N° 850

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 juillet 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) relatif à la consigne pour réemploi et recyclage sur les emballages,

Par Mme Marta de CIDRAC,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin, secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen.

AVANT-PROPOS

Il y a plus de trois ans, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire1(*) (« AGEC ») était promulguée.

Le texte, largement voté au Sénat et à l'Assemblée nationale après plusieurs mois d'un intense travail parlementaire, jetait des bases ambitieuses engageant notre pays vers la sortie d'une société de consommation fondée sur le « tout jetable ».

Au Sénat, première assemblée saisie, l'examen en commission de l'aménagement du territoire et du développement durable puis en séance publique avait transformé le texte initial, court et principalement technique, en une loi riche, abordant, parfois de manière novatrice, de nombreuses thématiques : gaspillages alimentaire et non-alimentaire, lutte contre le suremballage, lutte contre les dépôts sauvages, amélioration de l'information du consommateur, création d'un fonds de réemploi et d'un fonds de réparation, réduction de la production des plastiques à usage unique, exemplarité de l'État en matière d'économie circulaire...

Sur ces nombreuses thématiques, un grand nombre d'apports sénatoriaux avait été conservé au terme de la navette parlementaire. Les voir aujourd'hui figurer dans notre droit et observer leur mise en oeuvre constitue pour notre assemblée et notre commission un motif de satisfaction et de fierté. Ce travail nous engage également à en suivre l'application, afin que l'ambition qui fut la nôtre ne soit pas remise en cause par le pouvoir réglementaire.

*

Si une large majorité des problématiques avait donc fait l'objet d'un échange constructif et consensuel, la question de la consigne pour recyclage ou réemploi sur les emballages avait cristallisé les débats et les divergences entre le Sénat d'une part, et l'Assemblée nationale et le Gouvernement, d'autre part.

En la matière, derrière les dispositions du texte initial particulièrement floues, l'intention gouvernementale était précise : l'instauration d'une consigne pour recyclage sur les bouteilles en plastique, présentée par le Gouvernement comme l'unique solution pour atteindre l'objectif européen d'un taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson de 77 % en 2025 et de 90 % en 2029.

Au Sénat, cette proposition avait fait l'objet d'une opposition transpartisane dont l'unanimité doit encore être soulignée. Les groupes politiques de notre assemblée avaient tout d'abord pointé la double régression écologique du projet gouvernemental, tendant à « monétiser » un geste de tri, en principe désintéressé, et à pérenniser la bouteille en plastique à usage unique - en contradiction avec l'objectif de réduire de 50 % d'ici à 2030 le nombre de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson mises sur le marché, aujourd'hui inscrit dans la loi.

Nous avions également déploré la double peine pour le citoyen. La mise en place de la consigne pour recyclage des bouteilles PET aurait en effet créé deux systèmes de collecte concurrents : le premier sur l'ensemble des emballages plastiques, financé par les contribuables via la collecte séparée, le second sur les seules bouteilles plastiques, financé par les consommateurs via la consigne.

Face à ce projet, nous avions opposé une autre piste, celle de la consigne pour réemploi sur les emballages en verre, qui nous semblait doublement vertueuse, d'un point de vue environnemental et économique.

Au terme du débat parlementaire et des négociations entre les deux chambres, une position de compromis avait été trouvée : sur le fondement de bilans annuels de l'Ademe, le Gouvernement pourrait définir, après la publication du bilan réalisé en 2023, les modalités de mise en oeuvre d'un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi, après évaluation des impacts économiques et environnementaux et concertation avec les parties prenantes, notamment les collectivités en charge du service public des déchets, et à condition de ne pas avoir atteint les performances cibles sans ces dispositifs.

La loi « Climat et résilience »2(*), adoptée quelques mois plus tard et promulguée en août 2021, n'avait pas remis en cause cet équilibre. Avec l'accord et, parfois à l'initiative de notre commission, elle avait renforcé le volet réemploi des emballages de la loi « AGEC », en rappelant notamment la possibilité de mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi pour les emballages en verre, sur le fondement d'un bilan environnemental global attendu en 2023.

*

La loi « AGEC » a donc fait de l'année 2023 une année charnière pour le devenir de notre politique de prévention et de gestion des déchets d'emballages, non seulement en raison du calendrier fixé pour la réalisation des analyses sur les consignes pour recyclage ou réemploi, mais aussi du fait du calendrier de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) sur les emballages ménagers et de la toute nouvelle filière REP sur les emballages professionnels3(*) - dont les cahiers des charges et les agréments de six ans sont attendus d'ici la fin de l'année.

Le lancement en janvier d'une concertation portant sur la mise en place éventuelle d'un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi constituait à cet égard une étape d'application attendue de la mise en oeuvre de la loi « AGEC ».

Toutefois, le législateur avait exigé la remise préalable d'un bilan par l'Ademe avant le début de cette concertation avec les parties prenantes. En commençant celle-ci sans disposer des éléments d'expertise nécessaires, le Gouvernement a manifestement fait le choix d'agir dans le désordre, en laissant planer un doute quant à ses intentions.

Cette remise en cause du calendrier, contraire à l'esprit de la loi votée en 2020, est d'autant plus dommageable que d'autres volets du texte ont depuis pris du retard (mise en place des filières REP, déploiement de la collecte « hors foyer »...), en raison notamment de la crise sanitaire.

Dans ce contexte, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a décidé de lancer, en avril dernier, une mission d'information flash relative à la consigne pour réemploi et recyclage sur les emballages, avec deux objectifs clairs : exercer sur la concertation engagée une vigilance renforcée et s'assurer que le débat engagé soit le plus complet possible.

*

Ce rapport reflète les préoccupations et les priorités qui furent celles de notre commission lors de l'examen de la loi « AGEC ». Cohérent avec les principes et engagements qui sont les nôtres, le travail engagé depuis le printemps n'en demeure pas moins marqué par la volonté de réexaminer le sujet, sans a priori et sans parti pris, en tenant compte notamment des derniers éléments d'expertise, notamment des études de l'Ademe parues à la fin du mois de juin.

Comme il y a quatre ans, nos travaux ont été guidés par une exigence : fonder notre politique d'économie circulaire sur une priorité, la protection de l'environnement.

Cette exigence se traduit de plusieurs manières.

Premièrement, nous souhaitons faire de la réduction et du réemploi des emballages une priorité réelle, et non seulement théorique. Car derrière les priorités affichées, la prévention est indéniablement le « parent pauvre » de nos politiques publiques d'économie circulaire. Réduire les quantités d'emballages ne se décrète pas ; cette ambition se planifie, appelle une attention politique constante et requiert d'importants moyens opérationnels et financiers.

Deuxièmement, il nous a semblé primordial de nous intéresser à tous les emballages, et pas seulement au « totem » que constitue la bouteille plastique, qui ne représente qu'un centième des déchets ménagers, 2,8 % des déchets d'emballages et 15,4 % des déchets emballages en plastique.

Enfin, nous devons nous intéresser à l'ensemble des leviers disponibles, les dispositifs de consigne n'étant qu'un moyen parmi d'autres pour améliorer nos performances en matière de prévention et de gestion des déchets d'emballages.

Reflétant, certes, les préoccupations et les priorités qui furent celles de notre commission lors de l'examen de la loi « AGEC », le présent rapport d'information tient également compte de l'évolution du contexte depuis la promulgation de ce texte.

Contexte sanitaire, d'abord : la pandémie a retardé la mise en oeuvre de plusieurs volets de la loi « AGEC », à l'instar du déploiement de la REP « emballages de la restauration », initialement programmée en 2021 et repoussée à 2023. Elle a, dans le même temps, accéléré la mutation des modes de consommation, en accentuant par exemple les pratiques de vente à emporter ou de livraisons à domicile, génératrices de déchets d'emballage.

Contexte économique et social, par ailleurs. La guerre en Ukraine a provoqué une vague inflationniste inédite au XXIème siècle, nous invitant à manier avec précaution des politiques publiques qui pourraient avoir un impact sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Ce conflit a également souligné la nécessité de renforcer notre souveraineté économique, en réduisant notre dépendance aux importations. En contribuant à relocaliser la matière dans les territoires, l'économie circulaire répond à ce défi, faisant un trait d'union entre développement durable et aménagement du territoire, cher à notre commission.

*

Une chose est certaine : les retards accumulés par la France, tant en matière de prévention que de collecte et tri pour recyclage, appellent une action déterminée.

Nous devons, d'une part, renforcer considérablement nos politiques pour réduire la quantité d'emballages mis sur le marché, en particulier par le développement résolu du réemploi, notamment en déployant une consigne pour réemploi sur les emballages en verre.

D'autre part, les mauvaises performances de la France en matière de collecte triée pour recyclage, principalement sur les plastiques et l'aluminium, nous invitent à sortir du statu quo : tous les leviers pertinents d'un point de vue environnemental et économique doivent donc être mobilisés pour améliorer le geste de tri, ainsi que la collecte, dans et en dehors du foyer.

C'est le sens des nombreuses propositions formulées par ce rapport - inspirées de la trajectoire « ambitieuse » de la récente étude de l'Ademe.

Il ressort de cette étude que l'activation de l'ensemble de ces leviers permettra d'atteindre l'objectif spécifique de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson, à la condition toutefois d'être rapidement, intégralement et simultanément mises en oeuvre.

Aussi, la consigne pour recyclage, notamment sur les bouteilles plastiques, n'apparaît pas, à ce stade, comme un levier pertinent : moins performant qu'il n'y paraît, le dispositif est même porteur de nombreux effets pervers environnementaux, tout en étant économiquement irrationnel, ainsi que socialement et territorialement injuste.

En outre, à l'inverse du scénario reposant sur une consigne pour recyclage - qui ne porterait que sur un gisement spécifique, bouteilles en plastique et, éventuellement, canettes en aluminium - les solutions identifiées par ce rapport présentent un avantage majeur : elles contribueront à améliorer le recyclage de l'ensemble des déchets d'emballages ainsi que des papiers et cartons, tout en incitant, pour certaines d'entre elles, au tri à la source des biodéchets, aujourd'hui très peu valorisés alors qu'ils représentent un tiers des ordures ménagères résiduelles.

Comme le permet, en l'état, le projet de règlement européen « emballages », une clause de revoyure pourrait être prévue en 2026, pour réévaluer la pertinence de mettre en place une consigne pour recyclage sur les emballages et juger de l'efficacité de l'ensemble des autres leviers ambitieux identifiés par le présent rapport d'information.

L'ESSENTIEL

En janvier dernier, le Gouvernement annonçait le lancement d'une concertation portant sur la mise en place éventuelle d'un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi des emballages.

Quelques semaines plus tard, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable lançait une mission d'information flash, avec deux objectifs clairs : exercer sur la concertation engagée une vigilance renforcée et s'assurer que le débat engagé soit le plus complet possible.

Une chose est certaine : les retards accumulés par la France, tant en matière de prévention que de collecte et tri pour recyclage, appellent une action déterminée.

Pour la commission, le temps est donc venu de faire de la réduction et du réemploi des emballages une priorité réelle, et non seulement théorique, notamment en déployant une consigne pour réemploi sur les emballages en verre.

Par ailleurs, les mauvaises performances de la France en matière de collecte triée pour recyclage invitent notre pays à sortir du statu quo : tous les leviers pertinents d'un point de vue environnemental et économique doivent donc être mobilisés pour améliorer le geste de tri, ainsi que la collecte, dans et en dehors du foyer.

Mais la consigne pour recyclage n'apparaît pas, à ce stade, comme un levier pertinent : moins performant qu'il n'y paraît, le dispositif est même porteur de nombreux effets pervers environnementaux, tout en étant économiquement irrationnel, ainsi que socialement et territorialement injuste.

Suivant la rapporteure, Marta de Cidrac, la commission a donc adopté 28 propositions réparties en 4 axes répondant à ces orientations.

I. RÉDUIRE ET RÉEMPLOYER : FAIRE DE LA PRÉVENTION UNE PRIORITÉ RÉELLE ET NON THÉORIQUE

A. RÉDUIRE ET RÉEMPLOYER LES EMBALLAGES : UNE PRIORITÉ THÉORIQUE, PEINANT À SE TRADUIRE DANS LA RÉALITÉ

La réduction des déchets est l'objectif prioritaire de la politique d'économie circulaire : d'un point de vue environnemental et économique, le meilleur déchet est celui qui n'est pas produit.

Or, à rebours des objectifs législatifs et réglementaires associés à cette ambition, la quantité d'emballages a stagné depuis 2010 tandis que celle d'emballages plastiques a augmenté de 20 %. La quantité de bouteilles en plastique pour boissons ne diminue pas non plus, se maintenant entre 2020 et 2022 à un niveau supérieur à 350 000 tonnes.

B. RÉDUIRE LA QUANTITÉ D'EMBALLAGES MIS SUR LE MARCHÉ, NOTAMMENT PAR LE DÉVELOPPEMENT DU RÉEMPLOI

L'adoption d'objectifs, fussent-ils législatifs, ne suffit donc plus, pas plus que l'empilement de mesures parfois ponctuelles, certes bienvenues, mais inopérantes pour engager un changement structurel des modes de production et de consommation.

Réduire les quantités d'emballages ne se décrète pas ; cette ambition se planifie, appelle une attention politique constante et requiert d'importants moyens opérationnels et financiers.

Nous devons donc :

è PLANIFIER le développement du réemploi pour donner de la lisibilité aux acteurs économiques et accélérer la sortie du « tout-jetable ».

Une proposition phare : mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre en vue d'atteindre les objectifs de réduction et de réemploi fixés par la loi.

è LEVER les freins financiers et techniques à la réduction des emballages et au développement du réemploi.

Une proposition phare : accélérer le développement et la diffusion des standards d'emballages réemployables.

è CONTRÔLER les éco-organismes.

Une proposition phare : systématiser la mise en oeuvre de sanctions en cas de non-atteinte des objectifs ; définir, dans les cahiers des charges, le montant de ces pénalités éventuelles ; permettre, en particulier, la mise en place de sanctions pour non-atteinte des objectifs dans les outre-mer.

II. COLLECTE ET TRI POUR RECYCLAGE : FACE AUX RETARDS, SORTIR DU STATU QUO

À la traîne sur la prévention, la France accuse également un retard inquiétant en matière de recyclage des emballages, particulièrement en plastique. Face à ces retards, il est urgent de sortir du statu quo.

A. AMÉLIORER LE GESTE DE TRI, EN COMMUNIQUANT ET EN MOBILISANT DES LEVIERS INCITATIFS ET DISSUASIFS

Pour améliorer le geste de tri, il nous faut donc :

è COMMUNIQUER, pour informer le citoyen-consommateur sur le geste de tri et le rassurer sur le bien-fondé de la politique d'économie circulaire.

Une proposition phare : lancer dans les plus brefs délais une campagne nationale de grande ampleur, notamment pour permettre la montée en puissance des extensions des consignes de tri.

è INCITER, en soutenant le développement de la tarification incitative sur tout le territoire.

Une proposition phare : développer des aides pour le développement de la tarification incitative sous la forme de subventions directes de l'Ademe (fonds Économie circulaire) ou d'une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi).

è SANCTIONNER, en faisant du tri une obligation dont la méconnaissance est susceptible d'être sanctionnée.

Une proposition phare : définir des sanctions administratives simplifiées en cas de non-respect de ces règles de tri, à l'instar du modèle développé en Belgique.

B. AMÉLIORER LA COLLECTE, DANS ET EN DEHORS DU FOYER, ET L'ADAPTER À LA RÉALITÉ DES TERRITOIRES

Parallèlement à l'amélioration du geste de tri, une amélioration de la collecte est indispensable à l'atteinte des objectifs que notre pays s'est fixés.

Cela implique de :

è MIEUX COLLECTER À DOMICILE, en faisant monter en puissance le bac jaune.

Deux propositions phares : pour financer l'adaptation des schémas de collecte, augmenter le taux de couverture des coûts du service public de gestion des déchets par les éco-organismes. Instaurer un bonus tendant vers une couverture intégrale des coûts (100 %), pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions visant à améliorer le taux de collecte.

è MIEUX COLLECTER EN DEHORS DU FOYER, en systématisant le tri dans l'espace public et dans les entreprises.

Une proposition phare : anticiper dès à présent la généralisation, d'ici au 1er janvier 2025, de la collecte séparée pour recyclage des déchets d'emballages pour les produits consommés hors foyer. Dans le cahier des charges de la REP « emballages ménagers », fixer des objectifs d'installation de corbeilles de rue par habitant et par commune. Identifier des financements dédiés au sein du cahier des charges.

è ADAPTER la collecte, en déployant des moyens adaptés dans les territoires urbains, touristiques et ultra-marins.

Une proposition phare : dans les zones touristiques, mobiliser des moyens complémentaires financés par une part additionnelle à la taxe de séjour payée par les usagers à l'origine de ces surcoûts.

III. RÉÉVALUER EN 2026 L'OPPORTUNITÉ DE LA MISE EN PLACE D'UNE CONSIGNE POUR RECYCLAGE SUR LES EMBALLAGES DE BOISSON, DONT LE BILAN COÛT-AVANTAGE SEMBLE AUJOURD'HUI NÉGATIF, D'UN POINT DE VUE ENVIRONNEMENTAL, SOCIAL ET ÉCONOMIQUE

Améliorer nos performances en matière de collecte et de tri pour recyclage implique-t-il de mobiliser, en complément de ces nombreux leviers, une consigne pour recyclage sur les emballages de boissons, notamment sur les bouteilles plastiques, voire sur les canettes en aluminium ?

Pour la commission, il ne fait pas de doute : à ce stade, la consigne pour recyclage ne constitue pas un levier pertinent d'un point de vue environnemental et économique : séduisant au premier abord, le dispositif est en réalité porteur de nombreux effets pervers.

1. La consigne n'est pas aussi performante qu'il n'y paraît...

è CAR l'atteinte de l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson d'ici 2029 porte sur l'ensemble des bouteilles plastiques, et pas seulement sur celles en PET - or, de nombreux dispositifs de consigne mis en place en Europe ne concernent que les bouteilles en PET.

è CAR il semble difficile de répliquer les modèles étrangers en France caractérisée par la place historique du service public dans la gestion des déchets.

è CAR, selon les études de l'Ademe de juin dernier, l'atteinte de l'objectif de 90 % avec un dispositif de consigne repose sur un ensemble de conditions (notamment un maillage fin des points de reprise), dont rien n'indique qu'elles puissent être remplies.

2. La consigne pour recyclage est une « fausse bonne idée » environnementale...

è CAR loin de lutter contre le plastique, la consigne pour recyclage en pérennise la production et la consommation.

è CAR la consigne complexifie le geste de tri, alors qu'il venait tout juste d'être simplifié avec la généralisation des extensions de consigne de tri en 2023.

è CAR les bouteilles en plastique ne sont que la partie visible de la pollution plastique et des enjeux d'économie circulaire.

L'Ademe souligne, en outre, que « tous les scénarios modélisés avec consigne présentent, en moyenne, des taux de collecte pour recyclage des emballages légers inférieurs à celui de la trajectoire ambitieuse de la collecte sélective sans consigne », dont s'est inspirée la commission pour établir ses recommandations.

Déployer un dispositif spécifique et coûteux pour certains emballages ne peut pas être une justification pour mettre en place une collecte au rabais, et donc moins performante, pour l'ensemble des emballages légers !

