COM(2021) 582 final  du 22/09/2021

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Les deux textes COM(2021) 581 et 582 visent à réviser la directive Solvabilité II sur l'exercice des activités d'assurance ou de réassurance et créer un cadre harmonisé de prévention et de traitement des défaillances des entreprises du secteur.

Comme en matière de services bancaires ou financiers, une réglementation européenne du secteur de l'assurance et de la réassurance existe de longue date. En effet, seul un cadre commun permet aux assureurs d'exercer la liberté d'établissement et la libre prestation de services au sein du marché intérieur.

Afin de favoriser les investissements à long terme de ce secteur pour qu'il contribue au financement de la reprise post-Covid de l'Europe1(*) et de renforcer sa résilience pour mieux protéger les assurés, la Commission européenne a publié, le 22 septembre 2021, deux propositions de directive (COM (2021) 581 et COM (2021) 582) et une communication.

La première proposition de directive complète et affine le régime prudentiel de ces activités et renforce les pouvoirs des autorités de contrôle et leur coordination, en procédant à une révision complète de la directive 2009/138/CE du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance ou de la réassurance et leur exercice, dite « Solvabilité II ». Elle est assortie d'une communication sur cette révision.

La seconde proposition de directive établit un cadre européen harmonisé pour le redressement et la résolution des défaillances des entreprises d'assurance et de réassurance.

Pour l'essentiel, il s'agit :

- de permettre une meilleure protection et une meilleure information des consommateurs (« preneurs d'assurance ») sur la situation financière de leur assureur ;

- de renforcer la résilience des entreprises d'assurance, même en période d'incertitudes économiques ;

- d'améliorer la coopération entre les autorités nationales de contrôle ;

- de favoriser les investissements en capital à long terme ;

- de mieux prendre en compte certains risques, notamment les risques climatiques et les fluctuations à court terme des marchés financiers ;

- de prévenir les défaillances des entreprises d'assurance et de réassurance, d'anticiper leur redressement et d'organiser leur résolution ;

- d'exercer un contrôle renforcé sur tout le secteur afin de prévenir toute menace à sa stabilité financière.

Alors que la directive n° 2014/59/UE du 15 mai 2014 a établi un cadre européen pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, aucune procédure harmonisée au niveau européen ne permet actuellement de procéder au redressement et à la résolution des défaillances des assureurs.

Reprenant tout à la fois les caractéristiques essentielles de systèmes performants de résolution pour le secteur de l'assurance, établies en octobre 2014 par le Conseil de stabilité financière (CSF ou FSB)2(*), complétées en juin 2016, et la méthodologie d'évaluation de ces caractéristiques, publiée en août 2020, ainsi que les normes de planification préventive du redressement des groupes d'assurance opérant au niveau international, élaborées par l'Association internationale des contrôleurs d'assurance (AICA) en novembre 2019, la proposition de directive COM(2021) 582 met en place un cadre harmonisé pour le redressement et la résolution des défaillances dans le secteur de l'assurance.

La procédure de résolution ordonnée est destinée à améliorer la protection non seulement des assurés, mais aussi de l'économie réelle, du système financier et, en définitive, des contribuables.

Le texte proposé prévoit que chaque État membre instituera une autorité nationale de résolution dotée d'outils et de pouvoirs de surveillance adaptés pour engager toutes les mesures préparatoires et de résolution pertinentes en matière de gestion des crises susceptibles de frapper des entreprises d'assurance ou de réassurance. Les autorités nationales seront ainsi armées pour faire face à l'insolvabilité d'une entreprise d'assurance.

L'échelle d'intervention et des pouvoirs de contrôle dans ce cadre sont en cohérence avec la directive Solvabilité II, les dispositifs harmonisés applicables aux établissements de crédit, aux entreprises d'investissement et aux contreparties centrales.

Ø Des plans préparatoires de redressement et de résolution

Les groupes comportant des assureurs tout comme les entreprises d'assurance qui ne font pas partie d'un groupe devraient élaborer et soumettre au contrôleur du groupe des plans préventifs de redressement qui définissent les mesures à prendre pour rétablir leur situation financière lorsque celle-ci s'est considérablement détériorée.

