COM(2022) 540 final  du 26/10/2022

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


La Commission européenne a présenté, le 26 octobre 2022, un paquet « zéro pollution », qui vise à garantir d'ici 2050 un environnement exempt de polluants nocifs. Ce paquet s'inscrit dans les objectifs du Pacte vert pour l'Europe qui visent à améliorer la qualité de l'eau et de l'air ambiant, et du plan d'action de l'Union européenne, publié en mai 2021, à la suite de ce Pacte, intitulé : « Vers une pollution zéro de l'air, de l'eau et des sols ». Ce paquet législatif comprend trois textes qui prévoient de fixer des règles plus strictes en matière de qualité de l'air, de polluants des eaux souterraines et de surface, et de traitement des eaux urbaines résiduaires.

· Proposition de directive concernant la politique communautaire et les normes de qualité environnementale dans le domaine de l'eau, ainsi que la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration (COM (2022) 540)

La proposition de directive COM(2022) 540 tend à modifier trois directives, la directive-cadre sur l'eau, la directive sur les normes de qualité environnementale pour les eaux de surface et la directive sur la protection des eaux souterraines, qui constituent le cadre pour la gestion durable des eaux de surface et souterraines.

En vertu de la directive-cadre sur l'eau, la Commission européenne est chargée de procéder à un réexamen tous les quatre ans au moins de la liste des substances chimiques susceptibles de présenter un risque pour la qualité des eaux souterraines et de surface dans l'Union européenne, sur la base des progrès des connaissances scientifiques en la matière. Or le bilan de qualité de 2019 a établi la nécessité d'améliorer et de renforcer la qualité des eaux souterraines et de surface, et par conséquent de mettre à jour cette liste.

Dans ce cadre, le présent texte vise principalement à modifier des normes de qualité existantes ou à en introduire de nouvelles. Il propose ainsi d'inclure vingt-cinq nouvelles substances à la liste des polluants prioritaires existante, en vue d'améliorer la qualité des milieux aquatiques européens. Parmi les substances ainsi répertoriées, on relève : plusieurs produits pharmaceutiques utilisés comme analgésiques et anti-inflammatoires dont l'ibuprofène, des pesticides et produits de dégradation des pesticides dont le glyphosate, le bisphénol A, un plastifiant et un composant d'emballage plastique, et des substances perfluoroalkylées (PFAS). Force est de noter que la France soutient une démarche d'interdiction des PFAS au niveau européen, introduite par plusieurs États membres auprès de l'Agence européenne des produits chimiques, tout en prévoyant des dérogations limitées à un certain nombre d'utilisations.

La proposition de règlement modifie également la classification de nombreuses autres substances : quatre sont supprimées car elles ne présentent plus de risques à l'échelle de l'Union tandis que d'autres, déjà couvertes par les règles, sont soumises à des prescriptions renforcées. Elle complète aussi la liste indicative des principaux polluants en y incluant les microplastiques et les gènes de résistance aux antimicrobiens.

La Commission introduit aussi une obligation d'alerte mutuelle et de coopération pour les États membres en cas de circonstances exceptionnelles, d'origine naturelle ou de force majeure, afin de limiter les dégâts causés par la pollution ou de faire face à ses conséquences. Il s'agit de tirer les leçons de l'épisode de pollution, survenu l'été dernier, du fleuve Oder, entre la Pologne et l'Allemagne, probablement dû à une substance toxique.

Pour permettre une plus grande réactivité, la Commission européenne propose de substituer à la procédure législative ordinaire le pouvoir d'adopter des actes délégués pour inscrire de nouveaux polluants et établir de nouvelles normes de qualité, de façon harmonisée, à l'échelle de l'UE. On peut s'interroger sur le fait que la mise en oeuvre des normes et la liste de vigilance relèverait ainsi d'une décision de la Commission européenne, sans contrôle du principe de subsidiarité par les parlements, et non de la procédure législative ordinaire. Toutefois, cette procédure peut se justifier dès lors que l'Union européenne s'est engagée dans un objectif de réduction de la pollution des eaux, de l'air et des sols qui doit permettre de vivre dans un environnement sans substances toxiques d'ici 2050. Cet objectif est un des éléments clés du Pacte vert pour l'Europe, qui s'inscrit dans le prolongement de l'accord de Paris.

La révision des trois directives qui traitent des substances dans les eaux souterraines et de surface est fondée sur l'article 192 du TFUE qui vise à « la préservation, la protection et l'amélioration de la qualité de l'environnement, à la protection de la santé des personnes, à l'utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles et à la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l'environnement, et en particulier la lutte contre le changement climatique ». La gestion durable de l'eau entre ainsi dans le champ d'application de la politique environnementale dont l'élaboration au niveau européen doit notamment tenir compte des données scientifiques et techniques disponibles. En outre, la nature transfrontière de la pollution des eaux souterraines et de surface justifie une action harmonisée au niveau de l'Union pour lutter contre cette pollution et ses incidences dans les États membres. Cette démarche ne saurait être réellement efficace sans une harmonisation des normes à l'échelle de l'Union et sans une collaboration mutuelle.

Ainsi, il apparaît, sur le plan de la subsidiarité, que les objectifs de la proposition ne pourraient pas être atteints de manière efficace par les seuls États membres, compte tenu notamment de ces éléments.

Compte tenu de ces observations, la proposition de règlement (UE) 2021/254 ne semble pas porter atteinte au principe de subsidiarité. Le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 19/01/2023