Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de transformation de la fonction publique
Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (interruption de la discussion)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16 bis.

L’amendement n° 250, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 4° de l’article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Du non-respect de l’engagement à servir l’État pendant une durée minimale de dix ans pour les élèves diplômés de l’École nationale d’administration ou de l’École Polytechnique. »

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Notre collègue Vincent Delahaye vient d’évoquer des conflits d’intérêts ; je poursuivrai sur cette thématique.

Nous souhaitons enrayer la pratique dite du pantouflage, en proposant que le non-respect de l’engagement à servir l’État pour une durée minimale de dix ans soit assorti de la radiation de la qualité de fonctionnaire.

Les élèves fonctionnaires sont rémunérés par l’État dès leur admission, en contrepartie de quoi ils s’engagent à servir l’État pendant dix années. Si la règle des dix ans n’est pas respectée, les élèves sont censés rembourser une partie des traitements perçus pendant leur formation.

Toutefois, cette règle n’est pas suffisamment dissuasive. Hier pratiqué en général en fin de carrière, le pantouflage s’est généralisé, dès la sortie de l’ÉNA ou de l’École polytechnique, par exemple. Les risques de conflit d’intérêts n’ont jamais été aussi nombreux !

L’encadrement, voire l’interdiction du pantouflage est ancienne, puisqu’elle fut introduite dès 1919, voilà donc un siècle ; elle a été constamment réaffirmée depuis lors. Pourtant, cette interdiction n’est absolument pas suivie d’effets. Il se dit dans certains milieux que le plus gros employeur d’inspecteurs généraux des finances publiques est non pas Bercy, mais BNP Paribas…

La violation de cet interdit légal, mais aussi éthique, est monnaie courante, accentuée par la quasi-certitude d’une totale impunité. Il s’agit désormais du déroulement normal de carrière, au point qu’il est naturel de voir figurer dans un curriculum vitae le passage dans un ministère, puis dans une entreprise – non sans lien avec ledit ministère –, puis de nouveau dans un ministère, enfin dans une entreprise. Il suffit pour s’en convaincre de pratiquer la lecture régulière du Bulletin quotidien, où figurent les nominations et recrutements.

C’est pourquoi, reprenant une des préconisations du rapport de notre excellent collègue Pierre-Yves Collombat, nous proposons une mesure simple et radicale pour enrayer ce phénomène : interdire toute forme de pantouflage, sauf à être radié de la fonction publique en devant rembourser l’ensemble des frais engendrés par la formation.

Le coût seul de la pantoufle n’est pas assez dissuasif, selon nous. Le retour dans la fonction publique après un passage par le privé constitue en effet une sorte de filet de sécurité, qui tend à encourager le pantouflage. Cela n’est pas du tout admissible !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. L’amendement qui vient d’être présenté concerne le remboursement de la pantoufle. Il s’agit d’un vrai sujet, et nous sommes en droit d’attendre des réponses du Gouvernement.

Le principe est déjà clairement posé : les fonctionnaires qui partent avant d’avoir accompli leur obligation de servir doivent rembourser leurs frais de scolarité. La durée de l’obligation de servir varie toutefois d’un corps à l’autre : elle est de dix ans pour l’École nationale d’administration, de huit pour l’École des mines, par exemple.

Le pouvoir réglementaire a apporté de premières réponses en 2017, puis 2019, notamment en empêchant les départs pendant les quatre premières années de service.

Un manque de transparence persiste toutefois. Il existe peu d’informations sur le sujet, et les dispositifs ne sont pas clairement coordonnés : le recouvrement de la pantoufle échoit, selon le cas, au ministère ou à l’école. Ainsi, les deux commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat sur la haute fonction publique ont eu de nombreuses difficultés pour investiguer sur ce point.

Je souhaite avancer sur ces sujets, mais cet amendement me pose problème. Il vise à systématiser le licenciement des fonctionnaires n’ayant pas remboursé la pantoufle, alors qu’il faudrait sans doute prendre en compte des cas spécifiques ; je pense en particulier à des problèmes de santé. En outre, il ne concerne que l’École nationale d’administration et l’École polytechnique, alors que d’autres écoles sont concernées, en particulier l’École des mines et l’École normale supérieure.

