II. LE PROGRAMME 104 « INTÉGRATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ FRANÇAISE » 

A. DERRIÈRE UNE BAISSE EN TROMPE L'OEIL, UNE TRÈS LÉGÈRE AUGMENTATION DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'INTÉGRATION, DONT LA MISE EN OEUVRE A ÉTÉ DÉFINIE AUTOUR DU CONTRAT D'INTÉGRATION RÉPUBLICAINE (CIR)

L'année 2020 a représenté la première année de mise en oeuvre des mesures d'intégration des étrangers en situation régulière qui résultent initialement de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France45(*). Cette dernière a réformé le dispositif d'accueil et d'intégration des étrangers accédant pour la première fois au séjour en France et désireux de s'y installer durablement en créant un parcours personnalisé d'intégration républicaine d'une durée de 5 ans et en remplaçant l'ancien « contrat d'accueil et d'intégration » par un « contrat d'intégration républicaine ».

Ce contrat est conçu comme la première étape du parcours d'intégration personnalisé de l'étranger en France. Signé par celui-ci et par le représentant de l'État, il consacre des engagements réciproques, en particulier l'apprentissage du français et l'appropriation des valeurs de la République. Fondé sur une approche individualisée en fonction des besoins de l'étranger, le CIR vise à renforcer ses chances d'intégration dans la société française. Un entretien d'accueil approfondi par les services de l'OFII permet d'établir un diagnostic personnalisé. Il donne lieu à la prescription de formations obligatoires et à une orientation vers les services publics de proximité en fonction des besoins. Ces formations conduisent à une progression du niveau de langue, conditionnant la délivrance, à l'échéance de la carte de séjour temporaire, d'une carte de séjour pluriannuelle.

L'article 48 de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie46(*) a précisé et enrichi le contenu du contrat d'intégration républicaine (CIR), notamment :

- en indiquant que la formation en langue française dispensée dans le cadre du CIR est suffisante pour permettre à l'étranger primo-arrivant d'occuper un emploi et de s'intégrer dans la société française, et que cette formation peut donner lieu à une certification standardisée permettant d'évaluer le niveau de langue de l'étranger. On peut y rattacher le doublement du volume des formations linguistiques proposées et le choix de dédier un module spécifique, d'une durée de 600 heures, aux stagiaires non lecteurs, non-scripteurs, décidé par le comité interministériel à l'intégration du 5 juin 2018 ;

en ajoutant au contenu du CIR un conseil en orientation professionnelle et un accompagnement destiné à favoriser l'insertion professionnelle de l'étranger. Un entretien de fin de CIR est destiné à faire à la fois le bilan des formations suivies lors de celui-ci et le bilan de la situation du signataire vis-à-vis de l'emploi afin de l'orienter, selon sa situation, vers l'acteur pertinent au sein du service public de l'emploi (selon les cas, Pôle Emploi, missions locales, Cap Emploi, APEC), et de faciliter la prise d'un rendez-vous avec ce service, auprès duquel le primo-arrivant bénéficiera d'un entretien approfondi.

Puis, le comité interministériel à l'immigration et à l'intégration (C3I) du 6 novembre 2019 a renforcé le volet emploi de cette politique, alors qu'une expérimentation de formation linguistique à visée professionnelle est mise en oeuvre depuis septembre 2022 en collaboration avec les régions.

En outre, le partenariat avec les collectivités territoriales a été renforcé par la mise en place des contrats territoriaux d'accueil et d'intégration (CTAI), dispositif contractuel entre l'État et les collectivités territoriales pour l'intégration des étrangers primo-arrivants résidant sur leur territoire. En 2022, dans la même logique, a en outre été lancé le programme d'accompagnement global et individualisé des réfugiés (AGIR) par instruction conjointe du 25 avril 2022 de plusieurs ministres (intérieur, citoyenneté, travail, insertion, logement, etc.). Déployé en 2022 dans 26 premiers départements, il doit l'être dans 26 départements supplémentaires en 2023, et son déploiement se poursuivrait en 2024. Au 31 août 2023, le dispositif est opérationnel dans 40 départements. Ce dispositif permet la constitution d'un guichet unique de l'intégration des bénéficiaires de la protection internationale par l'accès à l'emploi et au logement. Fin août 2023, plus de 8 300 personnes réfugiées étaient ainsi individuellement accompagnées par le programme AGIR. L'opérateur AGIR a la charge, sous l'autorité du préfet, d'assurer la coordination entre tous les dispositifs et programmes existants dans le département.

Dans un contexte de crise sanitaire, la mise en oeuvre de ce nouveau parcours d'intégration a d'abord été ralentie. La suspension de l'accueil au sein des organes de l'Ofii et des formations linguistiques en présentiel ont notamment freiné les parcours d'intégration. Le rythme de signature des contrats s'en est également ressenti puisque seuls 78 764 CIR ont été signés en 2020, contre 100 000 environ en 2019.

En 2021, les parcours d'intégration ont repris une configuration plus normale. 109 000 CIR ont ainsi été signés, tandis que les formations civiques et linguistes ont repris à un rythme normal. En 2022, 110 080 CIR ont été signés, soit une légère hausse de 1,0 %.

Pour 2024, les crédits du programme 104, qui portent la majeure partie des crédits destinés à l'intégration au sein de la mission, sont en baisse apparente aussi bien en AE (- 111,9 millions d'euros, soit - 20,6 %) qu'en CP (- 112,0 millions d'euros, soit - 20,6 %) par rapport à 2023. Comme mentionné supra, ces baisses sont néanmoins attribuables à la suppression, en 2024 de l'action n° 15 « Accompagnement des réfugiés ». Dans le cadre du PLF pour 2022, cette action avait déjà connu un transfert sortant vers l'action n° 12 « Intégration des étrangers primo-arrivants » du même programme 104. À l'occasion du budget pour 2024, la suppression de l'action n° 15 aboutit notamment à transférer les crédits relatifs à l'intégration des réfugiés via les centres provisoires d'hébergement (CPH) au programme 30347(*) pour un montant de 126,2 millions d'euros en AE=CP.

En neutralisant cette évolution de périmètre, le programme 104 voit en réalité ses crédits augmenter tant en AE, de 2,6 % (+ 14,3 millions d'euros) qu'en CP, de 2,6 % (+ 14,2 millions d'euros). Cette hausse est imputable quasi-exclusivement à l'action n° 12 « Intégration des étrangers primo-arrivants ».


* 45 Loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.

* 46 Loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie.

* 47 Voir supra.

Partager cette page