M. André Reichardt. Très bien !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Quant aux pouvoirs du maire, je vous sais gré d’avoir ajouté dans votre propre texte, via une lettre rectificative, quelques dispositions à celles qui y figuraient initialement. Je serais heureux que vous acceptiez les propositions que nous avons formulées et d’ores et déjà intégrées au texte de la commission des lois pour renforcer l’autorité des maires, leurs pouvoirs de police et leur capacité à lever des amendes administratives sans passer par la procédure pénale, pour développer les polices intercommunales – c’est une liberté locale qu’il nous faut fortifier – et pour mieux protéger les élus lorsqu’ils sont menacés ou font l’objet d’agressions. Il est absolument nécessaire que les maires soient confortés par rapport à toutes ces incivilités et à toutes ces violences qui aujourd’hui accablent certains d’entre eux.

Le Gouvernement a eu deux ans, monsieur le ministre, pour réfléchir. Vous nous demandez une année supplémentaire pour franchir une étape dans le développement des libertés locales, en invoquant toute la difficulté technique qu’il y aura à poser de nouvelles règles pour les départements et les régions. En ce qui nous concerne, nous sommes prêts. J’ai déposé avec Mathieu Darnaud et Bruno Retailleau des textes, prévoyant même un socle constitutionnel. Nous souhaitons pouvoir en débattre très rapidement. Pourquoi vous faut-il tant de temps pour réfléchir alors que la question des libertés locales est aujourd’hui cruciale, comme vous l’avez vous-même expliqué il y a un instant ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Mathieu Darnaud, rapporteur.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je voudrais réagir aux propos de M. le ministre.

S’agissant de l’utilisation de l’expression « copier-coller », monsieur le ministre, j’ai simplement dit, sans aucun esprit polémique, que nous devions faire front commun et que les travaux du Sénat allaient un peu plus loin que le texte proposé par le Gouvernement.

La commission a estimé qu’il fallait donner davantage de souffle à ce projet de loi. On ne peut nous reprocher un manque de pragmatisme, voire de plasticité. Pour ne prendre que le seul exemple de la délégation que le Gouvernement a souhaité introduire pour la compétence eau et assainissement, nous avons dit « chiche ! » à son extension à d’autres compétences, considérant qu’il s’agissait peut-être là de la souplesse et de la capacité d’adaptation qu’appellent de leurs vœux nombre d’élus de nos territoires. Je m’empresse d’indiquer à l’adresse de certains de nos collègues socialistes que, sans opposer les tenants de l’intercommunalité à ceux de la commune, il apparaît nécessaire de mettre de l’huile dans les rouages. Je l’ai souligné dans la discussion générale, nos rapports se fondent sur un constat partagé par nombre d’élus sur les territoires. Notre collègue Max Brisson a cité l’exemple de sa communauté d’agglomération, qui compte 158 communes : on voit bien qu’il y a, dans le fonctionnement quotidien, dans la gouvernance, dans la gestion de certaines compétences, une visée stratégique et une visée de proximité.

Pour notre part, nous essayons d’être pragmatiques. Françoise Gatel et moi-même appelons à un souffle nouveau, le souffle de l’audace. Ce texte ne doit pas se résumer à une simple boîte à outils ; il doit nous permettre d’aller plus loin pour résoudre certaines difficultés qui marquent très clairement, en termes de gouvernance et d’exercice des compétences, les limites de l’intercommunalité telle qu’elle fonctionne aujourd’hui. Le temps est venu du second souffle, qui passe par plus de souplesse et une plus grande capacité d’adaptation aux problématiques locales. C’est un pont que nous jetons vers le futur projet de loi relatif à la décentralisation, à la différenciation territoriale et à la déconcentration. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je lève le gage sur un certain nombre d’amendements relatifs à la participation à l’Agence France locale.

Le ministre n’étant pas présent en commission des lois, j’ai souhaité que le Gouvernement dépose un certain nombre d’amendements pour que nous puissions avoir un débat libre et éclairé sur certains sujets, notamment celui de la délégation.

