance financière de l'IGN à ses deux principaux donneurs d'ordre que sont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et le ministère des armées.

Dans ce même rapport, le rapporteur spécial n'avait pas caché son inquiétude quant à la fragilité du nouveau modèle économique de l'IGN. Il avait à ce titre souligné qu'une des principales incertitudes inhérentes à la logique de projets intrinsèquement associée au nouveau modèle de l'opérateur était celle du « trou d'air », c'est-à-dire, à un moment donné, un volume de grands marchés insuffisant pour assurer la viabilité économique et l'équilibre budgétaire de l'institut. Les missions essentielles de l'établissement, telles que la production de données souveraines socles, pourraient alors s'en trouver menacées.

Le rapporteur spécial ajoutait dans ce même rapport que si ce phénomène devait, advenir l'État devrait nécessairement prendre ses responsabilités et intervenir, en ajustant, au moins temporairement, la subvention pour charges de service public (SCSP) de l'établissement et ce, afin de préserver un outil d'une part de référence au service de la maîtrise de données souveraines stratégiques et d'autre part essentiel à la conduite de la stratégie environnementale du pays.

S'il estimait à l'époque que le risque était plus susceptible de se matérialiser à compter de l'année 2025, au terme de la période couverte par l'EPOM, le directeur général de l'institut lui a annoncé que cela pourrait advenir dès l'année 2024. En effet, alors que l'IGN attend encore des confirmations de financement pour des projets tels que le Lidar HD ou celui visant à créer un jumeau numérique du territoire national, les simulations de sa direction financière prévoient en l'état une trésorerie négative à horizon de la fin de l'année 2024.

E. L'IGN DOIT BÉNÉFICIER D'UN NOUVEL ASSOUPLISSEMENT DE SON SCHÉMA D'EMPLOIS

1. Un nouvel assouplissement dans la trajectoire de réduction des effectifs de l'IGN

Davantage encore que la baisse de sa SCSP, c'était la réduction de ses effectifs qui faisait figure de principal obstacle à la transformation de l'IGN. À ce titre, l'assouplissement prévu par l'EPOM en 2023 était nécessaire. Si cet engagement pluriannuel prévoyait un retour à la trajectoire antérieure de baisse d'effectifs dès 2024, le présent projet de loi de finances propose un nouvel assouplissement en ne prévoyant de réduire les effectifs de l'IGN que de 25 ETP au lieu d'une diminution de 35 ETP. Le plafond d'emplois de l'opérateur doit ainsi être porté à 1 362 ETPT contre 1 387 ETPT en 202318(*).

Évolution des plafonds d'emplois notifiés et exécutés (2012-2024)

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

L'assouplissement de la trajectoire de baisse d'effectifs prévue par l'EPOM est traduit dans le schéma d'emplois de l'IGN qui ne doit donc diminuer que de 25 ETP en 2024.

Schémas d'emplois prévus et réalisés (2018-2024)

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Les progrès technologiques dans le domaine de l'information géographique et la transformation de son modèle se traduisent par l'émergence de nouveaux besoins de compétences pour l'IGN. Aussi, en 2021, la direction de l'établissement a-t-elle lancé un programme de recrutement et de formation qui vise à développer 150 nouveaux postes d'ici 2024 sur des compétences émergentes19(*)D'après le projet annuel de performance du programme 159, seuls 53 des 150 postes avaient été pourvus à la fin du mois de juin 2023.

Pour 2023, la prévision la plus actualisée relative aux charges de personnel de l'IGN fait état d'une dépense de 118,2 millions d'euros.

Évolution des dépenses de personnel (2016-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. La sous-traitance des grands projets explique la hausse des dépenses de fonctionnement de l'IGN

Les dépenses de fonctionnement hors charges de personnel devraient atteindre 61 millions d'euros en 2023, soit une progression de 15 % par rapport à 2022 et de 58 % depuis 2019.

Évolution des dépenses de fonctionnement hors personnel
(2016-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Ce phénomène s'explique par le nouveau modèle économique de l'IGN qui suppose un niveau élevé de dépenses de sous-traitance relatives aux grands projets.

Les besoins structurels d'investissements de l'IGN, pour maintenir et renouveler son appareil de production, avoisinent les 10 millions d'euros. Entre 2016 et 2021, ces dépenses se situaient à un niveau insuffisant. La viabilité de son nouveau modèle ainsi que la capacité de l'IGN à rester un établissement de référence performant à la pointe des techniques géomatiques, dépendent aussi du maintien d'un niveau de dépenses d'investissement suffisant.

Le rapporteur spécial a ainsi pu souligner dans son rapport d'information précité qu'il serait dangereux pour la viabilité même de son modèle que les dépenses d'investissement de l'IGN viennent à être utilisées à terme comme une variable d'ajustement de son équilibre budgétaire.

Le rebond de ces dépenses amorcé en 2022 semble devoir se confirmer en 2023, exercice au cours duquel la barre des 10 millions d'euros devrait être franchie (12 millions d'euros sont programmés). Il est important que ce niveau de crédits soit sanctuarisé dans les prochaines années qui s'annoncent déterminantes pour l'avenir de l'IGN.

Évolution des dépenses d'investissement en CP
(2016-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

III. LE CEREMA DOIT BÉNÉFICIER DE LA PREMIÈRE HAUSSE D'EFFECTIFS DE SON HISTOIRE

Le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) est un établissement public administratif qui résulte de la fusion au 1er janvier 2014 de onze services de l'État. L'action 11 « Études et expertises en matière de développement durable » du programme 159 porte les crédits de la subvention pour charges de service public de cet opérateur.

A. LA PREMIÈRE HAUSSE D'EFFECTIFS DE L'HISTOIRE DU CEREMA

Depuis sa création et jusqu'en 2022, le Cerema s'était vu imposer une diminution continue de sa subvention pour charges de service public et de ses effectifs.

Évolution en lois de finances initiales de la subvention pour charges
de service public et du plafond d'emplois du Cerema depuis sa création

 

Subvention
pour charges
de service public
(en millions d'euros)

Variation annuelle

Plafond d'emplois
(en ETPT)

Variation annuelle

2014

228,8

-

3 155

-

2015

226,3

- 1,1 %

3 152

- 0,1 %

2016

217,6

- 3,8 %

3 024

- 4,1 %

2017

210,8

- 3,1 %

2 899

- 4,1 %

2018

206,0

- 2,3 %

2 796

- 3,6 %

2019

201,3

- 2,2 %

2 695

- 3,6 %

2020

196,7

- 2,3 %

2 594

- 3,7 %

2021

191,1

- 2,8 %

2 507

- 3,3 %

2022

189,0

- 1,1 %

2 495

- 0,5 %

2023

194,1

+ 2,7 %

2 495

-

2024

197,9

+ 2,0 %

2 505

+ 0,4 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

De 2017 à 2022 la trajectoire de restriction budgétaire a même été amplifiée. Elle prévoyait :

- une baisse annuelle de son plafond d'emplois de 100 ETPT (soit un objectif de réduction de 17 %) ;

- ainsi qu'une contraction de sa SCSP d'environ 5 millions d'euros par an.

Évolution de la subvention pour charges de service public
effectivement versée au Cerema depuis sa création

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Cette tendance a été interrompue en 2023 et cette inflexion se confirme en 2024. La SCSP de l'établissement doit ainsi augmenter de 3,8 millions d'euros pour s'établir à 198 millions d'euros. Cette progression vise à couvrir la nouvelle hausse du point d'indice de la fonction publique intervenue en juillet 2023 ainsi que les autres mesures sociales décidées par le Gouvernement au bénéfice des agents publics dans le contexte d'inflation actuel.

Après une stabilisation en 2023, et pour la première fois depuis sa création, les effectifs du Cerema doivent augmenter en 2024. Le plafond d'emplois de l'opérateur est ainsi porté à 2 505 ETPT (+ 10 ETPT).

Dans le cadre de son nouveau modèle et pour répondre notamment aux besoins des collectivités en termes d'expertise sur les problématiques de transition écologique, le Cerema considère que d'ici à 2027, il devrait consacrer 400 nouveaux ETP à ces missions émergentes. Sur ces 400 ETP, il estime pouvoir redéployer 200 de ses effectifs actuels. Pour l'opérateur, son besoin, entre 2024 et 2027, équivaudrait donc à 200 nouveaux ETP, soit environ 50 par an.

Évolution du plafond d'emplois prévu et exécuté (2015-2024)

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2024, la première hausse d'effectifs de l'histoire du Cerema doit ainsi se traduire par un schéma d'emplois positif à hauteur de 10 ETP.

Schémas d'emplois 2017-2024

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Parallèlement, les effectifs hors plafond de l'établissement progressent de 2 ETPT, pour atteindre 122 ETPT, sous l'effet de l'augmentation de l'enveloppe prévue pour le recrutement d'apprentis.

En 2023, les dépenses de personnel de l'établissement devraient atteindre 223,0 millions d'euros, soit une augmentation de 17,5 millions d'euros par rapport à 2022. Cette hausse a deux origines :

- les augmentations du point d'indice de la fonction publique en juillet 2022 (5,2 millions d'euros en année pleine), ainsi qu'en juillet 2023 (1,2 millions pour six mois et 2,4 millions d'euros en année pleine) ;

une régularisation relative à la résorption de l'année de décalage de l'indemnité de sujétions spéciales (ISS) pour 13 millions d'euros.

L'évaluation la plus récente des dépenses de personnel du Cerema pour 2024 fait état d'un montant de 217 millions d'euros.

Évolution des dépenses de personnel depuis 2017

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Jusqu'en 2023, les dépenses d'investissement de l'établissement étaient particulièrement insuffisantes, oscillant entre 5 et 8 millions d'euros. Lors de l'examen du PLF pour 2022, le rapporteur spécial avait alerté le Gouvernement sur les risques d'une situation de nature à compromettre gravement les capacités de production et l'avenir du Cerema.

En juin 2021, un rapport de l'inspection générale de l'administration (IGA) et du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD)20(*) avait dressé un constat particulièrement sombre des perspectives du Cerema, pointant notamment ce déficit chronique d'investissement très préoccupant et éloigné du seuil de 14 millions d'euros annuels qu'il estimait indispensable au maintien des capacités de production de l'établissement.

À la faveur notamment de la dernière tranche des financements du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP) alloués depuis 2019 dans le cadre de la transformation de l'établissement, les dépenses d'investissement du Cerema ont été portées à un niveau exceptionnel de 16,7 millions d'euros en 2023. En 2024, elles devraient continuer de progresser pour atteindre 19 millions d'euros.

Évolution des dépenses d'investissements depuis 2017

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Cette évolution s'explique notamment par le lancement du programme de réhabilitation d'un parc immobilier extrêmement vétuste. Alors que l'établissement est en passe de finaliser la rédaction de son nouveau schéma d'investissement immobilier, sept sites pilotes ont d'ores et déjà été identifiés comme prioritaires : Aix-en-Provence, Trappes, Nancy, Toulouse, Bron, Rouen et Bordeaux. En parallèle, l'opérateur souhaite aussi s'engager dans un programme de rénovation de ses laboratoires.

B. LE NOUVEAU STATUT DU CEREMA SE MET PROGRESSIVEMENT EN PLACE

Depuis 2019 l'établissement s'est doté d'un projet stratégique baptisé « Cerem'Avenir ». Pour accompagner la mise en oeuvre de ce plan stratégique et les profondes restructurations conduites par le Cerema, celui-ci a bénéficié d'un financement de 12,3 millions d'euros sur 4 ans du fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP). Pour mener à bien ses restructurations internes, l'établissement peut aussi s'appuyer sur une subvention du fonds d'accompagnement interministériel des ressources humaines (FAIRH). Par ailleurs le conseil d'administration du Cerema avait adopté un projet stratégique pour la période 2021-2023 le 15 avril 2021, puis un contrat d'objectifs et de performance (COP) le 7 octobre de la même année.

L'article 159 de loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale dite loi « 3DS », a ouvert la voie à une nouvelle ère et à un nouveau modèle économique pour l'opérateur. La loi prévoit de faire de l'établissement un outil partagé entre l'État et les collectivités territoriales à travers un dispositif juridique dit de « quasi-régie conjointe ».

Ce modèle permet aux collectivités, qui font le choix d'adhérer, d'attribuer au Cerema des marchés publics par simple voie conventionnelle, sans application des obligations de publicité et de mise en concurrence exigées par le code de la commande publique. Les collectivités adhérentes s'engagent sur une durée de quatre ans et s'acquittent d'une cotisation selon leur démographie ou en fonction de leur type, selon un barème délibéré en conseil d'administration. Le premier barème, dont le détail est présenté dans le tableau ci-après, avait été voté par le conseil d'administration du 6 octobre 2022 qui a précédé le lancement de la campagne d'adhésion.

Barème de cotisations des collectivités adhérentes à la quasie-régie conjointe

(en euros)

Catégories de collectivités

Montant de la contribution en année pleine

Montant de la contribution au titre de l'année 2023

Communes et groupements de 10 000 habitants et moins

500 €

Abattement de 50 % sur le montant issu du barème applicable en année pleine

Communes et groupements de 10 001 à 39 999 habitants

0,05€ par habitant

Communes et groupements de plus de 40 000 habitants

2 000 €

Départements

2 500 €

1 250 €

Régions

5 000 €

2 500 €

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Au printemps dernier, la nouvelle gouvernance du Cerema a été inaugurée avec les installations, le 16 mai 2023, de son nouveau conseil d'administration ainsi que de son conseil stratégique. Le 16 mai 2023 marque ainsi le début de l'accès des collectivités à la quasi-régie avec le Cerema, leur permettant d'attribuer des marchés publics à l'opérateur sans application des obligations de publicité et de mise en concurrence fixées par le code de la commande publique. De juin à septembre 2023, le Cerema a organisé les premières instances régionales de sa gouvernance.

Le Cerema affichait d'emblée des ambitions très optimistes quant au déploiement de son nouveau modèle. Cette année, il a revue à la hausse ses prévisions à très court terme en visant 800 collectivités adhérentes dès 2023 (les toutes dernières projections prévoient même 850 adhésions21(*)) mais il a en revanche modéré ses prévisions à plus long terme en ne prévoyant plus que 1 500 collectivités adhérentes à horizon 2027 (au lieu de 2 000) et des cotisations de 1,7 million d'euros (au lieu de 2 millions d'euros) à cette même échéance.

Objectifs affichés par le Cerema en termes de collectivités adhérentes
et de cotisations

Catégories de collectivités

Cible 2023

Cotisations 2023 demi-tarif

(en euros)

Cible 2027

Cotisations 2027

(en euros)

Communes et groupements

360

180 000

581

580 000

Groupements

344

170 000

800

800 000

Départements

80

100 000

101

252 500

Régions

16

40 000

18

90 000

Total

800

490 000

1 500

1 722 500

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

La progression des ressources propres perçues par l'établissement était déjà engagée avant l'instauration du régime de quasi-régie conjointe. Ces ressources devraient atteindre 50 millions d'euros en 2023. Les objectifs volontaristes du Cerema en lien avec le déploiement de son nouveau modèle économique le conduisent à anticiper de nouvelles hausses sensibles de ces recettes jusqu'à ce qu'elles approchent la barre des 60 millions d'euros en 2027.

Évolution des ressources propres constatées et prévisionnelles

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

En 2022, le Cerema a réalisé des prestations rémunérées générant des recettes de 12,8 millions d'euros (en hausse de 0,6 million d'euros en un an), soit 28 % de ses recettes totales. Les ressources propres de l'opérateur provenant des collectivités sont en progression depuis 2018 : + 14,5 % en 2019, + 5,4 % en 2020, + 7 % en 2021 et + 5,4 % en 2022.

Du fait de son nouveau régime de quasi-régie, l'établissement public anticipe une multiplication par deux des recettes en provenance des collectivités qui passeraient de 12,8 millions d'euros en 2022 à 28 millions d'euros en 2027.

Par rapport à l'année dernière, dans son plan d'affaire, il a néanmoins nettement révisé à la baisse les objectifs attendus en matière de ressources propres provenant des collectivités territoriales pour les années à venir : 14 millions d'euros contre 22 millions d'euros en 2023, 20 millions d'euros contre 28 millions d'euros en 2024, 23 millions d'euros contre 29 millions d'euros en 2025, 26 millions d'euros contre 30 millions d'euros en 2026 et enfin 28 millions d'euros contre 31 millions d'euros en 2027.

En cumul, cette modération des ambitions du Cerema atteint tout de même près de 30 millions d'euros sur la période.

Évolution prévisionnelle des ressources propres dont les recettes provenant des collectivités territoriales

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

BUDGET ANNEXE
« CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS »

La direction générale de l'aviation civile (DGAC), administration centrale de l'État, joue un triple rôle de prestataire de service, de prescripteur de règles et de régulateur du transport aérien en France :

- elle assure les services de la circulation aérienne auprès des compagnies aériennes, au moyen de ses centres de contrôle en route et de ses tours de contrôle ;

- elle veille au maintien de la sécurité et de la sûreté du transport aérien en assurant la surveillance des industriels, des opérateurs et des personnels navigants ;

- elle est le régulateur économique et social du secteur aérien (compagnies aériennes, industries aéronautiques et aéroports sous réserve des missions exercées par l'autorité de régulation des transports) ;

- elle lutte contre les nuisances, en particulier sonores et atmosphériques, générées par le transport aérien ;

- elle élabore et défend les positions de la France dans les instances internationales qui traitent de l'aviation civile ;

- elle favorise le développement de l'aviation légère.

C'est la mission « Contrôle et exploitation aériens » qui retrace, dans le cadre du présent budget annexe, dit « BACEA », les activités de production de biens et de prestation de services de la DGAC.

I. LE TRAFIC AÉRIEN SE RAPPROCHE D'UN RETOUR À LA NORMALE ET LES RECETTES DU BACEA PROGRESSENT

A. EN SORTIE DE CRISE, LE SECTEUR AÉRIEN VOIT SA TRAJECTOIRE DE DÉCARBONATION SOUTENUE PAR LE PLAN FRANCE 2030

1. Le trafic rebondit fortement en 2023 à la faveur de la progression observée sur les vols internationaux

Après une décennie de croissance rapide, le transport aérien avait subi, à partir de 2020, la pire crise de son histoire. Avec une baisse de 69,7 % en passagers kilomètres transportés (PKT), l'année 2020 a été la pire année du transport aérien en Europe.

Évolution du trafic aérien (2010-2020)

(en passager kilomètres transportés ou PKT)

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial d'après les données de l'organisation de l'aviation civile internationale (OACI) et de l'association du transport aérien international (IATA)

Bien qu'en augmentation, en 2021, le trafic n'avait atteint que 40 % de son niveau de 2019. En 2022, en Europe, le trafic s'était plus nettement redressé. Le trafic sur les vols internationaux demeurant inférieurs de 25 % au niveau constaté en 2019 tandis que les vols intérieurs avaient 97 % de leur fréquentation d'avant crise.

Évolution par aire géographique du trafic international en passagers kilomètres transportés (PKT) par rapport au même mois de 2019

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

En Europe, en 2023, le trafic se rapproche de son niveau d'avant crise. Ainsi, en juillet 2023, il avait atteint 95 % des chiffres observés en juillet 2019.

Dans le sillage des évolutions internationales, le trafic aérien de passagers en France a augmenté progressivement depuis 2021 pour revenir à 96 % de son niveau de 2019 au cours des mois de juillet et d'août 2023.

En 2023, et à rebours de la situation constatée au cours des années de crise, ce sont les vols internationaux qui sont les principaux contributeurs de la croissance du trafic. Au cours des mois de juillet et d'août 2023, leur trafic est en effet revenu à 97 % de son niveau de 2019. Le trafic avec les destinations méditerranéennes se révèle notamment particulièrement dynamique.

