COM (2010) 368 final  du 13/07/2010

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 21/07/2010
Examen : 24/10/2012 (commission des affaires européennes)

Ce texte a fait l'objet de la proposition de résolution : n° 87 (2012-2013) : voir le dossier legislatif


Economie, finances et fiscalité

Texte E 5512

Refonte de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts

COM (2010)368 final


Proposition de résolution européenne de M. Richard Yung sur l'Union bancaire

(Réunion du 24 octobre 2012)

M. Richard Yung. - l'union bancaire a été une des décisions importantes du sommet européen du mois de juin. Nous avons pensé que le Sénat devait se saisir de ce dossier suffisamment en amont. Nous avons fait de nombreuses auditions pour cerner de plus près ce sujet complexe. La crise financière qui perdure se nourrit, au sein de la zone euro, d'un cercle vicieux entre dettes souveraines et dettes bancaires. Nous sommes en ce moment dans une phase de « renationalisation » des marchés financiers. On tourne le dos à ce qu'il faudrait faire. Les banques et les pays se replient sur leur marché domestique. Lors d'une table ronde, un des orateurs a parlé d'« euro du nord » et d'« euro du sud ». On ne peut pas construire l'Europe comme cela. La crise de confiance vis-à-vis de la zone euro pèse sur le financement de l'économie et la croissance de la zone.

L'Europe a multiplié les initiatives de soutien au secteur bancaire. La Banque centrale européenne a mené, au-delà de ses prérogatives d'origine, des politiques majeures d'intervention. Malgré l'accalmie des marchés, l'Europe et la zone euro se devaient de proposer des solutions structurelles pérennes.

La mise en place du mécanisme européen de stabilité (MES) qui pourra agir en tant que prêteur ultime aux banques de la zone euro, au-delà de sa mission première d'aides aux États, est une première réponse. C'est une avancée importante. À ce titre, pour assurer le bon usage des fonds et éviter tout conflit d'intérêt dans la résolution éventuelle des défaillances bancaires, il est apparu indispensable que soit mise en place une supervision des banques de la zone, harmonisée et indépendante.

Le mécanisme unique de supervision s'inscrit dans le cadre plus large de l'union bancaire actée par le sommet de la zone euro du 29 juin 2012. C'est une proposition de la Commission du 12 septembre qui doit permettre de restaurer la confiance et d'assurer la poursuite de l'intégration du marché financier européen. Ce système de supervision concerne la zone euro. Je souhaite mentionner sans les développer en détail les deux autres textes liés à ce projet : la garantie des dépôts et surtout les mécanismes liés à la défaillance des établissements financiers. Nous en reparlerons à une prochaine occasion car ils sont la conséquence logique de l'union bancaire.

Je vous propose que nous abordions ensemble en détail les éléments de la proposition de résolution. J'ai déjà évoqué le repli des acteurs financiers sur leurs marchés nationaux.

La Banque centrale européenne (BCE) dispose indéniablement de l'autorité institutionnelle et des compétences pour mener à bien cette mission de supervision. C'est le bon choix pour la supervision européenne. Mais cela pose plusieurs problèmes qu'il faut expliciter.

Tout en conservant un objectif d'adoption de ce mécanisme avant la fin de cette année, il faut en effet rester vigilant sur trois points.

Premier point : il convient d'assurer l'indépendance institutionnelle et fonctionnelle entre supervision bancaire et politique monétaire afin de préserver la réputation de la politique monétaire de la BCE. Il est proposé par la Commission de créer un comité de surveillance au sein de la BCE. Ce comité fera le travail mais il est statutairement sous l'autorité du Conseil des Gouverneurs de la BCE. Il faut éviter tout mélange des genres en tirant avantage de la connaissance de la BCE du secteur bancaire à travers ses missions d'octroi de liquidités. C'est un point crucial qu'il faudra traiter par des aménagements à court terme et ensuite, peut-être, par une modification institutionnelle.