3. Un dispositif qui est économiquement irrationnel, tout en étant socialement et territorialement injuste...

è CAR l'efficacité du dispositif implique de faire coexister deux systèmes de collecte.

En effet, le succès du système de consigne suppose la mise en place d'une collecte performante des emballages consignés non repris et des bouteilles plastiques dont les résines pourraient ne pas être couvertes par la consigne (comme le PEHD).

La coexistence de ces modèles a un coût : entre 181 et 229 millions d'euros par an à partir de 2029, par rapport au scénario sans consigne, pourtant plus efficace d'un point de vue environnemental. La commission juge, au demeurant, ce coût sous-estimé.

è CAR l'irrationalité économique de la consigne devra être compensée, par les collectivités territoriales, et donc par le contribuable local.

On peut déduire des études de l'Ademe de juin dernier qu'à performance égale, sur l'ensemble des emballages, le scénario avec consigne est plus coûteux pour les collectivités qu'un scénario ambitieux sans consigne.

è CAR la consigne pour recyclage se finance « sur le dos » des consommateurs.

Le montant des consignes non rapportées est estimé à une somme comprise entre 161 à 252 millions d'euros en 2029, soit une taxe annuelle déguisée allant de 2,40 à 3,70 euros par an et par Français.

è CAR la consigne pour recyclage présente un risque de rupture d'égalité territoriale.

En définitive, la consigne pour recyclage constitue pour l'heure une impasse.

Comme le permet, en l'état, le projet de règlement européen « emballages », une clause de revoyure pourrait donc être prévue en 2026, pour réévaluer la pertinence de la mise en place d'une consigne pour recyclage sur les emballages et juger de l'efficacité de l'ensemble des autres leviers ambitieux identifiés par le rapport d'information.

TABLEAU DE MISE EN OEUVRE ET DE SUIVI

Réduction, réemploi et recyclage des emballages : sortir du statu quo
Les 28 propositions
11 juillet 2023

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Décliner les trajectoires d'emballages réemployés mis en marché par secteur et pour certains produits. Intégrer ces trajectoires dans les cahiers des charges de la « REP emballages ménagers » et de la « REP emballages de la restauration ».

État
et éco-organismes

 

Règlement, cahiers des charges des éco-organismes

2

Mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre en vue d'atteindre les objectifs de réduction et de réemploi fixés par la loi.

État

 

Règlement

3

Évaluer l'adéquation des éco-contributions dédiées au réemploi et aller, si nécessaire, au-delà de la part de 5 % dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

4

Inclure un maillage territorial des infrastructures nécessaires au réemploi dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

5

Accélérer le développement et la diffusion des standards d'emballages réemployables.

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

6

Utiliser les modulations des éco-contributions à la hauteur de ce que permet la loi « AGEC », afin notamment d'inciter au recours d'emballages réemployables, à des emballages plus petits, moins épais, et de pénaliser les emballages inutiles.

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

7

En complément de l'objectif de développement du vrac dans les commerces de vente dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés, instaurer des objectifs et indicateurs de suivi propres au vrac dans le cahier des charges des éco-organismes.

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

8

Réaliser, en 2026, un bilan à la mi-temps des agréments des éco-organismes des REP « emballages ménagers » et « emballages de la restauration » ; renforcer le niveau des modulations, si cela est nécessaire pour atteindre les objectifs, comme le prévoit la loi « AGEC ».

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

9

Systématiser la mise en oeuvre de sanctions en cas de non-atteinte des objectifs ; définir, dans les cahiers des charges, le montant de ces pénalités éventuelles ; permettre, en particulier, la mise en place de sanctions pour non-atteinte des objectifs dans les outre-mer.

État

 

Règlement, cahiers des charges des éco-organismes

10

Lancer dans les plus brefs délais une campagne nationale de grande ampleur, notamment pour permettre la montée en puissance des extensions des consignes de tri.

État

 

Campagne de communication

11

Renforcer les moyens attribués aux collectivités par les éco-organismes pour la sensibilisation, afin par exemple de recruter un plus grand nombre d'ambassadeurs de tri.

État,
éco-organismes et collectivités territoriales

 

Cahiers des charges des éco-organismes

12

Développer des aides pour le développement de la tarification incitative sous la forme de subventions directes de l'Ademe (fonds Économie circulaire) ou d'une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi).

État, Ademe et collectivités territoriales

 

Loi

13

Autoriser la cohabitation pérenne entre TEOM et TEOMi sur un même territoire ; a minima, augmenter au-delà de 7 ans la période pendant laquelle cette cohabitation est possible.

État
et collectivités territoriales

 

Loi, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

14

Permettre la mise en oeuvre d'une « tarification incitative collective », pour faciliter son déploiement dans les zones urbaines.

État
et collectivités territoriales

 

Loi, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

15

Expérimenter une tarification sociale « déchets », s'inspirant de la tarification sociale sur l'eau, afin notamment de limiter les effets anti-redistributifs potentiels du passage à une tarification incitative.

État
et collectivités territoriales

 

Loi, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

16

Modifier les règlements de collecte des collectivités territoriales afin d'interdire les emballages dans les ordures ménagères résiduelles.

Collectivités territoriales

 

Décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

17

Définir des sanctions administratives simplifiées en cas de non-respect de ces règles de tri, à l'instar du modèle développé en Belgique.

État
et collectivités territoriales

 

Loi, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

18

Adapter les schémas de collecte aux objectifs : augmentation de la fréquence des collectes et de la taille des bacs dans les habitations lorsque cela est possible, densification des points d'apport volontaire, passage à une collecte multimatériaux...

Collectivités territoriales

 

Décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

19

Pour financer l'adaptation des schémas de collecte, augmenter le taux de couverture des coûts du SPGD.

État

 

Règlement

20

Instaurer un bonus tendant vers une couverture intégrale des coûts (100 %), pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions visant à améliorer le taux de collecte.

État

 

Règlement

21

Anticiper dès à présent la généralisation, d'ici au 1er janvier 2025, de la collecte séparée pour recyclage des déchets d'emballages pour les produits consommés hors foyer. Dans le cahier des charges de la REP « emballages ménagers », fixer des objectifs d'installation de corbeilles de rue par habitant et par commune. Identifier également des financements dédiés au sein du cahier des charges.

État
et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes

22

Développer ponctuellement des dispositifs de collecte séparée avec gratification, financés par les éco-organismes, en lien avec les collectivités territoriales. Expérimenter ces dispositifs à l'occasion de grands événements (Mondial de Rugby, Jeux Olympiques de 2024).

Collectivités territoriales et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

23

Massifier le contrôle du tri 7 flux et du tri au sein des établissements recevant du public et sanctionner systématiquement le non-respect de ces obligations.

État

 

Circulaire

24

Dans les zones urbaines, adapter les schémas de collecte à la nature de l'habitat ; déployer des dispositifs incitatifs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Collectivités territoriales et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

25

Dans les zones touristiques, mobiliser des moyens complémentaires financés par une part additionnelle à la taxe de séjour payée par les usagers à l'origine de ces surcoûts.

État
et collectivités territoriales

 

Loi

26

Dans les territoires ultra-marins, développer les dispositifs de gratification pour encourager la collecte sélective dans les zones les plus défavorisées ou isolées.

Collectivités territoriales et éco-organismes

 

Cahiers des charges des éco-organismes, décision de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI)

27

Dans le cadre des négociations européennes, afin de tenir compte des spécificités nationales et en application du principe de neutralité technologique, laisser aux seuls États membres le choix de décider - ou pas - de mettre en place un système de consigne.

Institutions européennes

 

Règlement européen

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Renvoyer à 2026 le choix de la mise en place d'une consigne pour recyclage sur les emballages.

État

 

Cahiers des charges des éco-organismes

I. RÉDUIRE ET RÉEMPLOYER : FAIRE DE LA PRÉVENTION UNE PRIORITÉ RÉELLE ET NON THÉORIQUE

A. RÉDUIRE ET RÉEMPLOYER LES EMBALLAGES : UNE PRIORITÉ THÉORIQUE, PEINANT À SE TRADUIRE DANS LA RÉALITÉ

1. La prévention de la production de déchets, par la réduction à la source et le réemploi : une priorité affichée de la politique d'économie circulaire
a) Une priorité théorique donnée à la prévention de la production de déchets

Élaborée afin de répondre aux nombreux effets délétères de la production et de la gestion des déchets sur l'environnement - épuisement des ressources non renouvelables (métaux, minéraux...) et renouvelables (eau) ; pression sur les sols et sur la biodiversité ; pollutions diverses, notamment plastiques ; contribution à l'effet de serre - la politique nationale de prévention et de gestion des déchets a défini ses objectifs de manière à mettre en oeuvre une hiérarchie entre les modes de traitement des déchets.

Prévenir la production de déchets, notamment par la réduction à la source et le réemploi apparaît dès lors comme un objectif prioritaire du fait de cette hiérarchie. S'il n'est pas possible d'atteindre cette cible, il faut alors par ordre préférentiel, privilégier la préparation en vue de la réutilisation, puis le recyclage, puis toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique et, enfin, l'élimination.

Traduction de cette priorité, le Plan national de prévention des déchets (PNPD) fixe un double objectif général de réduction de la quantité de déchets d'ici 2030 : 15 % des déchets ménagers et assimilés produits par habitant et 5 % des déchets d'activités économiques par unité de valeur produite (L. 541-1 du code de l'environnement).

b) Des objectifs de prévention spécifiques aux emballages

Réduire la production d'emballages - qui représentent un tiers des déchets ménagers produits en France - est un pan essentiel de la politique de réduction des déchets.

Des objectifs de prévention spécifiques aux emballages ont donc été prévus par le législateur ou le pouvoir réglementaire.

Le décret relatif aux objectifs de réduction, de réutilisation et de réemploi, et de recyclage des emballages en plastique à usage unique pour la période 2021-2025 dit « décret 3R », publié en avril 2021, et la stratégie 3R, adoptée en avril 2022, prévoient des objectifs de réduction propres aux emballages plastiques à échéance 2025 :

20 % de réduction des emballages en plastique à usage unique, dont au minimum la moitié obtenue par recours au réemploi et à la réutilisation ;

- tendre vers une réduction de 100 % des emballages en plastique à usage unique inutiles.

À plus long terme, la France se donne pour objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages à usage unique en 2040 (L. 541-10-17).

Pour les bouteilles en plastique à usage unique pour boisson, l'article 66 de la loi « AGEC » fixe un objectif de réduction de 50 % d'ici à 2030 du nombre mis sur le marché.

Enfin, l'article L. 541-1 du code de l'environnement dispose que la France se dote d'une trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique. Les objectifs de cette trajectoire sont définis de manière à atteindre une proportion de 5 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2023 et de 10 % en 2027.

2. Pour traduire ces objectifs, des mesures de réduction et de réemploi des emballages

Pour atteindre ces objectifs, plusieurs mesures de prévention sont prévues par la loi - principalement par la loi « AGEC » - ou les textes réglementaires pris pour son application.

Ces mesures reposent sur deux leviers complémentaires.

D'une part, la réduction du poids de chaque emballage, ce qui peut passer par des solutions techniques et par la lutte contre le « suremballage » ; d'autre part, par la réduction du nombre d'emballages mis sur le marché, qui peut notamment passer un développement du réemploi.

a) Les mesures de réduction de la production d'emballage

Les mesures de réduction de la production d'emballages sont de trois sortes : les mesures générales, les mesures sectorielles et les règles d'exemplarités en la matière dans le secteur public.

Les principales mesures générales sont les suivantes :

l'interdiction des sacs en plastique à usage unique depuis 2021 ;

- l'obligation imputée aux éco-organismes de mettre en place des objectifs de réduction de mise sur le marché notamment d'emballages plastiques à usage unique, avec une sanction en cas de non-atteinte des objectifs. Cet objectif, pour les plastiques à usage unique, a été fixé à 20 % en 2025, dont au moins la moitié par recours au réemploi et à la réutilisation ;

- l'obligation imputée aux éco-organismes de mettre à la disposition des consommateurs un dispositif de signalement électronique des emballages excessifs ;

- la création d'éco-modulations versées par les metteurs sur le marché d'emballages aux éco-organismes en fonction de critères de performance environnementale parmi lesquels la réduction de la matière utilisée ;

l'obligation, applicable en 2030, pour les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés de consacrer à la vente de produits présentés sans emballage primaire, y compris la vente en vrac, soit au moins 20 % de leur surface de vente de produits de grande consommation, soit de mettre en place un dispositif d'effet équivalent exprimé en nombre de références ou en proportion du chiffre d'affaires.

Les principales mesures sectorielles sont les suivantes :

- la mise en place progressive jusqu'en 2026 d'une interdiction de tout conditionnement composé pour tout ou partie de plastique pour les fruits et légumes frais non transformés ;

- l'interdiction de la mise à disposition gratuite de boissons dans des bouteilles à usage unique dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel (depuis le 1er janvier 2021) ;

- l'interdiction de l'usage des bouteilles en plastique pour boisson à usage unique dans la restauration scolaire (depuis le 1er janvier 2020) ;

- la fin, au plus tard le 1er janvier 2025, de l'utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique dans les services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires ainsi que des établissements d'accueil des enfants de moins de six ans ;

- l'interdiction de l'expédition des publications de presse et de publicité sous emballage plastique.

L'État a également pris une mesure d'exemplarité sur ce sujet, à savoir l'arrêt de tout achat depuis le 1er janvier 2022 de plastique à usage unique en vue d'une utilisation sur les lieux de travail et dans les évènements qu'il organise.

b) Les mesures de soutien au réemploi des emballages

À ces dispositions s'ajoutent celles pour le réemploi des emballages.

La principale mesure sur le sujet est la mise en place progressive entre 2023 et 2027 d'une obligation pour les producteurs de mettre sur le marché une part minimale d'emballages réemployés. Cette part est fixée à 5 % en 2023 et 10 % en 2027. Le réemploi bénéficie également d'un financement des éco-organismes porté à 5 % au moins du montant des contributions qui leur est versé. Les éco-organismes devaient également, avant le 1er janvier 2022, définir des gammes standards d'emballages réemployables pour les secteurs de la restauration, ainsi que pour les produits frais et les boissons.

Des mesures sectorielles ont aussi été prises pour le réemploi dans la restauration. Depuis le 1er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés sur place dans des contenants réemployables. Il en est de même pour les repas servis dans le cadre d'un service de portage quotidien à domicile.

Le secteur public a, là encore, des objectifs propres. Les biens acquis annuellement par les services de l'État ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements sont issus du réemploi ou de la réutilisation ou intègrent des matières recyclées dans des proportions de 20 % à 100 % selon le type de produit.

3. À rebours des objectifs, une stagnation de la quantité d'emballages et une forte hausse des emballages plastiques

Les différents moyens déployés pour prévenir la production d'emballages et favoriser leur réemploi ont, pour l'heure, une efficacité limitée.

Sur le long terme, la quantité d'emballages produite en France est stable. Elle était de 12,5 millions de tonnes en 20104(*), contre 12,7 millions de tonnes en 20205(*).

Par ailleurs, au sein de cet ensemble, les emballages plastiques progressent fortement sur toute la période, à rebours des objectifs de lutte contre le plastique à usage unique. Le volume d'emballages plastiques mis sur le marché est ainsi passé de 2 millions de tonnes à 2,4 millions de tonnes entre 2010 et 2020, soit une augmentation de 20 %6(*). En termes relatifs, les emballages plastiques passent de 16 % à 19 % du total d'emballages mis sur le marché.

Les bouteilles en plastique pour boisson représentent un peu moins de 10 % des déchets plastiques et environ 15 % des emballages plastiques. En 2022, un volume de 361 000 tonnes de bouteilles de plastique7(*) a été mis sur le marché. S'il est difficile d'obtenir des données sur l'évolution de cette consommation - signe d'un manque de planification de la réduction des déchets - celle-ci est vraisemblablement en forte hausse sur le long terme. Depuis 2010, en effet, la consommation de bouteilles et flacons de moins de deux litres a augmenté de 30 %. La consommation de bouteilles en plastique de boisson a toutefois décru depuis 2018 où elle atteignait 400 000 tonnes, avant d'atteindre un palier entre 2020 et 2022 ; aucun signe de fléchissement n'apparaît depuis, le volume se maintenant à un niveau supérieur à 350 000 tonnes par an8(*).

Deux conclusions peuvent être tirées de la faiblesse de ces résultats.

D'une part, comme l'a souligné la Cour des comptes, bien que la prévention soit la « priorité officielle », elle est en réalité le « parent pauvre de la gestion des déchets »9(*). Les mesures en faveur de la réduction de la quantité d'emballages mis sur le marché et du réemploi restent encore éparses. En tout état de cause, les mesures concrètes tendant à réduire la quantité de déchets d'emballages ont été adoptées plus tardivement que les autres mesures d'économie circulaire collecte, tri et celles relatives au recyclage - ce qui est de nature à ralentir l'efficacité de leur portée.

D'autre part, le recours à la réduction unitaire du poids des emballages est insuffisant, puisqu'alors même que celui-ci diminue, on observe une forme d'effet-rebond : le nombre d'emballages mis sur le marché compense intégralement et surpasse même cette réduction. Sur les dernières décennies, les emballages plastiques ont vu leur poids fortement décroître. Cette réduction atteint 40 % pour les bouteilles en plastique de boisson entre 1994 et 2012. Toutefois, ce mouvement par unité de consommation est à mettre en balance avec la multiplication générale des emballages plastiques. Or, ce second mouvement est plus important que le premier, si bien qu'entre 2010 et 2020, la production d'emballages plastiques à usage unique a crû de 20 % en France.

B. RÉDUIRE LA QUANTITÉ D'EMBALLAGES MIS SUR LE MARCHÉ, NOTAMMENT PAR LE DÉVELOPPEMENT DU RÉEMPLOI

L'impact environnemental des emballages - en particulier en plastique - ne sera efficacement limité qu'en réduisant la quantité de contenants à usage unique : d'un point de vue environnemental et économique, le meilleur déchet est celui qui n'est pas produit. Seule la prévention permet de réduire la pression sur le climat et la biodiversité exercée par les emballages à usage unique aussi bien en amont, lorsqu'ils sont produits, qu'en aval, lorsqu'ils arrivent en fin de vie.

S'il ne remet pas en cause le bien-fondé des politiques de collecte et de recyclage - nécessaires pour éviter ou retarder l'incinération ou l'enfouissement des déchets - ce constat nous invite à faire de la réduction et du réemploi une priorité réelle, et non seulement théorique.

L'adoption d'objectifs, fussent-ils législatifs, ne suffit plus, pas plus que l'empilement de mesures parfois ponctuelles, certes bienvenues, mais inopérantes pour engager un changement structurel des modes de production et de consommation. Réduire les quantités d'emballages ne se décrète pas ; cette ambition se planifie, appelle une attention politique constante et requiert d'importants moyens opérationnels et financiers.

Des premières briques ont été posées par la loi « AGEC » et la loi « Climat et résilience », avec l'appui constant de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, parfois à son initiative. Les leviers à disposition doivent désormais être activés et amplifiés, avant d'être retranscrits dans le nouveau cahier des charges de la REP « emballages ménagers » ainsi que dans le cahier des charges de la REP « emballages de la restauration », attendus d'ici la fin de l'année 2023.