À contrario, et alors qu'il avait fait preuve d'une plus forte résilience pendant la crise, le trafic domestique intérieur à la métropole stagne en 2023 à un peu moins de 90 % de son niveau d'avant crise. Le trafic entre les outre-mer et la Métropole a retrouvé son niveau historique depuis 2022, mais il ne progresse plus non plus depuis la fin de l'année dernière.

Trafic passager en France en référence à l'année 2019

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Concernant les perspectives de court-terme, le scénario central de la prévision de trafic aérien réalisées par la DGAC pour la France prévoit un retour au niveau d'avant crise courant 2023 sur la majorité des faisceaux internationaux, et fin 2024 avec les marchés internationaux les plus en retard, en particulier avec l'Asie. L'évolution du trafic intérieur apparaît désormais plus incertaine. Par ailleurs, les voyages pour motif professionnel restent inférieurs d'environ 20 % à leur niveau d'avant crise.

S'agissant des perspectives de moyen terme pour la France, la DGAC a modélisé trois scénarios. Ces trois scénarios prévoient un dépassement du niveau de trafic 2019 en 2025.

Les trois scénarios d'évolution du trafic en France modélisés par la DGAC

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Selon l'Association du transport aérien international (IATA), le trafic en Europe, exprimé en pourcentage du trafic de 2019, s'élèverait à 98 % en 2023, 108 % en 2024 et 116 % en 2025. Ces prévisions sont très proches de celle établies au niveau mondial : 95 % en 2023, 106 % en 2024 et 118 % en 2025.

À plus long terme, les prévisions s'accordent pour anticiper une croissance régulière sur la période 2018-2050. L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) prévoit une croissance mondiale de 3,6 % en moyenne chaque année contre 4,2 % avant la crise sanitaire. Elle serait de 2,7 % pour la zone Europe. Cependant ces projections ne prennent pas en compte l'incidence des mesures environnementales sur le prix du transport aérien. En anticipant les coûts prévisionnels liés aux enjeux de décarbonation du secteur, la DGAC prévoit à ce stade une croissance annuelle moyenne du trafic nettement moins dynamique, comprise entre 0,6 % et 1,1 % entre 2018 et 2050.

2. Certains aéroports pourraient être les victimes collatérales d'une nouvelle taxe qui visait, en réalité, à mettre à contribution les sociétés concessionnaires d'autoroutes

L'article 15 du présent projet de loi de finances (PLF) prévoit d'instaurer une nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance. À l'origine, le Gouvernement souhaitait créer une taxe visant à mettre à contribution les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) pour financer une partie du plan ferroviaire de 100 milliards d'euros annoncés en février dernier par la Première ministre. Cependant, l'article 32 des contrats de concession d'autoroutes, renforcé en 2015, stipule que toute évolution de la fiscalité spécifique aux SCA doit nécessairement être compensée. Aussi, pour que la mise à contribution des SCA qu'il entend mettre en oeuvre ne tombe pas sous le coup des stipulations de cet article, et après avoir sollicité deux avis du Conseil d'État, le Gouvernement a-t-il décidé de proposer la création d'une taxe au périmètre élargi à l'exploitation de l'ensemble des infrastructures de transport de longue distance.

Cette taxe conduirait à imposer à un taux de 4,6 % les revenus d'exploitation dépassant le seuil de 120 millions d'euros des exploitations d'infrastructures de transport de longue distance dont le niveau de rentabilité22(*) moyen serait supérieur à 10 %. Ces paramètres ont été savamment calibrés afin d'exclure de fait certains secteurs du périmètre de la taxe, au moins à court terme. Il en va ainsi de SNCF Réseau, des ports, ou encore des petits aéroports de province.

En pratique, en 2024, seules les SCA et cinq aéroports devraient être soumis à cette nouvelle imposition. Les aéroports concernés sont Roissy, Orly, Marseille, Lyon, Nice et Toulouse. Compte-tenu de la reprise du trafic aérien, dans les années à venir, les aéroports de Bordeaux et de Nantes pourraient également entrer dans le champ de cette nouvelle taxe.

Le rendement prévisionnel de la taxe en 2024 est évalué à 600 millions d'euros dont environ 130 millions d'euros provenant des aéroports, soit un peu plus de 20 % du total. Sur ces 130 millions d'euros, le groupe ADP à lui seul devrait avoir à s'acquitter de 120 millions d'euros.

Le Gouvernement entendait certes mettre à contribution le secteur aérien pour financer la hausse des investissements dans les infrastructures ferroviaires mais par un autre mécanisme, qui aurait ciblé directement les prix des billets sans qu'il n'ait d'incidences sur les aéroports, à savoir le relèvement du tarif de solidarité de la taxe sur le transport aérien de passagers (l'ancienne taxe de solidarité sur les billets d'avion). Cette nouvelle taxation des aéroports, qui n'avait pas du tout pu être anticipée par ces derniers, ne va pas sans poser des difficultés, tout particulièrement sur certaines plateformes. Elle augmentera très significativement leur charge fiscale et représentera une part tout sauf négligeable de leur résultat.

Les aéroports ont annoncé qu'ils entendent répercuter le coût de la taxe sur leurs redevances. Une part substantielle de la taxe qui affectera les aéroports sera ainsi supportée par les compagnies et, in fine, par les passagers. Cependant, cette répercussion ne sera pas systématiquement immédiate et certaines particularités telles que le système de double caisse (en vigueur pour ADP) ou de double caisse aménagée limiteront les capacités de répercussions de la taxe par les aéroports.

L'aéroport de Nice se trouve en particulier dans une situation atypique qui le rendra particulièrement vulnérable à cette nouvelle taxe. Dans la foulée de sa privatisation et suite à une décision du régulateur d'alors, l'Autorité de supervision indépendante (ASI), il avait dû réduire en 2019 de 30 % ses redevances aéroportuaires, entraînant une chute de sa rentabilité des capitaux investis. La pandémie et la crise la plus grave de l'histoire du transport aérien sont intervenues un an après, entraînant des pertes de plusieurs dizaines de millions d'euros pour l'aéroport et un nouvel effondrement son indicateur de performance interne.

Depuis, pour rehausser sa rentabilité du capital investi, l'aéroport augmente chaque année ses redevances à hauteur de 5 %, le maximum que l'Autorité de régulation des transports (ART), le nouveau régulateur, tolère selon son interprétation du principe de modération tarifaire. Les demandes de l'aéroport visant à augmenter de plus de 5 % par an ses redevances ont à ce jour toutes été rejetées par l'ART, y compris en 2022 au plus fort de la crise inflationniste.

Cette situation, en l'absence d'évolution de la régulation aéroportuaire et de l'interprétation du principe de modération tarifaire, empêchera l'aéroport de Nice de répercuter le coût de la taxe dans ses redevances, d'autant plus que pour l'année 2024, l'aéroport a déjà fait homologuer ses redevances au mois d'août dernier par l'ART23(*). Toutes choses égales par ailleurs, les coûts engendrés par la nouvelle taxe pourraient ainsi affecter les capacités d'investissement de l'aéroport qui est par ailleurs, comme ses homologues de Lyon et de Toulouse, en négociation avec le Gouvernement au sujet de l'indemnisation des pertes occasionnées par la crise sanitaire.

Le fait que les paramètres de la taxe aient été calibrés de façon à ce qu'elle ne s'applique pas aux aéroports de province plus modestes, comme par exemple l'aéroport de Beauvais-Tillé, induira en outre un effet de bord indésirable en introduisant une forme de distorsion de concurrence au détriment de la compagnie Air-France et au bénéfice des compagnies low-cost, au premier rang desquels Ryanair, beaucoup plus présentes sur ces petites plateformes.

3. La transition écologique du transport aérien est soutenue par le plan France 2030
a) 1,2 milliard d'euros en faveur du secteur aéronautique

Dans le prolongement du plan de relance aéronautique de 1,6 milliard d'euros, la réalisation des ambitions technologiques de la filière supposait de prolonger un niveau de soutiens publics à la hauteur de l'enjeu.

En effet, et comme il a pu le souligner dans un rapport d'information sur le soutien public à la filière aéronautique publié en février 2022 à l'occasion de la présentation par la Cour des comptes d'une enquête commandée par la commission des finances du Sénat en application du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances24(*), compte-tenu des investissements considérables qu'induit la transition écologique de la filière aéronautique, le rapporteur spécial est convaincu qu'une inscription des concours publics dans le temps long est incontournable.

Le volet aéronautique du plan France 2030 instauré dans le cadre de la loi de finances initiale (LFI) pour 2022 représente 1,2 milliard d'euros qui se répartissent entre :

800 millions d'euros pour alimenter la feuille de route partenariale du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC) ;

- et 400 millions d'euros consacrés aux acteurs émergents de la filière aéronautique.

Répartition des financements du volet aéronautique
du plan d'investissement France 2030

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

b) Le CORAC bénéficie d'une dotation de 800 millions d'euros du plan France 2030 et d'une trajectoire de financement prévisionnelle de 300 millions d'euros par an jusqu'en 2030

Pour le volet CORAC de l'enveloppe, opéré par la DGAC, les crédits déployés ont vocation à poursuivre la dynamique de recherche engagée dans le cadre du plan de relance aéronautique dans la perspective :

- d'avancer de quinze ans la mise en service d'un avion régional ou court et moyen-courrier bas carbone afin de positionner l'Europe et la France en leaders mondiaux sur ce marché ;

- de soutenir des démonstrateurs d'aéronefs répondant à des ambitions de ruptures technologiques majeures telles que l'ultra sobriété, la propulsion hydrogène ou l'hybridation électrique ;

- de soutenir la chaine d'approvisionnement aéronautique nationale pour assurer sa compétitivité et consolider les parts de marchés de l'industrie nationale dans les futurs programmes d'aéronefs à horizon 2030-2035.

Au sein de l'enveloppe de 800 millions d'euros dédiée à ce premier volet, une première tranche de 300 millions d'euros a été engagée en 2022, pour 75 millions d'euros de crédits de paiements exécutés. 435 millions d'euros d'engagements supplémentaires sont prévus en 2023 et le restant (65 millions d'euros) est programmé pour 2024. Les crédits de paiement correspondants doivent s'échelonner jusqu'en 2027.

En outre, le 16 juin 2023, le Président de la République a annoncé que la trajectoire pluriannuelle de la feuille de route du CORAC serait portée à 300 millions d'euros par an jusqu'en 2030. Avant la crise du transport aérien, en 2018 et en 2019, le montant des crédits dédiés au CORAC se situait à un niveau de 135 millions d'euros par an.

c) Un volet « acteurs émergents » doté de 400 millions d'euros

Le volet « acteurs émergents » de l'enveloppe aéronautique du plan France 2030 vise quant à lui à accélérer le développement et le passage à l'échelle industrielle de solutions technologiques nouvelles, voire de rupture, sur les marchés de l'aéronef bas carbone et de la production de carburants d'aviation durables (CAD) par l'accompagnement de projets portés par de nouveaux acteurs innovants.

Dans le cadre de ce volet, un premier appel à projets (AAP) intitulé « Produire en France des aéronefs bas carbone », doté de 100 millions d'euros et opéré par Bpifrance, a été lancé en avril 202225(*). Les résultats de la première relève ont été annoncés en juin 2023 et neuf projets ont été retenus pour 49 millions d'euros d'aides publiques pour des investissements cumulés à hauteur de 125 millions d'euros. La seconde relève est actuellement en cours d'instruction.

L'enveloppe résiduelle de 300 millions d'euros n'est toujours pas allouée à ce jour.

4. À horizon 2025, plusieurs liaisons aériennes d'aménagement du territoire sont menacées

Les liaisons aériennes d'aménagement du territoire (LAT) sont essentielles au maintien de la connectivité, au désenclavement ainsi qu'au développement économique de certains territoires. En 2023, l'État finance l'exploitation de dix LAT en métropole, deux liaisons en Guyane ainsi que la desserte internationale de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il participe également au financement de la desserte européenne de Strasbourg. Son intervention s'inscrit dans le cadre de conventions pluriannuelles de délégation de service public (DSP).

S'agissant de l'exploitation des LAT de métropole, la charge de la compensation financière est partagée entre l'État et les collectivités locales concernées. Le taux d'intervention de l'État est déterminé en fonction du degré d'enclavement de la destination et ne peut dépasser un pourcentage des recettes commerciales fixé entre 50 % et 80 %, selon l'enclavement du territoire desservi. En 2023, les financements consacrés par l'État à ces liaisons représentent environ 25,5 millions d'euros.

Le soutien financier des LAT par l'État en 2023

(en millions d'euros)

Liaison

Soutien financier de l'État en 2023

Aurillac - Paris

2,76

Brive - Paris

1,78

Castres - Paris

1,51

La Rochelle - Poitiers - Lyon

0,43

Le Puy - Paris

0,54

Limoges - Lyon

0,83

Limoges - Paris

0,15

Quimper - Paris

1,07

Rodez - Paris

1,25

Tarbes- Paris

2,18

Guyane

1,80

Saint-Pierre-et-Miquelon

4,55

Strasbourg - Amsterdam

5,23

Strasbourg - Madrid

0,64

Strasbourg - Munich

0,73

Total

25,50

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

En augmentation tendancielle jusqu'en 2010, les crédits consacrés aux LAT métropolitaines ont ensuite été progressivement réduits pour passer sous les 5 millions d'euros en 2017 et en 2018. L'objectif était alors de limiter la participation financière de l'État à quatre liaisons desservant des territoires particulièrement enclavés (Aurillac-Paris, Brive-Paris, Le Puy-Paris et Rodez-Paris), les autres liaisons sous délégation de service public devant être intégralement prises en charge par les collectivités territoriales.

En 2019, le Gouvernement a engagé une nouvelle politique de soutien aux LAT en s'appuyant sur les propositions et recommandations issues des Assises du transport aérien. 15 millions d'euros supplémentaires ont été alloués dès 2019 pour assurer le financement des liaisons existantes.

En 2020 puis en 2021, les répercussions de la pandémie de Covid-19 ont fragilisé le modèle économique des LAT. Des concertations entre les collectivités, l'État et les transporteurs ont permis d'ajuster les programmes de vols. Les accords ont notamment porté sur des réductions du nombre de rotations, sur l'exploitation d'appareils de moindre capacité ou, pour deux liaisons, sur l'attribution d'une surcompensation exceptionnelle. La crise a néanmoins précipité l'arrêt des services aériens entre Agen et Orly en juin 2020, liaison qui se trouvait déjà en difficulté avant la crise sanitaire en raison de la concurrence du TGV.

En 2022, les conventions de DSP portant sur les liaisons Paris-Tarbes et Le Puy-Paris ont été renouvelées. En 2023, trois nouveaux renouvellements de DSP ont été conclus : Limoges-Lyon en mars puis Aurillac-Paris et Castres-Paris en juin. L'appel d'offres concernant l'exploitation de la ligne Limoges-Paris a été déclaré infructueux compte tenu du montant excessif de compensation demandé. Le renouvellement de la DSP relative à la liaison Quimper-Paris, n'a pas été demandé par la collectivité. La convention de DSP relative à la ligne La Rochelle-Poitiers-Lyon a été résiliée par le transporteur et les services ont été stoppés dès le mois de mars 2023. Deux procédures d'appel d'offres sont en cours pour les liaisons La Rochelle-Lyon (sans financement de l'État) et Poitiers-Lyon. En 2024 est programmé le renouvellement de la liaison Rodez-Paris (échéance au 19 janvier 2024) pour laquelle un appel d'offres est engagé.

Depuis le début de l'année 2022, le contexte économique défavorable, notamment lié au phénomène inflationniste, a profondément bouleversé l'économie des LAT. Les compensations financières demandées par les transporteurs à l'occasion du renouvellement des conventions de DSP sont significativement supérieures à celles qui prévalaient avant la crise sanitaire. La baisse du trafic engendrée par les nouvelles habitudes de travail et associée à la forte hausse des coûts conduit certaines collectivités à renoncer à plusieurs liaisons.

À horizon 2025, pour les renouvellements des DSP, une tendance de retour aux budgets d'avant- 2020 est à ce stade anticipée, mais, d'après la DGAC, il existe une forte incertitude sur le maintien de certaines dessertes.

Le soutien financier des LAT par l'État en 2024

(en millions d'euros)

Liaison

Soutien financier de l'État en 2024

Aurillac - Paris

2,68

Brive - Paris

2,07

Castres - Paris

1,70

La Rochelle - Poitiers - Lyon

0,70

Le Puy - Paris

0,60

Limoges - Lyon

0,91

Quimper - Paris

0,21

Rodez - Paris

1,75

Tarbes - Paris

1,50

Guyane

1,50

Saint-Pierre-et-Miquelon

4,56

Strasbourg - Amsterdam

6,51

Strasbourg - Madrid

Strasbourg - Berlin

Total

24,69

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

C. ALORS QUE LES RECETTES DU BACEA POURSUIVENT LEUR RATTRAPAGE, LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT DE LA DIRECTION DES SERVICES DE LA NAVIGATION AÉRIENNE SONT EN NETTE AUGMENTATION

1. L'augmentation sensible des dépenses d'investissement de la direction des services de la navigation aérienne pousse à la hausse les crédits du budget annexe

Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) se compose de trois programmes pour des crédits prévus en 2024 à hauteur de 2,5 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et de 2,3 milliards d'euros de crédits de paiement (CP), soit des augmentations respectives de 350 millions d'euros (+ 17 %) et de 140 millions d'euros (+ 7 %). Ces augmentations font suite à la hausse des crédits déjà constatée en 2023 à hauteur d'environ 4 %.

Évolution des crédits du BACEA entre 2023 et 2024

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2023

PLF 2024

Variation 2024/2023

(en %)

612 « Navigation aérienne »

AE

574,5

836,2

+ 45,6 %

CP

592,6

652,9

+ 10,2 %

613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile »

AE

1483,8

1566,5

+ 5,6 %

CP

1483,8

1559,8

+ 5,1 %

614 « Transports aériens, surveillance et certification »

AE

45,5

48,5

+ 6,6 %

CP

45,5

50,3

+ 10,6 %

Total

AE

2103,8

2451,2

+ 16,5 %

CP

2121,8

2263,0

+ 6,7 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les crédits du programme 612 « Navigation aérienne » principalement consacrés aux dépenses d'investissements de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) enregistrent les augmentations les plus significatives26(*) : 262 millions d'euros en AE (+ 46 %) et 60 millions d'euros en CP (+ 10 %).

Le programme 613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile », consacre ses crédits au financement des fonctions supports de la DGAC. Comme en 2023, les crédits du programme devraient progresser de plus de 5 % en 2024, soit d'environ 80 millions d'euros, pour s'établir à 1 567 millions d'euros en AE et 1 560 millions d'euros en CP.

Cette augmentation s'explique premièrement par une hausse des dépenses de personnel liée :

- à une progression du coût des mesures catégorielles dans la perspective de la conclusion d'un nouveau protocole social avec les personnels de la DGAC ;

- à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

Elle a également pour origine un accroissement des dépenses d'investissement et de fonctionnement lié au phénomène d'inflation.

Ce programme retrace aussi la subvention pour charges de service public (SCSP) et les subventions d'investissement que la DGAC verse à l'école nationale de l'aviation civile (ENAC). Ces dotations doivent augmenter de 2,6 millions d'euros en 2024 dépassant la barre des 100 millions d'euros27(*) pour intégrer la revalorisation du point d'indice de la fonction publique ainsi que d'autres mesures salariales décidée par le Gouvernement dans le cadre de la Conférence salariale.

Les crédits du programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification » servent à financer les missions exercées par la DGAC dans les domaines de la régulation économique, du développement durable et du respect par l'ensemble des acteurs des règles qui leur sont applicables, notamment en termes de sécurité et de sûreté. Les enveloppes de crédits qui y seront consacrées en 2024 sont en augmentation de 7 % pour les AE et de 11 % pour les CP. Elles devraient ainsi s'établir à 48,5 millions d'euros pour les premiers et à 50,3 millions d'euros pour les seconds.

