Sommaire

Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi

Secrétaires :

Mmes Annie Guillemot, Mireille Jouve, M. Guy-Dominique Kennel.

1. Procès-verbal

2. Demande de retour à la procédure normale pour l’examen d’un projet de loi

3. Questions orales

consommation des crédits des contrats de plan état-régions

Question n° 607 de Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. – M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement ; Mme Marie-Françoise Perol-Dumont.

avenir de la ruralité

Question n° 608 de M. Claude Nougein. – M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

fermeture du bureau de poste des aldudes

Question n° 619 de Mme Frédérique Espagnac. – M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

dispositif dérogatoire à l’article l. 433-1 du code de l’action sociale et des familles

Question n° 597 de Mme Catherine Deroche. – M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement ; Mme Catherine Deroche.

répartition de la fiscalité photovoltaïque

Question n° 478 de Mme Patricia Morhet-Richaud. – Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

maintien du service météorologique de chamonix-mont-blanc

Question n° 604 de M. Loïc Hervé. – Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ; M. Loïc Hervé.

rôle de l’union internationale de conservation de la nature

Question n° 589 de Mme Frédérique Puissat. – Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ; Mme Frédérique Puissat.

nuisances sonores liées aux transports ferroviaires

Question n° 581 de M. Jean Pierre Vogel. – Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ; M. Jean Pierre Vogel.

modernisation du réseau ferroviaire en haute-savoie

Question n° 567 de Mme Sylviane Noël. – Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

fermetures de classes dans les zones rurales de moselle

Question n° 241 de M. Jean-Marc Todeschini. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse ; M. Jean-Marc Todeschini.

fonds pour le développement de la vie associative

Question n° 466 de M. Michel Savin. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse ; M. Michel Savin.

prise en compte de l’enseignement des langues régionales au lycée

Question n° 537 de Mme Maryvonne Blondin. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

taux d’encadrement des élèves du primaire

Question n° 611 de Mme Sylvie Vermeillet. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse ; Mme Sylvie Vermeillet.

statut des assistants d’éducation en milieu rural

Question n° 616 de M. Jean-Yves Roux. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

fusion des trois académies de la région auvergne-rhône-alpes

Question n° 617 de M. Didier Rambaud. – M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse ; M. Didier Rambaud.

conséquences du brexit sur l’économie de la région normandie

Question n° 610 de Mme Corinne Féret. – Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.

gestion des appels d’urgence

Question n° 579 de M. Olivier Cigolotti. – Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.

répartition des nouveaux effectifs entre police nationale et gendarmerie

Question n° 247 de Mme Anne-Catherine Loisier. – Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes ; Mme Anne-Catherine Loisier.

réforme de l’obligation d’emploi des personnes handicapées

Question n° 606 de M. Guillaume Chevrollier. – Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées M. Guillaume Chevrollier.

risques pour la santé des terrains synthétiques

Question n° 455 de M. Daniel Gremillet. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; M. Daniel Gremillet.

déserts médicaux en seine-maritime

Question n° 274 de M. Didier Marie. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; M. Didier Marie.

insuffisance de psychiatres au centre psychothérapique de l’ain

Question n° 336 de M. Patrick Chaize. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

demande statutaire des aides-soignants

Question n° 527 de Mme Nicole Duranton. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; Mme Nicole Duranton.

nombre d’enseignants-chercheurs nommés à la faculté de médecine de lille

Question n° 553 de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; Mme Cathy Apourceau-Poly.

financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

Question n° 578 de Mme Brigitte Micouleau. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; Mme Brigitte Micouleau.

remboursement des actes de biologie médicale innovants

Question n° 591 de Mme Véronique Guillotin. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; Mme Véronique Guillotin.

contribution fiscale liée aux nouveaux modes de rémunération des médecins

Question n° 623 de M. Gilbert Roger. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; M. Gilbert Roger.

soins bucco-dentaires des handicapés dans la sarthe

Question n° 618 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé ; Mme Nadine Grelet-Certenais.

transfert de la contribution climat-énergie aux collectivités locales

Question n° 535 de M. Guillaume Gontard. – Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances ; M. Guillaume Gontard.

contribution « vie étudiante et de campus »

Question n° 557 de M. Didier Mandelli. – Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances ; M. Didier Mandelli.

non-conformité d’un service intercommunal de cuisine centrale

Question n° 596 de M. Bernard Fournier. – Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances ; M. Bernard Fournier.

centre national d’études spatiales et guyane

Question n° 598 de M. Antoine Karam. – Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.

pêche au bar et 48e parallèle

Question n° 362 de M. Michel Canevet. – M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. Michel Canevet.

conséquences de l’arrêté sur les retournements de prairies

Question n° 615 de Mme Agnès Canayer. – M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; Mme Agnès Canayer.

fonds d’accompagnement à la succession et à la transmission

Question n° 629 de Mme Martine Berthet. – M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; Mme Martine Berthet.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

4. Allocution de M. le président du Sénat

5. Croissance et transformation des entreprises. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Explications de vote sur l’ensemble

M. Richard Yung

M. Fabien Gay

M. Martial Bourquin

M. Jean-Marc Gabouty

M. Philippe Adnot

M. Michel Canevet

M. Emmanuel Capus

Mme Sophie Primas

Ouverture du scrutin public solennel

Suspension et reprise de la séance

Proclamation du résultat du scrutin public solennel

Adoption, par scrutin public n° 54, du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances

M. le président

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé

6. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

7. Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – Renforcement de l’organisation des juridictions. – Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

Discussion générale commune :

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois

Question préalable sur le projet de loi

Motion n° 101 de M. Jean Louis Masson. – M. Jean Louis Masson ; M. François-Noël Buffet, rapporteur ; Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux ; M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Discussion générale commune (suite)

Mme Éliane Assassi

M. Jacques Bigot

Mme Maryse Carrère

M. Jean Louis Masson

Mme Sophie Joissains

M. Alain Marc

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Sylviane Noël

M. Philippe Bas, président de la commission des lois

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux

Clôture de la discussion générale commune.

projet de loi de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice

Article 1er et rapport annexé

M. Guillaume Chevrollier

Amendement n° 100 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’ensemble de l’article et du rapport annexé, modifié.

Article 1er bis – Adoption.

Article 1er ter

Amendement n° 3 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 2

Amendement n° 79 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet.

Amendements identiques nos 4 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol et 96 de Mme Annick Billon. – Retrait de l’amendement n° 96 ; rejet de l’amendement n° 4 rectifié bis.

Adoption de l’article.

Article 3

Amendement n° 45 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 13 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Amendement n° 14 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 4 – Adoption.

Article 5

Amendements identiques nos 42 de M. Maurice Antiste et 46 de Mme Éliane Assassi. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 6 (supprimé)

Article 7 – Adoption.

Article 8

Amendement n° 47 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Adoption de l’article.

Articles 8 bis, 8 ter, 8 quater et 9 (supprimés)

Articles 9 bis, 9 ter, 10 ter A, 10 ter et 11 – Adoption.

Article 11 bis (supprimé)

Article 12 (supprimé)

Amendement n° 40 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

L’article demeure supprimé.

Article 12 bis A (supprimé)

Articles 12 bis et 12 ter – Adoption.

Article 13

Amendement n° 48 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 14

Amendements identiques nos 49 de Mme Éliane Assassi et 80 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 43 de M. Maurice Antiste. – Retrait.

Adoption de l’article.

Articles 16 et 17 – Adoption.

Article 18

Amendement n° 5 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 18 bis, 19, 19 bis, 19 ter, 19 quater et 20 A – Adoption.

Article 21

Amendement n° 50 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 86 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 22 bis (supprimé)

Articles 23, 24, 25 et 25 bis A – Adoption.

Articles 25 bis à 25 quater (suppression maintenue)

Article 26

Amendement n° 6 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Amendements identiques nos 7 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol et 97 de Mme Annick Billon. – Rejet de l’amendement n° 7 rectifié bis, l’amendement 97 n’étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 8 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol et 98 de Mme Annick Billon. – Rejet de l’amendement n° 8 rectifié bis, l’amendement n° 98 n’étant pas soutenu.

Adoption de l’article.

Articles 26 bis A et 26 bis B – Adoption.

Articles 26 bis et 26 ter (suppression maintenue)

Article 27

Amendements identiques nos 17 rectifié de M. Maurice Antiste, 51 de Mme Éliane Assassi et 81 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 27 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 28

Amendements identiques nos 18 rectifié de M. Maurice Antiste, 52 de Mme Esther Benbassa et 82 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 71 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 29

Amendements identiques nos 19 rectifié de M. Maurice Antiste, 53 de Mme Esther Benbassa et 83 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet des trois amendements.

Adoption de l’article.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

Article 30

Amendement n° 54 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 31

Amendement n° 84 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 31 bis – Adoption.

Article 32

M. Maurice Antiste

Amendement n° 55 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 32 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Amendement n° 33 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Amendement n° 34 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Amendement n° 35 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Adoption de l’article.

8. Mise au point au sujet d’un vote

9. Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – Renforcement de l’organisation des juridictions. – Suite de la discussion en nouvelle lecture et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié et d’un projet de loi organique dans le texte de la commission

Article additionnel après l’article 32

Amendement n° 56 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Article 32 bis

Amendement n° 22 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 32 ter – Adoption.

Article 33

Amendement n° 28 de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 33 bis, 34 et 35 – Adoption.

Article 35 bis

Amendement n° 72 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 36

Amendement n° 57 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 37 A (supprimé)

Article 37

Amendement n° 58 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 38

Amendement n° 10 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.

Amendement n° 29 de M. Jacques Bigot. – Retrait.

Amendement n° 85 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendement n° 30 de M. Jacques Bigot. – Retrait.

Amendement n° 31 de M. Jacques Bigot. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 39 – Adoption.

Article 40 (supprimé)

Article 41 – Adoption.

Article 42

M. Maurice Antiste

M. Jean-Pierre Sueur

Amendement n° 1 rectifié de M. Alain Fouché. – Rejet.

Amendement n° 23 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 42 bis AA

Amendement n° 73 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles 42 bis AB, 42 bis AC, 42 bis B, 42 bis C, 42 bis, 42 ter et 43 – Adoption.

Article 43 bis

Amendement n° 61 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 43 ter

Amendement n° 62 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 43 quater

Amendement n° 63 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 44 – Adoption.

Article 45

Amendement n° 64 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Amendement n° 20 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Amendement n° 24 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 45 bis AA (supprimé)

Article 45 bis A

Amendement n° 65 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 45 bis B, 45 bis et 45 ter – Adoption.

Article 46

Amendement n° 37 de Mme Monique Lubin. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 47 – Adoption.

Article 48 (supprimé)

Article 48 bis

Amendement n° 66 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 49 (supprimé)

Article 49 bis A

Amendement n° 38 de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 49 bis et 50 – Adoption.

Article 50 bis A (supprimé)

Articles 50 bis, 50 ter et 50 quater – Adoption.

Article 50 quinquies (supprimé)

Articles 51 et 51 bis – Adoption.

Article 51 ter

Amendement n° 67 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 51 quater – Adoption.

Article 51 quinquies

Amendement n° 68 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 52 A (supprimé)

Article 52

Amendement n° 41 de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 52 bis

Amendements identiques nos 2 de M. Jacques Bigot et 87 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 52 ter

Amendement n° 88 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 52 quater et 52 quinquies – Adoption.

Article 53

Amendements identiques nos 44 de Mme Sophie Joissains, 69 de Mme Éliane Assassi et 92 rectifié de Mme Sylviane Noël. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 95 rectifié de Mme Sylviane Noël. – Retrait.

Amendement n° 77 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.

Amendement n° 78 de Mme Michelle Meunier. – Non soutenu.

Amendement n° 25 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 53 bis AA (supprimé)

Articles 53 bis AB, 53 bis AC, 53 bis AD – Adoption.

Articles 53 bis AE et 53 bis AF (supprimés)

Article 53 bis A – Adoption.

Articles 53 bis B et 53 bis C (supprimés)

Article 53 bis – Adoption.

Article 54 (supprimé)

Amendement n° 26 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenu.

L’article demeure supprimé.

Article 55

Amendements identiques nos 70 de Mme Éliane Assassi et 94 rectifié de Mme Sylviane Noël. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 56

Amendement n° 76 rectifié bis de Mme Michelle Meunier. – Adoption.

Amendement n° 74 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 57

Amendement n° 75 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Vote sur l’ensemble

M. Jacques Bigot

Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

projet de loi organique relatif au renforcement de l’organisation des juridictions

Articles 1er A, 1er B, 1er, 1er bis, 1er ter, 1er quater, 1er quinquies, 1er sexies, 1er septies, 1er octies, 2, 2 bis, 2 ter, 2 quater, quinquies, 4, 5 et 7 bis – Adoption.

Article 7 ter (supprimé)

Articles 8 A, 8 et 9 – Adoption.

Article 9 bis (supprimé)

Article 9 ter – Adoption.

Article 9 quater (supprimé)

Article 10 – Adoption.

Vote sur l’ensemble

Adoption, par scrutin public n° 55, du projet de loi organique dans le texte de la commission.

10. Ordre du jour

Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

COMPTE RENDU INTÉGRAL

Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

Secrétaires :

Mme Annie Guillemot,

Mme Mireille Jouve,

M. Guy-Dominique Kennel.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du 7 février 2019 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Demande de retour à la procédure normale pour l’examen d’un projet de loi

M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date du 8 février 2019, Mme Éliane Assassi, présidente du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, a demandé que le projet de loi autorisant l’approbation de la décision (UE, EURATOM) 2018/994 du Conseil du 13 juillet 2018 modifiant l’acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom du Conseil du 20 septembre 1976, inscrit à l’heure du jour du jeudi 14 février, le matin, soit examiné selon la procédure normale et non selon la procédure simplifiée.

Acte est donné de cette demande.

Dans la discussion générale, nous pourrions attribuer un temps de quarante-cinq minutes aux orateurs des groupes.

Le délai limite pour les inscriptions de parole serait fixé au mercredi 13 février, à quinze heures.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

3

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

consommation des crédits des contrats de plan état-régions

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, auteur de la question n° 607, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la faible consommation de diverses lignes budgétaires prévues dans les contrats de plan État-régions, ou CPER, pour les années 2015-2020.

En effet, à titre d’exemple, alors que les besoins en infrastructures de déplacement sont criants dans certains territoires, à telle enseigne que les collectivités territoriales, les régions tout naturellement, mais également parfois les départements, se sont fortement engagées budgétairement pour contribuer à leur réalisation, des retards considérables sont pris dans l’engagement effectif des crédits. C’est notamment le cas dans mon département, la Haute-Vienne.

Comment le Gouvernement entend-il respecter ses engagements et répondre aux besoins et aux attentes légitimes des territoires concernés ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice, l’État a effectivement contractualisé environ 14,5 milliards d’euros dans le cadre des CPER pour la période 2015-2020. À mi-parcours, c’est-à-dire à la fin de 2017, le taux d’engagement des crédits était de 36 %.

Il est à noter toutefois que le rythme s’est accéléré en 2018 par rapport à 2016, mais aussi à 2017. Cela devrait se traduire par une amélioration dans l’exécution des CPER.

Globalement, les CPER – il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt – ont connu un démarrage décalé à la suite de la première vague d’avenants en 2016 pour tenir compte des priorités des exécutifs régionaux. Depuis, certains volets ont connu une amélioration significative et atteignent même parfois 100 % d’exécution.

Les volets territoriaux, dans lesquels 750 millions d’euros du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT, sont contractualisés, sont dans une situation particulière. Le retard d’exécution, avec 36 % à la fin de 2017, doit être relativisé, car il ne traduit pas toujours la réalité de l’investissement de l’État en faveur des territoires.

Par exemple, ce taux ne prend pas en compte la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, créée puis pérennisée après la signature des CPER actuels. En réalité, avec la création de cette dotation, l’État a très fortement augmenté son accompagnement des projets des collectivités. D’ailleurs, nous pourrons vous présenter très prochainement un bilan consolidé à la fois du FNADT et de la DSIL.

Au final, le retard global des CPER vient principalement du volet « mobilité multimodale », qui pèse 7,5 milliards d’euros et n’était exécuté qu’à hauteur de 30 % à la fin de l’année 2017. D’ailleurs, ces engagements pris en 2015 ne correspondent pas toujours aux capacités réelles de financement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui n’a pas vu ses ressources augmenter. Cette impasse budgétaire, objectivement connue de tous, a déjà fait l’objet de discussions et sera de nouveau abordée dans le cadre de l’examen du texte sur les mobilités.

Dès le mois d’octobre 2017, le Gouvernement a lancé les Assises nationales de la mobilité et a installé le Conseil d’orientation des infrastructures, afin, précisément, de réorienter les investissements et d’accélérer le processus.

Le projet de loi relatif aux mobilités offrira une nouvelle occasion d’évoquer le sujet. Il sera présenté après le grand débat national ; nous avons en effet décidé de le décaler, afin de tenir compte des conclusions de ce grand rendez-vous.

M. le président. Monsieur le ministre, je vous invite à prêter davantage attention au chronomètre.

La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour répondre à M. le ministre.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Monsieur le ministre, la mise en œuvre des contrats de plan ne s’accélère pas partout.

En Nouvelle-Aquitaine, près de 2 milliards d’euros étaient prévus pour les mobilités. À ce jour, l’État a engagé seulement 24 % des crédits, contre 82 % pour la région. De surcroît, sur ces engagements, 15 % seulement sont effectivement payés par l’État, alors que la région en a payé 35 %.

Monsieur le ministre, vous annoncez une loi sur les mobilités. Mais quel crédit accorder à un tel texte ?

Vous indiquez de manière subliminale que c’est au début que le contrat de plan a pris du retard. Il est normal que les crédits soient mal consommés au début. Mais là, nous sommes à deux ans de la fin des contrats de plan. C’est maintenant qu’il faudrait passer l’accélérateur !

La crise dramatique et sans précédent que traverse notre pays depuis bientôt quatre mois a, certes, des causes multiples, mais, initialement, elle est liée à la question des mobilités et des déplacements de nos concitoyens.

Je vous demande avec solennité d’œuvrer auprès de vos services déconcentrés pour que les sommes inscrites aux contrats de plan soient réellement budgétées et engagées. Libérez aussi les marges de manœuvre nécessaires pour accélérer la mobilité dans nos territoires, par exemple en rétablissant l’ISF !

avenir de la ruralité

M. le président. La parole est à M. Claude Nougein, auteur de la question n° 608, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Claude Nougein. Monsieur le ministre, les territoires ruraux sont aujourd’hui confrontés à une désertification qui ne fait que s’accentuer. Par exemple, en Corrèze, département dont je suis élu, le premier des freins au développement est l’impossibilité pour les maires de communes hyper-rurales d’obtenir des permis de construire, à cause, pour partie, de la Commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, la fameuse CDPENAF.

Cette commission, composée majoritairement de « personnalités qualifiées agricoles et environnementales » – on les appelle ainsi –, est par principe contre tout ! Et son poids est irrémédiable, puisque le préfet doit en suivre l’avis conforme.

Je veux bien admettre qu’il a pu autrefois exister du mitage. Mais, avec les nombreuses lois qui existent aujourd’hui, ce n’est plus possible ! Dans ces conditions, pourquoi refuser par principe des permis de construire dans des zones viabilisées ? Le retour de balancier va trop loin. Certes, il a pu y avoir des abus à une époque dans la délivrance des permis de construire. Mais, à présent, nous avons basculé – c’est un mal français – dans l’excès inverse. En Haute-Corrèze, nous assistons à un véritable blocage des permis de construire.

C’est terrible pour le territoire et catastrophique pour son développement !

D’ailleurs, certains maires veulent démissionner ou ne pas se représenter. Même avec 100 habitants, sur un terrain à proximité du bourg, donc des réseaux, la commission leur dit : « non » ! Le maire, qui a beau défendre lui-même son projet, n’obtient jamais gain de cause.

Il faut, me semble-t-il, réformer cette commission, soit en rendant son avis consultatif et en laissant le préfet décider in fine – il aura plus de bon sens que les membres de cette commission –, soit, mieux encore, en modifiant sa composition pour qu’elle devienne paritaire entre les élus locaux, c’est-à-dire les maires, et les représentants des organismes agricoles et environnementaux. C’est le souhait de nombreux maires et de pratiquement tous les élus de mon département.

Car une telle politique, que je qualifierais d’« intégriste », finit de dépeupler notre territoire rural, qui est déjà sinistré.

Comble du comble, ceux qui interdisent les constructions sont les premiers à déplorer la fermeture des écoles et des services aux publics !

Monsieur le ministre, pouvez-vous modifier la composition de cette CDPENAF, afin de réduire la désertification de nos territoires ruraux ? C’est très urgent.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur, je partage votre volonté de lutter contre la désertification et de pouvoir construire plus là où c’est nécessaire.

Les débats que nous avons eus dans le cadre de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi ÉLAN, ont permis des avancées, y compris sur des sujets ô combien compliqués. Je pense par exemple à la loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, ou à l’avis conforme des architectes des bâtiments de France.

Il faut avoir une approche exhaustive sans faire de faux procès – ce n’est pas ce que vous faites – à la CDPENAF, dont les trois quarts des avis sont positifs. Et ceux qui ne le sont pas peuvent faire l’objet de recours pour illégalité de la part des habitants ou des élus locaux.

Les avis négatifs portent parfois sur des projets qui concernent des situations particulières, en zone agricole, en ayant par exemple pour effet de changer la destination de bâtiments agricoles ou de porter atteinte à des productions sous AOP.

Vous évoquez également le caractère paritaire de la composition de la CDPENAF. À mes yeux, cette parité est assurée. Cette commission est composée de représentants de l’État, d’élus, à hauteur de cinq voix sur dix-huit, et de représentants des agriculteurs, des associations concernées, des organisations syndicales, des chasseurs, des notaires et de l’Institut national de l’origine et de la qualité, l’INAO. Je suis ouvert à la discussion sur le sujet, comme nous l’avons fait dans le cadre de la loi ÉLAN.

Avec mon homologue au ministère de l’agriculture, nous allons envoyer dans les toutes prochaines semaines une nouvelle circulaire sur les objectifs et les modalités de fonctionnement de la CDPENAF. Elle sera élaborée conjointement entre nos deux ministères et adressée aux préfets. Le droit a en effet évolué depuis la dernière circulaire guidant l’action de la CDPENAF, qui date de 2012. Nous souhaitons que cette nouvelle circulaire puisse être adressée très rapidement et tienne compte des cas de figure que vous évoquez.

Je suis ministre chargé du logement, mais j’étais ingénieur agronome à l’origine. Je comprends bien les difficultés que vous soulignez, et j’ai conscience de l’importance des enjeux.

fermeture du bureau de poste des aldudes

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, auteur de la question n° 619, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Mme Frédérique Espagnac. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement à propos de l’annonce de la fermeture du bureau de poste des Aldudes, dans les Pyrénées-Atlantiques.

Cette annonce de fermeture, comme pour toute fermeture d’un service public de proximité, a créé un certain émoi au sein de la population et parmi les élus. Cette décision, qualifiée d’« arbitraire » par les maires de la vallée des Aldudes – cela concerne les communes d’Urepel, d’Aldudes et de Banca –, prive la population de la vallée, soit un millier d’habitants, d’un service essentiel, ce bureau étant le dernier abritant des activités postales et bancaires courantes dans cette zone.

Cette annonce a également soulevé une certaine colère auprès des élus des communes concernées. En fermant ce bureau, le groupe La Poste revient sur l’engagement qu’il avait pris de le garder ouvert. En effet, ce n’est pas la première fois que la vallée se mobilise pour maintenir un tel service public indispensable à la population. Déjà, en 2015, citoyens, entreprises et élus s’étaient battus contre le transfert du centre de tri local de Saint-Étienne-de-Baïgorry et de ses facteurs. Près de 200 personnes avaient alors occupé le bureau de poste. Une consultation populaire avait été organisée, mobilisant près de 62 % des personnes inscrites sur les listes électorales, qui avaient demandé à 98 % le maintien du bureau et du centre de tri. Mieux, cette question avait fait l’objet d’un reportage sur TF1, comme on en voit souvent dans le journal télévisé de Jean-Pierre Pernaut ; le bureau de poste des Aldudes y était présenté comme un modèle de service public en haute montagne.

Aujourd’hui, les territoires se battent toujours pour garder un maillage de services publics cohérent. Même le préfet des Pyrénées-Atlantiques, qui est conscient de cette nécessité, ouvre une concertation dans les vallées voisines.

Une telle décision fait fi de toute concertation locale et s’inscrit à contre-courant du débat national actuel. Les maires ne cessent de dénoncer – souvenons-nous du Congrès des maires de 2018 – l’abandon des territoires par l’État. L’argument de la rentabilité ne peut pas s’entendre systématiquement. Les habitants de nos petits villages paient des impôts comme tout le monde ; pourtant, leur accès aux services publics est fortement réduit. Ils ont un sentiment d’injustice, qui ne peut que se comprendre. Il faut se battre constamment pour des évidences. Fermer des services publics dans des territoires isolés entraîne nécessairement un exode rural. S’il n’y pas plus personne dans nos villages, qui façonnera et fera vivre nos territoires ? Inutile de préciser que le patrimoine vivant français fait partie des atouts de notre pays.

Par ailleurs, ce type de décision ne peut être que décourageant pour les élus et autres acteurs locaux, qui, avec des budgets plus que restreints, se battent pour rendre leurs territoires attractifs.

Monsieur le ministre, je connais votre attachement aux territoires ; vous l’avez encore prouvé encore en répondant à la question précédente. Je fais donc appel à vous.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Frédérique Espagnac. Si ce bureau de poste ferme, plus de 200 personnes seront à 35 kilomètres. C’est une population vieillissante. Cette vallée, c’est trois communes et 1 000 personnes.

Visiblement, il est proposé d’ouvrir un bureau dans un commerce.

M. le président. Vous avez dépassé votre temps de parole, ma chère collègue.

Mme Frédérique Espagnac. Je n’en ai plus que pour quelques secondes, monsieur le président.

La population vieillissante n’aura le droit de retirer que 150 euros. Sinon, elle devra faire 35 kilomètres, ce qu’elle ne peut pas faute d’argent ou de moyen de locomotion.

Monsieur le ministre, j’insiste donc vraiment auprès de vous. Une concertation est possible. Je crois, par exemple, à la création d’une maison de services au public.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice, les fermetures de services publics ou de bureaux de poste ont beaucoup contribué à la colère qu’exprime aujourd’hui un mouvement comme celui des « gilets jaunes ».

Lorsque vous n’avez plus comme seul guichet pour retirer de l’argent que le bureau de poste pour cause de départ de toutes les autres banques, vous avez un sentiment de déclassement. Nous le voyons aujourd’hui dans les territoires les plus ruraux comme dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. J’attache effectivement beaucoup d’importance à cette question.

Dans le cas que vous évoquez, il y a eu des concertations. (Mme Frédérique Espagnac fait un signe de dénégation.) Il y en a notamment eu avec le maire des Aldudes. En revanche, il n’y en a pas eu avec les mairies avoisinantes. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé au sous-préfet d’organiser une réunion – on me dit qu’elle est déjà planifiée – avec la commission départementale de présence postale territoriale, la chambre de commerce et d’industrie et les trois communes de la vallée des Aldudes, pour voir quelles peuvent être les meilleures solutions : des points postaux ? des points en mairie ? une maison de services au public ?

En tout état de cause, la concertation n’a pas été assez large ; toutes les communes concernées n’y ont pas été associées. Il faut remédier à cette situation.

La Poste est malheureusement aussi régie par un certain nombre de faits. Quand un bureau de poste n’est plus assez fréquenté, cela interroge. La solution réside-t-elle dans les maisons de services au public, système qui permet de regrouper l’ensemble des services et d’augmenter les fréquentations ? Je crois qu’il faut surtout ne pas avoir de position dogmatique. Déterminons territoire par territoire les solutions les mieux adaptées pour répondre aux besoins de nos concitoyens.

L’État met cela en œuvre aussi dans le cadre d’un accord avec La Poste. En 2019, nous allons rouvrir les discussions sur la prolongation du contrat. Ce sera l’occasion d’avoir des retours d’expérience et de voir ce qui a marché et ce qui a moins bien marché. L’idée est de pouvoir trouver, demain, des solutions pragmatiques, sans dogmatisme, avec parfois des fermetures et parfois des ouvertures de services, mais toujours, comme vous l’avez souligné, dans la pleine et entière concertation.

dispositif dérogatoire à l’article l. 433-1 du code de l’action sociale et des familles

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteur de la question n° 597, adressée à Mme la ministre du travail.

Mme Catherine Deroche. Ma question s’adressait à ministre du travail et porte sur les dispositions de l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles, qui instaure un système dérogatoire de forfait en jours destiné aux éducateurs et assistants familiaux permanents exerçant au sein des lieux de vie et d’accueil. Relevant du code de l’action sociale et des familles, les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail, à la répartition et à l’aménagement des horaires ne leur sont donc pas applicables. Il en résulte que ceux-ci demeurent soumis à un forfait annuel de 258 jours, en application de l’article L. 433-1, modifié en 2016.

Or, plus de dix ans après l’inscription de cet article dans la loi, la Cour de cassation a récemment jugé, le 10 octobre 2018, que l’absence de décret d’application faisait barrage à l’opposabilité d’une telle dérogation.

Par conséquent, en cette absence, le droit commun s’applique à ces personnels, réduisant ainsi le temps de travail qu’ils peuvent effectuer à dépense égale pour leur structure salariée.

Revenant sur la jurisprudence en vigueur, cette situation juridique nouvelle a pour effet de déstabiliser l’équilibre économique de certaines structures associatives d’aide sociale installées et appliquant de bonne foi le dispositif dérogatoire. J’ai reçu ainsi dans mon département l’association Anjou Insertion Jeunes, qui déploie un dispositif d’accueil destiné aux enfants placés, et ce depuis vingt-huit ans.

Au regard de l’intérêt social que revêtent ces structures, je souhaite savoir quel dispositif juridique le Gouvernement envisage de mettre en place pour que le dispositif dérogatoire susvisé soit juridiquement fondé et pérenne.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Je me permets de répondre en lieu et place de Mme Pénicaud, ministre du travail.

Madame la sénatrice, il y a effectivement une sorte de vide juridique sur le sujet que vous évoquez ; à tout le moins, une précision juridique doit être apportée.

La situation des lieux de vie, de leurs salariés et assistants permanents pose problème depuis un arrêt récent de la Cour de cassation. Selon la Cour, l’absence de décret d’application de l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles fait obstacle à l’application du régime prévu par ce texte pour ces salariés, un régime d’ailleurs dérogatoire à certains égards par rapport au code du travail s’agissant, par exemple, de la durée du travail. La Cour juge que, faute de mise en place de modalités et de suivi de l’organisation du travail des salariés par un décret, comme la loi le prévoit, l’exigence constitutionnelle de droit à la santé et au repos des salariés n’est pas assurée.

C’est la situation dans laquelle nous sommes. Il est d’autant plus nécessaire de la régler que la présence de permanents auprès des publics fragiles est une nécessité qui justifie des dérogations initialement prévues par la loi.

Vous avez donc raison de souhaiter une fondation juridique solide à ce régime dérogatoire, et singulièrement depuis l’arrêt de la Cour de cassation.

Il convient de le rappeler, la directive européenne concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, qui organise la protection des salariés en matière de durée du travail, permet des dérogations dans le droit national, notamment pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes. D’après une analyse juridique, les activités visées par l’article L. 433-1 semblent pouvoir entrer pleinement dans ce cadre. Mais il n’en reste pas moins qu’il faut pouvoir rassurer et permettre un cadre juridique plein et entier pour que ces dispositions prévues par la loi puissent s’appliquer.

