Mme la présidente. L’amendement n° 216 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :

Alinéa 10, première phrase

Remplacer le nombre :

95

par le nombre :

90

La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Les dispositions de l’article 17 s’inscrivent pleinement dans la stratégie gouvernementale de rationalisation des dépenses de santé. Le Gouvernement a donc aménagé la clause de sauvegarde, en minorant le taux d’abattement dont les laboratoires bénéficiaient jusqu’à présent, le faisant passer de 20 % à 5 %.

Il est normal que les entreprises pharmaceutiques soient mises à contribution et s’impliquent dans la politique de baisse des prix des produits de santé menée par le CEPS. C’est pourquoi le Gouvernement leur offre la possibilité de s’acquitter de leur contribution par le biais d’une baisse du prix de leurs médicaments, avec cette fois-ci une fenêtre d’abattement plus importante. Il n’en reste pas moins que la minoration de l’abattement de base à 5 % est grandement préjudiciable, non seulement pour les petites structures avec des moyens moins importants, mais également pour l’attractivité de notre territoire s’agissant des investissements et des expérimentations cliniques dont tant de patients atteints de pathologies rares et lourdes ont besoin.

À défaut de trouver de meilleures solutions, il convient que ce nouveau mécanisme de pression à la baisse des prix soit incitatif pour les entreprises. Il doit être plus intéressant pour les laboratoires de répercuter leur contribution sur leurs prix, ce qui fera baisser le niveau de l’Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie), plutôt que de s’acquitter de cette contribution l’année fiscale suivante. Aussi, afin de garantir l’attractivité de cet aménagement de la clause de sauvegarde, le présent amendement vise à ramener le taux d’abattement minimum à 10 %, dans le cadre de la politique de baisse des prix des médicaments.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avec le droit en vigueur, les entreprises dont il est ici question peuvent être exonérées de la clause si elles affichent pour l’ensemble du chiffre d’affaires un taux de conventionnement avec le Comité économique des produits de santé supérieur à 80 %. L’article élève ce taux à 95 %, ce qui revient, comme vous le dites, ma chère collègue, en vision miroir, à baisser le taux d’abattement à 5 %. En contrepartie, il aménage un régime d’exonération individuelle pour toute entreprise ayant consenti à une baisse de son prix net de référence.

Une telle individualisation de la négociation, bien qu’elle ait suscité la perplexité, puis les doutes, du secteur présente au moins, selon moi, l’intérêt de tenter l’expérience. C’est pourquoi l’économie générale de l’article 17 a été jugée satisfaisante par la commission, qui a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Pour des raisons similaires, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Nous avons déjà perdu notre place de leader européen en matière de recherche. Nous risquons désormais d’être à la traîne des autres pays. En effet, il n’y aura plus aucune attractivité pour les laboratoires qui s’occupent de la recherche et de l’amélioration de la santé de nos patients.

Les procédés actuels nécessitent énormément de recherches. Selon moi, le nivellement par le bas n’est pas la bonne solution.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. J’entends ce que dit Mme Delmont-Koropoulis. Nous avons évoqué le sujet rapidement au moment de l’examen des amendements en commission.

Lorsque nous avons rédigé, avec Véronique Guillotin et Yves Daudigny, un rapport sur l’accès précoce à l’innovation, nous avons bien vu quels étaient les freins pour les entreprises.

Qu’il y ait une régulation des prix et des négociations serrées entre les laboratoires et le CEPS, c’est normal. Nous devons maîtriser les prix, notamment par rapport à leur impact sur les comptes sociaux. Néanmoins, cet article introduit une modification importante du dispositif.

Mme Delmont-Koropoulis propose quelque chose d’intermédiaire entre ce qui existait avant et ce qui est prévu par le texte. Sa proposition me semble équilibrée. Pour ma part, je serais plutôt favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 216 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 217 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Lassarade et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :

Alinéa 10, seconde phrase

Remplacer les mots :

arrêté des ministres chargés de la santé et

par les mots :

l’accord-cadre mentionné au premier alinéa de l’article L. 162-17-4 du code

La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. La politique de négociation conventionnelle sur les prix entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques repose sur la confiance et la responsabilité de chaque partie. Chacune d’elle sait que le coût de l’innovation est justement évalué et qu’il permettra un accès équitable de chacun aux produits de santé. C’est d’ailleurs sur ce fondement que près de 95 % des laboratoires ont conventionné avec le CEPS.