Deuxième point : il faut préciser le fonctionnement de la supervision européenne et l'autorité du futur superviseur européen sur les superviseurs nationaux. J'attire votre attention sur le point suivant : la BCE assume en effet seule la responsabilité de la supervision. La BCE « sous-traite » certaines des missions aux autorités nationales. Elle doit pouvoir en maîtriser l'exécution menée localement par les superviseurs nationaux et se doter des moyens de contrôler ce que font les autorités prudentielles. On sait que, en temps de crise, les autorités nationales sont soumises à de nombreuses pressions. Ce n'est pas un reproche, c'est une réalité. Il faut contrôler autrement. Les contours et les modalités d'exercice de sa compétence exclusive conditionnent largement la crédibilité de la future supervision européenne.

Troisième point : il faut revoir les modalités de gouvernance qui sont proposées. Le comité de surveillance est constitué de 4 membres de la BCE et des 17 superviseurs. La création d'un comité exécutif restreint attaché au Conseil de surveillance, organe chargé de la supervision au sein de la BCE, permettra d'assurer la réactivité et le pragmatisme de la supervision. Agir rapidement est souvent une nécessité en matière bancaire. La participation de personnalités extérieures qualifiées assurerait une diversification plus grande. C'est le cas à l'ACP.

Le mécanisme unique de supervision doit répondre aux attentes essentielles en termes de supervision bancaire.

La supervision par la BCE doit couvrir les 6 000 banques de la zone euro. C'est un sujet qui a fait l'objet de discussions avec l'Allemagne. C'est pourtant une condition nécessaire de son efficacité. La crise nous a appris que les petites banques présentent des risques parfois très importants. Elle devra, à terme, couvrir les entreprises d'assurance et, de façon harmonisée, les chambres de compensation quelque soit leur statut.

Le Sénat s'est déjà prononcé sur la refonte de la réglementation prudentielle applicable aux banques (propositions CRD IV). Les négociations en cours devront aboutir afin de fournir à l'union bancaire un corpus réglementaire unique tout en préservant la place des établissements bancaires européens dans le financement de l'économie.

L'Autorité bancaire européenne occupe des fonctions centrales comme vecteur d'une convergence réglementaire des 27 États membres. C'est une autorité naissante. Elle est appelée à être le normalisateur des pratiques de supervision dont la qualité a été remise en cause par la crise. La crédibilisation des tests de résistance, le contrôle de la gouvernance des banques et de la politique de rémunération doivent y figurer en bonne place.

Afin d'assurer la cohérence de la démarche, le mécanisme unique de supervision appelle à la mise en place d'un mécanisme de résolution des défaillances bancaires. Une approche pragmatique conduit à privilégier tout d'abord une harmonisation des mécanismes nationaux de gestion des crises bancaires puis à doter l'union bancaire d'une véritable autorité de résolution.

Enfin, au regard des conséquences financières et politiques des décisions de supervision, il est nécessaire d'apporter une réponse institutionnelle aux attentes légitimes de contrôle démocratique de l'union bancaire. C'est un point très important. Pour l'instant, il n'est prévu aucun contrôle des parlements nationaux sur le mécanisme de supervision unique. Il me semble qu'un contrôle démocratique parlementaire est indispensable. Un sous-comité dédié à la zone euro devrait assurer ces missions de contrôle du mécanisme unique de supervision, au sein de la Conférence interparlementaire prévue à l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance. Ce contrôle doit permettre d'assurer à chacun le droit de regard et d'investigation nécessaire à la bonne appréciation de l'action conduite et de l'usage des pouvoirs conférés. L'union bancaire est un transfert de souveraineté important. Il faut un contrôle associant les parlements nationaux.

M. Simon Sutour, président. - Je vous remercie, monsieur le rapporteur, et ouvre le débat. Qui demande la parole ?

M. Jean Bizet. - Je voudrais souligner l'expertise du rapporteur en la matière. Elle n'est pas nouvelle et très importante pour notre commission. Je ferai juste quelques remarques. Je rejoins Richard Yung sur le constat de la lenteur de la mise en place de l'union bancaire. Je la déplore aussi. J'espère qu'elle n'est pas liée à la frilosité de la France pour entrer dans la mise en oeuvre d'une union budgétaire. L'architecture de l'union bancaire me convient parfaitement. C'est très rationnel et satisfaisant.