Je peux vous le certifier, les services de Mme la ministre du travail étudient sans délai les possibilités de sécuriser ce dispositif sur lequel vous alertez à juste titre le Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour répondre à M. le ministre.

Mme Catherine Deroche. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Il y a effectivement urgence pour nos associations – celle que j’ai évoquée emploie plus de 100 salariés dans l’ensemble du département et accueille 120 enfants –, car ce vide juridique leur crée de réels problèmes.

répartition de la fiscalité photovoltaïque

M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, auteur de la question n° 478, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Madame la secrétaire d’État, je souhaitais attirer votre attention sur la répartition de la fiscalité éolienne et photovoltaïque appliquée aux projets postérieurs au passage à la fiscalité professionnelle unique, ou FPU.

En effet, l’électricité d’origine éolienne et solaire photovoltaïque constitue avec l’hydroélectricité une des composantes majeures du mix électrique décarboné et renouvelable dont la France a choisi de se doter à l’horizon 2030. Dans ce contexte, comme vous le savez, de nombreux projets émergent dans les territoires, notamment en zone rurale, afin de nous permettre d’atteindre cet objectif tout en garantissant la protection de l’environnement et l’amélioration du cadre de vie.

Pour les communes susceptibles d’héberger des parcs éoliens ou photovoltaïques, la fiscalité est un enjeu majeur pour le développement de ces projets, car il peut représenter un attrait financier non négligeable. Si on peut se réjouir des avancées significatives sur la fiscalité éolienne avec la nouvelle répartition possible de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l’IFER, entre la commune d’implantation du projet et l’établissement public de coopération intercommunale, l’EPCI, on peut toutefois regretter qu’il n’en soit pas de même pour le photovoltaïque.

Cette situation est d’autant plus préjudiciable pour les communes sur lesquelles ces projets ont été lancés avant le passage en FPU. En effet, vous ne l’ignorez pas, les projets peuvent parfois s’étendre sur une période de plusieurs années avant leur raccordement final. Les municipalités proactives dans ce domaine subissent la double peine. Au départ, elles ont tenu compte d’une fiscalité revenant à la commune – je pense à la cotisation foncière des entreprises, la CFE, à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, ou à l’IFER –, et ont donc aujourd’hui plus de difficultés pour faire aboutir ces opérations. N’oublions pas le seuil d’acceptabilité par la population, qui est également un facteur non négligeable, notamment dans les petites communes, où le maire se trouve en première ligne.

C’est pourquoi il me paraît aussi important que les projets photovoltaïques soient pris en compte dans la modification de la répartition de l’IFER. Je souhaiterais donc connaître la position du Gouvernement à cet égard.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Morhet-Richaud, M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui ne peut être présent, m’a chargée de vous répondre.

Comme vous le rappelez, la France s’est engagée dans la transition de son système électrique, avec la volonté de bâtir un système de production à la fois plus diversifié et plus résilient.

En ce qui concerne le secteur de la production de l’électricité, le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie, présenté par le Président de la République le 27 novembre 2018, prévoit notamment de doubler la capacité installée des énergies renouvelables électriques en 2028 par rapport à 2017.

Dans ce contexte, l’énergie éolienne et l’énergie photovoltaïque ont vocation à constituer un des piliers de la transition énergétique française avec l’hydroélectricité.

Vous le savez, le Gouvernement souhaite multiplier par deux et demi les capacités installées d’éolien d’ici à 2028 et par cinq à six celles du photovoltaïque.

Dans ce contexte, la répartition de la fiscalité liée à ces nouveaux projets est une question essentielle ; vous la soulevez à raison, madame la sénatrice. D’abord, l’implication des collectivités facilite l’appropriation des sujets de la transition énergétique, qui est essentielle. Surtout, cela permet de mieux répartir les retombées socio-économiques des projets au niveau du territoire, ce qui est également essentiel ; comme vous le soulignez, cela fait partie de l’appropriation et de l’acceptabilité de la transition énergétique.

Par ailleurs, comme vous l’indiquez, la répartition de l’IFER, relative à l’éolien, a été modifiée à la fin de l’année 2018 dans le cadre du projet de loi de finances. Cette modification faisait suite aux travaux réalisés au sein du groupe de travail sur l’éolien piloté par le ministère de la transition écologique et solidaire, qui a conclu que la répartition de l’IFER constituait un frein au développement de la filière.

En revanche, un constat similaire n’a pas été fait pour le solaire photovoltaïque. Toutefois, si cela apparaissait nécessaire, une réflexion comparable pourrait également être engagée sur cette filière.

Je vous invite à transmettre une telle requête au ministre d’État. Pour ma part, je lui transmettrai vos remarques.

maintien du service météorologique de chamonix-mont-blanc

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 604, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Loïc Hervé. Madame la secrétaire d’État, je voudrais vous interroger ce matin sur le devenir du service météorologique implanté sur la commune de Chamonix-Mont-Blanc, en Haute-Savoie. Cette question pourrait d’ailleurs être utilement étendue aux mêmes services présents à Bourg-Saint-Maurice, en Savoie, et à Briançon, dans les Hautes-Alpes.

L’idée de supprimer ces services pour les regrouper sur Grenoble serait prise à la lumière des conclusions du rapport commandé au Conseil général de l’environnement et du développement durable, le CGEDD, remis en automne 2018 au ministère de la transition écologique et solidaire. La suppression de ces centres représenterait assurément un amoindrissement de la qualité du service rendu et fragiliserait la prise de décision des élus locaux dans le cadre de la protection des populations.

Vingt ans après le drame de Montroc, la commune de Chamonix-Mont-Blanc est l’une des plus exposées au risque d’avalanche dans les zones habitées. Alors que le service météorologique est physiquement présent à la commission de sécurité dans les cas de risque d’avalanche, ses conseils sont des plus pertinents puisqu’ils reposent sur un meilleur suivi nivologique, ainsi que sur des relevés continus et réels permettant une analyse prévisionnelle des plus fiables. C’est vrai à Chamonix-Mont-Blanc, mais c’est aussi vrai pour l’ensemble des massifs de Haute-Savoie puisque ce centre couvre le massif du Mont-Blanc, le massif du Chablais et le massif des Aravis. La responsabilité qui pèse sur les élus locaux dans ce domaine est considérable. Elle ne pourrait être qu’aggravée par la perte de cette expertise de terrain.

Je vous demande donc de maintenir ce système d’alerte, qui, par sa proximité, a maintes fois prouvé son efficacité et sa réactivité. Les élus locaux, municipaux comme départementaux, sont disposés à réfléchir avec l’État et Météo-France au devenir à moyen et à long terme de ce service.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous avez interrogé M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.

Je tiens d’abord à vous assurer que le ministre d’État est très vigilant quant à la qualité des services rendus par Météo-France aux acteurs des territoires dans le cadre de ses missions de service public, notamment dans les communes de montagne soumises à une grande variété de risques naturels pouvant affecter la sécurité des personnes et des biens.

C’est pourquoi il a été demandé au Conseil général de l’environnement et du développement durable une évaluation précise de l’évolution proposée de l’organisation de cet établissement en matière de gestion des risques d’avalanche.

Le rapport ayant été remis au ministre d’État, celui-ci va donc organiser très prochainement une réunion avec les élus des Alpes du Nord. L’objet sera de leur présenter les travaux de la mission et d’explorer avec eux – j’insiste bien sur ce dernier point – les suites pouvant être données aux recommandations. Cette réunion, à laquelle vous serez bien évidemment convié, pourra être préparée avec vous en amont.

L’un des points abordés sera la répartition des compétences de prévision des risques d’avalanche au niveau des massifs et au niveau local. La diffusion du rapport de la mission pourrait avoir lieu à l’issue de cette réunion. J’en discuterai avec le ministre d’État.

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Loïc Hervé. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de ces informations. Vous relevez la préoccupation des élus locaux et des parlementaires de nos trois départements au sujet de ces différents services. Je vous sais gré d’organiser cette réunion, qui nous permettra d’évoquer le sujet au fond.

Pour autant, jamais une simple modélisation informatique ne pourra remplacer une connaissance et une présence physique de terrain. Il me paraît illusoire de tout implanter à Grenoble. Comment imaginer qu’un météorologue puisse communiquer par webcam avec les agents de terrain sans connaître l’évolution nivologique et géographique des massifs ? Tout cela n’est pas réaliste ! Je suis donc très intéressé par les suites que vous donnerez à ma question.

rôle de l’union internationale de conservation de la nature

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, auteur de la question n° 589, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Frédérique Puissat. Ma question porte sur l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN, et est double.

Ma première question est simple : quels sont les liens entre le Gouvernement et l’UICN et quels moyens financiers la France lui accorde-t-elle ?

Ma deuxième question a trait à la stratégie internationale dite de « ré-ensauvagement ». J’attire votre attention, madame la secrétaire d’État, sur les impacts pour nos territoires ruraux de cette stratégie internationale. Définie par les objectifs d’Aichi en 2004, elle vise à conserver 17 % des territoires terrestres.

En France, cet objectif paraît atteint puisque 17 % du territoire national est couvert par un parc naturel régional ou national. Toutefois, il s’avère que cette stratégie de conservation confiée à l’UICN exige des États des efforts plus importants visant à amorcer le ré-ensauvagement par la prohibition de toute activité humaine telle que la chasse, la pêche, le pastoralisme. Cette démarche est encouragée par la mise en œuvre d’un système de compensation écologique, établi sur le même principe que le système d’échanges de crédits « carbone ».

C’est ainsi que la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages offre la possibilité à des acteurs privés de créer et de gérer des sites naturels de conservation, habilités à générer des crédits de compensation écologique auprès d’opérateurs dont l’activité nécessite le rachat de droits à « dénaturer ».

Quelle est votre position sur ce sujet face au risque de voir se créer des sanctuaires naturels excluant toute activité humaine, signant par là même la fin du pastoralisme dans les territoires de montagne ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Puissat, vous avez interrogé M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.

L’Union internationale pour la conservation de la nature joue un rôle important et croissant dans la protection de la biodiversité et des écosystèmes. C’est une force de proposition reconnue à l’échelle internationale en faveur de la protection de la biodiversité mondiale. À ce titre, le ministère de la transition écologique et solidaire entretient des liens étroits, constructifs et fructueux avec cette organisation.

Créée en 1948 à Fontainebleau, l’UICN est le plus vaste et le plus ancien réseau mondial de protection de l’environnement. La France en est membre fondateur et verse des contributions obligatoires comptabilisées sur le budget du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.

Par ailleurs, la France et l’UICN ont développé depuis 2005 un partenariat qui se traduit par des accords-cadres de coopération successifs. L’accord actuel 2017-2020 associe, du côté français, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, le ministère de la transition écologique et solidaire, le ministère des outre-mer, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation ainsi que l’Agence française de développement, l’AFD.

L’enveloppe de 8,8 millions d’euros sur quatre ans, versée pour l’essentiel par l’AFD, permet de développer des projets d’aide au développement et de financer la mise à disposition d’agents. Cet accord est placé sous l’autorité de l’ambassadeur délégué à l’environnement, par les ministères et institutions précités, auxquels l’UICN rend régulièrement compte. J’ai moi-même eu l’occasion d’échanger très fréquemment avec l’UICN.

Enfin, le Congrès mondial de la nature, que nous accueillerons en juin 2020 à Marseille, dispose d’un budget prévisionnel de 20 millions d’euros. Cet événement crucial, avant la COP 15 qui se tiendra en Chine, nous permettra de réaffirmer le leadership de la France en matière de préservation de la biodiversité.

En guise de conclusion, j’insiste : la France souhaite faire de cet événement un temps fort de la mobilisation. Nous aurons besoin de toutes les énergies, madame la sénatrice, y compris de la vôtre. Nous nous tenons donc à votre disposition pour travailler ensemble au renouvellement, notamment, du cadre stratégique mondial pour la biodiversité.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Frédérique Puissat. Madame la secrétaire d’État, nous serons bien entendu au rendez-vous des propositions qui pourraient être faites. J’attire néanmoins votre attention sur le fait qu’un certain nombre d’organismes échappent au politique.

Lors de la Conférence mondiale sur la biodiversité de Nagoya, des stratégies visant à préserver 17 % du territoire national ont été définies. Dès lors que l’UICN va au-delà, qu’elle reçoit un financement et que le ministère entretient des liens étroits avec elle, le Parlement n’a plus prise sur ce type d’organisme. Nous assistons alors à des stratégies de ré-ensauvagement local, y compris sur le territoire du Vercors et de l’Isère.

nuisances sonores liées aux transports ferroviaires

M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, auteur de la question n° 581, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.

M. Jean Pierre Vogel. Madame la secrétaire d’État, l’article 36 de la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire prévoyait, dans les cinq mois de la publication de la loi, la remise d’un rapport par le Gouvernement sur les nuisances sonores des infrastructures ferroviaires.

Ce rapport aurait dû être remis le 27 novembre 2018. Or les associations et collectifs représentant notamment les riverains de la ligne à grande vitesse Pays de la Loire-Bretagne, mise en service en juillet 2017, attendent avec impatience la remise de ce rapport, compte tenu des graves nuisances sonores subies par les populations des communes traversées.

L’amendement sénatorial à l’origine de cet article de loi insistait « sur la nécessité de réviser la réglementation en vigueur en y intégrant la notion d’émergence de bruit pour différencier les situations, élaborer des indicateurs pertinents et représentatifs du vécu des personnes et des situations réelles et en tirer les conséquences au niveau de la conception et réalisation des infrastructures ».

Pouvez-vous m’indiquer les raisons du retard dans la remise du rapport et me préciser sa date de publication ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Vogel, j’ai le plaisir de vous confirmer, au nom d’Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, qui m’a chargée de vous répondre, que le rapport sur lequel vous avez attiré son attention a bien été transmis le 21 décembre dernier au Sénat. Votre question est donc l’occasion pour moi de faire un point sur ce dossier auquel le Gouvernement porte une attention toute particulière.

Comme vous le savez, la réglementation relative aux nuisances sonores repose sur une caractérisation du bruit, sur la base d’indicateurs qui correspondent à la notion de « bruit moyen ». Ces indicateurs ont été retenus, car ils étaient considérés comme adaptés à la mise en évidence de la gêne et des impacts sanitaires de long terme.

Toutefois, comme vous le mentionnez, des attentes croissantes s’expriment, de la part notamment d’une partie des riverains des lignes à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire et Sud-Europe-Atlantique, pour que soit prise en compte la notion de « pics de bruit » via des indicateurs dits « événementiels », qui seraient davantage représentatifs de la gêne réelle occasionnée et éprouvée.

Même si la réglementation actuelle est conforme au cadre européen, la ministre chargée des transports souhaite que nous puissions préparer son évolution pour mieux répondre aux attentes des Français. Des études seront engagées dans ce sens par le Gouvernement et SNCF Réseau. Pour autant, les réflexions qui restent à conduire sur ce sujet sensible ne doivent pas nous empêcher d’apporter, dès maintenant, des réponses concrètes.

C’est le sens de la démarche de médiation que Mme Borne a confiée, en mai dernier, au Conseil général de l’environnement et du développement durable afin d’élaborer des propositions pour répondre aux préoccupations exprimées. Les conclusions de ces travaux lui seront remises dans les prochaines semaines.

Monsieur le sénateur, soyez donc assuré que l’État n’inscrit pas la réglementation dans un cadre figé et qu’il est pleinement engagé dans la recherche de solutions, notamment pour les riverains des lignes nouvelles Bretagne-Pays de la Loire et Sud-Europe-Atlantique.

M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Jean Pierre Vogel. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Si effectivement la réglementation française est conforme à la réglementation européenne, le cadre de vie de l’ensemble des riverains s’est considérablement dégradé. Cela donne lieu à des rassemblements importants. Lors du dernier, qui a réuni plus de 300 personnes, les riverains ont décidé d’emprunter la voie judiciaire ; ils sont fermement décidés à lutter contre le bruit.

J’attire également votre attention sur un point : SNCF Réseau est toujours le grand absent de ces réunions malgré les invitations. Nous avons la chance, dans la Sarthe, d’avoir un préfet extrêmement actif et présent ; il déplore également cet état de fait. Peut-être pourriez-vous faire passer le message à SNCF Réseau ? Nous attendons du Gouvernement des actions concrètes. Je vous invite d’ailleurs à venir constater sur le terrain, comme l’a fait Marc Legrand, président d’Eiffage Rail Express, l’ampleur des nuisances. Il y va de la santé d’un certain nombre de riverains !

modernisation du réseau ferroviaire en haute-savoie

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, auteur de la question n° 567, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.

Mme Sylviane Noël. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la situation actuelle du réseau ferroviaire en Haute-Savoie, plus particulièrement dans le secteur de la vallée de l’Arve.

Ce territoire appartient à l’une des onze zones françaises où les objectifs en matière de qualité de l’air fixés par la Commission européenne en termes de particules fines PM10 ne sont pas respectés.

Ainsi, à l’heure où le deuxième plan de protection de l’atmosphère de ce territoire est soumis à enquête publique, il paraît essentiel d’encourager les habitants du département à privilégier des modes de transport en commun en leur proposant une réelle alternative à l’utilisation de leur véhicule personnel.

Or j’ai appris avec stupéfaction, au cours d’une réunion organisée sous l’égide du préfet de Haute-Savoie, le 24 septembre 2018, avec les représentants de la SNCF, que les études pour la modernisation de la ligne Annecy-Saint-Gervais ne débuteraient qu’en 2023, les travaux devant se terminer en 2030. Ce calendrier est tout bonnement inacceptable !

Le secteur Saint-Gervais-La Roche-sur-Foron a pourtant été fléché dans l’étude ferroviaire comme étant celui qui supportait le plus de déplacements quotidiens du département, avec 90 000 déplacements par jour, seuls 4 % de ces déplacements se faisant par le rail. Et pour cause, puisque l’offre ferroviaire n’est pas suffisamment cadencée et rapide pour pouvoir être attractive par rapport à la voiture.

Le département de Haute-Savoie, constitué en grande partie de zones montagneuses très touristiques, a la chance d’être aussi un territoire à forts enjeux démographiques et économiques. Il peut, en effet, compter sur une population en croissance constante – plus de 12 000 habitants supplémentaires chaque année – et bénéficie d’une situation géographique privilégiée au carrefour de la France, l’Italie et la Suisse.

La mise en service du réseau international Léman Express permettra, certes, une légère amélioration de l’offre de service, mais celle-ci restera clairement insuffisante.

L’offre des trains à grande vitesse se dégrade également au fil du temps : ainsi, les élus haut-savoyards ont été informés cet été que la SNCF avait décidé de façon unilatérale de supprimer deux allers-retours entre Annecy et Paris par TGV.

Or la qualité de la desserte ferroviaire avec Paris constitue un prérequis indispensable en matière de développement économique et touristique pour un territoire. La Haute-Savoie compte plus de 70 000 entreprises, une balance commerciale excédentaire de plus de 1 milliard d’euros et près de 34 millions de nuitées touristiques. Malgré tout, le département ne jouit pas d’un réseau ferroviaire et de liaisons avec Paris à la hauteur de son dynamisme.

Cette suppression de deux allers-retours ne sera pas sans impact pour le développement économique et touristique. Les alternatives proposées ne sont pas acceptables pour les chefs d’entreprise, les touristes et les habitants de Haute-Savoie.

L’ensemble de ces éléments plaident incontestablement en faveur d’une amélioration d’envergure et rapide de la desserte ferroviaire de la Haute-Savoie.

Je souhaiterais donc connaître les actions envisagées par l’État pour remédier rapidement à cette situation, ainsi que leur calendrier.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Sylviane Noël, vous avez interrogé Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, qui n’a pu être présente aujourd’hui et m’a chargée de vous répondre.

Vous soulignez le caractère emblématique de la vallée de l’Arve au regard des enjeux de qualité de l’air. Soyez assurée que nous partageons votre préoccupation. Des ministres se sont déjà rendus sur place. Il s’agit d’une véritable préoccupation du Gouvernement.

Nous avons pleinement conscience de l’impact des lignes ferroviaires sur la vie quotidienne des territoires traversés, notamment pour les zones de montagne souvent défavorisées en matière d’offres de mobilité.

Dans ce contexte, la mise en service, en 2019, du Léman Express, qui reliera directement le canton de Genève à la Haute-Savoie, s’accompagnera d’une évolution considérable de l’offre de transport à destination d’Évian, de Saint-Gervais et d’Annecy.

Par ailleurs, le contrat de plan État-région 2015-2020 prévoit 4 millions d’euros pour la réalisation d’études préliminaires sur l’axe ferroviaire compris entre Bellegarde et Saint-Gervais.

Le coût d’une opération d’automatisation de la signalisation sur la ligne Annemasse-Saint-Gervais-Annecy est évalué entre 160 et 220 millions d’euros.

La ministre chargée des transports a demandé à la SNCF d’être en mesure de tenir le délai de 2025. Cela suppose cependant qu’un accord financier soit trouvé avec la région dans le cadre du contrat de plan État-région pour financer ce projet qui n’était pas prévu par celui-ci. Les financements mobilisables dans le cadre du contrat de plan État-région actuel s’élèvent à 34 millions d’euros : le tour de table financier reste donc à finaliser.

En ce qui concerne la baisse des fréquences TGV sur le Paris-Annecy, la gare de Lyon-Part-Dieu va connaître des travaux importants au moins jusqu’en 2023.

Cette contrainte technique a conduit SNCF Mobilités à travailler à une adaptation de l’offre grande vitesse en détournant ou en supprimant certains TGV à partir de 2019. C’est ce raisonnement qui s’applique à la liaison Paris-Annecy.

Pour compenser cette baisse de fréquence, SNCF Mobilités remplace l’ensemble des rames actuellement en service sur cette liaison par de nouvelles rames Duplex à deux niveaux, en mesure d’accueillir plus de voyageurs.

Soyez donc assurée, madame la sénatrice, de l’engagement du Gouvernement à promouvoir, en partenariat avec les élus de la région, des solutions de mobilités durables dans ce secteur particulièrement sensible de Haute-Savoie et de la vallée de l’Arve.

fermetures de classes dans les zones rurales de moselle

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 241, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, la question des fermetures de classes est au cœur des préoccupations de beaucoup de nos concitoyens dans les territoires. Si l’on en croit les premières remontées du terrain à la suite des réunions qui se sont déroulées ces derniers temps, vous avez décidé, cette année encore, d’accabler la ruralité.

Malgré la force du mouvement social et le message qu’il porte quant à la situation des territoires ruraux ou périurbains, malgré les déclarations d’intention du Président de la République quant au maintien des enseignants et des classes, notamment dans les espaces ruraux, force est de constater que nous n’y sommes pas.

En Moselle, malgré le contexte social et économique, nous enregistrons dans l’enseignement primaire – essentiellement dans les écoles situées en secteur rural ou dans les espaces périurbains – 78 fermetures de classes pour seulement 31 ouvertures.

Je ne vous lirai pas la longue liste des classes qui fermeront, mais j’ai été saisi ces derniers jours par de nombreux élus mécontents : ceux d’Abreschviller, de Richeling, d’Holving, de Kirsch-lès-Sierck, de Montenach, et je m’arrête là.

Souvent, ces décisions vont à l’encontre des investissements réalisés par les communes qui font tout leur possible pour améliorer les conditions d’enseignement, n’hésitant pas à se regrouper et à mutualiser leurs moyens. Ces fermetures s’inscrivent en contradiction avec les besoins exprimés par l’ensemble du monde éducatif

La réalité du monde scolaire, ce sont des classes surchargées malgré des chiffres qui tendent à démontrer que le taux d’encadrement en Moselle augmente. En effet, on fait de l’habillage en comptabilisant les créations de postes dans la prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers ou encore ceux qui sont liés à des besoins spécifiques.

Vous en conviendrez, ce type d’approche ne peut qu’être mal vécu par nos concitoyens, qu’ils expriment ou non leur mécontentement depuis plusieurs semaines.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous indiquer les mesures que vous entendez prendre afin de permettre au monde rural de maintenir de bonnes conditions d’apprentissage pour tous les élèves qui y vivent ? La ruralité n’attend plus des déclarations d’amour, mais jugera par les faits toute l’attention qui lui est portée par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur, si j’approuve le sens de vos propos, je ne suis d’accord ni sur les chiffres – je vous apporterai peut-être de ce point de vue de bonnes nouvelles – ni sur les qualificatifs que vous utilisez.

J’ai eu l’occasion de le rappeler hier de manière assez forte à l’Assemblée nationale, les classes rurales ont évidemment besoin de notre bienveillance et de notre soutien. Je l’ai dit hier et je le redis devant vous aujourd’hui : l’école primaire rurale française réussit mieux que la moyenne des autres écoles primaires. Elle doit donc être soutenue, qu’il s’agisse de mettre en place, au cas par cas, de façon pragmatique, des regroupements pédagogiques intercommunaux ou des classes multiniveaux. C’est résolument le sens de notre politique, qui vise notamment à créer des postes et ouvrir des classes afin d’accompagner le monde rural.

J’insiste très solennellement sur un point au sujet duquel nous devrions tous être d’accord : le vrai problème, c’est la démographie. Il importe que nous mettions en place une stratégie, en particulier dans le secteur rural. Pour ce faire, nous devons articuler quelques facteurs – notamment celui de l’école –, afin de rendre ces territoires plus attractifs et de faire en sorte que des familles s’y installent. C’est à mes yeux la vraie réponse, car, quelle que soit notre bienveillance, que faire quand il n’y a plus d’élèves ?

Selon vous, nous aurions décidé « d’accabler la ruralité ». Nous n’avons pas accablé la Moselle, tant s’en faut, pas plus que nous avons accablé la ruralité en général !

À la rentrée 2018, 20 emplois supplémentaires ont été créés pour 544 élèves de moins. À la prochaine rentrée, 12 emplois seront créés pour 1 000 élèves de moins. Il s’agit donc non pas de suppressions, mais de créations !

Le taux d’encadrement du département mesuré par le nombre d’enseignants pour 100 élèves est passé de 5,45 en 2017 à 5,57 en 2019. La progression est donc considérable. Ce dont nous pouvons débattre, c’est la façon dont nous répartissons les postes. C’est pourquoi nous avons signé un contrat de ruralité à l’échelle de la Moselle. Je suis tout à fait disposé à en discuter avec la rectrice et avec le directeur académique des services de l’éducation nationale, le DASEN. Bien souvent en effet, les moyens supplémentaires sont davantage consacrés à la formation des maîtres, afin de réussir le rebond qualitatif de l’école rurale, qu’au maintien de classes avec trop peu d’élèves dans certains endroits.

Ces choix qualitatifs seront discutés dans le cadre du contrat départemental, mais ne dépeignez pas la réalité sous de fausses couleurs. Ce serait ajouter inutilement du désespoir, alors que l’éducation nationale apporte tout son soutien aux écoles rurales, en particulier dans votre département.

M. le président. Monsieur le ministre, je vous demanderai de prêter davantage attention au chronomètre.

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour répondre à M. le ministre.

M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais elle est technique et relève de l’habillage, comme je l’ai déjà souligné. La réalité vécue sur le terrain par les élus locaux et les parents dans les communes rurales est tout autre : leur ressenti, ce sont les fermetures de classes !

Vous nous parlez de l’amélioration du taux d’encadrement. Mais vous avez reconnu qu’il s’agissait de créer des postes répondant à des besoins qualitatifs. Par exemple, vous créez 5 postes de RASED, les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, 6 postes de liaison école-collège, 1 poste pour le service militaire volontaire, 1 poste de conseiller pédagogique, 2 postes d’accueil des professeurs d’allemand, 2 formateurs aux usages numériques, mais tout cela se traduit par des fermetures de classes !

Le monde rural a le sentiment de payer le dédoublement des CP-CE1 dans les zones prioritaires, même si c’est une mesure que j’approuve. En tout état de cause, il faut être plus attentif.

fonds pour le développement de la vie associative

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 466, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Michel Savin. Monsieur le ministre, votre majorité à l’Assemblée nationale a supprimé en 2017 la dotation d’action parlementaire. Cette réserve parlementaire était fléchée à hauteur de 50 millions d’euros en 2016 vers les associations locales. Ainsi, ce sont 1 670 associations sportives locales et 2 236 associations qui ont pu en bénéficier.

Aujourd’hui, cette suppression de financement est loin d’être négligeable pour les petites associations sportives locales. La loi de finances pour 2018 avait inscrit 25 millions d’euros dans le fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA, crédits qui ont été maintenus pour 2019.

Ces 25 millions d’euros de crédits du FDVA « fonctionnement et actions innovantes » sont destinés en priorité aux associations ne bénéficiant pas du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, c’est-à-dire aux associations de taille réduite qui emploient peu ou pas de salariés.

Ce fonds, chargé jusqu’à présent de financer la formation des bénévoles, peut désormais également bénéficier aux associations sportives pour le financement global de leurs activités ou pour la mise en œuvre de projets ou d’activités dans le cadre de nouveaux services à la population.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous exposer les résultats de la campagne de subventions pour les associations sportives via le FDVA en 2018, afin de pouvoir établir un bilan précis de l’évolution qu’a connue le financement des associations sportives locales entre 2017 et 2018 et de connaître l’évolution envisagée pour 2019 ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le président, conformément à votre demande, je vais m’efforcer de tenir les délais prévus.

Monsieur le sénateur, la loi de finances pour 2018 a confié la gestion de 25 millions d’euros au FDVA pour compenser l’ancienne réserve parlementaire, avec de nouvelles modalités de gouvernance et de répartition.

Ces mêmes crédits ont été reconduits par les parlementaires à l’issue du vote de la loi de finances. Le décret du 8 juin 2018 relatif au FDVA a introduit des principes révisés de répartition. De la sorte, toutes les petites associations sur le territoire bénéficiant autrefois de la réserve parlementaire ont pu effectuer des demandes de subventions au titre du FDVA pour leur fonctionnement et pour leurs nouveaux projets, quel que soit le secteur d’activité.

En outre, l’instruction du 15 mai 2018 relative au FDVA et à l’utilisation de ces crédits déconcentrés a fait des petites associations une priorité. Je l’ai souvent constaté sur le terrain, de petites associations qui ne bénéficiaient pas autrefois de ces crédits les ont obtenus cette fois-ci.

Des priorités de financement ont ainsi pu être définies, avec la préconisation d’un plafond de subventions à 15 000 euros, ce qui a permis une meilleure répartition en faveur des petites associations. Nous avions pris, par ailleurs, des mesures bénéficiant aux associations de tailles moyenne et grande, notamment celles qui emploient des personnes.

Dans le cadre de sa mission interministérielle et intersectorielle, le FDVA, auprès duquel plus de 22 800 associations ont déposé une demande, a donc versé en 2018 l’intégralité des 25 millions d’euros à 9 500 associations, soit 41,5 % des associations ayant présenté un dossier. Tous les secteurs ont été soutenus, y compris le secteur sportif. À titre d’exemple, en Nouvelle-Aquitaine, 32 % des associations qui ont déposé une demande appartiennent au secteur du sport ; 45 % d’entre elles ont bénéficié d’une subvention.

Toutes les subventions ont été versées aux associations bénéficiaires dès 2018, sans rupture de financement, grâce à une réorganisation des instances de gouvernance dans les territoires.

Dès la campagne 2018, les modalités de demande ont été limitées à leur strict minimum réglementaire, dans une logique de simplicité : un formulaire unique de demande de subvention est ainsi prévu par l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Le dispositif étant désormais en place, je compte mobiliser les services de sorte que la prochaine campagne se déroule selon un calendrier amélioré – cela répondra, je crois, à ce que vous souhaitez – et que les associations soient destinataires des notifications de subvention avant l’été.