Ces plans sont évalués par le contrôleur du groupe. Les autorités de contrôle vérifient s'ils sont complets et de nature à permettre de rétablir rapidement la viabilité de l'entreprise. Les entreprises à profil de risque faible peuvent toutefois être exemptées de cette obligation, au cas par cas, par l'autorité nationale compétente.

Les autorités de résolution sont quant à elles tenues d'établir, pour chaque groupe sélectionné, des plans de résolution exposant les mesures qu'elles prendraient si les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution étaient remplies. Elles doivent évaluer la résolvabilité globale de l'assureur et les obstacles en la matière auxquels il doit être remédié en simplifiant la structure et les activités de l'entreprise.

Ø Une procédure de résolution en cas de défaillance avérée ou prévisible

Si les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution sont réunies, les autorités de résolution peuvent employer les instruments de résolution suivants : dépréciation ou conversion d'instruments de capital ou de dette, gestion extinctive, cession d'activités, mise en place d'une entreprise relai agréée à la laquelle sont transférés tout ou partie des actifs, séparation des actifs et des passifs pour opérer des transferts en direction d'une structure de défaisance. D'autres outils peuvent en outre être employés au niveau national dès lors qu'ils sont compatibles avec le régime des aides d'État.

Le texte comporte par ailleurs des dispositions concernant la valorisation, les mesures de sauvegarde, les obligations procédurales ainsi que les droits de recours.

En cas d'activités transfrontières, des collèges d'autorités de résolution seront mis en place, sous la direction de l'autorité de résolution du groupe et avec la participation de l'AEAPP qui fera office de médiateur si nécessaire.

Une coopération avec les autorités des pays tiers est également prévue, notamment dans le cadre d'accords de coopération. Les autorités de résolution de l'Union sont compétentes en cas de transferts d'actifs et passifs se trouvant sur leur territoire.

Ø Sanctions et modifications de coordination

Les États membres devront mettre en place un dispositif de sanctions administratives en cas de manquement des assureurs, des personnes qui contrôlent effectivement leur activité et des organes d'administration, de gestion ou de contrôle.

Enfin des modifications de coordination et de précisions sont apportées à la directive Solvabilité II, aux directives en matière de droit des sociétés et au règlement AEAPP.

***

Les deux propositions de directives (COM (2021) 581 et 582) sont destinées à renforcer et compléter le cadre européen harmonisé applicable au secteur de l'assurance et de la réassurance. Ils devraient permettre une mise en oeuvre plus sécurisée pour les consommateurs et la stabilité financière de l'Union des principes de libre circulation des services et des capitaux en lien avec ce secteur.

Elles ne semblent pas soulever d'objections fondées sur le principe de subsidiarité.

Le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir sur le texte COM(2021) 582 au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 La Commission estime qu'à court terme, ce sont jusqu'à 90 milliards d'euros de capitaux privés qui pourraient ainsi être libérés dans l'Union.

* 2 Le CSF, mis en place lors du G20, a succédé en avril 2009 au Forum de stabilité financière créé par le G7 en 1999.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 24/11/2021


MARCHÉ INTÉRIEUR, ÉCONOMIE, FINANCES, FISCALITÉ

Établissement d'un cadre pour le redressement
et la résolution des entreprises d'assurance et de réassurance

COM(2021) 581 final et COM(2021) 582 final - Textes E16248 et E16249

(Procédure écrite du 3 mars 2022)

Ces deux textes visent à réviser la directive Solvabilité II sur l'exercice des activités d'assurance ou de réassurance et créer un cadre harmonisé de prévention et de traitement des défaillances des entreprises du secteur.

Comme en matière de services bancaires ou financiers, une réglementation européenne du secteur de l'assurance et de la réassurance existe de longue date. En effet, seul un cadre commun permet aux assureurs d'exercer la liberté d'établissement et la libre prestation de services au sein du marché intérieur.

