M. Jacques Grosperrin. Ce n’est pas vrai ! Il ne faut pas dire cela !

M. Jean-Louis Tourenne. Il n’est pas facile pour des enseignants d’avoir à trancher en la matière. La solution réside sans doute dans la capacité qu’a l’école de s’adapter aux situations telles qu’elles se présentent sur le terrain.

Par ailleurs, il importe que la décision incombe non pas aux directeurs d’école, mais plutôt aux inspecteurs d’académie, en tout cas à des acteurs qui ne sont pas directement confrontés au terrain et ne sont pas exposés à des risques considérables.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Le sujet est important et complexe. Les « y’a qu’à, faut qu’on » ne suffisent jamais quand il s’agit d’affronter les réalités.

Personnellement, je connais votre détermination à défendre la laïcité, monsieur le ministre, et je suis très sensible à votre volonté de trouver les solutions les plus efficaces possible. Cela implique souvent une gestion au plus près du terrain. En même temps, comme l’a dit notre collègue Françoise Laborde, l’assurance de l’école couvre les accompagnateurs des sorties scolaires. Cela signifie que l’école cautionne ces personnes et considère qu’elles sont à même d’assumer ce rôle. Très sincèrement, il me semble extrêmement difficile de laisser aux enseignants, aux directeurs d’école la responsabilité de décider si tel ou tel parent peut ou non accompagner les enfants.

Tout en étant très à l’écoute de vos arguments, monsieur le ministre, je voterai cet amendement, parce que je pense qu’une sortie constitue une activité scolaire et que le port à cette occasion de signes ostentatoires allant à l’encontre du respect du principe de laïcité doit être sinon interdit, du moins clairement encadré par le législateur.

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour explication de vote.

M. Jacques Grosperrin. Je suis persuadé, monsieur le ministre, qu’au fond de vous-même, vous êtes d’accord avec nous. Votre fonction vous oblige à chercher un équilibre, notamment avec l’Assemblée nationale.

On a légiféré pour interdire le portable à l’école. Il s’agissait, ce faisant, de faciliter la vie des enseignants et des chefs d’établissement : l’adoption d’un tel amendement aurait le même effet, concernant cette fois les sorties scolaires.

Comme l’a rappelé le rapporteur, Françoise Laborde et moi-même avons fait un gros travail sur la perte des valeurs républicaines dans les établissements scolaires. On interdit aux chauffeurs de car de porter des signes ostentatoires lors des sorties scolaires : allons-nous le permettre aux accompagnateurs, au seul motif que, sinon, il n’y aura plus personne pour accompagner les enfants ? C’est un faux débat !

Il faut protéger les chefs d’établissement et les enseignants, leur faciliter la tâche. Je ne parle pas pour vous, monsieur le ministre, mais il faut sortir d’une complaisance qui, en réalité, ne rend service à personne, ni aux enseignants, ni aux enfants, ni même à des parents qui auraient peut-être envie d’accompagner leurs enfants dans une autre tenue.

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.

Mme Sylvie Robert. Pour ma part, je voterai contre cet amendement.

On voit bien que les arguments juridiques avancés au départ ne sont absolument plus au centre de nos discussions. Il s’agit en réalité d’un débat politique, marqué par le retour de vieilles obsessions. (Mme Françoise Gatel manifeste sa désapprobation.)

Il y a le principe de laïcité, auquel nous sommes très attachés et qui doit être respecté, et le principe de réalité, aux termes duquel les parents qui accompagnent les enfants ne sont pas soumis à l’obligation de neutralité religieuse. Le Conseil d’État a été très clair sur ce point.

Je vous remercie d’avoir pris la position qui est la vôtre, monsieur le ministre. Je m’étonne en revanche de celle de notre rapporteur, qui, depuis le début, s’abrite pourtant derrière beaucoup d’arguments juridiques.