La relation contractuelle entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques a permis à la France d’être leader en matière de production de médicaments en Europe et d’être un important créateur d’emplois industriels, ce qui risque de ne plus être le cas désormais.

Il est essentiel que la politique conventionnelle soit protégée et promue par le législateur. Les garanties apportées par cette méthode sont importantes pour que chaque patient puisse avoir accès à des stratégies thérapeutiques de qualité et, pour ceux qui le nécessitent, ciblées. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à confier la fixation du barème mesurant le taux d’avancement de la contribution due au titre de la clause de sauvegarde à un accord-cadre négocié entre le CEPS et les syndicats des entreprises pharmaceutiques plutôt qu’à un arrêté ministériel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. J’aurais bien aimé que le Gouvernement argumente.

Sur ce genre d’amendement, prenons garde ! En effet, à l’heure actuelle, avec l’épidémie de covid, la pression sur les médicaments, ainsi que sur les vaccins, est forte. Il est absolument nécessaire de ne pas céder au lobby pharmaceutique.

Sanofi est en train de licencier à tour de bras dans des sites orientés vers la recherche que je connais bien, puisqu’ils sont implantés dans le Val-de-Marne, tout en versant des dividendes à ses actionnaires, au détriment de la recherche pour le bien-être des patientes et des patients et de l’approvisionnement en médicaments.

Comme le rappelait voilà quelques jours l’association UFC-Que Choisir, les pénuries explosent : plus de 1 200 médicaments étaient concernés en 2019, et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé prévoit le double pour 2020, notamment du fait de la crise sanitaire.

Au-delà des ruptures, c’est la durée d’attente qui est inquiétante. En 2017, les usagers ont dû attendre en moyenne quatorze semaines avant de constater un retour à la normale de l’approvisionnement de leurs médicaments. Les vaccins sont les plus touchés : ils sont en moyenne indisponibles pendant 179 jours, soit près de six mois. En 2020, la durée médiane des ruptures d’approvisionnement en officine a été de huit mois. Ici, au Sénat, nous avons fait des rapports extrêmement intéressants sur la pénurie des médicaments, accompagnés de recommandations bien plus drastiques que ce que nous avons voté dans le cadre de l’amendement précédent et ce que nous nous apprêtons à voter.

J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur ce point : veillons à la mise en œuvre d’une maîtrise publique. La possibilité, pour le Gouvernement, d’intervenir constitue une arme. Je suis donc défavorable, avec l’ensemble de mon groupe, à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce que vous nous proposez, ma chère collègue, c’est une dérégulation : on retire à l’État sa capacité d’arbitrage. Je ne pense pas que l’État soit bête au point de tordre le cou des industries du médicament, en ne tenant absolument pas compte de leurs arguments. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre l’intérêt général et la production et l’innovation sur notre territoire. Considérer que l’État n’a plus rien à voir dans cette affaire, c’est quand même très dangereux en cette période.

On peut certes réfléchir sur l’avenir de la stratégie industrielle du médicament en France. Il y a certainement des choses à faire. On peut débattre de la durée entre la fin de la recherche et la mise en vente du produit.

La réalité, c’est l’existence d’aides en faveur de la recherche et l’innovation. Le crédit d’impôt recherche est particulièrement utilisé par l’industrie du médicament. Cela l’empêche-t-elle de délocaliser ? Malgré le CICE et le crédit d’impôt recherche, elle délocalise non pas simplement la production dans des pays à bas coût, mais aussi ses laboratoires de recherche et développement. Il n’y en a jamais assez ! Il faut encore remettre de l’argent et de la dérégulation et les laisser gérer les prix, tout ça payé par la sécurité sociale, qui est ensuite déficitaire !

C’est tout de même le rôle de l’État d’être l’arbitre, en dernier ressort, entre l’industrie et l’intérêt général. Je ne comprends pas que, dans la période actuelle, pleine d’incertitudes, notamment pour ce qui concerne la manière dont les marchés régulent l’approvisionnement des médicaments et l’implantation de la production, vous proposiez d’abandonner cette régulation.

Pour notre part, nous sommes favorables à un pôle public du médicament, et nous aurons un débat sur ce sujet.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. C’est toujours le même discours…

Avec cet amendement, il s’agit simplement de négociations conventionnelles entre le CEPS – s’il n’a pas de lien avec le Gouvernement, je me demande qui peut en avoir… – et les syndicats des entreprises pharmaceutiques.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai donné l’avis de la commission, qui est un avis favorable.

