N° 445

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 mars 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels,

Par Mme Muriel JOURDA,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Philippe Bonnecarrère, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, M. Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1162, 1911 et T.A. 206

Sénat :

169 et 446 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Déposée par le député Jean-Luc Warsmann (Liberté, Indépendants, Outre-mer et Territoires - LIOT, Ardennes), déjà à l'initiative de plusieurs textes en la matière, la proposition de loi améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels a été examinée en première lecture en tant que texte « transpartisan » par l'Assemblée nationale et adoptée par celle-ci le 5 décembre 2023.

Ce texte, sur lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée, s'inspire largement du rapport « Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner » établi par l'auteur de ce texte et le député Laurent Saint-Martin en tant que parlementaires en mission et remis en novembre 2019 au Premier ministre Édouard Philippe.

Dans un contexte où les avoirs criminels ne sont pas systématiquement identifiés et où l'on estime qu'environ 30 % seulement des biens saisis finissent par être effectivement confisqués par une juridiction de jugement, la proposition de loi - que les députés ont substantiellement enrichie à l'Assemblée nationale par l'adoption de plusieurs articles additionnels, faisant passer le texte de 3 à 11 articles - vise à faire vivre l'adage populaire selon lequel « le crime ne paie pas » et à contribuer à ce que les délinquants soient effectivement privés du fruit de l'infraction qu'ils ont commise.

La commission des lois a salué les avancées permises par le texte, qui comporte des mesures de nature à faciliter l'action des enquêteurs, des magistrats et de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) et qui, surtout, vient opérer une révolution copernicienne en mettant en place un mécanisme de confiscation « de droit » de certains biens saisis.

S'inscrivant dans la droite ligne de ces avancées, la commission des lois a amélioré et précisé la rédaction du texte en vue de faciliter son appropriation par les praticiens et apporté des compléments au texte de l'Assemblée nationale, en particulier en étendant la possibilité donnée aux officiers de police judiciaire de procéder à certaines saisies spéciales, en donnant de nouvelles prérogatives à l'Agrasc en matière d'alinéation ou de vente avant jugement des biens saisis et en comblant un vide juridique quant à l'autorité compétente pour se prononcer sur les biens saisis à certains stades de la procédure.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL DES SAISIES ET CONFISCATIONS : UN CADRE COMPLET AUX RÉSULTATS MITIGÉS

A. LE RÉGIME DES SAISIES ET CONFISCATIONS : DES OUTILS PUISSANTS POUR QUE « LE CRIME NE PAIE PAS »

Les procédures pénales de saisie et de confiscation traduisent deux pratiques distinctes.

La saisie est un acte judiciaire réalisé dans le cadre de procédures pénales permettant à l'autorité judiciaire d'appréhender matériellement ou juridiquement des biens, ce qui entraîne leur indisponibilité temporaire. La saisie peut être opérée à visée probatoire - préservation des éléments de preuve - ou confiscatoire - en vue de l'éventuel prononcé d'une peine de confiscation.

Par ailleurs, et bien que cette distinction ne résulte pas strictement du code pénal ou du code de procédure pénale, la doctrine distingue classiquement les saisies probatoires, qui concernent des biens utiles à la manifestation de la vérité (l'instrument de l'infraction, par exemple), des saisies dites « patrimoniales » qui portent sur les autres biens et poursuivent l'objectif de garantir à l'issue de la procédure soit la récupération du produit direct ou indirect de l'infraction, soit l'indemnisation des victimes.

Contrairement à la saisie pénale, qui intervient au cours de l'enquête ou de l'instruction, la confiscation constitue une peine prononcée à l'occasion d'une condamnation qui, lorsqu'elle devient définitive, entraîne la dépossession permanente d'un bien et son transfert au profit de l'État. Elle peut être prononcée à titre de peine alternative pour les délits1(*) ou les contraventions de la cinquième classe2(*), ou à titre de peine complémentaire dans les cas prévus par la loi ou le règlement, et de plein droit pour les infractions punies d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à un an, à l'exception des délits de presse3(*).

La peine complémentaire de confiscation peut porter sur l'ensemble des biens qui ont un lien avec un crime ou un délit, qu'ils aient servi à commettre l'infraction ou qu'ils en soient le produit direct ou indirect4(*). Pour les crimes et délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement et ayant procuré un profit à leur auteur, la confiscation peut porter sur les biens ayant un lien présumé avec l'infraction, c'est-à-dire sur ceux dont ni le condamné ni le propriétaire n'ont pu justifier l'origine5(*).

Enfin, pour certaines infractions d'une particulière gravité, il arrive que la loi prévoie une confiscation dite « générale », susceptible de porter sur tous les biens d'un condamné y compris en l'absence de lien avec l'infraction6(*).

Saisie comme confiscation peuvent porter sur tout type de bien situé en France ou à l'étranger, meuble comme immeuble, divis ou indivis, corporel ou immatériel, appartenant à une personne physique ou morale - y compris, pour éviter le recours à des « prête-noms », ceux dont la personne mise en cause ou condamnée n'est pas propriétaire mais dont elle a la libre disposition.

Ce cadre législatif est hérité de la législation anti-blanchiment de la France qui, dès les années 1990, s'est montrée pionnière pour affirmer que la confiscation des avoirs criminels était un objectif de politique publique7(*). Ainsi, en 1992, l'article 131-21 du code pénal introduisait les premières dispositions générales sur la peine complémentaire de confiscation. Le droit est ensuite régulièrement précisé8(*), en particulier en 2010 avec l'adoption de la loi visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale9(*), dite « loi Warsmann ». Celle-ci visait essentiellement à élargir le champ des biens susceptibles d'être saisis et confisqués, à clarifier les procédures pénales applicables et à améliorer la gestion des biens saisis et confisqués, notamment par la création de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc), chargée de gérer les biens saisis et confisqués et qui, en cas de vente de ces biens, affecte les sommes récoltées au budget général de l'État, à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca),à des associations de prévention du proxénétisme et de la traite des êtres humains ou encore aux juridictions et services d'enquête luttant contre la criminalité et la délinquance organisées.

L'Agence, qui s'est progressivement étoffée depuis lors, s'appuie aujourd'hui sur huit antennes territoriales ; créées entre 2021 et 2023, celles-ci répliquent l'implantation des juridictions interrégionales spécialisées (Jirs) et se trouvent (par ordre de création) à Marseille, Lyon, Lille, Rennes, Nancy, Bordeaux et Fort-de-France. Elle constitue désormais la pierre angulaire de la politique de dynamisation des scellés (dont la conservation est coûteuse, puisqu'elle suppose un stockage et parfois un entretien pour éviter que les biens ne se dégradent) et des biens confisqués et assure, dans les cas prévus par la loi, leur affectation à titre gratuit à des entités publiques (services d'enquête, services judiciaires, associations et fondations d'intérêt public...) qui peuvent ainsi en faire usage au service de l'intérêt général.

Outre les dispositions du code pénal relatives à la peine de confiscation10(*), de nombreuses dispositions du code de procédure pénale encadrent le recouvrement, le gel et la confiscation des avoirs criminels11(*). Le droit français s'inscrit par ailleurs dans un cadre européen - en particulier celui de la directive 2014/42/CE12(*) qui prévoit des règles minimales pour le gel, la gestion et la confiscation des avoirs criminels, et le règlement UE) 2018/180513(*), qui assure la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation des avoirs au sein de l'Union.

Enfin, conformément à la décision-cadre 2006/960/JAI dite « initiative suédoise14(*) », la France a identifié deux « bureaux de recouvrement des avoirs » (BRA), qui jouent le rôle de « points de contact » en matière de saisies et confiscations afin de faciliter la coopération à l'échelle européenne : la Plateforme d'identification des avoirs criminels (PIAC) et l'Agrasc.

B. DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS, MAIS DES MARGES PERSISTANTES DE PROGRÈS

Ce système donne, sur le plan quantitatif, des résultats encourageants.

Depuis la création de l'Agrasc en 2010 et sa montée en puissance progressive, et sous l'effet du renforcement de l'arsenal juridique dédié et de la diffusion d'une culture patrimoniale, le nombre et le montant des saisies et des confiscations réalisées est en constante augmentation.

Ainsi, un document synthétisant l'action de l'Agrasc pour l'année 202315(*) faisait état d'un montant de saisies réalisées dépassant 1,4 milliard d'euros, ce qui représente une augmentation de 87 % par rapport à l'année précédente. Le montant des confiscations a également augmenté, pour atteindre 175,5 millions d'euros en 202316(*). Près de 110 millions d'euros ont été reversés au budget général de l'État, le reste étant principalement réparti entre la Mildeca (50 millions), le fonds de lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains (3,8 millions) et l'Agrasc (9,9 millions)17(*).

Source : Éléments chiffrés d'activité, Agrasc, 2023

Source : Éléments chiffrés d'activité, Agrasc, 2023

Les résultats exposés ci-avant témoignent d'une dynamique vertueuse marquée par la montée en puissance de l'Agrasc, le développement de ses antennes régionales18(*) et, plus généralement, par une plus grande attention portée à la dimension patrimoniale des enquêtes.

Ils connaissent pour autant, de l'aveu général, des marges réelles de progression puisque le montant des saisies et confiscations reste modeste au regard des revenus générés par la délinquance dans notre pays - à titre de comparaison, l'Office antistupéfiants estimait ainsi à plus de 3 milliards d'euros le « chiffre d'affaires » annuel du trafic de drogues en France.

Ce constat a conduit le premier ministre de l'époque, Edouard Philippe, à confier en 2019 une mission aux députés Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin, avec pour buts affichés de :

clarifier et rationaliser le système existant, marqué par l'intervention parfois peu lisible de multiples entités - l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, mais aussi la plateforme d'identification des avoirs criminels du ministère de l'intérieur et la cellule nationale des avoirs criminels (CeNAC) de la gendarmerie nationale, chacune de ces structures étant dotée d'antennes ou de correspondants à l'échelle locale qui eux-mêmes interviennent aux côtés des groupes interministériels de recherche (GIR) - ;

améliorer à la fois l'effectivité des saisies pénales, ce qui suppose de garantir une identification suffisante des avoirs criminels, et le taux de confiscation à la suite d'une saisie qui s'établit ces dernières années, au maximum, autour de 30 % ;

étudier les modalités d'un meilleur fonctionnement de l'Agrasc, en particulier s'agissant de son mode de financement et de la réaffectation aux acteurs publics des biens saisis ou confisqués.

Le rapport issu de cette mission, remis en novembre 2019 et intitulé « Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner », relevait que, en dépit du chemin parcouru en une dizaine d'années, des évolutions de nature organisationnelle, règlementaire ou législative étaient nécessaires pour permettre au dispositif de saisies et de confiscations d'atteindre une plus grande efficacité. Il établissait à cette fin une liste de 34 propositions - dont 19 présentées comme étant de niveau législatif, et dont certaines ont déjà été mises en application comme l'affectation sociale de biens confisqués19(*) ou la prise en compte des tiers dans la procédure de confiscation20(*) - visant, entre autres, à renforcer substantiellement les prérogatives et les effectifs de l'Agrasc, à promouvoir l'enquête patrimoniale et à instaurer une procédure d'enquête post-sentencielle, à maximiser le nombre de confiscations, à réduire les frais de gestion des biens confisqués, à mieux assurer l'effectivité des décisions de confiscation, à optimiser l'emploi des avoirs confisqués ou encore à étendre le dispositif de restitution des biens dits « mal acquis ».

Les auditions conduites par le rapporteur corroborent le constat selon lequel il reste possible de faire mieux en matière de saisies et confiscations.

Elle relève en premier lieu que tous les intervenants reçus au cours des auditions, sans exception, se sont accordés pour considérer que le sujet des saisies et confiscations est au coeur de la lutte contre la délinquance, et singulièrement contre la criminalité organisée dont les protagonistes, qui ont intégré le risque de l'incarcération et sont mus par l'appât d'un gain rapide et facile, redoutent des peines qui viennent « frapper au portefeuille » davantage que la prison elle-même. À titre d'illustration, au cours d'une table ronde des organisations représentatives des magistrats, les intervenants ont rappelé que les recours formés par les délinquants de haut vol portaient désormais davantage sur les saisies que sur les détentions provisoires, témoignant du caractère fortement dissuasif des sanctions patrimoniales.

S'agissant des axes d'amélioration des saisies, un consensus a émergé sur la nécessité d'une meilleure identification des avoirs criminels. Cette mission semble, en l'état, ne pas être systématiquement conduite- notamment du fait d'un manque d'effectifs, qu'il s'agisse de ceux des GIR ou d'enquêteurs spécialisés en matière économique et financière. Les sénateurs Nadine Bellurot et Jérôme Durain rappelaient d'ailleurs, dans un récent rapport, que les effectifs dédiés au traitement des contentieux économiques et financiers (qui interviennent également sur les enquêtes patrimoniales) étaient « en proportion des effectifs totaux, insuffisants » et que leur champ d'action était actuellement « en souffrance »21(*) au sein de la police judiciaire.

L'affectation des biens saisis ou confisqués aux enquêteurs, source indéniable de motivation pour ces derniers, semble par ailleurs souffrir d'un processus administratif parfois trop lourd, et donc trop lent, en particulier dans la police nationale : les auditions conduites par le rapporteur ont, sur ce sujet, démontré que l'architecture pratiquée par la gendarmerie
- qui repose sur la CeNAC et ses déclinaisons régionales - offrait une simplicité bienvenue.

Les auditions conduites par le rapporteur montrent, par ailleurs, que la conduite des enquêtes patrimoniales pâtit d'un accès parfois difficile des officiers de police judiciaire aux fichiers qui leur permettent de retracer le patrimoine des personnes mises en cause : ainsi, si le pouvoir réglementaire les a dotés d'un accès direct au FICOBA (pour les comptes bancaires) ou au FICOVIE (pour les assurances-vie), la nécessité d'une réquisition persiste pour d'autres fichiers, tel le FIDJI (fichier informatisé des données juridiques immobilières).

Cette affectation est, par ailleurs, rendue plus difficile par une gestion des scellés dans les juridictions qui ne différencie que rarement les saisies probatoires (qui doivent être conservées jusqu'au jugement car elles concernent des biens utiles à la manifestation de la vérité) des saisies patrimoniales (qui, à l'inverse, peuvent être affectées à titre gratuit aux enquêteurs même en l'absence de décision définitive de confiscation).