Plus systématiquement que l’an passé, les associations auront aussi la possibilité, en vue d’améliorer l’efficience du dispositif, de déposer leur demande sur le portail officiel de gestion, dénommé « Le compte Asso ». Ce dernier a fait l’objet de toutes les améliorations afin d’être parfaitement adapté à la prochaine campagne.

Les modalités seront donc facilitées cette année, avec un formulaire de demande de subvention réduit au strict nécessaire et des démarches limitées, afin que de nombreuses structures puissent en bénéficier. Par ailleurs, le FDVA pourrait figurer parmi les sujets à l’ordre du jour du grand débat, puisque nous voulons stimuler la vie associative à l’échelle départementale.

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour répondre à M. le ministre.

M. Michel Savin. Vous parlez, monsieur le ministre, de priorité et de simplification. Mais, concrètement, vous ne m’avez donné aucun chiffre permettant de comparer ce qui était attribué aux associations en 2016 au titre de la réserve parlementaire et ce qui relève du FDVA.

Les choix politiques de votre majorité viennent directement impacter la vie des associations locales, au travers de la suppression de la réserve parlementaire et de celle des emplois aidés.

Vous le savez, les associations vivent des moments très difficiles. Elles jouent pourtant un rôle important pour renforcer la cohésion et la mixité dans nos villages et nos villes.

Vous avez évoqué à la fin de votre propos de nouvelles solutions de financement et de soutien, lesquelles ont aussi été annoncées par le Président de la République lors d’un débat qui a eu lieu au cours des dernières semaines. Il faudrait passer des paroles aux actes, car les associations souffrent beaucoup dans nos territoires.

prise en compte de l’enseignement des langues régionales au lycée

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, auteur de la question n° 537, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de saluer les membres du conseil municipal des jeunes de ma commune, Ergué-Gabéric, près de Quimper, qui viennent de s’installer dans les tribunes. Ils ont beaucoup travaillé pour leurs camarades et pour la vie quotidienne des écoles, et en sont remerciés par une visite au Sénat. Je remercie également M. le maire, les élus et les personnels qui les accompagnent.

Notre rôle, monsieur le ministre, est en effet d’accompagner la vie et l’engagement dans la société de nos jeunes, et de préparer au mieux leur avenir.

Ma question porte sur la réforme du baccalauréat et ses effets désastreux sur les langues régionales. C’est un recul qui se profile pour cet enseignement, qu’il soit optionnel ou bilingue.

L’élève qui choisira la langue régionale en langue vivante B, dite LVB, ne pourra plus suivre l’enseignement de ses deux langues étrangères et de sa langue régionale, comme c’est le cas actuellement dans les lycées où l’option LV2 bis est proposée. C’est un choix cornélien pour les amoureux des langues, qui aura des conséquences sur leur orientation dans l’enseignement supérieur.

L’élève pourra choisir l’un des enseignements de spécialité, qui sont au nombre de trois en classe de première. Hélas, seuls deux sont conservés en terminale ; on connaît pourtant l’importance de ces choix pour le post-bac.

L’option en langue vivante C, la LVC, pourra aussi être choisie. Mais, là encore, son coefficient pour le bac ne sera plus que de 0,6, alors que l’option « langues et cultures de l’Antiquité », LCA, conserve l’actuel coefficient de 3. N’y a-t-il pas là une forme d’injustice, d’autant que l’option LCA peut être cumulée avec une autre, ce qui n’est pas le cas pour les LVC ?

L’article L. 312-10 du code de l’éducation précise que cet enseignement peut être dispensé tout au long de la scolarité, selon des modalités définies par convention entre l’État et les collectivités où ces langues sont en usage. Le président Macron l’a rappelé dans son discours de Quimper, et la région Bretagne s’est pleinement engagée dans ce défi.

Vendredi dernier, à Rennes, le premier acte de différenciation a été signé par le Premier ministre et le président de région, avec un volet « langues et cultures bretonnes ».

Monsieur le ministre, vous qui prônez l’école de la confiance, faites aussi confiance aux élus des territoires ! Vous avez entre vos mains l’avenir de ce trésor linguistique. Quelles dispositions entendez-vous prendre pour inclure plus efficacement les langues régionales dans la réforme du baccalauréat, et au-delà, dans l’ensemble du système éducatif ?

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’invite encore une fois chacune et chacun d’entre vous à ne pas dépasser le temps de parole imparti. Cela ne m’amuse pas de vous rappeler à l’ordre, bien au contraire, mais nous avons un ordre du jour à respecter.

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. À mon tour, je salue – brièvement, monsieur le président ! – le conseil municipal des jeunes de votre commune, madame la sénatrice. C’est avec chaleur que je leur souhaite la bienvenue !

Je suis quelque peu surpris de la manière dont vous avez décrit la situation. La réforme du baccalauréat et celle du lycée en général seront au contraire une formidable opportunité de développement pour les langues régionales. En dépeignant les choses différemment et en disant que cette cause recule alors qu’elle avance, vous courez le risque d’être contredite et de nuire de façon injustifiée à cette cause.

Les arrêtés relatifs à la réforme du baccalauréat et du lycée publiés le 17 juillet 2018 prévoient la possibilité pour un élève de choisir une des langues régionales au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs, comme vous l’avez dit, mais aussi au titre de la langue vivante C dans les enseignements optionnels.

Dans la voie générale, la langue vivante régionale choisie au titre de la langue vivante B a un poids plus important – j’y insiste ! – en termes de coefficient dans l’examen qu’avant la réforme ; du point de vue que vous défendez, c’est donc un progrès. En effet, la langue régionale choisie comme langue vivante B constitue l’un des six enseignements communs ayant exactement le même poids dans l’examen, qui comptent pour 30 % de la note finale.

S’agissant de la langue régionale choisie au titre d’enseignement optionnel, la langue vivante C, elle comptera parmi les disciplines valorisées à l’examen pour les résultats des bulletins, soit 10 % de la note finale de l’examen.

En ce qui concerne spécifiquement la voie technologique, dans toutes les séries, le choix d’une langue régionale demeure possible au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs. Pour l’enseignement optionnel, le choix d’une langue vivante régionale au titre de la langue vivante C est proposé dans la série « Sciences et technologies de l’hôtellerie et de la restauration », STHR.

Il en résulte que, dans le cadre du Bac 2021, les langues régionales peuvent toujours être choisies par les élèves dans les filières technologiques.

De plus, et c’est un point majeur sur lequel je veux insister, la place et la dynamique des langues régionales dans le cadre du Bac 2021 sont confortées. Il a en effet été décidé d’introduire les langues vivantes régionales en tant qu’enseignement de spécialité. C’est énorme puisque cela représente quatre heures en classe de première et six heures en terminale ! Un tel dispositif n’existait pas auparavant ; vous ne pouvez donc pas dire qu’il y a un recul en la matière. Il s’agit au contraire d’une avancée considérable pour les élèves concernés.

Un projet d’arrêté modificatif a été présenté au Conseil supérieur de l’éducation du 6 février dernier, qui, d’une part, modifie l’intitulé de l’enseignement de spécialité « Langues, littératures et cultures étrangères » en « Langues, littératures et cultures étrangères et régionales », et, d’autre part, précise que les langues concernées par cet enseignement sont les langues vivantes A ou B ou C de l’élève. Ces propositions ont recueilli un vote favorable du Conseil.

Ces mesures que je mettrai en place représentent, je le redis, une nouvelle opportunité pour les langues régionales.

M. le président. Je salue, moi aussi, les enfants qui nous font le plaisir de nous rendre visite, ainsi que leurs accompagnateurs.

M. Michel Canevet. Des Finistériens !

taux d’encadrement des élèves du primaire

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, auteur de la question n° 611, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, je souhaite attirer votre attention sur les fermetures de classes envisagées en milieu rural, et plus particulièrement dans mon département du Jura.

La carte scolaire mobilise vivement chaque année à cette époque et, à l’heure du dédoublement des classes de CP-CE1 en zone prioritaire urbaine, nos territoires ruraux et de montagne ressentent cruellement les effets de seuil à l’origine des fermetures de classes. Partout, les maires de nos campagnes s’organisent en réseau pour mutualiser leurs moyens, tout en rénovant leurs écoles. Ils ont également à cœur de répondre aux besoins et aux demandes de leurs enseignants. Le Jura est d’ailleurs exemplaire en matière de regroupement scolaire.

Au sein même de la ruralité, la carte scolaire est inéquitable, car les spécificités géographiques, démographiques et sociologiques ne sont pas prises en compte objectivement.

Au sein d’une même région, en Bourgogne-Franche-Comté, le quotient démographique, dit « P sur E », était de 5,79 à la rentrée 2018 dans le département du Jura, quand les départements voisins de la Côte-d’Or et de la Nièvre pouvaient compter sur des taux d’encadrement respectivement de 6,02 et de 6,36.

Pourtant, le Jura fait partie des zones de montagne, avec un taux élevé de population rurale isolée. Il est difficilement justifiable que le taux d’encadrement y soit plus faible qu’en Côte-d’Or ou dans la Nièvre.

Monsieur le ministre, je n’ignore pas la baisse du nombre d’élèves et je reconnais volontiers que vous attribuez des postes supplémentaires dans tous les départements concernés. Mais vous ne rééquilibrez pas les disparités injustifiées des « P sur E ».

Bien que cet héritage soit ancien, je souhaiterais savoir si vous envisagez de prendre des mesures pour ajuster les taux d’encadrement entre territoires, en tenant compte de leurs difficultés et spécificités réelles.

M. le président. La parole est à M. le ministre, qui a presque réussi à respecter son temps de parole lors de sa précédente intervention. Je compte sur lui pour celle-ci ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Je vous remercie, monsieur le président, de signaler mes progrès ! (Nouveaux sourires.) Je vais essayer d’être à la hauteur…

Madame la sénatrice, ce sujet est très important et je le prends d’autant plus au sérieux qu’il concerne l’école rurale ; ce que j’ai dit sur la Moselle vaut d’ailleurs aussi pour le cas que vous évoquez. Je me réjouis également de la façon dont vous en avez posé les termes.

Vous avez dit, d’une part, qu’il y avait une inégalité entre les territoires au regard du « P sur E », et, d’autre part, qu’il fallait tenir compte de la spécificité des territoires. On pourrait considérer que ces deux phrases entrent en contradiction.

En effet, le fait de tenir compte des spécificités territoriales peut justifier de prévoir des taux d’encadrement différents. Il faut néanmoins, je le répète, que ce soit justifié. Tel est le sens des conventions de ruralité par département, qui doivent permettre d’expliciter ces spécificités et de justifier d’éventuels régimes de faveur pour compenser les problèmes qui existent.

Nous avons procédé ainsi pour le Jura, vous le savez, et vous y avez abondamment participé. La convention-cadre pour le maintien d’une offre scolaire et éducative de qualité dans les territoires ruraux du Jura a ainsi été signée le 24 mai 2018 par le préfet, le président de l’association des maires et des communes du Jura, le recteur et l’inspecteur d’académie, et nous la mettons en œuvre. C’est ce qui nous permet de faire progresser très fortement le « P sur E » en cette rentrée dans votre département puisqu’il sera de 5,81, contre 5,57 à la rentrée 2016. Les effets de convergence que vous souhaitez sont donc en passe de se réaliser.

Je vous remercie d’avoir souligné que nous continuons à attribuer des postes, en dépit de la baisse du nombre d’élèves.

Nous allons être attentifs à ce que la réserve départementale, laquelle est de 5 postes que nous attribuons au titre de la convention-cadre, permette de limiter les fermetures de classes. Le nombre de celles-ci sera largement inférieur à ce que la stricte considération de la démographie aurait autorisé.

Oui, madame la sénatrice, une attention particulière sera portée au Jura ; oui, il y aura une recherche de convergence des taux d’encadrement entre les départements ; oui, les spécificités et difficultés particulières seront prises en compte.

J’invite tous les élus et les représentants de l’État à faire preuve d’unité pour soutenir le nécessaire rebond de l’école rurale.

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour répondre à M. le ministre.

Mme Sylvie Vermeillet. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour tous ces « oui » !

J’espère que les moyens seront donnés à notre recteur Jean-François Chanet, avec lequel j’ai plaisir à travailler, pour que ces taux d’encadrement soient rééquilibrés au sein même de la grande région Bourgogne-Franche-Comté.

statut des assistants d’éducation en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 616, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le ministre, ma question concerne le statut des assistants d’éducation, ou AED, en milieu rural. L’article L. 916-1 du code de l’éducation précise : « Les assistants d’éducation sont recrutés par des contrats d’une durée maximale de trois ans, renouvelables dans la limite d’une période d’engagement totale de six ans. »

Ce statut des assistants d’éducation, s’il est protecteur, et à juste titre, dans des établissements urbains, s’avère contre-productif pour des établissements ruraux, et a fortiori de montagne. En effet, ces établissements rencontrent aujourd’hui d’importantes difficultés de recrutement de ces assistants d’éducation et de pérennisation de ces emplois, préjudiciables pour l’ensemble de la communauté éducative.

Tout d’abord, les étudiants qui pourraient être candidats à ces postes suivent des formations post-baccalauréat dans des lieux éloignés de la commune de recrutement, ce qui ne leur permet pas d’être présents pendant la semaine.

Par ailleurs, il est important de rappeler qu’il s’agit dans la majeure partie des cas de temps partiels, ce qui ne contribue pas à renforcer l’attractivité de ces recrutements. La rotation des personnels concernés fragilise le fonctionnement des établissements, dans la mesure où les AED sont peu formés et accompagnés. À terme, une telle situation engendre une concurrence des plus malsaines entre les communes et les intercommunalités pour attirer et stabiliser sur des sites ces assistants d’éducation si précieux.

Dans ce contexte, il me paraît pertinent d’envisager une modification du statut des AED en actionnant plusieurs leviers possibles : une pérennisation de postes, notamment en zones de revitalisation rurale et de montagne ; une modification du statut des accompagnants d’élèves en situation de handicap, les AESH.

En effet, un poste d’AED pourrait fournir un bon complément de salaire à une personne qui disposerait d’un autre emploi local de proximité, tel qu’un poste d’animateur de centre de loisirs, ou d’un statut d’AESH. Dans un contexte de mise en œuvre d’établissements scolaires multisites en milieu rural, l’évolution de ces statuts contribuerait à renforcer l’attractivité de ces derniers pour les personnels de vie scolaire en milieu rural.

Monsieur le ministre, envisagez-vous, afin de soutenir la stabilité des équipes éducatives en zones de revitalisation rurale ou de montagne, de prévoir des modifications statutaires ou réglementaires qui pourraient bénéficier aux assistants d’éducation ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, cette question très importante est d’actualité. Une réflexion est en effet menée sur les assistants d’éducation dans le cadre du dialogue social qui a lieu au sein du ministère de l’éducation depuis plusieurs mois avec les organisations syndicales, et à l’occasion des réformes en cours, notamment le projet de loi que je présente actuellement devant l’Assemblée nationale.

Les AED, dont l’effectif est d’environ 50 000, sont très précieux dans notre système. J’ai annoncé hier des mesures extrêmement importantes pour l’école inclusive, qui reposent sur un statut renforcé des accompagnants : celui d’AESH, lequel correspond en réalité à un statut d’assistant d’éducation.

Les AESH seront prochainement au nombre de 80 000, grâce aux créations de postes que nous prévoyons. Avec les 50 000 AED, nous aurons en tout 130 000 personnes qui joueront un rôle fondamental, j’y insiste, pour notre système. Il nous faut penser leur mission de façon cohérente et, vous avez raison, en fonction des spécificités des territoires.

Vous avez mentionné plusieurs problèmes, notamment la difficulté rencontrée par les territoires ruraux pour recruter des AED.

Nous avons ouvert les possibilités de recrutement : les profils sont plus souples, en particulier pour les AESH. Surtout, le projet de loi que je défends prévoit la possibilité pour certains étudiants, à partir de la deuxième année universitaire, de devenir assistants d’éducation pendant huit heures par semaine, et de s’entraîner progressivement à assumer des fonctions au sein du système éducatif lorsqu’ils se destinent au métier de professeur.

Ce dispositif permettra de mener un travail plus collectif en vue du recrutement des assistants d’éducation. Concrètement, l’institution académique, qu’il s’agisse du directeur académique des services de l’éducation nationale, le DASEN, ou du rectorat, apportera son soutien aux établissements situés en milieu rural, qui ont parfois du mal à trouver les personnels nécessaires. Demain, des étudiants, qui viendront peut-être d’un peu plus loin, rejoindront ce nouveau vivier que nous sommes en train de constituer.

Votre question invite aussi à s’interroger sur le statut général de ces personnels. Nous avons fait un pas important, hier, avec l’adoption de la mesure relative aux accompagnants d’élèves en situation de handicap. Nous en ferons d’autres à l’occasion de la réforme du pré-recrutement que je viens d’évoquer. La discussion est ouverte, mais je crois que ces éléments permettent d’ouvrir une perspective nouvelle pour la rentrée prochaine, en facilitant le recrutement en milieu rural.

fusion des trois académies de la région auvergne-rhône-alpes

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, auteur de la question n° 617, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Didier Rambaud. Monsieur le ministre, dans le prolongement de la réforme des régions en 2015, vous avez annoncé la refonte de la carte des académies au 1er janvier 2020, avec une seule académie par région. Vous avez donc voulu organisé les 26 académies métropolitaines sur le périmètre de 13 régions administratives, ce qui conduirait dans la région Auvergne-Rhône-Alpes à la fusion de trois académies : Grenoble, Lyon et Clermont-Ferrand.

Si cette décision de fusion devait être prise, elle pourrait entraîner des difficultés sur des territoires très étendus et avoir une incidence non négligeable sur la vie scolaire et universitaire pour les professeurs, les personnels, les étudiants et les élèves.

En matière d’examens aussi, l’impact ne serait pas sans conséquence puisqu’un rectorat unique redéfinirait, sous l’autorité du recteur, le service du département des examens et des concours, qui prend en charge la bonne organisation de ceux-ci.

Par ailleurs, si certains postes devaient être transférés à plusieurs centaines de kilomètres de distance, beaucoup de familles seraient impactées par cet éloignement.

La métropole grenobloise, deuxième pôle de recherche après l’Île-de-France, centralise à elle seule 4 pôles internationaux de recherche sur 7 équipements situés en France.

Aujourd’hui les élus et les responsables universitaires de la région grenobloise font part de leur inquiétude quant à la fusion des trois académies de la région Auvergne-Rhône Alpes.

Grenoble est une métropole à part entière, avec ses pôles d’excellence et d’innovation. Ville étudiante cosmopolite, elle séduit chaque année environ 65 000 étudiants de 180 nationalités différentes. Comment cette fusion peut-elle être envisagée sans que son positionnement en tant que ville phare pour la vie universitaire et la recherche au cœur des Alpes soit dégradé par l’éloignement possible des centres de décision ?

J’ajoute que la consultation et la concertation autour de ce projet ont été inexistantes.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire comment sera mise en place cette nouvelle organisation ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Didier Rambaud, ce sujet extrêmement important de l’organisation territoriale a fait l’objet de notre part d’une étude minutieuse, mois après mois. Les consultations ont peut-être été imparfaitement menées dans votre territoire, mais je puis vous assurer qu’elles ont été très nombreuses ailleurs.

Notre objectif, vous le savez, était d’assurer une plus grande cohérence entre la réforme régionale lancée voilà trois ans et l’organisation de l’éducation nationale.

Nous avons souhaité, dès le début, que cette nouvelle organisation tire les conséquences des points positifs de cette réforme, mais aussi de ses éléments négatifs, afin que nous évitions de reproduire les mêmes défauts.

Nous avons donc considéré que le rapprochement était nécessaire – sur certains sujets, il faut en effet une interlocution unique entre l’éducation nationale et la région –, mais qu’il ne devait pas se faire au détriment de la volonté de proximité que nous avons affichée dès le début.

Cela déborde quelque peu le sujet de votre question, mais je tiens à préciser que cette volonté de proximité conduira à une plus forte départementalisation de la décision à l’éducation nationale à partir de la rentrée prochaine. Ce point a un rapport direct avec la nécessaire attention que nous devons porter à l’école rurale.

Cette volonté se traduit aussi par le fait que nous ne supprimons aucun rectorat – celui de Grenoble n’est donc pas supprimé. Nous nous attacherons cependant à ce que certains services de rectorats fusionnent à l’intérieur d’une même région, en vue d’une plus grande efficacité. Il y aura, par exemple, un seul chef du service académique d’information et d’orientation, ou CSAIO, par région, car, sur un tel sujet, il faut une seule tête, mais avec des équipes qui pourront être présentes à Lyon, Grenoble et à Clermont-Ferrand.

Cette vision pragmatique nous conduit, premièrement, à ne pas supprimer les rectorats, et, deuxièmement, à envisager des fusions de services, sujet par sujet, quand cela s’impose. C’est le principe de subsidiarité : lorsqu’un service est plus efficace au sein d’une académie, comme celle de Grenoble, il est maintenu à cette échelle ; dans d’autres cas, la fusion est nécessaire dans le même objectif d’efficacité.

La fusion ne signifie pas que tous les personnels vont dans la même ville ; ils peuvent se répartir entre Lyon, Grenoble ou Clermont-Ferrand.

Ces villes, qui peuvent être considérées comme moyennes, disposeront d’un service de portée régionale, ce qui aura un effet de revitalisation.

Frédérique Vidal vous répondra sur la question de l’enseignement supérieur. Il est bien évident que nous avons tous conscience de l’importance universitaire de Grenoble, et l’attention de l’État ne faiblira pas à son égard, bien au contraire.

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour répondre à M. le ministre.

M. Didier Rambaud. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Je prends acte que les rectorats seront maintenus, et je vais affiner mes questions afin de les adresser à votre collègue Frédérique Vidal.

conséquences du brexit sur l’économie de la région normandie

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, auteur de la question n° 610, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.

Mme Corinne Féret. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur l’inquiétude suscitée en Normandie, notamment dans le Calvados, par la perspective d’une sortie brutale, sans accord, du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Sur le plan économique, les risques sont lourds pour l’ensemble de notre territoire. La Normandie est la région qui commerce le plus avec le Royaume-Uni – agroalimentaire, produits chimiques et pétroliers. Elle est son premier partenaire économique avec 2,5 milliards d’euros d’exportations, soit trois fois plus que la Bretagne, et 1,7 milliard d’euros d’importations.

Certains secteurs d’activité seraient particulièrement impactés par un Brexit « dur ». S’agissant de la pêche, l’inquiétude s’ajoute aux problèmes déjà existants, en particulier pour les navires hauturiers. L’enjeu est considérable pour les pêcheurs normands et ceux du Calvados, qui pourraient perdre près de la moitié de leur surface de pêche.

La Normandie est également une terre d’excellence du cheval. C’est la première région d’élevage, de formation et de recherche équine. Cette filière aurait donc tout à craindre du rétablissement de normes sanitaires britanniques obligeant à réinstaurer des contrôles vétérinaires, longs et coûteux, au moment des transports des chevaux.

Sans accord, les ports normands risqueraient eux aussi de subir de plein fouet le Brexit, la rapidité et la simplicité des démarches administratives étant essentielles pour fluidifier le trafic et garantir un modèle économique portuaire concurrentiel.

Le pire est en effet à craindre. À Ouistreham, dans le Calvados, on appréhende de devoir réduire le nombre de liaisons quotidiennes avec la Grande-Bretagne en raison de l’augmentation des temps de désembarquement des ferries. Et dans tous les ports concernés, des travaux seraient nécessaires, le coût du rétablissement du contrôle sanitaire aux frontières représentant une enveloppe de 5 à 10 millions d’euros par port.

Cette question du maintien de la fluidité du trafic transmanche doit devenir une priorité. En pratique, il convient de permettre aux ports, à la fois, de faire face aux difficultés liées au Brexit et de pleinement saisir l’opportunité de redirection des flux de marchandises irlandais.

Ainsi un Brexit « dur » aurait des conséquences majeures – économiques, touristiques, en matière d’emploi et de sécurité intérieure –, auxquelles il convient de se préparer.

Je souhaite donc connaître les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre, en liaison avec la Commission européenne, pour accompagner le Calvados et la Normandie, qui seront sans nul doute lourdement impactés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Madame la sénatrice Féret, la France et l’Union européenne sont mobilisées pour assurer, dans toute la mesure du possible, un Brexit ordonné. Cela passe par la ratification de l’accord de retrait négocié au nom des Vingt-Sept par Michel Barnier.

Malheureusement, les incertitudes du côté britannique exigent que nous nous préparions à toutes les éventualités, y compris celle d’un Brexit sans accord. Les conséquences en seraient lourdes, et je suis consciente que la Normandie, du fait de ses liens privilégiés avec le Royaume-Uni, serait particulièrement exposée.

Comme vous le savez, la pêche est une priorité, et nous l’avons fait reconnaître comme telle par nos partenaires européens.

Notre priorité est claire : le maintien de l’accès aux pêcheurs britanniques et européens des eaux territoriales des deux ensembles. Nous souhaitons donc, comme la Commission, que le Royaume-Uni accepte un maintien des règles d’accès et de partage existantes, le temps que soit négocié un nouvel accord de pêche.

Le Gouvernement prépare toutes les hypothèses, y compris, si cela était nécessaire, un soutien à la fois européen et national aux pêcheurs. Je précise qu’il s’agirait d’un appui temporaire, jusqu’à l’entrée en vigueur d’un nouvel accord de pêche.

En outre, nous sommes particulièrement attentifs à l’éligibilité des ports français à des fonds européens, pour les aider à réaliser les investissements dans les infrastructures, rendues nécessaires par le Brexit.

Permettez-moi de mentionner que, dès à présent et jusqu’au 24 avril prochain, un appel à projets doté de 65 millions d’euros est ouvert pour permettre à certains ports, dont Cherbourg, Caen et Dieppe, d’obtenir des financements européens.

S’agissant enfin de la filière équine et des contrôles qui s’appliqueront à l’exportation d’animaux vivants vers le Royaume-Uni, les déclarations du gouvernement britannique se veulent rassurantes. À court terme, même en cas de Brexit sans accord, aucune nouvelle exigence ne sera introduite et le Royaume-Uni continuera de reconnaître durant un certain temps les documents et certificats délivrés dans l’Union européenne.

Nous chercherons, bien entendu, à pérenniser et à sécuriser cette situation dans le cadre de la négociation sur les relations futures entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.

gestion des appels d’urgence

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 579, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Olivier Cigolotti. Madame la ministre, ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur. Le 7 décembre dernier, un rapport commun de l’Inspection générale de l’administration, l’IGA, et de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, a été rendu public. Il porte sur les nécessaires évolutions du référentiel en matière de secours d’urgence aux personnes.

Ce rapport ne préconise pas la mise en place des plateformes départementales censées regrouper les appels du 15 et du 18, dont l’efficacité est avérée puisque de telles plateformes fonctionnent dans vingt et un départements, mais recommande plutôt la création de plateformes suprarégionales correspondant peu ou prou aux zones de défense et de sécurité, soit environ dix ou douze plateformes.

Cette proposition réduit à néant tout le travail réalisé, ici, au Sénat.

Le Président de la République, dans son intervention du 6 octobre 2017, rappelait son attachement au volontariat et à l’excellence de notre modèle de sécurité civile.

Il insistait également sur la nécessité de « mettre en place des plateformes uniques d’appels telles qu’elles existent déjà dans de nombreux départements ».

Dans le contexte de violence que connaît notre pays, tous les esprits sont tournés vers la protection de nos populations.

Au-delà des conservatismes, il est urgent de faire évoluer les systèmes de réception des appels d’urgence par les acteurs publics que sont les sapeurs-pompiers, les SAMU, ou services d’aide médicale urgente, la police et la gendarmerie.

Il est vraiment regrettable que le rapport IGA-IGAS ignore totalement l’option consistant, à terme, à faire du 112 l’unique numéro d’urgence, en s’appuyant sur les synergies de proximité et sur les expériences départementales réussies.

Je souhaite savoir, madame la ministre, si le Gouvernement entend procéder à la modernisation de l’action publique en créant des plateformes de « proximité » ou bien, comme le préconise le rapport que j’ai cité, des plateformes supradépartementales.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le sénateur Cigolotti, les services d’aide médicale urgente, comme les services d’incendie et de secours, connaissent un accroissement important de leur activité. En 2017, les seuls sapeurs-pompiers ont reçu 18 millions d’appels et effectué près de 4 millions d’interventions au titre du secours aux personnes.

Aussi une réponse opérationnelle optimale ainsi qu’une prise en charge efficace des appels sont-elles nécessaires.

Ainsi, à l’issue d’une consultation élargie, un plan ambitieux de trente-sept mesures concernant le volontariat a été arrêté par le ministre de l’intérieur. Ce plan vise notamment à diversifier le vivier de recrutement des sapeurs-pompiers volontaires et à fidéliser les effectifs actuels. Sa mise en œuvre sera suivie par le Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires et devrait intervenir entre 2019 et 2021.

En outre, conformément à la volonté du Président de la République, les services du ministère de l’intérieur travaillent étroitement avec la Direction générale de l’offre de soins sur un modèle cible d’organisation et de traitement unique des appels d’urgence du 112, ainsi que sur la définition d’une feuille de route pour atteindre cet objectif.

Ce modèle d’organisation passe par un travail important, dont le rapport que vous évoquez ne constitue qu’un élément d’éclairage.

Très concrètement, les ministères de l’intérieur et de la santé travaillent actuellement à l’interopérabilité de leurs systèmes de gestion des appels et des opérations. Ce système d’information, intitulé « NexSIS 18-112 » et géré par l’Agence du numérique de la sécurité civile, sera progressivement déployé dans les services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, selon un calendrier prévisionnel s’étendant de 2021 à 2025.

NexSIS 18-112 sera mis à la disposition d’un département test, la Seine-et-Marne, dès 2020. Construit pas à pas avec les SDIS et pour eux, parfaitement interopérable avec les systèmes des forces de police et de gendarmerie et avec ceux des SAMU notamment, ce système d’information placera ces services au cœur de ce que sera demain la réponse unique et intégrée aux appels d’urgence.

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour répondre à Mme la ministre.

M. Olivier Cigolotti. Merci, madame la ministre, de votre réponse. Dans ce dossier comme dans bien d’autres, nous avons besoin de proximité.

Cette proximité est indispensable pour permettre aux sapeurs-pompiers de piloter enfin leur mission de secours d’urgence aux personnes, qu’ils accomplissent seuls dans 95 % des cas, en palliant, bien souvent, les carences de notre système de santé.

répartition des nouveaux effectifs entre police nationale et gendarmerie

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteur de la question n° 247, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir sur la répartition des nouveaux effectifs entre police nationale et gendarmerie tels que prévus dans le PLF pour 2019.

Candidat, le Président de la République promettait la création de 10 000 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes, sans préciser néanmoins la clé de répartition qui s’appliquerait à cette création.

Il s’engageait à « donner à la gendarmerie toute sa place » dans la « mission de renseignement », reconnaissant « sa contribution désormais significative au renseignement territorial et au suivi des individus susceptibles d’être radicalisés ».

Nous le savons : la gendarmerie protège 50 % de la population et sa zone de compétence couvre 95 % du territoire. Elle vient en appui de la police lors des concentrations de population, comme nous avons pu le constater à l’occasion des manifestations des « gilets jaunes ».

Elle est confrontée à la gestion des flux de population et à la délinquance sur les axes de communication, dans des espaces ruraux très vastes, et avec des pics de population dans les zones d’affluence saisonnière.

