Proposition de règlement relatif à la mise en place de l'instrument visant à renforcer l'industrie européenne de la défense au moyen d'acquisitions conjointes - COM (2022) 349

Se fondant sur l'article 173 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne1(*), qui avait également servi de base juridique à la création du fonds européen de la défense, le texte COM (2022) 349 final s'inscrit dans le prolongement de la « déclaration de Versailles » du 11 mars 2022, par laquelle les chefs d'État ou de gouvernement ont appelé à renforcer les capacités de défense des États membres de l'Union européenne, et, en particulier, à « augmenter considérablement les dépenses en matière de défense, en consacrant une part importante aux investissements, à axer sur les insuffisances stratégiques relevées, et en développant les capacités de défense de manière collaborative au sein de l'Union européenne », ainsi qu'à « élaborer de nouvelles mesures d'incitation afin d'encourager les investissements collaboratifs des États membres dans des projets conjoints et dans l'acquisition conjointe de capacités de défense ».

À la demande du Conseil, la Commission européenne et le Haut représentant ont ensuite présenté, le 18 mai 2022, une communication conjointe sur l'analyse des déficits d'investissement dans le domaine de la défense et sur la voie à suivre.

Cette communication prônait un cadre renforcé de coordination en matière de défense, en mettant en avant 7 axes :

1. La création rapide d'une task-force pour soutenir la coordination entre les États membres ;

2. La mise en place d'un instrument à court terme de l'Union destiné à renforcer les capacités industrielles de défense au moyen d'acquisitions conjointes ;

3. Un cadre de l'Union européenne pour les acquisitions conjointes dans le domaine de la défense ;

4. Un chemin vers une programmation et une acquisition stratégiques conjointes de l'Union européenne en matière de défense ;

5. Le renforcement de la capacité industrielle de l'Europe dans le domaine de la défense ;

6. Un soutien à l'effort de recherche et développement (R&D) ;

7. Un renforcement du soutien de la BEI à la défense.

La proposition de règlement met donc en oeuvre l'un des axes précités, en visant à créer un instrument spécifique à court terme visant à renforcer l'industrie européenne de la défense au moyen d'acquisitions conjointes. L'enveloppe budgétaire dévolue à cet instrument jusqu'au 31 décembre 2024 s'élèverait à 500 millions d'euros (en euros courants).

Cet instrument, qui devrait être complémentaire du fonds européen de la défense et spécialement conçu pour faire face aux effets et aux conséquences néfastes de la guerre en Ukraine, permettrait aux États membres procédant à des acquisitions conjointes d'obtenir un soutien financier du budget de l'Union. Le texte du règlement proposé précise que « la contribution financière est établie en tenant compte de la nature collaborative de l'acquisition conjointe et est majorée d'un montant approprié pour créer l'effet incitatif nécessaire pour encourager la coopération ».

L'exposé des motifs relève que ce nouvel instrument bénéficierait à la base industrielle et technologique de la défense européenne (BITDE), « tout en garantissant la capacité d'action des forces armées des États membres de l'Union, la sécurité de l'approvisionnement et une plus grande interopérabilité ». Une fois cet instrument créé, la Commission indique qu'elle proposera un règlement établissant un programme européen commun d'investissement dans la défense (EDIP), conformément au plan annoncé dans la communication conjointe précitée.

L'exposé des motifs de la proposition de règlement souligne les fragilités liées à la fragmentation des achats d'armement par les États membres et ses inconvénients pour la solidité de la BITDE. Il relève que « la situation actuelle exige une intervention politique au niveau de l'Union afin d'améliorer le niveau de coopération en encourageant la coopération financière entre les États membres dans le cadre des procédures de passation de marchés dans le domaine de la défense », en soulignant qu'une « telle intervention est bénéfique pour la sécurité des citoyens de l'Union ainsi que pour la BITDE ». Cette valeur ajoutée européenne permettrait ainsi à ce texte de respecter le principe de subsidiarité, tout comme le principe de proportionnalité dans la mesure où cet instrument aurait un objet limité au strict nécessaire.

Le contexte de la guerre d'agression en Ukraine a indéniablement bouleversé l'approche des États membres sur ces enjeux liés aux questions de défense et justifie cette action nouvelle à l'échelle de l'Union. Celle-ci nécessite néanmoins une étude minutieuse sur le fond, dans le cadre de la procédure prévue par l'article 88-4 de la Constitution, comme la commission des affaires européennes l'avait fait lors de l'instauration du fonds européen de la défense.

Compte tenu de ces éléments et justifications, et étant donné que la commission des affaires européennes procédera à un examen au fond de ce texte dans le cadre de la procédure prévue par l'article 88-4 de la Constitution, le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir plus avant sur cette proposition au titre du respect du principe de subsidiarité.


* 1 Le premier paragraphe de l'article 173 stipule que « l'Union et les États membres veillent à ce que les conditions nécessaires à la compétitivité de l'industrie de l'Union soient assurées. À cette fin, conformément à un système de marchés ouverts et concurrentiels, leur action vise à : accélérer l'adaptation de l'industrie aux changements structurels ; encourager un environnement favorable à l'initiative et au développement des entreprises de l'ensemble de l'Union, et notamment des petites et moyennes entreprise ; encourager un environnement favorable à la coopération entre entreprises ; favoriser une meilleure exploitation du potentiel industriel des politiques d'innovation, de recherche et de développement technologique ». Son deuxième paragraphe précise que « les États membres se consultent mutuellement en liaison avec la Commission et, pour autant que de besoin, coordonnent leurs actions. La Commission peut prendre toute initiative utile pour promouvoir cette coordination, notamment des initiatives en vue d'établir des orientations et des indicateurs, d'organiser l'échange des meilleures pratiques et de préparer les éléments nécessaires à la surveillance et à l'évaluation périodiques. Le Parlement européen est pleinement informé ».