S'agissant, cette fois, des confiscations, les facteurs de « décrochage » par rapport aux saisies sont nombreux et semblent tenir principalement à :

- comme en matière de saisies, un manque d'effectifs spécialisés, alors même que la technicité de la matière suppose une pleine maîtrise des procédures et un suivi fin ;

- des saisies parfois insuffisamment motivées ou, pire, dont la motivation a été perdue au cours de la procédure. Sur ce terrain, on rappellera que les moyens informatiques dont disposent à ce jour les magistrats ne comportent pas de « chaînage » logiciel sur l'ensemble de la procédure, imposant à la juridiction de jugement de conduire un complexe travail rétrospectif pour caractériser les biens saisis dont ils envisagent de prononcer la confiscation - travail d'autant plus pesant qu'il a déjà été effectué aux stades antérieurs de la procédure, mais que sa trace n'a pas été pleinement conservée. Cette situation crée à l'évidence des lourdeurs qui n'incitent pas au prononcé des confiscations ;

- une procédure ressentie par les magistrats comme complexe, fastidieuse et chronophage, et dont l'intérêt semble parfois relatif au vu du laps de temps qui s'est écoulé depuis la saisie : comme l'a résumé l'Agrasc dans le cadre de son audition, « les dossiers avec des détenus, enserrées dans des délais contraints, les dossiers d'atteintes aux personnes, notamment de violences conjugales, sont incontestablement prioritaires sur les dossiers concernés par des saisies patrimoniales notamment quant à l'audiencement de ces dossiers, ce qui explique le délai entre la saisie et la confiscation éventuelle et devant être prononcée parfois des années plus tard alors que la situation du mis en cause a changé ».

Un consensus s'est ainsi exprimé sur la lourdeur de la procédure et sur l'impossibilité, au vu de sa complexité et de l'insuffisance des effectifs dédiés à sa mise en oeuvre, de « massifier » les saisies et les confiscations.

Si on peut espérer que les difficultés informatiques évoquées ci-avant soient, au moins pour partie, levées par la mise en oeuvre de la procédure pénale numérique (PPN), le rapporteur rappelle que ce projet ne sera effectif qu'à la fin de 2025 et qu'il connaît, depuis son lancement, des retards qui font craindre que cette date ne soit pas tenue. Elle appelle par conséquent le Gouvernement à mettre en place, sans attendre, des moyens informatiques complémentaires visant à faciliter l'action des juridictions ; elle demande également au pouvoir exécutif de garantir la bonne prise en compte, dans le périmètre du chantier PPN, des éléments liés aux biens saisis et à enfin mettre en place le « chaînage » numérique qui fait aujourd'hui défaut et dont l'absence entrave le prononcé des peines de confiscation.

II. UNE PROPOSITION DE LOI « PUZZLE », ENTRE AMÉNAGEMENTS TECHNIQUES ET RENVERSEMENT DE LA LOGIQUE DES CONFISCATIONS

La présente proposition de loi entend apporter une réponse, au moins partielle, à ces défaillances et faciliter l'action des parties prenantes. Les dispositions qu'elle contient sont d'inégale importance mais répondent toutes à un objectif commun consistant, pour reprendre les mots utilisés par l'auteur du texte lors de son audition, à adapter la législation aux besoins des intervenants.

Elles s'articulent schématiquement selon trois axes.

La première partie des dispositions du texte vise à améliorer le fonctionnement de l'Agrasc en :

rendant systématique la notification à l'Agrasc de toutes les saisies opérées et de toutes les décisions de confiscation prises par les juridictions de jugement - y compris pour les saisies probatoires ou pour les biens confisqués sur lesquels l'Agence n'a pas de compétence aux termes du code de procédure pénale (article 1er bis C) ;

étendant la compétence de l'Agrasc aux biens non-restitués (article 1er bis E), ce qui procède d'une volonté bienvenue de rationalisation administrative et d'unification de la gestion des biens confisqués sous l'égide de l'Agence mais présente un impact difficilement évaluable dans un contexte où le volume représenté par les biens concernés n'est pas connu ;

reconnaissant la compétence de l'Agrasc en matière de formation des officiers de police judiciaire et des magistrats, sans que cela se traduise par l'attribution à celle-ci d'un monopole qui aurait mis fin à l'organisation de formations par des autres entités qui, comme la PIAC et les CeRAC, interviennent aujourd'hui auprès des policiers et gendarmes (article 1er bis) ;

- prévoir que la décision de confiscation d'un bien immobilier vaut titre d'expulsion du condamné et des « occupants de son chef » (article 3), ce qui a pour intérêt d'épargner à l'Agrasc de devoir mener une procédure civile d'expulsion longue, coûteuse et dont l'issue est de facto favorable à l'Agence dans 100 % des cas.

Un second groupe de dispositions vient élargir les possibilités d'affectation des biens saisis et confisqués. Celles-ci prévoient :

- que les biens meubles saisis au cours des enquêtes ou des instructions pourront être affectés, à titre gratuit, aux fédérations sportives délégataires, aux associations et fondations reconnues d'utilité publique et aux organismes gestionnaires d'un parc naturel national ou régional (article 1er) ;

- que les collectivités territoriales pourront bénéficier d'une affectation sociale des immeubles confisqués (article 1er bis D).

Les autres dispositions viennent aménager la procédure pénale applicable aux saisies et aux confiscations. Elles viennent ainsi :

simplifier la procédure d'appel contre les décisions avant jugement relatives à la destruction des biens saisis ou à leur remise à l'Agrasc, en substituant à la compétence de la chambre de l'instruction celle d'un juge unique (article 1er) ;

- ajouter aux missions des officiers de police judiciaire celle de « [réaliser] des enquêtes patrimoniales aux fins d'identification des avoirs criminels » (article 1er bis A) ;

- ouvrir la possibilité au procureur, dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public (CJIP), d'imposer à la personne morale mise en cause de se dessaisir au profit de l'État de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure (article 1er bis B) ;

faciliter les confiscations en valeur en supprimant, dans cette hypothèse, l'obligation posée par le droit en vigueur d'une motivation renforcée de la juridiction de jugement (article 1er ter) ;

obliger la juridiction de jugement, sauf décision spécialement motivée, à prononcer la confiscation des biens saisis qui sont l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction (article 3) ;

- intégrer les comptes bancaires au dispositif de restitution des biens « mal acquis » (article 4), qui ne concerne aujourd'hui que les biens susceptibles d'être cédés.

III. LES APPORTS DE LA COMMISSION DES LOIS : CONFORTER LES GRANDS AXES DU TEXTE ET LE RECENTRER SUR SES OBJECTIFS

La commission des lois a souscrit aux grands axes du texte ; elle a, en particulier, mis en avant l'impact fort de la mise en place d'une confiscation « de droit » de certains biens saisis par l'article 3. Cette dernière disposition est, de toute évidence, la plus marquante du texte : elle constitue une véritable révolution copernicienne, une inversion de la logique des confiscations qui pourrait produire des effets puissants sur le « ratio » de confiscation des biens saisis.

À l'initiative du rapporteur, la commission a modifié certaines dispositions, soit pour y apporter des clarifications, des coordinations et améliorations rédactionnelles, soit pour faciliter l'appropriation par les acteurs des procédures et outils nouveaux que le texte entend créer.

Elle a ainsi :

- à l'article 1er, prévu que les biens qui pourraient être confiés à titre gratuit à de nouvelles entités seraient les biens meubles confisqués, et non saisis : outre que les ajouts proposés par l'Assemblée nationale risquaient de se faire au prix d'une dilution des affectations - et donc au préjudice de ceux qui, en première ligne dans l'exercice de la mission de saisie et de confiscation, en sont aujourd'hui les seuls bénéficiaires, à savoir les services d'enquête et les services judiciaires22(*) -, l'affectation élargie de biens saisis, donc susceptibles d'être restitués à terme, aurait risqué de soulever des problèmes de gestion pour l'Agrasc comme pour les entités bénéficiaires (amendement COM-16) ;

- au même article, par cohérence et dans un esprit de simplification, soumis à un recours devant un juge unique d'autres procédures de saisies que celles visées par le texte adopté par les députés (amendement COM-16) ;

- recentré, à l'article 1er bis C, la notification à l'Agrasc des décisions de saisies et de confiscations sur celles qui entrent dans le périmètre des compétences de l'Agence, afin d'éviter que celle-ci se trouve « noyée » sous une masse de décisions qu'elle ne pourra ni exploiter, ni conserver et qui n'auront pas d'intérêt opérationnel pour elle (amendement COM-20) ;

- supprimé l'article 1er bis C relatif aux compétences de l'Agrasc en matière de formation qui, selon l'analyse unanime des personnes entendues par le rapporteur, est dépourvu de portée normative (amendement COM-22) ;

- précisé, à l'article 3, que la nouvelle confiscation obligatoire des biens saisis qui sont l'objet, le produit ou l'instrument de l'infraction emportera l'absence d'obligation de motivation des décisions correspondantes (amendement COM-25) ;

- modifié, au même article, les dispositions relatives à l'expulsion des occupants du chef du condamné pour prévoir qu'une telle mesure ne pourrait pas toucher les occupants liés au condamné par un contrat de bail régulièrement conclu, antérieur à la confiscation et qui s'acquittent de leurs obligations en tant que locataires (amendement COM-26).

La commission a, par ailleurs, enrichi le texte en :

- transposant aux CIPJ dites « environnementales » la possibilité, prévue par le texte pour les CIPJ « classiques », d'obliger la personne morale mise en cause à se défaire de tout ou partie des biens saisis pendant la procédure (amendement COM-19 du rapporteur) ;

- ouvrant aux services d'enquête et aux services judiciaires la possibilité, dont ils disposent déjà pour les biens meubles, de se voir affecter à titre gratuit des biens immeubles saisis ou confisqués (amendements COM-4 rect.ter de Paul-Toussaint Parigi et COM-10 rect.ter de Nathalie Delattre) ;

permettant aux officiers de police judiciaire de procéder, sur autorisation d'un magistrat, à certaines saisies spéciales nouvelles : celles des biens meubles qui risquent de disparaître à défaut d'une telle saisie et celles des fonds présents sur des comptes de paiement (amendement COM-24 du rapporteur) ;

élargissant les prérogatives de l'Agrasc en matière d'alinéation ou de vente avant jugement de biens saisis : ce procédé pourra ainsi concerner les biens dont l'entretien requiert une expertise particulière ou à ceux dont la conservation présente des coûts disproportionnés (amendement COM-17) ;

mettant fin au caractère suspensif de certains recours à l'encontre des décisions de saisie ou de restitution, permettant de rendre ces décisions plus efficaces (amendement COM-18).

Les recherches et auditions conduites par le rapporteur ont également fait apparaître l'existence d'une lacune juridique quant à la gestion des biens saisis entre la clôture de l'enquête ou de l'instruction et la tenue de l'audience de jugement, aucun magistrat n'étant identifié par le code de procédure pénale pour exercer cette tâche - ce qui pose de réelles difficultés aux services d'enquête qui, s'ils n'ont pas sollicité l'affectation gratuite d'un bien pendant la durée (parfois courte) des investigations, perdent la possibilité de formuler une demande en ce sens. Elle poursuivra ses travaux d'ici à la séance publique afin de déposer, à cette occasion, un amendement permettant de combler ce vide.

*

* *

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Affectation des biens meubles saisis dont la conservation n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et simplification de la procédure d'appel

L'article 1er vise à :

- simplifier la procédure d'appel contre les décisions prises, selon les cas, par le procureur ou par le juge d'instruction quant à la destruction ou à la remise à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués aux fins d'aliénation des biens meubles saisis dont la conservation n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité ;

- élargir la liste des organismes pouvant bénéficier d'une affectation à titre gratuit de certains bien saisis, en y intégrant les fédérations sportives délégataires, les associations et fondations reconnues d'utilité publique et les organismes gestionnaires d'un parc naturel national ou régional.

La commission a adopté cet article en rationalisant la liste des nouvelles entités affectataires, en ménageant un droit de priorité dans les affectations aux services d'enquête et aux services judiciaires et en prévoyant que cette nouvelle possibilité d'affectation s'appliquerait aux biens confisqués plutôt qu'aux biens saisis.

1. L'état du droit

Les articles 41-5 (pour l'enquête) et 99-2 (pour l'instruction) du code de procédure pénale fixent le régime applicable, avant jugement, aux biens meubles saisis dont la conservation n'est plus utile à la manifestation de la vérité.

Ces articles, créés par la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007de lutte contre la contrefaçon, autorisent le procureur de la République ou le juge d'instruction, face à de tels biens, à décider :

- lorsque la restitution est impossible (notamment lorsque le propriétaire des biens ne peut pas être identifié ou lorsqu'il n'a pas donné suite, dans un délai d'un mois, à une mise en demeure adressée à son domicile), de leur destruction ou de leur remise à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) aux fins d'aliénation ;

- lorsque la confiscation est prévue par la loi et que le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur des biens concernés, à remettre lesdits biens à l'Agrasc23(*) en vue de leur aliénation ou de leur affectation à certains services publics (services judiciaires, services de police, unités de gendarmerie, Office français de la biodiversité ou services placés sous l'autorité du ministre chargé du budget qui effectuent des missions de police judiciaire) à titre gratuit24(*).

Le procureur de la République ou le juge d'instruction doivent par ailleurs ordonner la destruction des biens concernés, dès lors qu'il s'agit d'objets qualifiés par la loi de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite.

Aux termes des articles précités, les décisions du procureur de la République et du juge d'instruction peuvent être contestées devant la chambre de l'instruction dans des délais, respectivement, de 5 et de 10 jours. Ces délais, suspensifs, sont ramenés à 24 heures en cas de notification orale d'une décision de destruction de produits stupéfiants.

Selon le rapport « Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner » remis par les députés Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin au Premier ministre Edouard Philippe en novembre 2019, ce système est générateur de lourds frais de gestion eux-mêmes liés, entre autres, à « la durée trop longue des procédures, encore accrue par le développement des contentieux liés aux saisies et confiscations » qui pousse les juridictions à engager une véritable « course contre la montre » pour limiter autant que possible le temps écoulé entre la saisie d'un bien et la prise de décision sur le devenir de celui-ci.

2. La proposition de loi : simplifier l'appel contre les décisions de destruction ou d'aliénation et élargir la liste des bénéficiaires d'une affectation à titre gratuit

L'article 1er de la présente proposition de loi prévoit, en premier lieu, de simplifier la procédure d'appel contre les décisions prises par le procureur ou par le juge d'instruction quant à la destruction ou à la remise à l'Agrasc des biens meubles saisis dont la conservation n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

En effet, et comme l'ont confirmé les auditions conduites par le rapporteur, le système actuel de recours devant la chambre de l'instruction génère des délais particulièrement importants, notamment dans un contexte où les recours contre les décisions de saisie sont fréquents : l'Association française des magistrats instructeurs (AFMI) rappelait ainsi que les délais de traitement des appels sur de telles décisions atteignaient fréquemment un an, voire deux.

