COM (2000) 281 final  du 10/05/2000
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 05/12/2000

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 05/07/2000
Examen : 17/10/2000 (délégation pour l'Union européenne)


Politique étrangère et de sécurité commune

Communication de M. Hubert Haenel
sur deux propositions de règlement du Conseil
pour la reconstruction des Balkans (E 1481)

Ce texte traite de la reconstruction des Balkans. Il s'agit d'un programme dit CARDS (Assistance de la Communauté européenne pour la reconstruction, la démocratisation et la stabilisation) qui se subdivise en deux documents :

- une proposition de règlement du Conseil relatif à l'aide à l'Albanie, la Bosnie, la Croatie, la Yougoslavie et la Macédoine ;

- une proposition de règlement relatif à l'Agence européenne pour la reconstruction.

En mai dernier, la Commission avait proposé une première version de ces textes. Elle a entre-temps adopté de nouvelles orientations pour mieux gérer l'aide extérieure qu'elle accorde aux pays étrangers, notamment en matière de programmation des projets et de constitution de comités d'aide à la prise de décision. Ces nouvelles orientations ont été traduites dans le cadre du règlement MEDA sur lequel nous nous étions penchés et qui vient d'être réformé. Il paraissait logique qu'elles soient également appliquées au programme d'assistance destiné aux Balkans.

La première mouture de ces textes a donc été retirée, puis remplacée par une nouvelle rédaction qui nous a été transmise voici quelques jours.

· La proposition d'assistance financière a pour but d'établir un cadre juridique unifié pour l'aide aux Balkans, qui était jusqu'alors dispersée entre différentes procédures.

Elle intègre le principe de la programmation hiérarchisée inscrite dans MEDA : un cadre stratégique est d'abord défini, sur lequel se fonde une programmation pluriannuelle indicative, permettant d'établir un programme annuel. L'objectif est d'accroître l'efficacité de l'aide, son articulation avec les programmes de réforme et sa complémentarité avec l'assistance fournie par d'autres donateurs.

Par ailleurs, un comité de gestion présidé par la Commission et composé des Etats membres est instauré afin qu'ils puissent donner leur avis sur les priorités et les grandes orientations de l'aide accordée.

L'assistance prend la forme d'avances financières non remboursables.

· La seconde proposition concerne plus particulièrement le Kosovo, qui fait l'objet d'un dispositif d'assistance spécifique dont l'exécution peut être confiée, par la Commission, à l'Agence européenne pour la reconstruction. Il est en outre prévu que, « lorsque les conditions le permettront », ce régime soit, sur proposition de la Commission et après accord du Conseil statuant à la majorité qualifiée, étendu à d'autres régions de la République fédérale de Yougoslavie, ce qui sera probablement le cas dans un avenir proche compte tenu de l'actualité récente dans cette partie des Balkans.

Cette Agence est chargée de diverses missions d'exécution : collecte d'information sur l'étendue des dommages, la reconstruction, le retour des réfugiés, les besoins de la population ; élaboration de projets de programme pour la reconstruction et le retour des réfugiés ; mise en oeuvre de l'assistance, si possible en coopération avec la population locale... Par ailleurs, l'Agence peut aussi mettre en oeuvre des programmes financés directement par les Etats membres ou par d'autres donateurs.

Sur le plan de son organisation interne, l'Agence dispose d'un conseil de direction composé d'un représentant de chaque Etat membre et de deux représentants de la Commission, l'un d'eux assurant la présidence du conseil. Ce dernier « examine » le cadre stratégique relatif à l'assistance, présenté par la Commission, dans lequel doit s'insérer le programme annuel de reconstruction. Il donne son avis sur le projet de programme annuel arrêté sur la base du cadre stratégique. Un directeur, nommé par le conseil de direction sur proposition de la Commission, prépare le projet de programme annuel de reconstruction et rend compte de sa gestion au conseil de direction.

L'Agence est instituée jusqu'au 31 décembre 2004, son statut devant faire l'objet d'un nouvel examen six mois avant cette échéance. En tout état de cause, elle sera dissoute par le Conseil sur proposition de la Commission lorsque sa mission aura été remplie.