Je souhaite revenir sur votre proposition concernant CRD IV et le souci qui doit être porté au financement de l'économie. C'est un point très important pour nos entreprises et nos collectivités.

Je suis tout à fait d'accord sur le recours à l'article 13 du TSCG pour le contrôle parlementaire. Il ne faut pas lâcher sur ce sujet. J'insiste, il faut être excessivement exigeant sur la dimension démocratique et parlementaire de l'union bancaire.

M. Simon Sutour, président. - D'autres interventions ?

M. André Gattolin. - Je m'inquiète de l'architecture du système de l'union bancaire : on voit de plus en plus mal l'articulation entre l'Union dans son ensemble et la zone euro. De plus, quel est le périmètre de la conférence interparlementaire prévue par le TSCG ?

M. Richard Yung. - C'est un sujet actuel de négociation que de trouver un compromis incluant les pays au-delà des 17. Les pays hors zone euro pourraient participer, en votant, aux instances de préparation. Mais cela n'est pas encore fixé. En ce qui concerne la conférence interparlementaire du TSCG, elle concerne les vingt-cinq Etats signataires, mais c'est une formule qui permet beaucoup de souplesse.

M. Simon Sutour, président. - Nous sommes effectivement dans une phase où les choses se mettent progressivement en place.

M. François Marc. - Je me félicite de ce travail et des propositions soumises aujourd'hui. Ce sont des sujets que la commission des finances évoque régulièrement. Globalement on ne peut qu'être en accord avec l'ensemble des points qui sont abordés. J'ai néanmoins toujours une réticence sur le rôle confié à la BCE et celui confié à l'ABE. En effet, quand on dit « Autorité bancaire », on peut alors imaginer qu'il y a derrière les notions de gouvernance et de contrôle. J'ai l'impression que nous sommes en train de reculer devant l'obstacle qui parait difficile à surmonter à certains pays. La BCE est crédible mais pour une politique bien précise, celle de la politique monétaire. Il faudrait une réorientation des grands principes d'action de la BCE. Est-ce qu'on peut la laisser aller et venir à sa guise sur le terrain monétaire et lui confier en même temps une mission de supervision ultime sur les banques ? On avait pourtant mis en place l'ABE qui avait, dans mon esprit cette vocation. Les choses semblent actées mais de nombreux économistes s'interrogent encore.

Les banques anglaises me posent question au regard de la régulation et du contrôle. J'ai l'impression que les britanniques veulent se tenir à l'écart. Comment peut-on voir les choses pour l'avenir ? Les réticences pourraient-elles être levées ? Il faudrait assainir les choses à l'échelle de l'Europe.

M. Richard Yung. - Ce qui est certain c'est que le Royaume-Uni ne fait pas partie du dispositif. Il ne le souhaite pas. Les filiales des banques anglaises en zone euro seront cependant soumises à la supervision. Il faut souligner que le recours à l'article 127-6 du traité implique l'unanimité et donc le vote du Royaume8Uni. Par ailleurs l'ABE, qui produit la réglementation, est à 27 donc elle couvre le Royaume-Uni. Je comprends bien le débat sur le place de l'ABE qui paraissait la solution logique, mais l'ABE ne dispose ni des moyens ni de l'autorité suffisants. L'article 127-6 limite le choix du superviseur à la BCE.

M. Jean Bizet. - les questions posées par notre collègue François Marc amènent d'autres questions qui dépassent le cadre de notre débat. Il est vrai que la révision du traité sera à terme inévitable. On a, en son temps, confié des missions précises à la BCE. Elle est chargée de maîtriser l'inflation mais rien ne l'empêche de s'impliquer davantage dans l'industrie et dans l'économie comme le font la Banque d'Angleterre et la Fed. Il faudra revoir cela. De même, il est bien évident qu'il faudra clarifier l'intervention de nos collègues non membres de la zone euro dans les questions concernant la zone euro. Peut-on imaginer demain un budget proprement dit de la zone euro ? On va tout droit, très lentement vers l'écriture d'un nouveau traité mais on a assez de sujets conflictuels aujourd'hui. On ne pourra pas éviter une Europe à plusieurs vitesses qui existe dans les faits aujourd'hui.