Analysant cette situation comme une source de complexité susceptible de mettre en péril l'affectation ou la vente avant jugement d'une proportion importante de biens saisis, l'article 1er prévoit de substituer à la compétence de la chambre de l'instruction celle d'un magistrat unique, à savoir le premier président de la cour d'appel ou un conseiller désigné par celui-ci. Cette évolution permettrait, selon les députés, de gagner en rapidité et en efficacité dans le traitement des recours contre les décisions de saisie.

Le même article viendrait, par ailleurs, étendre la liste des organismes susceptibles de bénéficier d'une mise à disposition à titre gracieux de biens meubles saisis.

La première de ces extensions, qui résulte de l'adoption par la commission des lois de l'Assemblée nationale d'un amendement de son président Sacha Houlié, concernerait les fédérations sportives délégataires d'une mission de service public : selon le rapport établi de Jean-Luc Warsmann, une telle innovation permettrait « par exemple » d'affecter à la Fédération française de motocyclisme « des véhicules deux-roues, qui sont régulièrement saisis et font l'objet de frais de gardiennage importants », ces véhicules pouvant être employés pour « la formation des citoyens en matière de sécurité routière - ce qui apparaît relever d'une logique vertueuse ».

D'autres extensions sont intervenues en séance publique, à la suite de l'adoption d'amendements permettant l'affectation gratuite des biens meubles saisis :

aux gestionnaires de parcs naturels nationaux ou régionaux, dans le prolongement de la possibilité déjà ouverte par le code de procédure pénale de les attribuer à l'Office français de la biodiversité ;

aux associations et fondations reconnues d'utilité publique
- cette possibilité ayant, étonnamment, été limitée par les auteurs de l'amendement correspondant, membres du groupe Renaissance, aux biens saisis par le procureur de la République et non par un juge d'instruction.

Aucune de ces mesures n'est la traduction d'une préconisation du rapport précité des députés Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin qui, sur le sujet de la gestion des biens saisis avant jugement, recommandait en revanche de rendre possible une telle vente « dans l'ensemble des situations rencontrées par le juge, ce qui suppose de supprimer la condition de dépréciation de la valeur du bien dans le temps prévue aux [articles] 41-5 et 99-2 du code de procédure pénale » et qui proposait, lorsque cette vente n'est pas possible, non pas d'attribuer les biens saisis aux fédérations sportives ou aux gestionnaires de parcs naturels, mais d'attribuer les biens « de faible valeur » à des associations ou de prévoir leur rachat par le mis en cause, sur le modèle des droits belge et néerlandais.

3. La position de la commission : recentrer le dispositif d'affectation gratuite pour garantir son efficacité

La commission ne s'est pas opposée au transfert à un juge unique de la compétence pour connaître des recours sur les décisions de saisie, une telle évolution lui ayant semblé inévitable au vu de la croissance tendancielle du volume de ces recours comme de la charge de travail à laquelle les chambres de l'instruction sont aujourd'hui confrontées.

Dans un esprit de cohérence, elle a appliqué une procédure identique aux autres recours analogues prévus par le code en matière de saisies : saisies d'objet dangereux ou illicites, saisies d'animaux, ou encore refus de restitution de biens saisis par le juge d'instruction. Elle a également, à des fins de simplification des procédures, transféré au président de la cour d'appel la compétence actuellement confiée, toujours en matière de saisies, au président de la chambre de l'instruction en cas recours contre les ordonnances du juge d'instruction en matière de restitution (amendement COM-16 du rapporteur).

Par ailleurs, par le même amendement COM-16 du rapporteur, la commission a apporté une triple modification au système d'affectation gratuite des biens proposée par l'Assemblée nationale.

En premier lieu, elle a supprimé la possibilité donnée par la proposition de loi d'une affectation gratuite de biens à des fédérations sportives délégataires : contrairement à celui des gestionnaires de parcs naturels nationaux et régionaux (dont l'ajout est cohérent avec la possibilité déjà donnée par la loi à l'Office français de la biodiversité de bénéficier d'affectations à titre gratuit) et des fondations et associations reconnues d'utilité publique (qui peuvent déjà bénéficier d'une procédure analogue pour les biens immeubles), l'ajout de ces fédérations poserait problème dans la mesure où, d'une part, leurs missions sont sans lien avec la pratique des saisies et des confiscations et où, d'autre part, le nombre potentiellement important d'affectations pouvant leur être consenties impose a minima une évaluation fine de l'impact d'une telle mesure préalablement à toute initiative législative.

Dans le même temps, la commission des lois a souhaité rappeler que l'affectation gratuite des biens gérés par l'Agrasc devait bénéficier en priorité aux services d'enquête et aux services judiciaires, dont les besoins sont considérables et pour lesquels une telle affectation constitue un puissant levier de motivation. Elle a en conséquence prévu que les biens concernés seraient affectés par priorité à ces services, l'affectation aux autres bénéficiaires s'effectuant par défaut.

Enfin, suivant une préconisation formulée par les représentants de l'Agrasc, la commission a recentré cette possibilité nouvelle sur les biens non pas saisis, mais confisqués. En effet, l'affectation étendue de biens saisis aurait soulevé des difficultés :

- juridiques, les décisions d'affectation de biens saisis étant motivées en fonction d'éléments concrets du dossier, ce qui fait que seuls certains services peuvent valablement en être destinataires sans violer le secret de l'instruction ;

- pratiques : les biens saisis, même lorsqu'ils sont affectés à des tiers, restent la propriété des personnes mises en cause et sont susceptibles d'être restitués en fin de procédure si la confiscation n'est pas prononcée, une telle restitution pouvant au surplus s'accompagner d'une indemnisation du propriétaire en cas de perte de valeur du bien.

Ce recentrage du dispositif sur les biens confisqués permettra ainsi de donner à la nouvelle procédure d'affectation gratuite créée par le texte ait un caractère non plus seulement provisoire, mais définitif.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis AA (nouveau)
Caractère non suspensif des recours contre les décisions de saisie ou de non-restitution

À la suite de l'adoption d'un amendement du rapporteur, la commission des lois a harmonisé le régime des recours contre les décisions de saisie ou de non-restitution afin que ceux-ci n'aient pas de caractère suspensif.

Les décisions de saisie ou de non-restitution sont toutes susceptibles de recours dont les caractéristiques sont définies par le code de procédure pénale et tous enserrés dans des délais brefs, tant pour le requérant que pour l'entité appelée à statuer sur le recours.

Si certains de ces recours sont suspensifs, d'autres ne le sont pas, y compris lorsqu'ils portent sur des saisies importantes : tel est par exemple le cas des recours prévus par les articles 706-148 (saisie sur le patrimoine par le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction), 706-150 (saisie de biens immeubles par les mêmes magistrats) et 706-153 (saisie des biens et droits incorporels) du code de procédure pénale. Or, selon les auditions conduites par le rapporteur, l'effectivité immédiate des saisies est un point essentiel de leur efficacité : les représentants de l'Association française des magistrats instructeurs soulignaient à cet égard que les saisies de comptes bancaires - qui font l'objet d'un transfert immédiat à l'Agrasc - sont moins fréquemment contestées que des décisions portant sur d'autres types de biens.

C'est pourquoi la commission des lois a, à l'initiative du rapporteur, adopté un amendement portant article additionnel et mettant fin au caractère suspensif des recours formés contre les décisions de saisie ou de non-restitution (amendement COM-18) prises par le procureur de la République ou le juge d'instruction : cette évolution rendra les saisies plus efficaces, contribuera à l'objectif de dynamisation des scellés et viendra protéger l'exercice par le juge du fond de son office en matière de confiscation. Aux yeux du rapporteur, cette modification constituera une harmonisation bienvenue, puisqu'en l'état du droit les recours contre les décisions de saisies sont d'ores et déjà non-suspensifs dans de nombreux cas (à titre d'illustration, l'appel n'est pas suspensif en matière de saisies spéciales de biens immobiliers - article 706-150). Elle ne semble, en outre, se heurter à aucun obstacle constitutionnel ou conventionnel, le caractère suspensif ou non du recours n'ayant pas d'impact sur l'effectivité de la possibilité donnée au mis en cause ou aux tiers de contester la décision rendue, a fortiori dans un contexte où l'autorité d'appel est tenue au respect de délais resserrés pour se prononcer.

La commission a adopté l'article 1er bis AA ainsi rédigé.

Article 1er bis AB (nouveau)
Élargissement des cas de vente avant jugement

À la suite de l'adoption d'un amendement du rapporteur, la commission a élargi les cas de vente avant jugement des biens saisis par l'Agrasc.

Aux termes des articles 41-5 et 99-2 du code de procédure pénale, le procureur de la République et le juge d'instruction respectivement peuvent confier à l'Agrasc pour alinéation, dès l'enquête ou l'instruction, des biens saisis qui ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité « lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur du bien ». Si le bien est vendu, le fruit de cette vente est consigné pour être ensuite restitué au propriétaire lorsque la confiscation n'est in fine pas prononcée.

Cette procédure présente des avantages financiers non négligeables non seulement parce qu'une vente rapide des biens saisis est plus rémunératrice (et donc favorable à l'État comme, en cas de restitution de la somme perçue, au propriétaire), mais aussi parce qu'elle évite la constitution de stocks « dormants » générateurs de coûts.

Dans ce contexte, et reprenant une suggestion formulée par l'Agrasc au cours de son audition, la commission a adopté l'amendement COM-17 du rapporteur afin d'élargir les cas d'alinéation avant jugement des biens saisis et d'ouvrir la possibilité d'une telle alinéation dans deux hypothèses : en cas de frais conservatoires (gardiennage, stockage...) disproportionnés par rapport à la valeur économique du bien, et lorsque l'entretien du bien requiert une expertise particulière.

La commission a adopté l'article 1er bis AA ainsi rédigé.

Article 1er bis A
Réalisation d'enquêtes patrimoniales par les officiers de police judiciaire

L'article 1er bis A complète la liste des missions dévolues aux officiers de police judiciaire pour prévoir que ceux-ci réalisent des enquêtes patrimoniales aux fins d'identification des avoirs criminels.

La commission a adopté l'article sans modification.

1. L'ajout d'une dimension patrimoniale aux missions des officiers de police judiciaire

L'article 17 du code de procédure pénale énumère les missions dévolues aux officiers de police judiciaire et les charge :

- de constater les infractions à la loi pénale, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs ainsi que, lorsqu'une information est ouverte, d'exécuter les délégations des juridictions d'instruction et de déférer à leurs réquisitions ;

- de recevoir les plaintes et dénonciations ;

- de procéder à des enquêtes préliminaires dans les conditions définies par les articles correspondants du code de procédure pénale ;

d'exercer certains pouvoirs en cas d'infraction flagrante (information du procureur de la République, constatations sur les lieux de l'infraction, prélèvements externes, perquisitions, premières saisies...).

L'article 1er bis A, issu d'un amendement du rapporteur Jean-Luc Warsmann adopté en séance publique, vise à compléter cette liste pour prévoir que les officiers de police judiciaire « réalisent les enquêtes patrimoniales aux fins d'identification des avoirs criminels ». Il s'agit là d'une forme de paradoxe, puisque le rapport rédigé par le même parlementaire en 2019 considérait à l'inverse qu'il n'était « pas opportun de
rendre l'enquête patrimoniale obligatoire dans tous les dossiers
 », ce dont on peut déduire qu'il n'est pas opportun de faire de l'enquête patrimoniale une mission générale des officiers de police judiciaire.

M. Warsmann concède d'ailleurs que la valeur de cette innovation est davantage incitative que normative, l'objectif affiché étant d'« encourager l'identification systématique des avoirs criminels dans le cadre des enquêtes ».

2. La position de la commission 

En dépit des limites du dispositif proposé par l'article 1er bis A, les auditions menées par le rapporteur attestent que cette évolution est ressentie positivement par les représentants de la police et de la gendarmerie nationales. Les deux directions générales compétentes s'accordent ainsi pour considérer, comme le rapport précité, que l'identification des avoirs criminels « est encore trop souvent perçue comme chronophage et vécue comme une charge supplémentaire dans une procédure pénale complexifiée depuis plusieurs années » et voient dans la modification de la réfaction de l'article 17 du code un signal positif envoyé à l'ensemble des officiers de police judiciaire pour les inciter à s'interroger, dans chaque dossier, sur l'opportunité de mener ou non une enquête patrimoniale.

En conséquence, la commission n'a, à ce stade, pas jugé opportun de modifier le dispositif adopté par les députés.

La commission a adopté l'article sans modification.

Article 1er bis B
Obligations applicables dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public

L'article 1er bis B ouvre la possibilité, dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public, d'imposer à la personne morale mise en cause de se dessaisir de tout ou partie des biens saisis au cours de la procédure au profit de l'État.

La commission a adopté cet article en prévoyant, par analogie, un dispositif similaire pour les conventions judiciaires d'intérêt public dites « environnementales ».

1. Une volonté d'élargir les obligations applicables en cas de convention judiciaire d'intérêt public

Prévues par l'article 41-1-2 du code de procédure pénale et introduites par la loi n° 2016-1691 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique du 9 décembre 2016, dite « Sapin II », les conventions judiciaires d'intérêt public (CJIP) permettent, pour certaines infractions (principalement la corruption, le trafic d'influence, le blanchiment de certaines infractions) et tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, au procureur de la République de proposer à une personne morale mise en cause un accord qui, sous réserve de la validation du président du tribunal judiciaire à la suite d'une audition en audience publique de la personne morale précitée et des éventuelles victimes, éteint l'action publique. Cette extinction intervient en contrepartie du respect de certaines obligations, alternatives ou cumulatives, qui prennent en l'état du droit les formes suivantes :

verser (avec une possibilité d'échelonnement) au Trésor public une amende d'intérêt public, dont le montant est fixé de manière proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés, dans la limite de 30 % du chiffre d'affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date du constat de ces manquements ;

se soumettre, pour une durée maximale de trois ans et sous le contrôle de l'Agence française anticorruption, à un programme de mise en conformité destiné à s'assurer de l'existence et de la mise en oeuvre de certaines mesures et procédures (code de conduite, dispositif d'alerte interne, cartographie des risques, procédures d'évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires, procédures de contrôle comptable, formation, régime disciplinaire visant à sanctionner les salariés en cas de violation du code de conduite)25(*).

À l'initiative du rapporteur Jean-Luc Warsmann, un amendement a été adopté en séance publique par l'Assemblée nationale afin de compléter la liste de ces obligations. Le présent article vise ainsi à permettre au procureur, dans le cadre d'une CJIP, d'obliger la personne morale mise en cause à se dessaisir au profit de l'État de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure.

