COM (2007) 637 final  du 23/10/2007
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 25/05/2009

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 08/11/2007
Examen : 28/11/2007 (délégation pour l'Union européenne)


Justice et affaires intérieures

Communication de M. Robert del Picchia

Immigration légale - Conditions d'entrée et de séjour
Procédure de demande unique et socle commun de droits

Textes E 3678 et E 3679
COM (2007) 637 final et COM (2007) 638 final

(Réunion du 28 novembre 2007)

Ces deux propositions répondent à la volonté d'élaborer une politique européenne globale de l'immigration. A la suite du programme de La Haye de novembre 2004 qui avait reconnu le rôle de l'immigration légale pour le développement économique, le Conseil européen de décembre 2006 a défini un ensemble de mesures à arrêter au cours de l'année 2007 afin d'assurer une bonne gestion des migrations légales. A cette fin, il s'est référé au programme d'action relatif à l'immigration légale, proposé par la Commission européenne dans une communication de décembre 2005, à la suite du Livre vert de janvier 2005.

Dans cette communication, la Commission avait prévu cinq propositions législatives sur l'immigration de main d'oeuvre. Cette démarche avait pour finalité de définir les conditions d'admission applicables à quatre catégories de migrants : les travailleurs hautement qualifiés, les travailleurs saisonniers, les stagiaires rémunérés et les personnes transférées temporairement par leur société. Elle devait aussi permettre de garantir un statut juridique aux travailleurs issus de pays tiers déjà admis, et introduire des simplifications procédurales pour les demandeurs. Une précédente proposition, présentée en 2001, qui tendait à établir des règles communes concernant l'immigration économique n'avait pu aboutir.

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J'en viens d'abord à la proposition E 3678 qui établit une procédure commune accélérée pour l'admission des travailleurs hautement qualifiés issus de pays tiers. Cette admission sera fondée sur une définition et des critères communs : contrat de travail, qualifications professionnelles et salaire supérieur à un seuil minimum fixé au niveau national (au moins trois fois le SMIC). Elle prévoit en outre un régime assoupli pour les jeunes professionnels ayant un niveau d'études supérieures d'au moins trois ans.

Les travailleurs admis se verront délivrer un titre de séjour leur permettant de travailler (« carte bleue européenne »). Ce titre leur conférera, ainsi qu'à leur famille, un ensemble de droits, notamment des conditions favorables pour le regroupement familial. Le titulaire de cette carte pourra se rendre dans un second État membre pour y travailler, après deux ans de séjour régulier dans le premier État membre. Il sera possible de cumuler les périodes de séjour dans différents États membres pour obtenir le statut de résident de longue durée.

Les États membres disposeront d'une assez large marge de manoeuvre pour adapter ce nouveau régime aux besoins de leur marché de l'emploi. En particulier, leur compétence pour fixer le nombre d'immigrants économiques sera préservée.

Nous devons, en premier lieu, apprécier cette proposition au regard de la subsidiarité et de la proportionnalité.

L'objectif est d'améliorer, par des règles d'admission harmonisées et assouplies, la capacité de l'Union européenne à attirer les travailleurs hautement qualifiés des pays tiers tout en veillant à éviter une « fuite des cerveaux ». Il s'agit aussi de répondre aux pénuries de compétences, actuelles et à venir, dans l'Union européenne. La Commission fait état des projections d'Eurostat mettant en évidence une diminution de la population totale de l'Union d'ici 2025 et de la population en âge de travailler d'ici 2011. Elle souligne également qu'il faudra tenir compte de la croissance continue de l'emploi dans les secteurs caractérisés par un niveau élevé de formation, ce qui suscitera un besoin accru en main d'oeuvre hautement qualifiée. Or, l'Union européenne n'apparaît pas suffisamment attractive : elle est la principale destination des travailleurs non qualifiés et moyennement qualifiés venus du Maghreb puisqu'elle accueille 87 % de ceux-ci, tandis que 54% des immigrants hautement qualifiés issus de ces même pays sont installés aux États-Unis et au Canada. Dans le cadre de l'Union, ces immigrants sont actuellement confrontés à 27 systèmes d'admission, parfois lourds et fastidieux, et ils ne peuvent pas se déplacer facilement d'un pays à l'autre pour travailler. Actuellement, seuls dix États membres, dont la France, disposent de régimes spécifiques qui leur sont destinés.