*

A l'issue du débat, la commission des affaires européennes a adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne dans la rédaction suivante :

Proposition de résolution européenne

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement du Conseil confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit (E 7684),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) en ce qui concerne son interaction avec le règlement du Conseil confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit (E 7685),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil intitulée feuille de route pour une union bancaire,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et la résolution des défaillances d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement (E 7417),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux systèmes de garantie des dépôts (E 5512),

Juge préoccupants le repli progressif des acteurs financiers sur leurs marchés nationaux, la fragmentation du marché financier européen et leurs conséquences sur le financement de l'économie ;

Estime qu'il est primordial de mettre un terme au cercle vicieux entre dettes souveraines et dettes bancaires ;

Soutient et juge essentielle la création d'une union bancaire européenne ;

Considère que la mise en place rapide d'une supervision des banques par la Banque centrale européenne, élément majeur à la construction d'une union bancaire, est une réponse appropriée aux contraintes financières et économiques de la zone euro ;

Souhaite toutefois, tout en conservant un calendrier serré d'adoption, que soient proposés :

- les moyens d'assurer l'indépendance institutionnelle et fonctionnelle entre supervision bancaire et politique monétaire ;

- des règles précises concernant l'autorité de la Banque centrale européenne sur les superviseurs nationaux afin de garantir la pleine responsabilité de la Banque centrale européenne dans la supervision ;

- une révision de la gouvernance proposée pour la future supervision européenne, afin de prévoir, au sein du comité de surveillance, la participation de personnalités extérieures qualifiées ainsi que la constitution d'un comité exécutif restreint ;

Considère qu'il est indispensable que toutes les banques de la zone euro, indépendamment de leur taille, soient soumises à la supervision européenne ;

Rappelle les termes de sa résolution n° 113 (2011-2012) concernant les propositions de règlementations prudentielles dites « CRD IV » et notamment la nécessité de veiller à ne pas compromettre le financement des entreprises et des collectivités territoriales par les établissements bancaires ;

Soutient fermement l'objectif d'adoption, dans le cadre de la mise en place de l'union bancaire, d'une réglementation unique assurant la solidité et le bon fonctionnement du secteur bancaire ;

Réaffirme le rôle central de l'Autorité bancaire européenne en tant qu'autorité de régulation des 27 États membres de l'Union européenne ;

Soutient le projet de la Commission de confier à l'Autorité bancaire européenne la mission d'établir un manuel uniforme des pratiques de supervision conformes à l'intérêt européen et restaurant la confiance des investisseurs. Doivent y figurer notamment :

- les moyens de la fiabilisation des tests de résistance et du contrôle des modèles internes de valorisation des risques utilisés par les banques ;

- le contrôle des éléments clés de la gouvernance des établissements financiers et des politiques de rémunération ;

Souligne la nécessité d'une réponse institutionnelle aux attentes légitimes de contrôle démocratique de l'union bancaire au regard des conséquences financières et politiques des décisions de supervision ;

Demande en conséquence que le contrôle de la supervision bancaire européenne soit une des missions explicites de la formation chargée de la zone euro au sein de la Conférence interparlementaire prévue à l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance ;

Appelle à une adoption rapide de la proposition visant à l'harmonisation européenne des régimes de redressement et de résolution des défaillances d'établissements de crédit et d'entreprises d'investissement ;

Soutient le projet de la Commission de mise en place consécutive d'une autorité commune de résolution au sein de la zone euro ;

Rappelle l'importance de la supervision des chambres de compensation au regard du risque systémique qu'elles présentent et prend acte de l'entrée en application en 2013 du règlement « EMIR » ;

Considère, dans ce cadre, qu'il est souhaitable que la supervision par la Banque centrale européenne soit à terme progressivement étendue de façon homogène à l'ensemble des chambres de compensation ;

Souhaite que la supervision unique européenne couvre, à terme, les entreprises d'assurance ;

Demande au Gouvernement de défendre et de faire valoir ces orientations auprès des institutions européennes.