Cette mesure traduit - partiellement - l'une des recommandations du rapport précité de MM. Warsmann et Saint-Martin, qui « invit[ait] le ministère de la justice à engager des réflexions » pour prévoir un dessaisissement dans plusieurs cas : comme obligation d'un contrôle judiciaire ; « dans les procédures alternatives aux poursuites, sur le modèle de la convention judiciaire d'intérêt public » ; dans les procédures de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) ; dans les procédures de libération anticipée.

2. La position de la commission 

La commission des lois n'a pas souhaité adopter de modification de fond au dispositif adopté par les députés ; à l'initiative de son rapporteur (amendement COM-19), elle l'a toutefois enrichi en prévoyant, par coordination, que l'obligation de se dessaisir de tout ou partie des biens confisqués pourrait également être imposée aux personnes morales mises en cause dans le cadre des conventions judiciaires d'intérêt public dites « environnementales » de l'article 41-1-3 du code de procédure pénale.

La commission a adopté l'article 1er bis B ainsi modifié.

Article 1er bis C
Notification à l'Agrasc des décisions de saisie et de confiscation

L'article 1er bis C prévoit la notification à l'Agrasc de l'ensemble des décisions de saisie et de confiscation, y compris pour les saisies probatoires ou pour les biens sur lesquels l'Agence n'est pas compétente aux termes du code de procédure pénale.

La commission a adopté cet article en limitant, par cohérence, cette obligation de notification aux décisions susceptibles d'entrer dans le champ légal de compétences de l'Agrasc.

1. Le périmètre de compétence de l'Agrasc en matière de saisies et confiscations

L'article 760-160 du code de procédure pénale confie à l'Agrasc une compétence sur certains biens saisis et confisqués. Cette compétence s'exerce seulement sur mandat de justice, le seul monopole de l'Agence portant sur les sommes saisies, qui lui sont automatiquement transférées.

L'article 706-161, pour sa part, autorise l'Agence à mettre en oeuvre un traitement de données à caractère personnel pour garantir le bon suivi des biens dont elle est saisie.

Lors de leur audition, les représentants de l'Agrasc ont relevé que le système d'attribution à celle-ci des biens saisis ou confisqués présentait encore de réelles failles dans la transmission des informations : ils ont indiqué que des biens lui étaient parfois confiés sans que leur soit communiquée l'ordonnance de saisie correspondante (y compris pour les comptes bancaires qui sont obligatoirement gérés par l'Agence, si bien qu'il lui arrive de recevoir des virements dont elle ne connaît pas la provenance...), imposant un travail long et fastidieux pour retracer l'origine des biens en question ; ils ont également souligné que tous les biens corporels saisis ou confisqués ne leur étaient pas remis, y compris s'agissant des biens saisis qui ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité, et qu'ils restaient « dormants » dans les juridictions, créant à la fois une charge pour les entités qui continuent de les stocker et, en l'absence de vente ou de réaffectation, une perte sèche pour l'État.

Le manque d'informations communiquées à l'Agrasc porte ainsi atteinte à son objectif de dynamisation des scellés et, si la création d'antennes territoriales semble avoir produit des résultats probants, l'Agence estime qu'une partie non-négligeable des biens qui relèvent de sa compétence ne lui sont pas confiés. Sur ce terrain, Nicolas Bessone, entendu en tant que représentant de la Conférence nationale des procureurs de la République et par ailleurs ancien directeur général de l'Agrasc, a rappelé qu'à son arrivée à la tête de l'Agence en 2020, une opération « cold case » lancée par ses soins avait mis au jour un différentiel notable entre les prérogatives théoriques de l'Agence et la réalité de ses compétences : avaient ainsi été identifiés 350 millions d'euros d'avoirs non-confiés à l'Agrasc, dont 150 millions d'euros d'avoirs confisqués qui pouvaient être transférés directement à l'État pour peu qu'on les mette en regard avec le jugement correspondant.

C'est dans ce contexte que l'Assemblée nationale a adopté, en séance publique, deux amendements identiques du rapporteur et des membres du groupe LIOT afin de rendre systématique la communication à l'Agrasc de toutes les saisies opérées et de toutes les décisions de confiscation prises par les juridictions.

Si cette évolution vise à répondre à une défaillance objective, le rapporteur relève qu'elle concerne l'intégralité des saisies et confiscations - y compris, donc, les saisies strictement probatoires qui n'ont pas vocation à être gérées par l'Agrasc ou les décisions portant sur des biens sur lesquels l'Agence n'est pas compétente aux termes du code de procédure pénale.

2. La position de la commission 

Le rapporteur a accueilli l'article 1er bis C avec une certaine circonspection.

En effet, les auteurs justifient la transmission de toutes les décisions de saisie et de confiscation à l'Agrasc par une volonté de permettre à l'Agence « d'assurer un suivi statistique fiable et une gestion optimale des biens saisis et confisqués ». On peut douter de la pertinence de cette proposition dans un contexte où, comme on l'a vu, l'Agrasc n'a pas de compétence universelle en matière de biens saisis et confisqués26(*) ; or, faute d'une telle compétence, on voit mal comment l'Agence pourrait valablement être chargée de collecter et de traiter l'ensemble des statistiques qui s'y rapportent.

En outre, et de l'aveu même des députés concernés, une telle évolution suppose des développements informatiques importants (l'objet de l'amendement du groupe LIOT précise ainsi qu'« il appartiendra au Gouvernement de transcrire cette obligation sur le plan opérationnel, en prévoyant une évolution des applicatifs pénaux pour permettre l'automatisation de cette transmission des décisions ») : outre qu'ils ne relèvent pas du domaine de la loi, ces développements gagneraient à être pensés dans le cadre du projet « procédure pénale numérique » (PPN), en cours de déploiement, et non de manière isolée.

Le dispositif soulève, au surplus, de réelles difficultés de mise en oeuvre et de coordination, car il s'articule mal avec d'autres dispositions du code de procédure pénale non modifiées par l'article 1er bis C, et notamment avec celles qui :

- bornent le périmètre du traitement de données à caractère personnel que l'Agrasc est autorisée à mettre en oeuvre en le limitant aux décisions de saisie et de confiscation dont elle est saisie (article 706-161), ce qui lui interdit mécaniquement de mettre en oeuvre un traitement analogue pour les décisions qui portent sur des biens pour lesquels elle n'est pas compétente : dans ce contexte, on peut légitimement s'interroger sur le devenir des décisions qui, transmises à l'Agrasc, ne correspondront pas à des biens dont elle est gestionnaire, décisions qu'elle ne pourra ni traiter, ni conserver, ni exploiter ;

- accordent à l'Agence, pour les besoins liés à l'accomplissement de ses missions (article 706-60), un droit d'accès à certains fichiers dont la nature est étroitement liée à son périmètre actuel de compétences (pour la gestion des sommes saisies, fichiers recueillant les déclarations d'ouverture et de clôture des comptes de toute nature et de location de coffres-forts, ainsi que de souscription et de dénouement des contrats de capitalisation ou des placements de même nature, notamment des contrats d'assurance vie ; pour l'évaluation de la valeur des biens immobiliers, données relatives aux


mutations à titre onéreux ou à titre gratuit et aux actes relatifs aux sociétés et références cadastrales, adresse, superficie, type et caractéristiques des biens immobiliers visés par l'article L. 107 B du livre des procédures fiscales).

Le rapporteur relève enfin que, comme l'ont confirmé au cours de leur audition les représentants de la conférence nationale des procureurs de la République et de la conférence nationale des procureurs généraux, le dispositif de l'article 1er bis C concerne l'intégralité des saisies, y compris celles qui ont une valeur strictement probatoire - ce qui correspond à une gigantesque masse de données dont la plupart n'auront aucun intérêt opérationnel pour l'Agence. Certes, ceux-ci ont déclaré préférer un excès d'informations plutôt que laisser subsister un système dans lequel l'Agrasc peine à exercer ses compétences faute de disposer d'une vision exhaustive des biens sur lesquels elle pourrait exercer ses compétences ; interrogés sur l'opportunité d'une limitation du dispositif proposé aux biens sur lesquels l'Agence est compétente, ils ont par ailleurs craint qu'une notification de toutes les décisions soit la seule manière d'éviter un défaut de transmission des informations pertinentes par les greffes. Pour autant, la manière dont ces notifications vont être transmises puis exploitées et les conséquences de ce nouveau système sur les ressources de l'Agence restent nébuleuses.

Pour ces raisons, et suivant l'analyse du rapporteur, la commission a limité le périmètre de cette nouvelle obligation de notifications aux décisions sur lesquelles l'Agrasc est susceptible d'être compétente - c'est-à-dire, pour reprendre la formule figurant à l'article 706-160 du code de procédure pénale, à celles qui portent sur des biens « qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d'administration » (amendement COM-20).

La commission a adopté l'article 1er bis C ainsi modifié.

Article 1er bis D
Possibilité pour les collectivités territoriales de bénéficier d'une affectation sociale des immeubles saisis ou confisqués

L'article 1er bis D ouvre la possibilité d'une affectation sociale des immeubles saisis ou confisqués aux collectivités territoriales.

La commission a adopté cet article en y ajoutant la possibilité pour les services d'enquête, les services judiciaires et l'Office français de la biodiversité de bénéficier eux aussi d'une affectation de biens immobiliers.

1. Le dispositif d'affectation sociale des immeubles saisis ou confisqués

L'affectation sociale des immeubles confisqués, prévue par le neuvième alinéa de l'article 706-160 du code de procédure pénale, repose en pratique sur la faculté donnée à l'Agrasc de mettre, le cas échéant à titre gratuit, à disposition de certains organismes un bien immobilier saisi ou confisqué et dont la gestion lui a été confiée en application du deuxième alinéa du même article.

En l'état, peuvent être bénéficiaires d'une telle mesure :

les associations dont les activités ont un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à l'égalité entre les femmes et les hommes, à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;

- les associations et fondations reconnues d'utilité publique ;

- les organismes exerçant des activités de maîtrise d'ouvrage et concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement.

En adoptant les amendements identiques déposés en séance publique par le Gouvernement, le groupe Liberté, Indépendantes, Outre-mer et Territoires et le groupe Horizon et apparentés, les députés ont souhaité que le bénéfice de l'affectation sociale des immeubles confisqués soit étendu aux collectivités territoriales.

2. La position de la commission

La commission des lois a salué une évolution bienvenue qui permettra d'aller plus loin dans la mise en oeuvre du dispositif d'affectation sociale des biens immobiliers, étant rappelé que ce dispositif ne concerne en l'état qu'un très faible nombre de biens (cinq, selon l'Agrasc), et de valoriser l'action de terrain des collectivités territoriales.

L'association Crim'Halt comme l'Agrasc ont, à ce propos, relevé qu'une affectation sociale d'immeubles confisqués aux collectivités territoriales pourrait permettre à celles-ci de mettre les biens concernés à la disposition de « petites » associations locales, de coopératives citoyennes ou d'autres structures qui ne bénéficient pas aujourd'hui d'une possibilité d'affectation directe : cette faculté nouvelle contribuera ainsi aux objectifs initiaux de l'article 706-160 et dynamisera l'affectation de biens confisqués au secteur associatif.

Dans la droite ligne de ces évolutions, la commission a adopté deux amendements identiques de Paul Toussaint Parigi (COM-4 rect. ter) et Nathalie Delattre (COM-10 rect. ter) permettant aux services d'enquête, aux services judiciaires et à l'Office français de la biodiversité, qui peuvent déjà se voir affecter des biens meubles saisis et confisqués, de se voir affecter gratuitement des biens immeubles.

La commission a adopté l'article 1er bis D ainsi modifié.

Article 1er bis E
Compétence de l'Agrasc pour vendre les biens dévolus à l'État
ou non-restitués

L'article 1er bis E consacre une compétence nouvelle de l'Agrasc en matière de vente des biens dévolus à l'État ou non-restitués.

La commission a adopté cet article en y apportant une amélioration rédactionnelle.

1. Une extension de la compétence de l'Agrasc aux biens dévolus à l'État ou non restitués

Comme on l'a déjà indiqué, l'Agrasc ne dispose pas, à ce jour, d'une compétence globale sur les biens saisis et confisqués. Selon l'article 706-160 du code de procédure pénale, elle est ainsi compétente pour assurer, sur l'ensemble du territoire et seulement sur mandat de justice, c'est-à-dire en vertu d'une décision expresse du magistrat ou de la juridiction compétent(e) :

- la gestion de tous les biens, quelle que soit leur nature, saisis, confisqués ou faisant l'objet d'une mesure conservatoire au cours d'une procédure pénale, qui lui sont confiés et qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d'administration ;

- la gestion centralisée de toutes les sommes saisies lors de procédures pénales ;

- l'aliénation ou la destruction des biens dont elle a été chargée d'assurer la gestion ;

- la gestion des biens affectés à titre gratuit par l'autorité administrative.

La pleine mise en oeuvre des préconisations du rapport de MM. Warsmann et Saint-Martin aurait voulu que soit reconnue à l'Agrasc une compétence universelle pour l'intégralité des biens saisis et confisqués à des fins patrimoniales, qu'elle dispose pour ce faire de moyens renforcés y compris par la mise en place de nouvelles antennes territoriales et que, dans le même temps, soit créée sous l'égide de l'Agence une véritable enquête post-sentencielle ayant pour but d'identifier le patrimoine de la personne condamnée et, ce faisant, de permettre l'exécution des peines de confiscation même en l'absence de saisie préalable. Toutefois, le Gouvernement n'ayant pas le souhait, et le Parlement pas la possibilité constitutionnelle, de déployer les moyens requis pour assurer une telle évolution, le présent article se limite à une solution de compromis : elle consiste, en l'espèce, à rendre l'Agrasc compétente pour « suivre » l'exécution des décisions de non-restitution et la mise en oeuvre des dispositions de l'article 41-4 du code de procédure pénale prévoyant que, lorsque la restitution n'a pas été demandée ou décidée dans un délai de six mois, les objets non restitués deviennent propriété de l'État.

2. La position de la commission 

La commission a souscrit aux objectifs poursuivis par cet article et n'y a apporté qu'une modification de forme (amendement COM-21) visant à en préciser la rédaction.

La commission a adopté l'article 1er bis E ainsi modifié.

Article 1er bis (supprimé)
Compétence de l'Agrasc en matière de formation des membres des services de police judiciaire et des magistrats

L'article 1er bis rappelle que l'Agrasc peut former régulièrement les services d'enquête et les services judiciaires.

Constatant que cet article était dépourvu de portée normative, la commission l'a supprimé.