Il est bon que nous ayons un débat sur ce sujet complexe. Je rejoins notre collègue Lafon : il n’y a pas de vide juridique, il s’agit non pas d’un débat juridique, mais d’un débat politique. Madame Eustache-Brinio, pourquoi le Conseil d’État changerait-il de position en 2019 ? Il faut veiller à ne pas détourner ce texte de son objet. On l’a vu hier à propos des allocations familiales : on prend prétexte de la discussion de ce projet de loi pour remettre sur la table certaines obsessions ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.) Consacrons notre temps à analyser des dispositions structurelles très importantes pour l’école, pas à débattre de tels sujets ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je rappelle que les premiers avis du Conseil d’État n’étaient pas défavorables au port du voile à l’école et recommandaient simplement son encadrement en fonction des situations. Personnellement, j’approuve son interdiction par la loi.

Je considère que l’accompagnant d’une sortie scolaire est acteur de l’école et qu’il est dès lors tenu à la neutralité.

Mme Josiane Costes. Absolument !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cela étant, si nous adoptons la mesure proposée, on ne trouvera plus, ipso facto, d’accompagnants des sorties scolaires dans certains territoires.

M. Jacques Grosperrin. Ce n’est pas vrai !

Mme Catherine Conconne. Pensez à Mayotte !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous ne vivons pas tous la même réalité, mon cher collègue ! Je connais des cas où il en sera ainsi. En dehors de la question du port de signes ostentatoires, il arrive aussi qu’aucun parent ne puisse se rendre disponible pour accompagner les enfants en sortie scolaire. Je trouve problématique de faire dépendre des parents l’organisation de voyages ou de sorties scolaires. Mon petit-fils fréquente une école où aucune sortie n’est organisée, parce qu’aucun parent ne se porte volontaire pour accompagner les enfants, et pas forcément pour des motifs religieux : les parents ne peuvent pas se libérer, pour toutes sortes de raisons.

Ce serait plonger dans le vide que de voter l’amendement tel qu’il est rédigé, même si sa philosophie ne me heurte pas. Il faut avant tout donner les moyens à l’éducation nationale d’organiser les sorties scolaires sans devoir compter sur les parents, en faisant en sorte, par exemple, que les enfants soient accompagnés de personnes titulaires du BAFA.

Ma position est claire : j’aimerais que l’on puisse appliquer le principe de laïcité lors des sorties scolaires, mais je ne veux pas que cela aboutisse à empêcher leur organisation dans certaines écoles. Ce n’est peut-être pas courageux, mais je m’abstiendrai, en attendant la mise en œuvre de solutions financées permettant de recourir à des accompagnants autres que les parents.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. Je voterai cet amendement pour éviter de faire peser la décision sur les directeurs d’établissement et les enseignants et pour que les règles soient les mêmes partout en France.

M. Xavier Iacovelli. À Mayotte aussi ?

Mme Annick Billon. Je souhaite une école de la République égalitaire, et je veux que les règles soient les mêmes partout ! (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.

Mme Patricia Schillinger. Je rejoins tout à fait les propos de Mmes Lienemann et Robert : le dispositif de cet amendement est inapplicable sur le terrain. Je vis en Alsace, terre concordataire : la laïcité, nous la pratiquons. (Exclamations amusées.)

Monsieur le ministre, il faudrait réaliser une étude sur cette question des sorties scolaires. Soit on décide de recourir à des animateurs diplômés pour encadrer les enfants, soit on continue à solliciter les parents, afin que ceux-ci participent à la vie de l’école. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de produire un tel rapport dans les mois à venir (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.), mais voter en l’état cet amendement, qui n’est pas applicable sur le terrain, serait d’une grande brutalité.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Max Brisson, rapporteur. La discussion conforte pleinement l’avis favorable que j’ai exprimé au nom de la commission.

Mes chers collègues, allons-nous demander aux chefs d’établissement et aux directeurs d’école de trancher un débat qui divise la représentation nationale ? Sachons faire preuve de courage ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.) Il faut fixer des règles claires pour ceux qui sont en première ligne.

Ce débat ne fait pas resurgir de vieilles obsessions !

M. Max Brisson, rapporteur. Il s’est un peu durci sur la fin, mais il a été digne, alors que le sujet aurait pu donner lieu à des dérapages. Cela n’a pas été le cas, parce que nous partageons la volonté, au-delà de notre attachement commun à la laïcité, de donner à ceux qui sont sur le terrain les moyens d’appliquer la loi.

