13986/00  du 30/11/2000
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 22/07/2003

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 28/12/2000
Examen : 20/04/2001 (délégation pour l'Union européenne)


Justice et affaires intérieures

Exécution des décisions de gel des avoirs ou des
preuves dans l'Union européenne

Texte E 1633

(Procédure écrite du 20 avril 2001)

Il s'agit d'une importante initiative de trois Etats, la France, la Suède et la Belgique, qui constituent actuellement la « troïka » de l'Union.

Ce document vise à mettre en oeuvre le principe de reconnaissance mutuelle, reconnu par le Conseil européen de Tampere d'octobre 1999 comme la pierre angulaire de la coopération judiciaire en matière pénale, aux décisions précédant la phase de jugement, en particulier à celles qui permettraient aux autorités compétentes d'agir rapidement pour obtenir des éléments de preuve et saisir des avoirs faciles à transférer, comme le prévoyait expressément le point 36 des conclusions de ce Conseil européen.

La nouveauté essentielle de ce texte réside dans le mécanisme retenu, qui s'inspire de celui de l'exequatur simplifiée, afin d'obtenir un maximum de rapidité pour éviter la destruction, la transformation ou le transfert des éléments de preuve ou des avoirs issus d'activités criminelles.

Ainsi, toute décision de gel prise par l'autorité judiciaire d'un Etat membre, sera directement applicable dans un autre Etat, alors qu'elle nécessite aujourd'hui l'adoption d'une nouvelle décision judiciaire.

En effet, le projet prévoit que l'autorité judiciaire d'un Etat est tenue d'exécuter sans délai une décision de gel transmise par une autorité d'un autre Etat.

Cette décision est accompagnée d'un simple certificat signé par l'autorité compétente. Elle doit comprendre, ou être suivie dans un délai de quatre jours, par une instruction déterminant le sort du bien gelé.

L'autorité de l'Etat d'exécution sera également tenue de transférer le bien gelé à l'autorité de l'Etat ayant pris la décision de gel, si celle-ci en fait la demande.

Un recours non suspensif contre une décision de gel est possible, tant dans l'Etat d'émission que dans l'Etat d'exécution, mais seul l'Etat d'émission engagera sa responsabilité. Dans un souci de protection des droits des personnes pouvant subir un tel préjudice, le texte pose le principe d'une indemnisation par l'Etat de l'exécution, qui se retournera ensuite vers l'Etat d'émission.

Le projet présente donc un intérêt majeur, tant du point de vue de son caractère novateur, que du point de vue de la lutte contre la criminalité transnationale.

Le champ d'application de la proposition est, toutefois, limité à une liste d'infractions pour lesquelles un travail d'harmonisation a d'ores et déjà été réalisé au sein de l'Union : le trafic illicite de stupéfiants, la fraude portant attente aux intérêts financiers des communautés, le blanchiment du produit du crime, le faux-monnayage de l'euro, la corruption, ainsi que la traite des êtres humains.

Ce texte n'a pas encore été examiné au sein du Conseil en raison de l'encombrement que connaît le groupe de travail « coopération judiciaire en matière pénale », avec, notamment, les discussions laborieuses sur « Eurojust ».

Bien qu'il s'inscrive pleinement dans l'esprit de Tampere, ce projet pourrait, également, connaître des difficultés de la part de certains Etats membres attachés à la procédure de l'exequatur. Or, la procédure d'adoption requiert l'unanimité.

Ce projet illustre donc, une fois encore, les limites de l'efficacité de la coopération judiciaire en matière pénale, telle qu'elle est pratiquée actuellement.

Compte tenu des attentes légitimes des citoyens et des nécessités concrètes ressenties par les magistrats à l'égard de la construction d'un espace de sécurité et de justice, la délégation s'est prononcée en faveur d'une adoption rapide de ce texte.