Dans un rapport d'information que je vous avais présenté en juin 2005, j'avais fait valoir que l'immigration ne pouvait pas, à elle seule, résoudre le problème du vieillissement démographique, que l'approche de la Commission ne tenait pas suffisamment compte de la diversité de situation des États membres (en particulier la situation singulière de la France dont la fécondité reste élevée, qui a un fort taux de chômage et connaît d'ores et déjà un flux important d'immigration régulière) et qu'il était particulièrement difficile d'évaluer à moyen et long terme les besoins du marché du travail. Pour ce qui est de notre pays, les besoins de main d'oeuvre peuvent toutefois être identifiés dans deux catégories de métiers : les métiers très qualifiés (dans l'informatique et l'ingénierie notamment) et les métiers qui concernent les services à la personne.

J'avais en outre souhaité une ouverture plus large du marché du travail aux salariés des nouveaux États membres d'Europe centrale et orientale. En 2006, le choix d'une ouverture maîtrisée a été fait : 61 métiers avaient été ouverts aux ressortissants des nouveaux États membres sur une liste de 400 métiers ; le Gouvernement vient de décider de porter à 150 le nombre de métiers ouverts à partir de 2008. Je souhaite que cette ouverture puisse se poursuivre rapidement : pourquoi ne pas envisager d'anticiper, sous la prochaine présidence française, la fin de la période transitoire qui s'achève le 1er mai 2009 ? En outre, une seconde liste de 30 métiers, visant des emplois qualifiés, s'adresse à des ressortissants de pays tiers. Six métiers seront ouverts à ces ressortissants sur l'ensemble du territoire national ; 24 autres métiers dans certaines régions seulement.

Sous le bénéfice de ces observations, je crois que nous pouvons souscrire à l'analyse de la Commission européenne sur la nécessité de renforcer l'attractivité de l'Union européenne pour les travailleurs hautement qualifiés, ce qui justifie une harmonisation des systèmes d'admission et des facilités de déplacement d'un pays à l'autre pour travailler.

Encore faut-il que les mesures arrêtées au plan communautaire demeure respectueuse des prérogatives des États membres dans ce domaine. Plusieurs dispositions de la directive donnent des garanties dans ce sens : le salaire exigé sera au moins égal au triple du salaire minimum, mais les États membres resteront libres d'aller au-delà ; la situation de l'emploi dans l'État membre concerné demeurera opposable ; en cas de mobilité intra-européenne, ce sont les conditions du deuxième État membre qui s'appliqueront, ce qui me paraît important notamment sur le salaire minimum requis ; en outre, quand ils existent, les systèmes de quotas pourront s'appliquer. La Commission européenne prend d'ailleurs soin d'indiquer que la proposition « n'empiètera pas sur la compétence des États membres de fixer le nombre d'immigrants économiques arrivant dans l'Union européenne pour y chercher du travail. »

Je relève néanmoins une ambiguïté dans la proposition de directive qui précise que « toute personne qui remplit les conditions (...) se voit délivrer une carte bleue européenne », ce qui laisse entendre que cette délivrance pourrait être de plein droit. Or, les États membres doivent conserver la possibilité de réguler, si nécessaire, l'accès des ressortissants non communautaires à leur marché du travail. Nous pourrions adresser des observations à la Commission afin d'insister sur cette prérogative des États membres.

En outre, les mesures proposées doivent prendre en compte les actions déjà entreprises dans les États membres dans ce domaine. C'est ainsi que la politique migratoire menée par le Gouvernement depuis 2006 s'inscrit pleinement dans le cadre de l'approche globale des migrations définie au niveau européen et a même anticipé sur les propositions de la Commission européenne. Elle se caractérise en particulier par la promotion d'une immigration choisie et concertée, qui vise à parvenir, à terme, à ce que l'immigration économique représente 50 % des flux d'entrée à des fins d'installation durable en France (contre 7 % aujourd'hui).

La loi du 24 juillet 2006 a notamment mis en place la carte « compétences et talents » pour les travailleurs qualifiés. Les premières cartes seront délivrées d'ici la fin de l'année. 2 000 personnes qualifiées devraient en bénéficier chaque année. Plus souple que la « carte bleue européenne » puisqu'elle ne concerne pas seulement les activités économiques et pas exclusivement les salariés, la carte « compétences et talents » peut contribuer très efficacement à l'attractivité européenne à l'égard des travailleurs hautement qualifiés. Il me semblerait donc logique qu'elle soit reconnue au titre de la mobilité intra-européenne que la Commission européenne cherche à promouvoir à travers sa proposition. Ce point pourrait également fait l'objet d'observations à la Commission.

