COM(2020) 405 final  du 04/06/2020

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Le nouveau programme « UE pour la santé » proposé par la Commission européenne a pour objectif de remédier au déficit de coordination entre les États membres dans ce domaine et de renforcer les capacités de l'Union à réagir en cas de crise sanitaire en développant notamment l'investissement dans les systèmes de santé nationaux.

Il se décline autour de trois objectifs généraux :

- protéger les citoyens de l'Union contre les menaces transfrontières graves sur la santé ;

- améliorer la disponibilité, dans l'Union, des médicaments, des dispositifs médicaux et d'autres produits nécessaires en cas de crise ;

- renforcer les systèmes de santé et le personnel de santé, notamment par la transformation numérique.

Ces objectifs généraux sont complétés par 10 objectifs spécifiques :

- renforcer les capacités de l'Union en matière de prévention, de préparation et de réaction face aux menaces transfrontières graves sur la santé ainsi que de gestion des crises sanitaires, notamment par la coordination, la fourniture et le déploiement de moyens sanitaires d'urgence, la collecte de données et la surveillance ;

- assurer la disponibilité, dans l'Union, de réserves ou de stocks de produits nécessaires en cas de crise, ainsi que d'une réserve de personnels médicaux, soignants et auxiliaires prêts à être mobilisés face à une situation de crise ;

- soutenir les actions visant à garantir la disponibilité et l'accessibilité appropriées ainsi que le caractère abordable des produits nécessaires en cas de crise et d'autres fournitures médicales essentielles ;

- renforcer l'efficacité, l'accessibilité, la durabilité et la résilience des systèmes de santé, notamment en soutenant la transformation numérique, l'adoption d'outils et de services numériques, les réformes systémiques, la mise en oeuvre de nouveaux modèles de soins et la couverture santé universelle, et remédier aux inégalités en matière de santé ;

- soutenir les mesures visant à renforcer la capacité du système de santé à favoriser la prévention des maladies et la promotion de la santé, les droits des patients et les soins de santé transfrontières, et promouvoir l'excellence des personnels médicaux et soignants ;

- soutenir les actions concernant la surveillance, la prévention, le diagnostic, le traitement et les soins des maladies non transmissibles, notamment du cancer ;

- encourager et soutenir l'usage prudent et efficace des médicaments, en particulier des antimicrobiens, et les modes de production et d'élimination des médicaments et des dispositifs médicaux plus respectueux de l'environnement ;

- soutenir l'élaboration, la mise en oeuvre et le contrôle de la bonne application de la législation de l'Union en matière de santé et fournir des données comparables et fiables de haute qualité pour étayer l'élaboration et le suivi des politiques, et encourager le recours à l'évaluation des incidences sanitaires des politiques concernées ;

- soutenir les travaux intégrés entre les États membres, et en particulier leurs systèmes de santé, y compris la mise en oeuvre de pratiques de prévention à fort impact, et développer la mise en réseau par l'intermédiaire des réseaux européens de référence et d'autres réseaux transnationaux ;

- soutenir la contribution de l'Union aux initiatives internationales et mondiales en matière de santé.

Ce programme serait financé à hauteur de 1,946 milliards d'euros sur le budget de l'Union européenne (CFP) 2021-2027 et de 8,451 milliards d'euros via l'instrument de l'Union européenne pour la relance, soit un total de 10,397 milliards d'euros.

À ce jour, les moyens d'atteindre ces objectifs n'ont pas encore été définis. Toutefois, ils reposeront sur une participation volontaire des États membres qui devront s'engager dans une coopération plus poussée pour bénéficier de ces fonds.

La base juridique de la proposition est l'article 168, paragraphe 5, du TFUE, qui prévoit l'adoption de mesures d'encouragement visant à protéger et à améliorer la santé humaine, et notamment à lutter contre les grands fléaux transfrontières.

Compte tenu de ces éléments, il n'apparaît pas nécessaire au groupe de travail sur la subsidiarité d'intervenir plus avant sur ce texte au regard de l'article 88-6 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 10/06/2020


Questions sociales et santé

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'établissement d'un programme d'action de l'Union dans le domaine de la santé pour la période 2021-2027 et abrogeant le règlement (UE) n° 282/2014 (Programme "UE pour la santé")

COM(2020) 405 final - Texte E14864

À la suite de la pandémie de covid-19, la Commission européenne a souhaité renforcer l'action de l'Union dans le domaine de la santé, pour répondre à une crise sanitaire future.

Le rapport que Laurence Harribey et moi vous avions présenté en juillet dernier et dont vous aviez autorisé la publication contenait un certain nombre de propositions en ce domaine. Ce rapport avait été transmis à la Commission européenne, et nous pouvons constater aujourd'hui une convergence de vue sur de nombreux sujets.