Par ailleurs, monsieur le président de la commission des lois, s’il est facile de voter certaines dispositions pour créer de la liberté, cela impose aussi de recalculer l’intégration fiscale et les dotations.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Oui, c’est logique, mais il n’y a plus personne ensuite pour expliquer et défendre de telles mesures sur le terrain ! (Mme le rapporteur proteste.) La neutralisation du coefficient d’intégration fiscale, le CIF, appelle la fin de l’intercommunalité telle qu’on la connaît aujourd’hui. C’est donc une réforme profonde que vous proposez ! Nous aurons en tout cas ce débat. Je serais d’ailleurs curieux de savoir ce qu’en pensent certaines associations d’élus…

Ma volonté, monsieur le président de la commission des lois, n’est pas de fermer la porte à un certain nombre de libertés. Je souhaite simplement que le débat puisse avoir lieu. Lors de l’élaboration de la loi NOTRe, si les impacts financiers et budgétaires avaient été examinés avec davantage de prospective, un certain nombre d’élus n’auraient peut-être pas constaté des variations aussi brutales de la DGF que celles que déplore à juste titre M. Duplomb. En effet, quand une commune a changé d’intercommunalité pour en rejoindre une plus riche, sa DGF diminue. Mais ce sont les mêmes critères qui sont en vigueur depuis quarante ans.

En ce qui concerne les pouvoirs de police du maire, vous avez rappelé, monsieur le président Bas, que la commission des lois a enrichi le texte. Quant à la décentralisation, ne soyez pas impatient : la dernière loi de décentralisation remonte à 2003. Vous exerciez d’ailleurs déjà des fonctions éminentes à cette époque, puisque vous étiez secrétaire général de la présidence de la République ! Il n’y a pas eu d’autre loi de décentralisation depuis. La commission des lois a commis quelques propositions de loi organiques ou constitutionnelles. J’imagine que c’est pour les verser au débat que nous allons avoir. Un an pour réfléchir à la place de l’État, à la coordination du bloc départemental, du bloc régional et du bloc communal, ce n’est pas trop. Je crois d’ailleurs savoir que, même au sein de cet hémicycle, le débat n’a pas encore eu lieu, puisque les propositions de loi que j’évoquais n’ont pas encore été examinées par le Sénat. Nous serons heureux, avec Jacqueline Gourault, de pouvoir y participer le moment venu !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Merci !

Mme la présidente. Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 744 rectifié

Article additionnel avant le titre Ier

Mme la présidente. L’amendement n° 745 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mme Gréaume, M. Collombat, Mme Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

I. – Avant le titre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le livre Ier de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 3111-… ainsi rédigé :

« Art. L. 3111-– La République reconnaît les départements comme division territoriale essentielle, inhérente à l’organisation administrative et politique française et nécessaire à son bon fonctionnement, notamment par leurs compétences en matière de solidarités et leur soutien aux communes. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Titre préliminaire

Le rôle des départements

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à consacrer le rôle du département comme division administrative française, afin de le protéger.

La loi NOTRe a déjà retiré la clause de compétence générale aux départements et transféré un grand nombre de leurs compétences aux régions, notamment en matière de transport et de développement économique. Les élus s’inquiètent à juste titre de la future réforme de la fiscalité locale, qui portera un nouveau coup dur aux départements et à leur autonomie.

Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit d’ôter aux départements leur dernier levier en matière de fiscalité locale, la taxe sur le foncier non bâti, supprimant ainsi tout lien entre les citoyens et les finances des départements. En tant qu’élue régionale, je puis vous assurer que quand une collectivité n’a quasiment plus aucune marge de manœuvre en termes de fiscalité, le lien entre elle et les citoyens s’affaiblit fortement !

Le rôle du département ne doit pas se réduire aux questions sociales, comme on l’entend souvent dire, puisqu’il est né d’une volonté de rapprocher les administrés de l’administration : il a été conçu afin que nul citoyen ne soit éloigné de plus d’une journée à cheval de la préfecture. Il doit rester un échelon adapté à la mise en œuvre des solidarités territoriales et à l’accompagnement en termes d’ingénierie.

Monsieur le ministre, j’ai parfois tendance, entre autres défauts, à faire à la fois les questions et les réponses. Vous avez indiqué tout à l’heure que la question des départements et des régions serait traitée dans un autre texte. Or parler de la commune, c’est aussi parler du lien entre l’État et les différentes collectivités. Pourquoi, par conséquent, repousser ce débat aux calendes grecques ou à même à 2020 ? Il me paraît pertinent de réaffirmer d’ores et déjà, au travers du présent texte, la place du département.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement empreint d’empathie à l’égard des départements relève d’une simple déclaration de principes et n’a pas de valeur normative. Mue par la volonté de privilégier la sobriété et l’efficacité de la loi, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Madame la sénatrice, j’ai cru comprendre qu’il s’agissait là d’un amendement d’appel. Oui, le Gouvernement croit en la strate départementale. Les conseils départementaux ont un avenir. Dans cette optique, il faut trouver des solutions sur le plan financier. Je ne partage pas complètement votre opinion sur la réforme de la fiscalité. L’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, ou le revenu de solidarité active, le RSA, sont des dépenses dynamiques, pour des raisons structurelles dans le premier cas, conjoncturelles dans le second. Vous qui êtes élue régionale, vous n’ignorez pas que les régions ne voulaient pas de la TVA il y a quelques années. Aujourd’hui, aucune ne songerait à y renoncer ! Affecter un impôt national aussi dynamique que la TVA aux conseils départementaux est plutôt une bonne idée à mon sens, mais nous aurons l’occasion d’en parler lors de l’examen du projet de loi de finances.