Afin de favoriser les investissements à long terme de ce secteur pour qu'il contribue au financement de la reprise post-Covid de l'Europe et de renforcer sa résilience pour mieux protéger les assurés, la Commission européenne a publié, le 22 septembre 2021, deux propositions de directive (COM (2021) 581 et COM (2021) 582) et une communication.

La première proposition de directive complète et affine le régime prudentiel de ces activités et renforce les pouvoirs des autorités de contrôle et leur coordination, en procédant à une révision complète de la directive 2009/138/CE du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance ou de la réassurance et leur exercice, dite « Solvabilité II ». Elle est assortie d'une communication sur cette révision.

La seconde proposition de directive établit un cadre européen harmonisé pour le redressement et la résolution des défaillances des entreprises d'assurance et de réassurance.

Pour l'essentiel, il s'agit :

- de permettre une meilleure protection et une meilleure information des consommateurs (« preneurs d'assurance ») sur la situation financière de leur assureur ;

- de renforcer la résilience des entreprises d'assurance, même en période d'incertitudes économiques ;

- d'améliorer la coopération entre les autorités nationales de contrôle ;

- de favoriser les investissements en capital à long terme ;

- de mieux prendre en compte certains risques, notamment les risques climatiques et les fluctuations à court terme des marchés financiers ;

- de prévenir les défaillances des entreprises d'assurance et de réassurance, d'anticiper leur redressement et d'organiser leur résolution ;

- d'exercer un contrôle renforcé sur tout le secteur afin de prévenir toute menace à sa stabilité financière.

Entrée en application le 1er janvier 2016, la directive Solvabilité II définit le régime prudentiel des entreprises d'assurance et de réassurance européennes, mis en place dans les années 1970 et révisé en 2002. Les règles qu'elle pose les contraignent notamment à mettre en adéquation leur niveau de fonds propres avec les risques auxquels elles sont confrontées. Un capital minimum, dénommé marge de solvabilité, est ainsi destiné à garantir leurs engagements vis-à-vis des assurés et à leur permettre de faire face aux aléas inhérents à l'activité d'assurance.

Cette directive a modifié en profondeur le régime existant, dans le prolongement de la réforme Bâle II concernant le secteur bancaire, entrée en vigueur en 2008. Afin d'améliorer la protection des preneurs d'assurance et des ayants droit, de renforcer l'intégration du marché européen de l'assurance et la compétitivité des assureurs et réassureurs européens au niveau international, elle a défini des principes directeurs :

- équilibre entre protection des assurés et coût du capital pour les assureurs, en favorisant une approche fondée sur le profil de risque particulier de l'entreprise d'assurance ;

- promotion d'une bonne gestion des risques et responsabilisation des assureurs en leur donnant plus de liberté, en contrepartie d'un dialogue prudentiel renforcé ;

- harmonisation des normes et des pratiques prudentielles non seulement dans l'Union européenne, mais aussi au sein du secteur financier.

La Commission propose une révision globale de la directive Solvabilité II pour tirer les conséquences de cinq années d'application et prévoir un alignement sur les objectifs actuels de l'Union que sont le financement de la reprise économique post Covid, l'Union des marchés de capitaux (UMC) et le Pacte vert pour l'Europe.

Cette révision s'articule autour de cinq objectifs :

- inciter les entreprises d'assurance à contribuer au financement durable à long terme de l'économie ;

- améliorer leur sensibilité au risque ;

- atténuer la volatilité à court terme de leur solvabilité ;

- améliorer la qualité, la cohérence et la coordination de leur contrôle et la protection des preneurs et des bénéficiaires, notamment en cas de défaut ;

- mieux prendre en compte la possible constitution de risques systémiques dans le secteur des assurances.

On relèvera plus particulièrement :

· Une application du principe de proportionnalité aux risques

En vertu du principe qui préconise d'adapter le niveau de contraintes au risque, il est proposé de relever les seuils d'application de la directive, d'exempter les entreprises à profil de risque faible, et de renforcer les obligations d'information et d'audit.