Pour ces raisons, je sollicite le retrait de l’amendement ; s’il est maintenu, j’appellerai à son rejet, au profit d’autres amendements traitant de ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Personne ne nie l’importance du sujet, mais l’avis est défavorable pour les deux raisons exposées par M. le rapporteur : le caractère systématique du licenciement et le champ partiel des écoles couvertes.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous arrivons à un moment très plaisant de cette séance… Donner du travail supplémentaire à la Haute Autorité, tout le monde est capable de le faire ; on fera des dossiers, et ainsi de suite. Mais nous voici dans le vif du sujet : les allers-retours avec le privé des hauts fonctionnaires ayant des tâches de responsabilité – car c’est pour eux que le problème se pose, pas pour l’instituteur qui ouvre une pizzeria ! (Sourires.)

Désormais, les carrières sont par morceaux : on est pendant quelques années à BNP Paribas ou à la Société générale, ensuite à la tête de la Banque de France, puis on repart. À cha peu, comme disait ma grand-mère, on finira bien par faire les dix ans… Et puis, quand on sera installé dans une banque à un bon niveau, ma foi, on pourra rembourser une partie de la pantoufle.

Évidemment, ces pratiques sont un peu gênantes pour les gens qui croient que nous sommes dans un système démocratique et qu’il y a une division des pouvoirs. Eh bien non, ce n’est pas ainsi que les choses se passent.

Je veux bien qu’on prenne toutes les précautions oratoires qu’on veut et qu’on confie toujours plus de tâches à la Haute Autorité ou à une autre instance, mais le cœur du sujet est le contrôle véritable des allers-retours des gens qui ont des postes de responsabilité – les autres, ce n’est pas important. C’est cela qui pose problème pour notre démocratie ! Or, en la matière, je ne sens pas un enthousiasme considérable de la part du Gouvernement… (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Christian Manable applaudit également.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 250.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article additionnel après l'article 16 bis - Amendement n° 250 (début)
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Discussion générale

8

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Sans que ce soit une litanie, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à respecter son temps de parole et à faire preuve de courtoisie.

plan canicule

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme Patricia Schillinger. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Cette semaine, un épisode caniculaire intense et précoce s’abat sur l’Hexagone, avec des températures supérieures à quarante degrés et des ressentis encore plus élevés.

Certes, des leçons ont été tirées du tragique été 2003. Aujourd’hui, l’ensemble des ministères et des administrations se sentent concernés et ont déjà pris des mesures de prévention, qu’il s’agisse du report des épreuves du brevet, des préconisations aux entreprises, notamment dans le BTP, ou encore du recours facilité à la circulation différenciée en cas de pollution.

Pour autant, madame la ministre, à l’échelle de toute une population, les réflexes individuels et collectifs en matière de prévention ne sont pas encore automatisés, même dans l’hémicycle, où la cravate reste de mise pour mes collègues masculins… (Sourires. – Très bien ! et applaudissements sur diverses travées.)

Aussi, pourriez-vous nous détailler les principaux éléments du plan Canicule déclenché cette semaine pour ce qui concerne la prévention, notamment les publics spécifiquement ciblés par les messages de prévention, ainsi que les mesures de mobilisation prévues pour les services de santé en cas d’afflux dans les hôpitaux et dans le secteur des services à la personne ? Comment la cellule de veille est-elle déclinée ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Schillinger, chaque année, je réunis au début de l’été, dès le mois de juin, l’ensemble des ministères concernés pour être certaine que le plan Canicule puisse être déployé.

Il y a dix jours donc, j’ai réuni ce groupe de travail au sein de mon ministère pour vérifier que l’ensemble des consignes étaient connues de tous. Aussi, cette semaine, dès que le territoire a été placé en vigilance orange, nous avons pu mettre en œuvre toutes les recommandations sur les différents lieux de vie.

Au titre des lieux de vie, je pense évidemment aux entreprises, notamment à celles du BTP et de la restauration, où nous souhaitons que soient mis en place des horaires aménagés et des lieux de rafraîchissement.

Nous demandons également que le télétravail soit favorisé.

Je pense également aux lieux de vie des enfants, qu’il s’agisse des crèches, qui ont reçu des consignes adaptées, ou des établissements de l’éducation nationale. Jean-Michel Blanquer a adressé toutes les recommandations nécessaires aux professeurs des écoles, mais aussi aux principaux des collèges et des lycées pour qu’ils prennent soin des jeunes et évitent que ces derniers ne soient exposés à la chaleur dans la journée.

Je pense par ailleurs aux lieux de sport. La ministre des sports a fait passer des consignes à toutes les associations sportives.