En tout état de cause, ne souhaitant pas émettre un avis défavorable sur un amendement qui parle à mon cœur, puisque j’aime la strate départementale, j’en demande le retrait. Ces questions pourront être mieux examinées lors de la discussion du projet de loi que présentera Jacqueline Gourault.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le ministre, mon objectif est de parler non pas à votre cœur, mais à votre raison, car nous sommes ici pour faire la loi, hors de toute passion ! (Sourires.)

Nous ne partageons pas votre vision du devenir de la fiscalité ; nous y reviendrons lors de l’examen du projet de loi de finances. Libre à vous d’estimer que la TVA est un impôt juste ; ce n’est pas notre cas.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce n’est pas ce que j’ai dit : il est dynamique !

Mme Cécile Cukierman. Pour ma part, je ne suis pas de ceux qui souhaitent que l’on remplace un impôt dynamique par un autre, certes lui aussi dynamique, mais totalement injuste !

Madame la rapporteure, votre réponse m’étonne quelque peu. J’ai souvenir que, lors de la discussion de la loi Maptam ou de la loi NOTRe, nous avions entériné, afin de permettre l’adoption finale de ces textes modifiés par le Sénat, un certain nombre de principes pour réaffirmer la place de la commune ou la libre administration des collectivités territoriales dont la portée législative n’était guère évidente. Comme l’a rappelé la semaine dernière M. le président de la commission des lois, certaines choses vont mieux en les disant !

Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, je vais retirer cet amendement, en vous donnant rendez-vous pour l’examen du projet de loi de Mme Gourault. Nous verrons alors quel sort vous entendez réserver aux départements. Bien que laïque, je suis comme saint Thomas : je ne crois que ce que je vois !

Mme la présidente. L’amendement n° 745 rectifié bis est retiré.

TITRE Ier

LIBERTÉS LOCALES : CONFORTER CHAQUE MAIRE DANS SON INTERCOMMUNALITÉ

Chapitre Ier

Le pacte de gouvernance : permettre aux élus locaux de s’accorder sur le fonctionnement quotidien de leur EPCI

Article additionnel avant le titre Ier - Amendement n° 745 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 746 rectifié bis

Articles additionnels avant l’article 1er

Mme la présidente. Les amendements nos 179 et 180 rectifié, faisant l’objet d’une discussion commune, ne sont pas soutenus, non plus que les amendements nos 174, 175 et 177.

L’amendement n° 744 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mme Gréaume, M. Collombat, Mme Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République est abrogée.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet après-midi, plusieurs intervenants ont fait référence à la loi NOTRe, certains vantant ses mérites, d’autres dénonçant ses effets néfastes pour nos collectivités. Pour notre part, en parfaite cohérence avec nos positions passées, nous avons déposé cet amendement visant à l’abroger.

Cette loi marque le paroxysme des politiques menées depuis la fin du XXe siècle, et plus particulièrement ces dernières années, en matière de décentralisation, après la loi de 2010 de réforme des collectivités territoriales et la loi de 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Ses dispositions ont dénaturé radicalement l’esprit ayant présidé à la création des EPCI : mettre en œuvre une intercommunalisation volontaire au service des communes, en complément du triptyque républicain communes-départements-régions.

L’application de la loi NOTRe a eu des conséquences néfastes pour le bon fonctionnement des collectivités territoriales, avec une intercommunalisation à marche forcée écrasant les communes pour créer des EPCI géants dont le périmètre n’a parfois aucune pertinence et dépouillant les communes de compétences qui leur tenaient pourtant à cœur et dont elles pouvaient assurer le bon exercice.

Dans le même temps, cette loi a révélé un désir de réduire, progressivement mais sûrement, la place des départements, qui ont perdu leur clause de compétence générale et vu nombre de leurs compétences passer aux mains des régions. Les gouvernements successifs menant ces politiques ne rêvent que de grandes régions européennes et de métropoles.

Aux contours naturels des territoires se sont substitués de grands ensembles irrationnels. Au libre transfert de compétences par les communes ont succédé des transferts forcés, au détriment du lien de proximité avec les citoyens qu’assuraient des élus désormais dépités, fatigués, démunis !