Au titre de l'examen de l'article 88-4 de la Constitution, je relèverai deux difficultés.

1.  La première difficulté concerne les conditions dans lesquelles ces travailleurs pourront se déplacer d'un État membre à l'autre

Nous devons approuver dans son principe la mobilité intra-européenne des travailleurs hautement qualifiés. Il s'agit là d'un élément clé pour renforcer l'attractivité de l'Union européenne. Cependant, en l'absence d'une évaluation fiable des flux migratoires que cette mobilité pourrait engendrer entre les États membres, il me semble que cette mobilité devrait être subordonnée à une définition plus précise du « travailleur hautement qualifié ». Le texte proposé retient une acception assez large puisqu'il vise les emplois salariés qui requièrent un diplôme de l'enseignement supérieur (représentant au moins trois années d'études) ou au moins trois ans d'expérience professionnelle équivalente. Cette définition très large devrait être précisée et le champ d'application pourrait être limité, dans un premier temps, aux travailleurs les plus qualifiés.

2. La deuxième difficulté que je veux évoquer porte sur le risque de « fuite des cerveaux »

Il convient d'être très vigilant pour qu'un dispositif de ce type ne suscite pas une « fuite des cerveaux » des États tiers, en permettant à une personne de prolonger son établissement de pays en pays et de contrat en contrat pour finalement ne jamais regagner son pays d'origine. Je rappelle que nous avons veillé à prévenir ce risque dans le cadre du dispositif applicable à la carte « compétences et talents », par exemple en prenant en compte l'objectif de développement du pays dont le demandeur a la nationalité.

L'exposé des motifs de la proposition de directive spécifie que ses objectifs doivent être mis en oeuvre d'une manière « qui ne compromette pas la capacité des pays en développement à fournir les services sociaux de base et à progresser sur la voie de la réalisation des objectifs de développement du millénaire. » A cette fin, elle prévoit des mesures destinées à promouvoir la « migration circulaire », notamment en prenant en compte l'exercice d'activités ou la poursuite d'études dans le pays d'origine. Mais il me semble que cette ambition devrait être davantage affirmée et que des garanties raisonnables mais fortes devraient être prévues. Nous pourrions adopter des conclusions dans ce sens.

Compte rendu sommaire du débat

M. Bernard Frimat :

Nous avons exprimé notre hostilité à la politique actuelle d'immigration à l'occasion de l'examen des différents projets de loi présentés par le Gouvernement dans ce domaine. Le concept d'immigration choisie est détestable et discriminatoire. Les obstacles au regroupement familial ne peuvent avoir qu'un effet négatif et ne contribuent en rien à l'attractivité du territoire national.

Le problème posé à l'Union européenne, c'est son incapacité à accueillir des ressortissants d'autres pays tiers et c'est la manière dont elle leur rend la vie difficile. J'en veux pour preuve la situation précaire des médecins issus de ces pays qui exercent dans nos hôpitaux et qui sont indispensables à leur bon fonctionnement. C'est à mon sens une hypocrisie de la part de la Commission européenne d'organiser la « fuite des cerveaux » à travers cette proposition de directive tout en soulignant qu'il faut veiller à la prévenir.

La politique menée en matière d'immigration est donc aussi détestable au plan national qu'au plan communautaire. Si la France est précurseur dans ce domaine, c'est dans le sens d'un recul démocratique et d'une régression dans l'intégration. Je suis en désaccord fondamental avec cette approche de l'immigration.

Mme Marie-Thérèse Hermange :

Je veux faire une remarque sur la condition qui est posée d'avoir un diplôme sanctionnant au moins trois années d'études.

Beaucoup d'étudiants issus de pays tiers, qui viennent effectuer de simples stages en France, bénéficient d'ores et déjà à ce titre automatiquement d'un visa délivré par les consulats français. Or, le plus souvent, ils ne fréquentent pas les universités dans lesquelles ils sont supposés être inscrits.

M. Robert del Picchia :

En principe, un étudiant étranger doit justifier son inscription dans une université française avant de pouvoir bénéficier d'un visa.

M. Simon Sutour :

Les universités françaises souffrent d'un manque de rayonnement international. Il est donc choquant d'avoir une approche restrictive dans ce domaine.

