COM (2001) 336 final  du 20/06/2001
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 21/05/2002

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 16/07/2001
Examen : 29/11/2001 (délégation pour l'Union européenne)


Transports

Galiléo

Texte E 1765 - COM (2001) 336 final

(Procédure écrite du 29 novembre 2001)

I. HISTORIQUE

La radionavigation par satellites permet à un utilisateur de capter des signaux émis par plusieurs satellites pour déterminer de manière très précise, à chaque moment, sa position en longitude, latitude et altitude. Actuellement, il existe deux systèmes globaux de navigations par satellites :

- l'un russe, GLONASS ;

- l'autre américain, GPS.

En pratique, on assiste à un monopole du système américain GPS. L'Europe souhaite s'affranchir de la dépendance du GPS et la Commission, saisie par le Conseil en mars 1998, a présenté en février 1999 une communication sur le projet Galiléo. Ce projet repose sur quatre phases de développement :

- définition (1999-2000)

- développement (2001-2005)

- déploiement (2006-2007)

- exploitation (dès 2008).

Le Conseil a demandé à la Commission, par une résolution de juillet 1999, de développer un système à usage civil, géré par les pouvoirs publics.

Après un premier projet présenté par la Présidence française en décembre 2000 sur lequel un accord n'a pu être trouvé, le Conseil européen de Stockholm (mars 2001) et le Conseil Transports du 5 avril 2001 ont adopté une résolution lançant la phase de définition du projet afin que, d'ici la fin de l'année 2001, la décision de lancer la phase de développement de Galiléo puisse être prise. Les conditions posées par le Conseil étaient les suivantes : Galiléo doit être fondé sur « une structure de gestion unique et efficace », « que ce soit sous la forme d'une entreprise commune au sens de l'article 171 du traité, d'une agence ou de tout autre organe approprié ».

La Commission a présenté en juin dernier une proposition de règlement du Conseil relatif à la constitution d'une entreprise commune Galiléo, sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer.

II. LE CONTENU DE LA PROPOSITION

Galiléo doit permettre à chaque individu, grâce à un petit récepteur individuel bon marché, de connaître sa position à quelques mètres près (contre quelques dizaines de mètres pour le GPS), avec une garantie de continuité de l'émission du signal, qui permettra d'assurer une fiabilité totale du système.

Galiléo offrira trois niveaux de service :

- un service de base gratuit destiné au grand public (notamment pour les loisirs) ;

- un service payant à accès restreint pour des applications commerciales et professionnelles nécessitant des performances supérieures et une garantie de service ;

- un service payant très restreint de haut niveau pour des applications qui ne doivent subir aucune interruption pour des raisons de sécurité.

Juridiquement, c'est la formule de « l'entreprise commune » (article 171 du traité) qui a été retenue afin de permettre, selon la Commission, une meilleure participation du secteur privé.

Cette entreprise commune est une structure temporaire destinée à fonctionner pendant la phase de développement du programme (jusqu'à fin 2005). Elle est chargée :

- d'assurer le lancement des actions de recherche et de développement nécessaires, ainsi que la coordination des actions nationales en ce domaine ;

- de préparer les phases suivantes du programme, y compris sa transformation éventuelle en une société européenne.

Cette première phase doit permettre de valider le système, après le déploiement d'une constellation satellitaire limitée (3 à 5 satellites), la mise en place d'un secteur de contrôle au sol représentatif et la fourniture d'un certain nombre de récepteurs utilisateurs.

L'entreprise commune sera composée de représentants de la Commission et de l'Agence spatiale européenne (ASE), auxquels pourront s'associer la Banque européenne d'Investissement (BEI) et les entreprises privées qui souscriront à son fonds initial.

En mars 2001, un mémorandum a été signé par les principales entreprises intéressées qui s'engageraient à souscrire au fonds initial de l'entreprise commune, à hauteur de 200 millions d'euros. La Commission a fixé à 20 millions d'euros le montant minimum qui doit être versé par une entreprise pour souscrire un fonds. Ce montant est ramené à un million d'euros pour la PME.

Pendant la phase de développement, les fonds publics s'élèveront à 1,1 milliard d'euros, en provenance, à parts égales, du budget communautaire (fonds RTE-réseaux transeuropéens) et de l'ASE.

III. ETAT DES NÉGOCIATIONS

a) Le Parlement européen

Le Parlement européen a examiné le texte en session plénière le 3 octobre dernier. Il a exprimé ses préoccupations au sujet de la viabilité financière du programme, au cas où les projections relatives aux investissements du secteur privé ne se concrétiseraient pas. Il a souligné que l'absence de participation du secteur privé ne saurait se traduire par une participation plus élevée de l'Union européenne ou des budgets nationaux.