Les remboursements en capital de la dette désormais considérés comme des opérations de trésorerie et qui ne sont plus retracées parmi les crédits budgétaires du budget annexe28(*) devraient s'élever à 382 millions d'euros en 2024 contre 368 millions d'euros en 2023.

2. Dans le sillage de la reprise du trafic aérien, les recettes du BACEA poursuivent leur progression

Avant la crise, au cours de l'année 2019, en période de fort dynamisme du trafic aérien, le BACEA avait perçu 2,2 milliards d'euros de recettes d'exploitation. Du fait de la chute vertigineuse du trafic aérien mais également des décisions prises par l'État de reporter le paiement de taxes et de redevances acquittées par les compagnies aériennes, les recettes d'exploitation du BACEA s'étaient effondrées à 800 millions d'euros seulement en 2020.

Depuis, du fait de la reprise dynamique du trafic aérien ainsi que, à compter de 2023, du mécanisme de rattrapage lissé dans le temps de la diminution des redevances constatées en 2020 et en 2021 (voir infra), les recettes d'exploitation du BACEA se sont nettement redressées et on même dépassé leur niveau de 2019.

Variation des recettes d'exploitation du BACEA entre 2018 et 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

En 2024, fortes d'une hausse de près de 180 millions d'euros (+ 8 %), elles pourraient ainsi s'établir à 2,4 milliards d'euros, soit un peu plus de 200 millions d'euros au-dessus du niveau constaté en 2019.

Évolution des recettes d'exploitation du BACEA 2022-2024

(en millions d'euros)

Recettes (M€)

Exécution 2022

LFI 2023

PLF 2024

Variation PLF 2024 / LFI 2023

Redevances de navigation aériennes

1530,7

1746,4

1851,8

+ 6,0 %

Redevances de surveillance et de certification

20,9

25,5

27,1

+ 6,3 %

Tarif de l'aviation civile

422,4

444,3

511,3

+ 15,1 %

Autres recettes

33,9

14,2

16,9

+ 19,0 %

Total recettes exploitation

2007,9

2230,4

2407,1

+ 7,9 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

a) Le rendement des redevances de navigation aérienne poursuit sa progression et pourrait approcher les 2 milliards d'euros

Les redevances de navigation aérienne regroupent la redevance de route (RR), la redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) et les redevances de navigation aérienne outre-mer, la redevance océanique (ROC) et la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne outre-mer (RSTCA-OM). L'évolution de leurs recettes est déterminée par celle des tarifs des taux unitaires prévus dans les plans nationaux validés par la commission européenne relatifs aux périodes de référence dites « RP » et pris en application des règlements Ciel unique II, ainsi que des prévisions de trafic (voir infra).

Évolution des recettes tirées des redevances de navigation aérienne
(2010-2024)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Pour l'année 2024, le projet annuel de performances du BACEA évalue le rendement total des redevances de navigation aérienne à 1,9 milliard d'euros, ce qui équivaudrait à une hausse d'un peu plus de 100 millions d'euros (+ 6 %) par rapport aux montants prévisionnels estimés pour 2023. Ce niveau serait supérieur de 260 millions d'euros par rapport au rendement constaté en 2019, avant la crise sanitaire. Cette différence s'explique principalement par l'effet du mécanisme de lissage sur sept ans du rattrapage des conséquences économiques de l'effondrement du trafic aérien au cours des années 2020 et 2021 (voir infra), qui est évalué par la DGAC à environ 250 millions d'euros annuels.

La majeure partie de la hausse anticipée en 2024 s'explique par l'augmentation de plus de 70 millions d'euros (+ 5 %) du rendement de la redevance de route qui pourrait dépasser les 1 550 millions d'euros.

Le rendement de la redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) pourrait quant à lui augmenter de plus de 20 millions d'euros (+ 10 %) pour dépasser les 250 millions d'euros. En proportion, les redevances de navigation aérienne outre-mer, pourraient augmenter plus fortement encore (+ 30 % ou 11 millions d'euros) pour atteindre un rendement annuel de 45 millions d'euros.

b) 27 millions d'euros de redevances de surveillance et de certification

Les redevances de surveillance et de certification29(*) viennent financer en partie la surveillance des acteurs de l'aviation civile, la délivrance d'agréments et d'autorisations, de licences ou de certificats nécessaires aux opérateurs (constructeurs, ateliers d'entretien, compagnies aériennes, aéroports, personnels, organismes de sûreté, opérateurs de navigation aérienne). Ces différentes activités sont principalement prises en charge par la direction de la sécurité de l'aviation civile (DSAC) au sein de la DGAC.

Pour 2024, le projet annuel de performances du BACEA anticipe le rendement de ces redevances à 27,1 millions d'euros, soit une augmentation de 1,6 million d'euros par rapport à 2023.

c) Le rendement du tarif de l'aviation civile pourrait augmenter de 15 % et dépasser les 510 millions d'euros

La création du nouveau code des impositions sur les biens et services (CIBS) au 1er janvier 2022 avait conduit à un réaménagement de la fiscalité des transports et notamment de la fiscalité sur le transport aérien. L'ancienne taxe de l'aviation civile (TAC), qui était prévue à l'article 302 bis K du code général des impôts (CGI) a ainsi été renommée en « tarif de l'aviation civile », intégré à la taxe sur le transport aérien de passagers. Ce tarif de l'aviation civile est prévu à l'article L. 422-20 du CIBS et son tarif est établi à l'article L. 422-21 du même code qui précise qu'il est indexé sur l'inflation.

D'après les estimations indiquées dans le projet annuel de performances du BACEA, le rendement du tarif de l'aviation civile pourrait s'établir à plus de 510 millions d'euros en 2024, soit une augmentation de 70 millions d'euros (+ 15 %), par rapport aux recettes attendues en 2023. Cette hausse s'explique par l'inflation et les prévisions du trafic aérien.

Évolution des recettes issues du tarif de l'aviation civile depuis 200930(*)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les recettes issues de la « taxe Bâle-Mulhouse »31(*) devraient quant à elles s'établir à 5,7 millions d'euros en 2024, soit une hausse prévisionnelle de 1,5 million d'euros par rapport au rendement attendu en 2023.

d) Les taxes collectées par la DGAC pour le compte de tiers

La DGAC est chargée de l'établissement de l'assiette, du recouvrement et du contrôle des tarifs de solidarité32(*) et de sûreté et de sécurité33(*) de la taxe sur le transport aérien de passagers ainsi que de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA)34(*) Le produit de ces taxes est ensuite reversé à des tiers.

En 2024, les recettes attendues pour le BACEA relatives aux frais de gestion35(*) de ces taxes sont estimées à 5,7 millions d'euros par le projet annuel de performances, soit une augmentation de 0,6 million d'euros.

(1) Le plafond d'affectation du tarif de solidarité à l'AFIT France devrait être relevé de 22 millions d'euros en 2024

Suite à la création du code des impositions sur les biens et services (CIBS), l'ancienne taxe de solidarité sur les billets d'avion a été rebaptisée « tarif de solidarité » de la taxe sur le transport aérien de passagers. Elle est prévue à l'article L. 422-20 du CIBS et son montant établi à l'article L. 422-22 du même code.

Depuis sa création, le produit de ce tarif de solidarité (TS) participe au financement de l'aide au développement dans le domaine de la santé en abondant le fonds de solidarité pour le développement (FSD) géré par l'agence française pour le développement (AFD).

Ses montants avaient été majorés dans le cadre de l'« écocontribution » prévue à l'article 72 du projet de loi de finances pour 2020, si bien qu'il était censé rapporter 210 millions d'euros au FSD et 230 millions d'euros à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFIT France) en 2020.

L'article 28 du présent PLF propose de relever le plafond d'affectation de recettes du tarif de solidarité à l'AFIT France de 22 millions d'euros pour le fixer à 252 millions d'euros dès 2024.

D'après les prévisions figurant à ce même article36(*), le produit de ce tarif devrait permettre, en 2024 d'atteindre les plafonds d'affectation prévus pour le FSD et l'AFIT France.

(2) L'État doit intervenir pour résorber le déficit de financement des dépenses de sûreté et sécurité aéroportuaires

Le tarif de sûreté et de sécurité est mentionné à l'article L. 422-20 du code des impositions sur les biens et services (CIBS) en tant que partie intégrante de la taxe sur le transport aérien de passagers37(*). Conformément à l'article L. 6328-3 du code des transports, les recettes résultant de ce tarif sont affectées aux exploitants d'aérodromes pour financer les missions d'intérêt général qui leur sont confiées en matière de sécurité-incendie-sauvetage, de sûreté, de lutte contre le péril animalier et de mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux.

L'effondrement du trafic aérien a brisé une tendance qui s'orientait vers le retour à un quasi équilibre du financement des missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires. Fin 2019, le déficit cumulé des aéroports n'était plus que de 16,5 millions d'euros. La crise a mis un coup d'arrêt brutal à cet élan et le déficit des aéroports a franchi les 400 millions d'euros en 2020.

En urgence, l'État a ainsi alloué aux aéroports des avances remboursables pour un montant cumulé de 700 millions d'euros entre 2020 et 2022 suivi sur le programme 826 « Avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid- 19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité » au sein du compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

Avances remboursables versées aux aéroports depuis 2020

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Les échéances de remboursement s'étaleront de 2024 à 2032. Ces remboursements d'avance entreront dans le périmètre des coûts de sûreté-sécurité. Par conséquent, à compter de 2024, les échéances de remboursement des avances vont provoquer des augmentations du tarif de sûreté et de sécurité.

Par ailleurs, deux évolutions législatives récentes ont prévu des relèvements des plafonds de ce tarif. L'article 117 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 avait procédé à une augmentation de un euro, à compter du 1er avril 2022, du plafond du tarif applicable aux aéroports de catégorie 3, catégorie pour laquelle le déficit de financement des missions de sûreté et sécurité était le plus prononcé et alors que le tarif de la plupart des aéroports de cette classe atteignait déjà le niveau plafond de 14 euros par passager. L'article 79 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a quant à lui augmenté de un euro supplémentaire les plafonds des tarifs applicables aux aéroports de catégorie 1 et 3.

L'article 16 sexies du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 prévoit une nouvelle augmentation de 1,20 euro du plafond du tarif applicable aux aéroports de catégorie 3 ainsi que la possibilité pour l'État de décider de majorer jusqu'à 85 % (au lieu de 65 % aujourd'hui) la minoration de tarif appliquée aux passagers en correspondance.

Rendement annuel du tarif de sûreté et de sécurité depuis 2018

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2023, d'après les estimations les plus récentes effectuées par la DGAC, les 953 millions d'euros qui devraient être perçus par les aéroports au titre de ce tarif ne permettront pas de couvrir les dépenses de sûreté et de sécurité de l'année qui pourraient s'élever à 1 057 millions d'euros. Le déficit cumulé du financement des missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires devrait donc s'accroître de plus de 100 millions d'euros cette année.

En 2024, du fait à la fois de la reprise du trafic, des dernières évolutions législatives et des premières échéances de remboursement de ces avances remboursables, le produit du tarif de sûreté et de sécurité devrait augmenter de 34 % par rapport à 2022 pour atteindre 1 077 millions d'euros, soit un montant supérieur à son niveau d'avant crise.

Au cours des années à venir, le système de financement des missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires sera soumis à de très fortes tensions, notamment en raison de nouvelles obligations réglementaires qui vont peser sur l'évolution des dépenses des aéroports en la matière.

Sur la période 2024-2030, l'amortissement des investissements liés au déploiement des appareils de détection des explosifs dans les bagages de soute de dernière génération (EDS38(*) 3), dont le coût global est estimé à 700 millions d'euros, au déploiement à venir des équipements de détection d'explosifs pour les bagages de cabines (dits « EDS cabine »), dont le coût est estimé à 86 millions d'euros hors génie civil, ainsi que l'évolution des coûts salariaux de 2,5 % par an en moyenne vont contribuer à une forte hausse des dépenses relatives aux missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires. Cette progression s'ajoutera, à compter de l'année 2024, au remboursement du capital des avances en plus de celui des intérêts (voir supra).

Cette hausse des coûts ne suit pas de manière proportionnelle le rythme de la reprise des trafics. Celle des coûts fixes suit une progression par paliers. Ainsi, sous l'effet conjugué de l'inflation, de dépenses d'investissements reportées depuis le début de la crise sanitaire, du déploiement à venir des nouveaux équipements de sûreté précités et de l'évolution des coûts salariaux, les dépenses de sûreté et de sécurité représenteront un volume supérieur de 10 % à celui de 2019 toutes choses égales par ailleurs, en particulier à niveau de trafic équivalent.

En 2024, rien que pour stabiliser le déficit du système de financement de ces missions aéroportuaires régaliennes, il serait nécessaire d'augmenter en moyenne le tarif de sûreté et de sécurité de 22 %. La hausse devrait être portée à 44 % pour résorber le déficit accumulé ces dernières années. De telles augmentations sont inimaginables tant elles affaibliraient la compétitivité des aéroports comme des compagnies françaises.

Face à cette situation d'impasse manifeste du modèle de financement des missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires, des mesures de soutien aux aéroports s'avèrent indispensables. Le versement d'une nouvelle avance étant exclue en raison de la dette déjà accumulée par les aéroports, la DGAC a signalé au rapporteur spécial qu'elle étudiait des scénarios d'effacement partiel ou total des 700 millions d'euros d'avances accordées ces dernières années aux aéroports dans la perspective de stabiliser leur déficit cumulé.

Le constat de cette impasse avait déjà été dressé par le rapporteur spécial, notamment lors de l'examen du PLF pour 2023. Il estimait déjà que l'État aurait dû envisager de prendre à sa charge, au moins pour la part relevant des conséquences de la crise sanitaire, le déficit de financement de ces dépenses qui relèvent de missions purement régaliennes. Aujourd'hui, et alors qu'un nouveau mur d'investissements se dresse devant les aéroports, il lui paraît plus urgent que jamais d'aboutir à une solution de financement qui préserve la compétitivité du secteur aérien national.

La résolution de cette question est d'autant plus urgente que, du fait du déséquilibre du modèle de financement des missions de sûreté et de sécurité aéroportuaires, la France prend un retard de plus en plus préoccupant dans la mise en place des nouveaux systèmes de sûreté notamment s'agissant des moyens de contrôle des passagers et des bagages de cabine et du déploiement du programme dit « EDS cabine ».

(3) Le rendement de la taxe sur les nuisances sonores aériennes devrait retrouver en 2024 son niveau de 2019

Le produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), acquittée par les compagnies aériennes, est reversé aux exploitants d'aéroports pour financer les aides accordées aux riverains pour l'atténuation des nuisances sonores ou le remboursement à des personnes publiques des avances consenties pour financer des travaux de réduction des nuisances sonores.

En 2024, d'après les estimations figurant dans le Tome I de l'annexe au présent PLF sur l'évaluation des voies et moyens, et après avoir été fortement affecté par les conséquences de la crise sanitaire, le rendement de la TNSA devrait retrouver son niveau de 2019 à environ 50 millions d'euros.

Évolution du rendement de la TNSA depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les annexes budgétaires

3. Après une forte augmentation en 2022, les taux unitaires des redevances aériennes devraient évoluer plus raisonnablement

Dans le cadre du système européen de régulation de la performance des services de navigation aérienne articulé autour des périodes de références dites « RP », les taux unitaires des redevances aéronautiques des États européens sont construits sur des hypothèses de coûts et de trafics fixées pour plusieurs années. En 2022, en raison de la baisse des prévisions de trafic par rapport à la situation d'avant crise (les conséquences économiques de l'effondrement du trafic en 2020 et 2021 faisant l'objet d'un mécanisme de lissage pluriannuel à compter de 2023), les taux unitaires des redevances de navigation aérienne avaient très fortement augmenté.

Taux unitaire de la redevance de route en France de 2015 à 2024

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2023, les taux unitaires ont faiblement augmenté. L'effet inflationniste du début du mécanisme de lissage sur sept années des pertes liées aux années 2020 et 2021 (environ 250 millions d'euros par an attendues par la DGAC) a été compensé par le phénomène de reprise du trafic. D'après les données transmises par la DGAC au rapporteur spécial, en 2024, les taux unitaires de la redevance de route pourraient diminuer de 3 euros.

Le principal indicateur de performance des services de la navigation aérienne est celui des minutes de retards générées par les régulations de trafic attribuables aux centres en route. Comme l'illustre le graphique ci-après, en 2023, la performance du contrôle de la navigation aérienne a été très affectée par le mouvement social lié à la réforme des retraites. En dehors de ce phénomène, les minutes de retards causées par le contrôle aérien auraient été comparables aux performances qui avaient été observées en 2019, avant la crise.

Retards imputables au contrôle aérien de janvier à septembre 2023

Courbe bleue : retards mensuels générés en 2019.

Courbe rouge : retards mensuels générés en 2023 directement imputables au contrôle aérien.

Courbe jaune : retards mensuels générés en 2023 par les mouvements sociaux.

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

Au cours des neufs premiers mois de l'année 2023, les retards toutes causes confondues (y compris les mouvements sociaux) ont atteint 185 % de ceux qui avaient été constatés en 2019, soit 5,5 millions de minutes contre 3,0 millions de minutes. Outre les grèves relatives à la réforme des retraites, les délais imputables à des causes météorologiques ont également été très sensibles en 2023 : 1 million de minutes contre seulement 0,6 million de minutes en 2019.

D'après les estimations de la DGAC, les retards imputables au contrôle aérien au cours des neufs premiers mois de l'année 2023 ont représenté 1,7 million de minutes, soit une légère amélioration de 5 % par rapport aux chiffres de l'année de référence 2019. La majeur partie de ces minutes de retard liées au contrôle aérien a été générée par les centres en route de la navigation aérienne (CRNA) de Reims et d'Aix-en-Provence.

D'après la DGAC, plusieurs phénomènes ont contribué à majorer les délais imputables au contrôle aérien en 2023 :

- la baisse du nombre de contrôleurs au CRNA de Reims malgré l'augmentation des capacités en lien avec la mise en place du nouveau système 4-Flight (voir infra) ;

- la réorientation de flux de trafic dans le CRNA de Reims pour compenser l'impact lié à un manque d'effectifs au CRNA de Karlsruhe ;

- une remontée partielle et tardive des capacités du CRNA d'Aix en Provence à la suite du déploiement de 4-Flight en décembre 2022 ;

- des absences inopinées de contrôleurs aériens dans les CRNA d'Aix-en-Provence et de Reims.

II. ENTRE NOUVEAUX INVESTISSEMENTS, ORGANISATION DU TRAVAIL, GESTION PRÉVISIONNELLE DES EFFECTIFS ET DÉSENDETTEMENT, LE BACEA EST CONFRONTÉ À DES DÉFIS MAJEURS

A. NOUVEAU PROTOCOLE SOCIAL ET ANTICIPATION D'UNE VAGUE MASSIVE DE DÉPARTS À LA RETRAITE, DES ENJEUX DE CAPACITÉ ET DE PERFORMANCE POUR LE CONTRÔLE AÉRIEN

1. La DGAC doit se préparer à une vague de départs à la retraite de contrôleurs aériens d'ici à la fin de la décennie

En 2022, du fait de la crise du transport aérien, les effectifs de la DGAC avait été réduits de 72 ETP, ce qui avait eu pour conséquence une diminution des recrutements d'ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) le nombre de promotions annuelles passant de quatre en 2020, à deux en 2021 puis à l'équivalent d'une seule en 2022. En raison de la reprise du trafic et de la perspective d'une vague de départs à la retraite qui touchera les contrôleurs aériens à la fin de la décennie, un schéma d'emplois nul avait été adopté en LFI pour 2023, le nombre de promotions d'ICNA étant remonté à trois pour l'année en cours.