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Que faut-il penser de ces textes ? D'abord que cette nouvelle version est moins critiquable que la précédente en ce qu'elle s'insère dans le programme global d'aide extérieure de l'Union.

Ensuite, qu'ils constituent un signal fort de l'Europe, quelques semaines avant le sommet des Balkans que présidera le Président de la République française, le 24 novembre prochain, à Zagreb. Dans cet objectif, le souhait des institutions européennes est d'obtenir un accord des Etats membres lors du prochain Conseil Affaires générales du 20 novembre.

Même s'il n'est pas encore parfait, ce texte m'apparaît donc symboliquement important et je vous propose de ne pas faire obstacle à la poursuite des discussions.

Toutefois, divers points doivent encore être affinés auxquels, semble-t-il, la présidence française est très attachée,  l'objectif étant de ne pas se départir du modèle de MEDA : je citerai notamment le rôle des Etats membres dans l'examen des projets, la marge de manoeuvre exacte dont disposera le conseil de direction de l'Agence pour la reconstruction lors de l'approbation des stratégies et des programmes. C'est pourquoi, je vous suggère d'adresser au ministre chargé des Affaires européennes une lettre lui faisant part de nos inquiétudes et de nos perplexités face à un texte aux intentions louables, mais aux modalités trop complexes, en terme de partage des responsabilités, de lisibilité et d'efficacité.

Je vous précise en outre, et il faut le déplorer, que l'enveloppe financière correspondant à cette assistance n'est pas encore fixée. En effet, le budget destiné à l'aide extérieure s'élève à 10 milliards d'euros maximum, sur la période 2000-2006, pour financer tout à la fois ce programme et le programme MEDA. Le montant des ressources consacrées à ce dernier n'a pas été arrêté lors du Conseil Affaires générales du 9 octobre dernier où a été évoqué - sans conclure - un chiffre de 6 milliards d'euros. Il est donc impossible d'en déduire actuellement le montant des fonds restants qui seront affectés aux Balkans.

A la suite de cette communication, la délégation a décidé d'adresser une lettre au ministre des Affaires européennes sur ce texte.

Annexe : lettre de M. Hubert Haenel à M. Pierre Moscovici.


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DÉLÉGATION
POUR
L'UNION EUROPÉENNE

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Paris, le 24 octobre 2000

LE PRÉSIDENT

 

Monsieur le Ministre,

Au cours de sa réunion du mardi 17 octobre 2000, notre délégation a procédé à l'examen du texte E 1481 relatif au programme CARDS d'assistance aux Balkans.

Connaissant l'ampleur des besoins dans cette partie de l'Europe, nous avons été sensibles aux motivations de ce texte, au moment où la situation politique nouvelle en République fédérale de Yougoslavie laisse espérer une normalisation des relations entre ce pays et l'Union européenne. Il nous a également semblé symboliquement important de ne pas élever d'opposition formelle à ce texte à quelques semaines de la tenue du Sommet de Zagreb, auquel notre pays attache la plus grande importance.

Toutefois, nous avons été nombreux à observer que, dans sa rédaction actuelle, le dispositif proposé demeure complexe et confus, ce qui risque de porter atteinte à son efficacité sur le terrain.

En particulier, le rôle des Etats membres dans la détermination des programmes d'assistance demande à être précisé, tant pour le volet aide aux Balkans que pour ce qui concerne le fonctionnement de l'agence européenne de reconstruction du Kosovo. C'est pourquoi, nous souhaitons attirer votre attention sur la nécessité de clarifier ces points, en s'inspirant du modèle récemment arrêté pour le fonctionnement du fonds MEDA destiné aux pays méditerranéens. Il est, en effet, essentiel d'afficher une politique unique d'aide extérieure de l'Union si l'on veut en accroître la compréhension et la lisibilité.

.../

Monsieur Pierre MOSCOVICI
Ministre délégué chargé des Affaires européennes

37 Quai d'Orsay

75351 PARIS

Par ailleurs, la crédibilité de l'action européenne rend indispensable que soit rapidement chiffrée la part de l'aide financière que les Etats membres envisagent d'accorder respectivement aux Balkans et à la zone méditerranéenne.

En vous remerciant des progrès qui pourront être obtenus sur ces points par la Présidence française, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l'expression de ma considération distinguée.