Nominations de rapporteurs

Mme Fabienne Keller est nommée rapporteur sur le sujet de la circulation des poids lourds de grande dimension (en remplacement de M. Jean Bizet).

M. Pierre Bernard-Reymond est désigné rapporteur sur le thème de l'évolution fédérale de l'Europe.

Mme Bernadette Bourzai est désignée rapporteur sur la proposition de directive sur les biocarburants.

M. Alain Richard est nommé rapporteur sur le problème d'une interdiction européenne du bisphénol.

M. Simon Sutour est nommé rapporteur sur le texte relatif à la réciprocité dans l'ouverture des marchés publics.

Questions diverses

Mme Colette Mélot. - En mars dernier, nous avions adopté une résolution sur le nouveau programme de l'Union européenne consacré à l'éducation, la formation, la jeunesse et le sport - le fameux « Erasmus pour tous ». Nous avions alors marqué notre attachement au programme de mobilité européen et demandé au Gouvernement français, je cite, « de soutenir l'augmentation des crédits proposée par la Commission de manière à permettre à ce programme de donner sa pleine efficacité ».

J'ai malheureusement eu connaissance d'informations préoccupantes, sur lesquelles il me paraît important que nous puissions avoir un échange.

Au début du mois, le Président de la commission des Budgets du Parlement européen, notre compatriote Alain Lamassoure, a poussé un cri d'alarme après avoir découvert que le programme Erasmus, comme le fonds social européen, pourrait se retrouver en cessation de paiement avant la fin de l'année. En effet, le budget final pour 2012 approuvé par les États membres était de près de 4 milliards d'euros en deçà de celui proposé par la Commission, ce qui rend l'exécution de certains programmes - a fortiori les programmes sociaux - difficile. Ainsi, le programme Erasmus devrait accuser un déficit de l'ordre de 90 millions d'euros, ce qui rend certaines demandes de mobilité émanant de plusieurs États membres impossibles à satisfaire.

A priori, les étudiants français ne devraient pas être touchés cette année par ces problèmes budgétaires. Le président de l'agence 2e2f (Europe-Éducation-Formation-France), qui est chargée en France de gérer les fonds des programmes européens en matière d'éducation et de formation tout au long de la vie, a indiqué que la Commission avait déjà versé à l'agence l'intégralité des fonds nécessaires pour 2012 et que les étudiants devraient donc toucher, cette année, les bourses qui leur ont été octroyées. En outre, la Commission européenne a présenté une demande de rallonge budgétaire lundi dernier, dont une partie devrait servir à financer les bourses Erasmus en attente.

Cela étant, le problème pourrait de nouveau se poser l'année prochaine. À ce stade, aucun accord n'est encore intervenu sur le budget pour 2013. Mais, il faudrait éviter que le programme Erasmus ne se retrouve l'otage des négociations qui opposeront le Conseil au Parlement européen sur ce budget. À cet égard, il convient de souligner que l'augmentation des crédits demandée pour le programme Erasmus en 2013 reste modique - à peine plus de 2 % - et que la part consacrée à ce programme dans le budget total de l'Union européenne reste très faible : les 490 millions d'euros demandés ne représentent en effet que 0,35 % du budget total de l'Union européenne.

L'on peut donc raisonnablement espérer que les crédits Erasmus seront préservés. Mais, il nous appartient, à mon sens, de manifester une nouvelle fois notre attachement à ce programme pour en garantir l'avenir. Nous avons déjà eu l'occasion, en mars dernier, de souligner le rôle central joué par Erasmus pour répondre aux défis économiques actuels et contribuer à rapprocher l'Europe des citoyens. Ce programme constitue non seulement un instrument incontournable dans la réalisation des objectifs Europe 2020, mais il suscite également l'adhésion des citoyens autour du projet européen. Il serait regrettable que son avenir puisse, à terme, être remis en cause.