Personnellement, j’entends bien ce que dit Mme Lienemann. Le contenu de l’accord-cadre, qui n’a d’ailleurs qu’une existence facultative, est de normer le plus légèrement possible les négociations entre l’industriel et le CEPS au moment de la définition des remises. Il ne me paraît pas souhaitable d’y faire figurer un élément susceptible d’infléchir a posteriori le montant de ces dernières.

Il convient de remettre les choses en place. Chacun son rôle ! Est-ce à l’accord-cadre de définir ce qui relève de l’impôt ? Car les exonérations relèvent effectivement de l’État et, donc, du Gouvernement.

Pour autant, je m’en remets à la commission, n’ayant pas la science infuse. Dans la mesure où il s’agit d’un sujet délicat et compliqué, j’écoute les uns et les autres. Toutefois, à un moment donné, il faut bien trancher. Ce qui existe aujourd’hui me paraît de qualité. On peut toujours l’amender, si vous le voulez, mais faites attention à ne pas modifier les responsabilités.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Je réitère l’avis défavorable du Gouvernement.

Le texte proposé dans l’article dont nous discutons prévoit que le taux d’abattement sera fixé par un barème déterminé par voie d’arrêté. Celui-ci permettra seulement de cadrer dans les grandes largeurs, par des fourchettes, ce taux d’abattement, qui doit rester, cela nous semble important, fixé par la loi. Il donnera de la clarté et de la prévisibilité, conformément aux attentes des entreprises.

Pour autant, une souplesse dans la modulation des taux d’abattement sera conservée, pour chaque entreprise pharmaceutique concernée par le déclenchement de la clause de sauvegarde. Ainsi, ces taux seront bien fixés au travers de négociations conventionnelles entre les syndicats représentatifs des entreprises du médicament et le Comité économique des produits de santé.

Comme le dit M. le rapporteur général, chacun son rôle. L’équilibre actuel, qui nous semble le bon, ne doit pas être modifié.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 217 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Savary et Bascher, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Boré, Bouchet, Brisson, Calvet, Cardoux, Chaize, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos et Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mmes Di Folco, Estrosi Sassone et Férat, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mmes Gruny et Lavarde, MM. Le Gleut, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Muller-Bronn et MM. Paccaud, Pellevat, Piednoir, Pointereau, Rapin, Sautarel, Savin, Sido, Sol, Tabarot et Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le III de l’article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ce rapport inclut un état des lieux de l’industrie du médicament et des produits de santé en France, indiquant notamment le nombre d’emplois créés et supprimés dans l’année, ainsi que les éventuelles ouvertures et fermetures de sites industrie. »

La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Le CEPS doit inclure, dans son rapport d’activité, des éléments supplémentaires.

Nous avons entendu le plaidoyer de Mme Lienemann, qui n’a pas tort. Si les laboratoires pharmaceutiques se sont éloignés de la France, c’est parce que les discussions n’aboutissaient pas, ce qui nuisait à la rentabilité économique. On allait voir ailleurs, où on était mieux rémunéré.

Il nous paraît donc important que le CEPS, qui fixe le prix des médicaments, la clause de sauvegarde et les remises, prenne en compte les efforts des entreprises qui ont leur siège social en France et qui créent des emplois. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que figurent au sein de son rapport annuel d’activité un certain nombre d’explications concernant ses décisions. Ces dernières doivent tenir compte du nombre d’emplois créés ou supprimés dans l’année, ainsi que des éventuelles ouvertures et fermetures de sites industriels. Dans le cadre de la crise sanitaire actuelle, il paraît logique que ces éléments soient pris en considération.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis de la commission est plutôt favorable, mais je demande, une fois n’est pas coutume, l’avis du Gouvernement sur cet amendement, qui vise à préciser le contenu du rapport remis chaque année au Parlement par le Comité économique des produits de santé en demandant qu’y soient inclus des éléments relatifs à la politique industrielle du médicament. L’enjeu est de taille – René-Paul Savary vient de le rappeler – s’agissant de la localisation, des fermetures et des ouvertures de sites industriels.

Il serait intéressant de savoir, monsieur le secrétaire d’État – j’espère que vous pourrez nous donner des éclaircissements –, si le CEPS est ou non le bon véhicule. Il est en tout cas important, dans la phase actuelle, de pouvoir disposer d’un état des lieux sur l’avenir de l’industrie pharmaceutique.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le CEPS ne nous semble pas le bon véhicule pour aborder ce sujet crucial, qui est une priorité du Gouvernement. Cette instance, vous le savez, a pour mission, fixée par la loi, de déterminer les prix des médicaments et les tarifs des dispositifs médicaux à usage individuel pris en charge par l’assurance maladie. Il nous semble donc que les éléments supplémentaires que vous souhaitez voir figurer dans son rapport dépassent largement la mission qui lui a été confiée.

