B. LA PERMANENCE PROBLÉMATIQUE DE DIFFICULTÉS CONNUES

Si l'effort réalisé sur les moyens humains devrait permettre une amélioration concrète des conditions de travail des personnels comme du service rendu au justiciable, les rapporteures ne peuvent que constater que certaines difficultés demeurent irrésolues malgré la hausse des moyens.

1. Le numérique : chantier sisyphéen de la Chancellerie

La hausse bienvenue, de l'ordre de 3 %, hors titre 2, dévolus à l'informatique ministérielle, permettra d'atteindre 272,2 millions d'euros en crédits de paiement. Le rattrapage entamé par le plan de transformation numérique pour 2018-2022 se poursuit donc dans le cadre d'une nouvelle programmation pour 2023-2027, dont les objectifs, au nombre de 9, sont rappelés dans le rapport annexé à la LOPJ 2023-2027. Il est d'ailleurs surprenant de constater que ces axes sont réduits au nombre de 6 dans le PAP 2024.

En toute hypothèse, les rapporteures appellent l'attention sur la nécessaire priorisation de tels objectifs, dont le nombre et la diversité ne doivent pas nuire à la poursuite de chantiers essentiels tels que la mise en service ou la refonte d'applicatifs, dont Portalis, la procédure pénale numérique (PPN) et Cassiopée. À cet égard, la poursuite de l'objectif « zéro papier » à l'horizon 2027, parfois jugé irréaliste par certaines personnes auditionnées par les rapporteures, ne doit pas mobiliser des ressources qui seraient mieux employées dans la conduite de la transformation numérique du ministère.

2. L'immobilier judiciaire : source de frustration persistante pour les personnels

Alors que la hausse des effectifs sur la période 2023-2027 devrait mettre les juridictions sous tension sur le plan immobilier, les crédits de paiement dévolus aux investissements liés à la nouvelle programmation immobilière 2023-2027 connaissent une hausse bienvenue pour atteindre 138,15 millions d'euros. Les rapporteures relèvent avec satisfaction que le montant alloué aux prises à bail, qui dénotent parfois un défaut de vision de long terme, diminue en AE de 58,3 millions d'euros en 2023 à 15,6 millions d'euros en 2024.

Malgré cet effort, les rapporteures ont constaté lors de leurs auditions que l'immobilier judiciaire demeure une source de frustration pour les personnels. D'une part, le défaut d'anticipation de la Chancellerie est régulièrement souligné. Ainsi, l'exemple du nouveau palais de justice de Lille, décrit comme déjà sous-dimensionné alors qu'il n'a pas encore été livré, apparaît particulièrement préoccupant. D'autre part, les personnes entendues par les rapporteures ont relevé l'inadaptation de certains projets en raison d'un défaut d'association des personnels concernés en amont.

À cet égard, il est apparu lors des auditions que la réhabilitation de l'immobilier judiciaire est encore très attendue par les personnels en juridiction. Au demeurant, un tel effort permettrait au ministère d'atteindre ses objectifs en matière de transition énergétique, alors qu'il indique aujourd'hui que la performance énergétique prévisionnelle du parc occupé est susceptible d'être affectée par le réchauffement climatique et la suroccupation7(*).

Les rapporteures appellent donc la Chancellerie à se doter d'une stratégie cohérente en matière immobilière, permettant l'association des usagers à la formulation des projets et l'adaptation de ces derniers aux recrutements en cours.

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Au bénéfice de ces observations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Justice judiciaire », « Accès au droit et à la justice », « Conduite et pilotage de la politique de la justice » et « Conseil supérieur de la magistrature » de la mission « Justice », inscrits au projet de loi de finances pour 2024.


* 7 Voir le PAP 2024, p. 233.

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