Nous refusons la politique de rafistolage du Gouvernement. Bien qu’il semble avoir compris que la voie ouverte par la loi NOTRe est profondément mauvaise, il ne propose que des modifications à la marge. Nous lui demandons aujourd’hui, ainsi qu’au Sénat, de prendre ses responsabilités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement procède effectivement d’une grande cohérence, mais il est quelque peu disruptif… On reconnaît bien là l’audace des sénateurs, parfois sous-estimée !

Cet amendement vise à demander l’abrogation de la loi NOTRe ; on ne peut pourtant pas dire que le roi est nu ! Les élus locaux ne veulent plus de big-bangs territoriaux. Certains d’entre eux sont insatisfaits, certes, mais il est nécessaire d’avancer. Les trois années d’efforts considérables de réorganisation qu’ils ont consentis ne doivent pas être vaines. Il faut desserrer l’étau, assouplir et aller un peu plus loin, monsieur le ministre.

Même si je partage un certain nombre de vos constats, madame la sénatrice, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Là encore, il s’agit à mon sens d’un amendement d’appel visant à orienter la réflexion. J’en appelle cette fois à votre raison, et non à votre cœur, madame la sénatrice : abattre d’un coup de hache la loi NOTRe créerait une insécurité juridique. Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable, dans l’hypothèse où cet amendement ne serait pas retiré.

Mme Éliane Assassi. Je retire cet amendement d’appel, madame la présidente.

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 744 rectifié
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article 1er (début)

Mme la présidente. L’amendement n° 744 rectifié est retiré.

L’amendement n° 746 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mmes Gréaume et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Conformément à l’article 37-1 de la Constitution et pour une durée maximale de trois ans, le représentant de l’État dans le département, ou le préfet de police à Paris, peuvent expérimenter, dans les départements et régions volontaires, pour un maximum de deux régions et de six départements, la mise en place d’un comité d’évaluation des politiques de décentralisation depuis la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions. Les membres de ce comité ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à son fonctionnement ne peut être pris en charge par une personne publique.

II. – Cette expérimentation permet de faire un bilan des politiques de coopération intercommunale en analysant les conséquences en termes de services publics, de contrôle des citoyens sur l’action publique et d’efficacité financière, sociale et organisationnelle.

III. – Cette expérimentation donne lieu à un rapport permettant d’apprécier l’opportunité de telles politiques imposant aux communes la coopération intercommunale et des transferts obligatoires de compétences.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Comme je l’ai souligné lors de la discussion générale, ce projet de loi marque tout de même un point d’arrêt par rapport à un certain nombre de lois précédentes visant en réalité à dévitaliser l’échelon communal, sous couvert de décentralisation.

Nous souhaitons qu’un point soit fait sur les politiques de décentralisation conduites depuis les années quatre-vingt dans notre pays. Dans cette optique, le présent amendement vise à permettre leur évaluation par la voie de l’expérimentation dans les départements et les régions.

Cela nous paraît nécessaire avant de légiférer de nouveau. Il convient en effet de ne pas naviguer à l’aveugle, sachant que rien aujourd’hui ne nous permet d’affirmer que les politiques successives d’intercommunalisation à marche forcée répondent effectivement aux enjeux.

Vous parlez de lever les irritants de la loi NOTRe, monsieur le ministre, mais nous demandons davantage pour notre part. Il nous paraît nécessaire d’étudier la mise en œuvre des différentes lois que j’évoquais pour comprendre comment ont pu apparaître ces fameux irritants, qui ne sont pas simplement issus de la loi NOTRe. Il conviendrait également de savoir ce que ces politiques ont apporté aux citoyens, aux élus, aux collectivités et in fine à la République.

À l’heure où le Gouvernement souhaite rationaliser les services publics en coupant dans les moyens et dans les effectifs, pouvez-vous nous dire si les conséquences financières de ces politiques ont été positives ? Peut-on parler de mesures efficaces au vu de la complexité de la répartition des compétences ? La mandature qui s’achèvera au mois de mars prochain a été marquée à cet égard par un grand chamboule-tout institutionnel.

Nous nous intéressons aussi aux conséquences sociales et culturelles de ces réformes, ainsi qu’au vécu des élus et des administrés. Nous ne pouvons rester inactifs devant le découragement des élus et les fractures territoriales qui s’amplifient.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ma chère collègue, l’appel à l’évaluation est entendu par tous, me semble-t-il. Nous devrions d’ailleurs pratiquer cet exercice plus régulièrement. Toutefois, votre proposition de créer des comités d’évaluation expérimentaux de la mise en œuvre des lois de décentralisation intégrant des préfets me semble satisfaite : n’est-ce pas le rôle du Parlement d’évaluer et de contrôler ? Le président de la commission des lois a d’ailleurs mis en place une mission d’évaluation des lois d’organisation territoriale. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Madame Cukierman, l’amendement n° 746 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Cécile Cukierman. Je ne le retire pas.