Le Parlement européen souhaiterait obtenir des garanties sur les financements : le rapport adopté par le Parlement invite la Commission à dresser un tableau précis des flux de revenus, à effectuer une analyse coût-efficacité approfondie et à présenter une fiche financière fondée sur des prévisions de financement « réalistes ». Le Parlement a demandé à la Commission d'établir une proposition pour une structure générale de financement de Galiléo.

Sur le fond, le Parlement européen apporte son soutien au programme, qui doit :

· assurer l'indépendance de l'Union européenne en matière de navigation par satellites ;

· permettre la promotion du potentiel technologique européen.

b) Le Conseil

Le texte a ensuite fait l'objet d'un débat lors du Conseil Transports des 15 et 16 octobre derniers. Le Conseil a chargé le Coreper d'approfondir ses travaux selon les axes suivants :

« - prévoir les modalités et le cadre de la participation du secteur privé en évitant les conflits d'intérêt ;

- permettre une association des Etats membres à l'entreprise commune par la création d'un conseil de surveillance. »

Le Conseil a par ailleurs demandé à la Présidence de prendre contact avec l'ASE « pour obtenir la confirmation de sa volonté de participer à l'entreprise commune ».

L'ASE a récemment confirmé sa participation financière au projet Galiléo. Réuni le 15 novembre dernier, le Conseil ministériel de l'ASE a en effet décidé de débloquer une enveloppe de 528 millions d'euros pour la première phase du projet.

Le Conseil Transports doit maintenant approuver, les 6 et 7 décembre prochains, la contribution de l'Union européenne à Galiléo.

IV. LES POINTS EN DISCUSSIONS

Trois questions importantes ont été soulevées.

1. Le contrôle par les Etats membres

Il y a maintenant unanimité pour affirmer la nécessité d'un contrôle de l'entreprise commune (EC) par les Etats membres au vu des enjeux (le programme met en oeuvre des prérogatives de puissance publique et comporte des impératifs sécuritaires).

Trois solutions sont possibles :

- soit chaque Etat membre dispose d'un représentant au Conseil d'administration ;

- soit les Etats membres participent à travers un comité spécial de surveillance ;

- soit les Etats membres participent au titre de la comitologie (à travers un comité de réglementation chargé d'adopter un rapport sur les activités de l'EC ainsi que le programme de travail de celle-ci pour l'année suivante).

2. Le rôle du secteur privé

Les Etats membres sont partagés sur l'opportunité de sa participation à l'EC. Certains estiment qu'il devrait s'agir d'une entreprise entièrement publique (par crainte de conflit d'intérêts).

La Commission est, quant à elle, favorable à la participation du secteur privé, afin de faciliter la transition vers la phase de déployement.

3. La participation de l'ASE

La plupart des Etats sont attachés au principe de l'unicité de gestion exigée pour la gestion et le financement de l'EC, tout en souhaitant une participation financière de l'ASE.

V. ELÉMENTS D'APPRÉCIATION

Le Gouvernement français est favorable à un aboutissement rapide du projet Galiléo. Toutefois, il est attaché à ce que les Etats exercent un réel contrôle sur l'EC et préfèrerait, à cette fin, que soit choisie l'option « comité de surveillance ». Par ailleurs, il s'est prononcé en faveur d'un partenariat public/privé et à l'unicité de gestion de l'entreprise (ce qui implique d'assurer une concertation étroite entre l'ASE et la Commission).

Dans son rapport sur la politique spatiale française française (n° 293-2000/2001) présenté au nom de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, notre collègue Henri Revol souligne l'importance de Galiléo qui doit « affranchir l'Europe de sa dépendance à l'endroit d'un système militaire (le GPS est sous le contrôle exclusif du Department of Defence américain) sur lequel elle n'a aucun contrôle », tout en donnant « aux industriels européens une position stratégique comparable à celle de leurs compétiteurs américains ».

Le rapport met en avant les axes essentiels que devrait suivre le projet Galiléo :

- le contrôle politique de ses orientations et le contrôle civil gouvernemental de sa mise en oeuvre ;

- une structure unique de gestion du projet et une responsabilité technique exercée par une entité unique dotée de l'autorité et de l'expérience technique indispensable : le rapport souligne l'intérêt du recours à l'entreprise commune qui permet d'offrir un cadre juridique commun à l'Union européenne et à l'ASE ;

- la participation du secteur privé est considérée comme indispensable par certains Etats ; l'Office estime qu'il est désirable de poursuivre dans cette voie, qui semble être souhaitée par les industriels européens.

Pour l'Office, Galiléo « apparaît donc comme la pierre de touche de la politique spatiale de l'Europe, c'est-à-dire comme le projet qui est susceptible de donner à l'effort spatial européen sa cohérence fondée sur une volonté politique d'autonomie stratégique ».

Compte tenu des éléments qui précèdent et de la réflexion conduite au sein de l'Office, il n'a pas paru nécessaire à la délégation d'intervenir plus avant sur ce texte.