1. Présentation

L'article 706-161 du code de procédure pénale fixe la liste des missions « support » de l'Agrasc dans le domaine de l'assistance aux juridictions et aux officiers de police judiciaire et de la formation. Ainsi, aux termes de cet article, l'Agence :

- fournit aux juridictions pénales et aux procureurs de la République, à leur demande ou à son initiative, les orientations ainsi que l'aide juridique et pratique utiles à la réalisation des saisies et confiscations envisagées ou à la gestion des biens saisis et confisqués ;

- mène toute action d'information ou de formation destinée à faire connaître son action et à promouvoir de bonnes pratiques en matière de saisie et de confiscation ;

- veille à l'abondement du fonds de concours de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) par les recettes provenant de la confiscation des biens des personnes reconnues coupables d'infractions en matière de trafic de stupéfiants, l'Agence ayant par ailleurs la faculté de verser à l'État des contributions pour financer la lutte contre la délinquance et la criminalité ainsi que la prévention de la prostitution et l'accompagnement des personnes prostituées ;

- informe les services compétents et les victimes des biens restitués sur décision de justice ;

- centralise, par la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel, les décisions de saisie et de confiscation dont elle est saisie.

L'article 1er bis prévoit de préciser la nature de la compétence de l'Agrasc en matière de formation en lui confiant la tâche de « [mener] des actions de formation régulière des magistrats et des services de police judiciaire ». Il s'inscrit dans la logique de la proposition n° 21 du rapport des députés Warsmann et Saint-Martin, « Poursuivre les efforts de formation continue à destination des magistrats n'occupant pas des fonctions spécialisées et pouvant néanmoins être amenés à connaître du contentieux de la saisie et de la confiscation au travers de leurs fonctions de juge des libertés et de la détention ou de juge correctionnel » : en effet, selon ce même rapport, de telles formations (qui seraient destinées par priorité aux juges correctionnels) devraient permettre de pallier « une certaine méconnaissance du dispositif législatif relatif aux saisies et aux confiscations », elle-même susceptible de « fragiliser la décision en cas d'appel (voire de cassation) ou [de] soulever des difficultés d'exécution ».

Il ressort des auditions menées par le rapporteur que cet ajout ne vaudrait pas exclusivité de la compétence de l'Agence sur les formations : en particulier, cette disposition nouvelle ne serait pas de nature à faire obstacle au maintien des initiatives de la PIAC et de la CeNAC en matière de formation aux enquêtes patrimoniales des personnels de la filière judiciaire dans la police et la gendarmerie nationales.

2. La position de la commission 

Constatant que l'article 1er bis était dépourvu de portée normative et ne donnait pas à l'Agrasc de nouvelles prérogatives de quelque nature que ce soit, la commission des lois a adopté un amendement de suppression (COM-22) présenté par le rapporteur.

La commission a supprimé l'article 1er bis.

Article 1er ter
Facilitation des confiscations en valeur

L'article 1er ter allège la motivation des confiscations prononcées en valeur.

Faisant le constat que cette évolution, opportune et utile, devait cependant faire l'objet d'une coordination visant à tenir compte de la mise en place par l'article 3 d'une confiscation « de droit » - et donc faite sans motivation spécifique - des biens saisis qui sont l'instrument, l'objet ou le produit de l'infraction, la commission a adopté un amendement visant à mettre en cohérence les dispositions relatives à la motivation des décisions de confiscation selon la nature du bien visé. 

1. La motivation des décisions de confiscation

La confiscation est une peine complémentaire encourue, selon l'article 131-21 du code pénal, dans tous les cas prévus par la loi ou le règlement, et de plein droit pour les crimes et pour les délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à un an, à l'exception des délits de presse. Elle peut, aux termes du même article 131-21, prendre plusieurs formes et porter sur :

- « tous les biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction » ;

- les biens acquis par un mélange de fonds illicites et licites, pour lesquels la confiscation est possible à concurrence de la valeur estimée du produit de l'infraction ;

tout bien meuble ou immeuble défini par la loi ou règlement qui réprime l'infraction ;

- pour les crimes ou les délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement et ayant procuré un profit direct ou indirect, les biens meubles ou immeubles de toute nature lorsque la personne qui en est responsable (le condamné lui-même ou le propriétaire d'un bien dont le condamné est le bénéficiaire effectif, cette seconde hypothèse permettant de surmonter le recours à des « prête-noms »), mise en demeure de s'expliquer sur les biens en question, n'a pas pu en justifier l'origine ;

- lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, tout ou partie des biens appartenant au condamné ou dont il a la libre disposition, quelle qu'en soit la nature : on parle alors de confiscation « générale » du patrimoine ;

- à titre obligatoire, les objets qualifiés de dangereux ou nuisibles par la loi ou le règlement, ou dont la détention est illicite ;

une valeur. Les biens confisqués en valeur peuvent être de toute nature, et la confiscation peut concerner toutes les propriétés dont le condamné est propriétaire ou tous les biens dont il a la libre disposition. La confiscation doit, dans cette hypothèse, atteindre une somme « représentative » de la valeur à confisquer. 

La forme de la confiscation

Suivant l'économie générale de l'article 131-21 du code pénal, la confiscation a d'abord vocation à être prononcée en nature. Les deuxième à quatrième alinéas de cet article prévoient à cet égard que, lorsqu'elle est encourue de plein droit ou en raison d'une disposition expresse, la confiscation peut porter spécialement sur les biens suivants (on parle alors de confiscation « spéciale ») :

- les biens meubles ou immeubles, quelle qu'en soit la nature, divis ou indivis, « ayant servi à commettre l'infraction ou qui étaient destinés à la commettre » (deuxième alinéa). Sont ici visés les biens utilisés comme instruments de la réalisation effective ou projetée de l'infraction, par exemple l'arme du voleur ou l'immeuble géré par le proxénète ;

- les biens « qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction » (troisième alinéa). L'objet de l'infraction correspond, par exemple, à la chose volée. Le produit de l'infraction peut quant à lui désigner l'argent retiré d'une activité prohibée, comme la vente de stupéfiants, l'exploitation illicite d'une maison de jeux ou d'un lieu de proxénétisme. La confiscation ne peut toutefois porter sur les « biens susceptibles de restitution à la victime », c'est-à-dire ceux appartenant au véritable propriétaire ou détenteur régulier pouvant faire valoir ses droits sur le bien ;

- « tout bien meuble ou immeuble défini par la loi ou le règlement qui réprime l'infraction » (quatrième alinéa).

Le cinquième alinéa de l'article 131-21 du code pénal prévoit une autre forme de confiscation spéciale applicable uniquement en cas de crime ou de délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement « et ayant procuré un profit direct ou indirect » à la personne condamnée, qui peut alors conduire à priver cette dernière de tous « les biens meubles ou immeubles, quelle qu'en soit la nature, divis ou indivis », dont elle n'a pu justifier l'origine.

Le sixième alinéa de ce même article prévoit la forme de confiscation la plus grave, à savoir la confiscation générale du patrimoine, qui peut porter sur « tout ou partie des biens appartenant au condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis », sous réserve que la loi réprimant le crime ou le délit le prévoie expressément (tel est par exemple le cas de l'article 225-25 du code pénal, dont le Conseil avait été saisi dans la décision n° 2021-899 QPC, en matière de traite des êtres humains ou de proxénétisme).

Enfin, et à la différence des hypothèses qui précèdent où la confiscation de la chose demeure facultative pour la juridiction de jugement, le septième alinéa de l'article 131-21 prévoit que celle-ci est tenue d'ordonner la confiscation des objets qualifiés de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite, quand bien même la personne condamnée n'en serait pas propriétaire.

Si le principe est celui de la confiscation en nature, il résulte du neuvième alinéa de l'article 131-21 du code pénal, depuis sa modification par la loi du 27 mars 2012, que la confiscation peut toujours être ordonnée en valeur. Elle peut alors « être exécutée sur tous biens, quelle qu'en soit la nature, appartenant au condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ».

Auparavant, une confiscation ne pouvait être ordonnée en valeur que lorsque la chose confisquée n'avait pas été saisie ou ne pouvait être représentée. Le champ des confiscations en valeur présentait donc un caractère résiduel.

Source : Conseil constitutionnel, commentaire de la décision 2021-932 QPC

De telles confiscations en valeur doivent, en l'état du droit, faire l'objet d'une motivation spécifique, prévue par l'article 485-1 du code de procédure pénale - qui n'exempte d'une telle obligation que la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction. Cette particularité a pour conséquence de complexifier substantiellement les confiscations en valeur puisque, comme l'a récemment rappelé la chambre criminelle de la Cour de cassation27(*), « le juge qui prononce une peine de confiscation en valeur à titre de produit de l'infraction doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au respect de la vie privée et familiale du propriétaire du bien confisqué, au regard de la situation personnelle de l'intéressé et de la gravité concrète des faits ».

C'est pour faciliter le prononcé par le juge d'une confiscation en valeur que l'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement du rapporteur Jean-Luc Warsmann étendant la dérogation au principe de motivation des décisions qui portent sur la confiscation en valeur du produit de l'infraction.

Cette disposition, si elle revient sur une jurisprudence de la chambre criminelle, ne semble pas soulever de difficulté juridique : comme le relève la chambre elle-même, l'obligation de motivation actuelle résulte non pas d'une norme constitutionnelle ou conventionnelle, mais bien de la seule rédaction des lois en vigueur et du principe d'interprétation stricte de la loi pénale28(*).

2. La position de la commission 

La commission a constaté que la nouvelle peine obligatoire de confiscation des biens saisis qui sont (entre autres) l'objet ou le produit de l'infraction, introduite par l'article 3 du texte, rendait obsolète la disposition « cible » du présent article, qui dispense de motivation spéciale le prononcé de la confiscation des mêmes biens.

Cette discordance fait en revanche apparaître le besoin d'une coordination, ce qui a conduit la commission à adopter un amendement du rapporteur (COM-23) réécrivant les articles 365-1 et 485-1 du code de procédure pénale pour faire échapper la confiscation en valeur du produit ou de l'objet de l'infraction à l'exigence de motivation spéciale.

La commission a adopté l'article 1er ter ainsi modifié.

Article 2
Utilisation des biens confisqués pour l'indemnisation des victimes

L'article 2 facilite l'exercice par les victimes de leur droit à être indemnisées par le biais des biens confisqués.

La commission a adopté cet article sans modification.

1. Les modalités actuelles d'utilisation des biens confisqués aux fins d'indemnisation des victimes

Le code de procédure pénale ouvre la possibilité d'utiliser les biens confisqués pour l'indemnisation des personnes s'étant portées partie civile et bénéficiant d'une décision définitive leur accordant des dommages et intérêts ou une prise en charge de frais.

Cette possibilité, consacrée par l'article 706-164 du code, s'exerce sous l'égide de l'Agrasc : saisie par la partie civile dans un délai - court - de deux mois à compter du jour où la décision de confiscation a acquis un caractère définitif, l'Agence peut en effet effectuer un prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens de la personne condamnée.

C'est dans ce contexte que l'article 2, qui n'a subi que des modifications formelles en commission puis en séance publique à l'Assemblée nationale, vient :

étendre le périmètre des biens pouvant servir à l'indemnisation des victimes, en y intégrant les biens non-restitués ;

- faciliter l'exercice par les victimes de leur droit en portant à six mois, contre deux actuellement, le délai dont elles disposent pour saisir l'Agrasc.

2. La position de la commission 

Souscrivant pleinement aux objectifs poursuivis par l'article 2, la commission des lois a adopté celui-ci sans modification.

La commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 2 bis (nouveau)
Modalités de saisie spéciale

Issu d'un amendement du rapporteur, l'article 2 bis facilite l'exercice par les officiers de police judiciaire du pouvoir d'opérer certaines saisies spéciales.

Aux termes de l'article 706-154 du code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire peuvent être autorisés par le magistrat en charge de diriger les investigations à saisir les sommes d'argent versées sur un compte de dépôt ou d'actifs numériques ; cette saisie, qui vise à éviter la disparition des fonds sous l'effet d'un transfert effectué par un tiers, est ensuite confirmée par le juge d'instruction lui-même (en cas d'instruction) ou par le juge des libertés et de la détention sur saisine du parquet (en cas d'enquête).

Reprenant des suggestions faites au cours des auditions, la commission a adopté un amendement COM-24 du rapporteur tendant à :

- étendre ce dispositif aux sommes déposées sur ces comptes de paiement (donc dans des « néo-banques »), ce cas étant loin - selon les praticiens - de constituer une hypothèse d'école ;

- prévoir un mécanisme analogue de saisie conservatoire par un officier de police judiciaire des biens meubles susceptibles de disparaître s'ils ne sont pas immédiatement saisis, pour les seules infractions punies d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

La commission a adopté l'article 2 bis ainsi rédigé.

Article 3
Caractéristiques et effets de la peine complémentaire de confiscation

L'article 3 vise, d'une part, à rendre obligatoire (sauf décision spécialement motivée) la confiscation des biens saisis qui sont l'objet, le produit ou l'instrument de l'infraction et, d'autre part, à prévoir que la confiscation d'un bien immobilier vaut expulsion du condamné et des occupants de son chef.

La commission a apporté à cet article des modifications essentiellement formelles puis a procédé à son adoption.

1. Une évolution substantielle du régime des confiscations

a) La non-automaticité de la confiscation

Peine complémentaire « classique », la confiscation n'est aujourd'hui appliquée qu'à la suite d'une décision explicite de la juridiction de jugement avec, comme on l'a vu (voir supra, commentaire de l'article 1er ter), une motivation spécifique dans de nombreux cas.

Avec l'absence de systématicité des enquêtes patrimoniales, à laquelle l'article 1er bis A se propose par ailleurs de répondre, ce régime paraît être l'une des explications du « décrochage » entre les saisies et les confiscations : on estime en effet - avec un biais statistique dont il convient de ne pas négliger l'effet, puisque les biens confisqués en année « n » ont en général été saisis plusieurs années auparavant - que seuls 30 % des biens saisis sont in fine réellement confisqués. Plus largement, le rapport des députés Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin relevait que, « Malgré une augmentation constante du nombre de confiscations, tous les acteurs auditionnés s'accordent à dire que cette peine est encore insuffisamment prononcée ».

Pour répondre à cette difficulté, et traduisant la proposition n° 18 du rapport précité29(*), l'article 3 prévoit de rendre obligatoire, sous les réserves habituelles (droits du propriétaire de bonne foi, notamment) et sauf décision spécialement motivée de la juridiction de jugement « en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur », la confiscation des biens qui ont été saisis au cours de la procédure et qui sont l'instrument de l'infraction, son objet ou son produit direct ou indirect.