Son maillage du territoire et sa connaissance du terrain lui confèrent une mission et un intérêt stratégique tout particuliers.

Les dernières programmations budgétaires laissent entrevoir la mise en œuvre d’une clé de répartition des effectifs nouveaux de 25 % pour la gendarmerie et 75 % pour la police, à mettre en regard du « 40-60 » antérieurement pratiqué. Il est également prévu de recruter des effectifs de la gendarmerie au sein de la DGSI, la Direction générale de la sécurité intérieure.

Madame la ministre, qu’en est-il aujourd’hui de ces recrutements et notamment, donc, de la présence de gendarmes au sein de la DGSI ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Madame la sénatrice Loisier, la sécurité des personnes et des biens dans tous les territoires constitue pour le Gouvernement une priorité.

La création de 2 500 postes à l’horizon 2022 est destinée à remettre à niveau les effectifs des unités territoriales de la gendarmerie, qui souffrent des conséquences de la politique de réduction conduite entre 2007 et 2012. Cette remise à niveau permettra de prendre en compte la hausse de la population dans la zone de compétence de la gendarmerie, que vous soulignez à juste titre.

Je rappelle qu’en 2018 le plafond d’emplois a atteint un niveau inédit depuis 2008 : 100 768 personnels, contre 100 192 en 2017.

J’ajoute que, depuis deux ans, l’écart entre les emplois votés et les emplois exécutés diminue : 1 935 équivalents temps plein annuel travaillé, en 2018, contre 3 754 en 2016.

L’augmentation des effectifs va se poursuivre entre 2019 et 2022, conformément à la volonté du Président de la République, et la gendarmerie bénéficiera de la création de 2 500 postes. Cette création de postes profitera en priorité aux unités assurant les missions de sécurité publique, dans le cadre de la poursuite de la mise en place de la police du quotidien et du développement de la fonction contact de la gendarmerie.

Les services de renseignement territoriaux ont par ailleurs vocation à être significativement renforcés d’ici à la fin du quinquennat, en partie par des militaires de la gendarmerie, qui contribuent à part entière au travail de ces services.

Il doit être rappelé que la clé de répartition entre les forces tient compte du champ de leurs missions respectives, en matière notamment de renseignement, de lutte contre le terrorisme, de contrôle aux frontières extérieures – cette activité s’accroît très fortement depuis 2015 –, de lutte contre l’immigration irrégulière et de gestion des centres de rétention administrative, autant d’objectifs prioritaires, au même titre que la sécurité du quotidien.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour répondre à Mme la ministre.

Mme Anne-Catherine Loisier. Merci, madame la ministre, pour ces éléments.

Je veux profiter de cette occasion pour attirer votre attention, dans une période où nos forces de sécurité sont fortement mobilisées, sur un protocole qui a été conclu en 2016, visant à mieux valoriser les carrières d’un certain nombre de fonctionnaires.

À ce jour, ce protocole n’est pas mis en œuvre. Or, me semble-t-il, le contexte actuel et le niveau de mobilisation desdits fonctionnaires nécessiteraient que le Gouvernement tienne ses engagements et reconnaisse les lourdes responsabilités et charges aujourd’hui assumées par les militaires sur l’ensemble de notre territoire.

réforme de l’obligation d’emploi des personnes handicapées

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, auteur de la question n° 606, transmise à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

M. Guillaume Chevrollier. Madame la secrétaire d’État, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, adoptée en septembre 2018, prévoit que les entreprises ou les collectivités ne pourront plus, pour remplir leur obligation d’emploi, comptabiliser les contrats de sous-traitance qu’elles passent avec des établissements d’aide par le travail, plus connus sous le nom d’ESAT, avec des entreprises adaptées ou avec des travailleurs indépendants en situation de handicap.

En effet, en théorie, les entreprises ont l’obligation de compter 6 % de travailleurs handicapés dans leurs effectifs.

Vous le savez, le travail est un élément important de la dignité de la personne humaine, et il est de notre responsabilité d’encourager l’insertion professionnelle des personnes handicapées, notamment en milieu ordinaire.

Le Gouvernement indique que les modalités de calcul du recours à la sous-traitance seront définies dans un futur décret, avec un objectif de « neutralité financière ».

Les associations représentantes des personnes handicapées, notamment l’Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales et de leurs amis, connue sous le nom d’Unapei, s’inquiètent de l’effet de cette réforme sur les donneurs d’ordre, qui, demain, ne seront plus incités comme avant à avoir recours à la sous-traitance.

Les associations craignent que cette réforme ne fragilise directement le travail des 250 000 personnes en situation de handicap qui ont aujourd’hui accès à un travail au moyen de l’accompagnement proposé par les ESAT.

Madame la secrétaire d’État, que leur répondez-vous ?

Je souhaite aussi savoir comment, concrètement, le Gouvernement compte garantir la neutralité financière pour les établissements d’aide par le travail, pour les entreprises adaptées et pour les travailleurs indépendants en situation de handicap, dont les activités pourraient être directement impactées par la réforme de l’obligation d’emploi des personnes handicapées.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Chevrollier, je vous remercie de votre question, qui me permet de clarifier les choses et de rassurer les personnes handicapées et les associations des gestionnaires d’ESAT et d’entreprises adaptées. Le dispositif que vous évoquez a déjà fait l’objet de nombreux échanges avec la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle du ministère du travail et, bien sûr, avec mes services.

Oui, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui a rénové l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés, a posé un principe tout simple : mieux distinguer l’emploi direct et l’emploi indirect des personnes handicapées, non pour opposer ces deux formes d’emploi, mais bien pour pouvoir décompter, en toute transparence, ce qui est fait par les uns et par les autres.

Oui, à compter du 1er janvier 2020, les entreprises ordinaires devront décompter différemment, dans le cadre de leur obligation d’emploi, les travailleurs handicapés qu’elles salarient et ceux auxquels elles concourent à fournir de l’activité en prestant avec des ESAT, des entreprises adaptées ou des travailleurs indépendants.

Et, oui, un décret d’application, à paraître d’ici à la fin mars, doit venir préciser comment, à partir de 2020, les achats en sous-traitance auprès du secteur adapté ou protégé resteront une bonne affaire pour les entreprises ordinaires, qui pourront les déduire de leur contribution due au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, l’OETH.

Je tiens à vous rappeler que toutes les parties prenantes sont autour de la table dans le cadre de l’élaboration de ce décret : les organisations syndicales et patronales, mais aussi les associations de personnes handicapées et toutes les têtes de réseaux gestionnaires d’ESAT et d’entreprises adaptées, y compris, bien sûr, l’Unapei.

Mais soyons réalistes : malgré notre très grand volontarisme et nonobstant la concertation en cours pour améliorer l’efficience de l’accompagnement vers et dans l’emploi des travailleurs comme des employeurs, il est assez peu vraisemblable que les entreprises atteignent au 1er janvier prochain la cible de 6 %, dont elles sont encore loin.

Toutes choses égales par ailleurs, les entreprises qui devraient avoir à s’acquitter d’une contribution au titre de l’OETH seront donc heureuses de pouvoir continuer à réduire son montant en déduisant leurs achats auprès d’ESAT et d’entreprises adaptées. Car, en effectuant de tels achats, elles font une triple action : pour elles-mêmes, en acquérant des biens et des services dont elles ont besoin pour leur fonctionnement courant ; pour leurs finances, en réduisant, par ces achats, le montant de leur contribution ; pour leur responsabilité sociale, en recourant à des achats responsables auprès de prestataires qui concourent directement, eux, à l’emploi de quelque 110 000 travailleurs en ESAT et 40 000 en entreprise adaptée.

Le dispositif de déduction devrait donc être en définitive assez simple, même si les discussions sont en cours pour savoir s’il faut permettre de déduire l’intégralité d’une facture de sous-traitance ou s’il faut limiter cette déductibilité à la seule partie se rattachant à la main-d’œuvre concernée.

L’intention du Gouvernement est en tout cas très claire. Elle est de continuer à valoriser le recours à un secteur adapté et protégé, qui joue un rôle majeur dans les parcours d’emploi de quelque 130 000 travailleurs handicapés, et que nous entendons bien renforcer, avec la création de 40 000 emplois dans le secteur adapté d’ici à 2022 et un soutien public porté à 500 millions d’euros, conformément à l’engagement conclu le 12 juillet dernier avec l’UNEA, l’Union nationale des entreprises adaptées, l’Unapei et APF France handicap.

M. le président. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. Vous n’êtes venue que pour une question, mais vous avez pris votre temps pour y répondre.

La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Guillaume Chevrollier. Merci, madame la secrétaire d’État, de cette réponse qui – je l’espère – dissipera les inquiétudes des associations de parents de personnes handicapées. Nous serons vigilants s’agissant de la rédaction du décret. Je sais que nous partageons tous, ici, l’objectif de construire une société plus inclusive ; nous serons donc, sur ce dossier, mobilisés et attentifs.

risques pour la santé des terrains synthétiques

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, auteur de la question n° 455, adressée à Mme la ministre des sports.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la France compte aujourd’hui 4 700 terrains synthétiques servant à la pratique du sport, du football au hockey sur gazon. Parmi eux, 3 000 sont de grande dimension, selon l’inventaire des équipements sportifs du ministère des sports.

Les communes sont nombreuses à avoir investi dans ce type de revêtement ; l’investissement consenti est certes plus onéreux – il est de trois à quatre fois plus élevé que pour un terrain en herbe –, mais l’entretien se révèle bien moins coûteux à l’usage. Surtout, en pratique, un terrain synthétique est utilisé environ 45 heures par semaine, contre 10 heures pour un terrain en herbe – le terrain synthétique est disponible par tous les temps.

Or, dans une enquête publiée dans le mensuel So Foot de novembre 2017, il est fait état de plusieurs études complémentaires pointant la dangerosité des granules de caoutchouc utilisés dans la fabrication des terrains synthétiques, permettant d’en augmenter la durée de vie et d’améliorer l’absorption des chocs.

Issus de pneus recyclés et, notamment, d’anciens joints de machines à laver, ces granulats contiendraient une teneur en hydrocarbures très largement supérieure à ce qui est généralement admis pour les enfants, ou encore des métaux comme le plomb et le zinc.

Les différents ministères concernés, au nombre de quatre, ont commandé à l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, une étude destinée à sensibiliser les acteurs et à rendre disponible, en la matière, une connaissance précise.

Le rapport de l’ANSES, qui devait être rendu en juin 2018, l’a été seulement le 29 août 2018. Ses auteurs, après avoir analysé les études et expertises actuellement disponibles, concluent, certes, à un risque peu préoccupant pour la santé, tout en évoquant des risques potentiels pour l’environnement.

Toutefois, l’ANSES fait état d’incertitudes liées à des limites méthodologiques et à un manque de données. Je salue d’ailleurs la position de l’agence, qui propose des axes de recherche prioritaires visant à remédier à ces lacunes.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, m’indiquer si vous avez connaissance des délais dans lesquels cette analyse complémentaire sera rendue, s’agissant notamment des incertitudes qui demeurent quant aux risques sanitaires liés à l’usage de granulats de pneus ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, en effet, l’usage de pneumatiques usagés dans les terrains de sport a suscité nombre d’interrogations et d’inquiétudes. L’ANSES a rendu publique son analyse le 18 septembre dernier.

Selon les auteurs de cette analyse relative aux éventuels risques liés à l’emploi de matériaux issus de la valorisation de pneumatiques usagés dans les terrains de sport synthétiques, la majorité des études publiées au niveau international concluent à un risque négligeable pour la santé des sportifs et des enfants.

Les analyses épidémiologiques existantes ne mettent en évidence aucune augmentation du risque cancérigène.

La note fait cependant état, comme vous l’avez rappelé, d’incertitudes liées à des limites méthodologiques et à un manque de données ; sont proposés, en réponse, des axes de recherche prioritaires qui permettraient de consolider les résultats et de compléter ainsi les évaluations de risque déjà disponibles au niveau international.

Aussi le Gouvernement a-t-il décidé de mener des travaux complémentaires destinés à mieux connaître les risques sur la santé humaine et sur l’environnement.

Par ailleurs, de nouvelles données sur les risques sanitaires, issues d’études en cours en Europe et aux États-Unis, devraient nous être communiquées très prochainement.

En matière environnementale, un groupe de travail sur les risques environnementaux liés à l’usage des granulats dans les terrains de sport devrait rendre ses conclusions en septembre 2019.

L’ensemble de ces travaux permettra d’avoir une visibilité globale et de décider des actions à conduire.

Nous ne manquerons pas, avec la ministre des sports et nos autres collègues concernés, de vous tenir informé des résultats de l’ensemble de ces travaux.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Daniel Gremillet. Merci, madame la secrétaire d’État, de votre réponse. J’attends avec impatience les conclusions de ces enquêtes – si j’ai bien compris, il faut attendre le milieu de l’année 2019. Ma question avait vocation à rassurer les familles ainsi que les maires, qui ont largement investi – il ne s’agissait nullement, bien sûr, de remettre en cause le recyclage.

déserts médicaux en seine-maritime

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 274, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Didier Marie. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question concerne les difficultés liées à l’existence de déserts médicaux dans le département qui est le mien, la Seine-Maritime.

La désertification médicale y est ancienne et connaît une progression exponentielle. Criquetot-l’Esneval, Cany-Barville, Eu, Caudebec-en-Caux sont autant de territoires où les médecins se font de plus en plus rares et où la population, souvent vieillissante, est de plus en plus inquiète.

Depuis mars 2018, ces secteurs sont désormais identifiés par l’agence régionale de santé via un nouvel indicateur : l’accessibilité potentielle localisée. Toutefois, ce zonage élaboré au niveau national ne traduit pas toujours la réalité des territoires, à l’image de celui de Fécamp, qui s’est vu déclassé en zone d’action complémentaire alors qu’il a perdu trois médecins et que cinq autres vont prochainement partir à la retraite.

Je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la question de la pertinence de ces zonages et sur la nécessité d’accompagner ces territoires pour y garantir une offre de soins de qualité. J’aimerais connaître les mesures que son ministère entendrait prendre à leur bénéfice.

En parallèle de ce nouveau zonage ont été créés les groupements hospitaliers de territoire, visant à mutualiser l’offre hospitalière. Or on constate trop souvent le déploiement d’une stratégie d’offre de soins très concentrée sur le plus grand établissement, au détriment des plus petits.

Pourriez-vous, madame la secrétaire d’État, nous fournir un premier bilan de l’action de ces groupements en Seine-Maritime et nous dire s’ils garantissent une offre de soins satisfaisante ?

Quant à la télémédecine, souvent évoquée, elle ne saurait être l’alpha et l’oméga de l’offre de soins dans les déserts médicaux. Pouvez-vous nous dire où en est son déploiement en Seine-Maritime ?

Il serait intéressant que le Gouvernement rende public l’ensemble des financements nationaux et locaux destinés à l’installation des professionnels de santé, afin de pouvoir en mesurer l’impact. Et j’aimerais savoir si vous envisageriez de recourir, en plus de ces mesures incitatives, à des mesures coercitives afin d’éviter à nos territoires de se retrouver dépourvus d’offre de soins, et, en particulier, de médecins généralistes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, le défi que nous avons à relever aujourd’hui est grand. En effet, le nombre de médecins généralistes ou spécialistes en accès direct exerçant en libéral est en baisse régulière depuis 2010 ; cette baisse est malheureusement susceptible de se poursuivre jusqu’en 2025.

Nous avons lancé, dès octobre 2017, le plan d’égal accès aux soins. Ce plan comporte un panel de solutions adaptables à chaque contexte local, car – nous en sommes tous convaincus – il n’y a pas une réponse unique aux difficultés démographiques.

La télémédecine fait bien sûr partie des leviers à mobiliser, mais ce n’est pas le seul.

Il faut aussi s’appuyer sur la réalisation de stages en cabinet, en maison ou en centre de santé au cours du cursus, ou encore sur le déploiement de l’exercice coordonné sous toutes ses formes, dont on sait qu’il représente un fort levier d’attractivité.

Dans ce cadre, un important travail méthodologique, largement concerté, a été mené pour permettre aux agences régionales de santé, les ARS, de mieux identifier les zones caractérisées par des difficultés d’accès aux soins, où sont mobilisées les aides à l’installation et au maintien des médecins.

Le fondement de ce travail est effectivement l’accessibilité potentielle localisée, l’APL, indicateur composite intégrant l’activité, l’âge des médecins généralistes exerçant sur le territoire ou encore le temps d’accès – afin de prendre en compte les spécificités locales, les ARS peuvent compléter par d’autres critères. Elles ont aussi la possibilité de réajuster régulièrement leur zonage ; un tel réajustement est d’ailleurs en cours en Normandie.

Le plan se déploie sur le terrain : le nombre d’étudiants ayant signé un contrat d’engagement de service public est en hausse de 13 % cette année; pour un total de plus de 2 800 bénéficiaires.

L’exercice coordonné sous toutes ses formes progresse aussi : le nombre de maisons de santé a augmenté de 18 % sur les neuf derniers mois, soit 1 209 structures ouvertes actuellement.

En Seine-Maritime, la dynamique est perceptible aussi, avec seize maisons de santé pluriprofessionnelles, ou MSP, ouvertes, et vingt-deux en projet.

Je comprends votre impatience, monsieur le sénateur, mais la contrainte à l’installation n’est pas la solution : introduire une coercition conduirait un grand nombre de médecins à retarder leur installation ou à s’orienter vers des solutions de contournement. Le risque serait ainsi d’aggraver encore davantage les problèmes d’accès aux soins.

Nous avons choisi de faire confiance aux acteurs.

La stratégie Ma santé 2022 annoncée par le Président de la République en septembre dernier nous dote de nouveaux leviers qui se déploieront progressivement en 2019 : la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé, la création de 4 000 postes d’assistants médicaux pour seconder et appuyer les médecins, le déploiement dans des territoires prioritaires de 400 médecins généralistes, en exercice partagé entre une structure hospitalière et une structure ambulatoire ou salariés d’un centre ou établissement de santé.

Pour réussir, nous aurons besoin que les élus soient à nos côtés ; en réunissant tous les acteurs, je suis convaincue que nous trouverons des solutions adaptées à chaque territoire.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Didier Marie. Merci, madame la secrétaire d’État, de vos réponses.

Je souhaite que votre ministère accorde une attention toute particulière à la Seine-Maritime, qui compte 1,3 million d’habitants et où le nombre de médecins ne cesse de baisser, tant dans les territoires ruraux que dans les quartiers urbains.

Les élus sont mobilisés, comme en atteste la création d’un nombre significatif de maisons de santé. Nous espérons que les efforts conjoints du Gouvernement et des élus permettront d’améliorer la situation.

insuffisance de psychiatres au centre psychothérapique de l’ain

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la question n° 336, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Patrick Chaize. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les difficultés que rencontre le centre psychothérapique de l’Ain, ou CPA, à Bourg-en-Bresse, du fait d’une carence en psychiatres.

Le 16 mars 2016, le Contrôleur général des lieux de privation des libertés publiait au Journal officiel des recommandations d’urgence concernant cet établissement, sur la base du constat d’un certain nombre de violations graves des droits fondamentaux des patients hospitalisés.

Par la suite, la direction de cet hôpital s’est vu enjoindre de mettre en œuvre dans les meilleurs délais des mesures correctives portant sur le fonctionnement général des services et les pratiques observées. Un plan d’actions a été engagé à moyen et long termes.

La politique volontariste mise en œuvre par le CPA et les efforts importants de l’ensemble de ses équipes ont conduit à sa certification par la Haute Autorité de santé en décembre 2017.

Pour autant, cet établissement, qui constitue la seule offre de soins psychiatriques du département, se heurte à de sérieuses difficultés. La baisse de la démographie médicale – celle-ci est dans l’Ain, toutes spécialités confondues, l’une des plus faibles de France – touche notamment la psychiatrie. Malgré la mise en place d’un projet d’attractivité, le CPA connaît en effet une carence importante en psychiatres.

Cette situation a conduit l’établissement à recourir à l’intérim médical. Si cette solution permet d’assurer une présence médicale dans les unités d’hospitalisation, la succession de missions d’une durée de deux à trois semaines a un impact négatif sur la qualité de la prise en charge. Au total, onze postes de psychiatres sont aujourd’hui vacants, ce qui a notamment des répercussions sur les structures extrahospitalières du CPA, qui ne sont plus en mesure de prendre en charge les patients dans des délais raisonnables, et ce dans un contexte de tension sur le recrutement infirmier.

Les médecins en exercice ont une lourde charge de travail ; à cette charge s’ajoutent l’intensité des réformes menées dans l’hôpital et une forme de discordance entre les exigences multiples auxquelles les psychiatres sont soumis et les moyens dont ils disposent. En outre, la moyenne d’âge des médecins, égale à 58 ans, laisse augurer des départs prochains ; les conditions de travail risquent donc de devenir encore plus compliquées.

Aussi, soucieux que soit garantie, dans l’Ain, une offre de soins psychiatriques satisfaisante, je souhaite connaître les mesures d’urgence concrètes que vous envisagez de prendre afin d’améliorer l’attractivité médicale, sachant qu’il faut au moins dix ans pour former un psychiatre – je le précise eu égard aux mesures annoncées en matière de formation médicale. La situation n’est plus tenable ; le contexte social se tend ; il y a là un enjeu de santé publique.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, le centre psychothérapique de l’Ain n’est plus le seul établissement de santé du département autorisé en psychiatrie. En effet, une nouvelle clinique dédiée à la psychiatrie a ouvert ses portes en 2018, à Châtillon.

Le centre psychothérapique de l’Ain doit faire face, comme vous l’avez dit, à une démographie des psychiatres défavorable ; il n’est malheureusement pas le seul de la région dans ce cas, et ce problème touche la France dans son ensemble.

Par ailleurs, le rapport public établi par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, s’il a certes permis de mettre en exergue la nécessité de faire évoluer certaines pratiques, a dans le même temps fortement fragilisé l’image de l’établissement.

De nombreuses mesures correctrices ont été prises, mais force est de reconnaître qu’elles n’aident pas l’établissement à recruter et à attirer des professionnels.

Le centre psychothérapique de l’Ain a été accompagné par l’agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, aussi bien dans l’élaboration de son plan d’actions après la visite du Contrôleur général des lieux de privation de liberté que dans la définition des orientations de son nouveau projet médical.

Ce nouveau projet, plus ouvert sur la cité, respectueux des droits des patients, renforçant les soins de réhabilitation psychosociale, devrait de nouveau attirer, progressivement, de jeunes psychiatres.

En attendant, un travail complémentaire est effectué au sein de l’établissement pour assurer sa juste place à chaque professionnel des équipes concernées.

demande statutaire des aides-soignants

M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton, auteur de la question n° 527, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Nicole Duranton. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la situation statutaire des aides-soignants. Actuellement, les personnes âgées atteintes de pathologies chroniques, de maladies neurodégénératives ou polypathologiques qui sont maintenues à leur domicile ne peuvent bénéficier chez elles que de l’aide des auxiliaires de vie ou des infirmiers libéraux. Débordés, les infirmiers libéraux en viennent parfois à refuser des interventions, notamment lorsqu’il s’agit de toilettes, au vu de la faible rentabilité de l’acte et du fait que, à l’hôpital, ce même acte n’est pas de leur ressort.

Il en résulte que les auxiliaires de vie, personnel dont le rôle est l’accompagnement dans la préparation des repas, l’entretien des locaux ou les tâches logistiques et qui n’a pas reçu les connaissances théoriques et pratiques pour la manipulation des patients et la surveillance des pathologies, se voient parfois contraints de pratiquer des soins qui vont au-delà de leurs prérogatives et de leur formation : toilette complète au lit des patients ou administration de médicaments.

Les aides-soignants, dont la formation répond parfaitement à cette typologie, n’ont pas la possibilité aujourd’hui d’exercer en libéral.

Est-il prévu une évolution du statut des aides-soignants leur permettant d’exercer en libéral, donc à domicile ? Une telle disposition soulagerait la charge de travail des infirmiers à domicile et permettrait aux aides-soignants d’être en mesure de réaliser ces actes dans l’intérêt des patients.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, les activités et compétences nécessaires pour exercer comme aide-soignant ont fait l’objet de premières réflexions engagées par le ministère des solidarités et de la santé en liaison avec les représentants de la profession.

Comme l’a annoncé le Président de la République lors de la présentation de la stratégie de transformation de notre système de santé Ma santé 2022, ces réflexions seront de nouveau ouvertes, afin de procéder à une actualisation des référentiels d’activité, de compétence et de formation de cette profession, en cohérence avec les besoins du système de santé.

Ces travaux devront notamment tenir compte des spécificités de l’exercice des aides-soignants auprès des personnes âgées, dans les différents modes de prise en charge existants, au domicile comme en établissement. Le rapport, qui sera remis très prochainement par M. Dominique Libault dans le cadre de la mission relative au grand âge et à l’autonomie, pourra à cet égard éclairer la démarche d’actualisation des référentiels.

Dans le cadre du plan Ma santé 2022, qui vise notamment à renforcer l’accès aux soins et à améliorer la qualité de la prise en charge, il est par ailleurs prévu de reconnaître une fonction d’assistant médical intervenant auprès de médecins exerçant en cabinet. L’accès à ces fonctions pourrait être ouvert à des professionnels aides-soignants dans des conditions qui doivent encore être définies.

Plusieurs axes de réflexion sont aujourd’hui ouverts et devraient permettre de faire évoluer le cadre et les conditions d’exercice des aides-soignants au sein de notre système de santé, au-delà des référentiels d’activité et de compétence et du cadre d’exercice auxquels ils sont aujourd’hui astreints. Leurs parcours professionnels devraient en être enrichis et les conditions de prise en charge des patients améliorées.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Nicole Duranton. Madame la secrétaire d’État, je me réjouis que cette piste fasse l’objet d’une réflexion. J’espère qu’elle deviendra une réalité et que nous obtiendrons une réponse favorable dans les prochains mois. En effet, il est important de maintenir au maximum à domicile les personnes âgées qui le souhaitent, d’autant que cette solution coûte nettement moins cher que le placement en maison de retraite.

nombre d’enseignants-chercheurs nommés à la faculté de médecine de lille

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteur de la question n° 553, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la secrétaire d’État, dans mon département, le Pas-de-Calais, et partout sur le territoire, la situation sanitaire est particulièrement préoccupante. Vous le savez, tous les voyants sont au rouge, ils le sont encore plus dans le bassin minier. Nous y sommes en effet confrontés à une surmortalité de 38 % par rapport à la moyenne nationale. Si aucune mesure d’urgence n’est prise, ce chiffre atteindra 46 % en 2025, d’autant que le bassin minier est le plus affecté par la mortalité liée au cancer.

Les réformes, dont la mise en place des groupements hospitaliers de territoire, les GHT, devaient apporter du mieux : moins de concurrence, plus de recherche de cohésion entre les établissements hospitaliers et la médecine de ville. Malgré cela, les hôpitaux de Lens et Béthune, membres du même GHT, sont tous les deux en difficulté, avec respectivement 20 et 80 suppressions de postes annoncées. Il manque toujours 6 millions d’euros pour la rénovation du bloc opératoire de Béthune et le service de cardiologie y a été supprimé, tandis qu’à Lens le projet de l’hôpital est sans cesse revu à la baisse et le service de pneumologie y a été supprimé.

Nous avons rencontré le doyen de la faculté de médecine de Lille, la plus importante par le nombre d’étudiants, et l’avons interrogé sur sa capacité à former plus de médecins à la suite de la disparition du numerus clausus. Sa réponse fut claire : par manque de praticiens-professeurs, le nombre d’étudiants n’augmentera pas.

Pourtant, le taux d’encadrement des étudiants par le corps enseignant est déjà plus faible qu’ailleurs – trois fois moins qu’à Paris et deux fois moins qu’à Marseille. On ne demande pas l’aumône, madame la secrétaire d’État, juste ce qui nous revient de droit. Nous souhaitons un plan de rattrapage dans le bassin minier, qui connaît une situation désastreuse dans le domaine de la santé.

Madame la secrétaire d’État, combien de postes d’enseignants le Gouvernement va-t-il nous octroyer pour que nous puissions retrouver une situation comparable à celle des autres régions, qui nous permette de retrouver une équité nationale ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, le vieillissement de la population, la forte augmentation des maladies chroniques, les progrès technologiques, l’apparition de nouvelles thérapeutiques ou l’entrée du numérique dans le monde de la santé ont considérablement modifié nos besoins et nos approches en matière de soins.

C’est dans ce contexte de défis que s’inscrit la mise en place du plan Ma santé 2022 présenté par le Président de la République, le 18 septembre dernier. Dans le cadre de ce plan, l’adaptation des formations aux enjeux de la santé de demain a notamment été identifiée comme un axe prioritaire de travail.

Le numerus clausus a montré ses limites pour assurer une couverture suffisante en professionnels de santé sur l’ensemble du territoire national. Il a par ailleurs conduit à opérer une sélection sur le fondement de critères peu pertinents par rapport à l’exercice que l’on attend de la pratique médicale et entraîne un gâchis humain inacceptable.

Le Président de la République a annoncé que le numerus clausus serait supprimé ainsi que la première année commune aux études de santé, la PACES, pour fluidifier et diversifier les parcours de formation et élargir la cartographie de l’offre de formation en santé. Cette réforme doit permettre de recruter des étudiants de profils plus variés, qui pourront s’orienter progressivement vers un métier au cours du premier cycle.

Ces mesures, ainsi que la suppression des redoublements tellement fréquents aujourd’hui d’étudiants ayant pourtant validé leurs ECTS en PACES, allégeront en partie la charge d’enseignement pesant sur les UFR, ou unités de formation et de recherche, délivrant des formations médicales. Elles contribueront également à améliorer la qualité de vie des étudiants et à les orienter vers la formation la plus adaptée à leurs connaissances, compétences et aptitudes.

Nous sommes attachés à préserver l’excellence de la formation délivrée. Aussi, il ne peut être imaginé de détériorer l’encadrement aujourd’hui apporté à ces étudiants et d’augmenter sans limite le nombre d’étudiants en formation.

Enfin, au-delà des créations de postes universitaires qui ont été enregistrées ces dernières années – je pense notamment aux postes de chefs de clinique universitaires de médecine générale –, les évolutions que nous enregistrons en matière de déploiement des nouvelles potentialités offertes par la dématérialisation, l’informatisation et la simulation en pédagogie ont déjà conduit les équipes universitaires à revoir en profondeur les conditions dans lesquelles elles délivrent leurs enseignements et vérifient les acquisitions de connaissances et la maîtrise de compétences de leurs étudiants.

La qualité de la formation en santé reste une priorité pour le Gouvernement, que les réformes désormais engagées ne sauraient remettre en cause.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la secrétaire d’État, votre réponse n’en est pas une ! Je ne vous ai pas demandé si la disparition du numerus clausus était une bonne chose ou pas – pour ma part, je pense que oui. Je vous demande combien de postes de professeurs seront octroyés à la faculté de Lille pour former les étudiants médecins, puisque, dans ce département, nous sommes bien en deçà de la moyenne nationale.

financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, auteur de la question n° 578, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Brigitte Micouleau. Madame la secrétaire d’État, j’appelle l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD.

Régulièrement, les personnels des EHPAD entrent en grève pour dénoncer leurs conditions de travail et les conditions de prise en charge de nos aînés.

Pourtant, rappelez-vous ! Afin de faire face au vieillissement attendu de la population et au développement des pathologies neurodégénératives, causes d’incapacités majeures pour les malades, le plan Solidarité grand âge 2007-2012 prévoyait le principe d’un soignant pour une personne âgée. Avaient également été actés le développement des unités spécialisées, pôles d’activités et de soins adaptés, les PASA, et celui des unités d’hébergement renforcé, les UHR.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces objectifs sont loin d’avoir été atteints !

