B. L'ABSENCE DE SOLUTION SIMPLE A LA SURPOPULATION CARCERALE

Dans le cadre de cet avis budgétaire la commission souhaite procéder à quelques constats. Le premier est qu'il est évident que le plan 15 000 n'est pas la seule solution à la surpopulation carcérale. Il a d'abord pour finalité de permettre de remédier à la vétusté des établissements actuels en permettant de déplacer les prisonniers pour réhabiliter ou détruire et reconstruire les établissements existants. Ceci devenant particulièrement urgent pour l'Île-de-France.

Le second constat est que les alternatives à la prison ne viennent pas se substituer à la prison mais sont réservées à un autre type de population. Le développement des alternatives à la prison est nécessaire mais ne vient pas réduire la population carcérale. Le rapport rendu en octobre 2023 par la Cour des comptes démontre que le profil des prisonniers tend de plus en plus à la concentration de profils multi-réitérants marqués par les précarités sociale et sanitaire, et notamment par des troubles mentaux. La surpopulation carcérale résulte notamment d'un déficit chronique de lieux d'accueil et de traitement dédiés à la psychiatrie. Si l'on compare la situation de la France à celle des autres pays de l'OCDE, on constate que ce sont souvent les pays qui ont le plus fort taux de prononcé de peines alternatives qui ont également le plus fort taux d'incarcération.

Troisième constat, les mécanismes automatiques de sortie de prison ne sont pas pleinement satisfaisants parce qu'ils font peser sur les services pénitentiaires un contraintes guidée par les chiffres au détriment des projets de réinsertion. Il est trop tôt pour faire le bilan de la libération sous contrainte voulue par le Garde des Sceaux mais le constat fait par les syndicats et les services pénitentiaires d'insertion et de probation est d'abord celui d'une embolie des greffes pénitentiaires pour gérer cette mesure qui repose finalement sur le seul critère que le détenu dispose d'un logement.

Dernier constat, la surpopulation carcérale provient du durcissement de la réponse pénale et de l'augmentation de la durée moyenne des peines. Ce point dépasse le cadre de mon avis mais doit nous conduire à nous interroger sur la politique pénale et la manière dont elle est définie.

La surpopulation carcérale pèse enfin sur les perspectives de réinsertion des détenus. Je m'inscrits dans la lignée des rapports d'Alain Marc pour noter la faiblesse de la culture d'évaluation en la matière, qui fait que nous progressons de manière empirique et un peu par tâtonnements. La contrôleure générale des lieux de privation de liberté a fait part lors de son audition de l'exemple allemand : dans ce pays, 70 % des détenus travaillent, contre 28 % France. Or, la surpopulation empêche l'accès au travail et à toutes les activités, et détourne même de leur vocation les dispositifs de réinsertion comme les structures d'accompagnement vers la sortie (SAS), dont la contrôleure générale a indiqué qu'elles sont actuellement occupées par des détenus qui ne sont pas proches de la sortie à seule fin de soulager les maisons d'arrêt.

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La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Administration pénitentiaire » inscrits au projet de loi de finances pour 2024.

Ces crédits seront examinés en séance publique le 11 décembre 2023.

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