Bien que relativement rare, une telle formule de confiscation obligatoire existe déjà dans le droit en vigueur, avec un objet limité : elle est par exemple applicable aux véhicules dont un condamné s'est servi pour commettre un délit routier grave ou en cas de condamnation définitive pour certaines infractions au code de la route30(*) (13° de l'article 222-44 du code pénal) ; d'autres types de peines complémentaires sont obligatoirement prononcés pour certaines condamnations devenues définitives, à l'instar de l'interdiction définitive d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs en cas de condamnation pour un viol, un inceste ou une autre agression sexuelle commise sur un mineur (article 222-48-4 du code pénal).

b) Les effets de la confiscation des biens immobiliers

Le régime actuel des confiscations, par ailleurs, ne prévoit pas que la décision définitive de confiscation d'un bien immobilier vaut titre d'expulsion à l'encontre de la personne condamnée. Ce silence constitue, selon l'auteur et rapporteur de la proposition de loi, une lacune qui génère des pertes de temps et d'argent conséquentes pour l'Agrasc : le député Warsmann estime ainsi que cette situation est « l'une des explications de [la] durée [moyenne de 18 mois entre le jugement de confiscation et la vente du bien] » puisque, si le condamné refuse de libérer l'immeuble confisqué, l'Agrasc se trouve obligée de saisir la justice civile pour obtenir son expulsion et de s'engager dans une procédure longue au cours de laquelle elle engage des frais importants, qui « incluent à la fois les coûts de la procédure d'expulsion et les frais d'entretien courant de l'immeuble, que l'[Agence] est tenue d'assurer en tant que gestionnaire du bien »31(*).

Au cours de son audition au Sénat, l'Agrasc a par ailleurs confirmé au rapporteur qu'elle obtenait systématiquement le titre d'expulsion requis auprès du juge civil.

C'est ainsi que, dans sa rédaction initiale, l'article 3 de la proposition de loi prévoyait d'insérer à l'article 131-21 du code pénal une précision selon laquelle « La décision définitive de confiscation d'un bien immobilier constitue un titre d'expulsion à l'encontre de la personne condamnée ». À l'initiative du rapporteur Jean-Luc Warsmann et du député Renaissance Jean Terlier, ce dispositif a été complété en séance publique : l'article vise ainsi à faire de la décision d'expulsion définitive un titre d'expulsion valable non seulement à l'encontre du condamné, mais aussi des « occupants de son chef » ce qui, selon les auteurs, permet d'inclure dans le champ de la mesure les « personnes qui occupent le logement en raison du titre de propriété de la personne condamnée, sans qu'elles soient elles-mêmes propriétaires », donc les membres de la famille du condamné.

Il s'agirait ainsi, comme l'a rappelé la direction des affaires criminelles et des grâces lors de son audition, d'éviter que les personnes condamnées ne fassent occuper l'immeuble qui leur a été confisqué par des tiers aux seules fins d'éviter l'expulsion et ne mettent en échec, par des manoeuvres dilatoires, l'effectivité de la sanction pénale.

Cet ajout, qui concerne les conditions d'exécution de la décision de confiscation mais non les modalités selon lesquelles elle est prise par la juridiction de jugement, ne remet pas en cause la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation - qui impose aux juges du fond de motiver la confiscation d'un immeuble abritant le domicile familial de la personne condamnée en justifiant de sa nécessité et de sa proportionnalité au regard de l'atteinte à la vie privée et familiale. Comme la chambre criminelle l'a rappelé dans un arrêt récent32(*), « il se déduit des articles 131-21, alinéas 3 et 9, du code pénal, 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1er du premier Protocole additionnel à ladite Convention que le juge doit contrôler le caractère proportionné de l'atteinte portée par la confiscation au droit au respect de la vie privée et familiale du propriétaire du bien confisqué, lorsque cette garantie est invoquée ». Rappelons que ce contrôle doit s'effectuer, toujours selon la chambre criminelle, « au regard de la situation personnelle de l'intéressé et de la gravité concrète des faits », ce premier critère dépendant notamment du statut de l'immeuble saisi (domicile du condamné, ou non) et du fait, pris en compte en l'espèce, que le condamné y héberge des membres de sa famille33(*).

La disposition ne remet pas davantage en cause la possibilité pour les personnes concernées de se tourner vers un juge pour contester leur expulsion : en effet, elle permettrait à l'Agrasc de ne pas faire appel au juge civil pour obtenir un arrêté d'expulsion, mais elle n'empêcherait en rien un condamné de solliciter la juridiction compétente pour demander l'annulation du même arrêté.

2. La position de la commission 

La commission des lois a relevé que le nouveau mécanisme de confiscation « de droit » de certains biens saisis constituait un véritable renversement de la logique actuelle des confiscations et une évolution très positive qui ne manquera pas de donner à cette peine un caractère encore plus dissuasif. Par conséquent, elle n'a adopté à l'article 3, sur ce point, que des amendements de précision visant, notamment, à expliciter la portée de



la modification opérée en prévoyant que la confiscation « obligatoire » des biens saisis concernés emportera l'absence d'obligation de motiver la décision correspondante (amendement COM-25).

Le rapporteur appelle le ministère de la justice à mettre en place sans délai des mécanismes, notamment informatiques, visant à faciliter l'application de cette mesure et à faire en sorte que l'identification par le parquet ou le juge d'instruction des biens saisis comme étant l'objet, le produit ou l'instrument de l'infraction soit automatiquement communiquée à la juridiction de jugement, évitant un fastidieux travail de « re-saisie » qui risquerait de limiter indûment la portée de cette innovation.

S'agissant des dispositions relatives aux effets des confiscations de biens immobiliers, le rapporteur a indiqué que, contrairement à l'analyse mise en avant par les députés, la notion d'« occupant [du] chef [du condamné] » ne concernait pas seulement les proches de celui-ci, mais bien toute personne présente dans le bien du fait d'une décision du condamné, y compris sur la base d'un bail régulièrement signé par les deux parties. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale aurait donc pour conséquence l'expulsion de tous les occupants présents à l'initiative du condamné, qu'ils soient ou non de bonne foi.

Si elle a adhéré aux objectifs poursuivis par la proposition de loi sur ce sujet, qui consistent à faire obstacle aux manoeuvres dilatoires déployées par certaines personnes condamnées, le rapporteur a estimé que la condamnation ne pouvait pas valablement porter préjudice aux locataires qui, liés au condamné par un contrat de bail conforme aux règles applicables et s'acquittant régulièrement de leur loyer, ne sauraient subir les conséquences d'une peine dont ils ne sont pas responsables.

À son initiative, la commission a ainsi adopté un amendement COM-26 prévoyant que la confiscation vaudrait titre d'expulsion à l'encontre du condamné et des occupants de son chef, à l'exception des titulaires d'une convention d'habitation conclue à titre onéreux dès lors que cette convention est antérieure à la confiscation et que le locataire s'est acquitté de ses obligations contractuelles.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4
Extension des biens « mal acquis » susceptibles d'être restitués

L'article 4 étend le dispositif de restitution des biens « mal acquis » à tous les types de biens, y compris ceux qui ne supposent pas une cession préalable à la restitution et qui sont en l'état ignorés par la loi.

La commission a adopté cet article sans modification.

1. Les modalités actuelles de restitution des biens « mal acquis »

La notion de « biens mal acquis » recouvre « les avoirs et biens détournés du budget d'une organisation internationale, d'un État ou d'une entreprise publique par une personnalité `politiquement exposée' et placés à l'étranger à des fins personnelles »34(*) ; la mise en place d'un mécanisme permettant la restitution de tels biens est prévue par la convention de Merida de 2003, ratifiée par la France, mais n'a été effectivement appliquée qu'à compter de 2021, avec la loi n° 2021-1031 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales du 4 août 2021. Le mécanisme de restitution prévu par son article 2, d'initiative parlementaire, est largement inspiré par le texte déposé par l'ancien sénateur Jean-Pierre Sueur et adopté par le Sénat dès 201935(*).

Le dispositif adopté en 2021 (XI de l'article 2 de la loi précitée) prévoit ainsi que sont restituées, « au plus près de la population de l'État étranger concerné, les recettes provenant de la cession des biens confisqués aux personnes définitivement condamnées » dès lors que ces personnes ont commis l'infraction en tant que dépositaires de l'autorité publique ou en tant qu'elles étaient chargées d'un mandat électif public ou d'une mission de service public dans un État étranger. Cette disposition s'applique pour une série d'infractions pénales (abus de confiance, corruption passive, trafic d'influence, prise illégale d'intérêts, favoritisme, détournement de fonds publics, corruption active, soustraction et détournement de biens publics), leur blanchiment, leur recel, le recel de leur blanchiment ou le blanchiment de leur recel.

Le mécanisme, s'il concerne - comme on l'a vu - les recettes provenant de la cession des biens confisqués, ne touche paradoxalement pas les comptes bancaires où sont hébergés des fonds « mal acquis ».

Pour pallier cette lacune, le rapporteur Jean-Luc Warsmann a déposé un amendement, adopté en séance publique, permettant de substituer à la notion de « recettes provenant des biens confisqués » celle, plus large,

de « confiscation » qui autorise à restituer tous types de biens, qu'ils aient ou non été préalablement cédés, et donc d'intégrer les produits bancaires et les numéraires.

2. La position de la commission 

L'article 4 procédant à la correction bienvenue d'une lacune de toute évidence non voulue par le législateur, la commission des lois l'a approuvé sur le fond comme sur la forme.

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MERCREDI 20 MARS 2024

M. François-Noël Buffet, président. - Nous en venons à l'examen du rapport de notre collègue Muriel Jourda sur la proposition de loi améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Ce texte traite, au moins partiellement, de la saisie et de la confiscation des avoirs criminels, c'est-à-dire de l'appréhension du patrimoine des délinquants, au sens large du terme.

L'architecture de la saisie et de la confiscation des avoirs criminels a été largement mise en place par un texte déposé par le député Jean-Luc Warsmann en 2010. En 2019, le Premier ministre Édouard Philippe avait confié au même député et à son collègue Laurent Saint-Martin le soin d'évaluer l'application de ce texte. Le rapport contenait une trentaine de préconisations, dont un certain nombre se retrouve dans la proposition de loi dont nous allons débattre, texte à nouveau déposé par Jean-Luc Warsmann en 2023.

En synthèse, la saisie et la confiscation des avoirs criminels, contrairement à ce que la terminologie peut laisser penser, sont possibles pour les contraventions, les délits et les crimes. Tous les avoirs - matériels et immatériels - et biens - meubles ou immeubles - peuvent être confisqués ou saisis, dans des conditions précises. Ainsi, les confiscations sont possibles pour les infractions punies de plus d'un an d'emprisonnement lorsqu'il est question de l'instrument, de l'objet ou du produit de l'infraction ; au-delà d'une peine encourue de cinq ans, il est possible de saisir ou de confisquer les biens dont le condamné ou le propriétaire ne peut pas justifier l'origine ; enfin, pour les infractions les plus graves - notamment financières - il est possible de confisquer tout ou partie du patrimoine de la personne condamnée.

Nous disposons donc d'une capacité de saisie importante qui revêt une dimension essentielle dans la répression et la prévention de la criminalité : un certain nombre d'infractions n'étant justifiées que par le gain qu'elles peuvent procurer, l'État dissuade leurs auteurs en le confisquant.

Concrètement, la saisie est effectuée au stade de l'enquête par les forces de police ou de gendarmerie, sur instruction ou validation du parquet. Elle peut également intervenir au stade de l'instruction, sur demande du juge. Par ailleurs, si les saisies peuvent être menées à titre probatoire, nous évoquons ici des saisies à caractère confiscatoire, l'objectif consistant, au-delà de l'indisponibilité du bien, à en transférer la propriété à l'État à l'issue de la procédure.

L'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc), créée en 2010 et placée sous la double tutelle du ministère des comptes publics et du ministère de la justice, se voit confier un certain nombre de biens. Certains d'entre eux - les yachts par exemple - impliquent une gestion un peu particulière et sont énumérés par le code de procédure pénale. Lesdits biens ne sont confiés à l'Agrasc que sur mandat de justice.

Une décision doit ensuite être prise, qu'il s'agisse de détruire des biens illicites ou de vendre ces biens dans l'intérêt à la fois de l'État et du propriétaire : dans l'hypothèse où un véhicule est saisi, sa valeur diminue avec les années de procédure, sans compter les frais de gardiennage. Il vaut mieux que ce bien soit vendu et que la somme soit consignée à la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

L'Agrasc peut aussi affecter un bien saisi aux services d'enquête ou aux services judiciaires.

S'ensuit, dans le déroulement de la procédure, une décision de justice prononçant ou non la confiscation des biens. Après confiscation, les biens pourront être vendus ou affectés ; depuis peu, une affectation sociale peut être prononcée.

Il est nécessaire que le parcours soit le plus fluide possible : ceux qui sont censés saisir les biens doivent être formés pour savoir comment et quoi saisir, afin que le juge puisse confisquer ce bien, de sorte qu'il ne soit pas saisi pour rien.

Au reste, l'enjeu de la confiscation - un moyen de punir et de remplir les caisses de l'État - a été mis en avant dans le rapport intitulé Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner, rendu en 2019 par nos collègues députés Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann.

Depuis sa publication, la principale modification intervenue est la création d'antennes régionales de l'Agrasc, lesquelles conseillent et forment les services enquêteurs et les magistrats à la dynamisation des scellés, c'est-à-dire l'appréhension et la vente de bien, ce qui a contribué à l'amélioration de l'efficacité du dispositif et à l'augmentation des recettes pour l'État.

Toutefois, il existe un écart entre le montant des saisies et celui des confiscations notoirement, puisqu'environ 30 % des saisies débouchent sur une confiscation. Par exemple, lorsque quelqu'un n'est pas condamné, il n'y a aucune raison de saisir ses biens.

Le déficit de formation et de connaissance en matière de confiscation en rend difficile la mise en oeuvre. Pour confisquer un immeuble, il faut savoir qu'il a été saisi, ce qui n'est pas évident, sachant qu'il doit être visé avec précision, au moyen de sa désignation cadastrale complète.

C'est pourquoi l'amélioration de la fluidité de la chaîne qui va de la saisie à la confiscation tient non seulement aux dispositions que nous allons voter, mais également à l'amélioration de la formation - mise en oeuvre par l'Agrasc -, à l'augmentation des effectifs de l'Agrasc, à la mise en place d'une meilleure infrastructure numérique, qui serait dotée d'un logiciel permettant de suivre le parcours complet des biens, pour améliorer leur visibilité par les magistrats au cours des procédures ; c'est loin d'être le cas aujourd'hui.

