COM (2002) 625 final  du 19/11/2002
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 21/04/2004

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 05/12/2002
Examen : 16/09/2003 (délégation pour l'Union européenne)


Économie, finances et fiscalité

Directive sur les services d'investissement

Texte E 2153 - COM (2002) 625 final

(Procédure écrite du 16 septembre 2003)

La Commission européenne a proposé, en novembre 2002, de réviser la directive de 1993 sur les services d'investissement et les marchés réglementés qui définit les conditions auxquelles les banques et les sociétés d'investissement peuvent offrir certains services financiers dans d'autres États membres.

Depuis le début des années quatre-vingt dix, le paysage financier a fortement évolué, ne serait-ce que par la mise en place de la monnaie unique. La directive en vigueur ne permet plus de disposer d'un cadre régissant efficacement les opérations transfrontalières d'investissement : elle ne couvre pas tout l'éventail des services offerts aux investisseurs, elle ne prévoit pas une harmonisation suffisante permettant la reconnaissance mutuelle effective des agréments délivrés aux entreprises d'investissement, ses dispositions se sont révélées rigides.

Or, les revers récemment essuyés par les marchés des actions et la situation de grandes entreprises cotées - comme Enron ou WorldCom - soulignent l'importance de mettre en place un solide cadre législatif permettant de préserver la confiance des investisseurs et la liquidité des marchés. La proposition de directive s'inscrit également dans le cadre du plan d'action pour les services financiers qui a mis en lumière la faiblesse de la législation européenne appliquée aux marchés des valeurs mobilières et les coûts d'opportunité importants résultant de la fragmentation réglementaire dans l'Union.

La place financière européenne est devenue plus complexe, gommant la frontière entre marchés et intermédiaires. Grâce à l'informatique, les opérateurs sont plus nombreux, ils sont plus réactifs et offrent un plus large éventail d'options de négociation. La concurrence entre bourses ou entre systèmes de négociation s'est renforcée. Un certain nombre d'entreprises d'investissement exécutent les ordres de leurs clients « en interne » sans l'intermédiaire d'une bourse de valeur : dans les pays qui autorisent cette « internalisation », entre 15 et 30 % des flux d'ordres des grandes institutions sont effectués en « interne ». La France, la Belgique ou l'Italie ont instauré une « concentration » obligatoire qui n'autorise pas ce système.

La proposition de la Commission est une proposition de directive-cadre qui définit les obligations générales devant être mises en oeuvre par les États membres. Ces obligations seront mises en oeuvre et exécutées par des mesures ultérieures prises par la Commission après consultation des États membres et avis du Comité européen des valeurs mobilières.

La proposition élargit le champ d'application de la directive, en complétant la liste des instruments financiers qui peuvent être négociés sur les marchés réglementés et en élargissant la gamme des services d'investissement pour lesquels un agrément est exigé. La directive inclurait ainsi le conseil en investissement, l'étude d'investissement et l'analyse financière, secteur fortement critiqué depuis les récentes crises financières.

La directive vise également à renforcer les règles que les entreprises d'investissement doivent respecter lorsqu'elles agissent au nom de leurs clients. En plus de règles de conduite plus claires et plus précises, les obligations liées à l'exécution « au mieux » seraient renforcées afin de s'assurer que les entreprises d'investissement exécutent les ordres de la manière la plus favorable au client. En termes de transparence et d'information des clients et des marchés, des exigences seraient fixées pour régler les conflits d'intérêts éventuels entre les ordres des clients et les ordres du propre portefeuille de négociation de l'entreprise. Pour les « gros » négociants (notion qui sera fixée ultérieurement) serait instaurée une « règle d'affichage des cours », les obligeant à rendre publics les cours acheteur et vendeur fermes pour des lots déterminés d'actions liquides. Cette proposition a été critiquée par plusieurs organismes professionnels, car ils considèrent que publier ces informations avant que l'accord ne soit réalisé peut modifier les conditions de marché de façon sensible entre le moment de la publicité et celui de la concrétisation de l'opération.

La proposition vise par ailleurs à renforcer l'application pratique du « passeport unique » qui permet à toutes les entreprises d'investissement d'offrir leurs services dans l'ensemble de l'Union une fois qu'elles ont été autorisées par l'autorité de régulation de leur État d'origine.

En ce qui concerne « l'internalisation » des ordres qui n'est pas autorisée dans tous les pays de l'Union, la proposition prévoit son autorisation quand il est démontré qu'elle est dans l'intérêt du client.

Enfin, la proposition prévoit de fixer des normes minimales relatives au mandat et aux pouvoirs dont les autorités nationales compétentes dans ce domaine devraient disposer. Afin d'organiser un réseau de ces autorités, la proposition prévoit des mécanismes de coopération en temps réel pour l'instruction et la poursuite des infractions aux obligations prévues.

Le Conseil des ministres a entamé les négociations sur ce texte, dont les principales dispositions sont assez semblables à la législation britannique. Le Parlement européen doit examiner la proposition en séance plénière en septembre 2003. Outre certains dispositifs techniques, les discussions portent principalement sur « l'internalisation » des ordres, les règles de transparence ou l'accès aux chambres de règlement et compensation qui gèrent le paiement et la livraison des titres. Plusieurs délégations, dont la France et l'Italie, pourraient accepter la fin de l'obligation de concentration de l'exécution des ordres par les bourses de valeurs, en contrepartie de règles de transparence plus fortes que le Royaume-Uni conteste.

La Commission des finances a fait savoir à la délégation qu'elle souhaitait se saisir de cette proposition de directive ; dans ce contexte, il n'a pas semblé nécessaire à la délégation d'intervenir sur ce texte à la fois technique et important pour les marchés financiers.