Cette proposition de règlement, présentée le 16 mars 2023, est un élément de la stratégie de la Commission européenne, décrite dans une communication publiée le même jour, intitulée « un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques à l'appui de la double transition »1(*) (écologique et numérique), qui vise à réduire la dépendance très forte de l'Union vis-à-vis de pays tiers pour l'approvisionnement en matières premières critiques, dans un contexte de forte croissance des besoins, de concentration des fournisseurs et de risques géopolitiques et environnementaux préoccupants.

Cette stratégie prévoit trois piliers solidaires comportant des mesures en vue de :

- développer la chaîne de valeur des matières premières critiques dans l'UE ;

- stimuler la diversification de l'offre et l'établissement de partenariats mutuellement bénéfiques à l'appui de la production mondiale dans le cadre des relations commerciales internationales ;

- favoriser l'approvisionnement durable et la circularité.

La proposition de règlement, qui s'inscrit dans le premier pilier2(*), fixe des objectifs chiffrés, à échéance 2030, de développement des capacités intérieures tout au long de la chaîne d'approvisionnement et met en place, à cet effet, un cadre pour soutenir le développement de ces capacités, renforcer la durabilité et la circularité des chaînes d'approvisionnement en matières premières critiques dans l'Union et améliorer la résilience.

Ce cadre prévoit :

- un renforcement des chaînes de valeur par l'accompagnement des projets stratégiques et l'accélération des autorisations ;

- une atténuation des risques d'approvisionnement par une veille prospective et une coordination européenne des stocks stratégiques ;

- le développement du recyclage et l'homologation des certifications RSE.

1. Des projets stratégiques prioritaires pour renforcer la chaîne de valeur des matières premières critiques de l'UE

Sélectionnés par la Commission, les projets stratégiques pourraient bénéficier de délais d'autorisation raccourcis et d'un soutien pour l'accès au financement.

Pour être retenus, les projets devraient répondre à un ensemble de critères et la demande comporter notamment des justificatifs en lien avec les critères, un plan d'affaires et des mesures visant à faciliter l'acceptation par le public. Le projet serait soumis à l'avis du comité européen des matières premières critiques et pourrait faire l'objet d'une opposition de l'État membre dont le territoire est concerné.

Des guichets nationaux uniques devraient être mis en place pour faciliter et coordonner la délivrance des autorisations. Celles-ci devraient faire l'objet d'un traitement prioritaire et être délivrées dans des délais raccourcis (24 mois pour les permis d'extraction et 12 mois pour les projets concernant uniquement la transformation et le recyclage). Les États membres devraient en outre intégrer le développement de tels projets dans les plans d'affectation des sols et de zonage.

En cas de difficulté de financement des projets, le promoteur du projet pourrait être aidé par la Commission et les États membres et demander une étude sur les financements envisageables à un sous-groupe spécialisé du comité. Les États membres pourraient en outre apporter un soutien administratif pour faciliter la mise en conformité et une assistance en vue d'accroître l'acceptabilité du projet par le public.

Afin de faciliter le développement des projets d'exploration et d'extraction, chaque État membre devrait élaborer un programme national d'exploration des ressources géologiques ciblant des matières premières critiques et publier en ligne les informations collectées sur les occurrences minérales contenant des matières premières critiques. Une coordination de ces programmes est prévue dans le cadre d'un sous-groupe du comité.

2. Une coordination des chaînes d'approvisionnement pilotée par la Commission et un cadre pour atténuer les risques pour la sécurité de l'approvisionnement

La Commission met en place un suivi des projets, des principaux opérateurs, des entreprises fabriquant des technologies stratégiques utilisant des matières premières stratégiques et des stocks stratégiques nationaux, alimenté par les informations que les États membres devront lui transmettre. Un dispositif de coordination des réserves nationales est en outre prévu, avec un niveau de référence pour chaque matière première.

De nombreuses informations seront publiées par la Commission, éventuellement sous une forme agrégée (pour les stocks) et des modalités de protection de la confidentialité des informations sensibles sont prévues.

Si elle estime qu'il existe un risque clair de rupture de l'approvisionnement, la Commission alerterait les États membres et les instances européennes de gestion de crises.

3. Des objectifs en matière de durabilité

Les États membres devraient se doter de programmes nationaux en matière de circularité afin de favoriser la collecte et le réemploi des matières premières critiques ainsi que l'utilisation de matières premières critiques secondaires.

De leur côté, les exploitants tenus de présenter des plans de gestion des déchets devront fournir une évaluation économique primaire des possibilités de valorisation des matières premières critiques issues des déchets d'extraction stockés dans l'installation et des déchets produits.

Un dispositif destiné à assurer le recyclage des aimants permanents est par ailleurs proposé.

Une homologation des systèmes de certification RSE est organisée et il est prévu que les modalités d'établissement de la déclaration relative à l'empreinte environnementale soient précisées.

4. Le développement de partenariats stratégiques entre l'UE et des États tiers pour diversifier et sécuriser les chaînes d'approvisionnement de matières premières critiques

5. Une gouvernance assurée par la Commission, assistée d'un comité consultatif composé de représentants des États membres

Les mesures proposées sont fondées sur l'article 114 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne, relatif au marché intérieur.

Si la mise en place d'un cadre européen coordonné pour garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques apparaît pertinente, certains aspects de la proposition de règlement devront être adaptés, en particulier pour tenir compte des exigences en matière de sécurité nationale et de la répartition des compétences entre les différents niveaux d'administration au sein des États membres.

De nombreux actes délégués et actes d'exécution sont par ailleurs prévus. Même si leur objet, les critères applicables et leur périodicité sont encadrés, les modalités d'association des États membres devraient être précisées.

Compte tenu de ces observations, et au regard de l'exigence d'amélioration de l'autonomie stratégique de l'UE dans le domaine des matières premières critiques, le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution, mais d'envisager un examen sur le fond en vue de proposer éventuellement une résolution au titre de l'article 88-4 de la Constitution.


* 1 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, COM(2023) 165 final.

* 2 Ce pilier prévoit également :

- un « soutien financier » (instruments privés, y compris via la plateforme InvestEU, les fonds européens et les aides d'État);

- l'élaboration de normes européennes en matière de prospection, extraction, raffinage et recyclage des matières premières critiques et un rôle actif au sein de l'Organisation internationale de normalisation (ISO) ;

- le développement des compétences, en faisant appel aux instruments financiers européens (FSE+, FEDER) et la création d'une académie des matières premières ;

- de la recherche et innovation : 470 millions d'euros prévus par Horizon Europe (2021-2024).