J'en viens aux modifications que je souhaite proposer sur ce texte visant, je le répète, à améliorer la fluidité et l'efficacité des saisies ainsi que leur transformation en confiscation et à mieux valoriser les biens confisqués.

Je propose de supprimer l'article voté par l'Assemblée nationale rappelant que l'Agrasc peut former des services d'enquête et des services judiciaires, car il n'a aucune portée normative, et l'Agrasc n'a pas le monopole de la formation.

Je vous propose de confirmer les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale indiquant que l'une des missions de l'officier de police judiciaire (OPJ) est de réaliser l'enquête patrimoniale, car ce n'est pas un réflexe.

Je ne suis pas d'accord avec la proposition de l'Assemblée nationale de notifier à l'Agrasc l'ensemble des saisies faites, car tous les biens saisis ne sont pas gérés par elle. Or cette disposition risque de noyer l'Agence sous une masse d'informations qu'elle n'est pas légalement en capacité de traiter. Aussi, je propose d'obliger la notification des décisions uniquement sur les biens relevant de la compétence de l'Agence.

L'Assemblée nationale a octroyé une compétence nouvelle à l'Agrasc lorsque les biens sont dévolus à l'État ou ne sont pas restitués. Il me semble que cette disposition est bienvenue.

Je suis également favorable à la disposition permettant à l'Agrasc de gérer les biens demandant une expertise particulière ou dont les frais de gardiennage ont un coût disproportionné par rapport à leur propre valeur.

L'extension de la possibilité pour les OPJ de saisir des biens meubles et les sommes déposées sur des comptes de paiement, sur autorisation du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention, me semble opportune et fait l'objet d'un de mes amendements. Pour rappel, jusqu'à présent, l'Agrasc est compétente pour gérer les comptes de dépôt et non les comptes de paiement, lesquels sont pourtant très utilisés dans les trafics.

Au total, nos propositions relatives au stade de la saisie visent à améliorer la connaissance de l'Agrasc des biens saisis, au moyen de la notification pour tous les biens qui la concernent, et de ceux qui sont chargés faire les saisies ; elles ont également pour objet d'étendre le nombre de biens pouvant être gérés par l'Agrasc.

J'en viens à l'étape de l'affectation des biens. Une décision prononçant la confiscation est susceptible d'appel devant la chambre de l'instruction ; or ces chambres sont engorgées par des décisions à rendre soumises à délai. Aussi, nous pouvons adopter la disposition adoptée par l'Assemblée nationale prévoyant que ce soit le président de la cour d'appel ou un conseiller délégué par lui qui soit saisi.

Mais je vous propose d'aller plus loin dans cette simplification en ajoutant que les recours faits dans le cadre de saisies simples soient non suspensifs : moins les délinquants pourront récupérer les biens saisis, plus la répression sera efficace. Au total, elle permettrait que l'appel soit plus rapide et non suspensif pour les saisies simples.

Je vous propose d'exclure les fondations sportives de la liste des organismes bénéficiant de l'affectation des biens saisis à titre gratuit - élargie par l'Assemblée nationale aux fédérations sportives, aux fondations et associations reconnues d'utilité publique et aux organismes gestionnaires d'un parc naturel. Il me paraît par ailleurs peu raisonnable de confier les biens au stade de la saisie, car ils pourraient être éventuellement restitués. Aussi, je propose que cela soit possible uniquement au stade de la confiscation, c'est-à-dire une fois que la propriété du bien saisi a été transférée à l'État.

J'en viens aux stades de la confiscation des biens puis de leur attribution. L'Assemblée nationale a voté la possibilité d'imposer le dessaisissement de biens dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public (CJIP), ce qui me paraît judicieux. Je propose d'ajouter les conventions judiciaires d'intérêt public en matière environnementale.

La mesure centrale du texte vise à rendre obligatoire la confiscation de l'objet du produit de l'instrument de l'infraction. Cela me paraît de bonne guerre, sachant qu'elle n'est pas automatique, puisque le juge peut y déroger. Je proposerai un amendement pour préciser la portée de cette mesure.

Nous pouvons difficilement trouver une disposition plus efficace pour compenser la méconnaissance des magistrats en la matière. En effet, faute de bien connaître la procédure des saisies, il leur est difficile de mettre en oeuvre la confiscation ; aussi nous proposons de la rendre automatique.

Par ailleurs, la confiscation d'un bien immobilier vaudrait titre d'expulsion pour la personne condamnée. Jusqu'à présent, l'Agrasc devait obtenir un titre d'expulsion pour la confiscation. L'Assemblée nationale a précisé que la confiscation valait titre d'expulsion non seulement pour la personne condamnée mais aussi pour tout « occupant de son chef », afin qu'un occupant ne puisse pas empêcher de valoriser l'immeuble saisi.

Toutefois, cette précision me paraît être excessive puisqu'elle couvre aussi le cas où un bail a été conclu de bonne foi par un locataire ignorant qu'il habite dans un immeuble acheté avec de l'argent provenant de la délinquance.

Aussi, je propose de maintenir que la confiscation vaut titre d'expulsion pour le condamné et pour les occupants de son chef, à l'exception de ceux qui ont signé une convention à titre onéreux - un bail -, qui s'acquittent de la contrepartie financière et dont la signature a eu lieu avant la saisie elle-même.

Je propose de ne pas modifier la disposition prévoyant d'affecter des immeubles confisqués aux collectivités territoriales.

Je suis également favorable, sous réserve d'un amendement de coordination, à la proposition visant à faciliter les confiscations en valeur.

L'utilisation des biens confisqués pour l'indemnisation des victimes est déjà possible ; elle va être facilitée. Le périmètre des biens permettant cette indemnisation va être étendu, de même que le délai, qui va passer de deux mois à six mois.

Enfin, les biens dits « mal acquis » doivent être restitués aux populations des pays d'origine. Jusqu'à présent, seul le produit de la cession des biens était autorisé ; je propose que cela soit aussi le cas des comptes saisis, qu'il nous semble bon de restituer.

Je déposerai d'autres amendements en séance, dans l'attente de la communication des éléments techniques pour les rédiger. Ils concerneront notamment la procédure de saisie et d'affectation, car, dès lors qu'une juridiction est saisie, il n'est plus possible de vendre un bien, aucune procédure n'étant prévue. D'ici à la séance, je proposerai une procédure permettant de vendre les biens en cours de procédure.

M. Hussein Bourgi. - Cette proposition de loi a fait l'objet d'un consensus politique à l'Assemblée nationale ; je souhaite que cela soit aussi le cas au Sénat, car l'objet du texte peut tous nous rassembler.

Nous sommes les dépositaires de la mémoire des travaux menés au Sénat, auxquels ce texte fait écho.

Quid des biens immobiliers appartenant aux marchands de sommeil ? Les travaux de la commission d'enquête sur la paupérisation des copropriétés immobilières suggèrent à ce stade que les marchands de sommeil auraient acquis leurs biens grâce à de l'argent sale, et ce à des fins détestables. De plus, les collectivités territoriales et les bailleurs doivent reloger les familles des copropriétés dégradées, qu'il faut détruire ou réhabiliter, tandis que les marchands de sommeil s'évaporent dans la nature.

Quid des avoirs russes, gelés par les différents paquets de sanctions adoptés par l'Union européenne ?

Lors de l'examen du projet de loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, des dispositions ont été votées sur les biens mal acquis. Malheureusement, la circulaire n° 6379/SG du 22 novembre 2022 n'est pas à la hauteur de la loi, la plus ambitieuse et volontariste du monde, et entrave l'action des ONG et des bénéficiaires, ce qui ne nous permet pas d'atteindre les objectifs élevés que nous avions fixés dans la loi.

M. Guy Benarroche. - Les travaux de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France ont mis en exergue le sujet de la saisie des avoirs et celui du blanchiment, qui ne sont pas sans lien avec l'objet de notre texte. Il ne serait pas inutile que le rapporteur du texte et celui de la commission discutent ensemble de ces sujets.

J'ai un avis mitigé sur l'amendement relatif à l'automatisation de la confiscation. Même si j'en partage l'objet, je me méfie du fait que le juge n'ait pas la possibilité de décider ; sa rédaction me semble trop contraignante.

À l'inverse, l'amendement ayant pour objet de modifier l'extension de la confiscation en cas de contrat me semble vidé de son contenu, car certains contrats sont conclus volontairement pour éviter la confiscation.

M. Thani Mohamed Soilihi. - La disposition faisant de la confiscation un titre d'expulsion peut concerner des tiers innocents qui n'ont rien à voir avec l'infraction. Quelles seraient les voies de recours de ces tiers, à qui se verrait automatiquement étendue la procédure de confiscation ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Monsieur Bourgi, les marchands de sommeil peuvent se voir confisquer leurs biens, car il s'agit de l'instrument de l'infraction.

Les biens confisqués peuvent être confiés gratuitement à des bailleurs sociaux ou à des collectivités territoriales si nous adoptons notre amendement relatif à l'affectation sociale ; par exemple, l'association Habitat et Humanisme a déjà bénéficié de l'attribution d'un immeuble appartenant à un marchand de sommeil pour le transformer en un immeuble d'habitation. Il est probable que ce type d'affectation sera plus fréquent.

Je n'ai pas de réponses sur les avoirs russes ; mais le texte permet de vendre des biens faisant partie des avoirs russes, à l'instar des yachts de luxe.

Sur les biens mal acquis, j'ai entendu votre observation.

Monsieur Benarroche, il sera toujours possible de combler les trous dans la raquette à la suite des travaux de la commission d'enquête, dont je ne suis pas en droit de connaître les travaux en cours. Le blanchiment d'argent est une question difficile. Nous examinerons les recommandations de la commission d'enquête en la matière, qui seront publiées après l'examen de notre texte en séance publique.

L'automatisation de la confiscation ne porte pas sur tous les biens. La confiscation sera obligatoire pour les biens qui sont l'instrument, l'objet ou le produit de l'infraction. Le magistrat aura la capacité de ne pas y procéder, c'est-à-dire d'aller à l'encontre de son caractère obligatoire, en motivant sa décision. En réalité, le mécanisme est inversé : la confiscation n'a plus à être prononcée, elle devient obligatoire, mais le juge peut y déroger.

L'existence de baux préalables ne remet pas en cause la confiscation. Il est possible de confisquer un immeuble bien que des locataires y soient présents. La dérogation vise à faire en sorte que la confiscation ne vaudra pas titre d'expulsion pour les locataires titulaires d'un bail régulier avant la saisie et qui n'aurait pas été conclu postérieurement à la saisie d'une façon frauduleuse.

Ainsi, la confiscation vaut titre d'expulsion, mais toute la procédure d'expulsion peut être mise en oeuvre après : celui qui vit dans les lieux peut contester ce titre d'expulsion. Jusqu'à maintenant l'Agrasc devait se procurer un titre d'expulsion, ce qui allongeait la procédure, d'autant qu'elle l'obtenait systématiquement. Toutefois, la procédure permettant de contester ce titre peut toujours être mise en oeuvre. Par exemple, une famille peut contester cette procédure d'expulsion en indiquant qu'elle porte une atteinte trop importante à sa vie privée. Toute la procédure existante permettant de contester une expulsion de droit commun peut être mise en oeuvre. Simplement, le titre, qui était accordé systématiquement, sera, grâce à cette disposition, inclus dans l'acte de confiscation.

M. Thani Mohamed Soilihi. - Pour contester, il faut une décision, laquelle doit être notifiée. Comment les personnes qui ne seraient pas au courant de la confiscation valant titre d'expulsion feront-elles pour défendre leurs droits ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Une telle situation n'est pas possible, car n'importe quelle décision de justice doit être notifiée. On veut que ceux qui ignorent le mode de financement de l'immeuble ne soient pas expulsés d'emblée. Aussi, la confiscation ne vaudra pas titre d'expulsion, dans leur cas, et il faudra mettre en place une procédure pour titre d'expulsion ; ces personnes seront donc nécessairement informées de la mise en oeuvre d'une procédure.

Du reste, s'ils sont étrangers à l'infraction, l'immeuble sera valorisable et même vendable s'il est occupé, comme c'est le cas aujourd'hui.

M. François-Noël Buffet, président. - Concernant le périmètre de ce projet de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre comprend les dispositions relatives aux biens susceptibles d'être saisis et confisqués dans le cadre d'une procédure pénale, y compris en ce qui concerne les biens dits « mal acquis » visés par l'article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ; aux procédures de saisie et de confiscation applicables en matière pénale ; à la gestion des biens saisis et confisqués, ce qui couvre, en particulier, les prérogatives de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-16 vise à simplifier le traitement des recours contre les décisions de saisie en le confiant au premier président de la cour d'appel et à affecter à des entités nouvelles des biens confisqués plutôt que saisis, à l'exception des fédérations sportives.

L'amendement COM-16 est adopté.

L'article 1er dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-18 concerne le caractère non suspensif des recours formés contre les décisions de saisie simple.

L'amendement COM-18 est adopté et devient article additionnel.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-17 a pour objet d'étendre les cas de vente avant jugement des biens saisis.

L'amendement COM-17 est adopté et devient article additionnel.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-15 vise à notifier la partie civile des décisions de saisie spéciale. Je ne suis pas sûre que cette disposition ait du sens au stade de la saisie. Avis défavorable.

L'amendement COM-15 n'est pas adopté.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements COM-2 rectifié bis et COM-8 rectifié visent à rendre prioritaire l'affectation sociale des biens confisqués, c'est-à-dire l'affectation à titre gratuit à des associations ou à des fondations reconnues d'utilité publique.

Cette solution alourdit la mission de l'Agrasc. Je propose donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

Les amendements identiques COM-2 rectifié bis et COM-8 rectifié ne sont pas adoptés.

Les amendements identiques COM-3 rectifié et COM-9 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements identiques COM-6 rectifié bis et COM-12 rectifié visent à porter à trois ans le délai dont disposerait l'Agrasc pour procéder à l'affectation sociale d'un bien immobilier confisqué. Il s'agit d'une mesure de nature réglementaire. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-6 rectifié bis COM-12 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements identiques COM-5 rectifié bis et COM-11 rectifié visent à ouvrir le conseil d'administration de l'Agrasc aux associations. Or il s'agit de missions régaliennes. J'émets donc un avis défavorable sur ces amendements.

Les amendements identiques COM-5 rectifié bis et COM-11 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements identiques COM-1 rectifié ter et COM-7 rectifié ont pour objet de confisquer obligatoirement des biens saisis dont l'origine ne peut pas être justifiée. Cela me semble excessif au regard du droit de propriété. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-1 rectifié ter et COM-7 rectifié ne sont pas adoptés.