Oui, la loi doit être renforcée ! C’est pourquoi je maintiens l’avis favorable de la commission.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Comme vient de le dire M. le rapporteur, ce débat est noble, et il est normal que nous l’ayons, car le problème est bien réel.

Je pense que nous partageons tous le même objectif, à savoir que des sorties scolaires puissent être organisées avec la participation de parents qui ne portent pas de signes ostentatoires.

Nous souhaitons également tous que les directeurs ou les directrices d’école ne se trouvent pas placés dans des situations impossibles, que ce soit parce qu’il n’y a pas de règle suffisamment claire ou parce que la règle, trop uniforme, n’est pas praticable dans les circonstances rencontrées sur le terrain. En conséquence, nous devons trouver un point d’équilibre.

Parmi tous les propos que j’ai entendus, un seul mot m’a choqué, madame la sénatrice Eustache-Brinio : le mot « hypocrite ».

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. S’il y a un ministre qui a pris ces sujets à bras-le-corps depuis son entrée en fonction, à rebours de ce que l’on a pu connaître auparavant, c’est bien votre serviteur ! (Marques dapprobation sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains.) Soyez au moins certaine que nous partageons tous le même objectif et que j’essaie de trouver la voie la plus efficace et la plus pragmatique pour l’atteindre.

Je respecte l’inspiration qui a conduit au dépôt de cet amendement. Après bien des réflexions, je ne la fais pas mienne.

J’ai longtemps pensé que les parents d’élèves pouvaient être considérés comme des collaborateurs bénévoles du service public, selon cette théorie qui veut que toute personne participant provisoirement ou de manière circonstancielle à un service public soit considérée comme tel. Si, par exemple, il lui arrive un accident dans ces circonstances, elle bénéficie du même régime de réparation qu’un agent public. (Mme Françoise Laborde approuve.) Cependant, le Conseil d’État, qui est la plus haute autorité en la matière, n’est pas de cet avis. Dès lors, les parents accompagnant une sortie scolaire disposent d’un certain nombre de droits – parfois de nature constitutionnelle – qu’il convient de respecter.

Dans ces conditions, il est souhaitable que les directeurs d’école disposent de points de repère pour prendre des décisions permettant, autant que faire se peut, que des parents d’élèves accompagnent les sorties scolaires sans porter de signes ostentatoires. C’est pourquoi nous édictons des règles : référence a été faite au vade-mecum et aux indications que j’ai données aux directeurs d’école.

Vous avez demandé, madame la sénatrice Schillinger, s’il était envisageable de mener une étude. Les réactions suscitées par cette demande m’ont donné à penser qu’il existait une certaine saturation à l’égard des rapports et des études… Je peux aussi l’entendre, mais sachez en tout cas que j’ai saisi le conseil des sages de la laïcité, qui remettra des analyses et des préconisations.

En résumé, je considère qu’adopter une mesure législative dans ce domaine pourrait être contre-productif. Je respecte totalement la position de ceux qui pensent le contraire, mais croyez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, que je suis passé par bien des chemins et des réflexions avant d’aboutir à une telle conclusion.

Cela étant, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, que ce soit dans le cadre réglementaire ou au travers du rôle d’accompagnement et de formation du ministère, pour favoriser, à la fois, une plus grande convergence entre les parents et l’école – c’est un objectif fondamental pour le bien des élèves – et l’organisation, sur le terrain, de sorties scolaires accompagnées par des parents ne portant pas de signes ostentatoires. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.

M. Olivier Paccaud. Mon propos tiendra en une seule phrase : la défense de la laïcité ne peut pas être à géométrie variable, soyons cohérents !

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. La laïcité, pour moi, c’est la possibilité pour chacun d’exercer sa religion dans l’espace public. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le ministre l’a très bien expliqué, les parents qui accompagnent une sortie scolaire ne sont pas considérés comme des agents publics : ils le font en conservant leur identité de parent ! Je crois important de maintenir les liens le plus étroits possible entre les parents et l’école, quelle que soit leur façon de se vêtir.