La dernière étude de la Drees, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques rapporte qu’en 2017 le ratio d’encadrement n’était que de 0,6 %, que seulement 25 % des EHPAD disposaient d’un PASA et moins de 3 % d’entre eux d’une UHR, et ce alors même qu’aujourd’hui 70 % des personnes vivant en EHPAD souffrent de maladies neurodégénératives.

Dans les établissements, le malaise est profond. Il tend même à s’aggraver, en particulier dans les EHPAD publics, lourdement touchés par la dernière réforme tarifaire, entrée en vigueur le 1er janvier 2017. Celle-ci se traduit, de fait, par une augmentation du financement de la sécurité sociale et une baisse concomitante des dotations départementales.

Aussi, madame la secrétaire d’État, de véritables mesures correctives sont-elles envisagées dans les prochains mois pour permettre aux EHPAD publics de voir leur financement augmenter ? Il y va de la qualité de vie des résidents et des conditions de travail des personnels.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, la réforme de la tarification des EHPAD, introduite par la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, objective les besoins de financement des établissements en reliant l’allocation de ressources aux besoins en soins des résidents ainsi qu’à leur niveau de dépendance.

Entré en vigueur au 1er janvier 2017, le nouveau modèle tarifaire des EHPAD repose désormais sur une objectivation du besoin en soins et du niveau de dépendance des résidents de chaque établissement. Une étude d’impact de la réforme tarifaire a été réalisée par la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, au mois de septembre 2017.

De ces travaux, il ressort que l’impact cumulé de la réforme sur les volets soins et dépendance se traduit globalement par une augmentation des financements des EHPAD. Seuls 2,9 % des établissements présentent une convergence tarifaire à la baisse sur les deux volets de la réforme.

Afin de tenir compte des préoccupations des professionnels du secteur, un mécanisme de neutralisation des effets négatifs des convergences soins et dépendance a été instauré, afin de maintenir les ressources financières de ces établissements pour les exercices 2018 et 2019.

Les EHPAD publics ont perçu 70 % de ces financements et des mesures de compensation ont également été mises en place par certains conseils départementaux.

En 2019, une enveloppe supplémentaire de 18 millions d’euros viendra compléter les 29 millions d’euros mobilisés en 2018 pour poursuivre l’accompagnement des établissements.

Enfin, des mesures spécifiques en direction des EHPAD ont été mises en œuvre dès 2018 et se poursuivront en 2019.

Pour la période 2019-2021, les crédits supplémentaires sont estimés à 360 millions d’euros, parmi lesquels 125 millions d’euros seront mobilisés dès 2019.

Ces montants sont amenés à être revalorisés compte tenu des projections d’évolution des besoins en soins et du niveau de perte d’autonomie des résidents.

Par ailleurs, des crédits supplémentaires seront également consacrés au financement des plans de prévention en EHPAD – 30 millions d’euros –, à l’amélioration de la coordination des soins – 20 millions d’euros pour le passage au tarif global – ainsi qu’à la poursuite de la généralisation de la présence d’infirmiers de nuit – 10 millions d’euros.

Au-delà de ces différentes mesures, la concertation nationale lancée au mois d’octobre 2018 doit permettre de déboucher sur des propositions en vue d’une réforme ambitieuse pour relever le défi du grand âge et de l’autonomie.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brigitte Micouleau. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, mais elle ne satisfera pas les légitimes attentes de tous les intervenants du secteur. Sur les 126 établissements présents en Haute-Garonne, 60 % sont des EHPAD publics, qui souffrent d’un manque cruel de moyens humains et matériels.

Nos aînés méritent mieux qu’un abandon de la solidarité nationale ; nos personnels soignants méritent mieux qu’un désengagement de l’État !

remboursement des actes de biologie médicale innovants

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, auteur de la question n° 591, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Véronique Guillotin. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne le remboursement des actes de biologie médicale innovants en oncologie, sujet technique que Mme Buzyn connaît bien, puisqu’il suscite de vives inquiétudes au sein du monde médical.

Le référentiel des actes innovants hors nomenclature, le RIHN, a été créé en 2015 pour garantir une prise en charge temporaire et dérogatoire des actes innovants. Parmi eux figurent les tests oncogénétiques, qui permettent une analyse des risques familiaux à travers une prise de sang, et les tests sur tumeur, qui permettent un traitement ciblé dans une démarche de médecine personnalisée. Ces deux types d’actes sont de plus en plus prescrits par les établissements, sous l’impulsion des pouvoirs publics, leur intérêt étant très largement reconnu.

Cependant, non seulement l’enveloppe dédiée au RIHN est une enveloppe fermée, qui ne permet pas le remboursement complet de tests toujours plus nombreux, mais aussi les conditions de remboursement des actes RIHN ont fortement évolué en 2017 et 2018, mettant en difficulté les praticiens prescripteurs, les établissements de santé, voire les patients atteints de cancer.

En effet, les actes RIHN sont désormais partiellement remboursés au prescripteur et non à celui qui effectue les tests. Les laboratoires, libérés de cette contrainte financière, ont aujourd’hui la liberté de facturer des sommes importantes aux établissements prescripteurs, qui ne bénéficieront de la part de l’État que d’un remboursement limité et non précisé à ce jour.

Les conséquences se font déjà sentir : renoncement aux tests sanguins ou sur tumeur ; à l’inverse, prescription de médicaments – coûteux et possiblement inadaptés – sans que la cible sur la tumeur ait été recherchée.

La baisse d’activité est notable sur l’ensemble du territoire pour les établissements et pour les vingt-huit plateformes régionales labellisées par l’Institut national du cancer, qui recevaient jusqu’à présent une dotation RIHN au prorata des actes effectués.

Compte tenu de l’importance de ces tests moléculaires, qui s’inscrivent pleinement dans une démarche de prévention et pour la médecine personnalisée et qui permettent concrètement de sauver des vies, comment le Gouvernement entend-il remédier à cette situation ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, vous faites part des inquiétudes du monde médical concernant le remboursement des actes de biologie médicale innovants en oncologie. Voici les éléments de précision que je veux vous apporter.

La dotation versée aux établissements de santé au titre des actes inscrits au référentiel des actes innovants hors nomenclature, le RIHN, est restée stable depuis 2015 et s’établit à 377 millions d’euros.

Cette enveloppe permet de prendre en charge les actes innovants de biologie médicale et d’anatomocytopathologie non inscrits aux nomenclatures ainsi que les actes dits de routine de biologie médicale. Le ministère ne dispose pas de données consolidées permettant de déterminer les réelles dépenses engagées par les établissements de santé au titre de ces actes.

La récente accélération des demandes de prises en charge des tests innovants entraîne une pression sur l’enveloppe dévolue au RIHN et une tension sur le financement des actes de la liste complémentaire, le choix étant fait de privilégier le financement des actes innovants plutôt que les actes de routine de la liste complémentaire. L’évolution du financement des actes hors nomenclature pose aujourd’hui la question de la place de l’innovation et de son financement dans le secteur de la biologie.

Le ministère des solidarités et de la santé, l’assurance maladie et la Haute Autorité de santé ont lancé des travaux qui permettront une inscription à la nomenclature d’ici à 2022 de l’ensemble des actes de la liste complémentaire considérés par les sociétés savantes comme pertinents.

Cette sortie des actes de routine de l’enveloppe consacrée au RIHN devrait permettre de fixer le juste niveau de financement pour ces derniers et de dédier l’ensemble de l’enveloppe dévolue au RIHN à des actes réellement innovants, afin de soutenir l’innovation dans le domaine de la biologie.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Véronique Guillotin. Madame la secrétaire d’État, je souhaite insister sur la différence entre acte de routine et acte innovant. J’ai bien compris les évolutions concernant le volet actes innovants. Ces actes sont aujourd’hui extrêmement importants pour le traitement des tumeurs et pour que soit trouvée la meilleure adaptation du traitement de la tumeur cible. Il s’agit d’une technique de médecine personnalisée.

Sur le terrain, nous avons été alertés sur le fait que le remboursement aux prescripteurs entraîne aujourd’hui la mise en place d’une véritable économie de marché, avec des tests qui ont tendance à être réalisés dans des laboratoires privés, le départ des tests vers des plateformes à l’étranger et une baisse d’activité des plateformes labellisées par l’Institut national du cancer. La possibilité de facturation du test de panels de gènes autour de 2 300 euros a mis en grande difficulté les établissements de recours et les prescripteurs n’exerçant pas en établissement de santé.

contribution fiscale liée aux nouveaux modes de rémunération des médecins

M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 623, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Gilbert Roger. Madame la secrétaire d’État, j’appelle l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l’entrée en vigueur, depuis le 1er janvier dernier, d’une contribution fiscale destinée à financer la prise en charge des nouveaux modes de rémunération des médecins.

De nombreux Français ont reçu au mois de décembre 2018 un courrier de leur mutuelle les informant que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoyait de nouveaux efforts de financement de notre système de santé, notamment dans la rémunération du médecin traitant liée au suivi de sa patientèle et des activités de prévention, d’éducation à la santé ou de formation.

Le financement de cette réforme se traduit dans les faits par une nouvelle contribution fiscale de 0,8 % du montant de la cotisation annuelle, venant s’ajouter au montant global des cotisations dues pour l’année 2019. Le montant de cette taxe sera intégralement reversé à l’État. Cette augmentation de la fiscalité des contrats de santé grève fortement le budget des Français les plus fragiles.

Dans le contexte social difficile actuel, une exonération de cette taxe pourrait-elle être envisagée pour les usagers de la santé les plus modestes et à quel niveau de salaire ou de pension le Gouvernement serait-il disposé à la placer ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, depuis l’avenant 8 à la convention médicale conclu à la fin de l’année 2012, les organismes d’assurance maladie complémentaire participent au financement de rémunérations alternatives au paiement à l’acte, au titre du forfait médecin traitant, à hauteur de 150 millions d’euros par an.

La convention médicale du 25 août 2016 prévoit une progression de ces rémunérations forfaitaires avec le nouveau forfait patientèle médecin traitant. Les organismes complémentaires se sont engagés à faire progresser cette contribution à 250 millions d’euros en 2018 et 300 millions d’euros en 2019. Cet engagement a été mis en œuvre entre 2013 et 2017 via la mise en place d’une contribution dont le produit correspondait à l’engagement financier conventionnel.

Désireux de substituer à cette contribution un versement financier à destination des médecins, les représentants des organismes d’assurance maladie complémentaire ont travaillé avec la Caisse nationale d’assurance maladie à l’élaboration d’un schéma cible de versement alternatif. Les différentes options envisagées n’ont toutefois pas abouti, soit qu’elles n’étaient pas juridiquement robustes, soit qu’elles ne satisfaisaient pas les exigences des partenaires conventionnels.

L’article 17 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 n’a donc pas institué une nouvelle taxe : il vise à pérenniser ce dispositif et, dans un souci de simplification, à rationaliser l’assiette de cette contribution.

Cet alignement de l’assiette sur celle qui est applicable à la taxe de solidarité additionnelle permet de renforcer la stabilité de la contribution sans que cela se traduise par une augmentation de charge supérieure à l’engagement pris dans le cadre de la convention médicale.

Ainsi, ce dispositif ne conduit pas à remettre en cause le niveau de prélèvement applicable aux organismes complémentaires, qui est resté globalement stable ces dix dernières années.

Par ailleurs, contrairement à ce que vous indiquez, cette contribution n’est pas à la charge des assurés, mais assujettit directement le chiffre d’affaires des organismes. Elle n’a donc pas vocation à peser sur les ménages et à se traduire par une augmentation du montant des cotisations.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Gilbert Roger. Hélas, madame la secrétaire d’État, je peux vous fournir un exemple très précis. Une dame de 98 ans que je connais très bien doit s’acquitter d’une cotisation de mutuelle de 1 800 euros. Elle ne dispose de quasiment pas de ressources, étant au minimum social. Elle paye 2 450 euros d’EHPAD – on en parle depuis ce matin.

Je vous répète que la cotisation de mutuelle a augmenté de 0,8 point. Vos services vous racontent des blagues !

soins bucco-dentaires des handicapés dans la sarthe

M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, auteur de la question n° 618, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Nadine Grelet-Certenais. Madame la secrétaire d’État, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur le financement des dispositifs visant à dispenser des soins bucco-dentaires aux personnes en situation de handicap dans la Sarthe.

Depuis le début de l’année 2017, l’expérimentation, engagée par le ministère des solidarités et de la santé et pilotée par le collectif santé interassociations de la Sarthe, le COSIA72, a permis de mettre en place un véritable accompagnement des personnes en situation de handicap et des solutions concrètes d’accès aux soins dentaires.

Vous le savez, les personnes en situation de handicap moteur ou mental requièrent des soins adaptés, une formation au handicap des praticiens, des assistants formés à l’approche psycho-comportementale, des locaux accessibles et ont bien souvent besoin d’interventions particulières.

À la fin de l’année dernière, ce sont près de 500 personnes qui ont pu bénéficier de tels soins dans des délais raisonnables, aussi bien au centre hospitalier du Lude ou de La Ferté-Bernard qu’au centre de l’Arche à Saint-Saturnin ou encore à l’établissement public de santé mentale d’Allonnes. Il faut ici saluer l’implication de chirurgiens-dentistes partenaires de l’initiative.

L’étape suivante concernait le dépistage par caméra intra-orale qui aurait permis de passer, au-delà du curatif, au stade de la prévention des problèmes bucco-dentaires qui ont un lourd impact sur l’espérance de vie.

Malgré la réussite de ce dispositif, tout à fait conforme aux objectifs définis par la charte Romain Jacob, qui fédère l’ensemble des acteurs nationaux du soin et de l’accompagnement, il est aujourd’hui remis en cause, faute de financement suffisant. En raison de son succès et de la demande exponentielle de prise en charge, le budget est épuisé.

Il me paraît très important de soutenir ce dispositif avant-gardiste. Il répond à une véritable demande et pourrait être érigé à l’échelon national comme modèle d’accompagnement sanitaire des personnes en situation de handicap.

Ainsi, madame la secrétaire d’État, envisagez-vous de pérenniser ce dispositif indispensable et, parallèlement, de lancer une évaluation objective de cette expérimentation, comme le recommandaient à juste titre la Direction générale de l’offre de soins et la Haute Autorité de santé ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, l’ARS Pays de la Loire a fait de l’accès aux soins des personnes en situation de handicap l’une des priorités du projet régional de santé. Notamment grâce à la signature de la charte Romain Jacob, elle a réalisé un plan régional d’actions sur l’accès à la prévention et aux soins pour les personnes en situation de handicap.

Un volet important de ce plan régional est consacré au secteur bucco-dentaire, source fréquente de difficultés, de retards de prise en charge et d’accompagnement pour les personnes concernées. La maîtrise d’œuvre en a été confiée au dispositif régional d’appui Acsodent Pays de la Loire, chargé de fédérer les différents acteurs. Le cahier des charges, auquel a répondu l’association COSIA72, portait sur un dispositif expérimental de deux années, dispositif qui est arrivé à échéance au mois de décembre dernier.

Les porteurs de projet sont parfaitement informés que ce dispositif avait une durée de deux ans et seraient soumis in fine à évaluation.

À ce stade et malgré l’enjeu de la réponse aux soins bucco-dentaires des personnes vivant avec un handicap dans l’ensemble des territoires de la région Pays de la Loire, il ne peut être envisagé que les financements publics soient maintenus sans une évaluation scientifique et partagée de ce projet.

Ainsi, les services de l’ARS Pays de La Loire sont en train d’évaluer ce dispositif, dont il était prévu qu’il soit inscrit au projet médical partagé du groupement hospitalier de territoire.

Les partenaires du projet sont invités, dans ce laps de temps, à prendre contact avec les acteurs du groupement hospitalier de territoire 72 pour voir comment et sous quelle forme ce projet pourrait être éventuellement prolongé.

Par ailleurs, l’ARS, consciente des difficultés, notamment en termes de démographie de chirurgiens-dentistes, a décidé avec l’UFR d’odontologie de Nantes, de créer au sein du centre hospitalier du Mans un centre d’enseignement et de soins dentaires avec un double enjeu, pédagogique et clinique. Ce centre aura vocation à dépister et à soigner toute problématique dentaire, en particulier pour les personnes vivant avec un handicap.

L’ARS vise, par le développement de consultations dédiées, à mettre en place un dispositif départemental de gradation des soins qui pourra être animé par plusieurs partenaires.

Le travail mené au centre hospitalier du Mans entre dans ce cadre et est de nature à structurer les ressources de ce dispositif. Près de 2 millions d’euros sont attribués, par l’ARS, au projet. Ce centre dentaire est une opportunité, très attendue par la population du département, soutenue prioritairement par l’ARS et susceptible de renforcer l’attractivité territoriale des futurs chirurgiens-dentistes.

M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Nadine Grelet-Certenais. Madame la secrétaire d’État, si vous êtes convaincue par le service extrêmement important rendu à ces populations en grande difficulté – autistes et personnes handicapées, personnes très âgées… –, il me paraît important d’évaluer cette expérimentation, mais, en attendant le bilan, de maintenir le dispositif, dans la mesure où le département accuse une forte désertification médicale.

Je suivrai donc avec beaucoup d’attention la suite qui sera réservée à ce dispositif, qui répond à une forte attente.

transfert de la contribution climat-énergie aux collectivités locales

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la question n° 535, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

M. Guillaume Gontard. Madame la secrétaire d’État, compte tenu de l’actualité des derniers mois – je pense aux « gilets jaunes » –, ma question a évolué par rapport à la version que j’avais initialement déposée le 22 novembre dernier. Je n’évoquerai finalement ici que la contribution climat-énergie, la CCE.

Alors que le mouvement des « gilets jaunes » surprenait tout le monde par son ampleur, le Sénat, décidément bien plus en prise avec le pays que le Gouvernement, avait proposé durant l’examen du budget pour 2019 de flécher une partie de la CCE vers les territoires engagés dans la transition énergétique.

Il avait bien compris que l’une des demandes fortes de nos concitoyens était la mise en œuvre d’une fiscalité juste et cohérente. En effet, comme l’exprime le mouvement des « gilets jaunes » et comme en témoigne la colère de l’ensemble de nos concitoyens, une fiscalité écologique ne peut porter ce nom que si elle sert directement et intégralement à financer la transition écologique et énergétique et non à renflouer les caisses de l’État, grevées par la baisse de la fiscalité du patrimoine ou des entreprises.

Le Gouvernement n’a pas entendu cette position de bon sens et s’est contenté de suspendre la hausse de la CCE pour tenter, sans grand succès, d’éteindre la grogne sociale. Ce faisant, il néglige encore les territoires, qui sont les laboratoires de l’innovation démocratique, sociale, écologique et économique, et qui réalisent 70 % des investissements publics. Leur situation financière devient pourtant intenable.

Nous avons donc favorablement accueilli le propos du ministre de la transition écologique et solidaire qui, le 22 janvier dernier, à l’occasion des Assises européennes de la transition énergétique, entrouvrait la porte au transfert d’une partie de la CCE aux collectivités.

Pour ce faire, il semblait reprendre un amendement du Sénat et flécher une partie de la CCE vers les collectivités qui diminueraient leurs émissions de gaz à effet de serre en mettant en œuvre un plan climat-air-énergie territorial, un PCAET.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser les intentions du Gouvernement ? Entend-il confirmer ce premier pas et apporter un début de réponse à une revendication portée par nombre d’élus locaux et par leurs associations représentatives ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur Gontard, la loi de finances pour 2018 a institué un dégrèvement de taxe d’habitation qui, associé aux exonérations existantes, permettra à environ 80 % des foyers fiscaux de ne plus payer cet impôt en 2020. Dès 2019, ces contribuables bénéficieront d’une réduction de 65 % du montant de leur cotisation.

Cette mesure, qui traduit un engagement du Président de la République, représente un gain de pouvoir d’achat important et durable pour plusieurs dizaines de millions de foyers fiscaux. Elle a été adoptée en respectant les principes de libre administration et d’autonomie financière des collectivités territoriales : ces dernières continuent aujourd’hui de disposer d’un plein pouvoir de taux et d’assiette sur la taxe d’habitation.

Néanmoins, le mécanisme est amené à évoluer.

L’année 2019 sera celle d’une refonte de la fiscalité locale, dont le contenu et le calendrier dépendront notamment du grand débat national, souhaité par le Gouvernement, avec l’ensemble de nos concitoyens.

À terme, plus aucun foyer fiscal n’a vocation à payer une taxe d’habitation sur sa résidence principale.

Pour compenser la perte de recettes pour les collectivités territoriales induite par cette mesure, le Gouvernement proposera une refonte complète de la fiscalité locale, qui reposera sur les principes suivants.

La perte de la taxe d’habitation pour les communes et les EPCI à fiscalité propre sera compensée par l’octroi d’une ressource conforme au respect de leur autonomie financière. L’une des pistes avancées par le Gouvernement consisterait à la compenser principalement en transférant aux communes la taxe foncière aujourd’hui perçue par les départements et en octroyant aux EPCI à fiscalité propre une fraction d’impôt national dynamique.

J’ajoute que le niveau de cette ressource sera établi en référence au dernier montant perçu avant l’entrée en vigueur de la réforme. Les collectivités territoriales continueront de disposer des ressources fiscales nécessaires à l’exercice de leurs compétences.

En tout état de cause, une telle refonte de la fiscalité locale s’inscrit dans le cadre du débat et de la concertation souhaités par le Président de la République avec l’ensemble des citoyens, des élus locaux et de leurs associations représentatives.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Guillaume Gontard. Vous n’avez pas du tout répondu à ma question, madame la secrétaire d’État. Je parlais de la contribution climat-énergie. À la suite des derniers propos tenus par M. François de Rugy, je souhaitais savoir comment cette contribution allait être fléchée vers les collectivités.

Vous le savez, ce sont les collectivités qui feront la transition énergétique et écologique. Il va bien falloir trouver un système pour financer les innovations dans les territoires.

J’espère que vous aurez l’occasion de me répondre sur ce sujet.

contribution « vie étudiante et de campus »

M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, auteur de la question n° 557, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

M. Didier Mandelli. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants a créé une contribution « vie étudiante et de campus », la CVEC, d’un montant de 90 euros par étudiant, laquelle a remplacé la cotisation au régime étudiant de sécurité sociale.

Cette contribution a été instituée au profit des établissements publics d’enseignement supérieur, des établissements dispensant des formations initiales d’enseignement supérieur, des établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général et des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, les CROUS.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, le Gouvernement a instauré un plafond de 95 millions d’euros au-delà duquel le produit de cette taxe servira à « contribuer à la réduction du poids de la dépense publique ». Même si la CVEC ne concerne pas la totalité des quelque 2 738 000 étudiants inscrits, les recettes devraient malgré tout s’élever à plus de 140 millions d’euros.

J’étais intervenu contre ce plafonnement lors de l’examen de cette mesure au Sénat, comme je suis du reste défavorable à d’autres plafonnements, par exemple celui du Fonds de prévention des risques naturels majeurs. Mon amendement avait malheureusement été jugé irrecevable, ce qui a empêché toute discussion.

En effet, il ne paraît pas acceptable de faire financer par des étudiants, via cette nouvelle contribution, la réduction du poids de la dépense publique alors que le budget étudiant a besoin de ces fonds.

Face à la mobilisation du monde universitaire, le ministre de l’action et des comptes publics s’est engagé le 23 octobre 2018 devant l’Assemblée nationale à ce que l’intégralité des recettes soit versée au budget étudiant.

Madame la secrétaire d’État, maintenant que l’ensemble des inscriptions à l’université ont été finalisées et prises en compte, je souhaiterais connaître le produit total de cette nouvelle contribution et savoir si l’intégralité des recettes a bien été reversée au budget étudiant, conformément à l’engagement pris par le ministre.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur Didier Mandelli, vous l’avez rappelé, lors de la discussion de la loi de finances pour 2019, plusieurs acteurs de la vie étudiante ont exprimé des inquiétudes quant à la redistribution effective du produit collecté au titre de la contribution « vie étudiante et de campus » instituée par la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants.

La CVEC a pour objet exclusif l’accueil et l’accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif des étudiants. Sa vocation même est de favoriser la réussite des étudiants en améliorant leurs conditions matérielles d’études. Elle fait partie intégrante du plan Étudiant du Gouvernement.

D’un montant de 90 euros par étudiant, la CVEC est collectée par les CROUS et redistribuée aux établissements afin de leur permettre de mettre en place des actions de vie de campus, notamment dans le domaine de la prévention et de la santé des étudiants, du soutien aux associations étudiantes.

Si les étudiants règlent la CVEC lors de leur inscription administrative, le produit final de la collecte et, partant, le montant global attribué aux CROUS et aux établissements ne peuvent être connus au moment de la rentrée universitaire. En effet, de nombreux étudiants sont exonérés de cette contribution : si la plus grande partie d’entre eux ont pu faire valoir cette exonération lors de leur inscription, certains ont d’abord acquitté la contribution et seront remboursés dans un second temps.

Le plafond de recettes prévisionnelles qui figure dans le projet de loi de finances pour 2019, comme pour toute taxe affectée, tient compte de cette incertitude : il ne s’appliquera qu’en 2019. Les recettes collectées à l’occasion des inscriptions en 2018 seront donc intégralement reversées aux CROUS et aux établissements d’enseignement supérieur.

Les 95 millions d’euros inscrits dans le projet de loi de finances pour 2019 sont donc prévisionnels. Le Gouvernement s’engage à réévaluer ce montant au cours de l’année 2019 afin de garantir, au vu du produit effectivement collecté en 2018, que l’intégralité de la CVEC bénéficiera effectivement à la vie étudiante et de campus.

La vocation de cette contribution est bien de financer la vie étudiante, et exclusivement la vie étudiante, comme vous l’avez rappelé. Le Gouvernement partage votre point de vue.

M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, pour répondre à Mme la secrétaire d’État .

M. Didier Mandelli. Je vous remercie de cette réponse, madame la secrétaire d’État, qui me rassure.

Nous serons vigilants dans les mois à venir sur l’utilisation qui sera effectivement faite de l’intégralité du produit de cette contribution. Nous veillerons à ce qu’elle soit réservée à la vie des étudiants, qui en ont bien besoin. Si tel ne devait pas être le cas, il faudrait alors revoir le montant de la contribution à la baisse. Pour l’heure, je me satisfais de votre réponse, qui va dans le sens de ce que nous souhaitons tous, c’est-à-dire l’intérêt de la vie étudiante.

non-conformité d’un service intercommunal de cuisine centrale

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 596, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Bernard Fournier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur la situation de la communauté de communes des Vals d’Aix et Isable, dans la Loire, à l’issue d’un contrôle non conforme de la cuisine centrale.

Ce contrôle, effectué en novembre 2018, par la direction départementale de la protection des populations, a relevé la présence de matières premières provenant d’un établissement non agréé.

Ce service de cuisine centrale, né de la volonté des élus de mutualiser un outil, constitue une réponse de proximité aux besoins en restauration des communes pour les écoles et les accueils de loisirs. Il permet de proposer des menus variés, goûteux, équilibrés et de qualité aux enfants scolarisés et accueillis sur le territoire de l’EPCI.

L’objectif des élus est de maîtriser le plus possible la fourniture des repas en sécurisant l’approvisionnement et en améliorant la qualité du service. En outre, les fournisseurs locaux ont été accompagnés par des fonds publics afin de faciliter leur maintien sur ce territoire rural et de privilégier un approvisionnement en circuit court.

Les résultats étaient très satisfaisants puisque l’activité de la cuisine centrale intercommunale était en progression ces dernières années. Aujourd’hui, elle est un outil de proximité pertinent pour répondre efficacement aux besoins exprimés sur le territoire.

Pour toutes ces raisons, les élus considèrent que le relevé de non-conformité et l’application des mesures de police administrative, dans ce cas spécifique, vont à l’encontre du discours de l’État sur l’adaptation des règles au contexte local. Une telle décision nuit particulièrement au développement des activités économiques et, donc, au maintien des emplois en zones rurales. Aussi les élus attendent-ils une réponse adaptée à cette situation.

Madame la secrétaire d’État, j’aimerais connaître votre analyse sur ce cas extrêmement concret, ainsi que la ligne politique du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur Fournier, vous m’interrogez sur la situation de la communauté de communes des Vals d’Aix et Isable, dans la Loire, à la suite d’un contrôle non conforme de sa cuisine centrale.

Lors de l’inspection du 8 novembre 2018, il a été constaté que la cuisine centrale de Souternon s’approvisionnait en steaks hachés auprès d’une boucherie dérogataire à l’agrément européen. Malgré ce constat et quelques autres non-conformités mineures, un niveau global d’hygiène « satisfaisant » a été accordé à cette cuisine dans l’application Alim’confiance. Toutefois, compte tenu des modalités d’achat de la viande hachée, le rapport d’inspection a été accompagné d’un courrier d’avertissement.

Sur le fond, le règlement (CE) n° 853/2004 du 29 avril 2004 pose le principe d’une obligation générale d’agrément pour les autorités de chaque État membre des établissements du secteur alimentaire qui fournissent des professionnels.

Ce texte permet également aux commerces de détail, une boucherie par exemple, de déroger à l’obligation d’agrément, sous réserve de n’approvisionner que d’autres commerces de détail, un restaurant scolaire par exemple, et de façon « marginale, localisée et restreinte ». L’arrêté du 8 juin 2006 définit les critères de cette dérogation, mais il exclut de son champ d’application la vente de viande hachée.

L’arrêté du 21 décembre 2009 impose en effet que, dans un commerce de détail, « les viandes hachées [soient] préparées à la demande et à la vue de l’acheteur », ce qui exclut leur préparation à l’avance, pour d’évidentes obligations de sécurité sanitaire.

Cette dérogation à l’agrément sanitaire est accordée automatiquement aux commerces de détail qui en font la demande au préfet. Il s’agit donc d’une procédure très simple, qui ouvre aux producteurs locaux un complément à la vente directe grâce à la possibilité de vendre leurs produits à des clients professionnels dans un rayon de 80 kilomètres. Cette distance peut même être portée à 200 kilomètres par le préfet « dans des zones soumises à des contraintes géographiques particulières ».

Dans ce contexte, le cadre juridique actuel paraît donc tout à fait adapté au développement des territoires ruraux et des circuits courts, comme vous l’appelez de vos vœux, tout comme nous d’ailleurs. Pour des raisons de sécurité sanitaire, il y a simplement quelques aliments plus sensibles qui en sont exclus, telle la viande hachée. Nous devons tous veiller à concilier qualité et proximité, mais pas au détriment de la sécurité.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Bernard Fournier. Madame la secrétaire d’État, votre réponse n’est pas totalement adaptée. Je dois dire que je suis quelque peu déçu par la frilosité du Gouvernement.

centre national d’études spatiales et guyane

M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, auteur de la question n° 598, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

M. Antoine Karam. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis son installation en Guyane, le Centre national d’études spatiales, le CNES, a toujours participé au développement économique et social du territoire. C’est dans cet esprit qu’il a participé en 1966 à la création du Centre médico-chirurgical de Kourou, le CMCK, pour répondre aux besoins du Centre spatial guyanais, ou CSG, ainsi que de l’ensemble de la population.

Lorsque ce même CMCK a été placé en 2004 sous la responsabilité de la Croix-Rouge, le CNES a poursuivi son accompagnement en versant une contribution annuelle de 500 000 euros destinée aux investissements. Ce soutien financier précieux a été porté de manière exceptionnelle à 1 million d’euros en 2017 pour aider l’hôpital.