1. PLANIFIER le développement du réemploi, notamment de la consigne pour réemploi, pour donner de la visibilité aux acteurs économiques et accélérer la sortie du « tout-jetable »

Les articles 9 et 67 de la loi « AGEC » et leur décret d'application du 8 avril 202210(*) ont amorcé la planification du réemploi, en prévoyant l'adoption d'une trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique, de manière à atteindre une proportion de 5 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2023 et de 10 % en 2027 (1° du I et III de l'article L. 541-1 du code de l'environnement).

Cette obligation s'applique aux entreprises qui mettent sur le marché plus de 10 000 emballages par an, avec une entrée en vigueur progressive pour les producteurs déclarant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 50 millions d'euros, puis entre 20 et 50 millions d'euros et enfin inférieur à 20 millions d'euros.

La rapporteure appelle tout d'abord à étendre cet effort de planification au-delà de 2027 pour accroître la visibilité des acteurs. Elle estime également que ces trajectoires pourraient être affinées, par secteur et pour certains produits, pour en renforcer l'opérationnalité. Ces trajectoires devraient enfin être inscrites dans les cahiers des charges de la « REP emballages ménagers » et de la « REP emballages de la restauration » et faire l'objet de sanctions systématiques en cas de non-atteinte (cf infra).

Proposition n° 1 : Décliner les trajectoires d'emballages réemployés mis en marché par secteur et pour certains produits. Intégrer ces trajectoires dans les cahiers des charges de la « REP emballages ménagers » et de la « REP emballages de la restauration ».

Comme elle l'avait rappelé à l'occasion des débats sur la loi « AGEC » en 2020 et sur la loi « Climat et résilience » en 2021, la rapporteure estime que la consigne pour réemploi sur les emballages en verre constitue un formidable levier pour atteindre nos objectifs de réduction de déchets d'emballages, en particulier celui de réduction de 50 % de bouteilles plastiques à usage unique mises sur le marché à échéance 2030.

Les gains environnementaux globaux permis par un système de consigne sont confirmés par l'étude de l'Ademe, prévue par la loi « AGEC », qui vient d'être publiée à la fin du mois de juin dernier.

L'évaluation environnementale de la consigne pour réemploi

L'étude réalisée par l'Ademe est consacrée à la comparaison d'emballages primaires en verre réemployables et consignés avec des emballages primaires à usage unique, en verre (volet A, composé de cinq scénarios) et en autres matériaux (volet B, également composé de cinq scénarios). Le rapport publié en juin dernier ne porte que sur le volet A - le volet B sera présenté dans un second livrable de l'étude.

Les résultats produits pour ce volet suggèrent un large avantage relatif du verre réemployable pour une grande majorité de situations étudiées, et ce pour 5 des 7 catégories d'impact faisant l'objet d'analyses approfondies - changement climatique, émission de particules, formation d'ozone photochimique, acidification, épuisement des ressources fossiles. Pour ces catégories d'impact, il est observé un avantage systématique de l'option réemployable dès sa deuxième utilisation, pour tous les scénarios impliquant une distribution aux particuliers (4 scénarios sur 5). Le scénario « distribution aux cafés, hôtels et restaurants » présente un avantage légèrement moins marqué de l'option réemployable pour des nombres d'utilisations faibles (2 ou 3).

Ces résultats positifs découlent de deux éléments notables :

- les impacts de production élevés des contenants en verre sont amortis au fil des cycles de réemploi successifs, et de manière d'autant plus marquée pour les premiers cycles ;

- une plus grande efficacité des transports en camion - tenant compte notamment d'une optimisation des chargements ou encore de l'évolution récente des normes EURO - limite les impacts associés aux cycles de réemploi.

Pour les deux catégories d'impact relatives à l'eau - eutrophisation d'eaux douces et épuisement des ressources en eau - le bilan est moins évident.

Concernant l'eutrophisation, le recours à des emballages de regroupement à usage unique en carton contribue grandement à cet impact environnemental, compliquant les comparaisons entre options. Toutefois, les scénarios concernant des bouteilles en verre montrent un avantage général de l'option réemployable par rapport à l'usage unique au regard de cette catégorie d'impact pour des masses d'emballages primaires supérieures à 600 g/L environ (soit notamment toutes les bouteilles de bières et de sodas collectées dans le cadre de cette étude).

Concernant la consommation d'eau, la consommation directement utilisée lors du processus de lavage industriel n'a pas été identifiée comme un paramètre influençant significativement les impacts des solutions d'emballages réemployables, du fait notamment de l'optimisation des activités des acteurs de lavage spécialisés, par exemple via l'utilisation d'équipements de lavage de plus en plus performants, favorisant la récupération des eaux de lavage. Les performances relatives des solutions à usage unique et réemployables à l'égard de cet impact environnemental dépendent principalement de la consommation d'électricité mobilisée pour chauffer l'eau de lavage (du fait de la mobilisation d'eau impliquée dans la production nucléaire), et de la consommation de détergent (du fait du recours à certains composés d'origine végétale).

Source : Ademe, Évaluation environnementale de consigne pour réemploi d'emballages en verre en France, 2023.

Prometteuse d'un point de vue environnemental, la consigne pour réemploi sur le verre répond également à une préoccupation locale forte : plus de 90 % des 1 800 élus locaux ayant répondu à la consultation lancée par le Sénat sur le projet de loi « Climat et résilience » estimaient pertinent d'en généraliser la mise en oeuvre.

Au regard de ces éléments, la rapporteure appelle donc le Gouvernement à se saisir de la faculté qui lui est donnée par la loi de mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre en vue d'atteindre nos objectifs de réduction et de réemploi.

Les dispositifs qui seront ainsi mis en place devront être optimisés d'un point de vue environnemental. Selon l'Ademe, cette optimisation dépend de plusieurs paramètres, parmi lesquels :

- un nombre d'utilisations des emballages réemployables le plus élevé possible ;

- une réduction des distances de transport par un maillage territorial fin des infrastructures nécessaires au réemploi, en particulier les laveuses ;

- un recours à des emballages standardisés ;

- une amélioration des processus de lavage, par exemple par une rationalisation de la consommation électrique associée au chauffage de l'eau.11(*)

Proposition n° 2 : Mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre en vue d'atteindre les objectifs de réduction et de réemploi fixés par la loi.

2. LEVER les freins financiers et techniques à la réduction des emballages et au développement du réemploi

À l'initiative de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, l'article 29 de la loi « Climat et résilience » a accru d'au moins 2 % à au moins 5 % la part des éco-contributions que les éco-organismes de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration » doivent consacrer au développement de solutions de réemploi et réutilisation des emballages (article L. 541-10-18 du code de l'environnement).

Toujours à l'initiative de la commission, le même article a prévu que ces sommes soient consacrées à l'accompagnement des producteurs mettant sur le marché des emballages réemployés ainsi qu'au financement d'infrastructures facilitant le déploiement du réemploi sur l'ensemble du territoire national.

De nombreuses personnes entendues se sont félicitées de ces avancées, qui doivent désormais se traduire dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

La rapporteure invite le Gouvernement à évaluer l'adéquation des éco-contributions dédiées au réemploi par les éco-organismes et à aller, si nécessaire, au-delà de la part de 5 %, comme le permet au demeurant l'article L. 541-10-18.

Proposition n° 3 : Évaluer l'adéquation des éco-contributions dédiées au réemploi et aller, si nécessaire, au-delà de la part de 5 % dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

À l'initiative de la commission, l'article 29 de la loi « Climat et résilience » a également prévu que le plan régional de prévention et de gestion des déchets comprenne un « maillage équilibré des dispositifs de consigne pour réemploi ou réutilisation, notamment des dispositifs de collecte mis en place par les producteurs ou leur éco-organisme, ainsi que des laveuses et lieux de stockage des emballages consignés, en tenant compte des fonctions urbaines sur les territoires et de manière à garantir un service de proximité » (7° du II de l'article L. 541-13 du code de l'environnement).

En cohérence avec cette cartographie, un maillage territorial des infrastructures nécessaires au réemploi, en particulier des laveuses, pourrait également être inscrit dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

Proposition n° 4 : Inclure un maillage territorial des infrastructures nécessaires au réemploi dans les cahiers des charges de la REP « emballages ménagers » et de la REP « emballages de la restauration ».

L'élaboration et la diffusion des standards d'emballages réemployables constituent un autre prérequis à la massification du réemploi.

Le recours à des emballages standardisés contribue en effet grandement à l'efficacité économique et environnementale des dispositifs de consigne pour réemploi car :

- ils amoindrissent les distances de transport en permettant un réemploi professionnel des emballages à une échelle régionale ;

- ils optimisent les taux de réemploi en fluidifiant la récupération des emballages et en limitant les effets de stocks stagnants ;

- ils optimisent les taux de chargement de camions en évitant les transports dédiés - potentiellement sous-optimisés - liés à un format d'emballage primaire spécifique12(*).

Cette problématique avait bien été identifiée par la loi « AGEC », dont l'article 65 prévoit que les éco-organismes des filières REP « emballages ménagers » et « emballages de la restauration » définissent des gammes standards d'emballages réemployables pour les secteurs de la restauration, ainsi que pour les produits frais et les boissons.

Ces standards devaient être définis au plus tard le 1er janvier 2022 ; les premiers prototypes en verre n'ont été présentés par Citéo qu'en mai 2023, soit près d'un an et demi plus tard que ce que prévoyait la loi « AGEC ».

Compte tenu des cibles calendaires fixées par la loi en matière de réduction et de réemploi des emballages. Ce retard particulièrement déplorable illustre, par les faits, que la prévention n'est pas, à ce jour, la priorité des metteurs en marché.

Proposition n° 5 : Accélérer le développement et la diffusion des standards d'emballages réemployables.

Pour accélérer le développement et la diffusion des standards d'emballages, l'article 29 de la loi « Climat et résilience » a prévu que les éco-contributions des producteurs assujettis aux REP « emballages ménagers » ou « emballages de la restauration » soient modulées pour les emballages consignés pour réemploi qui respectent ces standards.

La modulation des éco-contributions : un levier incitatif pour améliorer la performance environnementale des producteurs assujettis à la REP

L'essentiel des producteurs assujettis à une filière REP s'acquitte de leur obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes, à qui ils versent une contribution financière appelée éco-contribution.

Depuis la loi « AGEC », les éco-contributions versées aux éco-organismes doivent être modulées sous la forme de primes ou de pénalités, en fonction de critères de performance environnementale, parmi lesquels la quantité de matière utilisée, l'incorporation de matière recyclée, l'emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, la visée publicitaire ou promotionnelle du produit, l'absence d'écotoxicité et la présence de substances dangereuses, en particulier lorsque celles-ci sont susceptibles de limiter la recyclabilité ou l'incorporation de matières recyclées. Elles sont également modulées pour les emballages consignés pour réemploi qui respectent les standards d'emballage définis par les éco-organismes (article L. 541-10-3 du code de l'environnement).

La loi « AGEC » a fait de la modulation des éco-contributions un outil particulièrement incitatif pour améliorer la performance environnementale des producteurs assujettis à la REP : elle a en effet permis que les modulations, prenant la forme de primes ou de pénalités, puissent être supérieures au montant de l'éco-contribution versée par le producteur.

Le renouvellement du cahier des charges de la REP « emballages ménagers » - attendu d'ici la fin de l'année 2023 - offre la possibilité d'utiliser les modulations des éco-contributions à la hauteur de ce que permet la loi « AGEC ».

Les metteurs sur le marché ayant recours aux standards d'emballages devraient ainsi recevoir un soutien net de l'éco-organisme - la loi « AGEC » permettant aux primes d'être supérieures au montant de l'éco-contribution versée par le producteur.

Les modulations doivent également être pleinement mobilisées pour favoriser les emballages plus petits, moins épais, et pénaliser lourdement les emballages inutiles.

Proposition n° 6 : Utiliser les modulations des éco-contributions à la hauteur de ce que permet la loi « AGEC », afin notamment d'inciter au recours d'emballages réemployables, à des emballages plus petits, moins épais, et de pénaliser les emballages inutiles.

La réduction des déchets d'emballages passera enfin par un développement accéléré de la vente en vrac.

En la matière, l'article 23 de la loi « Climat et résilience » a fixé le cap à moyen terme : au 1er janvier 2030, les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés devront consacrer à la vente de produits présentés sans emballage primaire, y compris la vente en vrac, soit au moins 20 % de leur surface de vente de produits de grande consommation, soit un dispositif d'effet équivalent exprimé en nombre de références ou en proportion du chiffre d'affaires.

Les metteurs sur le marché devront être en mesure de fournir les acteurs de la distribution à la hauteur de la cible fixée par la loi « Climat et résilience » : l'offre de produits présentés en vrac devra donc être sensiblement accrue tout au long de la décennie.

À cette fin, des objectifs et indicateurs de suivi propres au vrac - par exemple, un volume minimal de mise en marché par grande catégorie de produit - devraient être inscrits dans le cahier des charges des éco-organismes.

Proposition n° 7 : En complément de l'objectif de développement du vrac dans les commerces de vente dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés, instaurer des objectifs et indicateurs de suivi propres au vrac dans le cahier des charges des éco-organismes.

3. CONTRÔLER les éco-organismes

Les éco-organismes sont des entités duales : chargés d'assurer la prévention et la gestion des déchets issus de catégories de produits données et d'atteindre les objectifs qui leur sont fixés par les pouvoirs publics, ils n'en sont pas moins les émanations des producteurs et de leurs intérêts. Or, en matière d'économie circulaire comme dans d'autres domaines, intérêts particuliers et intérêt général ne convergent pas naturellement.

Cela est particulièrement vrai pour la réduction des déchets et le réemploi : la mobilisation de ces leviers est souvent coûteuse, à court terme, et demande la plupart du temps de modifier en profondeur les modes de production et les processus. Il existerait donc un penchant naturel des producteurs et des éco-organismes qui les représentent pour « l'aval » : organiser ou financer la collecte, le tri et le recyclage est parfois plus confortable que de mettre au point une véritable politique de prévention.

C'est la raison pour laquelle les éco-organismes doivent être contrôlés et sanctionnés en cas d'écart avec les objectifs qui leur sont assignés dans leur cahier des charges. La qualité et la crédibilité du système de contrôle et de sanctions sont des conditions nécessaires de l'efficacité du principe de responsabilité élargie du producteur.

Une évaluation des trajectoires de performance - particulièrement en matière de prévention - doit tout d'abord être menée à la mi-temps des agréments afin de renforcer le niveau des modulations, si cela est nécessaire pour atteindre les objectifs, comme le prévoit l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement.

Proposition n° 8 : Réaliser, en 2026, un bilan à la mi-temps des agréments des éco-organismes des REP « emballages ménagers » et « emballages de la restauration » ; renforcer le niveau des modulations, si cela est nécessaire pour atteindre les objectifs, comme le prévoit la loi « AGEC ».

Par ailleurs, il conviendra de systématiser la mise en oeuvre du régime de sanctions créé par la loi « AGEC » - inscrit aux articles L. 541-9-5 et L. 541-9-6 du code de l'environnement - en cas de non-atteinte des objectifs.

Pour crédibiliser ce régime de sanctions, la rapporteure invite à inscrire le montant des pénalités éventuelles au sein des cahiers des charges des filières REP, par exemple en formalisant un montant par point d'écart avec les objectifs fixés.

Enfin, compte tenu des spécificités de ces territoires et des retards accumulés, elle appelle à la mise en place de sanctions spécifiques en cas de non-atteinte des objectifs dans les territoires ultra-marins.

Proposition n° 9 : Systématiser la mise en oeuvre de sanctions en cas de non-atteinte des objectifs ; définir, dans les cahiers des charges, le montant de ces pénalités éventuelles ; permettre, en particulier, la mise en place de sanctions pour non-atteinte des objectifs dans les outre-mer.

II. COLLECTE & TRI POUR RECYCLAGE : FACE AUX RETARDS, SORTIR DU STATU QUO, EN AMPLIFIANT LA POLITIQUE DU « BAC JAUNE »

À la traîne sur la prévention, la France accuse également un retard inquiétant en matière de collecte et de tri pour recyclage des emballages, comme l'attestent les derniers chiffres transmis à la mission d'information.

Notre taux de recyclage pour l'ensemble des emballages est aujourd'hui proche des objectifs à horizon 2025 et 2030, en raison des bonnes performances enregistrées sur le verre et l'acier. Toutefois, le retard est particulièrement marquant pour les emballages en aluminium et surtout en matière plastique (cf schémas ci-dessous).

Source : Citéo

Forte de ces constats, la Commission européenne a tiré la sonnette d'alarme, dans un rapport « d'alerte » envoyé à la France au début du mois de juin dernier. Sur les emballages plastiques, en particulier, La France devra considérablement intensifier ses efforts pour atteindre ses objectifs, selon l'exécutif européen.

Le retard accumulé sur la cible de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson - issu du droit de l'Union européenne et inscrit en droit national depuis la loi « AGEC » (article L. 541-10-11) - est particulièrement marqué : 60,3 % en 202213(*).

Ces mauvaises performances invitent notre pays à sortir du statu quo : tous les leviers pertinents d'un point de vue environnemental et économique doivent donc être mobilisés, pour améliorer le geste de tri ou améliorer la collecte, dans et en dehors du foyer.

Le déploiement de l'ensemble des leviers identifiés dans le présent rapport d'information - inspirés de la « trajectoire ambitieuse, sans consigne » de l'Ademe - pourrait permettre d'atteindre l'objectif spécifique de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson.

Source : Ademe

À l'inverse, les trajectoires « de base » et « intermédiaire » de l'Ademe (voir encadré ci-après pour la présentation des trajectoires de l'étude de l'Ademe) ne suffiront pas au respect de l'atteinte de cette cible spécifique.

Afin de collecter 90 % des bouteilles plastiques pour boisson d'ici 2029, les recommandations du présent rapport devront donc être rapidement, intégralement et simultanément mises en oeuvre.

Source : Ademe

Source : Ademe

En tout état de cause, à l'inverse du scénario reposant sur la consigne pour recyclage - qui ne porterait que sur le gisement spécifique des bouteilles en plastique et, éventuellement, des canettes en aluminium - ces solutions présentent un avantage majeur : elles contribuent à améliorer le recyclage de l'ensemble des déchets d'emballages ainsi que des papiers et cartons, tout en incitant, pour certaines d'entre elles, au tri à la source des biodéchets, aujourd'hui très peu valorisés alors qu'ils représentent un tiers des ordures ménagères résiduelles.

Les trajectoires d'amélioration de la collecte des bouteilles plastiques pour boisson, hors dispositif de consigne pour recyclage (étude de l'Ademe de 2023)

L'Ademe identifie 9 leviers d'amélioration de la collecte des bouteilles plastiques consommées à domicile (hors dispositif de consigne pour recyclage) :

- mise en place d'une tarification incitative ;

- tri à la source des biodéchets ;

- extension des consignes de tri à tous les emballages ;

- densification des points d'apport pour la collecte de proximité ;

- amélioration du service de collecte en porte-à-porte ;

- passage à une collecte multimatériaux ;

- diagnostic ciblé sur les ordures ménagères résiduelles et actions correctives ;

- campagne de communication nationale/locale sur le geste de tri ;

- amélioration de la performance de tri dans les centres de tri.