Sur l'année 2023, le total des flux prévisionnel devrait représenter 404 ETP en entrées et en sorties. Le solde prévisionnel devrait être positif à hauteur de 7 ETP pour les ICNA tandis que, notamment en raison de la poursuite de la rationalisation des fonctions supports de la DGAC, une baisse de 10 ETP des effectifs de la catégorie des ouvriers est anticipée au 31 décembre 2023. La synthèse des mouvements d'effectifs prévisionnels pour 2023 est présentée dans le tableau ci-après.

Mouvements prévisionnels d'effectifs en 2023

(en ETP)

ICNA : ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne.

IESSA : ingénieurs électroniciens des systèmes de la sécurité aérienne.

TSEEAC : techniciens des études et d'exploitation de l'aviation civile.

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

Pour 2024, le projet de loi de finances propose un plafond d'emploi de la DGAC39(*) de 10 439 ETPT, en hausse de 28 ETPT par rapport à 2023. Cette évolution traduit la mise en oeuvre d'une trajectoire de recrutement pluriannuelle destinée à pallier aux départs à la retraite qui doivent intervenir en fin de décennie ainsi que l'enjeu capacitaire lié à la reprise du trafic aérien.

Le présent PLF propose de stabiliser les emplois rémunérés de l'école nationale de l'aviation civile (ENAC) : 931 ETPT dont 791 sous plafond et 140 hors plafond.

Détail du schéma d'emplois 2024 de la DGAC

 

Départ

Arrivées

Schéma d'emploi

Administratifs/cadres

104

107

+ 3

ICNA

60

121

+ 61

IESSA-TSEAC

118

105

- 13

Ouvriers

29

6

- 23

Total

311

339

+ 28

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

En 2024, quatre nouvelles promotions d'ICNA doivent-elles être recrutées pour une augmentation des effectifs des contrôleurs aériens à hauteur de 61 ETP. Dans la mesure où la formation des contrôleurs aériens s'étale sur cinq années, il est indispensable d'anticiper les besoins et les recrutements pour ne pas se retrouver en situation de manque de capacités dans quelques années.

Le nombre de nouvelles promotions d'ICNA a ainsi vocation à augmenter progressivement jusqu'à cinq par an afin de répondre à cet enjeu. Cette trajectoire prévisionnelle aura vocation à être ajustée en fonction notamment de l'affinement des prévisions de trafic.

Dans le même temps, les catégories des ouvriers d'un côté (- 23 ETP) ainsi que des ingénieurs électroniciens des systèmes de la sécurité aérienne (IESSA) et des techniciens des études et d'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC) de l'autre (- 13 ETP) verront leurs effectifs se réduire en 2024, notamment du fait de la réforme des fonctions transverses de la DGAC.

2. Le nouveau protocole social ne doit pas reproduire les erreurs du passé

En 2024, la masse salariale de la DGAC, le principal poste de dépenses du budget annexe, devrait augmenter de 50 millions d'euros (+ 5 %) pour dépasser le milliard d'euros (1 037 millions d'euros). Les dépenses de personnel représentent au total, une fois incluses les cotisations sociales employeurs, les prestations sociales et l'action sociale, un montant de 1 341 millions d'euros, en hausse de 60 millions d'euros (+ 5 %) par rapport à 2023. Cette augmentation s'explique principalement par la revalorisation du point d'indice ainsi que par des mesures catégorielles.

Depuis la fin des années 1980, la DGAC a pris l'habitude de conclure des « protocoles sociaux » avec les organisations syndicales représentatives de ses agents. Ces accords pluriannuels, ayant notamment vocation à assurer une certaine forme de paix sociale, devaient garantir aux personnels de la DGAC des avantages catégoriels en contrepartie de l'adoption de mesures de productivité, notamment en matière d'organisation du temps de travail, visant à améliorer la performance du contrôle aérien.

Depuis de nombreuses années, le rapporteur spécial ne cache pas son scepticisme quant à l'équilibre et à l'intérêt de ces accords. Les mesures catégorielles du dernier protocole social qui a couvert la période 2016-2019 auraient coûté près de 50 millions d'euros à la DGAC, contre 27 millions d'euros pour le précédent, sans qu'une véritable réforme de l'organisation du travail des contrôleurs aériens n'ait aboutie et sans que des gains de performance flagrants n'aient été observés.

Dans le prolongement des interrogations du rapporteur spécial, la Cour des comptes a publié un rapport40(*) en septembre 2021 remettant très fortement en cause la pratique des protocoles sociaux de la DGAC. Selon ce rapport, il est devenu indispensable de « redéfinir le contenu des protocoles sociaux afin qu'ils ne se soldent pas par l'octroi continu d'avantages catégoriels supplémentaires ». Le rapporteur spécial ne peut que souscrire à cette conclusion qu'il avait lui-même tirée de ses observations. Le futur accord devra réellement transcrire le principe de « donnant-donnant » qui constitue la seule légitimité de cette pratique. Il devra enfin cette fois-ci se traduire par une amélioration sensible et mesurable de la performance des services de la navigation aérienne.

La crise sanitaire avait occasionné une suspension des négociations du nouveau protocole. Celles-ci ont repris au début de l'année 2023. Elles sont toujours en cours actuellement et la DGAC a pour ambition d'aboutir d'ici à la fin de l'année pour commencer à le mettre en pratique au début de l'année 2024.

D'après les éléments communiqués par la DGAC, le futur protocole social devrait prévoir plusieurs mesures de nature à améliorer la performance du contrôle aérien :

- une restructuration et une rationalisation des centres de contrôle et d'approche ainsi que des tours de contrôle ;

- la régionalisation de l'implantation territoriale des centres de maintenance de la DSNA ;

- la réorganisation du service de contrôle d'aérodrome qui amènera à remettre en cause la présence de la DGAC sur certaines plateformes pour envisager son remplacement par des services d'information de vol et d'alerte dits « AFIS » (pour Aerodrome Flight Information Service) ;

- la mise en place d'un corps unique de contrôleurs aériens à horizon 2030 ;

- la révision de l'arrêté relatif à l'organisation du temps de travail des contrôleurs aériens dans le but de rendre plus souple la planification des vacations de contrôle afin d'améliorer la performance des services de la navigation aérienne, tout particulièrement lors des périodes de pointes.

Les réformes de l'organisation du temps de travail des contrôleurs doivent s'accompagner de contreparties en termes indemnitaires.

B. PORTÉES PAR LES PROGRAMMES DE LA DIRECTION DES SERVICES DE LA NAVIGATION AÉRIENNE (DSNA), LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT DU BACEA PROGRESSENT FORTEMENT

1. Une nouvelle impulsion budgétaire pluriannuelle en faveur des investissements de la DSNA
a) La nouvelle trajectoire pluriannuelle d'investissements de la DSNA se traduit par une hausse sensible des crédits d'investissement du BACEA

En 2024, les dépenses d'investissement du BACEA devraient progresser de 50 millions d'euros pour approcher les 370 millions d'euros. Cette augmentation s'explique quasi exclusivement par la hausse des dépenses d'investissement de la DSNA (voir infra).

Les dépenses d'investissement du BACEA (en CP) inscrites en LFI depuis 2013

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Comme l'illustre le graphique ci-après, l'impulsion budgétaire prévue en 2024 doit se prolonger dans les années à venir.

Trajectoire prévisionnelle des dépenses d'investissement du BACEA (en CP) jusqu'en 2027

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Dans son rapport d'information de juin 2023 intitulé « la navigation aérienne fait atterrir en urgence son programme de modernisation »41(*), le rapporteur spécial avait souligné à quel point, en matière d'investissements, « la DSNA se trouve actuellement, et pour au moins encore quelques années, dans une phase critique dans laquelle elle doit tout à la fois assumer le coût financier des dérives constatées sur ses différents programmes de modernisation, assurer leur aboutissement, anticiper les projets de modernisation à venir et combler des années de sous-investissement dans des infrastructures aujourd'hui en situation d'obsolescence avérée ».

Il y révélait également qu'au printemps 2023, la DSNA avait sollicité une nouvelle trajectoire d'investissements pluriannuelle, largement majorée par rapport à celle qui avait été programmée en fin d'année 2022. Cette nouvelle trajectoire intégrait notamment les coûts prévisionnels de la transition du programme 4-Flight vers un système mutualisé (voir infra le nouveau programme « 4-Flight révolution ») et les investissements indispensables pour traiter des situations d'obsolescence identifiées sur les infrastructures de la DSNA (voir infra le nouveau programme « infrastructures bas carbone »).

Le rapporteur spécial constate, non sans un certain soulagement, qu'une révision de la trajectoire pluriannuelle d'investissement de la DSNA a bien été adoptée en ce sens. Elle explique le sursaut des crédits d'investissement du BACEA observé dès 2024.

Toutefois, et comme il a pu le préciser dans son rapport d'information de juin 2023, s'il est tout à fait conscient des besoins de visibilité budgétaire de la DSNA tout comme de la situation de « bosse d'investissements » dans laquelle elle se trouve actuellement et s'il accueille favorablement cette évolution, le rapporteur spécial tient à rappeler qu'en contrepartie de cette majoration substantielle de ses crédits d'investissements, la DSNA doit absolument donner davantage de garanties en matière de transparence, de performance ou encore de pilotage opérationnel et budgétaire de ses projets. Pour y parvenir, le rapporteur spécial a formulé une série de recommandations :

- garantir une régulation réellement indépendante et efficace des performances de la DSNA et mettre en oeuvre un comité de suivi financier des grands programmes ;

- améliorer le pilotage budgétaire des programmes de la DSNA, notamment en généralisant la budgétisation AE ? CP ;

- instaurer un contrat d'objectifs et de performance pluriannuel entre la direction générale de l'aviation civile (DGAC) et la direction du budget ;

- tenir les engagements pris par la DGAC au titre de la trajectoire de désendettement du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (DGAC).

b) Deux nouveaux projets expliquent la hausse de la programmation pluriannuelle des investissements de la DSNA

Le programme 612 « Navigation aérienne » représente à lui seul environ 85 % des dépenses d'investissement effective du BACEA, avec 315 millions d'euros de CP prévus en 2024, soit une hausse de 43 millions d'euros par rapport à 2023.

Évolution des CP inscrits en loi de finances initiale
sur le programme 612

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Le montant de crédits d'AE inscrits en 2024 est plus exceptionnel encore puisqu'il atteint 480 millions d'euros, soit presque un doublement par rapport au montant inscrit en LFI pour 2023.

Cette augmentation est la traduction de la mise en oeuvre d'une trajectoire d'investissement pluriannuelle nettement plus ambitieuse que celle qui avait été envisagée en fin d'année dernière mais elle révèle également la nécessité pour la DGAC d'inscrire ces crédits d'engagement dès 2024 pour pouvoir intégrer les opérations d'investissements afférentes dans la nouvelle période de référence « RP 4 ». En effet elles pourraient ainsi être financées par les redevances de navigation aérienne dans le cadre prévu par la régulation européenne de la performance des prestataires de services de la navigation aérienne.

Pour éviter un déclassement technologique, la DSNA conduit une série de grands programmes de modernisation des outils du contrôle aérien. Comme le rapporteur spécial a pu le souligner dans son rapport précité de juin 2023, ces grands programmes, aussi indispensables soient-ils, ont malheureusement accumulé les déboires tant en termes de délais que de surcoûts financiers.

Coût des programmes de modernisation
du contrôle de la navigation aérienne

(en millions d'euros)

Programme

Durée du programme

Dépenses cumulées fin 2022

Dépenses programmées en 2023

Dépenses programmées en 2024

Dépenses programmées après 2024

Coût total programme

4-Flight

2011-2027

745,8

80,0

59,0

14,2

899,0

4-Flight Révolution

2024-2030

-

2,0

45,6

294,6

342,0

Coflight

2003-2027

248,8

23,0

23,5

10,4

305,7

Sysat

2012-2032

114,4

28,0

28,5

265,8

436,7

Autres programmes

-

163,4

29,4

25,9

71,3

290,0

Total

-

1 272,4

162,4

182,5

656,3

2 273,4

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performance du BACEA

En incluant notamment les nouveaux surcoûts de 14 millions d'euros sur le programme 4-Flight mais surtout l'introduction du nouveau programme « 4-Flight révolution », le coût total cumulé des programmes de modernisation du contrôle de la navigation aérienne atteignent presque 2,3 milliards d'euros. Sur ce montant, 840 millions d'euros resteront encore à dépenser après le 31 décembre 2023.

Comme le montre le graphique ci-après, et pour différentes raisons42(*) qui avaient pour la plupart d'entre-elles été signalées dès 2018 par le rapporteur spécial dans son rapport d'information « Retards du contrôle aérien : la France décroche en Europe » publié le 13 juin 201843(*), les principaux programmes de modernisation du contrôle aérien ont enregistrés, depuis leur lancement, des surcoûts de près d'un milliard d'euros.

Évolution des coûts d'investissement
des programmes 4-Flight, Coflight et Sysat

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les annexes budgétaires aux lois de finances

En application de son nouveau plan stratégique à horizon 2030, à partir de l'année 2024, la DSNA va conduire deux nouveaux programmes d'investissement conséquents dont les détails sont précisés infra.

Il s'agit premièrement du programme « 4-Flight révolution » qui doit être le prolongement du programme « 4-Flight » (voir infra), la conception d'un nouvel outil d'assistance au contrôle aérien, dont le déploiement, lancé en 2022 doit s'achever d'ici 2027. Le coût total prévisionnel de ce programme est estimé à 342 millions d'euros d'ici à 2030.

Deuxièmement, à compter de 2024, pour remédier à des situations d'obsolescence de ses infrastructures qui ont notamment été mises en exergue par le rapporteur spécial dans son rapport de juin 2023 précité, la DSNA lance un programme d'investissements baptisé « infrastructures bas carbone ». Le coût total de ce nouveau programme d'investissement est estimé à 140 millions d'euros d'ici à 2029.

La budgétisation de ces deux nouveaux programmes explique largement les hausses de crédits observées dans la nouvelle trajectoire pluriannuelle d'investissement de la DSNA qui, elle-même, détermine très largement l'inflation des dépenses prévisionnelles d'investissement constatées sur le BACEA dans son ensemble.

Trajectoire prévisionnelle d'investissements de la DSNA (2023-2027)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

2. Le point sur les principaux programmes d'investissement de la DSNA
a) 4-Flight révolution : le projet qui doit succéder au programme 4-Flight - Coflight

Engagé en 2011, 4-Flight constitue le principal programme de modernisation du système français de gestion du trafic aérien. Alors qu'il devait être entièrement déployé dès 2015, 4-Flight n'a été mis en service que dans deux CRNA sur cinq en 2022. Il ne devrait être complètement déployé que d'ici fin 2026, c'est à dire après plus de 10 ans de retard. Entretemps, ses coûts ont doublé (+ 450 millions d'euros). Après avoir été réévalué de 35 millions d'euros en 2022, le coût prévisionnel du programme a une nouvelle fois été relevé en 2023, à hauteur de 14 millions d'euros, pour un total désormais estimé à 899 millions d'euros. Cette augmentation a pour origine, d'une part le financement du maintien en conditions opérationnelles (MCO) de l'outil Coflight qui n'avait pas été prévu à l'origine, et, d'autre part, les conséquences financières du report de la date de déploiement de 4-Flight dans le CRNA d'Athis-Mons (voir infra).

Pour enfin faire atterrir ce programme, la DSNA avait décidé en 2021 de déployer une version unique et harmonisée dans l'ensemble de ses cinq CRNA. Cette décision courageuse a rompu avec les habitudes qui privilégiaient des solutions hétérogènes, une pratique parfaitement inefficiente.

La prochaine étape du déploiement de l'outil 4-Flight devait être réalisée au CRNA Nord d'Athis-Mons au début de l'année 2024. Cependant, en raison des retards accumulés et du fait des risques pesant sur le calendrier de remontée en capacité du contrôle aérien à l'approche de la saison estivale aérienne et des Jeux olympiques de Paris, la DSNA a fait le choix de reporter cette mise en service à l'automne 2024, à une période qui semble plus propice.

Lancé en 2002, le programme Coflight est un système de traitement automatique des plans de vol. Croyant mutualiser les dépenses, la DSNA s'est associée au prestataire de services de la navigation aérienne (PSNA) italien et avait l'ambition de convaincre d'autres PSNA d'adopter ce système. Cette ambition a fait long feu : la DSNA sera le seul PSNA à assumer les coûts de Coflight qui ont doublé (+ 160 millions d'euros) depuis son lancement.

« L'adhérence quasi-totale » entre les programmes 4-Flight et Coflight a longtemps été sous-estimée, une situation qui n'a pas été sans conséquences sur les difficultés rencontrées par le projet 4-Flight. Le rapporteur spécial a notamment pu constater que l'interdépendance des deux programmes est en complet décalage avec le fait qu'ils ont jusqu'ici été développés en silos de façon quasi indépendante. Ainsi résulte-t-il de leur découplage contractuel une situation profondément sous-optimale, tant sur le plan opérationnel que sur les plans juridique ou encore de l'efficience économique des deux projets.

C'est pour cette raison que dans son rapport de juin 2023, le rapporteur spécial a formulé une recommandation visant, pour des raisons d'optimisation opérationnelle, technique et financière, à faire rapidement aboutir l'objectif d'articuler les programmes 4-Flight et Coflight au sein d'une seule architecture contractuelle. D'après la DGAC, cette reconfiguration contractuelle doit intervenir dès la fin de l'année 2023.

Le rapporteur spécial l'avait révélé dans son rapport de contrôle de juin 2023, alors que les programmes 4-Flight et Coflight n'ont à ce jour été déployés que dans deux centres sur cinq, la DSNA doit déjà se projeter dans « l'après ». En effet, le système 4-Flight n'a pas d'avenir de long terme car il n'a pas été conçu sur une architecture informatique pérenne. Il sera difficile de le faire évoluer et il ne pourra pas être adopté par d'autres prestataires de services de la navigation aérienne (PSNA). À long terme, le coût de sa maintenance et de ses évolutions, estimé à plus de 70 millions d'euros par an, qu'elle devrait assumer seule, n'apparaît pas financièrement soutenable pour la DSNA.

Pour se maintenir durablement au niveau technologique de ses homologues, la DSNA devra absolument parvenir à s'inscrire dans les feuilles de route industrielles du secteur pour partager les frais de ses systèmes avec d'autres PSNA. Aussi, la DSNA avait entamé des réflexions portant sur un plan de transition progressive du système 4-Flight, à travers le développement d'une série de nouvelles versions, vers une architecture susceptible de permettre à la DSNA d'intégrer des feuilles de routes industrielles mutualisées avec d'autres PSNA.

Cette ambition est traduite dans son nouveau programme d'investissement baptisé « 4-Flight révolution » dont le coût total prévisionnel est estimé à 342 millions d'euros d'ici à 2030.

Le programme « 4-Flight révolution »

Ce programme a pour objectif de concevoir, développer et déployer, pour l'horizon 2030, les versions successives d'amélioration et de maintien en condition opérationnelle du système 4-Flight déployé dans une version commune dite « V2 » dans les cinq centres en route de la DSNA entre 2024 et 2029.

Faisant suite au programme initial de déploiement du nouveau système, le présent programme vise à :

- accompagner la stratégie d'amélioration des performances des opérations de la DSNA en introduisant de nouvelles fonctionnalités notamment issues de la recherche SESAR ou des travaux initiés dans le cadre du projet « ATC44(*) Tools » ;

- contribuer à la rationalisation de l'architecture des systèmes de la DSNA en s'appuyant le cas échéant sur la centralisation et la virtualisation des applications ;

- réduire le coût de possession du système en s'inscrivant dans une démarche de convergence avec des partenaires ANSP vers les feuilles de route des industriels du contrôle aérien.