M. Serge Lagauche :

Les médecins issus de pays tiers ne sont pas rémunérés correctement en France parce que le Conseil de l'ordre des médecins refuse de les reconnaître. C'est une situation choquante car on a besoin de ces médecins.

Mme Catherine Tasca :

Le seul aspect positif dans les deux propositions de directive qui nous sont soumises, c'est la mise en place d'un socle commun de droits qui, à mon sens, devrait être approfondi par l'Union européenne. Pour le reste, je suis inquiète devant un dispositif qui pose le problème de l'immigration à l'envers. Ce ne sont pas les besoins en main-d'oeuvre de l'Union européenne qui vont réguler l'immigration. Cette démarche est vouée à l'échec. Le problème des pays tiers, ce sont les écarts de développement dont ils sont victimes ainsi que leur instabilité politique. Ces propositions de directive confortent le concept d'immigration choisie qui constitue un leurre et qui prépare le terrain pour la mise en place d'un système de quotas. C'est un signal très négatif qui est donné au reste du monde.

Mme Monique Papon :

Je suis pour ma part réservée sur les observations et conclusions qui nous sont proposées.

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À l'issue de ce débat, la délégation a décidé de ne pas adopter d'observations ni de conclusions sur la proposition E 3678.

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M. Robert del Picchia :

J'en viens maintenant à la proposition E 3679 qui vise à établir une procédure de demande unique et à reconnaître un socle commun de droits aux travailleurs issus de pays tiers déjà admis sur le territoire d'un État membre.

La proposition établit une procédure de demande unique. Le permis de séjour et de travail devra être délivré sous la forme d'un document unique. Les États membres devront instaurer un système de « guichet unique » et respecter certaines garanties (notamment la motivation des décisions de rejet et l'existence de voies de recours) et certaines normes dans le traitement des demandes. En outre, la délivrance de permis supplémentaires (comme un permis de travail) sera interdite. Enfin, le permis devra reprendre le modèle uniforme de titre de séjour établi par le règlement n° 1030/2002. L'objectif se limite cependant à établir qu'un niveau minimal d'harmonisation sans qu'il en résulte des interférences avec les procédures internes de traitement des demandes.

La proposition définit par ailleurs des domaines dans lesquels une égalité de traitement devra être assurée avec les travailleurs nationaux, sans interférer avec la prérogative des États membres de définir le contenu effectif de ces droits. Les domaines concernés sont : les conditions de travail, la liberté d'association, l'éducation et la formation professionnelle, la reconnaissance des diplômes, la sécurité sociale, le paiement des droits acquis en matière de pension en cas de déménagement dans un pays tiers, les avantages fiscaux, l'accès aux biens et services offerts au public (y compris l'accès au logement tant social que privé). Toutefois, des restrictions seront admises notamment : l'exigence d'une connaissance appropriée de la langue pour l'accès à l'éducation et à la formation, l'exigence d'un séjour pendant trois ans au moins pour l'accès au logement social, et l'exigence d'occuper effectivement un emploi pour certains droits sociaux.

Au regard de la subsidiarité et de la proportionnalité, la reconnaissance d'un socle commun de droits ne me paraît pas soulever de difficultés. La Commission européenne fait valoir que ce socle commun réduirait la concurrence déloyale pouvant s'exercer entre citoyens de l'Union et immigrants et qu'il jouerait comme un « garde fou » protégeant à la fois les premiers de la menace d'une main d'oeuvre bon marché et les seconds de l'exploitation. Il permettrait des conditions partout équitables dans l'ensemble de l'Union européenne. Bref, la création d'un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers paraît nécessaire à la fois pour assurer une protection effective aux personnes concernées, mais aussi pour éviter d'éventuels dumpings sociaux.

En revanche, je ne suis pas vraiment convaincu de l'utilité de prévoir des règles communes pour les procédures.

Après avoir subi l'échec d'une précédente proposition de directive, présentée en 2001, qui établissait les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants des pays tiers aux fins d'un emploi salarié ou de l'exercice d'une activité économique indépendante, la Commission retient une approche prudente en prenant soin de préciser que sa nouvelle proposition ne touche pas aux conditions d'admission et qu'elle se concentre sur la mise en place d'un socle commun de droits et sur un aspect procédural. Elle fait valoir que la simplification des procédures devrait alléger les formalités administratives exigées de ces travailleurs et de leurs employeurs.

On peut néanmoins se demander s'il ne s'agit pas là d'une question qu'il revient aux États membres de régler eux-mêmes. C'est ainsi que le titre unique de séjour et de travail constitue déjà la règle en France, notamment depuis la loi du 24 juillet 2006.