Elle identifie par ailleurs trois leviers d'amélioration de la collecte des bouteilles consommées hors domicile (hors dispositif de consigne pour recyclage) :

- développement du tri sur l'espace public ;

- collecte sélective en entreprises ;

- systèmes de collecte avec gratification.

À partir de ces leviers, trois trajectoires d'amélioration de la collecte des bouteilles plastiques pour boisson sont identifiées (hors dispositif de consigne pour recyclage) :

- une « trajectoire de base », qui modélise l'effet des leviers sur la base de la mise en oeuvre et de la prolongation des actions déjà décidées ou prévues, sans déploiement d'actions complémentaires ;

- une « trajectoire intermédiaire », qui vient renforcer le déploiement de certains leviers de la trajectoire « de base », nécessitant la mise en oeuvre de moyens complémentaires ;

- une « trajectoire ambitieuse », qui modélise l'effet des leviers au maximum, appelant un déploiement renforcé de certains leviers et nécessitant des modifications importantes (réglementaires, décisions collectives, moyens financiers etc).

Les recommandations du présent rapport d'information s'inspirent de la « trajectoire ambitieuse » en s'articulant avec la quasi-intégralité des leviers identifiés par l'Ademe, à l'exception de l'amélioration de la performance de tri dans les centres de tri et du tri la source des biodéchets - qui ne relèvent pas directement de la politique de collecte des emballages ménagers. Le tri à la source des biodéchets bénéficiera toutefois de plusieurs recommandations du rapport, notamment du développement de la tarification incitative.

A. AMÉLIORER LE GESTE DE TRI, EN COMMUNIQUANT ET EN MOBILISANT DES LEVIERS INCITATIFS ET DISSUASIFS

1. COMMUNIQUER : informer le citoyen-consommateur sur le geste de tri et le rassurer sur le bien-fondé de la politique d'économie circulaire

La communication constitue un levier essentiel et prioritaire pour améliorer nos performances de collecte, de tri et de recyclage. Les actions de communication peuvent, en effet, agir de manière décisive sur le comportement des citoyens et consommateurs : d'une part, par la promotion d'un geste de tri unique et, d'autre part, en rassurant et en donnant un sens à ce geste de tri.

Il s'agit, en somme, d'informer le public en apportant une réponse claire à deux questions distinctes : comment et pourquoi trier ?

L'existence d'exceptions aux règles de tri a longtemps complexifié le geste de tri à domicile : parmi les emballages plastiques, seuls les bouteilles et flacons devaient être orientés vers le « bac jaune », alors que les barquettes, les pots ou encore les films plastiques devaient être déposés dans les ordures ménagères résiduelles.

L'extension des consignes de tri sur l'ensemble du territoire national - prévue en 2023 par la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV)14(*) de 2015 - a mis fin à cette complexité, en permettant aux habitants d'orienter tous les emballages dans le « bac jaune ».

Au 1er janvier 2023, plus de 98 % de la population de métropole était couverte par l'extension des consignes de tri. Ce chiffre devrait atteindre les 100 % en 2024. Pour les territoires ultramarins, l'échéance réglementaire de mise en oeuvre de l'extension des consignes de tri est prévue au plus tard le 1er janvier 2026.

Alors que le geste de tri est enfin harmonisé pour la quasi-intégralité du territoire national, l'heure est désormais venue de communiquer massivement sur le geste de tri afin de tirer pleinement les bénéfices de la réforme engagée il y a près de dix ans. Les doutes subsistent chez de nombreux Français - 80 % d'entre eux affirment en avoir au moment de trier leurs emballages. Une règle simple peut donc être martelée : tous les emballages sont à déposer dans le bac de tri quelle que soit leur matière.

En plus de rappeler aux citoyens-consommateurs comment trier, la communication d'ampleur que la rapporteure appelle de ses voeux doit également rassurer les Français en donnant un sens au geste de tri. Car des doutes existent également quant à la finalité de ce geste. Certains Français peuvent en effet se poser la question de l'intérêt du tri, alors que certains emballages en plastique ne sont pas encore recyclables. Les actions de communication se doivent donc de rappeler que c'est en triant plus et mieux que les filières de recyclage de certaines résines - PET des barquettes, PET opaque, PP et PS - pourront enfin se développer : l'amélioration du tri est la condition sine qua non de la mise en place de solutions industrielles de recyclage.

Proposition n° 10 : Lancer dans les plus brefs délais une campagne nationale de grande ampleur, notamment pour permettre la montée en puissance des extensions des consignes de tri.

À cette campagne nationale de grande ampleur doivent être associées des actions de sensibilisation au plus près du terrain. Tel est le rôle des « ambassadeurs de tri », missionnés par les collectivités territoriales pour intervenir auprès des habitants - dans les écoles, en porte-à-porte, en particulier dans les quartiers où les taux de collecte triée sont les plus bas - afin de rappeler les consignes d'usage en matière de gestion des déchets.

Les moyens attribués aux collectivités par les éco-organismes des filières REP « emballages ménagers » et « emballages de la restauration » pour mener ces actions de sensibilisation doivent donc être largement accrus.

Proposition n° 11 : Renforcer les moyens attribués aux collectivités par les éco-organismes pour la sensibilisation, afin par exemple de recruter un plus grand nombre d'ambassadeurs de tri.

2. INCITER : soutenir le développement de la tarification incitative sur tout le territoire

Après avoir été informés et sensibilisés, les citoyens-consommateurs doivent être plus largement incités à respecter les consignes de tri.

C'est tout le sens de la tarification incitative, qui constitue un des leviers les plus efficaces pour atteindre les objectifs de réduction des volumes de déchets en envoyant un « signal prix ». Le principe est simple : le prix payé est en partie lié au coût réel du service et à la quantité d'ordures ménagères résiduelles produite par le ménage.

Dans la très grande majorité des cas, elle prend la forme d'une taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi) : la TEOM est alors assortie d'une part variable appliquée en fonction de la quantité ou de la nature des déchets produits (cf schéma ci-après). Elle prend plus rarement la forme d'une redevance d'enlèvement des ordures ménagères incitative (REOM), calculée en fonction de l'importance du service rendu et du volume des déchets enlevés.

Source : Citéo

Comme le notait un récent rapport de la Cour des comptes15(*), l'efficacité de la tarification incitative n'est plus à prouver. En moyenne, sa mise en place permet de réduire de 41 % la quantité d'ordures ménagères résiduelles (OMR). 97 % des intercommunalités qui produisent moins de 150 kg d'OMR et 100 % de celles qui produisent moins de 100 kg d'OMR par habitant ont recours à une tarification incitative. Ces chiffres sont confortés par les analyses de l'éco-organisme Citéo (voir schéma ci-après).

Source : Citéo

En dépit de son intérêt manifeste, la tarification incitative est trop peu développée sur le territoire national : alors que l'article 70 de LTECV de 2015 fixait un objectif de 15 millions d'habitants couverts en 2020, puis 25 millions en 2025, en 2021, seulement 6,6 millions de Français (soit environ 10 % de la population) étaient concernés par un dispositif de tarification incitative.

Source : Cour des comptes

Selon la DGPR, en 2021, la tarification incitative était « en cours de mise en place » pour 3,6 millions de Français. Cette situation devrait évoluer favorablement : environ 10 millions de nos concitoyens sont actuellement concernés, ou en passe de l'être, par un dispositif de tarification incitatif.

Selon le rapport de l'Ademe de juin 2023, la trajectoire sans consigne pour recyclage, permettant d'atteindre l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson, implique de déployer la tarification incitative pour 41,5 millions de Français en 2029. Ce levier est considéré par l'Ademe comme le plus déterminant pour combler l'écart avec l'objectif de 90 %16(*).

La marche, particulièrement haute, nécessite donc une mobilisation significative des élus locaux d'ici la fin de la décennie.

La mise en place d'une tarification incitative relève en effet du choix souverain de la collectivité territoriale compétente en matière de déchets (commune ou EPCI) : cette règle ne saurait être remise en cause, sauf à enfreindre le principe de libre administration des collectivités territoriales.

L'urgence à agir rend toutefois primordiale la levée des freins financiers, techniques, réglementaires ou législatifs qui entravent le développement de la tarification incitative.

Comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes précité, un des principaux obstacles existants est le coût de mise en place du dispositif, estimé entre 20 et 40 euros par habitant, ramené à 15 euros après prise en compte des aides (soit de 45 à 75 % d'aides) : ce surcoût est dû principalement aux investissements à réaliser au démarrage, mais aussi à l'accompagnement de la démarche qui doit se poursuivre sur une longue période.

La rapporteure fait donc sienne la recommandation de la Cour des comptes tendant à accentuer substantiellement les aides au démarrage. Ces aides ponctuelles pourraient prendre la forme de subventions directes - par exemple par le biais du fonds « Économie circulaire » de l'Ademe - ou d'une atténuation supplémentaire17(*) des frais de gestion levés par l'État qui grèvent la TEOMi.

Proposition n° 12 : Développer des aides pour le développement de la tarification incitative sous la forme de subventions directes de l'Ademe (fonds Économie circulaire) ou d'une atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi).

Par ailleurs, le I bis de l'article L. 1522 bis du code général des impôts prévoit que les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale peuvent instituer la part incitative de la taxe dans une ou plusieurs parties de leur territoire et pour une période maximale de sept ans18(*) ; à l'issue de cette période, la part incitative est étendue à l'ensemble du territoire, sauf si la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale la supprime par une délibération prise dans les mêmes conditions.

Afin de mieux tenir compte des contextes locaux, il devrait être permis de faire cohabiter de manière pérenne TEOM et TEOMi : cette dernière pourrait alors être déployée sur certaines parties du territoire. Il convient, a minima, d'augmenter au-delà de sept ans la période pendant laquelle cette cohabitation est possible.

Proposition n° 13 : Autoriser la cohabitation pérenne entre TEOM et TEOMi sur un même territoire ; a minima, augmenter au-delà de 7 ans la période pendant laquelle cette cohabitation est possible.

Le I de l'article 1522 bis CGI permet d'instaurer des tarifications applicables pour un « ensemble de locaux ». Cette solution peut faciliter le déploiement de la tarification incitative dans les habitats collectifs.

Certaines collectivités territoriales - en particulier dans les zones urbaines denses - souhaiteraient un assouplissement législatif supplémentaire, qui autoriserait l'instauration d'une TEOMi par quartier ou par commune dans certaines agglomérations. Dans ce scénario, la répartition des quantités de déchets, sur lesquelles seraient appliqués les tarifs, serait fonction de la valeur locative de chaque local soumis à la TEOMi, au prorata de la valeur locative du secteur. Cette « tarification incitative collective » pourrait être expérimentée dans des collectivités volontaires sur la totalité de leur territoire ou, au choix des collectivités, n'être activée que dans les zones denses, avec une tarification incitative individuelle dans les zones de faible densité.

La « TEOMi collective » faciliterait le développement de dynamiques collectives de réduction des déchets dans les zones concernées, en plus de permettre aux collectivités de consacrer plus de moyens aux actions de prévention, plutôt que de les affecter aux tâches administratives et opérationnelles nécessaires à la mise en oeuvre d'une tarification individuelle. Ainsi, une étude réalisée par Rennes Métropole montre qu'alors que la tarification incitative individuelle nécessite un investissement de 7 millions d'euros et l'emploi d'entre 15 à 21 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, celui de la « tarification incitative collective » limiterait les ressources nécessaires à 6 ETP, permettant la mobilisation de plus de ressources au profit des actions de prévention.

Proposition n° 14 : Permettre la mise en oeuvre d'une « tarification incitative collective », pour faciliter son déploiement dans les zones urbaines.

Pour limiter les effets parfois anti-redistributifs du passage à la tarification incitative pour les ménages les plus défavorisés, une tarification sociale s'inspirant de ce qui existe aujourd'hui pour l'eau devrait également pouvoir être déployée par les collectivités, d'abord sous la forme d'une expérimentation dans certains territoires avant une généralisation éventuelle, au choix des collectivités territoriales.

La tarification sociale de l'eau : un modèle pour la tarification « déchets » ?

Afin d'améliorer l'accès à l'eau pour tous, la loi du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre, dite loi « Brottes », a autorisé à titre expérimental la mise en place d'une tarification sociale de l'eau. La loi « Engagement et proximité » du 27 décembre 2019 a généralisé le dispositif, désormais ouvert à l'ensemble des collectivités territoriales chargées du service public d'eau et d'assainissement (SPEA). En 2020, 41 collectivités territoriales représentant 11 millions de personnes ont poursuivi la politique sociale de l'eau qu'elles avaient mise en place dans le cadre de l'expérimentation.

Ces politiques sont marquées par une très grande diversité, reflet des disparités territoriales et de la variété des choix politiques des collectivités (aides forfaitaires au paiement de la facture d'eau ; modulation du prix de la part fixe et/ou de la part variable de l'eau pour certaines catégories d'usagers ; modulation du prix par tranches de volume d'eau consommé...). La rapporteure estime que cette politique sociale de l'eau pourrait servir de modèle pour la tarification « déchets ».

Proposition n° 15 : Expérimenter une tarification sociale « déchets », s'inspirant de la tarification sociale sur l'eau, afin notamment de limiter les effets anti-redistributifs potentiels du passage à une tarification incitative.

Déployer la tarification incitative pour plus de la moitié de la population française d'ici la fin de la décennie - cible indispensable à l'atteinte des objectifs, selon l'Ademe - suppose enfin, et surtout, d'inciter les collectivités territoriales à emprunter cette voie : celles qui mettront en place une telle tarification devraient ainsi pouvoir bénéficier d'un « bonus » financier de la part des éco-organismes (voir infra).

3. SANCTIONNER : faire du tri une obligation dont la méconnaissance est susceptible d'être sanctionnée

Dans les cas où l'information et l'incitation n'auront pas suffi à améliorer le geste de tri, un levier répressif doit pouvoir être activé par les collectivités territoriales chargées de la collecte des déchets.

Pour ce faire, la rapporteure propose que les collectivités puissent envisager une modification de leurs règlements de collecte des collectivités afin d'interdire les emballages dans les ordures ménagères résiduelles. La présence d'emballages recyclables dans les ordures ménagères résiduelles pourrait alors être contrôlée par le personnel chargé de la collecte. Dans les quartiers ou habitations dans lesquels des erreurs de tri auront été constatées, un « ambassadeur de tri » pourrait être missionné pour sensibiliser les habitants sur le geste de tri.

Donner un caractère obligatoire au tri contribuera ainsi à l'apprentissage et au respect du geste du geste de tri.

Proposition n° 16 : Modifier les règlements de collecte des collectivités territoriales afin d'interdire les emballages dans les ordures ménagères résiduelles.

En cas de « récidive », et après des opérations de sensibilisation ainsi menées, des sanctions administratives simplifiées devraient pouvoir être imposées en cas de non-respect du règlement de collecte.

La rapporteure préconise de s'inspirer du modèle bruxellois, régulièrement cité dans les auditions. À Bruxelles, le non-respect de l'obligation de tri est passible d'amendes administratives de 75 euros. Lorsque, outre l'absence de tri, les agents constatent la présence de récipients en verre dans le sac, le montant de l'amende peut atteindre 125 euros.

Proposition n° 17 : Définir des sanctions administratives simplifiées en cas de non-respect de ces règles de tri, à l'instar du modèle développé en Belgique.

B. AMÉLIORER LA COLLECTE, DANS ET EN DEHORS DU FOYER, ET L'ADAPTER À LA RÉALITÉ DES TERRITOIRES

Parallèlement à l'amélioration du geste de tri, une amélioration de la collecte est indispensable à l'atteinte des objectifs que notre pays s'est fixés.

1. MIEUX COLLECTER À DOMICILE : faire monter en puissance le bac jaune

Il convient de manière prioritaire d'adapter les schémas de collecte aux objectifs.

Tout d'abord, une amélioration de collecte en porte-à-porte doit être engagée, particulièrement dans les territoires dont les performances ne sont pour l'heure pas suffisantes (soit dans les territoires en porte-à-porte ayant des faibles performances - 12,4 millions d'habitants - ou des performances moyennes - 20 millions d'habitants19(*)).

Cela peut notamment reposer sur une augmentation de la fréquence des collectes en porte-à-porte, de la taille des bacs jaunes dans les logements collectifs ou encore d'une amélioration du service dans les zones moins bien desservies.

En contrepartie, la fréquence des collectes et la taille des bacs d'ordures ménagères résiduelles pourraient être réduite, afin de rendre la collecte sélective plus incitative ou au moins équivalente à la collecte des OMR.

Par ailleurs, dans le cadre de la collecte par apport volontaire, une densification des points d'apport (conteneurs, bornes, colonnes semi-enterrées ou aériennes) devra être engagée, particulièrement dans les territoires dont les performances ne sont pour l'heure pas suffisantes (soit dans les territoires en apport volontaire ayant des faibles performances - 2,2 millions d'habitants - ou des performances moyennes - 4,1 millions d'habitants20(*)).

Enfin, dans le cadre du passage en porte-à-porte ou de l'apport volontaire, la collecte multimatériaux semble par ailleurs devoir être privilégiée, compte tenu des meilleures performances de cette modalité de collecte du « bac jaune ».

Les schémas principaux d'organisation de la collecte des recyclables (source : Ademe, « Consigne pour réemploi et recyclage des bouteilles de boissons », 2021)

Il existe trois schémas principaux d'organisation de la collecte des recyclables :

• Multimatériaux, qui correspond à une collecte en bi-flux : verre d'un côté/papier et emballages hors verre d'un autre côté ;

• Emballages/papiers, qui correspond à une collecte en tri-flux : verre/papier/emballages hors verre ;

• Papier-carton/Plastiques-métaux, qui correspond à une collecte en tri-flux : verre/papier carton/plastiques-métaux.

Le schéma « mixte » correspond à des organisations où il existe au moins deux des trois schémas principaux, chacun représentant plus de 10 % des tonnages.

Dans son rapport sur l'organisation de la collecte des emballages et papiers graphiques dans le service public de prévention et de gestion des déchets, l'Ademe indique que, en porte-à-porte, les quantités collectées sont en moyenne plus importantes dans le schéma multimatériaux par rapport aux deux autres schémas tri-flux.

Proposition n° 18 : Adapter les schémas de collecte aux objectifs : augmentation de la fréquence des collectes et de la taille des bacs dans les habitations lorsque cela est possible, densification des points d'apport volontaire, passage à une collecte multimatériaux...

Le surcoût induit par le renforcement de la collecte sélective devra majoritairement être pris en charge par les producteurs, plutôt que par les contribuables locaux. À cet égard, l'augmentation du taux de couverture des coûts du service public de gestion des déchets (SPGD) par la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) emballages ménagers et papiers semble inévitable.

En effet, le principe de REP - qui fait reposer les coûts afférents à la prévention et à la gestion des déchets sur les metteurs sur le marché - ne s'applique aujourd'hui que partiellement dans le champ de cette filière.

Jusqu'en avril 2023, et la promulgation de la loi portant fusion des filières REP d'emballages ménagers et des producteurs de papier21(*), l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement prévoyait en effet que le niveau de prise en charge des coûts supportés par le SPGD - calculés en fonction des coûts de référence d'un SPGD optimisé tenant compte de la vente des matières traitées - était fixé à 80 % pour les déchets d'emballages ménagers et à 50 % pour les déchets d'imprimés papiers et de papiers à usage graphique.