Nous travaillons également avec toutes les associations de lutte contre la précarité pour augmenter le nombre de maraudes et élargir les plages d’ouverture des centres d’hébergement de jour. Le ministre Julien Denormandie a demandé la création de places d’accueil de nuit – plusieurs centaines en région parisienne et à Lyon – pour permettre aux personnes de se rafraîchir la nuit.

Enfin, les établissements sociaux et médico-sociaux sont évidemment informés. Des plans bleus dans les Ehpad existent depuis 2003. Toutes les consignes sont très bien connues des personnels, et nous suivons chaque jour, via les agences régionales de santé, les hôpitaux qui seraient en tension, de façon à pouvoir les accompagner. Pour l’instant, nous n’avons pas reçu de signal d’alerte des établissements de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour la réplique.

Mme Patricia Schillinger. Je remercie la ministre de ces précisions.

En mon nom personnel et au nom de mes collègues, permettez-moi d’avoir une pensée pour nos sapeurs-pompiers et toutes nos forces de l’ordre qui subissent cette canicule de plein fouet,…

Mme Éliane Assassi. Les urgences sont en grève !

Mme Patricia Schillinger. … mais aussi tous les maires et tous les adjoints qui œuvrent dans ce domaine. (Marques dironie sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Permettez-moi, mes chers collègues, de faire un clin d’œil particulier à notre collègue Robert del Picchia (M. Robert del Picchia se lève et salue ses collègues.), qui a eu le courage de revenir parmi nous. (Applaudissements.)

suppression de l’émission soir 3

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture, mes chers collègues, en septembre dernier, Soir 3 célébrait ses quarante ans de programmation.

Depuis 1978, cette édition a réussi à s’imposer comme l’un des journaux télévisés préférés des Français, attirant près de 600 000 spectateurs en moyenne tous les soirs, avec, régulièrement, des pics de 1,5 million de téléspectateurs, pour suivre l’actualité, principalement locale. Cette situation aurait pu durer, mais c’était sans compter sur l’annonce des nouvelles orientations stratégiques de France Télévisions.

Officiellement, on parle non pas de suppression de programme, mais de transfert sur Franceinfo.

Pourtant, la disparition de l’émission Soir 3, telle que nous la connaissons tous, semble inévitable, monsieur le ministre. Rebaptisé, remodelé et repensé, le futur 23 heures n’a, à ce jour, même pas l’assurance que l’ensemble des moyens alloués au Soir 3 soient redéployés. Et pour cause, si la nouvelle édition est toujours consacrée à « l’international, l’Europe, la politique nationale, l’économie, et l’environnement », le coup de projecteur quotidien qui était mis sur nos régions et nos territoires va s’éteindre et, avec lui, une certaine idée du service public.

Dans le contexte de l’examen prochain du projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel, quel modèle souhaitez-vous défendre, monsieur le ministre ? Celui de la numérisation à tout prix et de la généralisation des chaînes d’infos à toute vitesse ? Ou serez-vous – vous connaissant, je n’en doute pas ! – à l’écoute des maires ruraux, qui ont lancé une pétition pour s’opposer à ce transfert, afin de maintenir une édition locale, proche de leur collectivité ?

Écouterez-vous le CSE, le comité social et économique, de l’établissement, qui s’est opposé hier à l’unanimité à la décision de la direction de France Télévisions, pour défendre un programme audiovisuel regardé par des téléspectateurs, notamment des seniors, qui ne se servent pas des nouvelles sources d’information ?

Enfin, écouterez-vous les usagers-citoyens qui plébiscitent leurs programmes et qui, pour beaucoup d’entre eux, vous regardent aujourd’hui ? Monsieur le ministre, vous êtes le dernier recours, et nous sommes très nombreux à compter sur vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture.

M. Franck Riester, ministre de la culture. Madame la sénatrice Delattre, l’audiovisuel public, pour lequel le Gouvernement a une grande ambition, est essentiel pour notre pays. Et nous comptons bien réaffirmer ses missions, parmi lesquelles figurent bien évidemment l’information et la proximité.

Pour autant, il appartient à la direction de France Télévisions de mettre en œuvre ses grilles de programmation dans la mesure où il existe une indépendance éditoriale évidente des chaînes.

En ce qui concerne l’information et la proximité, il est nécessaire d’adapter les programmes à l’évolution des usages de nos compatriotes, notamment à l’utilisation du numérique, mais pas seulement.