Cependant, face à la transformation récente du centre médical en établissement hospitalier public, le CNES a annoncé son désengagement du nouvel actionnariat. Cette décision largement contestée par le mouvement social qui a immobilisé l’établissement plus d’un mois en décembre dernier est d’autant plus regrettable qu’elle réduira fortement le potentiel d’investissement de l’établissement, la direction se retrouvant face à un véritable casse-tête pour équilibrer son budget.

Vous le savez, ce désengagement fait suite à celui qui a été opéré, quelques mois plus tôt, dans le capital de la Société immobilière de Kourou, la SIMKO, également créée en son temps pour répondre aux besoins en logements du Centre spatial guyanais.

Enfin, je rappelle qu’il avait été annoncé dans un rapport d’octobre 2017 sur les retombées financières du Centre spatial guyanais pour les collectivités territoriales que les contributions financières du CNES en Guyane devaient augmenter de 10 millions d’euros supplémentaires entre 2018 et 2020.

Dans ce contexte, vous comprendrez que ces deux décisions, prises certes dans des contextes différents, suscitent des interrogations chez les Guyanais et les élus sur la stratégie de l’État concernant la mission d’accompagnement au développement économique et social remplie par le CNES depuis des décennies en Guyane.

Si un protocole d’accord a été signé au centre hospitalier de Kourou, personnels et élus restent particulièrement attachés à l’engagement du CNES.

C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je souhaiterais connaître précisément le rôle que le Gouvernement entend donner au CNES dans la société guyanaise. Compte tenu des enjeux en matière de santé publique pour l’ensemble de la population, le Gouvernement entend-il reconsidérer l’engagement du CNES au sein du centre hospitalier de Kourou ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur Antoine Karam, vous l’avez rappelé, le Centre médico-chirurgical de Kourou, qui a en effet été créé par le CNES avec l’appui de la Croix-Rouge dans les premières années de la base spatiale, a bénéficié annuellement d’une contribution du centre spatial aux dépenses d’investissement pour 500 000 euros par an. Cette subvention a été portée à 1 million d’euros en 2016 et à 1,5 million d’euros en 2017 pour soutenir le fonctionnement de l’établissement, alors dans une situation économique structurellement déficitaire. Ses pertes, qui atteignaient plusieurs millions d’euros par an, étaient supportées par la Croix-Rouge.

Cette situation, qui n’était plus viable ni pour la Croix-Rouge, ni pour le CNES, ni pour nos concitoyens de Guyane et les employés du centre spatial, a conduit au rattachement du centre de Kourou au service public hospitalier de droit commun. Ce rattachement a été acté dans les accords de Guyane, et le CMCK, devenu CHK, est aujourd’hui un établissement public de santé qui s’inscrit dans la stratégie territoriale pilotée par l’agence régionale de santé. Ce rattachement au service public hospitalier a vocation à pérenniser cet établissement tout en permettant au CNES de recentrer ses actions au profit de la Guyane autour de ses domaines de compétences.

Le CNES, au travers du Centre spatial de Kourou, est un contributeur majeur de l’économie de la Guyane. Selon l’enquête récente de l’INSEE, le spatial contribue pour 15 % au PIB du territoire. Il emploie 1 700 salariés, dont 75 % sont recrutés sur le bassin d’emploi guyanais.

L’activité globale du centre crée 4 600 emplois, directs, indirects et induits, ce qui représente un sixième de l’emploi salarié privé en Guyane. L’activité du CSG produit 58 millions d’euros de recettes fiscales, dont 31 millions d’octroi de mer, soit 22 % de l’octroi de mer de la Guyane.

Au-delà de ces éléments directement liés à son activité spatiale, le CNES contribue au développement de la Guyane dans le cadre de conventions avec les acteurs locaux de l’État et les collectivités, pour un montant de 40 millions d’euros sur la période 2014-2020.

Le CNES finance ainsi pour 27 millions d’euros sur cette période une convention entre le CNES, l’État et la région, qui contribue au financement des programmes européens – le Fonds européen de développement régional, le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, etc. – et à des projets de développement local.

Le CNES alloue chaque année 13 millions d’euros aux communes de Guyane pour soutenir des actions de développement décidées par les municipalités. À la suite des événements de mars et d’avril 2017, le CNES a augmenté sa contribution de 10 millions d’euros sur la période 2018-2020 dans le cadre du plan Phèdre II décidé par la ministre des outre-mer et la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Ce programme est principalement consacré aux domaines de l’éducation, de la recherche et de l’enseignement supérieur.

Dès la rentrée 2018, le CNES a triplé le nombre de bourses d’enseignement supérieur, lequel est passé de dix à trente chaque année, et contribué au développement des établissements supérieurs de Guyane. Il a ainsi permis l’extension de l’institut universitaire de technologie, la rénovation des infrastructures de l’université et le passage au numérique.

M. le président. Veuillez conclure, madame la secrétaire d’État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. Pour conclure, il n’y a donc pas de désengagement du CNES en Guyane. Au contraire, le Centre accroît son soutien financier, qui passe de 40 millions d’euros à 50 millions d’euros.

M. le président. Madame la secrétaire d’État, on ne peut pas exagérément dépasser son temps de parole, même pour répondre à une question sur les outre-mer ! (Sourires.)

pêche au bar et 48e parallèle

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 362, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous le savez, la Bretagne, singulièrement le Finistère, est un territoire tourné vers les activités maritimes, en particulier la pêche, qu’elle soit professionnelle ou plaisancière.

Plusieurs parlementaires se sont mobilisés l’année dernière contre une situation injuste : au nord du 48parallèle, qui traverse le cap Sizun à la pointe de la Bretagne, il est interdit de pêcher le bar à titre de plaisance alors que les plaisanciers peuvent en pêcher trois par jour en Bretagne sud, au-dessous du 48e parallèle. Le bar navigue pourtant dans l’ensemble des eaux de l’Atlantique vers la Manche.

Cette situation particulièrement injuste nous a conduits à solliciter le ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Une solution avait pu être trouvée pour le dernier trimestre 2018. Les pêcheurs plaisanciers au nord avaient été autorisés à pêcher un bar par jour.

Pour l’année 2019, la période de pêche d’un bar a été limitée du 1er avril au 31 octobre au nord du 48e parallèle, quand il est toujours possible de pêcher trois bars par jour au sud.

Ma question est simple, monsieur le ministre de l’agriculture et de l’alimentation : pourrait-on faire en sorte, puisque les stocks sont dans une meilleure situation, que les plaisanciers puissent pêcher jusqu’à trois bars par jour sur l’ensemble du territoire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Didier Guillaume, ministre de lagriculture et de lalimentation. Monsieur le sénateur, cher Michel Canevet, merci d’avoir posé cette question. Vous êtes un fin connaisseur de la pêche des bars – de la pêche en général – en Bretagne. Pour le bar, comme pour tous les autres stocks, le Gouvernement défend des modalités de gestion durable, dans le strict respect des avis scientifiques. La durabilité de la pêche dans notre pays est absolument essentielle.

Votre question porte sur la différence de traitement entre les pêcheurs plaisanciers au nord et au sud du 48e parallèle en termes de possibilités de captures et de périodes de pêche.

Le CIEM, le Conseil international pour l’exploration de la mer, qui émet des avis scientifiques, distingue deux stocks de bars de part et d’autre du 48e parallèle nord. Il a émis des avis scientifiques différents sur la situation de chacun de ces deux stocks, l’état biologique de la ressource du stock du sud étant jugé meilleur que celui du nord. C’est la raison pour laquelle le conseil des ministres de la pêche a décidé d’adopter des mesures pour le bar plus restrictives dans la zone nord que dans la zone sud. Cette différence vaut tant pour la pêche professionnelle que pour la pêche de loisir.

Pour autant, les études scientifiques sur ces stocks et sur les liens éventuels entre eux se poursuivent. En fonction des résultats, la vision du CIEM sur les stocks pourrait évoluer au cours des prochaines années. Dans ce cas, le conseil pourra en tenir compte pour la définition des mesures de gestion.

Vous avez posé une question sous-jacente sur la possibilité pour la France d’harmoniser pour les pêcheurs plaisanciers les captures de bars entre le nord et le sud du 48e parallèle. La France n’a pas le droit de prendre des mesures plus souples que celles qui sont prises à l’échelon européen. Si harmonisation il y avait, elle ne pourrait se faire que sur la règle plus stricte, c’est-à-dire celle qui est en vigueur pour le stock du nord.

Comme vous l’avez rappelé, j’ai obtenu, lors du conseil des ministres de la pêche en décembre dernier, un assouplissement du cadre réglementaire de la pêche de loisir du bar du stock du nord pour 2019. Ces nouvelles règles permettent de capturer un bar par jour et par personne sur les sept mois les plus fréquentés par les pêcheurs plaisanciers, soit du 1er avril au 31 octobre.

C’est un progrès important, mais, si les scientifiques constatent à l’avenir une amélioration de l’état biologique des stocks de bars, les mesures de gestion pourront évoluer.

Parallèlement, j’ai décidé de confier une mission à un parlementaire sur ce sujet, en particulier sur la définition d’un cadre régulé et apaisé de cohabitation entre les pêcheurs professionnels et les pêcheurs plaisanciers.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Je suis très satisfait d’apprendre, monsieur le ministre, que vous avez décidé de désigner un parlementaire en mission. J’espère qu’il viendra jusque dans le Finistère pour rencontrer l’ensemble des acteurs. Je vous invite également, monsieur le ministre, à venir visiter les principaux ports de pêche artisanale en France, notamment le quartier maritime du Guilvinec. J’espère que vous pourrez le faire assez rapidement afin de prendre la mesure des préoccupations de l’ensemble de ce secteur d’activité, essentiel pour l’économie de la Bretagne occidentale.

Enfin, nous souhaitons bien entendu qu’une concertation sur le bar ait lieu le plus rapidement possible.

conséquences de l’arrêté sur les retournements de prairies

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 615, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Mme Agnès Canayer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le département de la Seine-Maritime est un territoire formé de plaines constituées de dépôts marins lagunaires, qui ont donné les calcaires, la marne, l’argile et, sur son littoral, des vallées crayeuses.

La complexité du réseau hydrographique et les nombreuses fissures favorisent l’infiltration des eaux de surface. De plus, la nature des exploitations agricoles du département, dont l’équilibre économique repose sur la polyculture et l’élevage, a aussi modifié le paysage et les sols.

La lutte contre le ruissellement et l’érosion étant deux défis majeurs, le syndicat mixte des bassins versants de la pointe de Caux s’est doté de compétences afin de prévenir ces phénomènes.

Des liens étroits ont été noués avec les agriculteurs pour favoriser des mesures de prévention afin de faire évoluer les pratiques en matière de culture et de réaliser des aménagements d’hydraulique douce adaptés aux besoins agricoles.

Cependant, la question du retournement des prairies reste sensible. L’arrêté préfectoral du 31 décembre 2014 a institué l’avis préalable du syndicat des bassins versants pour le retournement des prairies permanentes. Cet avis, uniquement consultatif, avait favorisé le dialogue entre les professionnels et avait permis au syndicat de bassins versants de faire des recommandations.

L’arrêté ministériel du 13 novembre dernier a supprimé ce régime d’autorisation préalable pour la Seine-Maritime, au motif que les retournements de prairies permanentes étaient inférieurs au seuil d’alerte du ratio national.

Cette décision suscite de vives interrogations de la part des éleveurs et des responsables des syndicats de bassins versants de la Seine-Maritime.

D’une part, les fluctuations permanentes des modes de calcul du ratio pour la Normandie génèrent une instabilité néfaste pour la mise en œuvre des procédures de régulation. Deux questions se posent : comment est calculé le ratio pour la Seine-Maritime ? comment sont prises en compte les spécificités géographiques et agricoles de notre département ?

D’autre part, les agriculteurs et les syndicats des bassins versants souhaitent plus de stabilité sur le régime des autorisations de retournement de prairies. Comment assurer, sur cette base, un dialogue plus serein pour garantir une gestion concertée des espaces agricoles ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Didier Guillaume, ministre de lagriculture et de lalimentation. Madame la sénatrice, vous posez une question importante sur les retournements de prairies, un sujet crucial pour l’agronomie, l’avenir de notre agriculture et le captage du carbone.

Votre interrogation porte plus spécifiquement sur le régime des autorisations pour le retournement des prairies, lequel a été supprimé pour la Normandie.

En 2018, les retournements de prairies étaient soumis à autorisation individuelle dans votre région, et ce n’est en effet plus le cas en 2019. La raison en est d’abord réglementaire : lorsque la part des prairies permanentes se dégrade de plus de 2,5 % dans une région, la France a prévu la mise en place d’un système d’autorisation individuelle préalable à la conversion de prairies en d’autres usages.

C’est ce régime qui s’appliquait en 2018 en Normandie. Il a permis d’augmenter la part des prairies dans la région et, au regard de ses bons résultats, il n’a pas été reconduit en 2019.

Cette décision est une mesure de simplification destinée à ne pas surcharger inutilement nos agriculteurs de contraintes administratives lorsqu’elles ne sont pas nécessaires. Les bénéfices environnementaux des prairies permanentes sont avérés. Celles-ci sont donc essentielles et doivent être préservées.

Le Gouvernement a choisi de faire confiance à nos agriculteurs pour préserver ces prairies. La transition agro-écologique est une ambition partagée par chacun, les agriculteurs comme le Gouvernement.

Si les agriculteurs normands ne géraient pas durablement leurs prairies en 2019, le régime d’autorisation serait rétabli en 2020, assorti de potentielles obligations de reconversion.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour répondre à M. le ministre.

Mme Agnès Canayer. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

J’entends vos arguments, mais c’est précisément cette fluctuation permanente du régime des autorisations préalables qui rend aujourd’hui la gestion difficile – une année il faut solliciter une autorisation ; l’année suivante, ce n’est plus nécessaire…

Certes, on ne peut qu’adhérer à la volonté de simplifier la vie de nos agriculteurs, mais ces autorisations permettaient aussi d’instituer un dialogue. Il faut, me semble-t-il, trouver d’autres voies pour maintenir ce dialogue essentiel pour une gestion prévisible et durable des espaces communs.

fonds d’accompagnement à la succession et à la transmission

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteur de la question n° 629, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Mme Martine Berthet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les jeunes agriculteurs des Alpes du Nord ont imaginé un fonds d’accompagnement à la succession et à la transmission, appelé « FAST », qui permettrait aux agriculteurs désirant céder leur exploitation à un jeune de bénéficier d’un accompagnement personnalisé, incitatif et encadré, durant les cinq années qui précèdent leur cessation d’activité effective.

Ce système, mis en place avec le concours de la mutualité sociale agricole, la MSA, des Alpes du Nord, des chambres d’agriculture et des fédérations départementales des syndicats d’exploitants agricoles, les FDSEA, repose sur des exonérations de charges MSA, pouvant aller de 15 % à l’entrée du dispositif jusqu’à 75 % lors de la cessation d’activité. Il a été expérimenté dans les deux Savoie et pourrait être étendu à la région Auvergne-Rhône-Alpes, voire au niveau national.

Si quelques dispositifs existent déjà, il est nécessaire de proposer cet accompagnement renforcé pour une étape très importante de la vie professionnelle et personnelle des agriculteurs cédants. En parallèle, un travail doit aussi être mené sur les leviers à mettre en place afin d’encourager de jeunes agriculteurs à acquérir une exploitation, particulièrement via des dispositifs d’acquisition progressive du capital.

Ainsi, les jeunes agriculteurs souhaitent lancer une dizaine d’expérimentations FAST dans chacun des départements des Alpes du Nord – Savoie, Haute-Savoie, Isère –, un secteur où la transmission est particulièrement difficile. La MSA a débloqué une enveloppe suffisante pour les mettre en place. Il ne leur manque que l’accord du Gouvernement, votre accord, monsieur le ministre, pour mettre en œuvre ce projet de façon pérenne.

Plus que le monde agricole, c’est toute l’économie rurale qui s’en trouvera dynamisée, l’arrivée de jeunes agriculteurs, par le renouvellement des activités, ayant un réel impact sur le commerce local, les entreprises et, plus globalement, les emplois.

Sachant que 50 % des agriculteurs aujourd’hui en exercice seront à la retraite dans dix ans, il est urgent de les inciter à transmettre leur exploitation à des plus jeunes.

Aussi, j’aimerais savoir, monsieur le ministre, comment vous entendez soutenir ce projet indispensable pour l’agriculture des Alpes du Nord et, plus largement, pour l’ensemble de l’agriculture française.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Didier Guillaume, ministre de lagriculture et de lalimentation. Madame Berthet, la transmission et l’installation, c’est l’avenir de notre agriculture. Il faut former des jeunes, transmettre, éviter l’artificialisation des terres et l’augmentation de la taille des exploitations.

Le projet FAST, imaginé par les jeunes agriculteurs d’Auvergne-Rhône-Alpes, permettrait aux agriculteurs cédant leur exploitation à un jeune de bénéficier d’une exonération partielle de cotisations sociales pendant cinq ans, pouvant aller de 15 % à 75 % des cotisations sociales dues par le cédant. Cette exonération s’effectuerait par un prélèvement de cotisations sociales sur le fonds d’action sanitaire et sociale de la caisse de MSA de rattachement.

À ce stade, ce projet intéressant pose deux difficultés aux services du ministère. D’une part, les crédits d’action sanitaire et sociale des caisses sont destinés par la loi aux agriculteurs en difficulté, et une caisse locale ne peut pas, de sa propre initiative, les affecter à un autre usage. D’autre part, nous avons une difficulté d’ordre communautaire, puisque l’aide ainsi allouée prendrait le caractère d’une aide d’État et entrerait sous le plafond des aides de minimis – avec un taux de 75 %, les sommes peuvent être importantes.

Je vous rejoins néanmoins sur l’intérêt du projet au fond et sur l’enjeu crucial du renouvellement des générations en agriculture, au centre des politiques publiques en faveur de l’installation et de la transmission.

Ainsi, le soutien à la transmission des exploitations constitue l’un des objectifs du programme d’accompagnement à l’installation-transmission en agriculture, ou AITA, rénové en 2016 et décliné dans les régions. Les actions de formation, de conseil, de communication et d’information à destination des cédants et des nouveaux agriculteurs constituent des axes d’intervention privilégiés de ce programme.

L’intervention financière de l’État au profit de ce programme repose sur un budget annuel d’environ 13,5 milliards d’euros, issu principalement de la taxe sur les cessions de terres rendues constructibles, dite « taxe JA ».

Outre les programmes régionaux, le programme AITA prévoit des actions à l’échelon national dédiées à l’animation et à la communication.

Trois appels à projets nationaux ont ainsi été lancés, dont l’un traitait spécifiquement des actions en faveur de la transmission des exploitations. Portés, respectivement, par l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’APCA, le syndicat Jeunes agriculteurs – JA –, la plateforme associative Initiatives pour une agriculture citoyenne et territoriale, ou INPACT, et par le réseau national des espaces-test agricoles, ou RENETA, ils rendront leurs conclusions à la fin de cette année.

Ces conclusions seront ensuite partagées avec le Comité national de l’installation et de la transmission, le CNIT, dans le souci de toujours mieux relever collectivement le défi du renouvellement des générations. Nous verrons alors, madame la sénatrice, quelle place peuvent prendre les différents dispositifs imaginés par les régions, tout en veillant à ne pas, au final, pénaliser les agriculteurs par les minimis.

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour répondre à M. le ministre.

Mme Martine Berthet. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Vous en convenez, la situation des agriculteurs est préoccupante. Ces derniers comptent sur vous et sur l’évaluation des appels à projets pour que la situation puisse évoluer.

Il est primordial que la transmission des exploitations soit facilitée pour sauver l’agriculture française. On compte aujourd’hui trois départs en retraite pour une installation. La première proposition formulée par les agriculteurs dans le grand débat national concerne précisément la transmission des exploitations.

M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Allocution de M. le président du Sénat

M. le président. Mes chers collègues, dans ces périodes de désarroi, chacun peut comprendre les souffrances exprimées. La crise que traverse notre pays depuis l’automne dernier montre les fractures auxquelles le Gouvernement, les élus nationaux et les élus locaux doivent répondre : fracture sociale et fracture territoriale, mais aussi crise de confiance.

Face au malaise exprimé par nos concitoyens, chacun essaie de mieux écouter. C’est ce que nous faisons tous actuellement : les maires, élus de proximité, en premier lieu, mais aussi les parlementaires et le Gouvernement.

Toutefois, je veux le réaffirmer solennellement : rien – j’insiste sur ce terme ! – ne justifie le recours à la violence ; rien ne justifie de bafouer l’État de droit ; rien ne justifie les provocations contre la République.

Quand plus aucun symbole n’est respecté, comment s’étonner de la résurgence de comportements que nous pensions définitivement appartenir au passé ? La nausée que nous inspire la résurgence de l’antisémitisme, tout comme les récentes profanations d’églises, renforce notre détermination à ne jamais rien céder quand l’essentiel est en jeu.

Un certain nombre d’élus – députés, sénateurs, élus locaux – ont récemment été victimes d’agressions ou de menaces. Certains ont vu leurs locaux vandalisés. Je veux exprimer ici la solidarité du Sénat à leur égard et adresser un message de soutien tout particulier au président de l’Assemblée nationale, notre collègue Richard Ferrand.

Attaquer des hommes et des femmes qui investissent une grande partie de leur vie dans la défense de l’intérêt général et qui s’engagent au service de leurs concitoyens, c’est nier la démocratie, c’est malmener la République. (Applaudissements prolongés.)

5

Article 74 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises
Explications de vote sur l'ensemble

Croissance et transformation des entreprises

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises (projet n° 28, texte de la commission spéciale n° 255, rapport n° 254, rapport d’information de la commission des affaires européennes n° 207).

Explications de vote sur l’ensemble

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises
Proclamation du résultat du scrutin public solennel (début)

M. le président. Avant de passer au scrutin, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits par les groupes pour expliquer leur vote.

Je rappelle que chacun des groupes dispose de sept minutes pour ces explications de vote, à raison d’un orateur par groupe, l’orateur de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.

La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, il me revient d’ouvrir cette dernière discussion sur le projet de loi PACTE, ce qui est un plaisir et un honneur.

Je rappelle que ce projet de loi a pour objet d’aider les entreprises à se développer, en particulier les PME et les TPE, qui constituent le maillon faible de l’économie française. Il vise à simplifier leur vie administrative, financière et fiscale et à renforcer leurs sources de financement en fonds propres. Il tend aussi – j’y reviendrai – à développer leur « vocation sociale », pour reprendre les termes du rapport Notat.

Trois mois de débats préparatoires, un mois de débats en ligne, une discussion approfondie en commission spéciale à l’Assemblée nationale comme au Sénat, des échanges nourris dans les deux chambres et plus de 1 000 amendements examinés dans cet hémicycle : le travail a été sérieux et approfondi.

Pas moins de 47 articles ont été adoptés conformes, qui sont relatifs notamment au régime du VIE, le volontariat international en entreprise, aux experts-comptables, à la réforme de l’agrément des entreprises solidaires d’utilité sociale, à la création d’une procédure d’opposition aux brevets, ou encore à la représentation plus équilibrée des femmes dans les fonctions exécutives des sociétés.

De façon moins positive, 43 articles ont été supprimés, sur la réforme de la gouvernance de Business France, la limitation à trois du nombre de mandats d’un président de chambre de commerce et d’industrie, ou CCI, l’assouplissement du régime du prêt interentreprises ou encore la suppression de la délégation parlementaire à la sécurité économique, unanimement demandée par l’Assemblée nationale.

Le texte s’est enrichi de 47 articles nouveaux portant notamment sur l’interdiction de la mise à disposition et de l’usage de certains produits en plastique – nous avons eu un long débat sur ce sujet –, la suppression de l’interdiction de la fabrication de certains produits phytopharmaceutiques, l’autorisation, sous conditions, de l’ouverture des commerces de détail alimentaire le dimanche après-midi, ou encore les mesures relatives au réseau des CCI.

De nombreux points de divergence subsistent encore avec l’Assemblée nationale, notamment sur la suppression de l’obligation de stage préalable à l’installation des artisans – les discussions ont été nourries sur ce point –, la réforme de la gouvernance de Business France, le relèvement de 200 à 250 salariés du seuil pour l’obligation de mise à disposition d’un local syndical, ou encore le relèvement à 100 salariés de tous les seuils fixés à 50 salariés dans le code du travail. S’agissant de ces derniers points, le Sénat envoie ainsi deux messages négatifs au monde du travail. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Chers collègues, vous verrez, on vous demandera pourquoi vous avez voté ces dispositions !

Je pourrais citer encore des divergences sur la durée des soldes ou l’adaptation des règles relatives à l’ouverture dominicale des commerces.

Enfin, l’article 44 du texte, qui vise, selon le vocable que l’on privilégie, à ouvrir le capital ou à privatiser ADP, c’est-à-dire Aéroports de Paris, ainsi que La Française des jeux, a suscité de vifs débats et une forte opposition dans cet hémicycle.

Pour ce qui concerne ADP, le Sénat a rayé d’un trait de plume toutes les améliorations que le rapporteur avait apportées au dispositif adopté par l’Assemblée nationale : cahier des charges, conditions de la régulation, surveillance des différents tarifs. Chers collègues, permettez-moi de vous le dire, l’article 44 a été supprimé par une majorité pour le moins hétéroclite. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Bruno Sido. Et alors ?

M. Charles Revet. C’est la preuve qu’il était bien de le faire !

M. Bernard Jomier. C’était dans l’intérêt général !

M. Albéric de Montgolfier. C’est cela, le nouveau monde ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Raison. Monsieur Yung, est-ce ainsi que vous concevez la politique ?

M. Richard Yung. Vous ne faites pas de politique, mais moi oui ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Grosdidier. Ce n’est pas de la politique, c’est de l’idéologie !

M. Richard Yung. Chers collègues, ce n’est pas parce que l’on crie que l’on a raison !

La suppression de l’article 44, disais-je, a été votée par 124 sénateurs Les Républicains, 20 RDSE, 74 socialistes et 16 CRCE… C’est l’arche de Noé ! (Huées sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Mes chers collègues, revenons à bord… (Sourires.)

M. Richard Yung. Dix sénateurs Les Républicains et les trois quarts des sénateurs de l’Union Centriste ont toutefois voté cet article.

S’agissant de La Française des jeux, nous n’avons pas compris…

M. Philippe Dallier. Ce n’est pas grave ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Richard Yung. … en quoi cette entreprise engageait des orientations stratégiques, ni pourquoi vous n’avez pas pris en compte les 20 000 buralistes, qui pourront devenir actionnaires, ainsi que la possibilité d’homogénéiser et de concentrer la régulation.

Pour toutes ces raisons, il me semble difficile de parvenir à un accord avec l’Assemblée nationale. (Exclamations.)

M. Rachid Temal. Avec le groupe La République En Marche de l’Assemblée nationale, plutôt !

M. Richard Yung. Je le souhaite, mais je n’y crois guère.

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission spéciale chargée dexaminer le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises. Il faut y croire !

M. Richard Yung. Je doute en effet que les deux bords de cet hémicycle soient prêts à faire les compromis nécessaires. (M. Martin Lévrier applaudit. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Je le regrette, car le texte comporte d’excellentes avancées, qui ne seront malheureusement pas mises en valeur.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe La République En Marche ne votera pas le texte issu du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Fabien Gay. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi de plus de deux cents articles aurait pu être découpé en au moins dix projets de loi, comme le prouvent les nombreuses et longues interventions qui ont eu lieu au début de chaque article essentiel – il y en a même eu une, relative à la privatisation d’ADP, qui ressemblait davantage à un meeting de campagne macronien qu’à une prise de parole sur article…

Pour notre part, nous sommes heureux qu’une majorité d’idées se soit dégagée pour refuser la privatisation et le bradage du monopole naturel que constitue ADP. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

M. Fabien Gay. Monsieur Yung, ce n’est pas une majorité hétéroclite qui s’est exprimée, mais une large majorité d’idées, pour défendre l’intérêt général. Voilà ce qui s’est passé, tout simplement ! (Mêmes mouvements.)

Après le scandale des autoroutes, celui de l’aéroport de Toulouse-Blagnac et celui à venir de nos barrages hydroélectriques, voilà un premier coup d’arrêt dans la vente de nos actifs dans des secteurs stratégiques de l’État. Non, en France, tout n’est pas à vendre, surtout pour aller engraisser quelques multinationales comme Vinci ! (M. le ministre de léconomie et des finances manifeste sa désapprobation.)

Mes chers collègues, rendez-vous le 7 mars prochain : dans le cadre de son ordre du jour réservé, le groupe CRCE vous proposera de renationaliser les autoroutes… (Exclamations.)

Mme Sophie Primas. N’exagérons rien !

M. Fabien Gay. Quant à vous, monsieur le ministre, il vous faudra respecter la voix du Sénat. Il est inconcevable, dans le moment politique que nous traversons, que vous puissiez passer outre cette quasi-unanimité. Envoyer un message contraire serait désastreux, au moment où vous prônez le dialogue partout dans le pays.

Nous vous faisons une proposition : sortez de ce projet de loi les privatisations et intégrez cette question dans le grand débat national. Êtes-vous d’accord pour que l’État continue à céder des parts pour engraisser le privé ? Et comme vous êtes en train de réfléchir à un référendum à questions multiples, n’hésitez pas à poser cette question, à côté de celles qui porteront sur l’augmentation des salaires et le rétablissement de l’ISF !

M. Fabien Gay. Pour le reste du texte, il y a un fil rouge cohérent : amplifier, sous couvert de vouloir « moderniser et simplifier », le détricotage du code du travail. En réalité, vous voulez créer un nouveau western social, où la loi du plus fort deviendra la norme. Par exemple, en deux cents articles, il n’y a aucun droit nouveau pour les salariés ! L’entreprise serait au cœur de votre projet de loi, mais pas les entrepreneurs, ni les salariés, ni les sous-traitants, ni les collectivités territoriales !

Comment comprendre qu’un certain nombre de nos amendements répondant à l’intérêt général, faisant écho à la crise sociale que nous traversons et en lien avec le texte aient été déclarés irrecevables ou refusés ?

Augmenter le SMIC ? Pas à l’ordre du jour ! Augmenter les salaires ? Pas à l’ordre du jour ! Donner un droit d’intervention aux salariés ? Pas question, irrecevable ! Conditionner le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ? Pas de réponse ! Apporter de la transparence et encadrer les rémunérations des hauts revenus et les dividendes ? Votre réponse : « Vous n’y pensez pas, nous ne sommes pas en Union soviétique ! » (Sourires.)

Mme Françoise Gatel. C’est vrai !

M. Fabien Gay. Au terme de cette discussion, on ne sait plus, in fine, si ce texte sert l’intérêt général ou des intérêts particuliers !

Comment comprendre que nous ayons passé près de deux heures de débat pour renforcer la place de Paris au bénéfice de quelques centaines de traders londoniens qui seraient tentés de venir chez nous en raison du Brexit, alors que nous n’avons, à aucun moment, traité de la question de la relation entre donneurs d’ordres et entreprises sous-traitantes ? Pourtant, cette question concerne directement nos TPE et nos PME, qui, elles, représentent des centaines de milliers d’emplois dans le pays.

Les dégâts sont énormes avec ce nouveau texte : financiarisation accrue des entreprises, renforcement du secret des affaires via l’opacité des comptes, attaques contre nos mécanismes nationaux de solidarité et fragilisation des droits des salariés, changements de gouvernance pour la Caisse des dépôts et consignations et La Poste, ou encore casse des seuils sociaux.