Si je dis « largement », c’est parce que ce sujet crucial doit faire l’objet d’une approche globale qui va bien au-delà des seules compétences et du seul champ d’intervention du CEPS. Cette question relève davantage des compétences du ministre de l’économie, qui, au nom du Gouvernement, a d’ores et déjà pu faire adopter un certain nombre de mesures, depuis le début du quinquennat, pour favoriser l’implantation des entreprises en France.

L’implantation des entreprises en France ne dépend pas que du niveau auquel est fixé le prix des médicaments ; il ne faudrait pas qu’un tel amalgame s’instaure : elle dépend de beaucoup d’autres facteurs, des financements offerts aux projets de recherche, par exemple, des mesures prises en soutien aux essais cliniques, du crédit d’impôt recherche ou encore des questions de main-d’œuvre et des taxes applicables aux entreprises, autant de champs sur lesquels le Gouvernement est intervenu, depuis le début de ce quinquennat, pour soutenir les industries en France.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si j’ai bien compris, monsieur le secrétaire d’État, vous nous dites que le Comité économique des produits de santé ne peut pas fournir à notre intention les éléments que nous cherchons à recueillir. En conséquence, il ne s’agit pas du bon véhicule. Mais il faut nous dire quel est le bon véhicule ! Si c’est Bercy, dont acte ! Mais nous aimerions que Bercy nous communique ces éléments.

Jusqu’à présent, nous n’avons pas le sentiment que tout soit clair et net. C’est pourtant très important. Les interrogations sont nombreuses, aujourd’hui, sur les pénuries de médicaments notamment, sans parler des autres dispositifs médicaux. Nous souhaiterions donc savoir où trouver ces informations, si vous en disposez.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Merci, monsieur le rapporteur général, de rester fidèle à votre engagement et de continuer à soutenir cet amendement.

J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État : le CEPS n’est certainement pas le bon véhicule. Mais j’ai l’impression que, ce soir, vous recourez à cet argument sur beaucoup d’amendements…

Que nous disent les laboratoires quand nous les rencontrons ? Catherine Deroche le sait tout aussi bien que moi, puisque, travaillant activement, nous avons notamment organisé, avec Corinne Imbert, avec d’autres, un certain nombre d’auditions de biotechs, grandes et petites, et essayé de promouvoir des dispositifs comme celui de l’utilisation testimoniale – vous voyez que nous essayons.

Or que nous disent ces sociétés ? Qu’en France elles rencontrent des difficultés, du point de vue de la recherche notamment. Ailleurs, des milliards sont mis sur la table pour la recherche ; en France, le compte n’y est pas. Souvent, quand une société française trouve une molécule, les essais cliniques sont devenus d’une complexité telle qu’elle les fait faire dans d’autres pays. Si on ajoute à ce tableau l’intervention très serrée du CEPS, dont la vision est strictement économique – on peut le comprendre, il est payé pour ça : faire des économies pour la sécurité sociale –, le résultat auquel on parvient est que ces entreprises vont s’installer ailleurs.

Il s’agit souvent de multinationales ; même lorsque le siège est en France, le dirigeant français finit par se dire, après qu’il est allé frapper à la porte d’autres pays où il voit que les choses se passent différemment : « En France, c’est trop compliqué ? Alors, délocalisons ! » Et la tarification fixée par le CEPS entre en ligne de compte dans les critères utilisés par ces entreprises pour décider si elles restent ou non en France. L’arbitrage dépasse en effet largement le cadre français, et même le cadre européen : il est mondial.

Il faut donc aller plus loin, et trouver le bon véhicule. Je souhaite malgré tout que cet article soit amendé afin que la discussion puisse avoir lieu en commission mixte paritaire et qu’on nous dise quelles perspectives on peut avoir pour l’avenir s’agissant de faire cesser ce départ d’entreprises vers d’autres pays.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Vous pouvez tout à fait adopter cet amendement et demander au CEPS d’inclure dans son rapport tous ces éléments, mais, sans vouloir parler pour lui, il ne sera tout simplement pas en mesure de vous faire un état des lieux exhaustif de l’impact de la politique du médicament, car il n’en aura qu’une vision parcellaire.

