B. LA MISE EN oeUVRE DES DISPOSITIONS DE LA LFSS 2022

1. La clause de sauvegarde des médicaments : une mesure dévoyée

Introduite par la LFSS 1999, la clause de sauvegarde des médicaments constitue historiquement un mécanisme de régulation de dernier ressort, destiné à inciter les entreprises pharmaceutiques à maintenir le volume de leur chiffre d'affaires en-deçà d'un seuil permettant le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam). Quand le chiffre d'affaires global du secteur dépasse un certain seuil, ces entreprises doivent payer une taxe, répartie en fonction de leur chiffre d'affaires.

À l'exception de l'année 2020, le dispositif a toutefois systématiquement été déclenché de 2015 à 2022, avec un rendement en forte hausse. Il s'agit donc en pratique d'un impôt de plus en plus lourd, imprévisible et indiscriminé, qui frappe les médicaments indépendamment de leur criticité thérapeutique ou industrielle.

Produit de la clause de sauvegarde des médicaments

(en millions d'euros)

Sources : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les rapports annuels du CEPS et les réponses de la DSS au questionnaire de la rapporteure générale

La commission appelle le Gouvernement à fiabiliser et étayer davantage les prévisions de la clause de sauvegarde dès le prochain PLFSS, et souhaite que la mission interministérielle récemment constituée par la Première ministre sur la régulation des dépenses de produits de santé soit l'occasion de s'interroger sur la pertinence et l'ampleur du dispositif.

2. La garantie de financement des hôpitaux : une mesure nécessaire, des modalités de sortie à préciser

Dans le contexte de l'épidémie de covid-19 et pour prévenir une perturbation majeure des ressources des établissements de santé, le Gouvernement a mis en place en 2020 par ordonnance une « garantie de financement ». La mesure a été reconduite en 2022 par une loi puis par un arrêté ministériel sans base légale.

En 2022, alors que l'activité hospitalière restait inférieure de 4 % au niveau de 2019 (notamment du fait de difficultés de recrutement), le coût de la garantie de financement pour 2022 a atteint près de 2,7 Md€ (1,9 Md€ en 2021 et 2,5 Md€ en 2020).

Si la garantie de financement a permis de sécuriser les ressources des établissements dans un contexte d'activité hospitalière très en-deçà du niveau de l'année 2019, ses modalités portent des effets désincitatifs à court terme pour les projets des établissements. En effet, la garantie ne prend pas en compte les changements de périmètres d'activités intervenus depuis 2019 : de nouvelles activités assurées par des établissements ne sont ainsi valorisées ni à leur activité réelle ni dans un périmètre élargi de garantie.

Les modalités de sortie de la garantie de financement doivent être précisées.

3. La généralisation de l'intermédiation des pensions alimentaires : être vigilant sur la mise en oeuvre

L'article 100 de la LFSS 2022 a rendu systématique l'intermédiation financière des pensions alimentaires par l'organisme débiteur des prestations familiales (ODPF) - concrètement les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole - dès l'émission d'un titre exécutoire fixant une créance alimentaire. Ce dispositif est entré en vigueur dès le 1er mars 2022 pour les décisions judiciaires de divorce fixant une pension alimentaire et est devenu applicable à l'ensemble des situations à compter du 1er janvier 2023.

Fin avril 2023, 133 869 pensions alimentaires ont été avancées ou intermédiées par l'Agence de recouvrement et d'intermédiation des pensions alimentaires (Aripa).

Il convient de rester vigilant sur la mise en oeuvre de la réforme, dont le succès implique la bonne information des parents, le respect par les avocats de leur obligation de transmission de dossiers à l'Aripa, et, de la part de l'Aripa, la gestion d'un fort afflux de dossiers, qui ne devra pas empêcher l'augmentation du taux de recouvrement des impayés.

4. Mettre effectivement en oeuvre la réforme des services autonomie à domicile

Dans une logique de simplification et de « guichet unique » pour l'usager, l'article 44 de la LFSS 2022 a prévu une réforme de l'organisation des services d'aide et de soins à domicile. Celle-ci doit conduire, dans les deux années suivant la publication du décret fixant le cahier des charges de ces services (au plus tard le 30 juin 2023), à l'unification des différents types de services existants - services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad), services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad) - dans une même catégorie de « services autonomie à domicile » (SAD), intégrant les activités de soins, d'aide et d'accompagnement.

Lors de l'examen du Placss par la commission, le 28 juin 2023, le cahier des charges n'a toujours pas été publié, alors que la date limite était fixée par la LFSS 2022 au 30 juin 2023. Il convient de le publier rapidement.

Dès le 1er janvier 2022, une réforme de la tarification des services à domicile a été engagée afin de consolider leur financement. Un tarif plancher national a ainsi été instauré et fixé à 22 euros pour 2022.

Comme l'avait relevé la commission lors de l'examen du PLFSS 2022, l'instauration d'un tarif plancher a un effet à la hausse sur le reste à charge des usagers, même si celui-ci est partiellement pris en charge par l'État par le biais du crédit d'impôt.

Il faudra non seulement mettre rapidement en oeuvre la réforme, mais aussi s'assurer qu'elle ne restreint pas l'accès aux prestations.

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