Premier point, le programme « santé » de l'Union européenne, inclus dans le cadre financier pluriannuel pour 2021-2027, a été doté d'un budget de 5,1 milliards d'euros. Si la Commission prévoyait initialement un financement à hauteur de 10,397 milliards d'euros, les chefs d'États ou de gouvernement l'avaient réduit à seulement 1,7 milliard d'euros lors du Conseil européen extraordinaire du 21 juillet dernier. Ce n'est qu'à la suite des discussions avec le Parlement européen que ce montant a finalement été porté à 5,1 milliards d'euros, soit dix fois le montant alloué au programme « santé » dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020. Il s'agit donc là d'un vrai progrès !

Ce programme permettra de renforcer les capacités de l'Union en matière de prévention, de préparation et de réaction face aux menaces transfrontières graves pour la santé. Les financements serviront au déploiement de moyens sanitaires d'urgence, à la collecte de données et à la surveillance dans un cadre davantage coordonné et intégré. Il s'agira également de garantir la disponibilité, dans l'Union, de personnel médical, ainsi que de réserves ou de stocks de produits pertinents.

Le programme prévoit également de développer la coopération entre États membres, particulièrement dans les régions frontalières.

Enfin, il financera des mesures structurelles permettant de surmonter les difficultés pointées dans le cadre du semestre européen. Ces fonds pourront ainsi permettre d'améliorer les capacités de réorganisation des établissements de soin en cas d'urgence sanitaire, ainsi que la résilience, l'accessibilité et l'efficacité des systèmes de santé des États membres.

Deuxième point, la Commission a fait des propositions pour sécuriser l'approvisionnement de l'Union en médicaments et dispositifs médicaux, tant en période d'urgence que pour répondre aux difficultés structurelles que connaît l'Union. La proposition de règlement COM(2020) 725 final vise à étendre les compétences de l'Agence européenne des médicaments pour répondre à une urgence de santé publique, de sorte que cette Agence puisse surveiller et atténuer les effets des pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux, d'une part, et assurer le développement en temps utile de médicaments sûrs et efficaces, d'autre part. Cette proposition de règlement reprend certaines de nos recommandations notamment :

- pérenniser et renforcer les moyens de l'Agence européenne des médicaments ;

- établir une liste de médicaments critiques ;

- et développer l'implication des fabricants de dispositifs médicaux.

En revanche, la stratégie pharmaceutique pour l'Union, présentée par la Commission le 25 novembre dernier, nous apparaît peu ambitieuse au regard de nos propositions, de celles du Gouvernement français ou du Parlement européen. En effet, l'un des objectifs de cette stratégie est d'assurer la souveraineté sanitaire de l'Union de manière pérenne et de répondre ainsi aux déséquilibres structurels que présente le marché du médicament. Pour cela, la Commission propose de lancer une étude en vue de recenser les causes des pénuries. Cette étude pourrait déboucher sur un renforcement des obligations d'approvisionnement continu de l'industrie. La Commission préconise aussi de diversifier les chaînes de production et d'approvisionnement et de constituer des stocks stratégiques. Elle encourage les États membres à coordonner leurs politiques nationales de prix et de remboursement pour permettre des procédures de passation de marché conjointes.

Pour notre part, nous avons proposé des actions plus interventionnistes pour favoriser la croissance des entreprises du médicament et des dispositifs médicaux, en développant l'investissement et la soutenabilité des filières. Nous recommandons également, tout comme le Parlement européen, de prévoir que la capacité à garantir les approvisionnements soit un critère d'évaluation des soumissionnaires aux marchés publics.

De son côté, le Gouvernement français a approuvé la proposition du Parlement européen qui préconise de créer un ou plusieurs établissements pharmaceutiques européens à but non lucratif, notamment pour la production de médicaments matures et jugés indispensables. En outre, dans sa résolution du 25 novembre 2020 sur la stratégie industrielle de l'Union européenne, le Parlement européen a demandé à la Commission de favoriser la relocalisation de la production de produits de santé.

Le débat reste donc ouvert entre les tenants d'un interventionnisme plus poussé afin d'assurer l'autonomie stratégique de l'Union en matière sanitaire, comme le Parlement européen ou le Gouvernement français, et ceux qui souhaitent simplement une meilleure régulation d'un marché fondamentalement concurrentiel, comme la Commission qui ne semble pas prête à aller dans notre sens pour le moment.

Enfin, troisième point, les dispositions encadrant la réaction de l'Union face aux menaces transfrontières graves pour la santé ont montré leurs limites. Consciente de cette situation, la Commission a présenté deux propositions de règlement pour permettre à l'Union de se préparer à une crise sanitaire et se donner les moyens d'y répondre. Il s'agit de la proposition de règlement COM(2020) 727 du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et de la proposition de règlement COM(2020) 726 du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement instituant le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. Dans notre rapport, nous recommandions de renforcer le rôle de ce Centre, notamment ses capacités de surveillance et de traitement des données. Nous recommandions également de favoriser la coordination et la coopération entre États membres, mais dans le respect des compétences des États membres.