Si l’on devait considérer que ces parents accompagnateurs sont des agents publics, il faudrait alors s’entourer d’un certain nombre de garanties quant à leurs compétences éducatives, par exemple. Mais tel n’est pas le cas : il s’agit bien de parents qui tiennent la main des enfants, leur disent de faire attention en traversant la rue pour rejoindre le car scolaire, et non d’agents publics. Dans ce cadre, il faut permettre que la diversité s’exprime, sans stigmatiser telle ou telle maman.

Il faut évidemment voter contre cet amendement. Sinon, on finira par interdire à certains parents de tenir le stand du chamboule-tout lors de la fête de l’école ! La place des parents dans l’école est importante, quels que soient leurs choix ! (M. Xavier Iacovelli applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.

Mme Françoise Cartron. L’objectif est d’améliorer la situation actuelle. Je rejoins la demande exprimée par ma collègue Patricia Schillinger : dispose-t-on d’un état des lieux établissant le nombre de cas où des mères portant des signes ostentatoires ont été empêchées de participer à une sortie scolaire ou ont au contraire imposé leur présence ? Je ne suis pas sûre que de telles situations soient très fréquentes et je pense que, à chaque fois, elles se règlent par le dialogue et la compréhension. On peut ainsi amener les personnes à intégrer certaines notions.

En tout cas, ce n’est pas en posant une interdiction absolue que l’on aidera le directeur d’école. Celui-ci n’est d’ailleurs pas isolé, comme certains ont pu le dire : il peut s’appuyer sur l’équipe enseignante. La réalité des situations est diverse, en termes de recrutement par exemple. Aucune école ne ressemble à une autre. Pour ma part, je fais confiance aux équipes éducatives pour trouver, en s’appuyant sur les directives du ministre, la solution la mieux adaptée à l’identité de l’école, sans créer de conflits inutiles.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 100 rectifié quater.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Article additionnel après l'article 1er bis G (supprimé) - Amendement n° 100 rectifié quater
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article additionnel après l'article 1er bis G (supprimé) - Amendements n° 416 rectifié bis, n° 116 rectifié ter et n° 117 rectifié ter

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 100 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 286
Pour l’adoption 186
Contre 100

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er bis G.

L’amendement n° 48 rectifié quinquies, présenté par M. Bascher, Mme Eustache-Brinio, M. Houpert, Mme Noël, MM. Mandelli, Courtial et Danesi, Mme Lavarde, MM. Segouin, Duplomb, J.M. Boyer et Piednoir, Mmes Imbert, A.M. Bertrand et Chauvin, M. Sol, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Joyandet et Bouchet, Mme de Cidrac, M. Frassa, Mmes Lherbier et Puissat, MM. Gilles, Paccaud, de Nicolaÿ, Laménie, Cuypers et Meurant, Mmes Deroche et Lamure et MM. Rapin et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 1er bis G

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 141-5-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 141-5-2. – Les propos et agissements visant à exercer une influence sur les croyances ou l’absence de croyances des élèves sont interdits dans les écoles, collèges et lycées publics, ainsi qu’aux abords immédiats de ces établissements, lors des entrées ou sorties des élèves ou dans un temps très voisin de celles-ci, et lors des sorties scolaires organisées par ces établissements.

« Un décret en conseil d’État fixe les sanctions encourues en cas de méconnaissance de cette interdiction. »

II. – Le I est applicable dans les îles Wallis et Futuna.

III. – Au premier alinéa de l’article L. 161-1 du code de l’éducation, après la référence : « L. 141-5-1 », est insérée la référence : « , L. 141-5-2 ».

La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Des comportements prosélytes visant les élèves à la sortie de certains établissements scolaires ont été constatés. Il est nécessaire d’en protéger les enfants, dans le cadre des sorties scolaires comme à l’extérieur des établissements scolaires.