Ces taux réduits constituaient une dérogation au principe, posé par l'article 8 bis de la directive-cadre « déchets » européenne22(*), d'une couverture intégrale des coûts par les producteurs assujettis à la REP.

À l'initiative du Sénat, la loi du 24 avril 2023 a modifié l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement afin de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de déterminer le niveau de prise en charge des coûts supportés par le SPGD par la nouvelle filière, issue de la fusion entre la REP « emballages ménagers » et la REP « papiers ».

La rapporteure invite donc le pouvoir réglementaire à se saisir de l'opportunité offerte par ce texte pour augmenter ce taux de couverture et renforcer, par là même, la prise en charge financière de la prévention et de la gestion des déchets par les producteurs.

Proposition n° 19 : Pour financer l'adaptation des schémas de collecte, augmenter le taux de couverture des coûts du SPGD.

Le taux de couverture des coûts du SPGD pourrait de surcroît constituer un excellent levier incitant les collectivités territoriales à développer un programme de collecte ambitieux, compatible avec nos objectifs nationaux.

Ainsi, en sus de l'augmentation « de base » du taux de couverture précédemment proposé, un bonus incitatif pourrait être instauré pour tendre vers une prise en charge intégrale des coûts - soit 100 % des coûts supportés par le SPGD calculés en fonction des coûts de référence d'un service optimisé tenant compte de la vente des matières traitées.

Ce bonus incitatif pourrait être attribué pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions compatibles avec la « trajectoire ambitieuse, sans consigne » de l'Ademe (mise en place d'une tarification incitative, renforcement des contrôles des ordures ménagères résiduelles, augmentation de la fréquence des collectes et de la taille des bacs, densification des points d'apport volontaire, déploiement du tri à la source des biodéchets...).

Proposition n° 20 : Instaurer un bonus tendant vers une couverture intégrale des coûts (100 %), pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions visant à améliorer le taux de collecte.

2. MIEUX COLLECTER EN DEHORS DU FOYER : systématiser le tri dans l'espace public et dans les entreprises

Comme elle l'avait souligné lors des débats sur la loi « AGEC », le rapporteure estime nécessaire d'améliorer les performances de la collecte sélective pour les produits consommés hors du foyer (dans la rue, dans les établissements recevant du public, en entreprise et administration...).

Si les quantités concernées - 1,6 kilogramme par habitant et par an (kg/hab/ab) d'emballages et de papiers dans les corbeilles de rue, selon Citéo - sont bien plus modestes que le gisement encore présent dans les ordures ménagères résiduelles - 54 kg/hab/an - un meilleur tri « hors foyer » présente un enjeu fort en termes de cohérence du geste de tri. Assurer une continuité de ce geste, c'est ancrer la pratique du tri dans le quotidien des Français, dans et en dehors de leur foyer.

À cette fin, la loi « AGEC » a prévu que les éco-organismes de la REP « emballages » prennent en charge les coûts afférents à la généralisation d'ici au 1er janvier 2025 de la collecte séparée pour recyclage des déchets d'emballages pour les produits consommés hors foyer, notamment par l'installation de corbeilles de tri permettant cette collecte séparée.

Cette généralisation pourrait être anticipée, en fixant, dans le cahier des charges de la REP « emballages ménagers », des objectifs d'installation de corbeilles de rue par habitant et par commune, compatibles avec nos cibles de collecte triée. Le cahier des charges devra également identifier les modalités de financement de cette nouvelle obligation par les éco-organismes.

Proposition n° 21 : Anticiper dès à présent la généralisation, d'ici au 1er janvier 2025, de la collecte séparée pour recyclage des déchets d'emballages pour les produits consommés hors foyer. Dans le cahier des charges de la REP « emballages ménagers », fixer des objectifs d'installation de corbeilles de rue par habitant et par commune. Identifier également des financements dédiés au sein du cahier des charges.

L'amélioration du tri « hors foyer » passera également par un développement ponctuel de dispositifs de collecte séparée avec gratification, de manière préférentielle dans des lieux publics à forte affluence ou dans les zones où les performances sont particulièrement faibles, pour éviter un détournement des flux actuellement collectés dans le « bac jaune » ou les autres dispositifs « hors foyer ».

À l'inverse de la consigne - impliquant un versement direct du consommateur au moment de l'acte d'achat du produit - la gratification suppose un financement par le ou les acteurs la mettant en place (par exemple un hyper ou supermarché) (cf encadré).

Le développement ponctuel de dispositifs de collecte séparée avec gratification dans des lieux publics à forte affluence impliquera donc un soutien financier des éco-organismes.

Qu'est-ce que la gratification ?

La consigne est à distinguer de la gratification. Dans le cadre d'un dispositif de gratification, aucune somme d'argent n'est versée par le consommateur au moment de l'achat du produit, mais une somme d'argent (sous forme de bons d'achat, bons de réduction, dons à des associations, etc.) lui est attribuée lorsqu'il retourne l'emballage vide et intègre à un point de collecte dédié. À la différence de la consigne, la gratification n'implique donc aucune somme d'argent supplémentaire dans le prix de vente du produit.

À date, la collecte par gratification des bouteilles en plastiques de boisson peut être réalisée principalement selon deux modalités différentes :

via des automates de collecte de type RVM (reverse vending machine) ;

via des plateformes collaboratives de récupération des bouteilles ou d'autres dispositifs de collecte innovante venant se greffer sur le dispositif actuel de collecte sélective (par exemple, projet basé sur le scan du code-barre de la bouteille via une application mobile et dépôt dans le bac de collecte sélective auquel a été ajouté une surcouche technologique permettant d'identifier automatiquement la typologie de l'emballage).

Sources : Ademe, Consigne pour réemploi et recyclage des bouteilles de boissons, 2021.
Ademe, Prospective sur les leviers d'amélioration des performances de la collecte sélective, 2023.

La rapporteure estime que de tels dispositifs pourront opportunément être expérimentés à l'occasion de grands événements sportifs que la France s'apprête à accueillir (Mondial de rugby, Jeux olympiques et paralympiques de 2024).

Le développement de dispositifs de collecte séparée avec gratification devra se faire en lien avec les collectivités territoriales, compte tenu notamment du taux de « cannibalisation » du « bac jaune » par les machines installées sur le domaine public, c'est-à-dire de la part des flux qui étaient initialement collectés sélectivement par les collectivités territoriales (environ 65 % selon l'étude de l'Ademe)23(*). Une part des tonnages collectés via les mécanismes de gratification devra donc être intégrée dans le calcul de la performance de la collectivité.

Selon l'Ademe, il existait, en 2021, 1 000 machines permettant d'effectuer une collecte avec gratification. La trajectoire « ambitieuse » de l'étude implique un déploiement de 800 machines supplémentaires d'ici la fin de la décennie24(*).

Proposition n° 22 : Développer ponctuellement des dispositifs de collecte séparée avec gratification, financés par les éco-organismes, en lien avec les collectivités territoriales. Expérimenter ces dispositifs à l'occasion de grands événements (Mondial de Rugby, Jeux Olympiques de 2024).

Mieux collecter en dehors du foyer, c'est enfin et surtout mieux appliquer les obligations s'appliquant aux professionnels (tri 7 flux et obligations de collecte séparée dans les établissements recevant du public (ERP)).

Tri 7 flux et obligations de collecte séparée dans les établissements recevant du public

- le tri 7 flux : Cette obligation consiste en un tri à la source et une valorisation des 5 flux de déchets non dangereux de papiers/cartons, plastiques, métaux, verre et bois, ainsi que, depuis la loi « AGEC », des fractions minérales (béton, briques, tuiles et céramiques, pierres) et du plâtre (article L. 541-21-2 du code de l'environnement). À compter du 1er janvier 2025, l'article 74 de la loi AGEC élargit l'obligation de tri à un 8eme flux : les textiles.

Cette obligation s'impose à tout professionnel produisant ou détenant des déchets non dangereux - à l'exception des professionnels qui ont recours au service public de prévention et de gestion des déchets (SPPGD) et qui produisent moins de 1 100 litres de déchets par semaine, qui doivent trier leurs déchets conformément aux consignes de tri édictées par la collectivité compétente. L'obligation de tri des fractions minérales et du plâtre s'impose à tout producteur ou détenteur de déchets de construction et de démolition - sauf si sur l'emprise du chantier, il n'est pas possible d'affecter une surface au moins égale à 40 m2 pour le stockage des déchets ou si le volume total de déchets produits (tous déchets confondus) est inférieur à 10 m3 sur l'ensemble de la durée du chantier.

l'obligation de collecte séparée dans les établissements recevant du public (ERP) : l'article 74 de la loi AGEC a introduit une nouvelle obligation de collecte séparée dans les ERP (article L. 541-21-2-2 du code de l'environnement), produisant plus de 1 100 litres de déchets, tous déchets confondus, par semaine. Cet article dispose ainsi que les exploitants des ERP doivent organiser la collecte séparée des déchets du public reçu dans leurs établissements ainsi que des déchets générés par leur personnel. Pour cela, ils mettent à la disposition du public des dispositifs de collecte séparée des déchets d'emballages ménagers constitués majoritairement de plastique, acier, aluminium, papier ou carton ainsi que des déchets d'imprimés papiers et de papiers à usage graphique, d'une part, et des biodéchets, d'autre part.

Tout producteur ou détenteur de déchets ne respectant pas ses obligations de tri 7 flux ou de collecte séparée dans les ERP encourt des sanctions administratives définies par l'article L. 541-3 du code de l'environnement, comme une astreinte journalière allant jusqu'à 1 500 euros ou une amende pouvant atteindre 150 000 euros, ainsi que des sanctions pénales, avec une amende du montant prévu pour les contraventions de la 4e classe (art. R. 541-78 du code de l'environnement).

Le non-respect du tri 7 flux est même passible d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende (L. 541-46 du code de l'environnement).

Au terme de ses auditions, la rapporteure est convaincue que d'importantes marges de manoeuvre existent quant au respect de ces règles de collecte triée. Elle invite donc l'État à massifier le contrôle ces obligations et à en sanctionner systématiquement le non-respect.

Proposition n° 23 : Massifier le contrôle du tri 7 flux et du tri au sein des établissements recevant du public et sanctionner systématiquement le non-respect de ces obligations.

3. ADAPTER la collecte : déployer des moyens adaptés dans les territoires urbains, touristiques et ultra-marins

Améliorer la collecte, c'est enfin l'adapter à la réalité des territoires assujettis à des contraintes limitant structurellement leur performance.

En particulier, l'efficacité du geste de tri diffère très largement selon la nature de l'habitat : plus il est dense, moins la collecte sélective y est performante (cf schéma ci-après).

Source : Citéo

Une adaptation des schémas de collecte est donc particulièrement nécessaire dans les zones urbaines. L'augmentation du taux de couverture des coûts du SPGD préconisée par la mission d'information (cf supra) contribuera à amortir les surcoûts associés pour les collectivités territoriales.

Une attention particulière devra être portée aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, au regard des caractéristiques qui leur sont propres - logements plus souvent surpeuplés et plus petits, prépondérance des logements collectifs. Des dispositifs incitatifs et innovants - fondés par exemple sur des systèmes de gratification et adossés à une sensibilisation renforcée par des « ambassadeurs de tri » - pourraient y être déployés.

Proposition n° 24 : Dans les zones urbaines, adapter les schémas de collecte à la nature de l'habitat ; déployer des dispositifs incitatifs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Les territoires à forte activité touristique connaissent également des problèmes spécifiques pour adapter leurs fréquences de collecte à la variation parfois très importante des populations les fréquentant.

Source : Cour des comptes

La rapporteure fait sienne la recommandation de Cour des comptes tendant à affecter une part additionnelle à la taxe de séjour - réglée par les vacanciers en plus du prix de l'hébergement au logeur, à l'hôtelier ou propriétaire - afin de permettre la couverture des charges supplémentaires du service public des déchets générés spécifiquement par la fréquentation touristique.

Proposition n° 25 : Dans les zones touristiques, mobiliser des moyens complémentaires financés par une part additionnelle à la taxe de séjour payée par les usagers à l'origine de ces surcoûts.

Enfin, dans la continuité des travaux de la délégation sénatoriale aux outre-mer - dont le rapport de décembre 202225(*) dépeignait le retard alarmant de la collecte et du traitement des déchets et plaidait pour un rattrapage massif par rapport à l'Hexagone - la rapporteure juge essentiel de calibrer des dispositifs à même de répondre à l'urgence écologique des territoires ultra-marins. Des mécanismes de gratification, financés par les éco-organismes, pourraient y être plus largement déployés pour encourager la collecte sélective dans les zones les plus défavorisées ou isolées.

Proposition n° 26 : Dans les territoires ultra-marins, développer les dispositifs de gratification pour encourager la collecte sélective dans les zones les plus défavorisées ou isolées.

III. RÉÉVALUER EN 2026 L'OPPORTUNITÉ DE LA MISE EN PLACE D'UNE CONSIGNE POUR RECYCLAGE SUR LES EMBALLAGES DE BOISSON, DONT LE BILAN COÛT-AVANTAGE SEMBLE AUJOURD'HUI NÉGATIF, D'UN POINT DE VUE ENVIRONNEMENTAL, SOCIAL ET ÉCONOMIQUE

A. LA CONSIGNE POUR RECYCLAGE : UN DISPOSITIF SÉDUISANT, AUX NOMBREUX EFFETS PERVERS

Améliorer nos performances en matière de collecte et de tri pour recyclage implique-t-il de mobiliser, en complément des nombreux outils déjà identifiés, une consigne pour recyclage sur les emballages de boissons, notamment sur les bouteilles plastiques, voire sur les canettes en aluminium ?

Pour la rapporteure, cela ne fait pas de doute : à ce stade, la consigne pour recyclage ne constitue pas un levier pertinent d'un point de vue environnemental et économique : séduisant au premier abord, le dispositif est en réalité porteur de nombreux effets pervers.

1. Un dispositif moins performant qu'il n'y paraît

Aujourd'hui, des dispositifs de consigne pour recyclage des bouteilles en PET - et plus rarement d'autres résines de plastique - ainsi que pour les canettes en aluminium, sont utilisés dans plusieurs pays européens, en particulier en Allemagne depuis 2003.

Les résultats de collecte et de recyclage atteints par ces pays sont, en première analyse, très satisfaisants.

Si on s'arrête aux seules bouteilles plastiques, selon l'étude comparative réalisée par l'Ademe, le taux de collecte pour recyclage des bouteilles en PET est d'au moins 85 % dans les pays ayant mis en place un dispositif de consigne pour recyclage26(*), contre seulement 58 % en moyenne dans l'Union européenne (données 2018)27(*).

Le taux de collecte dépasse dans certains pays l'objectif fixé par l'Union européenne de collecter 90 % des bouteilles plastiques en vue de leur recyclage en 2029. Ainsi, en Allemagne, par exemple, le taux de collecte pour recyclage de toutes les bouteilles en PET est d'environ 98 %28(*).

Comme l'avait estimé le Gouvernement lors de l'examen de la loi « AGEC » en 2019 et 2020, la consigne pour recyclage pourrait alors apparaître comme la solution miracle pour atteindre l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson d'ici 2029, fixé par le droit de l'Union européenne et le droit national.

Toutefois, le système est moins performant qu'il n'y paraît.

a) CAR les bouteilles à considérer ne sont pas seulement les bouteilles en PET, mais l'ensemble des bouteilles plastiques

Les excellents résultats de l'Allemagne en matière de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques, fréquemment mis en avant, concernent uniquement les bouteilles en PET.

Or, l'atteinte de l'objectif de 90 % nécessite également de collecter les bouteilles fabriquées avec d'autres résines plastiques, comme le PEHD. Celui-ci est pourtant exclu la plupart du temps du périmètre de la consigne29(*) - notamment pour des raisons sanitaires dans la mesure où il est surtout utilisé pour la fabrication des bouteilles de lait. En France, le PEHD est utilisé pour fabriquer 45 % des bouteilles de lait, qui sont également concernées par l'objectif d'une collecte pour recyclage de 90 % d'ici 202930(*).

L'atteinte de l'objectif de 90 % pour l'ensemble des bouteilles plastiques pour boisson suppose donc :

soit, de capter, via le SPGD, au moins 90 % des bouteilles non consignées fabriquées à partir d'autres résines, ce qui soulève la question de la pertinence de créer un deuxième système parallèle exclusivement pour les bouteilles en PET ;

soit, de mettre en place un système de consigne sur toutes les bouteilles plastiques indépendamment de leur résine. Mais dans la majorité des cas européens recensés par l'Ademe, la consigne pour recyclage ne porte que sur les bouteilles en PET. En tout état de cause, une consigne généralisée à l'ensemble des bouteilles plastiques supposerait, en termes d'organisation, que les bouteilles collectées par cet intermédiaire soient sur-triées. Là encore, le caractère opportun de la mise en place d'un nouveau système parallèle n'est pas une évidence.

b) CAR les situations en Europe sont plus diverses que ce que les défenseurs de la consigne pour recyclage laissent penser

Certains pays qui ont mis en place un dispositif de consigne pour recyclage n'atteignent pas encore l'objectif de collecte de 90 % pour les bouteilles de PET. C'est par exemple le cas de la Suède, où il est de 86 %31(*) et de la Croatie, où il est de 88 %32(*).

En tout état de cause, en raison de l'hétérogénéité des modèles de collecte et de tri des déchets, la comparaison européenne présente d'évidentes limites.

La France se caractérise par une place historique du SGPD dans la gestion des déchets : les éco-organismes y jouent un rôle plus limité, avant tout financier. Ce n'est pas le cas de tous les pays européens, où la REP « emballages » s'articule souvent autour d'un ou de plusieurs éco-organismes « opérationnels ».

Ce dernier modèle - impliquant une gestion quasiment directe du flux de déchets par son metteur sur le marché - semble plus à même de s'articuler avec un système de consigne pour recyclage qu'une REP « à la française », finançant un service public géré localement.

En outre, il est difficile de transposer les résultats de pays qui sont très souvent plus petits et plus denses que la France. À titre d'exemple, si la France avait le même maillage de points de reprise que le Danemark au kilomètre carré, il en faudrait environ 70 000, rien que sur le territoire métropolitain33(*), contre 58 000 dans le scénario de base de l'Ademe34(*).

À cet égard, il semble difficile de tirer les leçons des éventuels succès étrangers, qui pourraient être complexes de transposer dans notre pays.

c) CAR l'atteinte de l'objectif de 90 % avec un dispositif de consigne repose sur un ensemble de conditions, dont rien n'indique qu'elles puissent être remplies

Selon l'étude de l'Ademe de 2023, l'atteinte de l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson en 2029 en cas de mise en place d'un dispositif de consigne pour recyclage n'est pas garantie.