En réponse aux préoccupations des entreprises de petite taille sur la complexité et la lourdeur des exigences européennes, la Commission propose ainsi de relever les seuils d'exemption.

Une approche plus précise de la sensibilité au risque l'a conduite en outre à introduire une nouvelle notion d'entreprise à profil de risque faible (art. 29 bis), dont les obligations en matière d'information et de gouvernance sont allégées.

Dans le même temps, les obligations d'information des autres entreprises sont renforcées. Le rapport au contrôleur sur la solvabilité et la situation financière est ainsi restructuré tandis qu'est introduite une nouvelle exigence d'audit sur le bilan prudentiel, le bilan du groupe et le rapport unique sur la solvabilité et la situation financière.

· Le renforcement de la coopération entre les ANC et des pouvoirs supplémentaires pour améliorer la qualité de la supervision

La surveillance exercée par les autorités nationales de contrôle pourra prendre appui sur des échanges d'informations prudentielles plus nourris entre les ANC et l'évaluation conjointe des demandes d'agrément.

Les pouvoirs de ces autorités sont par ailleurs étendus à la surveillance des exigences d'honorabilité et de compétence des membres des organes d'administration, de gestion ou de contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance.

· Un appui aux investissements en capital à long terme

Pour encourager les entreprises d'assurance et de réassurance à investir à long terme, il est proposé de réduire l'impact à court terme des fluctuations sur les positions de solvabilité en révisant les règles d'extrapolation et de correction pour volatilité applicables aux garanties à long terme. Les actes délégués et d'exécution seront modifiés en conséquence.

· Le développement d'outils macro-prudentiels

Des considérations et analyses macroéconomiques sont ajoutées à l'évaluation interne des risques et de la solvabilité par les assureurs, auxquels les autorités de contrôle seront tenues de fournir des informations en lien avec des préoccupations macroprudentielles spécifiques.

Outre l'application du principe de gestion prudente en matière d'investissements, il est proposé de prévoir des exigences supplémentaires en matière de gestion et de planification des liquidités.

Il est en outre prévu, à titre de sauvegarde, dans certaines situations défavorables, que les distributions aux actionnaires et aux prêteurs subordonnés puissent être suspendues ou restreintes par les autorités de contrôle avant qu'il y ait réellement violation du capital de solvabilité requis.

· Une mise en cohérence avec le Pacte vert européen

Certaines des modifications proposées sont liées au pacte vert pour l'Europe : ainsi l'obligation de procéder à une analyse de l'impact de différents scénarios de changement climatique.

Dans le même temps, le régulateur européen - l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles dite AEAPP ou EIOPA - devra étudier les risques en matière de durabilité afin de voir s'il conviendrait de réserver un traitement prudentiel spécifique aux expositions associées aux actifs ou activités étroitement liées à des objectifs environnementaux ou sociaux.

· Une amélioration de la supervision des groupes

Un ensemble de dispositions nouvelles devraient faciliter l'identification des entreprises constituant un groupe et la définition d'une société holding d'assurance, sur le modèle de la directive de 2013 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et leur surveillance prudentielle. Il est en effet impératif de déterminer précisément, en particulier dans les groupes mixtes, le champ d'application du cadre prudentiel, en matière de solvabilité du groupe et de gouvernance, et de l'obligation de déclaration des opérations intragroupes.

· Un renforcement de la surveillance des activités d'assurance transfrontières

Il est proposé de compléter le périmètre minimal des échanges d'informations entre les autorités nationales de contrôle en cas d'activité transfrontière. En outre, en cas de conflit de compétence entre les autorités compétentes d'accueil, les pouvoirs de l'AEAPP seraient renforcés.

Les deux propositions de directives (COM (2021) 581 et 582) sont destinées à renforcer et compléter le cadre européen harmonisé applicable au secteur de l'assurance et de la réassurance. Ils devraient permettre une mise en oeuvre plus sécurisée pour les consommateurs et la stabilité financière de l'Union des principes de libre circulation des services et des capitaux en lien avec ce secteur.

Compte tenu de ces éléments, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ces textes.