En effet, depuis un certain nombre d’années, nous le voyons, nos compatriotes s’informent de plus en plus via les chaînes d’information en continu. C’est la raison pour laquelle France Télévisions a pris la décision, voilà maintenant quelques années, de créer une telle chaîne d’information. La direction a souhaité aller plus loin dans la réorganisation des programmes en matière d’information, en sanctuarisant les deux rendez-vous sur France 3 et sur France 2 de milieu de journée et de fin d’après-midi, tout en modifiant la fin de soirée.

Aussi, elle a décidé de créer un temps fort sur Franceinfo, la chaîne d’information en continu de France Télévisions, pour muscler cette tranche d’information, qui était effectivement concentrée sur Soir 3. Cette émission commençait vers vingt-trois heures trente, voire, parfois, minuit et ne remplissait pas complètement son rôle au regard de la présence nécessaire de France Télévisions, de l’audiovisuel public, de façon très puissante, sur les créneaux de l’information de proximité et de l’information concernant l’international et l’Europe, de vingt et une heures à minuit.

Cette décision ne remet absolument pas en cause le travail formidable des équipes, mais il faut pouvoir accompagner la direction de la chaîne dans la transformation de ses programmes au service d’une meilleure satisfaction des missions de service public, …

M. le président. Il faut conclure !

M. Franck Riester, ministre. … notamment en matière d’information et de proximité. (M. François Patriat applaudit.)

M. Rachid Temal. On n’a pas compris : Soir 3 est sauvé ou non ?

avenir de general electric à belfort

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la mobilisation qui a eu lieu ce week-end à Belfort montre à quel point un énième renoncement en matière industrielle est devenu inacceptable pour une très grande diversité de nos concitoyens, les syndicats des salariés, les organisations d’employeurs, ainsi que les élus de tous bords !

Le Gouvernement répète souhaiter diminuer le nombre de salariés concernés par le plan social. Mais ce qu’il faut, c’est que la puissance publique se redonne des leviers en matière industrielle pour construire une véritable transition énergétique.

Or nous nous sommes dépossédés, un à un, de tous nos fleurons, au point que nos emplois, nos savoir-faire, notre souveraineté économique et énergétique sont aujourd’hui à la merci de dirigeants sans scrupules, pour lesquels l’accroissement des profits est la principale, pour ne pas dire l’unique boussole.

General Electric s’est engagé à créer 1 000 emplois ; vous devez lui faire respecter ses engagements, monsieur le secrétaire d’État !

Au-delà, comptez-vous obtenir un moratoire sur les suppressions d’emplois industriels, notamment dans la filière de l’énergie, qui doit être accompagné d’un plan de développement, indispensable pour assurer une véritable transition énergétique ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la sénatrice, vous nous interrogez sur la situation particulière de General Electric et, au-delà, sur celle de l’industrie et des emplois industriels.

Nous vivons, il est vrai, une période assez paradoxale. La France crée de l’emploi industriel, des usines sont ouvertes, des entreprises investissent, et c’est heureux pour l’ensemble de nos concitoyens. Malgré l’amélioration de la situation industrielle et de la compétitivité de notre pays, qui tient aussi évidemment à l’ensemble des mesures mises en œuvre par le Gouvernement pour accompagner cette compétitivité, nous rencontrons des difficultés sur un certain nombre de sites. C’est le cas pour General Electric, avec l’annonce d’un plan prévoyant des suppressions d’emplois. À cet égard, vous avez eu raison de le rappeler, le Gouvernement considère depuis le début que ce plan n’est pas suffisamment bien proportionné, car il comprend trop de licenciements, et il veut qu’il soit amélioré.

Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence et qui m’a chargé de vous répondre, l’a indiqué aux dirigeants de General Electric. Il a également dit aux représentants des organisations syndicales que l’ensemble de ses services et lui- même se tenaient à leur disposition pour les accompagner dans un dialogue qui soit le plus constructif possible. (Marques dagacement sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Il est évidemment temps que ce dialogue constructif soit ouvert entre les organisations syndicales et la direction de General Electric pour faire en sorte que la situation soit très nettement améliorée.

Le Gouvernement ne veut pas que le plan présenté par General Electric soit le prélude à une fermeture du site de Belfort.

Mme Laurence Cohen. Il faut réagir alors !

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Au contraire, nous voulons que les investissements sur le site lui permettent de bénéficier de la reprise du marché des turbines lorsque celle-ci adviendra.

Par ailleurs, le ministre de l’économie et des finances a vivement engagé General Electric à se saisir des opportunités dans l’aéronautique pour investir en vue de garantir le maintien et le développement de ce site.