Le prosélytisme religieux, qui vise à convaincre une personne d’adhérer à une religion et n’est pas constitué par le simple port d’une tenue ou d’un signe religieux, est certes proscrit dans les services publics, mais il n’est pas interdit à la sortie des écoles, ce qui inquiète un certain nombre d’enseignants et de maires. Les élèves doivent être particulièrement protégés du prosélytisme, qui vise notamment à convertir ou à radicaliser certains d’entre eux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Max Brisson, rapporteur. Cet amendement porte sur les comportements prosélytes aux abords des établissements, qui sont avérés et posent un véritable problème. Le sujet mérite donc d’être abordé.

La commission, pour des raisons d’ordre juridique, a émis un avis défavorable, mais j’aimerais entendre le ministre sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. M. le rapporteur a précédemment cité, avec une grande justesse, Jean Zay, disant que les querelles des hommes doivent s’arrêter aux portes de l’école. Une fois de plus, nous devons définir ce que sont ces « portes » de l’école.

Il va de soi que le prosélytisme est interdit à l’intérieur des établissements scolaires : cette interdiction figure déjà dans le droit. Nous avons commencé à donner des instructions s’agissant de l’interdiction du prosélytisme aux abords des établissements, et les chefs d’établissement disposent déjà d’un certain rayon d’action à l’extérieur de l’enceinte scolaire.

Faut-il inscrire des dispositions dans la loi ? Pour ma part, je considère que ce qui se passe aux abords des établissements doit faire l’objet d’une vigilance croissante, et cela ne concerne pas que le prosélytisme religieux : je pense notamment au trafic de drogue, qui constitue un véritable sujet sur lequel j’échange avec le ministre de l’intérieur, de sorte que la nouvelle politique de reconquête républicaine nous permette d’être efficaces dans ce domaine.

Nous devons promouvoir une « sanctuarisation » des abords des établissements, mais cet amendement pose tout de même une série de questions formelles, notamment s’agissant de la définition de ces abords ou des sanctions possibles, qui ne pourront être résolues que dans un deuxième temps. Néanmoins, le sujet est réel et nous devons effectivement nous donner les moyens d’empêcher le prosélytisme aux abords des établissements. Pour ces raisons, l’avis du Gouvernement est favorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Max Brisson, rapporteur. Après avoir entendu le ministre exprimer un avis favorable sur cet amendement, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Votre amendement, madame Eustache-Brinio, a une portée bien plus large que ce que vous avez donné à entendre dans sa défense : sont clairement visées « les croyances ou l’absence de croyances des élèves » « dans les écoles, collèges et lycées publics ».

Or, la laïcité veut que la République reconnaît les seuls cultes : pas les croyances, ni les religions. Cette distinction est fondamentale.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Pierre Ouzoulias. Par ailleurs, souvenez-vous de nos débats d’hier à propos de la morale. Je défendais le principe de neutralité, le principe fondamental selon lequel l’école doit enseigner les règles de la citoyenneté et ne pas se mêler de tout ce qui est de l’ordre de la croyance. Que nous dit-on aujourd’hui ? Qu’il faut exclure les croyances des établissements !

M. Paccaud a déclaré que nous défendions une laïcité à géométrie variable ; pour votre part, mes chers collègues, vous avez une conception de la neutralité à géométrie variable ! Vous nous avez dit que l’école devait enseigner le beau, le vrai, le mal, le bon… Ces notions ne sont-elles pas de l’ordre de la croyance ?

Si mon amendement d’hier sur la neutralité avait été voté, cela aurait grandement facilité notre débat de ce jour. En effet, mes chers collègues, il nous est difficile de vous suivre sur le terrain de la laïcité quand vous nous opposez, comme hier, l’argument de la morale !

Mme Céline Brulin. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 48 rectifié quinquies.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er bis G (supprimé) - Amendement n° 48 rectifié quinquies
Dossier législatif : projet de loi pour une école de la confiance
Article additionnel après l'article 1er bis G (supprimé) - Amendement n° 326 rectifié

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er bis G.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 416 rectifié bis, présenté par Mme Loisier, MM. Laugier, L. Hervé, Moga et Henno et Mmes Goy-Chavent, Billon et Perrot, est ainsi libellé :

Après l’article 1er bis G (Supprimé)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 312-2 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les programmes scolaires de l’éducation physique et sportive prévoient un minimum de quarante-cinq minutes d’activités physiques et sportives par jour. »

La parole est à M. Jean-Pierre Moga.