Article 1er bis A (nouveau)

L'article 1er bis A est adopté sans modification.

Article 1er bis B (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-19 a pour objet d'étendre les obligations applicables aux cas de CJIP en matière environnementale.

L'amendement COM-19 est adopté.

L'article 1er bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis C (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-20 a pour objet de notifier à l'Agrasc les seules décisions de saisie entrant dans le périmètre de ses compétences.

L'amendement COM-20 est adopté.

L'article 1er bis C est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis D (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Les amendements identiques COM-4 rectifié ter et COM-10 rectifié ter tendent à affecter les biens immobiliers saisis et confisqués aux services d'enquête, aux services judiciaires, à l'Office français de la biodiversité (OFB). Avis favorable.

Les amendements identiques COM-4 rectifié ter et COM-10 rectifié ter sont adoptés et deviennent article additionnel.

L'article 1er bis D est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis E (nouveau)

L'amendement rédactionnel COM-21 est adopté.

L'article 1er bis E est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-22 vise à supprimer cet article.

L'amendement COM-22 est adopté.

L'article 1er bis est supprimé.

Article 1er ter (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-23 vise à alléger la motivation des confiscations en valeur.

L'amendement COM-23 est adopté.

L'article 1er ter est ainsi rédigé.

Article 2

L'article 2 est adopté sans modification.

Après l'article 2

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-24 concerne les modalités de saisie spéciale par les OPJ, dont la saisie sur les comptes de paiement.

L'amendement COM-24 est adopté et devient article additionnel.

Article 3

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - Au travers de l'amendement COM-25, nous procédons à une clarification rédactionnelle.

L'amendement COM-25 est adopté.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-26 vise à exclure des locataires de bonne foi du dispositif donnant valeur de titre d'expulsion à la décision de confiscation d'un bien immobilier.

L'amendement COM-26 est adopté.

L'article 3 adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4 (nouveau)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-13 concerne l'extension des infractions « support » du dispositif de restitution des biens mal acquis. Avis défavorable.

L'amendement COM-13 n'est pas adopté.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. - L'amendement COM-14 concerne l'extension du dispositif de restitution des biens mal acquis aux biens détenus par des proches. Avis défavorable.

L'amendement COM-14 n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté sans modification.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

16

Simplification du traitement des recours contre les décisions de saisie et affectation à des entités nouvelles des biens confisqués plutôt que saisis 

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 1er

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

18

Caractère non suspensif des recours formés contre les décisions de saisie simple

Adopté

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

17

Extension des cas de vente avant jugement des biens saisis 

Adopté

M. BENARROCHE

15

Notification à la partie civile des décisions de saisie spéciale 

Rejeté

M. PARIGI

2 rect. bis

Affectation sociale prioritaire des biens saisis et confisqués

Rejeté

Mme Nathalie DELATTRE

8 rect.

Affectation sociale prioritaire des biens saisis et confisqués 

Rejeté

M. PARIGI

3 rect.

Affectation sociale des biens saisis et confisqués aux entreprises solidaires d'utilité sociale 

Rejeté

Mme Nathalie DELATTRE

9 rect.

Affectation sociale des biens saisis et confisqués aux entreprises solidaires d'utilité sociale 

Rejeté

M. PARIGI

4 rect. ter

Affectation des biens immobiliers saisis et confisqués aux services d'enquête, aux services judiciaires, à l'Office français de la biodiversité ou à la direction générale de la Sécurité civile et de la Gestion des crises.

Adopté

Mme Nathalie DELATTRE

10 rect. ter

Affectation des biens immobiliers saisis et confisqués aux services d'enquête, aux services judiciaires, à l'Office français de la biodiversité ou à la direction générale de la Sécurité civile et de la Gestion des crises

Adopté

M. PARIGI

6 rect. bis

Délai d'affectation sociale des biens immobiliers confisqués

Rejeté

Mme Nathalie DELATTRE

12 rect.

Délai d'affectation sociale des biens immobiliers confisqués

Rejeté

M. PARIGI

5 rect. bis

Création d'un conseil d'administration de l'Agrasc et ouverture de celui-ci à des associations

Rejeté

Mme Nathalie DELATTRE

11 rect.

Création d'un conseil d'administration de l'Agrasc et ouverture de celui-ci à des associations

Rejeté

M. PARIGI

1 rect. ter

Confiscation obligatoire des biens saisis dont l'origine ne peut pas être justifiée

Rejeté

Mme Nathalie DELATTRE

7 rect.

Confiscation obligatoire des biens saisis dont l'origine ne peut pas être justifiée

Rejeté

Article 1er bis B (nouveau)

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

19

Obligations applicables en cas de conventions judiciaires d'intérêt public (CJIP) environnementales

Adopté

Article 1er bis C (nouveau)

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

20

Notification à l'Agrasc des seules décisions de saisie entrant dans le périmètre de ses compétences 

Adopté

Article 1er bis E (nouveau)

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

21

Rédactionnel

Adopté

Article 1er bis (nouveau)

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

22

Suppression de l'article 

Adopté

Article 1er ter (nouveau)

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

23

Allègement de la motivation des confiscations en valeur

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 2

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

24

Modalités de saisie spéciale (saisie par les officiers de police judiciaire et prise en compte des comptes de paiement)

Adopté

Article 3

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

25

Clarification rédactionnelle 

Adopté

Mme Muriel JOURDA, rapporteur

26

Exclusion des locataires de bonne foi du dispositif donnant valeur de titre d'expulsion à la décision de confiscation d'un bien immobilier 

Adopté

Article 4 (nouveau)

M. BENARROCHE

13

Extension des infractions « support » du dispositif de restitution des biens mal acquis

Rejeté

M. BENARROCHE

14

Extension du dispositif de restitution des biens mal acquis aux biens détenus par des proches 

Rejeté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 36(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie37(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte38(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial39(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 20 mars 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 169 (2023-2024) améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels.

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :

- aux biens susceptibles d'être saisis et confisqués dans le cadre d'une procédure pénale, y compris en ce qui concerne les biens dits « mal acquis » visés par l'article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ;

- aux procédures de saisie et de confiscation applicables en matière pénale ;

- à la gestion des biens saisis et confisqués - ce qui couvre, en particulier, les prérogatives de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc).

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

AUTEUR DE LA PROPOSITION DE LOI

M. Jean-Luc Warsmann, député des Ardennes

Table ronde DGGN / DGPN

DIRECTION NATIONALE DE LA POLICE JUDICIAIRE

M. Christian Sainte, directeur

SOUS-DIRECTION DE LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE

Mme Corinne Bertoux, sous-directrice adjointe

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA GENDARMERIE NATIONALE

Colonel François Devigny, chef du Bureau de la criminalité organisée et délinquance spécialisée

Lieutenant-colonelle Cécile Lambert, cheffe de la cellule nationale des avoirs criminels de la gendarmerie

AGENCE DE GESTION ET DE RECOUVREMENT DES AVOIRS SAISIS ET CONFISQUÉS (AGRASC)

Mme Sylvie Marchelli, sous-directrice opérationnelle

M. Giovanni Bon, auditeur de justice

DIRECTION DES AFFAIRES CRIMINELLES ET DES GRÂCES (DACG)

Mme Élise Barbe, sous-directrice de la négociation et de la législation pénale

M. Étienne Perrin, chef du bureau du droit économique, financier et social, de l'environnement et de la santé publique

M. Marin Houette, magistrat rédacteur au bureau de la législation pénale spécialisée

Table ronde Procureurs

CONFÉRENCE NATIONALE DES PROCUREURS GÉNÉRAUX DE COUR D'APPEL (CNPG)

Mme Anne Kostomaroff, procureure générale près la cour d'appel de Limoges

CONFÉRENCE NATIONALE DES PROCUREURS DE LA RÉPUBLIQUE (CNPR)

M. Nicolas Bessone, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille

ASSOCIATION DES MAGISTRATS INSTRUCTEURS (AFMI)

M. Frédéric Mace, président, tribunal judiciaire de Bordeaux

M. Daniel Francisco, vice-président, tribunal judiciaire de Fort-de-France

Mme Valérie Culioli, vice-présidente, tribunal judiciaire de Paris (JUNALCO)

M. Jonas Nefzi, vice-président, tribunal judiciaire de Créteil

MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE LA RELANCE - DIRECTION DU BUDGET

M. Bao Nguyen-Huy, adjoint au sous-directeur chargé de la Justice

M. Pierre Tambrun, adjoint au bureau Justice

ASSOCIATION CRIM'HALT

M. Fabrice Rizzoli, président

M. Jean-Jérôme Mondoloni, membre

Table ronde Associations de magistrats

UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS (USM)

Mme Fabienne Averty, secrétaire nationale

M. Aurélien Martini, secrétaire général adjoint

SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE (SM)

Mme Nelly Bertrand, secrétaire générale

Mme Judith Allenbach, secrétaire permanente

UNITÉ MAGISTRATS - SNM FO

Mme Valérie Dervieux, déléguée régionale Unité magistrat à la Cour d'appel de Paris et membre du Conseil national

M. Marc Lifchitz, membre du bureau national d'Unité Magistrats

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- Direction générale des finances publiques (DGFiP)

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-169.html


* 1 Article 131-6 du code pénal.

* 2 Article 131-14 du même code.

* 3 Article 131-21 du même code.

* 4 Ibid.

* 5 Ibid.

* 6 Ibid.

* 7 Source : commission des affaires européennes du Sénat, contrôle de subsidiarité, 25 mai 2022 : Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au recouvrement et à la confiscation d'avoirs

* 8 En particulier, par les lois n° 2004-204 du 9 mars 2004, n° 2007-297 du 5 mars 2007 et n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 ou encore, concernant les « biens mal acquis » par certains chefs d'État étrangers en France, n°2021-1031 du 4 août 2021.

* 9  Loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale

* 10 Articles 131-6, 131-10, 131-14, 131-16, 131-21 et 131-21-1 du code pénal

* 11 Articles 694-10 à 694-14, 695-9-1 à 695-9-30-2, 706-103, 706-141 à 706-165 et 713-36 à 713-41 du code de procédure pénale

* 12  Directive 2014/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l'Union européenne.

* 13  Règlement (UE) 2018/1805 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 concernant la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et des décisions de confiscation.

* 14  Décision 2007/845/JAI du Conseil du 6 décembre 2007 relative à la coopération entre les bureaux de recouvrement des avoirs des États membres en matière de dépistage et d'identification des produits du crime ou des autres biens en rapport avec le crime

* 15 Éléments chiffrés d'activité, Agrasc, 2023

* 16 Il est toutefois difficile de le comparer directement avec le montant des saisies, dans la mesure ou confiscations et saisies peuvent répondre à des temporalités différentes, un bien saisi en année N ne se trouvant définitivement confisqué que plusieurs mois, voire plusieurs années plus tard.

* 17 600 000 euros ont également été virés à une autorité étrangère dans le cadre d'une entraide pénale internationale (EPI), et 1,3 million est revenu au Compte d'affectation spéciale : « Participations financières de l'État »

* 18 En 2023, selon les données de l'Agrasc, celles-ci étaient à l'origine de 70 % des sommes versées.

* 19  Loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale.

* 20  Loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, complétée par le décret n° 2021-1794 du 23 décembre 2021.

* 21  Rapport n° 387 (2022-2023) « La police judiciaire dans la police nationale : se donner le temps de la réussite », fait au nom de la commission des lois.

* 22 Le rapporteur rappelle à cet égard que l'affectation de biens saisis à ces services apparaît déjà limitée et, pour beaucoup, insuffisante (à titre d'illustration, selon l'Agrasc, seuls huit biens ont été affectés aux services judiciaires au cours de l'année 2023) alors même que leurs besoins en véhicules, en matériels techniques ou en moyens informatiques sont considérables.

* 23 Lorsque l'Agence vend les biens en cause avant le jugement, le produit de cette vente est consigné et peut être réclamé par le mis en cause en cas de classement sans suite, de non-lieu ou de relaxe, ou lorsque la peine de confiscation n'est pas prononcée.

* 24 Dans un tel cas, la valeur du bien affecté gratuitement à un service public fait l'objet d'une estimation avant affectation et le propriétaire dudit bien peut, en cas de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, ou lorsque la confiscation n'est pas prononcée, en réclamer la restitution, assortie d'une indemnité compensant une éventuelle perte de valeur.

* 25 Il s'agit des mesures énumérées au II de l'article 131-39-2 du code pénal.

* 26 La proposition tendant à doter l'Agence d'une telle compétence figurait bel et bien dans le rapport de MM. Warsmann et Saint-Martin en 2019, elle s'inscrivait dans un cadre plus large dans lequel l'Agence, renforcée et dotée d'antennes régionales plus nombreuses, avait vocation à traiter « l'ensemble des missions de gestion des saisies et des confiscations des avoirs criminels : vente avant jugement, destruction, restitution (y compris contre paiement), attribution, réaffectation sociale et mise en oeuvre de l'enquête post-sentencielle », ainsi que « l'ensemble des missions d'expertise, d'élaboration, de collecte et de traitement des statistiques, de soutien, de bureau de recouvrement des avoirs et de formation », mais n'a pas été reprise dans le cadre du présent texte.

* 27 Cour de cassation, chambre criminelle, 19 avril 2023, 22-82.994.

* 28 Arrêt précité, point 8.

* 29 Cette proposition était ainsi libellée : « Compléter les dispositions législatives existantes pour rendre obligatoire, sauf motivation contraire, la confiscation des biens meubles et immeubles en relation directe avec l'infraction : produit direct ou indirect, objet ou instrument de l'infraction ».

* 30 Articles L. 221-2, L. 224-16, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3, L. 413-1 du code de la route.

* 31  Rapport n°1911 (2023-2024) de l'Assemblée nationale sur la proposition de loi, améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels, fait par Jean-Luc Warsmann.

* 32 Arrêt précité du 19 avril 2023.

* 33 Paragraphe 19 de l'arrêt précité : « En l'espèce, pour rejeter l'argument tiré de l'atteinte disproportionnée portée à la vie privée et familiale de M. [K] par la confiscation du bien constituant son domicile, l'arrêt attaqué énonce que la résidence de la fille majeure du prévenu à son domicile est inopérante en elle-même à démontrer l'atteinte à la vie privée et familiale, étant observé que celle-ci peut également être hébergée par sa mère ».

* 34 Rapport précité de MM. Warsmann et Saint-Martin.

* 35  Proposition de loi relative à l'affectation des avoirs issus de la corruption transnationale, déposée le 6 novembre 2018 et adoptée le 2 mai 2019.

* 36 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 37 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 38 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 39 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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