Ce dont nous parlons relève bien du prix, mais pas uniquement : il y va également – vous l’avez dit vous-même –, plus globalement, de la politique de recherche que nous menons. Certains éléments concernent le CEPS, d’autres concernent le ministère que je représente aujourd’hui, celui des solidarités et de la santé, d’autres encore le ministère de l’économie et des finances – un certain nombre de dispositions, d’ailleurs, se trouvent plutôt dans le projet de loi de finances que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette politique se trouve donc en différents endroits.

Je me garderai bien de donner des conseils à la Haute Assemblée, mais elle dispose, me semble-t-il, d’un certain nombre d’instruments, d’outils, d’évaluation des politiques publiques menées par le Gouvernement. La commission des affaires sociales peut ainsi déclencher des missions d’information pour avoir un regard sur cette question, qui est importante et qui constitue, je l’ai dit, une priorité du Gouvernement.

Je dis simplement, en tout cas, que le CEPS ne sera pas en mesure de vous donner l’ensemble des informations dont vous souhaitez disposer, car ce sujet dépasse très largement son seul champ de compétences, c’est-à-dire la question du prix des médicaments.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Notre collègue Savary pose une question tout à fait importante. Le bon vecteur est-il celui qu’il propose ? Ce n’est pas certain. Néanmoins, autant je suis critique sur toute une série de régulations et sur le rôle de l’État en général, autant je pense que nous devons réfléchir, dans ce pays, à des stratégies de filière pour le médicament. Bien sûr, dans certains cas, seul est en cause l’appât du gain – on connaît ça… –, mais il existe aussi des blocages, qu’il faut analyser – certains ont été cités.

J’espère que le haut-commissaire au plan, M. Bayrou, va s’attaquer à des débats comme celui-ci : comment planifier la filière du médicament en France ? Comment lui donner tous les moyens de se développer, de ne pas délocaliser, et même de relocaliser ? Il y a là des sujets majeurs.

Il est vrai néanmoins que, parmi d’autres critères, celui des conditions de la recherche notamment, il y a le critère du prix. Or je ne suis pas sûre que l’obsession du moindre coût du médicament, indifféremment produit en France ou ailleurs, donne toujours le bon résultat. Là où il s’agit de construire des systèmes d’évaluation et de fixation des taux de remboursement et des prix, il me semble qu’avec un peu d’ingéniosité, sans tomber dans le protectionnisme étroit, on pourrait quand même, du point de vue des remboursements, favoriser un juste prix pour ce qui est produit en France et être plus exigeant pour ce qui ne l’est pas. Or, paradoxalement, c’est plutôt l’inverse qui se passe : comme on nous dit que les autres pays ne veulent pas nous vendre à moins de nous vendre cher, nous acceptons de payer cher à l’importation et nous serrons le kiki aux entreprises françaises.

C’est un travail assez pointu qui doit être entrepris ; il nécessite des outils publics de précision, au plus près des entreprises partenaires.

Je ne crois pas que l’adoption de l’amendement de M. Savary puisse régler tous ces problèmes ; je le prends comme un amendement d’alerte. Il faut, collectivement, le Gouvernement, le haut-commissaire au plan, l’ensemble de celles et de ceux qui espèrent maintenir et développer une filière du médicament dans ce pays, se mettre autour de la table pour trouver une solution avec les partenaires sociaux. Je note d’ailleurs que, dans la structure proposée, les partenaires sociaux sont quasi absents : les salariés, ça n’existe pas… C’est déjà une carence ! En tout cas, l’enjeu est extrêmement important et urgent.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, pour explication de vote.

Mme Martine Berthet. Je soutiendrai cet amendement. Si une évaluation dans le cadre du rapport du CEPS ne réglera pas tout, celui-ci n’étant pas forcément en mesure de tout prendre en compte, ce sera déjà, néanmoins, un premier pas, qu’il est important de faire. Cessons de nous contenter de dire que nous ne voulons plus voir nos industries pharmaceutiques délocalisées, et donnons des signaux !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 355 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17, modifié.

(Larticle 17 est adopté.)

Article 17
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 287 rectifié quinquies,

Articles additionnels après l’article 17

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 607 rectifié ter, présenté par Mmes Monier, Blatrix Contat, Jasmin, Préville et Conway-Mouret et MM. Tissot, Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1,75 % » est remplacé par le taux : « 1 % ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Victoire Jasmin.