SEC (2004) 675 final  du 28/05/2004
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 14/09/2004

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 15/06/2004
Examen : 02/07/2004 (délégation pour l'Union européenne)


Budget communautaire

Avant-projets de budget rectificatif n° 7 et 8 au budget 2004

Textes E 2511-7 et E 2511-8
SEC (2004) 593 final et SEC (2004) 675 final

(Procédure écrite du 2 juillet 2004)

L'avant-projet de budget rectificatif (APBR) n° 7 au budget 2004 vise à constater l'excédent budgétaire de l'exercice 2003, qui se décompose comme suit :

en millions d'euros

2003

Excédent constaté sur les recettes

850

Sous-utilisation des crédits de paiement

4 729

Solde sur les échanges monétaires

- 109

Excédent budgétaire total

5 470

L'excédent de recettes s'explique principalement par une contribution, non prévue budgétairement, en provenance des États membres de l'Espace économique européen.

La sous-consommation de crédits représente à peine 5 % des crédits de paiement prévus. Environ la moitié des crédits non consommés sont reportés à 2004 (soit 2,2 milliards d'euros) et 2,8 milliards d'euros de crédits reportés de 2002 sont annulés, ce qui représente une certaine volonté d'orthodoxie budgétaire. Dans le détail, les dépenses agricoles, qui constituent la moitié du budget, sont consommées à plus de 98 %. Les dépenses liées aux actions structurelles, qui représentent 31 % des crédits, sont consommées à hauteur de 95 % ; cette rubrique constitue également la principale source d'annulation des crédits reportés de l'exercice 2002 (1,9 milliards d'euros annulés).

Par ailleurs, on constate une faible consommation des crédits pour les actions extérieures (94,6 %), pour les dépenses administratives (94,3 %) et surtout pour les dépenses de préadhésion (83,6 %), même si, ensemble, ces lignes budgétaires ne représentent que 13 % du budget global. La faible consommation des dépenses de préadhésion posera cependant la question de la consommation des crédits de la politique régionale et de la politique agricole commune pour les années à venir, et donc, le niveau de prévision budgétaire strictement suffisant pour les budgets à vingt-cinq.

Enfin, la Commission propose de reporter 650 millions d'euros de dépenses administratives sur l'exercice 2004, soit 12 % de l'enveloppe budgétaire prévue pour 2003 : la prévision budgétaire est actuellement difficile en raison de l'élargissement, mais il semble que les institutions devraient élaborer plus finement leurs demandes budgétaires, qui ont été manifestement surestimées pour 2003. Les dépenses administratives sont déjà en augmentation de 12 % entre le budget 2003 et le budget 2004 ; elles s'élèvent à plus de 6 milliards d'euros, sans tenir compte du report de ces 650 millions d'euros : ainsi, 4,9 milliards ont été réellement consommés en 2003 et 6,7 milliards seront disponibles en 2004 pour les dépenses administratives, soit un saut de + 37%.

L'APBR n° 7 se borne cependant à constater l'excédent de 2003 : l'affectation de cet excédent à la diminution de la contribution des États membres est inscrite dans l'APBR n° 8.

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L'avant-projet de budget rectificatif n° 8 pour 2004 révise le financement du budget communautaire sur la base de prévisions économiques plus récentes, intègre l'excédent de 2003 constaté dans l'APBR n° 7 et actualise la « correction britannique » au budget.

La révision des prévisions économiques, habituelle à cette époque, concerne les droits de douane, l'assiette TVA et le niveau du RNB (revenu national brut, notion qui remplace celle de PNB depuis le budget 2002). La diminution de la contribution des États membres en raison de l'intégration de l'excédent 2003 n'est pas mentionnée ou expliquée dans le texte de la Commission, mais est incluse dans un tableau de chiffres. Pour la France, la contribution est ainsi en baisse de 847 millions d'euros et atteint donc 15,9 milliards d'euros pour 2004.

Surtout, le texte actualise le montant de la « correction des déséquilibres budgétaires en faveur du Royaume-Uni » pour les exercices 2000 et 2003 selon les règles définies par la décision du Conseil du 29 septembre 2000 relative aux ressources propres. Le rapport que notre collègue, Serge Vinçon, et le député Marc Laffineur ont remis en février dernier au Premier ministre sur les perspectives financières européennes 2007-2013, fait utilement le point sur cette « correction britannique » qui vise depuis 1984 à réduire la part du Royaume-Uni dans le financement du budget communautaire. À l'époque, le système était justifié à la fois par un certain retard de croissance du Royaume-Uni et, d'un point de vue budgétaire pour le Royaume-Uni, par un « déséquilibre excessif » résultant des recettes faibles pour ce pays au titre de la politique agricole commune. Ces justifications ne sont aujourd'hui plus fondées : le Royaume-Uni a dépassé la moyenne communautaire en terme de richesse nationale et la part relative des dépenses agricoles s'est nettement réduite dans le budget communautaire.