Il y a encore beaucoup à faire, mais cela passera par un dialogue aussi constructif que possible entre les organisations syndicales, General Electric et le ministère de l’économie et des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme Laurence Cohen. Oh là là !

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai l’impression de ne pas vivre dans la même France que vous !

Malheureusement, le cas de Belfort n’est pas isolé : nous assistons à de prétendues améliorations des plans improprement appelés « sociaux ».

Vos propos sont de nature à beaucoup inquiéter les salariés. Et vous ne répondez pas à une question fondamentale : que faisons-nous pour construire en France une stratégie industrielle solide ? C’est sur ce point que j’interroge, au nom de mon groupe, le Gouvernement ! Dans ce cadre, nous considérons que les nationalisations temporaires, voire définitives, ne sont pas à exclure pour préserver des outils que je qualifierais de « stratégiques ». (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

situation de cinq cents mineurs dans la drôme

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Marie-Pierre Monier. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux.

Madame la ministre, à travers le pays, dans beaucoup de tribunaux, les greffières et les greffiers, chevilles ouvrières du système judiciaire français, sont en sous-effectif. Les exemples sont nombreux : au tribunal de grande instance de Valence, mais aussi dans bien d’autres endroits, leur trop petit nombre ne leur permet pas d’absorber la charge de travail qui leur incombe. Cette situation entraîne l’allongement considérable du délai de traitement des dossiers.

En effet, lorsqu’une décision de justice est prise par un magistrat, elle nécessite la rédaction par un greffier ou une greffière d’une notification, qui la rend valable aux yeux de la loi. Aucun dossier ne peut avancer sans cela, et ce sont les plus fragiles qui en souffrent en premier lieu, notamment les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle, ainsi que les enfants.

Plusieurs centaines de dossiers traités par le tribunal pour enfants de Valence sont en attente depuis des mois et s’accumulent. Or, pour intervenir auprès des familles et mettre en œuvre les décisions de justice prises en faveur de la protection de l’enfant, les travailleurs sociaux de l’ANEF, l’Association nationale d’entraide, et de la Sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence ont besoin de ces notifications rédigées par les greffiers, sans quoi ils n’ont aucun mandat pour agir. À cause du manque de personnel dans le service public de la justice, ils sont dans l’incapacité d’œuvrer pour placer les enfants lorsque cela est nécessaire.

Aujourd’hui, en ne réagissant pas, vous mettez des enfants en danger. Cette situation est inacceptable, intolérable. Que comptez-vous faire, madame la garde des sceaux, pour y remédier ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Brigitte Lherbier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice Monier, votre question est très importante dans la mesure où elle a un rapport avec l’enfance en danger, et nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état.

Vous m’alertez sur les difficultés du tribunal pour enfants de Valence qui se sont fait jour vers le mois de janvier dernier, notamment en raison de l’augmentation considérable du nombre de mesures d’assistance éducative.

Comme vous le savez, le juge des enfants a une double casquette : il intervient à la fois au pénal, et c’est le service de la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ, qui met en œuvre les mesures, et au titre de l’assistance éducative, et ce sont alors les départements et les services de l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, qui exécutent les décisions.

Au tribunal pour enfants de Valence, les mesures d’assistance éducative ont augmenté de 60 % en quatre ans. Pour faire face à cette situation, nous avons affecté un magistrat supplémentaire l’année dernière. Nous avons ainsi pris en compte les difficultés existantes. Toutefois, l’organisation du greffe n’a pas suivi. C’est la raison pour laquelle il a fallu travailler localement : la présidente du tribunal de grande instance a organisé des réunions au mois de mai dernier, et la notification des décisions par les greffiers a depuis lors repris.

Cependant, un stock de décisions importantes demeure encore à notifier. C’est pourquoi trois décisions ont été prises.

Tout d’abord, la direction des services judiciaires va attribuer des crédits supplémentaires pour permettre le recrutement de vacataires. Ensuite, la présidente du tribunal de grande instance affectera un emploi supplémentaire dans ce cadre-là. Enfin, deux greffiers supplémentaires arriveront au mois de septembre prochain.

Nous espérons ainsi pouvoir assurer au tribunal pour enfants de Valence les conditions nécessaires à son fonctionnement.

Plus généralement, pour ce qui concerne l’exécution des décisions de justice en matière d’assistance éducative, mes collègues Agnès Buzyn, Adrien Taquet et moi-même avons décidé de diligenter une mission d’inspection pour améliorer la situation dans ce domaine. C’est, je le répète, important pour l’enfance en danger. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)