COM (2000) 435 final  du 12/07/2000

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 08/08/2000
Examen : 18/09/2000 (délégation pour l'Union européenne)
Proposition rejetée par le Conseil conformément à l'article 8 du règlement 2377/90 le 28/09/2000


Politique sociale et santé

Somatotropine bovine


Texte E 1519 - COM (2000) 435 final

(Procédure écrite du 18 septembre 2000)

La présente proposition de règlement du Conseil vise à inscrire la somatotropine bovine (BST) en annexe II du règlement 2377/90 du Conseil, qui établit une procédure communautaire pour la fixation des limites maximales de résidus (LMR) de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale. L'annexe II de ce règlement correspond aux substances qui ne sont pas soumises à une telle limite.

La somatotropine bovine est une hormone de croissance (naturelle ou synthétique) administrée par injection pour augmenter la production laitière chez les vaches. A l'issue d'un moratoire de neuf ans, l'Union européenne a finalement décidé, en décembre 1999, d'interdire la commercialisation de la BST et son administration aux vaches laitières sur le territoire communautaire (décision du Conseil du 17 décembre 1999). Cette interdiction a été prise pour des raisons de santé et de bien-être des animaux, sur la base des seuls éléments scientifiques probants émanant du comité scientifique de la santé et du bien-être des animaux ; les vaches traitées à la BST peuvent en effet souffrir de boiteries, de mammites (inflammation des mamelles) et de cycles de reproduction perturbés. Le comité scientifique des mesures vétérinaires en rapport avec la santé publique n'a, par contre, pas pu mettre en évidence de risques clairement établis pour la santé publique, tout en soulignant les incertitudes qui subsistent sur certains aspects de sécurité pour le consommateur (possible corrélation entre l'utilisation de la BST et l'augmentation du niveau de facteur IGF-1 (« insuline growth factor 1 ») dans le lait, sachant que des expérimentations ont mis en évidence une association entre un taux important de ce facteur et le risque de cancers du sein et de la prostate ; possibilité de réactions allergiques et du développement d'antibiorésistances).

En 1987, deux laboratoires produisant une somatotropine bovine (ELI LILLY et MONSANTO) ont déposé auprès de la Commission européenne des dossiers d'inscription en annexe II du règlement 2377/90. Le Comité du scientifique compétent (comité du médicament vétérinaire) a rendu, en janvier 1993, un avis favorable, confirmé en juillet 1999. Cependant, contrairement à la procédure prévue par ce règlement, la Commission européenne, arguant du moratoire sur l'utilisation des BST, n'a pas soumis ces dossiers à l'avis du comité de réglementation composé de représentants des Etats (comité permanent du médicament vétérinaire) et a rejeté les demandes des deux sociétés. Ces dernières ont alors porté l'affaire devant le tribunal de première instance qui a considéré, dans deux arrêts en date du 25 juin 1998 et du 22 avril 1999, que le fait qu'une substance ne puisse être directement utilisée et mise sur le marché (en l'occurrence du fait de l'existence d'un moratoire) ne justifiait pas le refus de son inscription à l'annexe II du règlement 2377/90, les deux procédures étant distinctes. Le Tribunal de première instance a donc estimé que la Commission, en application du règlement 2377/90, était tenue de donner suite à l'avis du comité du médicament vétérinaire en proposant une inscription en annexe du règlement 2377/90.

Afin de se conformer à ces arrêts, la Commission a, en décembre 1999, présenté au comité permanent du médicament vétérinaire une proposition visant à inscrire la BST en annexe II du règlement 2377/90. Le 4 février dernier, le comité permanent n'a pas émis un avis conforme sur cette proposition, seuls quatre Etats membres ayant voté pour, un Etat s'étant abstenu, les dix autres Etats membres (dont la France) s'y étant opposés, estimant que l'arrêt du Tribunal de première instance portait sur un défaut de procédure et ne préjugeait pas de la réponse au fond à apporter aux demandes des laboratoires. Ces dix délégations ont également rappelé que la Commission avait, à l'occasion de l'adoption de la décision d'interdiction de la mise sur le marché de la BST, fait une déclaration confirmant, d'une part, l'insuffisance de données sur l'impact de l'utilisation de la BST sur la santé du consommateur, et, d'autre part, le maintien d'une opposition de l'Union européenne à l'adoption d'une LMR pour la BST au niveau du Codex alimentarius. Pour ces délégations, un classement de la BST en annexe II du règlement 2377/90 constituerait donc une décision prématurée et incohérente avec la position communautaire au Codex alimentarius.

En vertu du règlement 2377/90, dès lors que le comité de réglementation n'a pas rendu un avis conforme à sa proposition, la Commission doit soumettre celle-ci au Conseil qui statue à la majorité qualifiée.

La proposition de la Commission a ainsi été transmise au Conseil, le 12 juillet 2000, qui doit se prononcer dans les trois mois suivant sa saisine, soit avant le 12 octobre prochain. Ce dossier devra donc être inscrit à l'ordre du jour du Conseil agriculture, lors de sa session des 25 et 26 septembre prochains, ou, si ce dernier devait finalement être annulé, à l'ordre du jour du Conseil marché intérieur du 28 septembre.

La position du gouvernement français reste hostile à l'inscription de la BST à l'annexe II du règlement 2377/90, ce qu'on ne peut qu'approuver.

En effet, dans le contexte particulièrement sensible des questions de sécurité sanitaire des aliments, il convient d'avoir une approche cohérente sur un tel dossier. Or, dès lors qu'on estime qu'une substance présente des risques avérés pour la santé et le bien être des animaux et des risques potentiels pour la santé humaine, la notion de limite de résidus dans les denrées issues d'animaux traités n'a pas de sens. Le consommateur français ne comprendrait pas que la France n'ait pas une attitude cohérente avec sa position clairement affichée en faveur de l'interdiction de cette substance, ceci, d'autant plus qu'elle se bat, depuis de nombreuses années, pour que l'ensemble des facteurs autres que scientifiques soient pris en compte dans le cadre de l'évaluation de cette substance au niveau du Codex alimentarius.

*

En réponse à une demande de précisions de M. Marcel Deneux, le ministère de l'Agriculture a fait savoir que la BST n'avait jamais été utilisée en France. Quelques essais ont été autorisés en 1987, puis interrompus lorsque le moratoire a été décidé.

La délégation souhaite que le Gouvernement maintienne son opposition à l'adoption de ce texte.