Le Medef en rêvait, la droite ne l’avait pas fait, vous l’avez enfin réalisé ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.) Mettre à bas les seuils sociaux ! Cette mesure devrait autant participer à la création emploi que le CICE, c’est-à-dire à un niveau proche de zéro. (M. le ministre fait un geste de dénégation.) Mais vous avez réussi à faire croire que la présence syndicale, la représentation des salariés, un certain nombre de droits qui leur seraient concédés et les cotisations sociales constitueraient un frein au dynamisme de nos entreprises et à l’emploi.

C’est d’autant plus dogmatique que, en 2017, les 47 % d’entreprises interrogées par l’INSEE déclarant rencontrer des « barrières à l’embauche » les associaient davantage à l’incertitude sur la situation économique et à la difficulté de trouver une main-d’œuvre qualifiée qu’à la suppression des seuils sociaux.

Un jour, monsieur le ministre, il faudra nous dire quelle est votre vision de la société. Une société où il n’y a en fait qu’une seule règle : l’absence de règles ! Vous prolongez les mesures prises dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 et vous détruisez notre système de solidarité nationale. Pour vous, la protection des salariés et les cotisations sociales sont insupportables et deviennent des obligations, des règles, des contraintes, dont les entreprises devraient être libérées, car elles empêcheraient l’embauche dans notre pays.

Pourtant, nous devrions être fiers de notre modèle social et le défendre plutôt que tout faire pour le tuer à petit feu. Le monde entier nous l’envie ! Les cotisations sociales permettent de remplir les caisses de la sécurité sociale, et nous savons bien qu’un salarié bien soigné et bénéficiant d’une protection sociale est un salarié compétitif.

Enfin, sur nombre d’articles, votre texte tombe à plat. Vous parlez d’intéressement et de participation sans parler de partage de richesses ni de salaires. Nous avons travaillé sur une légère refonte de l’épargne retraite, alors que, en ce moment même, M. Delevoye conduit une consultation pour mettre à bas notre système par répartition.

Vous évoquez le statut d’auto-entrepreneur sans, à aucun moment, mentionner le fait que ce statut est dévoyé par des plateformes comme Uber ou Deliveroo pour exploiter des jeunes sans protection sociale. Heureusement que, parfois, les tribunaux vont plus vite que le législateur pour considérer que ces jeunes sont des salariés à part entière.

Votre texte, monsieur le ministre, connaîtra le même sort que les cinq derniers qui étaient relatifs aux entreprises : il ne résoudra rien ! Au contraire, il aurait fallu écouter le murmure qui monte dans le pays : « Partagez le gâteau ! Partagez le gâteau ! Partagez le gâteau ! »

M. Bruno Sido. Quel gâteau ?

M. Vincent Éblé. Et la cerise ?… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Fabien Gay. Je ne sais pas si c’est pour demain ou pour après-demain, mais ce jour arrive à grands pas. Les peuples en ont assez de souffrir pendant que d’autres accumulent des richesses. Alors, continuez à ne pas voir que ce système libéral s’écroule sous vos yeux et que l’espoir est revenu !

Comme le dit le poète Gibran Khalil Gibran, « les fleurs du printemps sont les rêves de l’hiver racontés le matin à la table des anges ». (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Que vienne vite ce printemps pour tous les peuples !

Le groupe CRCE votera contre ce texte. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Martial Bourquin. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi avait pour ambition de transformer notre économie. Cette ambition est louable, mais encore faut-il clairement identifier ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans notre système. Et c’est peut-être là que le bât blesse !

Dans ce débat, le Sénat a eu un rôle essentiel : supprimer les privatisations d’ADP et de La Française des jeux. C’est vraiment une avancée essentielle, qui a été obtenue après des journées et des soirées de débats. En ce qui me concerne, je trouve très intéressant que la gauche et la droite défendent ensemble l’intérêt national, lorsqu’il s’agit de pépites publiques comme ces deux entreprises ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)

La chambre haute, chambre des territoires, avec ses contradictions…

M. Julien Bargeton. C’est sûr !

M. Martial Bourquin. … et avec ses différents courants de pensée, a voulu, à une large majorité, garder dans le giron de l’État ces deux grandes entreprises publiques.

Nous, sénateurs socialistes, pensons profondément que privatiser des entreprises publiques florissantes, c’est privatiser des rentes !

M. Jean-François Husson, rapporteur. Et vous ne l’avez jamais fait quand vous étiez au pouvoir ?

M. Martial Bourquin. Ces rentes doivent revenir à l’État et peuvent permettre à notre économie, monsieur le ministre, d’être plus innovante ! On ne vend pas des bijoux de famille à des intérêts privés. Ces privatisations sont une aberration économique et une erreur politique. Certes, je sais bien que, après l’abandon de Notre-Dame-des-Landes, on peut être tenté de faire un cadeau royal à Vinci, mais cela ne servirait pas l’intérêt national ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Bruno Retailleau applaudit également.)

Dans les courriers relatifs au grand débat et lors de nos discussions avec les « gilets jaunes » reviennent sans cesse des reproches liés au bradage d’intérêts stratégiques, aux privatisations ratées des autoroutes et de l’aéroport de Toulouse et à l’abandon de notre industrie. En privatisant ses entreprises, la France perd la maitrise de son destin et de ses moyens d’action.

Monsieur le ministre, nous pensons que ce projet de loi PACTE est une occasion manquée. Nous regrettons que nos amendements, ambitieux, aient été rejetés. Ils visaient notamment à redéfinir l’entreprise du XXIsiècle et à créer une véritable codétermination avec les salariés. Nous pensons que le salarié doit être le sujet de la transformation de l’entreprise et du monde du travail, pas son objet !

Nous regrettons aussi l’acharnement contre l’économie sociale et solidaire, qui est symptomatique du caractère néolibéral de ce projet de loi. À l’heure où la sauvegarde de notre planète est devenue une priorité, les insuffisances de ce texte quant à l’environnement et au développement durable sont tout à fait incompréhensibles.

Monsieur le ministre, vous demandez aux salariés de participer au financement de l’investissement, alors que vous ne prenez aucune mesure contre les impressionnants dividendes des entreprises du CAC 40, qui ne participent pas, ou si peu, à l’investissement. Vous avez refusé de limiter les hauts salaires, qui sont un vrai scandale, mettent à mal notre cohésion sociale et renforcent le sentiment d’injustice.

La désindustrialisation est toujours en marche, malheureusement ! Et même si les « marcheurs » dirigent l’État, elle se poursuit, implacablement et inexorablement. J’ai une liste, longue, d’entreprises, notamment dans les Hauts-de-France, en Franche-Comté et dans plusieurs autres bassins industriels, qui connaissent de graves difficultés.

Le Gouvernement n’a pas de politique industrielle ! Nous l’avons dit à plusieurs reprises, et c’est vraiment dommage, parce que, face au Made in China ou au « Rendre sa grandeur à l’Amérique », il est plus que jamais nécessaire d’avoir un État stratège et une Europe capable de rivaliser avec ces deux continents.

Monsieur le ministre, ce gouvernement fait sans cesse référence à l’Allemagne, notre modèle économique, mais que fait ce pays aujourd’hui ? Après l’échec de Kuka, il a décidé de protéger ses entreprises stratégiques, en ramenant à 10 % du capital, contre 25 % auparavant, le seuil lui permettant de mettre à l’étude ou de bloquer des acquisitions étrangères dans des entreprises allemandes. Et nous, nous faisons tout l’inverse, en nous retirant de nombreuses entreprises stratégiques, dont l’État est actionnaire.

Il est plus que jamais nécessaire de mener un débat sur cette question et, plus généralement, sur la politique industrielle de notre pays. Il faut laisser les choix ouverts en matière de technologie industrielle, par exemple dans le secteur de l’automobile. Le tout-diesel a été un choix politique ; on va dorénavant nous imposer le tout-électrique ! Un tiers de nos sites industriels et les emplois qui vont avec risquent ainsi de disparaître. Sur ces questions, nous n’avons malheureusement pas eu beaucoup de débats.

En conclusion, le groupe socialiste et républicain, malgré quelques avancées sur la sauvegarde du stage de préparation à l’installation pour les artisans et l’adoption de nos amendements visant à mieux protéger les consommateurs, votera contre ce projet de loi.

Monsieur le ministre, nous avons une plus haute ambition pour nos entreprises et l’avenir économique de notre pays. Nous pensons que de nouvelles régulations doivent s’imposer, avec un État stratège omniprésent. Ce dernier prendrait tout de suite en main la question d’Alstom, dont le projet a été refusé par la commission européenne, en proposant une solution française, afin de garder cette pépite, qui est une entreprise stratégique.

Ce projet de loi oublie également les TPE et les PME, qui en sont finalement les grandes perdantes – je pense notamment à la mise en cause de l’allotissement, qui était une avancée considérable proposée par l’Union européenne.

Je le répète, nous voterons contre ce projet et nous sommes heureux d’avoir évité qu’ADP et La Française des jeux ne soient privatisées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Bruno Sido. C’est un peu facile…

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Jean-Marc Gabouty. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans la discussion générale, j’avais fait part de l’accueil favorable de ce texte par le groupe du RDSE, avec, bien sûr, quelques réserves, et en espérant que des améliorations et des enrichissements puissent être apportés par notre assemblée.

L’une des difficultés rencontrées portait sur le champ extrêmement large de ce texte, ce qui a pu nuire à l’identification d’une ligne directrice claire. À mon sens, la cession des participations publiques et la gouvernance des grands groupes publics comme la Caisse des dépôts et consignations et La Poste auraient pu faire l’objet d’un texte distinct ; cela aurait été plus clair et plus cohérent.

Sur l’ensemble, on ne pouvait que se féliciter des objectifs annoncés de transformation économique avec plus de liberté, de simplicité et d’efficacité pour les entreprises et les entrepreneurs.

Finalement, le texte qui nous est proposé aujourd’hui répond-il à ces objectifs et a-t-il été vraiment amélioré pendant ces deux semaines de débat ? Permettez-moi d’en douter.

Si le Sénat, par le texte adopté par sa commission spéciale ou par la voie d’amendements, a apporté un certain nombre de précisions utiles et d’enrichissements pertinents, ceux-ci concernent principalement des aspects techniques et ne portent pas sur l’essentiel.

Il est impossible de balayer l’ensemble des thèmes abordés. Je n’évoquerai donc que ceux qui ont le plus animé les débats.

En premier lieu, la cession et la modification du régime juridique d’Aéroports de Paris, approuvées avec un encadrement plus strict par la commission spéciale – je lui rends d’ailleurs hommage, parce que son travail était difficile –, ont finalement été rejetées par la majorité de notre assemblée, avec, au passage, quelques moments de flottement durant le débat, reconnaissons-le.

M. Jean-Claude Requier. C’est vrai !

M. Jean-Marc Gabouty. Si la concession de soixante-dix ans pouvait paraître un peu longue – monsieur le ministre, nous ne serons certainement pas là pour en constater tous les effets –,…

M. Bruno Le Maire, ministre de léconomie et des finances. C’est probable ! (Sourires sur plusieurs travées.)

M. Jean-Marc Gabouty. … le Sénat s’est sans doute privé de pouvoir peser sur le texte final, car cette position ôte à la commission mixte paritaire toute possibilité d’aboutir à des conclusions.

M. Richard Yung. Tout à fait !

M. Jean-Marc Gabouty. La privatisation de La Française des jeux ayant été évacuée d’emblée par la commission spéciale, le Gouvernement devra se consoler avec la seule validation du retrait de l’État d’Engie. Tout cela est-il cohérent ? Je n’en suis pas certain.

Nous pouvons tout de même nous retrouver sur l’exonération du loto du patrimoine de tout prélèvement ou contribution, ce qui devrait réjouir tout le monde.

M. Jean-François Husson, rapporteur. Sauf l’État…

M. Jean-Marc Gabouty. J’espère en tout cas que le Gouvernement acceptera cette disposition !

En ce qui concerne les chambres de métiers et de l’artisanat, l’acceptation d’une seule structure régionale a été obtenue à la suite d’un débat quelque peu confus, et je ne suis pas certain que le vote ait vraiment reflété la position de la majorité des sénateurs présents ce soir-là.

M. Jean-Marc Gabouty. Toutefois, cette évolution, comme c’est le cas pour de nombreuses autres structures économiques, professionnelles, administratives, associatives, sportives ou culturelles, s’inscrit dans une tendance lourde de centralisation des pouvoirs et des moyens financiers à l’échelon de la région. C’est une conséquence de la loi NOTRe, même si le processus était déjà engagé auparavant.

C’est une voie qui va continuer d’affaiblir les territoires périphériques, notamment ruraux, sans nécessairement gagner en efficacité. À mon sens, c’est tout l’inverse d’une politique de décentralisation et de proximité.

Le troisième thème de ce texte, « Des entreprises plus justes », contient des mesures très positives concernant l’épargne salariale et l’actionnariat des salariés avec un apport significatif du Sénat.

Je ne ferai que regretter le rejet d’un amendement visant à élargir le champ d’application de l’intéressement obligatoire à toutes les entreprises de plus de dix salariés. Je suis persuadé qu’un jour cette mesure s’imposera d’elle-même, mais le Gouvernement et le Sénat se refusent pour l’instant à aller plus vite dans ce domaine, sachant pourtant que la méthode incitative n’aura que des effets limités sur le nombre de salariés bénéficiaires de ce dispositif. Je suis prêt à prendre le pari qu’une telle mesure sera prise dans les deux ou trois ans à venir.

Enfin, dernier point chaud, si je puis m’exprimer ainsi, le relèvement du seuil de 50 à 100 salariés. C’était une mesure emblématique, apparemment séduisante pour les entreprises et à laquelle je pourrais a priori souscrire.

Même si ce n’est qu’un affichage, dont les auteurs savent qu’il n’a que peu de chances d’être retenu à l’Assemblée nationale, cette disposition contient quelques effets pervers qui, me semble-t-il, ont été sous-estimés.

Cette mesure est finalement assez discutable, car elle se justifie moins du fait de la fusion des instances de représentation du personnel en une seule structure depuis les ordonnances Travail. En outre, elle risque de rendre plus difficile la définition de mesures spécifiques en faveur des petites entreprises et elle supprime la garantie pour tous les salariés des entreprises de 50 à 100 salariés de bénéficier de la participation ; c’est donc une régression en termes de partage des résultats. Je ne suis pas sûr que ceux qui ont voté cette mesure ne souhaitent pas aujourd’hui que l’Assemblée nationale ne nous suive pas sur ce point…

Parmi mes regrets, je pourrais encore citer le report de 2020 à 2021 de l’application du relèvement des seuils du contrôle légal des comptes des sociétés. Cette décision n’est pas compréhensible pour les entreprises, mais il convient de reconnaître que la profession de commissaire aux comptes est bien organisée.

La majorité des membres du RDSE – groupe divers, qui respecte la liberté de vote de chacun – reste assez perplexe et estime que ce texte, qui n’a pas gagné en cohérence, montre tout à la fois un excès de conservatisme, de libéralisme et de frilosité. C’est pourquoi elle s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. Philippe Adnot. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, comme je l’avais indiqué lors de la discussion générale, ce texte aurait gagné en cohérence, si son périmètre avait été mieux ajusté.

Pour autant, il faut reconnaître que le travail de la commission spéciale et de la Haute Assemblée l’a amélioré sur de nombreux points, même si, à titre personnel, je regrette que des sujets importants n’aient pas été suffisamment pris en compte ou écartés à tort – j’y reviendrai…

Indiscutablement, le point fort de ce texte porte sur la modification des seuils. Je souhaite que le Gouvernement et l’Assemblée nationale ne reviennent pas sur les décisions que nous avons prises, car elles représentent, à elles seules, la bouffée d’oxygène réglementaire qu’attendent nos entreprises. La France et les Français iraient mieux si l’économie et l’emploi étaient plus performants. Ces mesures n’ont pas de coût budgétaire pour le Gouvernement, mais elles peuvent changer l’état d’esprit et les résultats de nos entreprises. Nous en avons grand besoin !

S’agissant des chambres consulaires, même si nous y avons apporté des modifications, je regrette que le texte final ne donne pas plus d’importance à la liberté d’organisation et à la responsabilisation des acteurs de terrain. Toutes ces nouvelles organisations vont, finalement, amener les chambres à facturer leurs services pour compenser les ponctions opérées sur leurs budgets, alors même qu’il n’y a aucune baisse ni suppression des taxes qui les alimentaient. Les entreprises paieront donc deux fois !

En ce qui concerne ADP et La Française des jeux, la suppression des privatisations me paraît être une bonne chose, car ces dossiers n’étaient pas suffisamment élaborés. Nous avons bien vu ce qu’a donné la privatisation mal maîtrisée des autoroutes.

Je regrette que le Sénat ne m’ait pas suivi sur l’intérêt d’avoir un brevet de qualité face à nos voisins. Je pense que nous y reviendrons. La France n’a pas intérêt à être le réceptacle des brevets de faible intérêt, tandis que les bons brevets seraient pris ailleurs.

Je regrette enfin que trop de nos propositions d’amendements se soient vues opposer une nouvelle lecture de l’article 45 et aient été déclarées irrecevables à ce titre.

L’obligation qui nous a été faite de ne partir que du texte initial du Gouvernement me paraît en contradiction avec la lettre de la Constitution, qui nous demande de partir du texte de la commission de l’Assemblée nationale. Cette méthode aura pour conséquence de priver le Sénat d’une capacité de peser sur les nouveautés apportées par les députés, donc de réduire notre poids, ce qui me paraît, à l’heure actuelle, de mauvaise politique. Monsieur le président, il nous faudra réexaminer l’application de l’article 45, qui met en danger notre assemblée.

Voilà, mes chers collègues, des motifs de satisfaction et de regrets. Mais il y a aussi un constat : le Sénat est bien indispensable à un travail de qualité. Je voterai le texte ainsi amendé. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, le groupe Union Centriste a abordé l’examen de ce texte avec enthousiasme, tant il est important que nous puissions soutenir le développement économique de notre pays.

Nous avons entrepris de travailler sur ce texte dans cet esprit et, comme vient de le dire Philippe Adnot à l’instant, dans un souci de liberté et de responsabilité.

Nous tenons à remercier les deux rapporteurs, Jean-François Husson et Élisabeth Lamure, de l’excellent travail qui a été réalisé, ainsi que Mme la présidente de la commission spéciale. Je rappelle que cette dernière connaît bien le sujet des entreprises, puisqu’elle préside la délégation sénatoriale aux entreprises depuis quatre ans ; elle a d’ailleurs pu traduire dans ce texte un certain nombre de propositions formulées par la délégation. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Ce projet de loi visait plusieurs objectifs : simplifier la vie des entreprises – c’est pour nous un objectif constant –, mieux orienter l’épargne vers ces dernières et rendre les entreprises plus justes.

En ce qui concerne l’épargne, si tant est que l’on se satisfasse de la manière dont les banques concourent au développement économique, il faut pouvoir orienter l’épargne à plus long terme vers les entreprises.

Sur le troisième volet que j’ai indiqué, n’en déplaise à certains qui considèrent qu’il n’y a pas eu suffisamment d’avancées, j’ai plutôt tendance, pour ma part, à considérer que nous avons progressé. En tout cas, le texte est relativement fondateur en la matière. Nous avons notamment souhaité qu’il n’impose pas de contraintes supplémentaires aux entreprises, comme l’avait voulu le ministre, mais, au contraire, qu’il leur permette de prendre des initiatives.

En ce qui concerne la simplification de la vie des entreprises, nous avons beaucoup débattu de la question du registre dématérialisé – il faudra que les coûts issus de toutes les formalités administratives puissent être réduits –, ainsi que du contrôle des comptes – je n’y reviens pas.

Je voudrais m’arrêter quelques instants sur la question des chambres consulaires. Le groupe Union Centriste estime que le rôle de ces dernières est particulièrement important pour irriguer le tissu rural et faire en sorte que les entrepreneurs soient accompagnés sur l’ensemble du territoire, dans tous les départements, et qu’ils puissent travailler en réseau.

Dans un monde où s’opposent les gros et les petits, les chambres consulaires constituent aujourd’hui un rempart pour les petits !

Que ce soient les chambres d’agriculture pour les agriculteurs, les chambres de métiers et de l’artisanat pour les artisans, les chambres de commerce et d’industrie pour les commerçants et ceux qui travaillent dans le secteur des services, elles jouent toutes un rôle important pour les entreprises individuelles ou celles qui n’emploient que peu de salariés, face à la tentation de quelques grosses entreprises de vouloir tout régenter. Soyons attentifs à ce que ces organisations consulaires, qui sont représentatives des employeurs, poursuivent leurs missions.

Le groupe Union Centriste partage l’essentiel des orientations et des propositions formulées, mais il a deux regrets.

Tout d’abord, nous déplorons le refus de la privatisation d’ADP, car, selon nous, il s’agissait d’une véritable chance pour notre pays, qui ne vit pas dans un régime d’économie administrée. (M. Pierre-Yves Collombat sesclaffe.)

Il faut laisser les acteurs économiques respirer, et, en l’occurrence, offrir à l’outil aérien une chance de se développer. Ne l’oublions pas, nous vivons dans un contexte de concurrence internationale ; nous pouvons toujours nous dire que nous sommes bien chez nous, mais il faut garder cette réalité à l’esprit. Aussi, la majorité du groupe de l’Union Centriste considérait que la privatisation d’ADP était un moyen de rendre cet outil un peu plus compétitif.

Mme Éliane Assassi. Il est déjà compétitif !

M. Michel Canevet. Pas suffisamment, hélas.

Mme Éliane Assassi. C’est même pour cela que vous voulez le vendre !

M. Michel Canevet. Le second regret que nous voulons exprimer porte sur l’article 61 et la responsabilité sociétale des entreprises.

Mes chers collègues, nous vivons dans un monde en pleine évolution. Nous ne pouvons plus envisager notre code civil, et plus généralement notre droit, comme lorsque nous avons élaboré ces règles voilà quelques décennies, voire quelques siècles. Il faut savoir évoluer avec son temps. Aujourd’hui, nous le savons, la prise en compte des aspects sociaux et environnementaux est absolument essentielle. Même le MEDEF va se doter d’une raison d’être.

Vendredi dernier, j’étais à l’assemblée générale de Produit en Bretagne, une association comprenant plus de 1 000 entrepreneurs et qui affirme clairement que la responsabilité sociétale de l’entreprise doit être mise en avant, à travers notamment la définition d’une raison d’être.

C’est dire si les entrepreneurs ont pris conscience du rôle et de la place des entreprises. Il faut que nous puissions accompagner, sans être à leur remorque, ces entrepreneurs qui vont de l’avant et qui font en sorte, grâce à la juste rémunération du travail, à l’intéressement, à la participation, à l’actionnariat salarié, que la valeur produite soit mieux répartie entre les actionnaires et les salariés.

Je crois que les dispositifs mis en place au travers de ce texte – dès lors qu’ils ne sont pas coercitifs, cher Jean-Marc Gabouty, car il faut laisser aux acteurs économiques leur liberté d’entreprendre, d’innover et de s’organiser – peuvent être générateurs de bien-être pour les salariés et de développement pour les entreprises. C’est en tout cas l’un des objectifs visés, et je ne doute pas qu’il sera atteint, notamment grâce aux mesures que le Gouvernement entend prendre pour mieux faire connaître ces dispositions.

Mes chers collègues, pour conclure, j’émets le vœu que l’Assemblée nationale reprenne l’essentiel du travail fait au Sénat. Le groupe de l’Union Centriste votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous nous apprêtons à voter le projet de loi pour la croissance et la transformation des entreprises.

Je tiens tout d’abord, au nom du groupe Les Indépendants, à saluer à mon tour le travail mené par la commission spéciale, sous la présidence de notre collègue Catherine Fournier, et par ses trois rapporteurs, Élisabeth Lamure, Jean-François Husson et Michel Canevet, qui n’a pas pu se féliciter lui-même. (Sourires.)

M. Charles Revet. Très bien !

M. Emmanuel Capus. Ce travail a grandement contribué à la qualité de nos débats.

Ce vote va intervenir après une nouvelle vague d’agitation sociale. À ce sujet, monsieur le président, nous saluons votre condamnation extrêmement claire de toutes les violences et de tous les outrages, qui sont proprement inacceptables.

Dans cette agitation, je vois une raison supplémentaire pour agir vite et apporter la preuve de l’efficacité du travail parlementaire. À la source de cette situation se trouvent en effet certains des problèmes que ce projet de loi se donne précisément l’ambition de résoudre.

C’est le travail, qui ne paie pas assez, et ne permet plus toujours de vivre décemment. C’est l’administration, qui décourage inutilement les efforts accomplis. C’est le sentiment, enfin, que partagent nombre de nos concitoyens, d’être les perdants de la mondialisation.

Le texte que nous nous apprêtons à voter redonnera du souffle à nos entreprises. C’est notre conviction. Il fera respirer notre économie en relâchant les carcans dans lesquels nous avons progressivement enfermé l’initiative individuelle. Nous pensons, enfin, qu’il contribuera utilement à restaurer la confiance dans la liberté d’entreprendre.

La contribution du Sénat dans la construction de ce texte permet d’aller plus avant dans cette direction. Je pense notamment au relèvement des seuils de 50 salariés à 100 salariés, afin de donner à nos PME plus de temps pour répondre à leurs obligations légales. Cette disposition, couplée à la période de mise en conformité pour le franchissement des seuils, allégera fortement la pression normative qui contraint encore la croissance de nos PME.

Le Sénat a aussi porté la voix des territoires dans ce débat. C’est notamment le sens d’un amendement que nous avons déposé avec d’autres collègues sur ces travées.

Cet amendement visait à réintroduire la généralisation de l’organisation administrative du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat autour d’un établissement unique de région, tout en précisant les moyens d’action des chambres de niveau départemental. Il faut maintenir un réseau dense pour ces structures d’accompagnement, qui donnent accès à la création d’entreprise au cœur de nos territoires.

Je me réjouis que le Sénat puisse ainsi se faire l’écho de ces voix des territoires. Elles nous alertent contre le risque d’une rupture toujours plus marquée entre les centres et les périphéries, entre la France qui trouve sa place dans la mondialisation et celle qui a l’impression d’y perdre.

C’est notre rôle de veiller à ce que les lois n’ajoutent pas au sentiment d’abandon qui nourrit la frustration de tant de nos concitoyens. Il y va de la cohésion de notre société.

Pourtant, mes chers collègues, nous devons également avoir conscience que, à l’issue de ces débats, la position du Sénat n’apparaîtra pas clairement sur certains sujets structurants, comme Michel Canevet l’a rappelé. En particulier, nous n’avons pas apporté de réponse univoque à une question essentielle qui nous était posée : dans quelle mesure souhaitons-nous voir l’État intervenir dans notre économie ?

Une majorité d’entre nous a ainsi refusé la privatisation de La Française des jeux, souhaité encadrer celle d’Aéroports de Paris et choisi de confirmer celle d’Engie. Sur le fond, ma position personnelle reste constante : ce qui relève du pouvoir régalien doit être géré par l’État ; le reste doit être délégué.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. Jean-Marie Bockel. Tout à fait !

M. Emmanuel Capus. J’ai du mal à voir, mes chers collègues, en quoi la gestion de l’énergie serait moins stratégique pour l’État que celle du tourisme…

Il nous faut admettre que même une chatte n’y retrouverait pas ses chatons. En vérité, mes chers collègues, et pour être plus précis, je ne crois pas que nous ayons mal répondu à la question : en fait, nous l’avons mal posée.

Au fond, il ne s’agit pas tant de savoir s’il nous appartient, à nous, législateurs, de décider si nous devons conserver ou non des actifs stratégiques pour l’État, que de déterminer si l’intervention de l’État se révèle stratégique pour ces actifs, dès lors que l’État ne faillit pas à l’exercice de ses missions régaliennes.

Plus prosaïquement, je pense que nous remplirions mieux notre rôle en prenant une part active et constructive à la définition des modalités dans lesquelles les cessions d’actifs pourront s’opérer.

M. Claude Malhuret. Très bien !

M. Emmanuel Capus. J’ai déjà eu l’occasion de le dire alors que nous commencions l’examen de ce projet de loi : la transformation de notre économie ne se décrète pas ; ce sont les entreprises qui s’en chargeront elles-mêmes.

Notre rôle doit d’abord consister à leur donner les outils les mieux adaptés aux évolutions de notre économie et en assurer un cadre juste. Nous devons laisser plus de liberté pour innover et inventer de nouvelles solutions aux problèmes de notre temps.

À cet égard, je suis convaincu que des outils, tels que le statut d’entreprise à mission, dont le Sénat a tenu à clarifier et simplifier le régime, ainsi que la réduction du forfait social sur la participation et l’intéressement constituent des moyens concrets et efficaces de répondre à ces enjeux. Je suis certain que nos entreprises sauront s’en emparer pour façonner un modèle plus en phase avec les aspirations des Français, c’est-à-dire plus inclusif, plus juste et plus durable.

C’est en nous efforçant de restaurer la confiance dans la société, plutôt qu’en créant de nouvelles barrières, que nous parviendrons, aujourd’hui et demain, à dynamiser la compétitivité de notre économie, tout en assurant la cohésion sociale.

C’est le cas, aujourd’hui, avec la loi PACTE, et ce sera le cas, demain, avec d’autres projets de loi que nous aurons à examiner et qui se révéleront également déterminants pour la France. Nous devrons alors miser de nouveau sur la confiance, pour accélérer la transformation de notre société.

C’est la raison pour laquelle le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte, qui va, selon nous, globalement dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, au terme de l’examen de ce texte, je tiens tout d’abord à saluer la qualité du travail de la commission spéciale, de sa présidente et de ses trois rapporteurs.

Ce texte est présenté par le Gouvernement comme le grand texte économique de ce quinquennat, paré d’un titre et de chapitres ambitieux : « Des entreprises libérées, plus innovantes, plus justes »… Pour un peu, on chanterait. (Sourires.)

Pourtant, l’extrême diversité des sujets traités dans ce texte et leur inégale importance ne dégage pas, nous semble-t-il, le souffle nécessaire susceptible d’impulser le choc de compétitivité espéré par de nombreux chefs d’entreprise.

Sur la forme, le texte est passé de 73 articles à près de 200 articles à l’issue de son examen à l’Assemblée nationale. Ainsi, nombre de dispositions, parfois sur des sujets majeurs, ont échappé à une véritable étude d’impact, l’exemple le plus flagrant étant cet amendement « anti-Huawei », annoncé par voie de presse et déposé pour le moins tardivement par le Gouvernement, pendant l’examen même du texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Sans nier l’importance du sujet, convenez qu’il était nécessaire d’expertiser sérieusement, a minima, la solution proposée. Le Sénat l’a rejetée à regret, mais en toute responsabilité.

Sur le fond, nous nous retrouvons, monsieur le ministre, sur le constat : les obstacles rencontrés par les entreprises, essentiellement les petites et les moyennes, pour se développer, créer des emplois, se sont sédimentées au fur et à mesure de l’évolution de la législation et de son adaptation aux nouveaux enjeux économiques. Bien des scories normatives entravent aujourd’hui une croissance agile et efficace des PME. Ce texte permet d’en simplifier un nombre certain.

C’est dans cette perspective que les travaux du Sénat ont renforcé sensiblement le texte, tant en commission qu’en séance. En particulier, nous sommes allés plus loin sur la rationalisation des seuils, en relevant les obligations liées au passage de 50 salariés à 100 salariés. C’est le seuil le plus emblématique en matière de croissance des entreprises. Il serait souhaitable que la CMP puisse trouver un bon équilibre sur ce point, car c’est une mesure très attendue.