Un dispositif de consigne pour recyclage des bouteilles en plastique performant reposerait donc en effet sur plusieurs conditions, dont rien n'indique qu'elles puissent être remplies :

- un montant de la consigne suffisamment incitatif35(*) ;

- un système de marquage suffisamment facile à comprendre pour le consommateur, afin d'assurer une bonne compréhension du dispositif et une simplicité d'utilisation ;

- une communication et une sensibilisation efficace à comprendre pour le consommateur, afin de faciliter l'adhésion et la compréhension du dispositif, et de limiter l'effet potentiel de la consigne sur le geste de tri en collecte sélective ;

- la mise en place d'un maillage plus fin de points de reprise des emballages consignés comprenant non seulement les commerces de grande et moyenne surface, mais aussi les supérettes et les autres petits commerces. À cet égard, la situation française peut difficilement être comparée à celle de nombreux pays où la consigne a été mise en place, plus petits et plus denses. Or, pour les petits commerces, la collecte est plus difficile à mettre en place - en raison du manque de place - et coûte plus cher - en raison des coûts de personnel élevé en cas de déconsignation manuelle ;

- la mise en place d'une collecte et d'un traitement performant des emballages consignés non repris et des bouteilles plastiques dont les résines pourraient ne pas être couvertes par la consigne (comme les bouteilles de lait). Il serait donc nécessaire d'améliorer, dans le même temps, l'efficacité du bac jaune. Il est paradoxal que l'efficacité du dispositif censé pallier les insuffisances du bac jaune repose sur la performance de ce dernier.

Il convient de noter que certaines de ces conditions impliquent des coûts élevés, aussi bien d'investissement que de fonctionnement.

2. La consigne pour recyclage : une « fausse bonne idée » environnementale

Derrière des atours attrayants, la consigne pour recyclage est susceptible d'induire des effets pervers environnementaux, qui rendent son choix discutable. Aussi, le dispositif a tout de la « fausse bonne » idée verte.

a) CAR loin de lutter contre le plastique, la consigne pour recyclage en pérennise la production et la consommation !

Il convient tout d'abord de rappeler que le processus de recyclage du plastique n'est pas un mécanisme de « résorption des déchets ». Il ne peut pas fonctionner en boucle parfaitement fermée, en raison de la dégradation progressive de la qualité des polymères. Cela implique d'une part la production inévitable de déchets ultimes non recyclables, et d'autre part un usage persistant d'énergies fossiles pour intégrer du plastique primaire dans les nouvelles bouteilles. Le recyclage est un « amortisseur temporel »36(*) de la production de déchets, pour reprendre l'expression du rapport de 2020 de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) d'Angèle Préville et Philippe Bolo. Il ne fait que prolonger la durée de vie d'une matière qui reste, in fine, un déchet à éliminer.

Nécessaire à la bonne gestion d'un déchet déjà produit, le recyclage n'en demeure pas moins inopérant pour atteindre les objectifs de réduction de la consommation plastique.

La consigne pour recyclage sur les bouteilles plastiques pourrait même être un frein à l'atteinte des objectifs de réduction spécifiques fixés par la loi sur ce gisement - division par deux d'ici 2030 et disparition complète en 2040.

Elle pourrait tout d'abord entraîner un « effet rebond »37(*). Le dispositif ancre en effet dans la durée la consommation des plastiques à usage unique dans les habitudes des consommateurs. Rendre la bouteille consignée donne immanquablement l'impression illusoire que le « devoir écologique » est accompli, et cela, qui plus est, par un geste qu'on pourrait qualifier de « ludique ». La consigne détournerait donc l'attention du consommateur des objectifs prioritaires en matière de déchets.

La consigne pour recyclage sur les bouteilles en plastique induit également un risque « d'effet verrou »38(*) : les investissements nécessaires pour mettre en place le dispositif peuvent détourner des politiques de réduction du volume des déchets afin de s'assurer de l'équilibre économique du système de consigne. Certains acteurs de l'industrie plastique interrogés par la rapporteure dans le cadre de la mission d'information ont d'ailleurs souligné que l'objectif de réduction de la consommation de bouteilles pourrait difficilement s'articuler avec les investissements qui devraient être consentis pour développer la consigne pour recyclage.

Proportion de boissons vendues dans des emballages réutilisables en Allemagne de 2004 à 2020 (en pourcentage)

Ministère fédéral allemand de l'Environnement, de la Protection de la nature, de la Sécurité nucléaire et de la Protection des consommateurs

En Allemagne, on observe ainsi une corrélation forte -- certes sans lien de causalité strictement démontré -- entre la mise en place de la consigne pour recyclage des bouteilles en PET et l'intensification de leur consommation. En 2004, au moment où une telle consigne a été mise en place, la part des bouteilles réutilisables était de 66,3 %. Elle est descendue jusqu'à 41,2 % en 201839(*). Cela représente une diminution de l'usage des bouteilles réutilisables de 38 %. Au sein des emballages pour boisson à usage unique, la part des briques en carton par rapport aux bouteilles en plastique a également décru sur la période.

L'étude « consommateur » de l'Ademe relève certes qu'une partie des Français estiment qu'ils achèteront moins de bouteilles en plastique pour boisson en cas de mise en place de la consigne pour recyclage, avec un baisse de la consommation des boissons non consignées (entre un cinquième et un tiers des Français)40(*) ou vers l'eau du robinet (pour un tiers des Français)41(*).

Néanmoins, l'Ademe reconnaît que « ces résultats doivent (...) être exploités avec prudence dans la mesure où il s'agit de comportements anticipés par le consommateur qui dépendent de sa capacité à se projeter dans un dispositif qui n'existe pas à date »42(*).

Par ailleurs, et surtout, ces résultats ne prennent pas en compte l'effet « verrou » de la consigne sur l'offre, précédemment décrit.

Pour la rapporteure, les études de l'Ademe ne contredisent donc pas l'analyse faite par la commission : la consigne pour recyclage risque de pérenniser la production et la consommation de plastique.

b) CAR la consigne complexifie le geste de tri, alors qu'il venait tout juste d'être simplifié !

La consigne pour recyclage est également source d'une complexification du geste de tri. L'extension des consignes de tri (voir supra), généralisée à la quasi-totalité du territoire en début d'année, visait pourtant le contraire !

Il pourrait donc sembler contradictoire d'exiger du citoyen-consommateur un geste de tri spécifique reposant sur la consigne pour une partie des déchets - bouteilles plastiques ou canettes en aluminium - alors même que lui demander un geste de tri unique a été identifié ces dernières années comme un moyen pivot afin d'assurer une collecte efficace des déchets ménagers recyclables.

Le moment choisi est particulièrement inopportun puisque cette politique de simplification engagée depuis maintenant huit ans vient tout juste d'être généralisée et n'a toujours pas déployé tous ses effets.

Selon l'étude « consommateur » réalisée par l'Ademe, les Français déclarent certes ne pas envisager de moins trier en cas de mise en place de la consigne pour recyclage43(*).

Cependant, l'agence appelle, encore une fois, à utiliser ces résultats avec prudence, « dans la mesure où il s'agit de comportements anticipés par le consommateur qui dépendent de sa capacité à se projeter dans un dispositif qui n'existe pas à date »44(*).

c) CAR les bouteilles en plastique ne sont que la partie visible de la pollution plastique et des enjeux d'économie circulaire !

Le choix d'une consigne pour recyclage pour les bouteilles en plastique pourrait également être paradoxal puisqu'il reviendrait à mettre en place un dispositif de collecte spécifique pour un gisement secondaire. Les bouteilles en plastique pour boisson représentent 1 % des déchets ménagers45(*), 2,8 % des déchets d'emballages46(*) et 15,4 % des déchets emballages en plastique47(*). Quel que soit le référentiel choisi, les bouteilles en plastique représentent une très faible part des gisements de déchets.

Il en est de même avec les « dépôts sauvages ». Contrairement à un préjugé largement répandu sur la consigne pour recyclage48(*), celle-ci ne peut qu'avoir un impact marginal sur leur résorption car les bouteilles en plastique ne représentent que 1 % des déchets non collectés et abandonnés49(*).

Les bouteilles en plastique pour boisson sont aussi bien mieux recyclées que la plupart des déchets. Elles sont collectées pour recyclage à hauteur de 60,3 % en 202250(*) alors que le taux de recyclage des emballages plastiques est de 21,4 %51(*). Il est donc peu rationnel de concentrer les efforts sur le gisement sur lequel les progrès seront, par définition, les plus faibles.

Une consigne pour recyclage, si elle devait être mise en place, devrait donc porter sur plusieurs gisements, et inclure notamment les canettes en aluminium, qui ont un taux de recyclage très inférieur à celui des bouteilles plastiques : deux canettes sur trois ne sont pas recyclées.

L'Ademe souligne à ce propos que « tous les scénarios modélisés avec consigne présentent, en moyenne, des taux de collecte pour recyclage des emballages légers inférieurs à celui de la trajectoire ambitieuse de la collecte sélective sans consigne »52(*).

La consigne ne couvre qu'entre 11 % et 18 % des emballages légers, mais le choix de la mettre en place ou non a des effets d'entraînements forts sur la collecte du reste de ceux-ci53(*). Un écart compris entre 3 et 4,2 points de la performance de la collecte pour recyclage des emballages légers apparaît entre les scénarios avec consigne pour recyclage et du scénario sans consigne en faveur de ce dernier54(*).

Source : Ademe

Contrairement au dispositif de consigne pour recyclage, les solutions proposées dans le présent rapport d'information pour un bac jaune ambitieux améliorent le recyclage de l'ensemble des déchets d'emballages, tout en incitant, pour certaines de ces solutions, au tri à la source des biodéchets, aujourd'hui très peu valorisés alors qu'ils représentent un tiers des ordures ménagères résiduelles.

À cet égard, la rapporteure ne souscrit pas au parti-pris méthodologique de l'Ademe55(*), qui associe au dispositif de consigne une activation « intermédiaire » des autres leviers d'amélioration du bac jaune. Déployer un dispositif spécifique et coûteux pour certains emballages ne peut pas être une justification pour mettre en place une collecte au rabais, et donc moins performante, pour l'ensemble des emballages légers !

« Des milliers de RVM [reverse vending machine /automate] ne remplaceront jamais des millions de bacs jaunes »56(*).

3. Un dispositif économiquement irrationnel, socialement et territorialement injuste
a) CAR l'efficacité du dispositif implique de faire coexister deux systèmes de collecte...au mépris de la rationalité économique

Les scénarii élaborés par l'Ademe dans lesquels la consigne pour recyclage permet d'atteindre l'objectif de 90 % de collecte des bouteilles plastiques pour boisson impliquent des coûts trop souvent sous-estimés dans le débat public.

L'Ademe rappelle également la nécessité d'un maillage fin de points de déconsignation, notamment dans les petits commerces. Or, la collecte manuelle a un coût deux à trois fois plus élevé que la collecte mécanique57(*).

Aussi, le succès du système de consigne suppose, en parallèle, la mise en place d'une collecte performante des emballages consignés non repris et des bouteilles plastiques dont les résines pourraient ne pas être couvertes par la consigne (comme le PEHD).

Une fois l'ensemble de ces coûts pris en compte, il est possible de comparer le coût annuel des trajectoires avec consigne pour recyclage et de la trajectoire bac jaune ambitieux sur l'ensemble des emballages légers. À horizon 2029, selon l'Ademe, une trajectoire de bac jaune ambitieux aurait un coût net total de 1,834 milliard d'euros par an contre 2,015 milliards à 2,063 milliards58(*) pour les scénarios qui incluent dans le champ de la consigne au moins les bouteilles en PET et les canettes contre 1,126 milliard d'euros par an aujourd'hui59(*). Ce montant ne prend pas en compte les consignes non retournées, qui ne doivent pas être considérées comme une source de financement du dispositif.

Si l'on exclut le scénario de la consigne à périmètre réduit au PET clair et foncé, le surcoût des scénarios avec consigne pour les citoyens-contribuables peut donc être évalué à un montant compris entre 181 et 229 millions d'euros par an à partir de 202960(*).

Ce chiffre pourrait même être sous-estimé en raison du parti-pris méthodologique de l'étude de l'Ademe, qui fait associer au dispositif de consigne pour recyclage une simple « trajectoire intermédiaire » pour le bac jaune. Or, la rapporteure estime que les mesures du scénario « bac jaune ambitieux » sont nécessaires, à long terme, pour atteindre les objectifs de recyclage de tous les emballages61(*).

En somme, la consigne n'est absolument pas efficiente au regard des moyens engagés : il semble économiquement irrationnel d'investir dans un dispositif si coûteux - particulièrement dans des machines de déconsignation, dont le coût est estimé par l'Ademe à 1,2 milliard d'euros - dans l'hypothèse retenue d'un gisement devant être divisé par deux d'ici 2030 et complètement disparaître d'ici 2040.

Dans le contexte économique et social actuel, il serait pour le moins préjudiciable d'alourdir encore plus la facture du contribuable.

Il serait à l'inverse plus pertinent d'améliorer les performances de la collecte issue du bac jaune, qui bénéficie à tous les types de matériaux.

b) CAR l'irrationalité économique de la consigne devra être compensée, par les collectivités territoriales, et donc par le contribuable local

Le surcoût de la trajectoire avec consigne par rapport à la trajectoire ambitieuse sans consigne devra être financé.

C'est d'abord les collectivités territoriales, et donc le contribuable qui devra absorber ce surcoût. Les collectivités ont en effet engagé des investissements élevés pour moderniser et augmenter leurs capacités de collecte et leurs centres de tri. Depuis 2015, ces investissements sont estimés à environ 1,5 à 2 milliards d'euros par le Cercle national du recyclage. Il est donc paradoxal de ne pas se saisir de ces infrastructures de qualité qui sont disponibles pour collecter et trier tous les déchets, dont les bouteilles en plastique.

En outre, pour répondre à la nécessité de mieux collecter et trier le reste du bac jaune, ces investissements devraient s'intensifier dans les prochaines années, non seulement dans les centres de tri, mais surtout dans les dispositifs de collecte.

Si une consigne pour recyclage aboutit à retirer du bac jaune les bouteilles en plastique et les canettes en aluminium, alors le coût de traitement des déchets à la tonne augmenterait mécaniquement pour les collectivités territoriales, puisque les coûts liés au traitement des déchets sont majoritairement fixes. Les collectivités territoriales devraient alors prendre en charge au moins 20 % de ce surcoût62(*).

L'étude de l'Ademe va, certes, à rebours de ce raisonnement, en estimant que les coûts de gestion des emballages légers pour le service public de gestion des déchets seront les mêmes avec ou sans consigne pour recyclage63(*).

Ce résultat est toutefois biaisé par le parti-pris méthodologique de l'étude, qui fait coexister le dispositif de consigne pour recyclage avec une simple « trajectoire intermédiaire » pour le bac jaune. Or, cette trajectoire intermédiaire se traduira par une moindre performance de collecte sur les emballages légers, comme le reconnaît au demeurant l'Ademe (cf supra).

On peut donc déduire de l'étude de l'Ademe, qu'à performance égale, sur l'ensemble des emballages, le scénario avec consigne est plus coûteux pour les collectivités qu'un scénario ambitieux sans consigne.

Un énième dispositif de compensation par l'État ne règlerait rien au problème. Outre sa complexité évidente et son effectivité incertaine, il ne ferait que transférer le coût exorbitant de la consigne du contribuable local au contribuable national...qui sont en définitive la même et unique personne !

c) CAR la consigne pour recyclage se finance « sur le dos » des consommateurs

La seconde partie du surcoût de la consigne sera supportée par les consommateurs de bouteilles - mais également par ceux qui n'en achètent pas !

Les consommateurs de bouteilles seront les premiers pénalisés puisque le système sera en partie financé par le non-remboursement des bouteilles non reprises. Dans les scénarios comprenant une consigne pour recyclage s'étendant au moins au périmètre des bouteilles en PET et aux canettes de l'Ademe, le montant des consignes non rapportées est estimé à une somme comprise entre 161 à 252 millions d'euros en 2029, dans l'hypothèse d'un taux de reprise d'au moins 90 % et d'une division par deux de la quantité de bouteilles mises sur le marché64(*). Cela représente une taxe annuelle déguisée allant de 2,40 à 3,70 euros par an et par Français.

Mais la ponction pourrait être bien plus élevée les premières années de mise en place du dispositif, car le taux de collecte initial sera plus faible - au mieux égal à 80 % - et le gisement de bouteilles plastiques ne sera pas immédiatement divisé par deux. Cette taxe déguisée pourrait ainsi être multipliée par quatre !

Or, l'enquête de l'Ademe sur la perception par les consommateurs des dispositifs de consigne pour recyclage fait apparaître que « le coût financier est assez largement redouté par les répondants », en particulier les jeunes et les plus modestes65(*).

Par ailleurs, l'augmentation du coût du traitement des déchets du bac jaune consécutive au détournement des flux d'emballages consignés pourrait être compensée par une hausse des contributions financières payées par les entreprises restant assujetties à la REP au titre des emballages mis sur le marché et ne faisant pas l'objet d'un dispositif de consigne pour recyclage. Cela aura évidemment un effet inflationniste, supporté in fine, par le consommateur66(*).

Dans la période actuelle d'inflation et de contraction du pouvoir d'achat, ce surcoût pour le consommateur est peu acceptable. Au demeurant, celui-ci devrait quoiqu'il arrive supporter, lors de la mise en place d'un tel dispositif, une avance de frais même quand il rapporte sa bouteille dans la machine à déconsigner. Or, pour être efficace, selon l'Ademe, la consigne devrait être d'au moins 15 centimes67(*) voire 2068(*) pour les bouteilles en PET. Ce niveau peut apparaître très élevé pour de nombreux consommateurs : l'acceptabilité sociale de la consigne est donc loin d'être garantie.

d) CAR la consigne pour recyclage présente un risque de rupture d'égalité territoriale

Dans les territoires ruraux, avec un maillage prévu dans tous les scénarios, sauf dans le scénario maillage dense, de 1 point de reprise pour 1 168 habitants69(*), les points de collecte seront plus éloignés du domicile des habitants et plus fréquemment manuels, ce qui est plus contraignant, que dans les autres territoires.

Cette forte contrainte -- loin d'être vertueuse d'un point de vue environnemental est d'autant plus problématique qu'elle porterait sur les habitants des territoires qui ont actuellement les taux de recyclage des bouteilles les plus élevés, et qui pourraient sans difficulté se passer de la consigne pour atteindre l'objectif de collecte pour recyclage de 90 % en 2029.

Cette situation impliquerait aussi une concurrence déséquilibrée entre commerces en fonction de leur surface. La présence de machines de déconsignation orienterait mécaniquement la population vers les grandes surfaces de périphérie au détriment des petits commerces et accentuerait donc la dévitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

En outre, même en cas de mise en place d'une consigne pour recyclage avec un maillage plus fin du territoire - qui ne ferait qu'atténuer, mais pas disparaître les inégalités territoriales - la présence de points de déconsignation manuelle dans les petits commerces serait une contrainte bien plus difficile à gérer pour eux, vu le peu d'espace dont ils disposent, que dans les plus grandes surfaces. Cette contrainte supplémentaire semble donc peu opportune au regard de la déprise commerciale observée dans les territoires ruraux et de la situation dégradée des commerces en milieu rural70(*).

En définitive, la consigne pour recyclage :

- n'est pas aussi performante qu'il n'y paraît ;

- est une « fausse bonne » idée environnementale, s'inscrivant à contre-courant de la « marche de l'histoire » tendant à réduire les déchets, en particulier plastiques ;

- est un gouffre financier qui sera supporté par les contribuables et les consommateurs.