Compte tenu des temps de développement, une livraison majeure est attendue tous les deux ans. Cela correspond à la fourniture de trois versions sur la durée totale de l'opération.

Source : projet annuel de performances du BACEA

b) Après le constat douloureux de son échec, le programme Sysat a été opportunément restructuré

Le programme Sysat a été lancé en 2011 pour moderniser les centres d'approche et les tours de contrôle avec un volet pour la région parisienne (Sysat G1) et un autre pour la province (Sysat G2).

Sysat G1 devait à l'origine passer par l'acquisition « sur étagère » d'un système standard. Cependant la DSNA, a conçu un cahier des charges de 10 000 pages, excluant de fait tout produit industriel existant. Cette sur spécification caricaturale a conduit l'industriel SAAB/CS dans une impasse, entraînant une dérive rapide et incontrôlée des coûts et des délais. L'organisation de la DSNA et sa maîtrise d'ouvrage beaucoup trop dispersée et source d'incohérences, a condamné ce programme dont l'échec a été courageusement acté en 2021. Le programme Sysat G1 a ainsi été complètement restructuré. Le contrat avec l'industriel SAAB/CS pour le site de Roissy Charles-de-Gaulle (CDG) a été résilié au profit d'une simple remise à niveau du système existant des tours de contrôle. Pour Orly, le contrat a dû être revu largement pour y faire entrer un projet certes différent mais plus réaliste : l'achat « sur étagère » d'un système destiné à la tour de contrôle.

Le programme Sysat G2 était irréalisable, sa première mouture envisageant de moderniser l'ensemble des tours de contrôle à horizon 2020. Abandonné, il est revenu à son point de départ. Cette révision était incontournable. Un appel d'offres a été lancé en 2023 en vue de moderniser quinze grandes tours et centres d'approches. La notification du marché doit intervenir en 2024. Les premiers sites appelés à être modernisés devraient être ceux des aéroports de Nice, Lyon, Marseille et Toulouse pour des mises en service prévues d'ici à 2028.

En 2024, un nouveau volet est rattaché au programme Sysat. Il s'agit du projet DAT (digital advanced towers) qui vise à contrôler à distance l'aéroport de Tours Val-de-Loire depuis le site de Blagnac pour une mise en service programmée en 2025. Ce projet, qui à l'origine visait à contrôler cinq terrains à distance, a été largement revu à la baisse.

Comme le rapporteur spécial l'a signalé dans son rapport d'information de juin 2023, depuis son lancement, le coût du programme Sysat a plus que quintuplé et au moins 37 millions d'euros auront été dépensés en pure perte.

c) Un nouveau programme « infrastructures bas carbone » pour remédier à l'obsolescence des emprises immobilières de la DSNA

Le rapporteur spécial avait soulevé cet enjeu dans son rapport de juin 2023 en indiquant que « la focalisation des investissements de la DSNA sur ses grands programmes de modernisation a occulté, et probablement conduit à négliger, des situations d'obsolescence rencontrées sur d'autres de ses systèmes et infrastructures ». Bien que n'entraînant pas de risques de sécurité en raison des systèmes de redondance, la situation est préoccupante puisque l'ensemble des infrastructures de la DSNA semble aujourd'hui exposé à des phénomènes plus ou moins prononcés d'obsolescence et de vétusté.

Concernant les infrastructures de génie civil, notamment le réseau des tours de contrôle, la DSNA évalue la dette d'investissement à plus de 200 millions d'euros. Face à cette situation, la DSNA a proposé à la direction du budget un plan consistant à engager 140 millions d'euros d'investissements en deux phases, 45 millions d'euros entre 2024 et 2026, puis 95 millions d'euros entre 2027 et 2029.

Ce plan a été traduit dans le nouveau programme « infrastructures bas carbone » inclus dans la trajectoire pluriannuelle d'investissements de la DSNA à compter de l'exercice budgétaire 2024.

Trajectoire prévisionnelle de consommation des crédits d'investissement relatifs au programme de la DSNA « infrastructures bas carbone » (2024-2029)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances du BACEA

D. LA TRÈS LOURDE DETTE DU BACEA ENTAME SON REFLUX

En raison de l'effondrement du trafic aérien provoqué par la pandémie de Covid 19, la dette du BACEA s'est considérablement accrue pour culminer à 2,7 milliards d'euros au 31 décembre 2021. Après une stabilisation en 2022, l'encours de dette du budget annexe devrait effectivement commencer à se résorber cette année pour s'établir à 2,5 milliards d'euros au 31 décembre 2023.

Alors que la LFI pour 2023 avait autorisé le BACEA à recourir à l'emprunt dans une limite de 256,6 millions d'euros, le montant auquel il fera appel devrait être inférieur. Au jour où le rapporteur spécial écrit ces lignes, aucun tirage n'a été effectué par le BACEA au cours de l'année 2023.

La DGAC considère que le BACEA pourrait devoir emprunter 238 millions d'euros en 2024 ce qui permettrait à son encours de dette de poursuivre son repli à environ 2,4 milliards d'euros au 31 décembre 2024.

Évolution de l'endettement du budget annexe de 2008 à 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Selon les prévisions de trafic retenues à ce jour par la DGAC, le désendettement du BACEA devrait se poursuivre après 2024 à une moyenne d'environ 300 millions d'euros par an, pour un encours de dette de 1,5 milliard d'euros à horizon 2027.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

À la suite de la première délibération à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a intégré, dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, un amendement qu'il avait déposé et a minoré de 880 704 euros les crédits de l'action 10 « Gouvernance, évaluation, études et prospective en matière de développement durable » du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologique » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » afin de tenir compte du transfert de certaines portions du réseau routier national aux départements et aux métropoles.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen des crédits consacrés aux transports terrestres et au transport aérien de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens »

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie », « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » et « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ». - Sans considérer l'évolution des dépenses de soutien à l'énergie, qui ont été très importantes en 2023, les crédits des programmes sont globalement en hausse. Cependant, leur progression reste inférieure à l'inflation, à rebours de la communication du Gouvernement, qui présente ce budget comme celui de la transition écologique.

S'agissant du fonctionnement du ministère, le plafond d'emplois augmente pour la première fois depuis des années. Je souligne au passage que certains crédits visent à rénover la façade de la tour Séquoia, achetée par le ministère en 2015, le bâtiment s'étant avéré peu performant d'un point de vue énergétique.

En ce qui concerne le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », les crédits semblent quasiment doubler. En réalité, il s'agit d'un transfert, puisque les crédits liés à la stratégie nationale de la biodiversité, rattachés l'an dernier au programme 380 du fonds vert, rebasculent sur le programme 113. Cette réorganisation est positive en matière de lisibilité, tous les crédits consacrés à la biodiversité étant désormais rassemblés au sein du même programme.

Ces crédits ont fait l'objet d'une gestion plus encadrée au niveau national que les autres politiques du fonds vert. Un exemple est que lorsque des régions n'utilisaient pas leur enveloppe, le montant était repris et transféré à d'autres régions. L'Office français de la biodiversité (OFB), principal opérateur du programme 113, sera en mesure de voter un budget à l'équilibre pour la première fois en 2024, grâce à une augmentation de sa subvention pour charges de service public.

J'en viens au programme 181 « Prévention des risques », dont l'augmentation des crédits s'explique quasi intégralement par la hausse de la subvention versée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), son principal opérateur. En effet, l'Agence fait face à des frais de fonctionnement qui augmentent en même temps que ses crédits d'intervention. Ces derniers proviennent aussi de France 2030 et du fonds Chaleur.

L'Ademe gère le fonds économie circulaire, qu'il ne faut pas confondre avec les financements assurés par les éco-organismes.

Elle se charge aussi du fonds Hydrogène, qui est de taille modeste et dont les crédits vont baisser de 38 à 20 millions d'euros, à rebours des discours affichant la volonté de développer ce vecteur énergétique. Les crédits du fonds viennent parfois compléter des crédits de France 2030, ce qui n'est pas idéal en matière de lisibilité.

Les risques technologiques sont pris en considération par ce programme et, vingt-deux ans après l'accident de l'usine AZF, tous les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) devraient être approuvés d'ici à la fin 2023.

En ce qui concerne les risques climatiques, les dernières tempêtes Ciarán et Domingo figurent parmi les cinq épisodes de tempête les plus coûteux. Les fonds manquent pour faire face aux dépenses engendrées, et il serait urgent de revoir l'enveloppe financière du régime de catastrophe naturelle. À ce titre, je déposerai un amendement visant à augmenter les crédits du fonds Barnier.

Le financement de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est également porté par le programme. Un projet de loi a été déposé au Conseil d'État, qui vise à fusionner l'ASN et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), pour former l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). La traduction budgétaire de la fusion n'apparaît pas encore clairement. Par ailleurs, l'ASN plaide pour un programme budgétaire unique, les crédits étant actuellement éclatés entre la mission « Recherche et enseignement supérieur » et celle que nous examinons.

Le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » ou fonds vert connaît une progression véritable, les crédits de paiement (CP) augmentant de 125 %, pour passer de 500 millions d'euros à 1,125 milliard d'euros. Ce nouveau budget semble plus sincère, notamment au regard du nombre important de dossiers déposés en 2023, qui n'ont pas pu être financés faute de crédits suffisants.

De plus, la maquette du programme évolue et deux nouvelles sous-actions sont créées. D'abord, la sous-action « Soutien aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) en milieu rural » se voit allouer 30 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et reprend pour partie les propositions faites par Stéphane Sautarel et Hervé Maurey dans le rapport d'information qu'ils ont remis sur le sujet. Ensuite, la sous-action « Territoires d'industrie » est dotée de 100 millions d'euros en AE. La pertinence de son inscription dans le fonds vert me semble plus critiquable compte tenu de sa mission, qui consiste d'abord à soutenir une activité économique. Le rattachement de ces crédits au programme 380 plutôt qu'à la mission « Économie » permet de présenter artificiellement un volume de financement plus important pour le fonds vert.

Comme l'an dernier, la répartition prévisionnelle des crédits entre les différentes actions et sous-actions du fonds vert n'apparaît pas dans le projet annuel de performances, ce qui est regrettable. Au cours des auditions que nous avons menées, nous avons appris que des grilles de répartition étaient préparées par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) et transmises aux préfets. Si cette grille n'est pas rendue publique, il devient difficile d'opérer une comparaison entre le prévisionnel et ce qui a été effectivement dépensé. Ce travail de répartition est en cours pour 2024.

La gestion des crédits du fonds est assimilable à celle de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Ainsi, comme pour la DSIL, il n'y a pas de comité d'attribution des fonds. Les porteurs de projets ont signalé des difficultés rencontrées pour déposer leur dossier. Néanmoins, les dossiers qui n'ont pas été retenus en 2023 seront considérés comme déjà déposés pour 2024. Par ailleurs, dans certains départements, quand les crédits manquent sur le fonds vert, on a recours à la DSIL ou à la DETR, l'inverse se vérifiant également. Une quasi-fongibilité existe donc entre les trois enveloppes.

J'en viens au programme 345 « Service public de l'énergie ». En 2022 comme en 2023, la hausse significative des prix de l'électricité et du gaz avait entraîné un effet inattendu : les énergies renouvelables devenaient rentables et contribuaient au budget de l'État. L'an dernier, des recettes exceptionnelles étaient prévues pour un montant d'environ 36 milliards d'euros. Finalement, les recettes générées en 2022 et 2023 ne s'élèvent qu'à 17,7 milliards d'euros et, pour 2024, la prévision n'est que de 2,7 milliards d'euros, en raison de la baisse des prix sur les marchés de gros. À cet égard, le Gouvernement a diminué les montants prévus par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en septembre 2023.

Dans la loi de finances initiale pour 2021, un mécanisme avait été introduit, qui prévoyait de réviser le tarif d'achat de contrats de soutien à la production d'électricité photovoltaïque, signés entre 2006 et 2011. Le Sénat avait supprimé l'article, mais le Gouvernement a persévéré. Finalement, un arrêté a été annulé par le Conseil d'État et le Gouvernement vient de renoncer à appliquer ce dispositif, qui avait conduit à d'importants travaux préparatoires et mobilisé 10 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires.

Par ailleurs, le 26 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel un article de la première loi de finances rectificative pour 2022, qui prévoyait un déplafonnement partiel des contrats de complément de rémunération de certains producteurs, sans inscrire ses modalités précises dans la loi. Suite à cette décision, le Gouvernement a déposé un amendement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en première lecture à l'Assemblée nationale qui prévoit désormais un déplafonnement intégral et sans conditions.

Crée en 2023, l'action n° 18 « Soutien hydrogène » est pour la première fois, dotée de 680 millions d'euros en AE et de 25 millions d'euros en CP.

Enfin, s'agissant des mesures de soutien aux consommateurs, trois types de dispositifs perdureront en 2024 : le bouclier sur les prix de l'électricité prévu à l'article 52, un dispositif d'amortisseur ciblé prévu au même article, pour lequel le Gouvernement n'a pas su expliquer qui il concernait, et des mesures destinées aux structures d'habitat collectif chauffées au gaz.

Je terminerai en évoquant le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », qui prévoit un montant significatif alloué à des mesures de soutien aux consommateurs, notamment au travers du chèque énergie et des primes à la transition. À cet égard, le fonctionnement du dispositif MaPrimeRénov' évoluera en 2024 pour compter deux parcours : « performance » et « efficacité ».

Le parcours « performance » sera constitué d'aides proportionnelles au coût des travaux visant à soutenir la réalisation de travaux de rénovation globale. Ces financements seront majorés pour les logements F et G. L'accompagnement sera obligatoire. Ce parcours sera financé par le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ».

Les crédits du programme 174 de la mission que nous examinons seront alloués au financement du parcours « efficacité » de MaPrimeRénov'. Pourtant, bien qu'il soit inscrit sur la mission « Écologie », ce dispositif vise à soutenir la décarbonation du chauffage des logements, sans prévoir de rénovations globales, alors que celles-ci permettent véritablement la réduction de la consommation d'énergie.

Quoi qu'il en soit, les crédits réunis des programmes 135 et 174 ne permettront pas d'atteindre les objectifs fixés en matière de bâtiments de basse consommation. De plus, même si les aides doivent augmenter pour les ménages des déciles inférieurs, le niveau de reste à charge restera bien trop élevé. En effet, pour les ménages très modestes, le reste à charge représente aujourd'hui 45 % du coût des travaux.

Par ailleurs, nous observons une sous-exécution des crédits de MaPrimeRénov' en 2023, qui pourrait aussi perdurer en 2024. Les difficultés rencontrées pour trouver des artisans qualifiés ou définir une rénovation globale expliquent notamment ce problème.

En ce qui concerne le dispositif d'aide à l'acquisition de véhicules propres, il prend deux formes : le bonus ou la prime à la conversion. J'ignore comment les fonds sont répartis entre les deux, car le ministère n'a pas pu répondre. Les modalités d'attribution et le montant de ces deux dispositifs en 2024 ne sont pas encore connus. Comme vous le savez, suite aux débats qui ont eu lieu au Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2023 et à l'amendement que j'avais soutenu au nom de la commission des finances, nous avons été finalement entendus et le bonus ne sera dorénavant attribué qu'à des véhicules présentant un bilan carbone correct. Un arrêté a défini les critères et la grille d'analyse sur lesquels reposera ce bilan. L'Ademe passe en revue tous les véhicules commercialisés en France pour définir les notes obtenues, qui seront connues au mois de décembre. Ce retard perturbera sûrement la consommation des crédits alloués au bonus en 2024.

Des crédits modestes, s'élevant à 50 millions d'euros, seront fléchés pour le leasing social. Nos craintes sont nombreuses quant à l'opérationnalité du dispositif, notamment parce que les véhicules potentiellement éligibles ne sont pas encore produits. Tenant compte de cette difficulté, le Gouvernement étudie la possibilité d'adopter des critères géographiques pour les ménages éligibles. L'article 52 bis porte sur l'inscription dans la loi de cette pratique.

Le programme comprend aussi le dispositif « gros rouleurs », introduit par la loi de finances pour 2023, qui visait à cibler les personnes utilisant leur véhicule pour aller travailler. Le dispositif est prorogé pour 2024 et étendu jusqu'au sixième décile.

Je finirai mon intervention en évoquant le compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (Facé), dont les crédits n'ont pas évolué depuis 2018, s'élevant toujours à 360 millions d'euros, alors qu'un rapport de la Cour des comptes s'est montré assez sévère, soulignant notamment qu'en raison de l'inflation l'enveloppe ne permet pas de mener l'ensemble des travaux nécessaires.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Les crédits consacrés à l'énergie dans la mission sont très impactés par l'extinction annoncée des mécanismes exceptionnels de protection des consommateurs d'ici à 2024. Les montants baissent de 70 % au sein du programme 345 et de 3 % dans le programme 174. Certes, la conjoncture économique explique cette extinction et je rappelle que, selon la CRE, les prix sont redescendus à 140 euros pour un mégawatt d'électricité et à 50 euros pour un mégawatt de gaz, atteignant des niveaux très inférieurs à ceux de l'année 2022, marquée par le conflit en Ukraine et la découverte du phénomène de corrosion sous contrainte, qui avait limité la production d'énergie.

Pour autant, notre commission s'inquiète de la reconduction limitée du bouclier tarifaire. En ce qui concerne l'électricité, seuls les boucliers individuels et collectifs, ainsi que la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), sont pleinement prolongés. Ce ne sera pas le cas de l'amortisseur et du filet de sécurité, pourtant utiles aux entreprises et aux collectivités. À cet égard, je rappelle que certains contrats signés sont basés sur des niveaux bien supérieurs aux 140 euros par mégawatt. S'agissant du gaz, le projet de loi de finances (PLF) prévoit un bouclier pour les ménages bénéficiant d'un système de chauffage collectif, mais pas de bouclier individuel ni de baisse de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN). Pour les carburants, seule une indemnité est proposée. Les chèques énergie exceptionnels sont abandonnés. Au total, les crédits se limitent à 2,9 milliards d'euros et connaissent une baisse de 90 %.

De plus, une forte incertitude pèse sur les hypothèses macroéconomiques retenues pour le budget. D'abord, si les charges de service public de l'énergie finançant les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables sont positives pour la seconde année consécutive, avec 2,7 milliards d'euros, elles restent très sensibles aux fluctuations des prix du marché. En outre, l'article 11 du PLF autorise le Gouvernement à doubler réglementairement la TICGN pour un montant de 4 milliards d'euros. Enfin, l'article 52 permet de caper à 1,6 milliard d'euros les recettes exceptionnelles tirées des compléments de prix pénalisant les demandes excessives des fournisseurs, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Or c'est au consommateur que doivent être reversés ces compléments de prix de l'Arenh, comme l'ont proposé la CRE et le rapport d'information intitulé Mieux prévenir et réprimer la fraude à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, remis par notre commission en juillet dernier. Le PLF prévoit aussi de plafonner les contrats de compléments de rémunération des producteurs d'électricité renouvelable pour 1,3 milliard d'euros.

Enfin, nous déplorons plusieurs angles morts dans ce PLF. D'une part, la revitalisation des territoires n'est pas soutenue, contrairement à l'engagement pris dans la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat. D'autre part, la neutralité technologique n'est pas toujours appliquée, l'énergie nucléaire, l'hydroélectricité, l'hydrogène, les biocarburants et les biogaz en pâtissant. Enfin, plusieurs opérateurs de l'État ne disposent pas d'effectifs suffisants, à commencer par la CRE, qui a pourtant besoin de contrôler et de sanctionner les comportements opportunistes.