En plus d'être d'une très grande complexité, le système de la « correction britannique » est maintenant devenu ubuesque et anachronique : par exemple, les dépenses de préadhésion en étaient exemptes et le Royaume-Uni ne bénéficiait pas de la « correction » sur ces dépenses. Depuis le 1er mai, l'ampleur de la « correction » s'est donc artificiellement gonflée du fait de la transformation de ces dépenses en dépenses « normales » du budget communautaire.

De plus, les modalités de répartition du financement de cette correction par les autres États membres ont été revues en 2000 à la demande et au bénéfice de quatre États contributeurs nets : l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche et la Suède. Le résultat est que, selon l'APBR n° 8, la France finance 29 % de la « correction » pour 2003, l'Italie 24 %, l'Espagne 14 %, l'Allemagne 6 %, la Belgique 5 %... Ainsi, la France et l'Italie financent à eux deux 53 % de la « correction britannique » et cinq pays en financent globalement 78 %. L'APBR n° 8 propose parallèlement que les dix nouveaux États membres, dont le retard de développement est nettement supérieur à celui que connaissait le Royaume-Uni en 1984, contribuent pour 283 millions d'euros à cette « correction », soit 5,5 % de son total ! On peut également s'étonner que ces pays financent en 2004 la « correction » pour l'année 2003, année où ils n'étaient pas membres de l'Union européenne. Le financement de cette « correction » représente 9 % de leur contribution globale à l'Union en 2004.

Or, cette « correction » est loin d'être marginale. L'APBR n° 8 prévoit qu'elle s'élève à 5,4 milliards d'euros pour 2003, dont 1,5 milliard à la charge de la France. Pour mémoire, le financement du budget communautaire par le Royaume-Uni s'élèvera en 2004 à 11 milliards d'euros grâce à ce mécanisme. Comme le rappelle Serge Vinçon dans son rapport, cette « correction » est supérieure au budget communautaire de la recherche (4 milliards) ou au montant du fonds de cohésion qui bénéficie aux pays les plus en retard de développement (3 milliards d'euros). Ainsi, le financement de la « correction britannique » représente pour cette année 9,3 % du total de la contribution française au budget communautaire (15,9 milliards d'euros).

Dans ce contexte, l'APBR n° 8 applique strictement la décision communautaire sur les ressources propres datant de 2000. Il sera cependant nécessaire de développer une réflexion approfondie sur le mécanisme de « correction des déséquilibres excessifs » dans le cadre des discussions qui commencent sur les perspectives financières pour 2007-2013, car le financement de la « correction » est concentré sur deux pays et les dix nouveaux États membres y contribuent malgré leurs niveaux de développement.

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Comme souvent, les deux APBR ont été très rapidement examinés en comité budgétaire, qui est le groupe de travail compétent du Conseil. Le comité les a adoptés le 8 juin 2004. Pourtant, le Gouvernement n'a saisi le Parlement de l'APBR n° 8 que le 15 juin. Traditionnellement, la délégation est saisie sur ces textes d'une demande d'examen en urgence par le Gouvernement.

Sur l'APBR n° 7, plusieurs pays, dont la France, ont évoqué la question de l'importance des excédents, qui devra « orienter la préparation du projet de budget pour 2005 ». Sur l'APBR n° 8, l'Italie et le Portugal ont rappelé que « plus de la moitié de la correction britannique est financée par deux États membres » et que le débat sur ce sujet devrait se dérouler dans le cadre des travaux sur les prochaines perspectives financières.

Aucun pays ne semble avoir évoqué spécifiquement le problème du niveau de consommation des dépenses administratives et de leur évolution. Le Président de la délégation avait pourtant interrogé le Gouvernement sur ce sujet en mars dernier : saisi en urgence de l'examen de l'APBR n°5 au budget 2004, il s'interrogeait déjà sur l'évolution de 4,4% du point d'indice des fonctionnaires européens au 1er janvier 2004, « compte tenu de la nécessaire discipline budgétaire actuelle ».

En conclusion, il se confirme à l'expérience que l'examen des budgets rectificatifs par les États membres est largement superficiel, surtout s'il s'agit de diminuer leur contribution au budget communautaire. La délégation n'a pas estimé nécessaire d'intervenir plus avant sur ces deux textes qui sont, en effet, en grande partie, une application du règlement financier de la Communauté et qui ont déjà fait l'objet d'un accord entre les États membres.