J’entends ce que vous dites sur le rôle du Parlement, madame la rapporteure. Loin de nous l’intention de le fragiliser dans son action de contrôle et d’évaluation, d’autant que l’on pourrait faire beaucoup mieux. Nous pourrions, par exemple, revoir comment l’on entend collectivement, du côté tant du Parlement que du Gouvernement, cette mission de contrôle.

Je me permets d’insister sur l’objet premier de cet amendement, qui est d’organiser une expérimentation au sein des collectivités territoriales, en associant l’ensemble des acteurs qui ont apprécié ou subi, selon les cas, les différentes lois de décentralisation. Le dispositif de cet amendement ne s’oppose pas au rôle du Parlement. Il pourrait au contraire en être tout à fait complémentaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 746 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 746 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique
Article 1er (interruption de la discussion)

Article 1er

I. – La section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :

« Sous-section 3

« Relations entre les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et leurs communes membres

« Art. L. 5211-11-1. – I. – Après chaque renouvellement général des conseils municipaux ou une opération prévue aux articles L. 5211-5-1 A ou L. 5211-41-3, le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre inscrit à l’ordre du jour de l’organe délibérant un débat et une délibération sur l’élaboration d’un pacte de gouvernance entre les communes et l’établissement.

« Si l’organe délibérant décide de l’élaboration d’un pacte, il l’adopte dans un délai de neuf mois à compter du renouvellement général ou de l’opération prévue au premier alinéa du présent I, après avis des conseils municipaux des communes membres.

« II. – Le pacte détermine :

« 1° Dans les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, s’il est créé une conférence des maires telle que mentionnée à l’article L. 5211-11-2 ;

« 2° Le cas échéant, la composition et les modalités de fonctionnement de la conférence des maires ;

« 3° Les modalités de mutualisation de services entre les services de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et ceux des communes membres afin d’assurer une meilleure organisation des services ;

« 4° Les conditions dans lesquelles est mis en œuvre l’article L. 5211-57 ;

« 5° Éventuellement, les missions, la composition et les modalités de fonctionnement des commissions créées dans les conditions prévues aux articles L. 2121-22 et L. 5211-40-1.

« III. – Le pacte peut prévoir :

« 1° Les conditions dans lesquelles l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut, par convention, confier la création ou la gestion de certains équipements ou services relevant de ses attributions à une ou plusieurs de ses communes membres. La convention répond aux mêmes exigences que celles prévues à l’article L. 1111-8 ;

« 2° Les conditions dans lesquelles le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut déléguer au maire l’engagement de certaines dépenses d’entretien courant d’infrastructures ou de bâtiments communautaires. Dans ce cas, le pacte fixe également les conditions dans lesquelles le maire dispose d’une autorité fonctionnelle sur les services de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, dans le cadre d’une convention de mise à disposition de services.

« IV. – La modification du pacte suit la même procédure que son élaboration.

« Art. L. 5211-11-2. – I. – La conférence des maires est une instance de coordination entre l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et les communes membres, au sein de laquelle il peut être débattu de tous sujets d’intérêt communautaire ou relatifs à l’harmonisation de l’action de ces personnes publiques.

« La création d’une conférence des maires est obligatoire dans les métropoles.

« Dans les autres établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, sa création est facultative. Toutefois, dès lors que 30 % des maires des communes membres de la communauté urbaine, de la communauté d’agglomération ou de la communauté de communes considérée en ont fait la demande par courrier adressé au président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, la création de la conférence des maires est obligatoire.

« II. – La conférence des maires est présidée de droit par le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et comprend, en outre, les maires des communes membres.

« Elle se réunit, sur un ordre du jour déterminé, à l’initiative du président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou à la demande d’un tiers des maires.

« Le présent II s’applique sous réserve des mesures prévues par le pacte de gouvernance mentionné à l’article L. 5211-11-1. »

II. – Les articles L. 5211-40 et L. 5217-8 du code général des collectivités territoriales sont abrogés.

III. – L’article L. 5832-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

« 2° bis Les articles L. 5211-11-1 et L. 5211-11-2 ; »

2° Le 4° est ainsi rédigé :

« 4° L’article L. 5211-40-1 ; ».