B. RÉÉVALUER EN 2026, À L'AUNE DES OBJECTIFS EUROPÉENS, L'OPPORTUNITÉ DE LA MISE EN PLACE D'UNE CONSIGNE POUR RECYCLAGE SUR LES EMBALLAGES DE BOISSON

À ce stade, la consigne pour recyclage, notamment sur les bouteilles plastiques, ne constitue donc pas un levier pertinent d'un point de vue environnemental et économique pour améliorer nos performances en matière de prévention et de gestion des déchets d'emballages.

La rapporteure alerte donc sur les risques induits par une mise en place précipitée d'un tel dispositif, qui serait particulièrement néfaste aux objectifs environnementaux recherchés.

De la même manière, la mise en oeuvre d'une consigne pour recyclage ne doit pas être imposée par Bruxelles, sans tenir compte des spécificités nationales. C'est pourtant le risque que fait courir la proposition de règlement européen sur les emballages présentée par la Commission européenne en novembre 202271(*).

En effet, l'article 44 de cette proposition impose aux États membres, sauf à ceux qui atteindraient les objectifs de collecte de 90 % par d'autres moyens en 2026 et 2027, la mise en place d'un système de consigne pour les bouteilles en plastique et les canettes d'aluminium à usage unique.

Reprenant la recommandation de la résolution du Sénat du 24 avril 202372(*), la rapporteure estime que la décision de mettre en place des systèmes de consigne doit demeurer une prérogative des États membres, afin de tenir compte des spécificités nationales et en vertu du principe de neutralité technologique.

Proposition n° 27 : Dans le cadre des négociations européennes, afin de tenir compte des spécificités nationales et en application du principe de neutralité technologique, laisser aux seuls États membres le choix de décider - ou pas - de mettre en place un système de consigne.

Comme le permet, en l'état, le projet de règlement européen « emballages », une clause de revoyure pourrait être prévue en 2026, pour réévaluer la pertinence de mettre en place une consigne pour recyclage sur les emballages et juger de l'efficacité de l'ensemble des autres leviers ambitieux identifiés par le présent rapport d'information.

Le second semestre 2026 sera également consacré au bilan à mi-parcours des agréments des éco-organismes des REP « emballages ménagers » et « emballages professionnels » (cf supra) : la période sera donc particulièrement propice à l'évaluation de l'état d'avancement de notre politique de prévention et de gestion des déchets et à l'identification d'ajustements éventuels.

Proposition n° 28 : Comme le permet, en l'état, le projet de « règlement européen emballages », renvoyer à 2026 le choix de la mise en place d'une consigne pour recyclage sur les emballages.

TRAVAUX EN COMMISSION

Désignation d'un rapporteur
(mercredi 12 avril 2023)

M. Jean-François Longeot, président. - Comme vous le savez, une concertation gouvernementale a été lancée le 30 janvier dernier concernant la mise en place de dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi, notamment sur les bouteilles plastiques. Prévue à l'article 66 de la loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite « Agec », cette concertation constitue une étape d'application attendue de la mise en oeuvre de ce texte, que notre commission avait largement contribué à enrichir.

Dans un communiqué de presse que nous avons cosigné avec Marta de Cidrac, présidente du groupe d'études Économie circulaire et rapporteure de la loi Agec, nous avions déploré la méthode retenue par le Gouvernement. Le législateur avait en effet prévu la remise préalable d'un bilan par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), avant toute évaluation éventuelle des impacts des dispositifs de consigne et concertation avec les parties prenantes. Nous estimons que, en commençant la concertation sans disposer des éléments d'expertise, le Gouvernement a agi dans le désordre. Cette remise en cause du calendrier, contraire à l'esprit de la loi votée en 2020, est d'autant plus dommageable que d'autres volets du texte ont depuis lors pris du retard, en raison notamment de la crise sanitaire.

Il me semble donc nécessaire que nous exercions une vigilance renforcée, afin que le débat déjà engagé soit le plus complet possible.

Par exemple, l'opportunité d'une consigne pour recyclage des bouteilles en plastique devra s'apprécier globalement et de manière équilibrée, au regard de l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage en 2029, mais également de celui - plus décisif encore en matière d'économie circulaire - de réduction de 50 % du nombre de bouteilles en plastique à usage unique d'ici 2030. L'évaluation ne pourra, enfin, faire abstraction du contexte marqué par la généralisation du bac jaune pour tous les Français en 2023 : une consigne pour recyclage ne devra pas réduire à néant les efforts de simplification du geste de tri, en introduisant une source de complexité pour nos citoyens.

Afin de faire valoir ces points de vigilance et d'identifier d'éventuelles pistes alternatives, il me semble donc important de mettre en place, au sein de notre commission, une mission flash qui permettra au Sénat de faire entendra sa voix avant la conclusion de la concertation prévue en juin. Vous l'aurez compris, le rapporteur, que nous allons maintenant désigner, travaillera dans des délais restreints !

La commission désigne Mme Marta de Cidrac rapporteure de la mission flash sur l'opportunité de la mise en place d'une consigne sur les bouteilles plastiques.

Examen du rapport d'information
(mercredi 5 juillet 2023)

M. Jean-François Longeot, président. - Deuxième point à l'ordre du jour : la présentation du rapport de la mission flash relative à la consigne pour réemploi et recyclage sur les emballages.

Avant de laisser la parole à notre rapporteure, Marta de Cidrac, permettez-moi de vous partager quelques éléments de contexte.

En janvier dernier, le Gouvernement a annoncé le lancement d'une concertation portant sur la mise en place éventuelle d'un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi des emballages.

Il s'agissait d'une application attendue de la loi « AGEC » de 2020. Toutefois, au terme du débat parlementaire et des négociations entre le Sénat et l'Assemblée nationale, nous étions arrivés à un compromis : nous avions exigé la remise en 2023 d'un bilan par l'Ademe avant le début de la concertation avec les parties prenantes et avant toute décision gouvernementale sur la mise en place de dispositifs de consigne.

En commençant cette concertation sans disposer des éléments d'expertise nécessaires, le Gouvernement a manifestement fait le choix d'agir dans le désordre, en laissant planer un doute quant à ses intentions.

Cette remise en cause du calendrier, contraire à l'esprit de la loi votée en 2020, est d'autant plus dommageable que d'autres volets du texte ont depuis pris du retard, en raison notamment de la crise sanitaire.

Dans ce contexte, nous avons donc décidé de lancer, en avril dernier, une mission d'information flash relative à la consigne pour réemploi et recyclage sur les emballages, avec deux objectifs clairs : exercer sur la concertation engagée une vigilance renforcée et s'assurer que le débat engagé soit le plus complet possible.

Je remercie Marta de Cidrac qui a dû travailler dans des délais particulièrement resserrés, qui ne l'ont pas empêchée de mener un large cycle d'auditions et de tenir compte des expertises les plus récentes, notamment celles de l'Ademe, dont les bilans, tant attendus, ont été rendus publics la semaine dernière.

Sans plus tarder, je laisse la parole à notre rapporteure.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Comme vous l'avez dit, Monsieur le Président, ce rapport s'inscrit dans la continuité de la loi « AGEC » à laquelle nous avons tous énormément oeuvré.

Comme il y a quatre ans, mes travaux ont été guidés par une exigence : fonder notre politique d'économie circulaire sur une priorité : la protection de l'environnement. Cette exigence se traduit de plusieurs manières.

Premièrement, il me semble indispensable de faire de la réduction et du réemploi des emballages une priorité réelle, et non seulement théorique. Car derrière les priorités affichées, la prévention est indéniablement le « parent pauvre » de nos politiques publiques d'économie circulaire. Réduire les quantités d'emballages ne se décrète pas ; cette ambition se planifie, appelle une attention politique constante et requiert d'importants moyens opérationnels et financiers.

Deuxièmement, il m'a semblé primordial de nous intéresser à tous les emballages, et pas seulement au « totem » que constitue la bouteille plastique, qui ne représente qu'un centième des déchets ménagers, 2,8 % des déchets d'emballages et 15,4 % des déchets emballages en plastique.

Enfin, j'estime nécessaire que nous nous intéressions à l'ensemble des leviers disponibles, les dispositifs de consigne n'étant qu'un moyen parmi d'autres pour améliorer nos performances en matière de prévention et de gestion des déchets d'emballages.

Reflétant, certes, les préoccupations et les priorités qui furent celles de notre commission lors de l'examen de la loi « AGEC », le rapport d'information que je vous présente ce matin tient également compte de l'évolution du contexte depuis la promulgation de ce texte.

Contexte sanitaire, d'abord : la pandémie a retardé la mise en oeuvre de plusieurs volets de la loi « AGEC », à l'instar du déploiement de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) « emballages de la restauration », initialement programmée en 2021 et repoussée à 2023. Elle a, dans le même temps, accéléré la mutation des modes de consommation, en accentuant par exemple les pratiques de vente à emporter ou de livraisons à domicile, génératrices de déchets d'emballage.

Contexte économique et social, par ailleurs. La guerre en Ukraine a provoqué une vague inflationniste inédite au XXIème siècle, nous invitant à manier avec précaution des politiques publiques qui pourraient avoir un impact sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Ce conflit a également souligné la nécessité de renforcer notre souveraineté économique, en réduisant notre dépendance aux importations. En contribuant à relocaliser la matière dans les territoires, l'économie circulaire répond à ce défi, faisant un trait d'union entre développement durable et aménagement du territoire, cher à notre commission.

Une chose est certaine : les retards accumulés par la France, tant en matière de prévention que de collecte et tri pour recyclage, appellent une action déterminée. C'est le sens des 28 propositions que je vous soumets ce matin.

Commençons par la prévention. En la matière, à rebours de nos objectifs, on observe une stagnation de la quantité d'emballages mis sur le marché et une forte hausse des emballages plastiques, passés de 2 millions de tonnes à 2,4 millions de tonnes entre 2010 et 2020, soit une augmentation de 20 %.

L'impact environnemental des emballages - en particulier en plastique - ne sera pourtant limité efficacement qu'en réduisant la quantité de contenants à usage unique : d'un point de vue environnemental et économique, le meilleur déchet est celui qui n'est pas produit. Seule la prévention permet de réduire la pression sur le climat et la biodiversité, comme l'ont très bien montré les travaux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) menés par Angèle Préville et Philippe Bolo concernant la pollution plastique.

L'adoption d'objectifs, fussent-ils législatifs, ne suffit plus, pas plus que l'empilement de mesures parfois ponctuelles, certes bienvenues, mais inaptes à engager un changement structurel des modes de production et de consommation.

Des premières briques ont été posées par la loi « AGEC » et la loi « Climat et résilience », avec l'appui constant de notre commission, parfois même à son initiative. Les leviers à disposition doivent désormais être activés et amplifiés, avant d'être retranscrits dans le nouveau cahier des charges de la REP « emballages ménagers » ainsi que dans le cahier des charges de la REP « emballages de la restauration », attendus d'ici la fin de l'année 2023.

Je vous proposerai, à cet égard, des propositions - les 1 et 2 - visant à planifier le développement du réemploi pour donner de la visibilité aux acteurs économiques et accélérer la sortie du « tout jetable ».

Au regard des derniers bilans publiés par l'Ademe, qui confirme les nombreux gains environnementaux permis par un système de consigne pour réemploi, le Gouvernement doit maintenant se saisir de la faculté qui lui est donnée par la loi de mettre en oeuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre en vue d'atteindre nos objectifs de réduction et de réemploi.

Je vous proposerai également plusieurs recommandations - les 3 à 7 - tendant à lever les freins financiers et techniques à la réduction des emballages et au développement du réemploi, notamment en accélérant le développement et la diffusion des standards d'emballages réemployables.

Enfin, en particulier pour concrétiser nos ambitions en matière de réduction et de réemploi, il conviendra de mieux contrôler les éco-organismes, comme le soulignent les propositions 8 et 9. Le montant des pénalités éventuelles en cas de non-respect des objectifs devrait être inscrit au sein des cahiers des charges des filières REP, par exemple en formalisant un montant par point d'écart avec les objectifs fixés.

Passons maintenant à la collecte pour recyclage. En la matière, nous sommes également loin du compte. Le retard est particulièrement marquant pour les emballages en aluminium et surtout en matière plastique.

Ces mauvaises performances nous invitent à sortir du statu quo : tous les leviers pertinents d'un point de vue environnemental et économique doivent donc être mobilisés.

Je vous soumettrai tout d'abord de nombreuses propositions, tendant à améliorer le geste de tri.

Tout d'abord, par une meilleure communication, afin de mieux informer nos concitoyens et de les rassurer sur le bien-fondé de la politique d'économie circulaire. C'est le sens des propositions 10 et 11. J'estime par exemple nécessaire de lancer dans les plus brefs délais une campagne nationale de grande ampleur, notamment pour permettre la montée en puissance des extensions des consignes de tri.

Après avoir été informés et sensibilisés, les citoyens consommateurs doivent être plus largement incités à respecter les consignes de tri. C'est pourquoi nous devons largement soutenir le développement de la tarification incitative - dont l'efficacité n'est plus à prouver - sur tout le territoire.

Selon le rapport de l'Ademe de juin 2023, la trajectoire sans consigne pour recyclage, permettant d'atteindre l'objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson, implique de déployer la tarification incitative pour 41,5 millions de Français en 2029. Nous n'en sommes qu'à 10 millions aujourd'hui, en comptant les Français pour qui la tarification incitative est en cours de déploiement.

L'urgence à agir rend ainsi primordiale la levée des freins financiers, techniques, réglementaires ou législatifs qui entravent aujourd'hui le développement de la tarification incitative. C'est le sens des propositions 12 à 15.

Dans les cas où l'information et l'incitation n'auront pas suffi à améliorer le geste de tri, un levier répressif doit pouvoir être activé par les collectivités territoriales chargées de la collecte des déchets. Je vous proposerai donc des recommandations - les 16 et 17 - tendant à faire du tri une obligation dont la méconnaissance est susceptible d'être sanctionnée.

Parallèlement à l'amélioration du geste de tri, une amélioration de la collecte est indispensable à l'atteinte des objectifs que notre pays s'est fixés.

Il convient tout d'abord de mieux collecter à domicile, en faisant « monter en puissance » le bac jaune, comme le proposent les recommandations 18 à 20. Il nous faut adapter les schémas de collecte aux objectifs, par exemple par une augmentation de la fréquence des collectes et de la taille des bacs dans les habitations lorsque cela est possible.

Pour financer cette adaptation, le principe de responsabilité élargie du producteur - qui fait reposer les coûts afférents à la prévention et à la gestion des déchets sur les metteurs sur le marché - doit mieux s'appliquer dans le cadre de la REP « emballages ».

Je propose donc d'augmenter le taux de couverture des coûts du service public de gestion des déchets, dans la continuité de nos travaux sur la loi « fusion des filières » REP d'avril dernier. Ce taux de couverture pourrait de surcroît constituer un excellent levier incitant les collectivités territoriales à développer un programme de collecte ambitieux, compatible avec nos objectifs nationaux.

Un bonus incitatif - tendant vers une couverture intégrale des coûts du service public - pourrait être attribué pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions compatibles avec nos objectifs, par exemple pour celles mettant en place une tarification incitative.

Nous devons aussi améliorer les performances de la collecte sélective pour les produits consommés hors du foyer. C'est l'objet des propositions 21 à 23. J'estime ainsi que, dans le cahier des charges de la REP « emballages ménagers », des objectifs d'installation de corbeilles de rue par habitant et par commune devraient être fixés.

Améliorer la collecte, c'est enfin l'adapter à la réalité des territoires. Les propositions 24 à 26 sont donc spécifiques aux territoires urbains, touristiques et ultra-marins, dont les performances sont souvent bien inférieures à la moyenne nationale.

Si on s'appuie sur le bilan de l'Ademe publié la semaine passée, le déploiement de l'ensemble de ces leviers pourrait permettre d'atteindre l'objectif spécifique de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson, à la condition toutefois d'être intégralement et pleinement mis en oeuvre.

Améliorer nos performances en matière de collecte et de tri pour recyclage implique-t-il de mobiliser, en complément, une consigne pour recyclage sur les emballages de boissons, notamment sur les bouteilles plastiques, voire sur les canettes en aluminium ?

Pour moi, cela ne fait pas de doute : à ce stade, la consigne pour recyclage ne constitue pas un levier pertinent d'un point de vue environnemental et économique : séduisant au premier abord, le dispositif est en réalité porteur de nombreux effets pervers.

De plus, à l'inverse du scénario reposant sur une consigne pour recyclage - qui ne porterait que sur un gisement spécifique, bouteilles en plastique et, éventuellement, canettes en aluminium - les solutions que je vous ai présentées ont un avantage majeur : elles contribueront à améliorer le recyclage de l'ensemble des déchets d'emballages ainsi que des papiers et cartons, tout en incitant, pour certaines d'entre elles, au tri à la source des biodéchets, aujourd'hui très peu valorisés alors qu'ils représentent un tiers des ordures ménagères résiduelles.

Pourquoi s'opposer, à ce jour, à cette consigne pour recyclage ? Les arguments que je développerai dans mon rapport, étayés par les bilans de l'Ademe publiés la semaine passée, sont nombreux. Ils peuvent se résumer en trois grands axes.

Premièrement, la consigne n'est pas aussi performante qu'il n'y paraît. L'atteinte de l'objectif de 90 % porte sur l'ensemble des bouteilles plastiques, et pas seulement sur celles en PET - or, de nombreux dispositifs de consigne mis en place en Europe ne concernent que sur les bouteilles en PET. De plus, les situations en Europe sont plus diverses que ce que les défenseurs de la consigne pour recyclage laissent penser : il me semble difficile de répliquer chez nous les modèles étrangers. Enfin, l'atteinte de l'objectif de 90 % avec un dispositif de consigne repose sur un ensemble de conditions, dont rien n'indique qu'elles puissent être remplies.

Deuxièmement, la consigne pour recyclage est une « fausse bonne » idée environnementale, s'inscrivant à contre-courant de la « marche de l'histoire » tendant à réduire les déchets, en particulier plastiques. Loin de lutter contre le plastique, la consigne pour recyclage en pérennise la production et la consommation. De même, la consigne complexifie le geste de tri, alors qu'il venait tout juste d'être simplifié, avec l'extension des consignes de tri. Par ailleurs, les bouteilles en plastique ne sont que la partie visible de la pollution plastique et des enjeux d'économie circulaire.

Enfin, la consigne pour recyclage est un gouffre financier qui sera supporté par les contribuables et les consommateurs. À la lecture du bilan de l'Ademe, j'estime le surcoût des scénarios avec consigne pour les citoyens à un montant compris entre 181 et 229 millions d'euros par an à partir de 2029.

En définitive, il me semble que la consigne pour recyclage constitue pour l'heure une impasse. Comme le permet, en l'état, le projet de règlement européen « emballages », une clause de revoyure pourrait être prévue en 2026, pour réévaluer la pertinence de mettre en place une consigne pour recyclage sur les emballages et juger de l'efficacité de l'ensemble des autres leviers ambitieux identifiés par le présent rapport d'information.

Je vous remercie de votre attention et me tiens à votre entière disposition pour répondre à vos éventuelles questions.