Je rappelle, à cet égard, l'enjeu fondamental que revêt, dans le cadre de la négociation sur le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, l'augmentation substantielle des crédits alloués au futur programme « Erasmus pour tous ». La Commission prévoit de lui consacrer 1,64 % du budget total de l'Union européenne et le Sénat s'est déjà prononcé en faveur de cette proposition. Reste maintenant à savoir quels seront les arbitrages au sein du Conseil. C'est pourquoi je souhaite insister sur la nécessité que la proposition de résolution que nous présentera notre collègue François Marc le 8 novembre prochain s'assure, une fois de plus, que le budget alloué au nouveau programme « Erasmus pour tous » soit suffisamment doté et qu'il ne fasse pas les frais de la négociation complexe qu'est celle du cadre financier pluriannuel.

Des informations que j'ai obtenues, il semblerait que notre Gouvernement soit sensibilisé à notre position : le Premier ministre s'est engagé, dans un discours à l'Assemblée nationale au début du mois, à ce que la France soutienne un budget plus important pour l'Europe de l'éducation. Veillons à ce que ces paroles trouvent leur aboutissement dans l'accord sur le cadre financier pluriannuel. De ce point de vue, je regrette que la France fasse partie des sept États membres qui refusent l'augmentation du budget demandée par la Commission pour 2013. Même si ce refus ne vise pas spécifiquement le programme « Erasmus », il adresse, à mon sens, un signal assez négatif.

Mme Bernadette Bourzai. - Il est vrai qu'il s'agit d'un problème récurrent et préjudiciable au regard de l'importance que revêt ce programme tant pour l'image de l'Union européenne que pour son avenir.

M. Simon Sutour, président. - La commission des affaires européennes a toujours manifesté un soutien très fort à ce programme européen. Nous ne manquerons pas d'en saisir le ministre chargé des affaires euroépennes.

Sur la question du cadre financier pluriannuel 2014-2020, les négociations sont en cours à Bruxelles. Je rappelle que la France est aujourd'hui un contributeur net au budget européen, d'où sans doute certaines réticences à voir celui-ci augmenter dans un contexte marqué par de fortes restrictions budgétaires au niveau national. À cet égard, je souligne que ce n'est pas seulement le programme « Erasmus » qui pourrait être visé, mais également d'autres politiques de l'Union européenne. Je pense en particulier à la politique agricole commune ou à la politique de cohésion.

M. Jean-François Humbert. - Le programme « Erasmus » est un très beau projet. Je pense d'ailleurs qu'il devrait être appelé à couvrir de nouveaux types de mobilité dans les années à venir. Je pense en particulier à celles qui pourraient se développer dans le domaine sportif. J'aurai l'occasion de vous en reparler dans quelques semaines lorsque je présenterai mon rapport sur l'Europe du sport. Mais, ces réflexions me conduisent à soutenir pleinement le renforcement des moyens alloués à ce programme.

M. André Gattolin. - J'ai moi-même adressé, la semaine dernière, une question écrite au ministre des affaires européennes sur la question de l'avenir du programme « Erasmus ». Des échanges que j'ai eus avec lui, il semble que le Gouvernement soit pleinement sensibilisé à la nécessité de garantir l'avenir du programme « Erasmus ». À cet égard, je me félicite de la très forte mobilisation sur Internet des étudiants pour assurer la viabilité du programme dans les prochaines années. Leur démarche me paraît très positive.

M. Simon Sutour, président. - Notre commission continuera à l'avenir à suivre cette question de près. Concernant les problèmes de financement évoqués par Mme Mélot, je souhaiterais ajouter que, dans certains États membres, c'est bien souvent l'insuffisance du cofinancement national qui peut créer un obstacle à la mobilité. L'Union européenne ou l'attitude des sept États membres sur le projet de budget pour 2013 ne sont pas seules en cause.