Le budget prévoyant une revalorisation des crédits alloués à la rénovation énergétique, la mobilité propre et la chaleur renouvelable, je proposerai à notre commission un avis favorable. Par ailleurs, je déposerai plusieurs amendements visant à supprimer la disposition sur les compléments de prix de l'Arenh, pour compléter les effectifs de la CRE et relever les crédits alloués aux centrales à charbon, au chèque énergie et au fonds Chaleur.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je mesure, au fil des années, l'importance de cette mission budgétaire au poids particulièrement dense.

Le fait que le ministère ne soit pas en mesure de répondre aux questions de notre rapporteur spécial est révélateur. Une incompréhension gagne l'opinion, à force d'injonctions sur des sujets qui touchent à l'environnement, à l'écologie, à la consommation et aux pratiques de la vie quotidienne. Nous observons une inadéquation entre les moyens que le budget de la Nation doit consacrer à ces questions et les moyens que les Français doivent aussi y dédier.

Christophe Béchu avait annoncé que le fonds vert serait à la main des élus et cette promesse n'a pas été tenue. Il faut rappeler le Gouvernement à cet engagement. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires avait émis une réserve, expliquant que, pour la première année, les préfets agiraient pour le compte des élus. Quand ce fonds sera-t-il réellement à la main de ces derniers ?

Enfin, je ne suis pas contre la souplesse offerte par la fongibilité des fonds, mais il faut le dire et le faire en transparence. Si les informations ne sont pas partagées, ces transferts ont lieu au bon vouloir de l'État et de ses représentants dans les départements, dans lesquels les situations diffèrent. La cohérence est nécessaire. Il s'agit aussi de la confiance que les élus placent en la parole et le soutien de l'État.

M. Stéphane Sautarel. - D'abord, la Commission européenne appelle certains pays, dont la France, à interrompre les dispositifs de soutien mis en place pour faire face à l'inflation énergétique. Notre rapporteur spécial et le rapporteur pour avis s'interrogent sur les niveaux de ces boucliers, qui sont déjà en baisse.

Ensuite, s'agissant du fonds vert, la meilleure solution pour le mettre aux mains des collectivités serait de le transférer dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales », qui rassemble les autres fonds de soutien à l'investissement des collectivités.

Enfin, la Cour des comptes a souligné certaines limites du Facé ; pourrions-nous travailler en 2024 à des solutions pour sortir de la situation de blocage dans laquelle se trouve le fonds depuis 2018 ?

Mme Florence Blatrix Contat. - Je partage les inquiétudes exprimées par Daniel Gremillet concernant la forte réduction des soutiens à la consommation d'énergie, alors que certaines entreprises et collectivités ont signé des contrats pour une durée de trois ans, au moment où les prix étaient très élevés.

De manière plus générale, l'objectif de cette mission est d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, d'accélérer la préservation et la restauration de la biodiversité et d'assurer notre souveraineté énergétique. Ces priorités doivent faire l'objet d'une planification pluriannuelle reposant sur une méthode et sur une volonté de rupture. Nous ne pouvons pas nous contenter de simples réajustements de la trajectoire et d'actions prises au fil de l'eau. Or je peine à identifier une véritable stratégie.

Par ailleurs, la transition doit être socialement juste et inclusive ; il s'agit d'un préalable pour qu'elle soit acceptée, notamment par les plus modestes. À ce titre, je partage les inquiétudes de Christine Lavarde, notamment sur les effets de MaPrimeRenov', qui restent trop faibles pour les plus modestes.

J'en viens au leasing social, qui pourrait constituer une piste pour permettre aux plus modestes de se déplacer. Je regrette les retards pris en la matière.

La mission compte quelques avancées, mais souffre d'un manque d'ambition. Par conséquent, nous nous abstiendrons.

M. Vincent Delahaye. - Je voudrais interroger Christine Lavarde sur les aides exceptionnelles pour l'énergie et les carburants. Je m'étais opposé à des aides trop générales et plaide toujours pour mieux cibler les dispositifs. Les boucliers comportent-ils un niveau de prix à partir duquel ils cessent d'être utilisés ?

M. Hervé Maurey. - Sur le fonds vert, je me réjouis que les propositions que nous avions faites avec Stéphane Sautarel soient reprises et que nous puissions en affecter une partie à la mobilité.

Par ailleurs, je parlerai plus de frontière douteuse que de fongibilité. À titre d'exemple, dans mon département, il arrive souvent que des crédits du fonds vert soient alloués à des bornes incendie.

L'absence de contrôle du fonds vert par les élus est problématique.

Le dispositif MaPrimeRénov' est complexe et change tout le temps, ce qui crée un problème de lisibilité et de compréhension ; pourrait-on simplifier, clarifier et stabiliser les choses ?

Enfin, s'agissant des véhicules propres, sommes-nous en règle avec les dispositions légales, qui prévoient d'atteindre un certain pourcentage de véhicules propres au sein des administrations de l'État ?

M. Laurent Somon. - Sur le fonds vert, je partage l'idée que les collectivités devraient exercer un contrôle sur l'affectation des crédits. Dans le PLF pour 2023, il était prévu qu'une partie soit affectée pour compenser la perte de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour les collectivités ; est-ce toujours le cas ?

Vous avez précisé qu'il n'y avait pas d'affectation du fonds vert par objet, mais des priorités sont-elles identifiées ? Les crédits du premier fonds vert semblent avoir été essentiellement affectés au logement alors que les budgets actuels devaient être orientés vers la réindustrialisation ; est-ce le cas ?

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Je commencerai par les dispositifs de soutien aux consommateurs, qui demeurent. Cependant, les prix du gaz ayant fortement baissé, ils sont passés sous le seuil au-delà duquel se déclenche la mise en place du bouclier gaz. Le dispositif de soutien est donc tombé de lui-même. Lorsque, en juin dernier, j'avais présenté mon rapport d'information intitulé L'usine à gaz des aides énergie, j'avais fait remarquer qu'il était dommage de ne pas garder dans la loi le principe d'un dispositif, de manière que, si le besoin se présentait de nouveau, le dispositif soit prêt à être activé. En l'état, il sera de nouveau nécessaire de légiférer.

En ce qui concerne l'électricité, les consommateurs bénéficient toujours des tarifs réglementés de vente. Le projet de loi de finances prévoit bien de conserver le bouclier dont l'ampleur sera déterminée par le niveau d'augmentation des prix, que le Gouvernement arrêtera en février, suite à la détermination des tarifs réglementés théoriques par la CRE. Jusqu'à présent, ce bouclier s'est matérialisé dans une limitation de la hausse des prix à 4 % en février 2022, à 15 % en février 2023, puis à 10 % supplémentaires en juillet de la même année alors que les calculs de la CRE faisaient état d'une augmentation de 100 %. Avec le bouclier, l'État compense la différence entre le prix de vente théorique et le prix de vente de réel. Le bouclier s'applique à tous les consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVE), soit les consommateurs ayant une puissance inférieure à 36 kilovoltampères (kVA) : particuliers, TPE et petites collectivités.

Ceux qui ne sont pas éligibles au TRVE bénéficiaient précédemment de l'amortisseur, qui se déclenchait dès lors que les prix de l'électricité devenaient supérieurs à 180 euros le mégawatt. Seuls les consommateurs ayant signé des contrats de long terme à un tarif très élevé devraient continuer de bénéficier d'un dispositif d'amortisseur. Ainsi, tous les consommateurs d'électricité devraient pouvoir bénéficier d'un dispositif de soutien dès lors qu'ils payent un prix largement supérieur au prix du marché actuel.

Le bouclier électricité prend deux formes. D'abord, il consiste en un « capage » de l'augmentation du prix des fournitures. Ensuite, l'État a réduit à son niveau le plus bas l'accise sur les prix de l'électricité, l'ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), ce qui représente une perte de recettes pour le budget évaluée à 10 milliards d'euros. Le Gouvernement propose de reconduire cette mesure en 2024. En première partie du budget pour 2024, le rapporteur général a fait adopter par la commission une mesure visant à annuler cette minoration d'accise pour les particuliers. Afin que cette hausse ne s'impute qu'aux déciles les plus élevés, nous ouvrons dans la mission un complément de chèque énergie, qui s'adressera aux ménages modestes et moyens. Grâce à ce dispositif, nous aiderons plus que ce qui était prévu les ménages des premier et deuxième déciles ; nous aiderons à même hauteur les ménages des troisième, quatrième, cinquième et sixième déciles et nous faisons payer plus cher ceux des classes moyennes supérieures et aisées. Il s'agit d'une question de soutenabilité de la trajectoire des finances publiques. Comme l'a exprimé la Commission européenne dans son récent rapport publié dans le cadre du semestre européen, nous ne pouvons pas continuer à vivre sous perfusion.

L'aide au carburant ne repose pas sur un seuil de prix. Le guichet est ouvert et, quand les particuliers répondent aux conditions d'éligibilité et qu'ils en font la demande, ils reçoivent le chèque. L'année dernière, les crédits ont été sous-consommés, ce qui explique peut-être que le Gouvernement ait étendu les déciles éligibles.

J'en viens au fonds vert. Je ne souhaite pas un transfert des crédits vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et préférerais supprimer le dispositif. Nous demandons à toutes les collectivités de voter des schémas, comme les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, qui ne peuvent être mis en place, faute de ressources. Une partie des recettes de la fiscalité écologique, notamment la TICPE et la TICFE, devrait être affectée aux collectivités, qui s'en serviraient pour financer leurs schémas. Chaque année, un amendement allant dans ce sens est déposé au Sénat. À titre d'exemple, les préfets demandent à toutes les communes d'identifier les écoles ayant besoin de rénovation, afin que celle-ci soit financée par le fonds vert. Si les rénovations ont déjà eu lieu, les communes ne sont pas éligibles. Par ailleurs, une semaine a été donnée aux collectivités pour répondre. Il ne s'agit pas d'une bonne méthode. Il faut décentraliser la gestion des crédits. Le fonds vert ne sert qu'à annoncer que de l'argent a été alloué à l'écologie et, sur les 7 milliards d'euros d'AE annoncés dans ce budget, 2,5 milliards d'euros reposent sur le fonds vert.

L'année dernière, les collectivités n'ont pas été compensées à la hauteur de la CVAE collectée en 2022. On s'aperçoit que 500 millions d'euros ont été fléchés par un amendement déposé à l'Assemblée nationale, pour abonder les crédits du fonds vert. Sur cette somme, 350 millions d'euros étaient dédiés à la stratégie nationale biodiversité, qui rebasculent cette année du programme 380 sur le programme 113. Nous avons assisté à un tour de passe-passe.

En ce qui concerne la réindustrialisation, la nouvelle sous-action « Territoires d'industrie » offre un début de réponse, mais celle-ci n'a pas sa place dans le fonds vert, n'ayant rien à voir avec le verdissement des entreprises.

Le ministère de l'écologie est-il vertueux et responsable ? Je leur ai posé la question, leur document de présentation donnant l'impression d'un ministère exemplaire. Cependant, il n'existe malheureusement pas de comparaisons entre les ministères, donc je ne saurais pas dire où il se situe.

Je finirai en évoquant le leasing social de véhicules électriques. Aujourd'hui, les offres de leasing proposées sur le marché prévoient un premier loyer significatif, entre 3 500 et 4 000 euros, et la durée de détention pour laquelle on s'engage est longue, autour de 36 mois au minimum. Dans sa proposition, le Gouvernement annonce un loyer de 100 euros par mois, sans premier loyer particulier, et une durée de détention minimum plus courte. Ces annonces posent un problème d'équilibre économique. Par ailleurs, les ménages les plus modestes seraient intéressés par des véhicules d'occasion, mais le marché de l'occasion du véhicule électrique n'existe pas encore.

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons avec l'examen des programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture ».

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Nous présentons les crédits des programmes 203 « Infrastructures et services de transports » et 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

D'abord, je rappellerai que l'essentiel des investissements de l'État dans les infrastructures de transport est financé par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) comporte une programmation des dépenses de l'Agence qui s'achève en 2023. Par ailleurs, son article 3 prévoit que cette programmation devait être actualisée au plus tard en juin 2023, puis tous les cinq ans. Nous regrettons que le Gouvernement n'ait toujours pas respecté cette disposition.

Pourtant, le travail d'analyse qui doit servir de base à cette programmation a bien été mené par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), qui a remis son rapport en février dernier, dans lequel nous retrouvons certaines de nos remarques passées. Dans le scénario de « planification écologique » qu'il privilégie, le Conseil recommande que l'État, via l'AFIT France, dépense 26 milliards d'euros d'ici à 2027 dans les infrastructures de transport. Certes, la Première ministre a annoncé que le scénario central du COI servirait de base à la construction de la nouvelle programmation, mais cet engagement reste purement verbal et ne saurait se substituer à l'adoption d'une trajectoire d'investissement pluriannuelle par le Parlement.

En attendant la formalisation de cette trajectoire, le budget pour 2024 de l'AFIT France prend en compte les enjeux de décarbonation des transports. Les ressources de l'Agence devraient augmenter de 900 millions d'euros et ses dépenses pourraient atteindre un niveau inédit de 4,6 milliards d'euros. Notons à cet égard qu'une sous-consommation des crédits votés a déjà été observée dans le passé. Ces montants sont loin d'être excessifs tant les besoins de la transition écologique des infrastructures de transport sont colossaux.

Nous en parlons depuis deux ans, mais restons toujours scandalisés par l'attitude des sociétés concessionnaires d'autoroute qui, parce qu'elles sont en conflit avec l'État sur l'indexation de la taxe d'aménagement du territoire, refusent de verser la contribution annuelle de 60 millions d'euros qu'elles doivent à l'AFIT France. Des procédures judiciaires sont en cours. La recrudescence actuelle des tensions entre l'État et ces sociétés ne présage pas un règlement rapide du conflit, qui est plutôt relancé par la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, qui conduira à imposer 4,6 % de la fraction de chiffre d'affaires des sociétés d'autoroute qui excède 120 millions d'euros. Cette taxe devrait leur coûter environ 450 millions d'euros en 2024.

En 2024, la hausse significative des crédits attendue sur le programme 203 s'explique principalement par l'augmentation de la contribution de SNCF Voyageurs au fonds de concours dédié au financement du réseau ferroviaire. Nous reviendrons plus spécifiquement sur ce sujet qui nous interpelle.

Par ailleurs, le réseau routier national non concédé est engagé dans une spirale de dégradation préoccupante. Le directeur général des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) nous a aussi fait part de son inquiétude. Les crédits consacrés ont été rognés par l'inflation et sont désormais insuffisants. Ainsi, un audit de 2018 estimait qu'une somme annuelle d'au moins 1 milliard d'euros d'investissement serait nécessaire pour enrayer la dégradation des chaussées. En tenant compte de l'inflation, ce montant correspond aujourd'hui à 1,2 milliard d'euros. Or en 2024, les crédits devraient tout juste dépasser la barre du milliard d'euros. Dès 2017, le Sénat a alerté les pouvoirs publics sur ces risques de dégradation.

En ce qui concerne les trains de nuit, le Gouvernement n'est pas au rendez-vous de ses engagements. Alors qu'il a multiplié les déclarations, le renouvellement du matériel roulant n'avance pas. Pourtant, la qualité de service reste la condition du succès de ces trains. Nous appelons le Gouvernement à mettre ses actes en cohérence avec ses promesses.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

En juillet dernier, la mission d'information de la commission des finances sur le financement des AOM a dressé dans son rapport le constat du besoin de financement résultant de l'indispensable choc d'offre des mobilités du quotidien. En septembre, l'État et Île-de-France Mobilités (IDFM) ont conclu un protocole de financement, que des dispositions fiscales proposées dans ce PLF visent à mettre en oeuvre.

Le Gouvernement ignore une nouvelle fois les AOM locales, métropolitaines et régionales, auxquelles n'est proposée qu'une obscure conférence de financement, assortie d'une demande de rapport. Or un travail sérieux appréhendant l'ensemble des enjeux a été accompli par la mission d'information, qui a notamment formulé des recommandations pour permettre aux AOM de faire face à la hausse prévisionnelle de leurs dépenses.

Le Gouvernement s'obstinant à ne pas vouloir se préoccuper des AOM, notre commission défendra un amendement visant à leur affecter une nouvelle ressource dès 2024, constituée par une fraction des 250 millions d'euros du produit des mises aux enchères des quotas carbone. Cette initiative est salutaire et coche toutes les cases : il s'agit d'une ressource immédiate, pérenne et en ligne avec l'objectif de décarbonation des transports.

Par contraste avec une éventuelle augmentation des taux du versement mobilité, la ressource proposée présente l'avantage de ne pas être réservée aux AOM les mieux dotées en matière de base fiscale ni à celles qui organisent déjà un service de transport collectif régulier. Elle apportera aussi une solution à la mobilité en zone rurale, grande oubliée du système de financement des transports du quotidien.

J'en viens à la question du fret. La Commission européenne a lancé une enquête sur les aides publiques apportées à la société Fret SNCF, notamment sur la reprise de sa dette en 2020 par la filiale de tête du groupe SNCF. La Commission les considérera sans doute comme des aides d'État et, si elle demandait un remboursement de 5 milliards d'euros assorti d'une amende, cela se traduirait par une faillite immédiate de Fret SNCF.

Pour éviter ce scénario, le Gouvernement a choisi la voie de la négociation et proposé un plan de discontinuité, qui est douloureux. Nous sommes préoccupés par l'approche de la Commission, qui paraît incohérente. En effet, le secteur du fret ferroviaire est structurellement déficitaire en Europe et, en favorisant la concurrence sur ce marché, on favorise les filiales d'opérateurs historiques européens. Fret SNCF comptera donc deux sociétés : une dédiée à la maintenance et une autre au transport de marchandises. De plus, elle devra abandonner 23 lignes, qui seront ouvertes à la concurrence et figurent parmi les plus rentables. Fret SNCF se concentrerait donc sur le wagon isolé, qui constitue le secteur le moins rentable.

J'en viens à la régénération et à la modernisation des infrastructures ferroviaires. En mars 2022, dans leur rapport d'information intitulé Situation de la SNCF et ses perspectives, Hervé Maurey et Stéphane Sautarel avaient démontré à quel point les investissements étaient insuffisants. Ils avaient recommandé d'augmenter de 1 milliard d'euros par an les dépenses de régénération, mais aussi de programmer et de financer le déploiement des technologies de modernisation du réseau.

En février dernier, le rapport du COI a dressé le même constat et formulé les mêmes recommandations. La Première ministre a repris à son compte ces propositions et annoncé que, d'ici à 2027, les dépenses augmenteraient de 1,5 milliard d'euros par an.

Malgré ces paroles, des zones d'ombre demeurent. Il reste à décider de la trajectoire de montée en puissance des investissements et de savoir qui va payer. À cette dernière question, l'État répond qu'il doit plutôt s'agir de la SNCF, grâce aux bénéfices dégagés par sa filiale Voyageurs. Ainsi, le Gouvernement a déjà annoncé que 300 millions d'euros supplémentaires seraient prélevés en 2024 sur les résultats de la SNCF. D'après nos informations, le conseil d'administration de la SNCF ajoutera 175 millions d'euros dès 2024.

À moyen terme, cette modalité de financement présente des risques importants. En premier lieu, il n'est pas certain que SNCF Voyageurs reste en situation favorable et qu'elle puisse supporter ce fardeau. En deuxième lieu, cette solution est antinomique avec le contexte d'ouverture à la concurrence. D'une part, SNCF Réseau va accroître son lien de dépendance financier avec SNCF Voyageurs et, d'autre part, SNCF Voyageurs se trouvera lestée d'un lourd handicap face à ses concurrents, en finançant 50 % de la régénération et de la modernisation du réseau. En troisième lieu, cette pression financière contraindra les investissements de SNCF Voyageurs et aura un effet négatif sur le développement de l'offre ferroviaire, ce dont s'inquiète aussi l'Autorité de régulation des transports (ART). En quatrième lieu, ce choix pourrait se traduire par la poursuite de l'inflation des prix des billets. Pour toutes ces raisons, nous continuons à appeler à une nouvelle LOM et nous travaillerons sur le financement des infrastructures de transport en général, afin de trouver des solutions innovantes et en phase avec l'objectif de décarbonation.