M. Jacques Fernique. - Je remercie la rapporteure pour ce rapport d'information et ses propositions.

En ma qualité de parlementaire, je suis associé depuis janvier dernier à cette fameuse concertation relative à l'éventualité de dispositifs de consigne pour recyclage ou réemploi mise en place par la Ministre Bérangère Couillard. J'ai ainsi pu constater les conditions chaotiques, incohérentes et bien peu pratiques dans lesquelles se déroule cette concertation. Le dernier rebondissement est le report à l'automne de la décision sur la mise en place de la consigne pour recyclage, initialement prévue en juin ou juillet.

J'accueille avec satisfaction les recommandations proposées par la rapporteure, qui ne prend pas l'affaire par un petit bout de lorgnette. Je crois que nous obtenons un ensemble cohérent à travers ces 28 recommandations.

En effet, il est utile de muscler le cahier des charges des REP pour que le réemploi progresse et de s'appuyer à cette fin sur les modulations d'éco-contributions.

Dans la foulée de ce qui a été mis en place en Alsace, la consigne pour réemploi des contenants en verre doit se développer et se généraliser.

Les REP concernés doivent également assurer le déploiement des équipements et de la logistique. Si dans les territoires ces équipements de collecte, de regroupement et de lavage ne se développent pas, la généralisation annoncée par la ministre en 2025 n'aura pas lieu.

Par ailleurs, les éco-organismes doivent rendre des comptes sur leur trajectoire au regard des objectifs légaux. Il faut systématiser les sanctions en cas de non-respect de ces objectifs.

L'amélioration de nos performances ne peut plus être une affaire de choix personnels et de bonnes volontés. La communication d'ampleur et le développement d'une campagne nationale permettront à chacun de prendre conscience qu'il s'agit bien d'obligations au tri, qui peuvent être sanctionnées ou conduire à une hausse de la fiscalité sur les déchets.

Les propositions 18 à 26 sur l'amélioration de la collecte sont tout à fait positives, notamment la proposition relative à la prise en compte des difficultés propres aux quartiers populaires. En effet, la tarification incitative n'est pas évidente dans ces territoires.

Il faut aussi améliorer les performances dans les zones touristiques et dans les outre-mer. Les propositions sur les outre-mer sont en phase avec les recommandations du rapport de la délégation aux outre-mer des sénatrices Gisèle Jourda et Viviane Malet.

J'aborderai enfin le sujet qui a conduit à la rédaction de ce rapport, à savoir l'éventualité de la consigne pour recyclage sur les bouteilles plastiques. Cette question fait écho au règlement européen qui se profile, comme cela a été constaté par la commission des affaires européennes. La valeur de la matière bouteille plastique est de l'ordre de 2 000 euros la tonne. À partir du moment où le coût de la collecte sélective s'élève à 700 euros, il n'est pas étonnant que les acteurs privés, à travers les éco-organismes, s'intéressent à ce gisement.

Pour avoir pris connaissance la semaine dernière des études de l'Ademe, je partage tout à fait l'avis de la rapporteure : la mise en place de dispositifs de consigne pour recyclage semble plutôt négative. Cette solution ne permettra pas le redressement de la trajectoire vers nos objectifs.

Mme Angèle Préville. - Merci à la rapporteure pour le travail très important réalisé sur ce sujet.

En 2020, j'ai réalisé un rapport d'information au nom de l'OPECST sur la pollution plastique. Par ailleurs, à l'automne dernier, nous avons souhaité, avec le député Philippe Bolo, faire un travail poussé sur le recyclage des plastiques, à travers une note scientifique de l'OPECST, qui vient d'être publiée. Nous partageons ainsi le même avis que la rapporteure notamment concernant le recyclage des bouteilles plastique en PET.

Nous avons indiqué que les performances de la France en matière de collecte des bouteilles plastiques ne permettent pas d'atteindre les objectifs fixés au niveau de l'Union européenne.

La mise en place d'une consigne recyclage sur les bouteilles en PET présente des inconvénients, au-delà de la confusion qu'elle pourrait créer au sein de la population.

Sur le plan économique, elle remettrait en cause l'équilibre financier des collectivités territoriales, notamment celui des plus vertueuses. Cela se traduirait par une captation par le secteur privé des déchets ayant le plus de valeur - à savoir les bouteilles en PET - tandis que les collectivités territoriales géreraient les déchets les plus difficiles à valoriser.

Sur le plan environnemental, la consigne tend à banaliser l'utilisation de bouteilles en plastique pour boisson. Pourtant, la France s'est fixé un objectif de réduction de 50 % de la mise sur le marché de ces bouteilles d'ici 2030.

Je tiens également à souligner que, dans toutes les recommandations formulées par la rapporteure, les propositions 10 et 11 qui prônent une meilleure communication, me semblent très importantes. En effet, nous devons mener des campagnes de grande ampleur.

Je rappelle aussi que tous les citoyens ont la faculté de se rendre dans les magasins avec leur propre contenant pour se faire servir à la découpe. Or, dans la loi, l'autorité en charge de communiquer sur ce sujet n'a pas été précisée. De fait, aucune communication n'est mise en place. Nous avons interpellé plusieurs fois le ministère en indiquant qu'une campagne est nécessaire. En effet, il y a ici un levier très important de réduction des emballages plastiques.

Nous avons également insisté dans notre note scientifique de l'OPECST sur la nécessité de réduire la quantité d'emballages produits et consommés. Lorsque nous évoquons la notion d'économie circulaire, nous avons l'impression que tout sera recyclé. Or en réalité, le flux des déchets plastiques est très élevé et ne fait qu'augmenter. Quand nous regardons le taux de recyclage, nous sommes très loin du compte.

M. Gilbert Favreau. - Je souhaiterais indiquer à la rapporteure que je partage totalement ses recommandations.

J'aimerais également souligner que l'éco-organisme Citéo disposait d'un agrément de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers. Si, normalement, cet agrément devait se terminer l'année dernière, il a été finalement prolongé d'une année supplémentaire.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Je vous remercie pour votre écoute.

Je précise à Gilbert Favreau qu'un nouvel agrément pour la REP des emballages ménagers est attendu d'ici la fin de l'année.

M. Jean-François Longeot, président. - Je remercie la rapporteure pour le travail effectué sur un sujet un lien avec nos territoires. Les citoyens ont du mal à assimiler ce qui se fait et ce qui ne se fait pas. Ainsi, par souci de visibilité, de clarté et de performance, je pense qu'il est indispensable de garantir une certaine stabilité des règles et pratiques au sein de nos territoires.

La commission adopte le rapport d'information ainsi que ses recommandations et en autorise la publication.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 18 avril 2023

Institut de la transition écologique des outre-mer (Itedom) : M. Stéphane MURIGNIEUX, président.

- Table ronde

· Zero Waste France : Mme Alice ELFASSI, responsable des affaires juridiques ;

· France nature environnement : Mme Axèle GIBERT, chargée des réseaux prévention des déchets et risques industriels.

Mercredi 19 avril 2023

Ministère de la transition énergétique - Direction générale de la prévention des risques (DGPR) : M. Vincent COISSARD, sous-directeur des déchets et de l'économie circulaire.

Conseil national de l'économie circulaire (CNEC) : M. Jean-Michel BUF, président.

- Table ronde

· Intercommunalités de France : Mmes Odile BEGORRE MAIRE, vice-présidente de la communauté de communes du Bassin de Pompey, Anaëlle CONTREPOIS, conseillère déchets, et Montaine BLONSARD, responsable des relations avec le Parlement ;

· Association des maires de France (AMF) : M. Jean-François VIGIER, maire de Bures-sur-Yvette et trésorier général adjoint de l'AMF, et Mme Charlotte DE FONTAINES, chargée des relations avec le Parlement ;

· Régions de France : MM. Jean-Michel BUF, conseiller régional des Pays de la Loire, et Frédéric ÉON, conseiller parlementaire, juridique et fonction publique.

Jeudi 20 avril 2023

Association des communes et collectivités d'outre-mer (ACCD'OM) : M. Jean LANOIX, président de la commission transition écologique, et Mme Nicole ERDAN, rapporteur de la commission transition écologique.

Vendredi 21 avril 2023

- Table ronde

· Amorce : MM. Nicolas GARNIER, délégué général, et Joël RUFFY, responsable du pôle institutionnel ;

· Cercle national du recyclage : MM. Jean-Patrick MASSON, président, et Bertrand BOHAIN, délégué général.

- Table ronde

· Fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement (Fnade) : Mme Clotilde VERGNON, responsable recyclage et filières REP, et M. Thomas SAUVAGET, responsable des relations institutionnelles ;

· Fédération des entreprises du recyclage (Federec) : M. Christophe VIANT, président de la filière Plastique, Mmes Géraldine BULOT, secrétaire générale, et Agathe MAURY, chargée de mission papier-carton plastique et consigne.

Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) : MM. Baptiste PERRISSIN FABERT, directeur général délégué par intérim, et Jean-Charles CAUDRON, direction de la supervision des filières REP.

Mardi 9 mai 2023

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) : M. Marc MADEC, représentant de la CPME au Conseil national de l'économie circulaire, Mme Sandrine BOURGOGNE, secrétaire générale adjointe, M. Théo FARGE, chargé de mission environnement, et Mme Zoé LAGARDE, responsable développement durable.

Association nationale des industries alimentaires (Ania) : Mme Sandrine BLANCHEMANCHE, directrice du pôle alimentation saine sûre durable et accessible, et M. Simon FOUCAULT, directeur des affaires publiques.

UFC - Que Choisir : M. Gérard QUENOT, administrateur national, Mme Lucile BUISSON, chargée de mission Environnement, énergie et transport, et M. Benjamin RECHER, chargé des relations institutionnelles.

- Table ronde

· Citeo : M. Laurent GRAVE-RAULIN, directeur affaires publiques et juridiques, Mme Anne-Sophie LOUVEL, directrice opérations et territoires, et M. Nicolas FURET, directeur performance 3R.

· Leko : M. Patrick BARIOL, directeur général.

Mercredi 10 mai 2023

- Table ronde

· Fédération du commerce et de la distribution : M. Philippe JOGUET, directeur développement durable et RSE, et Mme Sophie AMOROS, responsable des affaires publiques et communication ;

· Alliance du commerce : M. Yohann PETIOT, directeur général ;

· Conseil du commerce de France (CdCF) : Mme Émilie RÉGNIER-VIGOUROUX, responsable juridique.

- Table ronde

· Elipso : MM. Christian THÉRY, président, Gaël BOUQUET, délégué général, Maxime VESSELINOFF, responsable des affaires publiques, et Raphaël JUVAN, responsable du recyclage Europe chez Plastipak ;

· Polyvia : M. Xavier CHASTEL, directeur général ;

· Plastalliance : MM. Philippe COHU, vice-président Économie circulaire, et Joseph TAYEFEH, secrétaire général.

- Table ronde

· Aluminium France : M. Cyrille MOUNIER, délégué général ;

· GIE La Boîte Boisson : Mme Sandrine DUQUERROY DELESALLE, directrice durabilité et affaires extérieures chez Crown Bevcan EMEA, MM. Lluis PITARCH, responsable durabilité et affaires extérieures chez Ball Packaging Europe, et Lucien DEBEVER, délégué général ;

· France Aluminium Recyclage : Mme Catherine ATHENES, présidente.

- Fédération des industries du verre : M. Jacques BORDAT, président.

Lundi 15 mai 2023

- Table ronde

· Boissons rafraîchissantes de France (BRF) : Mme Hélène COURADES, directrice générale ;

· Maison des eaux minérales naturelles (MEMN) : M. Sébastien JACQUES, délégué général ;

· Syndicat des eaux de source et des eaux minérales naturelles (SESEMN) : M. Antoine CARDON, délégué général, et Mme Agnès HURON JACQUOT, référente experte tri, collecte et recyclage.

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- Alliance Carton Nature

- Plastics Europe et Valorplast

- Syndilait

- Reloop


* 1 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 2 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

* 3 Cette filière créée en 2023 est d'abord limitée aux emballages utilisés par les professionnels de la restauration. Elle sera étendue dès 2025 à l'ensemble des emballages professionnels.

* 4 Ademe, 2012, La valorisation des emballages en France, données 2010, p. 3.

* 5 Ademe, 2022, La valorisation des emballages en France, données 2020, p. 6.

* 6 Ademe, 2012, La valorisation des emballages en France, données 2010, p. 3. ; Ademe, 2020, La valorisation des emballages en France, données 2010, p. 6.

* 7 Ademe, 2023, Évaluation du taux de collecte des bouteilles en plastique de boisson pour 2021 et 2022, p. 21.

* 8 Ademe, 2023, Évaluation du taux de collecte des bouteilles en plastique de boisson pour 2021 et 2022, p. 23.

* 9 Cour des Comptes, septembre 2022, Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser, p. 65.

* 10 Décret n° 2022-507 du 8 avril 2022 relatif à la proportion minimale d'emballages réemployés à mettre sur le marché annuellement.

* 11 Ademe, Évaluation environnementale de consigne pour réemploi d'emballages en verre en France, 2023, p. 179-183.

* 12 Ademe, Évaluation environnementale de consigne pour réemploi d'emballages en verre en France, 2023, p. 181.

* 13 Ademe, 2023, Évaluation du taux de collecte des bouteilles en plastique de boisson pour 2021 et 2022, p. 21.

* 14 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 15 Cour des Comptes, septembre 2022, Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser.

* 16 La mise en place d'une tarification incitative pour 41,5 millions de Français contribue à accroître la collecte pour recyclage des bouteilles plastiques de 6,1 points, ce qui correspond à 21 % de l'amélioration permise par la « trajectoire ambitieuse, sans consigne » de l'étude de l'Ademe (Ademe, Prospective sur les leviers d'amélioration des performances de la collecte sélective, p. 51).

* 17 Depuis la loi de finances pour 2019, les frais de gestion, fixés à 8 % sur la TEOM, sont limités pour la TEOMi à 3 % pendant cinq ans (article 1641 du code général des impôts).

* 18 Avant la loi de finances pour 2021, cette durée maximale était de cinq ans.

* 19 Ademe, Prospective sur les leviers d'amélioration des performances de la collecte sélective, p. 29.

* 20 Ademe, Prospective sur les leviers d'amélioration des performances de la collecte sélective, p. 27.

* 21 Loi n° 2023-305 du 24 avril 2023 portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier.

* 22 Directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets.

* 23 Ademe, Prospective sur les leviers d'amélioration des performances de la collecte sélective, 2023, p. 41.

* 24 Ibid.

* 25 Rapport d'information n° 195 (2022-2023) de Mmes Gisèle Jourda et Viviane Malet, fait au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, « La gestion des déchets dans les outre-mer », 8 décembre 2022.

* 26 Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, p. 18.

* 27 Cour des comptes européenne, Les mesures prises par l'UE pour lutter contre le problème des déchets plastiques, 2020, p. 30.

* 28 Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, p. 19.

* 29 Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, pp. 21 et 23.

* 30 Ministère de la transition écologique, Stratégie nationale « 3r » pour les emballages en plastique à usage unique, Annexe 7, Fiches sectorielles, 2022, p. 37.

* 31 Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, p. 19.

* 32 Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, p. 19.

* 33 Calcul réalisé à partir des données contenues dans : Ademe, 2023, Benchmark européen des dispositifs de consigne pour réemploi et/ou recyclage des emballages, p. 40.

* 34 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 150.

* 35 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, pp. 81-85. L'Ademe précise également que « le montant de la consigne constitue le principal facteur explicatif des performances pouvant être atteintes en termes de taux de reprise au regard des corrélations observées à l'international » (ibid. p. 24).

* 36 Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, 2020, Pollution plastique : une bombe à retardement ?, p. 221.

* 37 Ibid.

* 38 Ibid.

* 39 BMUV, Anteile der in Mehrweg-Getränkeverpackungen abgefüllten Getränke.

* 40 Ademe, 2023, Enquête sur les perceptions et pratiques des consommateurs en cas de mise en place de la consigne pour recyclage sur les emballages de boisson en France, Rapport de résultats, p. 41.

* 41 Ibid, p. 46.

* 42 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 57.

* 43 Ademe, 2023, Enquête sur les perceptions et pratiques des consommateurs en cas de mise en place de la consigne pour recyclage sur les emballages de boisson en France, Rapport de résultats, p. 52.

* 44 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 58.

* 45 33,5 millions de tonnes de déchets ménagers ont été produites en France en 2020 selon le Bilan environnemental de la France - Édition 2022, p. 99.

* 46 12,7 millions de tonnes de déchets d'emballages sont produites en France en en 2020 selon l'Ademe (Ademe, 2022, La valorisation des emballages en France, données 2020, p. 6).

* 47 2,4 millions de tonnes de déchets d'emballages sont produites en France en 2020 selon l'Ademe (ibid).

* 48 Plus de 70 % des Français croient ainsi que la consigne « permettra de réduire le nombre de déchets jetés dans la nature » (Ademe, 2023, Enquête sur les perceptions et pratiques des consommateurs en cas de mise en place de la consigne pour recyclage sur les emballages de boisson en France, Rapport de résultats, p. 30).

* 49 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 40.

* 50 Ademe, 2023, Évaluation du taux de collecte des bouteilles en plastique de boisson pour 2021 et 2022, p. 21.

p. 24

* 51 Ademe, 2022, La valorisation des emballages en France, données 2020, p. 6.

* 52 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 22.

* 53 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 22.

* 54 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 22.

* 55 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 15.

* 56 Citation d'un représentant de l'UFC que Choisir entendu par la rapporteure.

* 57 Ademe, 2021, Consigne pour réemploi et recyclage des bouteilles de boissons, p. 97.

* 58 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 31.

* 59 Ibid, p. 36.

* 60 Ibid, p. 31.

* 61 En application de la directive « emballages », ceux-ci doivent être recyclés à 70 % d'ici le 31 décembre 2030.

* 62 À l'heure actuelle, les collectivités reçoivent une compensation par les éco-organismes dans le cadre de la REP « emballages ménagers » à hauteur de seulement 80 % d'un coût net optimisé de gestion des déchets d'emballages ménagers. Le taux réel moyen de prise en charge est par conséquent inférieur à 80 %.

* 63 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, pp. 59-60.

* 64 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 31.

* 65 Ademe, 2023, Enquête sur les perceptions et pratiques des consommateurs en cas de mise en place de la consigne pour recyclage sur les emballages de boisson en France, Rapport de résultats, pp. 23-24.

* 66 Voir sur ce point Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 65.

* 67 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 24.

* 68 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 25. Selon l'Ademe, une consigne à un niveau aussi élevé est nécessaire car « le montant de la consigne constitue le principal facteur explicatif des performances pouvant être atteintes en termes de taux de reprise au regard des corrélations observées à l'international » (ibid., p. 24).

* 69 Ademe, 2023, Scénarios avec et sans consigne pour recyclage des emballages de boisson, p. 17.

* 70 Rapport d'information n° 577 (2021-2022) de MM. Bruno Belin et Serge Babary, « Soutenir le commerce en milieu rural : 43 mesures déclinées en 10 axes », fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques, déposé le 16 mars 2022.

* 71 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux emballages et aux déchets d'emballages, modifiant le règlement (UE) 2019/1020 et la directive (UE) 2019/904, et abrogeant la directive 94/62/CE, COM(2022) 677 final.

* 72 Résolution européenne n° 96 (2022-2023) portant avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux emballages et aux déchets d'emballages, modifiant le règlement (UE) 2019/1020 et la directive (UE) 2019/904, et abrogeant la directive 94/62/CE, COM(2022) 677 final.

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