5343/00  du 28/01/2000

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 24/02/2000
Examen : 12/12/2000 (délégation pour l'Union européenne)
Saisine caduque suite à la modification substantielle de la proposition initiale ayant donné lieu à une nouvelle saisine le 18/04/2001 (E 1720)


Justice et affaires intérieures

Lutte contre les infractions graves au détriment de l'environnement


Texte E 1413

(Procédure écrite du 12 décembre 2000)

La présente proposition est un projet de décision cadre du Conseil relative à la lutte contre les infractions graves au détriment de l'environnement.

Résultant d'une initiative du Danemark, elle reprend le contenu d'une proposition d'action commune, déposée le 1er février 1999 par le même Etat, puis retirée ultérieurement, qui avait été examinée par la délégation (procédure écrite du 26 novembre 1999).

En effet, depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, l'action commune a été remplacée par la décision cadre, pour les matières relevant du troisième pilier. Cet instrument, qui vise au rapprochement des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres est beaucoup plus contraignant, puisqu'il lie les Etats membres quant au résultat à atteindre, tout en laissant à ceux-ci le choix des moyens pour y parvenir.

Le projet prend également en considération la convention du Conseil de l'Europe sur la protection de l'environnement par le droit pénal, en date du 9 septembre 1998, signée par sept Etats membres dont la France, et dont l'entrée en vigueur est subordonnée à la ratification par trois Etats membres au moins.

L'objectif du projet est de voir reconnaître les infractions graves au détriment de l'environnement dans l'ensemble des Etats membres de l'Union et d'assurer une répression efficace de celles-ci.

I. lE CONTENU DU PROJET

1. Le champ d'application

Par « infraction grave contre l'environnement », la proposition de décision-cadre entend des actes ou des omissions assortis de circonstances aggravantes enfreignant la législation nationale sur l'environnement. Ces actes peuvent se traduire par une pollution de l'air, de l'eau, du sol ou du sous-sol ou par le stockage ou l'élimination de déchets ou de substances similaires pouvant causer des dommages importants à l'environnement.

Les circonstances aggravantes tiennent essentiellement à la nature de l'infraction, notamment à la préméditation, et au caractère anormal ou inhabituel de l'activité.

2. Le projet contient plusieurs obligations pour les Etats membres

Les Etats doivent d'abord veiller à prévoir des sanctions pénales efficaces, pouvant aller jusqu'à des peines privatives de liberté ou l'extradition.

Les Etats doivent également prendre des mesures permettant de reconnaître la responsabilité pénale des personnes morales, de saisir et de confisquer les instruments et le produit des infractions, de priver les personnes reconnues coupables du droit à exercer une activité nécessitant une autorisation ou un agrément, ainsi que d'assurer la réparation des dommages.

En matière d'enquête, le projet dispose que les services répressifs de chaque Etat doivent disposer de pouvoirs et de méthodes d'investigation qui leur permettent de mener des enquêtes et d'engager des poursuites.

Le projet impose également que la compétence de chaque Etat membre s'étende aux navires immatriculés dans leurs territoires, aux personnes morales dont le siège est situé sur leurs territoires et aux infractions dont les conséquences affectent ou visent son territoire.

En ce qui concerne la coopération entre les Etats membres pour lutter contre ce type de criminalité, la décision cadre prévoit une coordination entre les différentes autorités nationales, et une coopération policière, pénale et administrative dans le domaine des informations ainsi que des enquêtes et des poursuites, y compris en matière de commissions rogatoires.

Des points de contact nationaux pour la collecte et l'échange d'informations devraient être créés à cet effet.

Il est également prévu d'établir un répertoire des compétences et connaissances spécialisées en matière de lutte contre les infractions graves au détriment de l'environnement tenu par le secrétariat général du Conseil, étant entendu qu'Europol pourrait être chargé de cette mission et du maintien du réseau de points de contacts nationaux si ce type de crime venait entrer dans son champ de compétences.

Enfin, le projet de décision cadre comporte l'obligation pour les Etats membres de prendre les dispositions nécessaires afin de signer et de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe de 1998 sur la protection de l'environnement par le droit pénal dans un certain délai.

II. L'EXAMEN DU PROJET

1. Le bien-fondé du projet

L'initiative danoise trouve son fondement direct au point 48 des conclusions du Conseil européen de Tampere, qui prévoit que la criminalité au détriment de l'environnement figure au nombre des domaines sur lesquels devraient se concentrer les efforts visant à harmoniser les définitions, les incriminations et les sanctions entre législations pénales nationales.

Il convient également de remarquer que l'adoption d'un tel instrument permettait d'intégrer dans l'acquis communautaire la protection pénale de l'environnement, ce qui présente un intérêt indéniable dans la perspective de l'élargissement puisque l'environnement constitue un point difficile des négociations avec les pays candidats.

Le Parlement européen a d'ailleurs rendu un avis favorable sur ce projet, dans son rapport en date du 21 juin 2000, tout en présentant certains amendements.

2. Les difficultés

Le présent projet soulève néanmoins des difficultés importantes.

D'une part, parce qu'il comprend des dispositions très éparses.

Ce projet de décision-cadre comporte en effet trois types de dispositions :

- celles qui touchent au droit pénal,

- celles qui sont relatives à la coopération policière,

- et, enfin, l'obligation de signer et de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe de 1998.

Or, un certain nombre d'Etats membres ne sont pas enclins à signer cette convention. La France elle-même y est opposée car elle refuse la mise en place de modalités de coopération pénale spécifiques qui entreraient en concurrence avec les modalités prévues par la convention d'entraide judiciaire en matière pénale, adoptée dans le cadre de l'Union européenne.

Les négociations au sein du Conseil ont donc été difficiles. Pour sortir de cette impasse, les présidences portugaise et française ont proposé de ne reprendre que les dispositions de la convention faisant l'objet d'un consensus au sein des Etats membres.

Le texte actuellement en discussion au Conseil constitue donc une version très épurée de la proposition initiale puisqu'il se borne à reprendre certaines dispositions de la convention, en particulier l'obligation de prévoir des sanctions pénales en cas d'infraction grave contre l'environnement.

Etant donné l'état actuel du projet, la délégation n'a pas estimé nécessaire d'intervenir à son sujet.