Enfin, les crédits du programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » devraient rester relativement stables en 2024.

En conclusion, nous vous proposons d'adopter les crédits des programmes 203 et 205 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». - Le programme 159 regroupe les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Après une décennie de baisses substantielles de ses moyens, Météo-France connaît un répit bienvenu depuis l'année dernière. Comme je l'avais exposé dans un rapport d'information en 2021, cet opérateur est de plus en plus sollicité du fait de la multiplication des phénomènes extrêmes. En 2024, ses effectifs doivent progresser de 25 équivalents temps plein travaillés (ETPT).

À l'horizon 2026, Météo-France devra investir dans de nouveaux supercalculateurs pour 350 millions d'euros. Il s'agit d'un enjeu important pour multiplier la surface de calcul, rester dans la course et s'adapter au changement climatique. J'avais indiqué, dans le même rapport, que la direction générale de l'aviation civile (DGAC) devait mieux participer à l'analyse météorologique pour le secteur aéronautique. Je me réjouis, à cet égard, que Météo-France engage une mise à jour de sa comptabilité analytique en 2024, puisque cela permettra de rouvrir les discussions entre les deux organismes. En effet, le financement que fournit la DGAC pour la prévision aéronautique est gelé depuis 2012. La commission des finances a soulevé ce sujet et a été entendue, du moins sur la méthode.

L'année dernière, dans un autre rapport d'information, je vous avais présenté la transformation en cours au sein de l'IGN.

Je vous avais aussi signalé un certain nombre de risques associés à son nouveau modèle économique, dont celui de devenir plus dépendant de grands programmes financés par des commanditaires publics. En l'occurrence, de grands ministères tels que celui de la défense ou de l'agriculture font appel à l'opérateur : soumis eux-mêmes à des contraintes, ils ont parfois tendance à considérer que l'IGN est une variable d'ajustement, d'où un risque de trou d'air que je pressentais. Celui-ci est malheureusement arrivé plus tôt que je ne l'imaginais, et l'IGN risque fort d'être confronté à un problème budgétaire et de se trouver à court de trésorerie dès l'année prochaine.

Je salue ici les efforts que nous avons collectivement fournis lors de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) à l'occasion de la commission mixte paritaire qui s'est tenue hier. Le rapporteur général a relayé cette préoccupation, ce dont je le remercie, et nous avons voté une subvention de 4 millions d'euros en faveur de l'IGN, qui doit réussir sa transformation. Je crois que nous avons ainsi joué un rôle utile pour lui permettre d'achever cette mutation, qui mobilise l'ensemble de ses équipes.

J'en viens au Cerema qui, après un passage à vide, a retrouvé une vraie dynamique. Lors du vote de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS), nous avions validé le passage à une quasi-régie conjointe État-collectivités, qui permet aux collectivités adhérentes de cotiser et de faire appel au Cerema.

Ce nouveau modèle économique a été mis en place cette année : les premiers résultats semblent encourageants et devront être observés à l'avenir. Si ces ressources nouvelles permettent à ces organismes de boucler leur budget, elles ne sont pas sans présenter des risques dans la mesure où la part de la subvention pour charges de service public devient nettement minoritaire.

Du fait de cette vitalité retrouvée et pour la première fois de son histoire, les effectifs du Cerema devraient augmenter de 10 ETP en 2024, ce qui est sans doute insuffisant. J'aurai l'occasion de déposer un amendement à ce sujet, le Cerema souhaitant voir son plafond d'emplois augmenter sans que sa subvention progresse nécessairement, en estimant qu'il pourra couvrir cette hausse par son chiffre d'affaires, au moyen de la conquête de marchés.

J'en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit « Bacea », c'est-à-dire les dépenses de la DGAC.

Après des années marquées par la pire crise de son histoire et des chutes considérables du trafic, le transport aérien retrouve des couleurs, le trafic ayant presque retrouvé son niveau d'avant-crise. En 2024, les évolutions incluent un dispositif de rattrapage des conséquences de la crise, qui s'est traduite par une augmentation de la dette, dans la mesure où les redevances de navigation aérienne - c'est-à-dire les principales recettes du Bacea - dépasseront leur niveau d'avant-crise.

Le transport aérien se porte mieux, j'en conviens. Cependant, je ne peux pas vous cacher mon scepticisme, voire ma préoccupation, s'agissant des répercussions sur le secteur de la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, instaurée par l'article 15. Les aéroports sont en effet la victime collatérale de la volonté de l'État de mettre à contribution les sociétés d'autoroutes, puisque le Conseil d'État a estimé que d'autres secteurs devaient être soumis à cette taxe, à hauteur d'au moins 20 %, afin qu'elle soit valide sur le plan juridique.

Avec ce cran d'imposition supplémentaire, plusieurs aéroports seront confrontés à des difficultés, en particulier l'aéroport de Nice. J'ai eu l'occasion d'auditionner le président du directoire de cet aéroport, qui a fait état d'une très faible rentabilité des investissements, nettement en deçà des normes du marché : si cette trajectoire se confirme, il deviendra très malaisé d'investir, y compris dans l'amélioration du service ou dans la sécurité.

Pour de nombreux aéroports, cette taxe sera d'autant plus lourde à supporter que la capacité à la répercuter sur les billets des passagers n'existe pas, ce qui est le cas de Nice, en vertu du principe de modération tarifaire qui s'impose à l'ART, chargée d'agréer les redevances.

Au-delà de ce constat, la taxe aura un effet paradoxal puisqu'elle accordera un avantage concurrentiel aux compagnies low cost, basées dans d'autres aéroports que les quatre plus grands du pays, ce qui viendra encore affaiblir des compagnies françaises qui perdent 1 % de parts de marché chaque année.

La DGAC, pour sa part, se trouve en pleine négociation de son nouveau protocole social. Les grèves étant récurrentes chez les contrôleurs aériens, le Sénat a apporté sa contribution en votant une proposition de loi relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic, proposition votée dans des termes identiques par l'Assemblée nationale la semaine dernière.

Cette loi viendra instaurer une forme de prévisibilité dans les déclarations des contrôleurs aériens grévistes, ce qui devrait permettre de mieux calibrer le service minimum. Ce texte a déclenché une grève en réaction la semaine dernière, mais nous avons accompli un effort afin que le dialogue social soit désormais basé sur la réalité du nombre de grévistes et non sur des prévisions erratiques, en vue d'éviter des annulations de dernière minute.

Ce texte reflète, une fois encore, la volonté d'améliorer le dialogue social, les contrôleurs aériens devant encore fournir des efforts de productivité en contrepartie de mesures indemnitaires. Dénommées « protocoles sociaux », ces pratiques semblaient assez atypiques et n'avaient pas fait leurs preuves - c'est un euphémisme. Si les objectifs de performance de ce nouveau protocole social semblent ambitieux, je reste à ce stade dubitatif, et je proposerai à la commission de s'y pencher de plus près.

En outre, le PLF 2024 marque une impulsion budgétaire supplémentaire en faveur d'un domaine que j'avais évoqué dans un rapport d'information en juin dernier, à savoir les grands investissements de la DGAC pour la modernisation du contrôle aérien. J'avais alors souligné l'obsolescence de certaines infrastructures de base, sujet jusqu'alors masqué par les grands programmes informatiques et numériques, mais qui était porteur de difficultés, voire de risques.

Au sein de la DGAC, la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) doit donc maintenir à niveau et moderniser les infrastructures, d'où la nécessité de lui apporter un soutien. Parmi les investissements nécessaires, citons ceux qui visent à assurer la transition du nouvel outil d'assistance du contrôle aérien (4-Flight) vers un système qui pourra être mutualisé avec des partenaires européens de la DSNA.

Un dernier mot sur la lourde dette du Bacea : après avoir culminé à 2,7 milliards d'euros en 2022, elle a amorcé un repli cette année, mais la décrue sera longue et nous devrons rester vigilants.

Je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». En ce qui concerne le programme 159, je suis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. -

Sur le fond, je salue la hausse des crédits alloués au programme 203 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » par rapport à la loi de finances initiale pour 2023. La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable plaide depuis plusieurs années en faveur d'un renforcement des moyens consacrés à la régénération, à la modernisation et au développement de nos infrastructures de transport, en particulier les infrastructures ferroviaires.

Pour autant, ce nouveau PLF n'apporte pas réellement de traduction concrète des annonces du Gouvernement en la matière. Je pense en particulier à la « nouvelle donne ferroviaire » promise par la Première ministre, avec 100 milliards d'euros en faveur du secteur d'ici à 2040 : nous n'en connaissons à ce jour ni les modalités de financement ni la ventilation. En outre, le montant de 1,5 milliard d'euros attendu chaque année d'ici à la fin du quinquennat en matière de régénération et de modernisation ne bénéficie pas d'un plan de financement à ce stade.

Tout laisse à penser - M. Maurey et Mme Carrère-Gée l'ont rappelé dans leur rapport - que la SNCF aura la lourde tâche de trouver les ressources nécessaires. Pire encore, nous n'avons aucune stratégie établie en matière de modernisation du réseau : nous resterons donc les cancres européens sur ce sujet, au même niveau que la Lituanie dans le domaine de la modernisation des infrastructures ferroviaires.

Par ailleurs, j'ai cru comprendre que les crédits du plan d'avenir, des contrats de plan État-région (CPER) et des services express régionaux métropolitains (Serm) ne font qu'un, mais peut-être que mes collègues pourront m'éclairer.

Enfin, vous avez évoqué la nouvelle taxe instituée par l'article 15 du PLF pour 2024, qui permettra à l'Afit France de disposer de nouvelles ressources, ce dont je me félicite en tant qu'administrateur de cet organisme. J'ai cependant pris connaissance d'un amendement du rapporteur général visant à amputer ces ressources potentielles à hauteur de 100 millions d'euros, alors que le modèle économique de l'Afit France est à bout de souffle. Je m'interroge, néanmoins, quant à la solidité juridique du dispositif créé par l'article 15.

En vous remerciant pour votre invitation, je formule le voeu que nos deux commissions travaillent de façon plus étroite et synchronisée pour les prochains PLF, dans l'intérêt exclusif de notre institution.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - S'agissant de la modernisation du réseau ferroviaire, M. Hervé Maurey, qui avait déjà remis un rapport d'information très complet sur le sujet, souligne de nouveau le retard pris dans ce domaine. Je rappelle que la première ligne à grande vitesse (LGV) qui n'a pas été financée en totalité par l'État est la LGV Est, sujet qui fait écho à celui des trains d'équilibre du territoire (TET) : la région Grand Est a en effet proposé récemment, avec d'autres collectivités, de contribuer à hauteur de 50 % aux frais de fonctionnement du rétablissement d'une desserte ferroviaire entre Nancy et Lyon.

Nous devons jouer sur deux tableaux, le second étant celui de la modernisation du réseau routier, aujourd'hui détérioré. Rappelons en effet que certains territoires - c'est le cas de l'Ardèche - sont dépourvus de desserte ferroviaire et que la politique du « tout rail » a ses limites. Si nous souhaitons faire preuve d'équité, nous devrons élaborer, tant pour le réseau routier que pour le réseau ferroviaire, un plan ambitieux sur au moins dix ans, en définissant des priorités et en ne nous bornant pas à parer au plus urgent.

J'ajoute, à propos de la voirie, qu'il faut faire preuve de logique en installant des chaussées drainantes sur les voies dites « vertes » dédiées aux mobilités actives, quitte à ce qu'elles coûtent plus cher et à ce qu'on s'y déplace moins vite. Alors que nous ne sommes déjà pas capables de mettre le bitume approprié sur les voies réservées aux automobilistes, utiliser un fond vert sur les voies dites « vertes » mais bitumées me semble davantage traduire l'adage « tout et son contraire » que la formule « en même temps ».

M. Marc Laménie. - Je remercie l'ensemble des rapporteurs pour leur travail. Le rapport d'information d'Hervé Maurey et de Stéphane Sautarel dédié aux infrastructures ferroviaires a été cité : quelle suite a été donnée aux recommandations issues de cet important travail ?

Concernant la SNCF, je peine à m'y retrouver avec SNCF Réseau, SNCF Voyageurs, Gare & Connexions, etc. Combien d'ETP l'Afit France compte-t-elle ? Ne fait-elle pas doublon avec d'autres organismes ? N'est-il pas envisageable de simplifier la répartition des missions ?

Par ailleurs, existe-t-il un engagement pour les TET ?

J'aimerais aussi obtenir des précisions sur la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance : en quoi consiste-t-elle ? Abondera-t-elle les ressources de l'Afit France ? Comment s'articule-t-elle avec le plan d'investissements de 100 milliards d'euros en faveur du ferroviaire ?

Enfin, sur la partie fluviale, qu'en est-il de la situation de Voies navigables de France (VNF), important opérateur de l'État ? Hormis le tourisme fluvial, plus aucune péniche ne circule dans les Ardennes, qu'il s'agisse de la Meuse ou des canaux.

M. Michel Canévet. - À quoi l'Afit France sert-elle ? Ne serait-il pas temps de la supprimer dans une logique de rationalisation ?

Pour ce qui concerne la SNCF, les opérations de désendettement permettent-elles à l'entreprise de retrouver une meilleure santé financière et de dégager des excédents permettant d'améliorer le réseau, objectif absolument nécessaire ? Cette tendance à renouer avec les excédents pourra-t-elle durer et permettre la remise en état du réseau comme des gares ? Celles-ci ont été affectées par de nombreux dysfonctionnements et doivent faire l'objet d'investissements afin de garantir la fiabilité du réseau.

S'agissant du transport aérien, les liaisons d'aménagement du territoire, aussi nécessaires qu'utiles, pourront-elles être maintenues à l'avenir ? 

M. Bruno Belin. - Qu'est-il prévu dans le PLF 2024 pour soutenir les collectivités locales face au défi que représente l'entretien des ouvrages d'art et des ponts, notamment des ponts orphelins ?

M. Jean-Raymond Hugonet. - Les sujets abordés par les rapporteurs touchent de près mon département, l'Essonne. Nous avons tous en mémoire la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013, qui n'a fait que démontrer l'absolue nécessité de moderniser le réseau.

De la même manière, la présence de l'aéroport d'Orly, à cheval sur les départements de l'Essonne et du Val-de-Marne, m'amène à souligner le caractère incontournable de la modernisation des instruments d'approche.

Mme Florence Blatrix Contat. - Les rapporteurs ont-ils eu, au cours des auditions, des indications au sujet d'une éventuelle loi de programmation qui permettrait de mieux définir les modalités de mise en oeuvre du plan ferroviaire doté de 100 milliards d'euros ?

Je partage également leurs interrogations et leurs inquiétudes quant au financement par SNCF Voyageurs de la régénération du réseau. Sans ouvrir ici le débat sur la gratuité des transports, il faudrait éviter une augmentation du prix des billets telle qu'elle découragerait les usagers d'emprunter les transports collectifs.

Par ailleurs, je me réjouis de votre position relative à l'enquête de la Commission européenne et à la nécessité d'éviter la mise en concurrence du fret, déjà en grande difficulté.

S'agissant du versement mobilité, pourrait-on envisager un déplafonnement ? Certes, la question des marges des entreprises est cruciale, mais nous pourrions sans doute aller un peu plus loin.

Je déplore, enfin, le manque de vision de l'État : alors que la région Auvergne-Rhône-Alpes est concernée au premier chef par le projet de liaison Lyon-Turin - une infrastructure absolument essentielle -, le Gouvernement n'avance pas et ne nous donne aucune visibilité. La question doit pourtant être tranchée très rapidement : il est exclu de reporter ce projet, qui date déjà de plus de trente ans et qui est essentiel, tant pour nos territoires que pour le fret et la décarbonation des transports.

M. Pascal Savoldelli. - Malgré l'excellent travail du rapporteur spécial sur le contrôle et l'exploitation aériens, le passage sur la reprise des négociations avec les partenaires sociaux n'impacte guère, me semble-t-il, les finances publiques.

Ces remarques n'ont pas lieu d'être dans un rapport financier, d'autant que le rapporteur spécial a exprimé une certaine suspicion par rapport à la logique du « donnant-donnant » et ouvre un débat par trop conflictuel par rapport au droit du travail.

Par ailleurs, la fragilité du modèle économique de l'IGN suscite des inquiétudes. Le rapport se félicite de l'augmentation de la part que prend l'État dans le nouveau modèle de l'Institut, mais celui-ci a transféré des missions de service public au secteur privé.

Où va l'argent public ? Pour bien connaître le périmètre de l'activité de l'IGN, dont le siège se trouve à Saint-Mandé, dans mon département, je nourris de sérieux doutes à l'égard de ce nouveau modèle : plus on accentuera la délégation au privé des pans entiers de l'activité, plus on risque de s'orienter, à terme, vers la privatisation de l'organisme.

M. Stéphane Sautarel. - Je remercie à mon tour les rapporteurs pour leur travail, tout en regrettant la continuité de certaines observations et de limites. En particulier, alors que les constats au sujet de la modernisation et de la régénération du réseau ferroviaire sont unanimes et que les annonces ont été faites, les crédits ne sont toujours pas là, ce qui me semble incroyable dans le cadre de la gestion d'une politique publique majeure. Qui plus est, l'appel à SNCF Voyageurs et non pas à SNCF Réseau est une aberration totale qui pose question une nouvelle fois quant au modèle ferroviaire français.

Concernant les AOM, je me félicite de l'initiative du Sénat et de l'affectation de quotas carbone, qui garantissent un droit de suite à nos observations sur les besoins de financement des AOM, qu'il s'agisse d'Île-de-France Mobilités ou des AOM de province. Sans cette initiative sénatoriale, il me semble que le Gouvernement ne nous aurait apporté aucune réponse dans ce PLF pour 2024 : je demande aux rapporteurs de confirmer ce point.

M. Jean-Baptiste Blanc. - L'augmentation des crédits et des ETP du Cerema serait-elle liée, par hasard, à l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN) ? Si oui, comment appréhende-t-il cette nouvelle mission ? Sur le plan de la gouvernance enfin, les élus sont-ils associés à la démarche ? L'impression a pu être donnée que l'intelligence artificielle faisait son entrée au Cerema à des fins de surveillance du sol français.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. - L'Afit France compte un nombre très limité d'emplois, inférieur à une dizaine. L'objectif de cet établissement consiste à avoir une visibilité de long terme sur le financement des infrastructures, ce qui est absolument nécessaire compte tenu des enjeux de la durée des projets.

Il s'agit également d'être en mesure de flécher les ressources via des fonds de concours, ce qui présente un intérêt budgétaire certain : nous savons bien, pour l'avoir tous expérimenté, que des dépenses noyées dans le budget de l'État ont tendance à se diluer, conduisant à ce que les ressources ne soient pas au rendez-vous pour mener à bien les projets.

Aucun élément nouveau n'est, à ma connaissance, à signaler sur les TET cette année, l'ouverture de nouvelles lignes et le renouvellement du matériel roulant devant se poursuivre, avec 3,5 milliards d'euros dédiés à l'acquisition de rames neuves d'ici à 2025.

Madame Blatrix Contat, je partage votre interrogation sur la loi de programmation : le ministre des transports semble y être favorable et cherche, si l'on peut dire, des voies de passage au Parlement. Aucune annonce n'a été faite en dehors des voeux du ministre, alors même qu'une échéance avait été prévue dans le cadre de la loi d'orientation des mobilités.