M. Jean-Pierre Moga. L’activité physique a de nombreux bienfaits pour la croissance et la santé des enfants : elle permet de fortifier le cœur et les poumons, de former des os forts, de conserver un poids de santé, de réduire les risques de certaines maladies, mais aussi d’améliorer l’humeur et l’estime de soi, d’être en capacité d’obtenir de meilleurs résultats à l’école.

Dans nos sociétés, la sédentarité ne fait que croître, et ce phénomène est accentué par l’omniprésence des écrans. Les médecins recommandent un minimum de soixante minutes d’activité physique quotidienne d’intensité modérée à élevée à partir de l’âge de 5 ans. Au titre de son rôle d’éducation et de santé publique, l’école doit permettre aux élèves d’avoir une activité physique suffisante et adaptée à leur âge.

M. le président. L’amendement n° 116 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Regnard, Longeot et Sol, Mme Eustache-Brinio, MM. Mandelli et Henno, Mme Puissat, MM. Paccaud et Guerriau, Mme Guidez, MM. Vogel, Perrin et Raison, Mmes Goy-Chavent, Deroche et Kauffmann, MM. D. Laurent, B. Fournier et Détraigne, Mme Garriaud-Maylam, M. Karoutchi, Mmes Lassarade et Malet, MM. de Nicolaÿ et Bouchet, Mmes Berthet et Gatel, MM. Pierre et Saury, Mme Ramond, M. Vaspart, Mme A.M. Bertrand, MM. Huré, Husson, Laménie et Wattebled, Mme Lamure, MM. Longuet, Revet, Sido et Pellevat, Mme Deromedi et MM. Pointereau, Kennel, Dufaut, Bonhomme, Grosperrin, Chasseing, Théophile, Gremillet, Rapin et Bonne, est ainsi libellé :

Après l’article 1er bis G

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’État assure une pratique quotidienne minimum d’activités physiques et sportives de trente minutes au sein des établissements du premier degré.

Cet enseignement s’intègre obligatoirement dans le cadre des horaires et des programmes en vigueur dans ces établissements.

Un décret fixe les modalités d’application du présent article.

La parole est à M. Michel Savin.

M. Michel Savin. Aujourd’hui, la sédentarité est la quatrième cause de mortalité mondiale. La jeune génération passe désormais plus de temps devant des écrans qu’en mouvement. C’est pourquoi la pratique des activités physiques et sportives doit être encouragée.

Bien sûr, l’éducation physique et sportive, ou EPS, fait d’ores et déjà partie des programmes scolaires, mais l’objet de cet amendement est de rendre obligatoire, pour une durée minimale quotidienne, la pratique d’activités physiques et sportives, sans remettre en cause les heures d’EPS. Le jour où un cours d’EPS est prévu, cette pratique sera bien sûr considérée comme réalisée.

Cet amendement se situe dans la droite ligne des objectifs du Gouvernement, monsieur le ministre : mise en place d’un label « Génération 2024 » dans les établissements scolaires ; volonté d’expérimenter dès la rentrée prochaine le projet « confiance et sport », avec classe le matin et sport l’après-midi.

Cette pratique quotidienne serait aussi un excellent signal envoyé aux jeunes générations, notamment dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

La stratégie pluriannuelle Sport Santé prévoit, dès 2019, des interventions auprès des écoliers et collégiens pour faire valoir la nécessité de pratiquer une activité physique régulière. Intervenir, c’est bien ; assurer une pratique, c’est mieux !

Ces activités physiques quotidiennes permettraient également de sensibiliser les jeunes générations aux valeurs du sport que sont le respect, l’esprit d’équipe, le goût de l’effort, la tolérance, le partage.

Enfin, M. Moga l’a rappelé, il y a un enjeu de santé publique, sachant que toutes les études prouvent que la pratique sportive régulière permet d’éviter, voire de traiter, certaines maladies chroniques et affections de longue durée.