C'est pourquoi je vous propose d'interroger la Commission européenne pour qu'elle nous fournisse des justifications plus précises, au regard de la subsidiarité sur cette harmonisation des procédures.

Au titre de l'article 88-4, mes observations se concentreront sur le socle commun de droits qu'il est proposé d'établir.

Je crois qu'il faut être très vigilant sur les droits énoncés.

Certes, la proposition de directive précise que l'égalité de traitement devra concerner « au moins » les droits qu'elle énonce. Il ne s'agit donc pas d'une liste exhaustive. En outre, La proposition sera sans préjudice des dispositions plus favorables contenues dans les accords communautaires ou mixtes avec des pays tiers, les instruments internationaux plus favorables du Conseil de l'Europe et les conventions internationales. Mais nous devons demander au Gouvernement de procéder à un examen détaillé des droits ainsi énoncés notamment au regard des dispositions pertinentes du droit national. Par exemple, les droits en matière de formation professionnelle s'acquièrent en fonction de la durée d'activité. Ils ne peuvent donc s'appliquer automatiquement à un travailleur issu d'un pays tiers.

Les restrictions qu'il sera possible d'apporter à cette égalité de traitement me paraissent aussi requérir une attention particulière. En l'état, leur justification ne me paraît pas bien explicitée par la proposition de directive. Est ainsi prévue, par exemple, la restriction des droits sociaux aux personnes qui occupent effectivement un emploi. L'explication donnée par la Commission européenne qui fait notamment valoir que « par définition, la plupart de ces droits doivent (...) être exercés dans le cadre d'un emploi » me paraît insuffisante.

Compte rendu sommaire du débat

M. Simon Sutour :

Il me paraît superflu de faire des observations au regard de la subsidiarité sur l'établissement de règles communes pour les procédures.

Il est par ailleurs souhaitable d'approuver l'idée d'un socle commun de droits. En revanche, je ne suis pas favorable à des conclusions sur les domaines dans lesquels une égalité de traitement devra en tout état de cause être assurée et sur les restrictions susceptibles de lui être apportées. Il me semble en effet que ce qui nous est proposé est très subjectif.

M. Hubert Haenel :

Je crois au contraire qu'il est important que nous demandions des justifications sur les restrictions qui sont envisagées par la directive à l'égalité de traitement entre les travailleurs issus de pays tiers et les travailleurs nationaux.

M. Bernard Frimat :

Nous sommes sur une question de principe. Autant nous sommes d'accord sur la mise en place d'un socle commun de droits, autant nous ne voulons pas nous laisser entraîner dans des débats dont ne maîtriserions pas la finalité sur la liste de ces droits et sur les restrictions envisagées.

M. Charles Josselin :

Il faut surtout veiller à ne pas paraître réticents sur le principe de l'égalité de traitement. D'éventuelles réserves devraient donc se limiter à l'existence de restrictions à cette égalité de traitement.

M. Simon Sutour :

Pourquoi ne pas exprimer un désaccord global sur l'article 12 de la proposition de directive qui établit la liste des droits à l'égalité de traitement et qui prévoit les restrictions que les États membres peuvent apporter à cette égalité de traitement ?

M. Jean Bizet :

Nous devons être très explicites pour soutenir le principe de l'égalité de traitement et demander en revanche des explications et des justifications pour les restrictions qui sont proposées par ce texte.

Mme Catherine Tasca :

Il faut bien sûr approuver le principe d'un socle commun de droits. Mais il y aurait un vrai risque à laisser entendre qu'il pourrait y avoir des domaines dans lesquels cette égalité de traitement ne devrait pas être assurée.

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À l'issue de ce débat, la délégation a décidé de ne pas adopter d'observations sur la subsidiarité et elle a adopté les conclusions suivantes :


Conclusions

Vu l'article 88-4 de la Constitution ;

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d'un permis unique autorisant les ressortissants de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d'un État membre et établissant un socle commun de droits pour les travailleurs de pays tiers qui résident légalement dans un État membre (texte E 3679) ;

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La délégation pour l'Union européenne du Sénat :

1. Approuve l'objectif d'établir un socle commun de droits pour les travailleurs de pays tiers qui résident légalement dans un État membre ;

2. Estime que les restrictions à l'égalité de traitement prévues à l'article 12 §2 de la proposition de directive ne sont pas justifiées.