Concernant le versement mobilité, il est effectivement possible d'aller plus loin, comme c'est le cas en Île-de-France. Pour le reste des AOM en revanche, la proposition du rapporteur général d'affecter 250 millions d'euros provenant du produit des enchères des quotas carbone va déjà dans la bonne direction, car elle présente l'avantage de ne pas favoriser les AOM disposant des bases fiscales les plus élevées.

Au sujet de VNF, son directeur général nous a confirmé que la période de mise sous tension que l'organisme a traversée, avec des objectifs de réduction d'effectifs de 80 personnes à 100 personnes par an qu'il a lui-même qualifiés de « mordants », cède la place à un contrat d'objectifs et de performance révisé, incluant une stabilisation des effectifs sur trois ans. Sur le plan financier, 300 millions d'euros par an sont également garantis sur la même période. Les perspectives de VNF sont donc bien meilleures pour 2024.

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial. - Monsieur Laménie, notre rapport a donné lieu à deux mesures concrètes : d'une part, le fait que les crédits du fonds vert puissent aller davantage vers des actions de mobilité, ce qui n'était pas le cas précédemment ; d'autre part, les 250 millions d'euros issus des ventes de quotas carbone font suite à notre travail. L'ensemble de nos recommandations n'a évidemment pas été retenu, mais l'important est bien d'amorcer des mesures et dispositifs, ce qui est positif compte tenu de l'équilibre général des finances.

Par ailleurs, monsieur Canévet, le Gouvernement affiche sa volonté de faire reposer l'essentiel du financement prévisionnel de la régénération du réseau sur SNCF Mobilités, ce qui ne nous paraît pas très sain. Un prélèvement sur les résultats de cette entité est prévu cette année et atteindrait désormais plus de 1 milliard d'euros, en augmentation de près de 500 millions d'euros par rapport à ce qui était prévu initialement.

Ce mode de financement est préoccupant : comme l'ont exprimé des représentants de la SNCF, cet argent n'est par définition pas consacré au renouvellement du matériel, notamment dans les trains de nuit, ni à la maîtrise du prix du billet, qui est pourtant un aspect essentiel dans la transition écologique et dans le choix de modes de transport alternatifs à l'automobile. Comme nous l'avons déjà souligné par le passé, le mode de financement global du système ferroviaire mériterait donc d'être revu.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - Monsieur Canévet, ne cachons pas le fait que les perspectives sont plutôt sombres pour les lignes d'aménagement du territoire, dont le déficit naturel est comblé par l'État et par les collectivités - principalement les régions, mais aussi parfois les départements - afin de les maintenir.

Les difficultés de ces lignes sont réelles, avec une augmentation des coûts liée à une baisse du trafic et de la fréquentation, notamment sur les clientèles d'entreprise. Très fortement dégradé, le modèle des lignes d'aménagement du territoire appellera une mobilisation de l'État aux côtés des collectivités, des choix n'étant malheureusement pas à exclure. Ces lignes remplissent pourtant, dans le cas des départements excentrés, une fonction majeure, et le train ne peut pas toujours s'y substituer.

Monsieur Belin, 20 millions d'euros viennent d'être ajoutés via un amendement aux 130 millions d'euros dédiés à l'entretien des ponts, au titre du projet de loi de finances de fin de gestion. Il s'agit d'un programme important pour le Cerema, particulièrement suivi par son directeur général.

Par ailleurs, je tiens à rassurer monsieur Savoldelli, des crédits sont bien prévus pour les protocoles sociaux de la DGAC. Le précédent protocole, sur la période 2016-2019, a coûté 50 millions d'euros au budget annexe, soit un montant non négligeable. Regardons les réalités de ce secteur en face : les métiers liés au contrôle aérien, qu'il s'agisse des contrôleurs eux-mêmes ou des métiers support tels que les électroniciens, sont difficiles, puisqu'il est question d'une mission régalienne de sécurité, qui implique une mobilisation 24 heures sur 24 et une responsabilité considérable.

Pour autant, nous pouvons faire des comparaisons avec nos voisins européens. Certes, les contrôleurs sont moins bien payés qu'ailleurs, mais ils sont également moins productifs, la France étant de plus championne d'Europe en termes de retards et de nombre de jours de grève. Je maintiens que la loi récemment votée vise à améliorer la situation, en respectant à la fois les contrôleurs et le dialogue social.

Lesdits contrôleurs y trouvent aussi une contrepartie avec une meilleure prévisibilité, puisqu'ils ne seront plus réquisitionnés abusivement comme ils l'étaient depuis des années : le service minimum sera ainsi revu en abaissant les niveaux de réquisition. De plus, les contrôleurs seront prévenus bien plus tôt de leur réquisition, à savoir l'avant-veille et non plus quelques heures avant, ce qui me semble être un point d'équilibre.

Cela étant dit, les problématiques d'organisation du transport aérien et d'adaptation au trafic restent posées et doivent être traitées par le dialogue social. Les protocoles sociaux me semblent mériter un examen : je n'ai pas connaissance, dans les autres services de l'État, d'un dispositif en vertu duquel une réorganisation entraîne le versement de primes.

Les moyens de parvenir à un équilibre et à une forme de « donnant-donnant » doivent être identifiés pour moderniser le secteur, sous peine de rencontrer des difficultés à l'avenir. D'autres pays européens ont ainsi décidé de ne pas conserver le contrôle aérien dans le giron public, je souhaite au contraire qu'il y demeure, mais en traitant les problèmes par le dialogue, je pense que les contrôleurs y sont particulièrement attentifs.

Concernant l'IGN, ne nous méprenons pas : je ne me félicite pas du changement de modèle, j'estime plutôt qu'il s'agissait d'une nécessité alors que l'IGN traversait une crise existentielle et que certains plaidaient pour sa disparition. Sa refondation passe par un travail d'investissements visant à lui redonner tout son rôle d'opérateur central de l'État en matière d'information géographique.

Le trou d'activité pressenti pour 2024 se confirme. Nous ne l'avons pas complètement comblé, mais la subvention de 4 millions d'euros votée hier en commission mixte paritaire reflète le soutien du Sénat à l'établissement. S'il faudra suivre la manière dont ce nouveau modèle se déploie, les ministères ne devront pas, pour leur part, lui confier d'autres missions sans actualiser les coûts. Je crois que l'IGN est engagé sur la bonne voie et doit encore affronter une épreuve de vérité budgétaire et financière. Nous avons en tout état de cause besoin d'un opérateur public dans cette matière centrale.

M. Jean-Baptiste Blanc a évoqué, à propos du Cerema, un « effet ZAN » dans le surcroît d'activité de l'organisme. Je ne dispose d'aucun élément en ce sens, mais souligne que le directeur général a mené un important travail de remobilisation des équipes. Le Cerema bénéficie d'une confiance et d'une attractivité nouvelles, y compris auprès des collectivités qui y font leur entrée, dans le cadre du schéma de régie quasi conjointe que nous avons adopté ici même.

En termes de gouvernance, les élus prennent toute leur place au conseil de surveillance et au conseil d'administration du Cerema, dans un nouvel équilibre. Ce type d'établissements a souvent fait office de variable d'ajustement pour l'administration centrale, qui baissait davantage leurs crédits que la diminution qu'elle s'appliquait à elle-même. Nous avons essayé de stabiliser ces établissements, qui sont autant d'outils de l'État utiles au service des collectivités et de la mobilité.

Enfin, M. Hugonet a entièrement raison de plaider en faveur d'une modernisation des systèmes d'approche en région parisienne et autour d'Orly. Des annonces ont été faites au sujet de la descente continue face à l'ouest, enjeu majeur pour les riverains et pour les collectivités voisines puisqu'il s'agit de mieux lutter contre les nuisances sonores aéroportuaires. Le sujet auquel sont confrontés le ministère des transports et la DGAC reste complexe : si l'on choisit de resserrer les faisceaux, le nombre de territoires touchés sera moindre, mais au risque de faire des perdants.

Article 35

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-26 (FINC.1) vise à « réaffecter » la suppression de la réduction de la TICFE en première partie par la création de chèques énergie exceptionnels pour les déciles 1 à 6. Si le montant est à première vue considérable, le dispositif permet, dans sa globalité, de générer 1 milliard d'euros d'économies.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. - Le sixième décile correspond à des revenus annuels d'environ 27 000 euros, me semble-t-il.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Il s'agit bien d'une mesure de redistribution ciblant les classes moyennes et populaires. J'ajoute que seuls 25 % des crédits ouverts pour le chèque fioul et le chèque bois ont été consommés.

L'amendement II-26 (FINC.1) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-27 (FINC.2) vise à rehausser le montant du fonds Barnier de 30 millions d'euros afin d'engager les travaux permettant de prévenir les futurs épisodes d'inondations.

L'amendement II-27 (FINC.2) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 50

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article acte la réforme de MaPrimeRénov', notamment du renforcement des contrôles et de la lutte contre la fraude.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50.

Article 50 bis (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Emporté par son élan visant à étendre MaPrimeRénov' à Saint-Pierre-et-Miquelon, le Gouvernement a retenu deux articles très similaires dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale : je vous propose de ne conserver que l'article 50 bis, mieux rédigé.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50 bis.

Article 50 ter (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-28 (FINC.3) a pour objet la suppression de cet article, quasi identique à l'article 50 bis.

L'amendement II-28 (FINC.3) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat de supprimer l'article 50 ter.

Article 51

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à prolonger le congé de reconversion mis en place dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 51.

Article 52

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-29 (FINC.4) vise à supprimer les alinéas relatifs à la révision de la répartition du complément de prix Arenh : en effet, adopter une telle modification au débotté pourrait avoir des effets sur le fonctionnement des marchés qui ne seraient pas nécessairement au bénéfice des consommateurs. Ce point est corroboré par l'analyse de la CRE.

L'amendement II-29 (FINC.4) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 52, sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 52 bis (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à sécuriser le dispositif de leasing social en l'inscrivant dans la loi.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 bis.

Article 52 ter (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article a pour objet d'étendre le fonds Barnier à certaines mesures prises par les agences de la zone des 50 pas géométriques située en outre-mer, c'est-à-dire la zone littorale.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 ter.

Article 52 quater (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-30 (FINC.5) vise à garantir que le Gouvernement présente au Parlement un bilan de l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation » (Mirapi) à la date à laquelle le rapport d'évaluation aurait dû être initialement rendu, c'est-à-dire en mars 2024.

L'amendement II-30 (FINC.5) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 52 quater, sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 52 quinquies (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'article vise, sans la nommer, uniquement la centrale biomasse de Gardanne, qui bénéficiait d'un dispositif d'obligation d'achat. Après avoir choisi de le suspendre au regard de l'évolution des prix de l'électricité afin de profiter de la rente fournie par le marché, ce site souhaite de nouveau en bénéficier.

Le Gouvernement lui donne ce droit et vient modifier les clauses du contrat initial en prévoyant désormais une indexation des coûts sur l'inflation. Si ce choix me semble scandaleux, notamment d'un point de vue environnemental, il existe un enjeu social autour des 90 emplois de cette centrale, dénuée de toute pertinence écologique. Avis favorable, mais uniquement sur le volet social.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 quinquies.

Article 52 sexies (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à contrecarrer la décision du Conseil constitutionnel du mois d'octobre dernier et à inscrire dans la loi le déplafonnement intégral et sans condition des contrats de complément de rémunération.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 sexies.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction du budget

- M. Laurent Pichard, sous-directeur à la direction du budget - quatrième sous-direction budgets des transports, de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, de la transition énergétique, de l'égalité des territoires, et du logement et de la ville ;

- M. Frédéric de CARMOY, chef du bureau des transports ;

- M. Nicolas FIEVET, adjoint au chef de bureau.

Direction de la législation fiscale (DLF)

- M. Vincent MAZEAU, chef du bureau D2 - fiscalité énergétique et environnementale et autres taxes sur le chiffre d'affaires ;

- M. Damien GIAMPAOLI, chef de section D2A au bureau D2 ;

- Mme Clara LANDAIS, rédactrice au bureau D2 ;

- M. Daniel CHOUCHENA, adjoint au chef de bureau au sein de la sous-direction SDA de la DGAC au MTEC.

Direction générale de l'aviation civile (DGAC)

- M. Damien CAZÉ, directeur général ;

- M. Jean GOUADAIN, directeur de cabinet du directeur général ;

- M. Marc BOREL, directeur du transport aérien ;

- M. Pierre GIRARD, sous-directeur des études, des statistiques et de la prospective à la direction du transport aérien ;

- M. Édouard GAUCI, adjoint à la secrétaire générale ;

- M. Florian GUILLERMET, directeur des services de la navigation aérienne.

Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) 

- M. Sébastien SORIANO, directeur général ;

- Mme Cécile BORGES LEMARIÉ, secrétaire générale adjointe.

Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA)

- M. Gilles LEBLANC, président.

Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) 

- M. Pascal BERTEAUD, directeur général.

Météo-France

- Mme Virginie SCHWARZ, présidente directrice générale ;

- M. Philippe GONZALEZ, secrétaire général.

Fédération nationale de l'aviation et de ses métiers (FNAM)

- M. Pascal de IZAGUIRRE, président ;

- M. Laurent TIMSIT, délégué général.

Air France

- Mme Anne-Marie COUDERC, présidente.

Union des aéroports français (UAF)

- M. Nicolas PAULISSEN, délégué général.

Aéroports de Paris (ADP)

- M. Edward ARKWRIGHT, directeur général ;

- M. Mathieu CUIP, directeur des affaires publiques ;

- M. Paul BEYOU, responsables des affaires publiques nationales.

Aéroports de la Côte d'Azur

- M.  Franck GOLDNADEL, président du directoire.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2024.html


* 1 Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » porte les subventions pour charges de service public (SCSP) du centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Céréma), de l'institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo France.

* 2 Rapport d'information n° 840 (2020-2021) de M. Vincent Capo-Canellas, fait au nom de la commission des finances, déposé le 22 septembre 2021.

* 3 Le montant réel attendu par Météo-France après déduction de la réserve de précaution étant quant à lui de 196 millions d'euros.

* 4 Hors contribution de la France à l'organisation EUMETSAT.

* 5 Dont 10 ETPT n'étaient liés qu'à un recalibrage technique avec un effet de vase communiquant entre les enveloppes hors plafond et sous-plafond.

* 6 Dont 17 ETP consacrés à la prévention du risque de feux de forêts et 6 ETP pour l'installation de nouvelles bouées au large de la Corse suite aux évènements dramatiques survenus à l'été 2022.

* 7 À hauteur de 12 ETP.

* 8 Tous types confondus.

* 9 Permettant à l'établissement de réaliser une économie de 42 ETP.

* 10 Régie par le décret n° 2008-368 du 17 avril 2008.

* 11 Elles concernent principalement des opérations de modernisation, de jouvence et de maintenance des infrastructures techniques.

* 12 Le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 précise les statuts et le fonctionnement de cet établissement public administratif.

* 13 Les géodonnées socles sont les données « primaires » de base qui servent de support à toute conception de services d'information géolocalisée.

* 14 Tels que les différentes couches qui composent le référentiel à grande échelle (RGE), la base de données de précision décamétrique dite BD Carto, la base de données géodésique (BDG), la BD Topage, le registre parcellaire graphique (RPG) pour les besoins agricoles ou encore le fond cartographique au 1/25 000e dit Scan 25.

* 15 Rapport d'information n° 17 (2022-2023) de M. Vincent Capo-Canellas, fait au nom de la commission des finances, novembre 2022.

* 16 Ce document correspond aux anciens contrats d'objectifs et de moyens et constitue le volet financier du contrat d'objectifs et de performance (COP) de l'IGN.

* 17 C'est-à-dire, en tenant compte de la réserve de précaution.

* 18 Sans compter les 60 ETPT qui contribuent temporairement à la mission « RPG îlots » du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

* 19 Intelligence artificielle, programmation agile, data science, altimétrie 3D, géovisualisation, gestion de projets innovants, animation de communautés, infrastructures et services numériques, etc.

* 20 « Le rôle du Cérema en matière d'appui aux collectivités territoriales : renforcer son activité au bénéfice des collectivités locales », juin 2021.

* 21 816 collectivités ayant effectivement adhérées au 24 octobre 2023.

* 22 Constitué du quotient entre résultat net et le chiffre d'affaires.

* 23 Décision n° 2023-041 du 29 août 2023 relative à la demande d'homologation des tarifs des redevances aéroportuaires applicables aux aéroports de Nice-Côte d'Azur et Cannes-Mandelieu à compter du 1er novembre 2023.

* 24 Soutien public à la filière aéronautique : des aides d'urgence efficaces, une transformation à accélérer, rapport d'information de M. Vincent Capo-Canellas, fait au nom de la commission des finances n° 538 (2021-2022), 23 février 2022.

* 25 Cet APP vise à soutenir des innovations susceptibles d'alimenter rapidement le marché de l'aviation bas carbone (hors production de CAD), comme les avions légers électriques ou hybrides. Il concerne prioritairement les projets permettant un passage à l'échelle industrielle rapide en vue d'une production et d'une commercialisation à grande échelle d'ici 2030.

* 26 Voir le détail dans les développements infra relatifs à ce programme.

* 27 100,5 millions d'euros dont 97,5 millions d'euros pour la SCSP à proprement parler.

* 28 Conformément à la nouvelle rédaction de l'article 18 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) adoptée dans le cadre de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

* 29 Ces redevances ont été instaurées par l'article 120 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 codifié à l'article L. 611-5 du code de l'aviation civile.

* 30 Depuis le 1er janvier 2016, les recettes de TAC sont intégralement affectées au BACEA.

* 31 Destinée à couvrir le coût des missions d'intérêt général assurées sur l'aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse par la DGAC, cette taxe est acquittée par les passagers et le fret à l'arrivée et au départ de cette plateforme.

* 32 L'ancienne taxe de solidarité sur les billets d'avion.

* 33 L'ancienne taxe d'aéroport.

* 34 Prévue à la section 4 du chapitre II du titre II du livre IV de la partie législative du code des impositions sur les biens et services (CIBS).

* 35 Le niveau des frais de gestion correspond à 0,5% du produit des taxes concernées.

* 36 Ainsi que dans le Tome I de l'annexe au PLF 2024 sur l'évaluation des voies et moyens.

* 37 Le régime juridique de ce tarif, qui correspond à l'ancienne taxe d'aéroport, est déterminé à l'article L. 422-23 du même code.

* 38 Pour « Explosive Detection System ».

* 39 Plus de 70 % des agents de la DGAC appartiennent à la filière technique et opérationnelle : ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA), ingénieurs électroniciens des systèmes de la sécurité aérienne (IESSA) et techniciens des études et d'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC). La DGAC comprend également, entre autres, des adjoints d'administration, des ouvriers d'État ou bien encore des ingénieurs des études et d'exploitation de l'aviation civile (IEEAC).

* 40 Consacré à « la politique RH de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) ».

* 41 Rapport d'information n° 758 (2022-2023) fait au nom de la commission des finances sur les programmes de modernisation de la navigation aérienne 4-Flight, Co-Flight et Sysat par M. Vincent Capo-Canellas, juin 2023.

* 42 Le rapporteur spécial s'était alors interrogé sur le caractère systématique des dérives financières et en termes de délais de chacune des opérations de modernisation technique de la DSNA. Il avait notamment pointé de profondes lacunes en matière de pilotage des grands programmes d'investissements. Les dysfonctionnements de la gestion des opérations de modernisation avaient en particulier pour origine une gouvernance sous optimale, en partie liée aux caractéristiques de la direction de la technique et de l'innovation (DTI) de la DSNA.

* 43 Retards du contrôle aérien, la France décroche en Europe, rapport d'information n° 568 (2017-2018) réalisé au nom de la commission des finances du Sénat par Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

* 44 Air traffic control (contrôle aérien).

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