Nous avons également rendu les dispositifs relatifs à l’épargne salariale encore plus attractifs, en alignant les taux dérogatoires du forfait social sur le taux de 10 %, tant pour le plan épargne retraite que pour la participation ou l’intéressement, des sujets auxquels le Sénat est particulièrement attaché. Nous nous félicitons de ces dispositions.

En outre, nous avons renforcé le poids des élus dans le conseil d’administration de La Poste, en accompagnant sa transformation. Nous sommes allés plus loin pour sécuriser davantage le développement des levées de fonds en actifs numériques, avec une sanction pénale pour ceux qui tromperaient les épargnants. Enfin, nous avons permis une meilleure information et une meilleure protection des consommateurs dans le cadre de la fin des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité.

En revanche, plusieurs sujets ont fait l’objet de désaccords entre le Gouvernement et notre Haute Assemblée, le Sénat ayant souhaité poser un regard différent sur le débat.

Oui, nous avons supprimé la définition de l’intérêt social et de la raison d’être de l’entreprise dans le code civil : si nous partageons la volonté de voir nos entreprises se transformer et le souhait de les accompagner vers de nouveaux modèles de croissance plus sociaux, plus tournés vers les préoccupations environnementales, il nous est apparu que l’imprécision des termes de cet article allait fragiliser les entreprises et faire peser sur elles un risque de contentieux accru, alors que la législation française sur la responsabilité sociale et environnementale, la RSE, est déjà très poussée.

D’ailleurs, certaines entreprises et organisations représentatives se sont d’ores et déjà dotées d’une raison d’être, en toute liberté, cher Michel Canevet, preuve, s’il en était besoin, qu’il n’y a pas besoin d’une loi pour le faire. Produit en Bretagne en est un bon exemple.

La stratégie d’une entreprise, monsieur le ministre, est sa responsabilité, sa liberté, son ADN, et elle s’exprime dans son projet d’entreprise. Nous pensons que les lois doivent être normatives, plutôt que bavardes. Lorsque la loi ouvre de tels espaces d’interprétation, c’est la jurisprudence qui prend le pas sur le pouvoir politique. En ces temps de confusion institutionnelle, chacun doit être attentif à son rôle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Nous avons bien sûr, au terme de longs débats ayant mené à un quasi-consensus, renoncé aux privatisations d’Aéroport de Paris et de La Française des jeux.

Tout d’abord, la motivation présentée par le Gouvernement nous semblait peu convaincante : le rendement attendu du fonds de rupture est d’ores et déjà équivalent aux dividendes perçus par l’État au titre de ces sociétés. Nous comprenons que des dividendes peuvent naturellement fluctuer, mais admettez, d’une part, qu’il en va de même pour le rendement des fonds de placement (M. le ministre le conteste.), et, d’autre part, que les perspectives de croissance de ces deux entreprises laissent présager de solides dividendes.

Pour ADP, ensuite, le débat s’est beaucoup focalisé sur le fait de savoir s’il s’agissait de la privation d’un monopole ou bien d’infrastructures en situation concurrentielle. Si ce débat n’est pas tranché, tout au moins sommes-nous d’accord pour considérer qu’ADP est une infrastructure stratégique.

Alors que, dans quelques jours, l’Europe va se doter d’un mécanisme de filtrage permettant d’évaluer le risque pour les infrastructures européennes stratégiques de tomber dans les mains d’actifs extra-européens, monsieur le ministre, il nous semble imprudent de laisser partir ADP sans en mesurer toutes les dimensions stratégiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Or aucune garantie n’a été apportée sur les mécanismes de cessions des actifs à court, moyen et long termes : qui peut dire, monsieur Yung, quel sera le sort d’un futur acquéreur privé, « opéable » une fois, deux fois, dix fois dans les 70 prochaines années ? Qui sera maître du jeu dans le ciel français ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas. Pour La Française des jeux, la FDJ, si le sujet de la santé et du rôle nécessaire de la régulation a été au cœur des discussions, c’est aussi le manque de réponse sur le financement de la filière équine et l’aménagement du territoire qui ont motivé notre avis.

Pour autant, au sujet de ces deux sociétés, nos rapporteurs ont beaucoup travaillé pour améliorer, dans le cas d’ADP, le calcul des redevances aéroportuaires, ainsi que la régulation du secteur, et nous avons accepté la réforme de la fiscalité des jeux de la FDJ et des paris sportifs en ligne.

Voilà quelques points, non exhaustifs, que le Sénat a améliorés au cours de ses travaux, ou sur lesquels il a marqué sa différence. C’est pour cette raison que le groupe Les Républicains votera le texte issu de nos travaux. Mais que dire du projet de loi dans sa globalité ? Il nous semble difficile aujourd’hui d’estimer correctement quel sera l’effet de ce texte protéiforme sur la croissance des entreprises. Si de nombreuses dispositions techniques sont attendues, il reste urgent, maintenant, de tenir les engagements sur la compétitivité.

Les impôts de production ne baissent pas, et la France reste championne d’Europe en matière de prélèvements obligatoires et de dépenses publiques ; le déficit commercial se dégrade. Enfin, monsieur le ministre, les promesses de baisse de l’impôt sur les sociétés ne risquent-elles pas, à court terme, de se briser sur le mur jaune des réalités sociales. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. À mon tour, je tiens à remercier les membres de la commission spéciale, sa présidente, Catherine Fournier, ainsi que ses trois rapporteurs, Michel Canevet, Jean-François Husson et Élisabeth Lamure. Cette procédure spéciale d’examen parlementaire a été parfaitement conduite. (Applaudissements.)

Ouverture du scrutin public solennel

M. le président. Mes chers collègues, il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises.

Ce scrutin, qui sera ouvert dans quelques instants, aura lieu en salle des conférences.

Je remercie nos collègues Annie Guillemot, Mireille Jouve et Guy-Dominique Kennel, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.

Une seule délégation de vote est admise par sénateur.

Je déclare le scrutin ouvert pour une demi-heure et je suspends la séance jusqu’à seize heures cinq, heure à laquelle je proclamerai le résultat.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures trente-cinq, est reprise à seize heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Proclamation du résultat du scrutin public solennel

Explications de vote sur l'ensemble
Dossier législatif : projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises
Proclamation du résultat du scrutin public solennel (fin)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 54 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l’adoption 207
Contre 117

Le Sénat a adopté, dans le texte de la commission modifié, le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre de léconomie et des finances. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un scrutin difficile à décrypter, puisque, d’une certaine façon, ceux qui étaient pour le texte initial du Gouvernement ont voté contre, et ceux qui étaient contre le texte du Gouvernement ont voté pour. (Pas nous ! sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)

Au bout du compte, nous sommes dans une très grande confusion. Dans cette obscure clarté qui tombe des étoiles (Sourires.), je pense qu’il est bon de rappeler certaines choses simples.

Au préalable, je veux saluer la qualité exceptionnelle du travail de la présidente de la commission, Catherine Fournier, et des trois rapporteurs, Élisabeth Lamure, Jean-François Husson et Michel Canevet, que je tiens tous à remercier. (Applaudissements.)

Nous avons fait ici, pendant de longues heures de discussions parfois animées, un travail que j’estime utile. J’espère bien que certaines des propositions – je pense en particulier à tous les dispositifs d’encadrement et de renforcement des garanties autour des privatisations proposés par Jean-François Husson – pourront être reprises dans le texte définitif de la loi PACTE. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Enfin, je veux rappeler quelques convictions et remettre quelques pendules à l’heure par rapport à ce que j’ai pu entendre. J’y insiste, ce texte est essentiel pour notre économie.

Il est d’abord essentiel pour les salariés. Je peux tout entendre, car nous sommes en démocratie, mais je ne laisserai pas dire que le projet de loi sur la croissance et la transformation des entreprises n’est pas une bonne nouvelle pour les salariés !

Ou alors, il faudra m’expliquer que la simplification de l’épargne salariale n’est pas une bonne nouvelle pour les salariés ; il faudra m’expliquer que le développement de l’actionnariat salarié n’est pas une excellente nouvelle pour les salariés (M. Fabien Gay et Mme Sophie Taillé-Polian sexclament.) ; il faudra m’expliquer que les garanties qui sont apportées aux femmes conjointes de collaborateurs, qui vont désormais bénéficier d’une protection renforcée, ne sont pas une bonne chose pour les salariés ; enfin, il faudra expliquer aux 10 millions de salariés qui vont enfin avoir accès à l’intéressement et à la participation grâce à la suppression du forfait social pour toutes les entreprises de moins de 250 salariés, qu’il ne s’agit pas d’une bonne nouvelle.

M. Fabien Gay. Ne vous inquiétez pas, on le leur expliquera !

M. Bruno Le Maire, ministre. Pour ma part, je crois exactement le contraire : PACTE est un grand texte pour les salariés, parce qu’il va permettre à ceux qui travaillent de vivre plus dignement de leur travail et de leur salaire. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

Je crois également qu’il s’agit d’un bon texte pour les entrepreneurs, et même d’un texte essentiel, puisqu’il va simplifier en profondeur les mesures de création des entreprises et les procédures administratives en créant un guichet unique ; il va alléger un certain nombre de charges coûteuses ; il va nous remettre à niveau au regard des règles européennes pour tout ce qui est contrôle des comptes. En effet, je ne vois aucune raison pour que les entrepreneurs français aient des obligations en matière de certification des comptes plus strictes que celles de leurs voisins et concurrents espagnols, italiens, belges ou néerlandais. (M. Loïc Hervé approuve.)

Nous remettons la compétitivité française à l’heure de l’Europe, en rappelant que les procédures françaises ne doivent pas être plus strictes que celles des concurrents européens.

C’est une bonne chose pour les entrepreneurs également, puisque nous allons simplifier les seuils sociaux, en permettant à tous les entrepreneurs ayant 48 ou 49 salariés, lorsqu’ils franchissent la barre des 50 salariés, jusqu’à 55 ou 60, parce qu’ils auraient des commandes ou des perspectives économiques plus favorables, d’être dispensés d’obligations supplémentaires pendant les cinq années suivant le jour où ils auront franchi ce seuil.

Je suis convaincu que cela permettra de débloquer l’acte d’embauche dans notre pays et de créer les emplois dont les Français ont besoin. Désormais, avec la loi PACTE, il n’y aura plus que trois seuils, là où il y en avait une dizaine : 11 salariés, 50 salariés, 250 salariés. C’est une simplification fondamentale pour les entrepreneurs et pour la création d’emplois dans notre pays.

Nous avons aussi eu un grand débat sur la question de la raison d’être. Faut-il introduire cette notion dans notre droit ?

Tout d’abord, je rappelle qu’aucun dispositif n’est obligatoire pour les entrepreneurs dans ce texte. Tout est une faculté, rien n’est une obligation, parce que je pense que c’est ainsi que l’on fait progresser une société.

Pour autant, croyez-moi, pour avoir discuté avec de jeunes entrepreneurs, avec de jeunes créateurs d’entreprise, que ce soit dans le domaine de l’artisanat, du commerce ou des start-ups techniques les plus pointues, je puis vous dire que tous veulent donner une raison d’être à leur société, parce que tous ont bien compris que l’entreprise ne se limite plus à la création de profit, mais doit répondre à des attentes : une attente sociale, une attente environnementale, une attente d’égalité entre les femmes et les hommes, une attente de plus de place pour les personnes en situation de handicap, une attente pour transformer la société dans le sens de plus de justice.

La raison d’être, c’est l’avenir de l’entrepreneuriat en France, et je suis convaincu que notre pays peut donner l’exemple à toute l’économie européenne en la mettant en place, c’est-à-dire en donnant un sens à l’activité économique.

Je me suis battu, avec Jean-Dominique Senard, avec Nicole Notat, avec un certain nombre de députés, avec des sénateurs, ici, pour que l’économie française prenne du sens : la raison d’être accordée aux entreprises, c’est du sens donné à notre modèle économique. (M. Fabien Gay sexclame.)

Je pense, en dernier lieu, que ce texte est essentiel aussi pour l’innovation. C’est d’elle, monsieur Bourquin, que dépendra notre capacité à réindustrialiser notre pays.

Je peux tout entendre, mais certainement pas que nous n’avons pas une politique industrielle pour notre pays, Agnès Pannier-Runacher et moi-même ; certainement pas que notre industrie continue son déclin, à un moment, monsieur Bourquin, où vous devriez partager avec moi la fierté des entrepreneurs industriels français, qui, pour la première fois depuis dix ans, recréent des emplois et rouvrent des entreprises dans nos territoires. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

À ces entrepreneurs, à ces industriels, qui se sont retroussé les manches, qui se sont battus, qui ont investi, digitalisé, robotisé, créé des emplois, même si ce n’est pas assez et s’il faut aller beaucoup plus loin, nous devons la reconnaissance d’avoir eu le courage de réindustrialiser nos territoires et notre nation. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – MM. Jean-François Husson, rapporteur, et Jean-Paul Émorine applaudissent.)

Si nous voulons aller plus loin, il faut aussi donner à l’innovation davantage de perspectives. Tout ce qui figure dans le texte sur les liens entre recherche et entreprises est à cet égard fondamental. Tout ce qui vise à valoriser la qualité du brevet français, qui, aujourd’hui, souffre de certaines insuffisances, est absolument fondamental.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je le maintiens, la cession d’actifs dans des activités qui peuvent parfaitement être traitées par des acteurs privés, de manière encadrée et régulée – en d’autres termes, les privatisations d’ADP, d’Engie et de La Française des jeux –, est une nécessité absolue pour financer le fonds pour l’innovation de rupture de dix milliards d’euros, qui nous permettra d’investir dans l’intelligence artificielle et dans les technologies nouvelles.

Au XXIe siècle, il y aura des vainqueurs et il y aura des vaincus !

Dans le camp des vainqueurs, vous aurez les nations qui auront investi pour l’innovation, celles qui auront la maîtrise de l’intelligence artificielle, des logiciels, des algorithmes, des données. Et dans le camp des vaincus, vous aurez les nations qui auront baissé les bras, continuant de gérer des rentes plutôt que d’investir dans l’avenir du pays.

Je préfère que notre nation soit championne dans les domaines de l’intelligence artificielle et des nouvelles technologies ! Je préfère que notre nation soit dans le camp des vainqueurs plutôt que dans le camp des vaincus ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre. Vous avez été très présent dans les débats et proactif, comme nous venons de l’entendre. Je tenais à le souligner.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.)

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Proclamation du résultat du scrutin public solennel (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises
 

6

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

7

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – Renforcement de l’organisation des juridictions

Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

 
 
 

Mme la présidente. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (projet n° 269, texte de la commission n° 288, rapport n° 287) et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif au renforcement de l’organisation des juridictions (projet n° 268, texte de la commission n° 289, rapport n° 287).

Dans la discussion générale commune, la parole la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, votre assemblée examine donc, en nouvelle lecture, les deux projets de loi qui constituent la réforme de la justice que je vous ai présentée au nom du Gouvernement au mois d’octobre dernier.

Cette nouvelle lecture intervient après que le Sénat et l’Assemblée nationale n’ont pu trouver d’accord en commission mixte paritaire. Cet échec a traduit des divergences fortes entre les deux assemblées.

Il faut constater qu’en première lecture votre commission des lois, puis votre assemblée avaient fait, pour l’essentiel, le choix de s’éloigner de la plupart des propositions formulées par le Gouvernement, propositions soutenues par la majorité de l’Assemblée nationale.

Sans aller jusqu’à dire que deux projets s’opposaient, ce qui serait contraire à la réalité et sans doute trop caricatural, je constate que sur des questions essentielles, nous n’avons pas pu trouver de solutions communes. Je l’ai regretté au mois d’octobre, ici même, en observant que le Sénat avait fait le choix de ne pas partager les principales orientations contenues dans le projet initial du Gouvernement. Dès lors, les conditions d’un accord étaient presque impossibles à réunir. C’est la situation devant laquelle nous nous trouvons aujourd’hui.

Pourtant, la volonté de donner à la justice les moyens d’accomplir son office est une ambition partagée par tous, je le sais. Sur chacune des travées dans cet hémicycle, comme au Palais-Bourbon, nous souhaitons que la justice dispose réellement des moyens de fonctionner de manière efficace sans rompre, en aucune manière, avec les principes qui la fondent.

Toutefois, si les moyens sont essentiels – et le Gouvernement a prévu, dans la présente loi de programmation, de les lui attribuer à une hauteur tout à fait importante –, ils ne peuvent suffire à eux seuls pour assurer une amélioration du fonctionnement de la justice. J’entends bien que nous venons de loin – de très loin même !–, sur le plan budgétaire et que la justice doit disposer, c’est évident, à la fois de personnels plus nombreux et de moyens budgétaires plus importants. Je l’entends. Le Gouvernement l’a entendu lui aussi et y a répondu puisque ce budget progressera de 24 % sur cinq ans et permettra de recruter 6 500 emplois supplémentaires.

Cependant, la justice a également besoin d’être réformée. Il faut qu’elle s’adapte aux situations actuelles sans renier les principes fondamentaux qui la structurent. Réformer ne veut pas dire adopter une logique comptable ou une logique « d’économie de gestion », comme vos rapporteurs ont pu l’écrire. Ce n’est pas non plus déshumaniser la justice, ni même la robotiser. C’est encore moins l’éloigner du justiciable. Je ne m’arrête pas à ces termes qui relèvent, de mon point de vue, plus de slogans que d’une analyse rigoureuse du projet de loi que je porte.

Ce qui me préoccupe, en réalité, c’est que les Français expriment une grande défiance à l’égard de la justice. Il est, pour moi, en tant que garde des sceaux, très difficile d’entendre nos concitoyens trouver la justice de ce pays trop éloignée, trop lente, parfois inefficace, quand on sait le dévouement des magistrats et de l’ensemble des personnels dont l’engagement est exemplaire.

Adapter notre justice, c’est avant tout lui permettre de répondre aux besoins des justiciables. Je mesure évidemment les attentes des professionnels avec lesquels j’ai beaucoup dialogué, à de nombreuses reprises. Je comprends leurs craintes face à des évolutions parfois difficiles à appréhender et qui peuvent même inquiéter. Je ne néglige pas l’ampleur de ces préoccupations qui se sont exprimées devant vous. Et au cours de l’élaboration du texte qui vous est soumis, au cours de son examen, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, de nombreux éléments nouveaux de compromis ont été apportés pour répondre aux demandes des avocats, des magistrats et des personnels de la justice.

J’observe ainsi que si l’Assemblée nationale a, comme je le disais voilà un instant, apporté son soutien aux propositions du Gouvernement, elle a, en outre, fait évoluer le texte sur des points importants. Et j’ai soutenu cette démarche.

Dans cette perspective, l’Assemblée nationale a d’ailleurs préservé un certain nombre d’avancées qui avaient été adoptées par le Sénat. Tel est le cas des garanties relatives aux services en ligne, qui ne pourront pas proposer des consultations juridiques sans le concours d’un avocat. Il en est de même pour le renforcement des obligations imposées aux plateformes.

Je pourrais également citer la suppression de la représentation obligatoire devant les tribunaux paritaires des baux ruraux, l’inscription dans la loi des conditions d’expérimentation de la procédure de révision des pensions alimentaires, là où le Gouvernement demandait initialement une habilitation.

À ces points se sont ajoutées d’autres évolutions apportées au texte par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Je citerai, à titre d’exemple, le délai imposé à une victime pour se constituer partie civile devant le juge d’instruction à la suite d’une plainte laissée sans réponse. Ce délai a été maintenu à trois mois en permettant au procureur de la République de solliciter du juge d’instruction un délai complémentaire de trois mois afin de poursuivre les investigations en cours.

En matière d’alternative aux poursuites, l’actuelle limitation du champ d’application de la composition pénale aux délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans a également été maintenue.

Des éléments destinés à mieux encadrer le rôle de la caisse d’allocations familiales ont été adoptés pour l’expérimentation, dont je parlais, que le projet de loi prévoit d’ouvrir en matière de révision des pensions alimentaires.

Je pourrais citer, outre les dispositions qui ont clarifié certains points portant sur la répartition des contentieux spécialisés entre tribunaux judiciaires sur la base de projets locaux, la consultation des conseils de juridiction, désormais prévue dans le texte.

Ces différents points récapitulent des demandes souvent formulées par des professionnels du droit auxquelles il a été répondu, comme cela avait d’ailleurs été le cas sur plusieurs autres points lors de l’élaboration du projet de loi.

Le texte a donc évolué très sensiblement. En revanche, le Gouvernement, et la majorité qui le soutient, a souhaité préserver les lignes de force de cette réforme. C’est ici que, pour l’essentiel, nous divergeons.

Je ne veux pas y revenir très longuement, car j’ai eu l’occasion de l’évoquer en première lecture, puis lors de mon audition par votre commission des lois il y a seulement quelques jours dont vos rapporteurs feront sans doute état. Je me contenterai de faire rapidement observer les éléments suivants.

Sur la partie budgétaire, le Gouvernement a une approche à la fois ambitieuse et réaliste. Nous prenons en compte les contraintes d’ensemble de nos finances publiques et notre capacité concrète à réaliser un certain nombre d’équipements sur cinq ans, durée de la loi de programmation. Ce texte préserve d’ailleurs – je tiens ici à le souligner – les équilibres entre les moyens affectés aux juridictions judiciaires et ceux qui sont alloués à l’administration pénitentiaire.

Sur la procédure civile, le projet que je défends a deux objectifs principaux : d’abord, simplifier l’accès du justiciable à la justice, ensuite, recentrer le juge sur son cœur de métier ; là où son rôle est essentiel, le juge doit être renforcé, notamment par les outils et les moyens qui lui sont alloués.

J’avais d’ailleurs regretté, en octobre dernier, que votre assemblée soit revenue sur plusieurs mesures proposées par le Gouvernement. J’avais indiqué que je ne partageais pas un certain nombre de préventions du Sénat quant au recours au numérique et à la dématérialisation. Ces éléments me semblent constituer, au contraire, un très grand progrès en termes de modernité et de simplicité d’accès au droit et à la justice, si – et j’insiste sur cette condition –, les garanties nécessaires sont apportées pour que la justice demeure « humaine », au sens où elle nécessiterait la présence physique des magistrats et des personnels de justice. Le projet que je porte fournit ces garanties. Pour les assurer totalement, nous y avons d’ailleurs intégré un certain nombre de demandes exprimées par la profession d’avocat.

Mais je défends aussi des positions réalistes, par exemple sur les plateformes qui constituent, je le crois, une évolution à la fois importante et inéluctable. Cela ne doit pas signifier que ces plateformes ne peuvent être en aucun cas régulées, mais il faut tenir compte de ce qu’est la réalité de l’économie du Net. C’est ainsi, me semble-t-il, que l’on apportera des garanties réelles aux justiciables qui auront recours à ces plateformes de plus en plus nombreuses.

Sur la procédure pénale, nous avons aussi des divergences qui ont été exprimées à diverses reprises. Le texte que je propose ne constitue pas, contrairement à ce qui a pu être dit, une rupture avec les réformes qui se sont succédé depuis un quart de siècle. Ces réformes ont toujours entendu renforcer la capacité d’action des parquets pour adapter la réponse judiciaire à de nouvelles formes de délinquance mais en maintenant les droits de la défense et les garanties apportées aux justiciables.

L’originalité de ma démarche ne vient donc pas de ce qu’elle inscrirait une rupture dans cette logique. Elle vient plutôt de ce que les propositions de simplification pénale contenues dans ce texte sont le fruit des propositions venues des acteurs de terrain, des policiers qui interviennent lors de la phase d’enquête, des magistrats du parquet et des magistrats qui ensuite jugent les litiges qui leur sont soumis.

J’assume ma volonté de mieux protéger les Français tout en préservant la garantie des droits. Et ces garanties sont bien là, j’y ai veillé. Le Conseil d’État l’a amplement confirmé dans son avis. Au renforcement des pouvoirs des enquêteurs répond un contrôle des magistrats du parquet et du siège sur les actes d’enquête. Je rappelle que les magistrats du parquet sont avant tout des magistrats, indépendants et également garants, à ce titre, de la liberté individuelle. Quant aux juges des libertés et de la détention, les JLD, je sais que les contrôles qu’ils exercent ne sont pas de nature purement formelle. Par l’intervention de ce juge statutaire, la garantie des droits est bien assurée.

Le Sénat a très sensiblement modifié ce texte dans un sens qui m’a semblé, ainsi qu’à plusieurs observateurs, parfois éloigné des attentes exprimées par les juridictions, par les enquêteurs et par les justiciables.

En tout état de cause, il faut que nous répondions à ce besoin clairement exprimé par nos concitoyens : le droit à la sécurité doit être pleinement garanti, dans des principes qui respectent l’État de droit.

Nous nous sommes, en outre, éloignés sur la partie consacrée aux peines. Les objectifs que nous poursuivons avec ce texte sont simples. Je le redis devant vous, l’idée, c’est que la peine de prison ne soit plus la seule peine de référence. Il faut que soient effectivement incarcérés ceux qui le méritent et pour lesquels c’est une nécessité, mais il faut punir autrement ceux pour qui la prison s’avérera inutile, désocialisante et source de récidives.

C’est pourquoi j’ai proposé que les peines soient désormais réellement exécutées ; des peines également adaptées au profil de chaque délinquant, des lieux d’incarcération nouveaux et diversifiés, un suivi des détenus plus individualisé. Voilà ce que contient mon projet de loi !

S’il partage les objectifs globaux que je propose – ce que j’ai souvent entendu dire par MM. les rapporteurs et par M. le président de la commission des lois –, le Sénat a cependant adopté un point de vue opérationnel différent de celui du projet, en particulier sur les courtes peines. La prison me semble demeurer pour vous, s’agissant des plus petits délits, un outil, une forme d’horizon. Pour notre part, nous proposons une approche par paliers afin de moduler davantage la réponse et de renforcer son individualisation.

Vous ne souhaitiez pas, par exemple, faire du bracelet électronique une véritable peine autonome. De même, en créant une peine de probation autonome, le Sénat s’est inscrit dans les pas de la réforme ayant institué la contrainte pénale. L’évaluation de cette mesure montre qu’elle n’a malheureusement pas produit les effets attendus.

Si je propose un sursis probatoire, mêlant la contrainte pénale et le sursis avec mise à l’épreuve, c’est précisément dans un souci d’efficacité et de souplesse, pour surmonter les difficultés rencontrées dans l’application de cette peine de contrainte pénale depuis sa création.

Enfin, sur l’organisation des juridictions, mon objectif est, là encore, de simplifier la vie des justiciables en rendant plus lisible et plus compréhensible notre organisation, en maintenant tous les lieux de justice au nom du principe, absolument essentiel, de proximité pour la justice du premier degré.

Nous nous retrouvons pour créer une juridiction unique de première instance, que vous aviez proposé d’appeler « tribunal de première instance » et que l’Assemblée nationale a dénommée « tribunal judiciaire ». En revanche, vous avez écarté la possibilité d’élaborer des projets locaux permettant de répartir quelques contentieux spécialisés entre les tribunaux judiciaires dans les départements comptant plusieurs tribunaux. Il en est de même pour une expérimentation identique qui concernerait deux régions comportant plusieurs cours d’appel.

Enfin, j’évoquerai un dernier point qui n’est pas sans importance. L’habilitation que le Gouvernement a demandée au Parlement concernant la justice des mineurs a suscité des interrogations et des critiques. Je le comprends, mais je voudrais ici dire que le Gouvernement souhaite prendre ce dossier à bras-le-corps en s’appuyant sur le travail parlementaire qui a déjà été engagé sur ce sujet dans les deux assemblées. Le temps de la ratification sera pleinement employé pour que les deux chambres débattent de cette réforme et modifient le texte que le Gouvernement leur proposera, dans le sens qui leur semblera utile. Je suis absolument résolue à mener à bien cette réforme que deux majorités successives n’ont pas réussi à faire aboutir depuis plus de dix ans.

J’aurais préféré, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, que nous puissions trouver des terrains d’entente plus nombreux.

M. Loïc Hervé. Nous aussi !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avant même la première lecture, j’avais fait part à M. le président de la commission des lois et à MM. les rapporteurs de ma volonté en ce sens. Les choix que vous avez alors exprimés et que vous avez réaffirmés depuis font que les conditions n’ont pas été réunies pour que cela soit possible.

C’est ainsi. Le Gouvernement en prend acte et, comme les positions de chacun sont désormais claires, il ne déposera pas d’amendements pour revenir aux dispositions adoptées par l’Assemblée nationale qui ont recueilli son accord.

Cela nous éloigne, certes, pour un temps, mais je sais qu’à terme nous nous retrouverons pour que la justice puisse, en France, être mieux rendue au seul bénéfice des justiciables. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Évelyne Perrot et M. Philippe Bonnecarrère applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Joissains et M. Alain Fouché applaudissent également.)

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame le président, madame le ministre, mes chers collègues, au nom d’Yves Détraigne et en mon nom ès qualités de rapporteur de la commission des lois, nous avons dix minutes pour vous rappeler rapidement la situation.

Madame le ministre, je dois vous le dire très directement, les yeux dans les yeux, vous avez indiqué voilà un instant à la Haute Assemblée que votre analyse était rigoureuse – évidemment ! – mais que la nôtre était plutôt le résultat d’une politique de slogans. Eh bien, sachez-le, je vous exprime mon désaccord le plus profond sur ce point ! Notre analyse a été rigoureuse, quoique différente de la vôtre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Maryse Carrère, ainsi que MM. Jean-Pierre Sueur et Jacques Bigot applaudissent également.)

Je vous remercie, de ce point de vue, de bien vouloir respecter le travail de l’ensemble des collègues sur l’ensemble de ces travées, qui ont voulu appréhender votre texte à la lumière du rapport établi par M. Philippe Bas en avril 2017, avec d’autres corapporteurs, et à la lumière du travail approfondi fait à l’occasion d’une proposition loi que nous avions présenté ici en octobre 2017.

Nous pouvons tout entendre, mais – je vous le dis très librement – nous ne pouvons pas tout accepter.

Nous avons une vision différente de la vôtre, madame le ministre. Nous pensons qu’il existe des besoins budgétaires supplémentaires : notre justice a besoin d’être totalement remise à niveau, si vous me permettez cette expression.

Nous pensons que des places de prison doivent être créées, dans un délai rapide, pour retrouver l’encellulement individuel et permettre une gestion pénitentiaire correcte. D’autres mesures pénales que nous avons voulues y contribueraient également : nous avons souhaité permettre au tribunal correctionnel de choisir librement parmi toute une palette de sanctions adaptées, afin que la sanction soit efficace.

Nous l’avons fait figurer dans notre texte ; nous avons même été très novateurs, considérant dans l’ensemble que la prison n’était pas la seule solution. Nous l’avons dit et écrit ! Dès lors, ne faites pas dire, à cette tribune, que le Sénat ne s’est pas inscrit dans cette logique : les articles du projet de loi qui sortent de cette maison prouvent le contraire.

M. Bruno Sido. Très bien !

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous voulons impérativement que la justice civile reste à la portée du justiciable. Nous ne refusons pas sa numérisation, nous approuvons les plateformes numériques, mais nous avons simplement demandé qu’elles soient certifiées, afin que les personnes qui utiliseront ce dispositif soient protégées. Vous nous l’avez refusé !

Nous ne refusons pas toute évolution. En matière de divorce pour faute, nous pensons simplement que la conciliation est utile, parce qu’il est nécessaire que les personnes qui se séparent douloureusement puissent au moins voir leur juge et régler devant lui quelques difficultés. Vous avez balayé cette approche, au motif qu’il y avait trop d’affaires et pas assez de temps !

Nous estimons que le règlement des pensions alimentaires relève non pas d’un directeur de la fonction publique, aussi brillant et intelligent soit-il, mais d’un juge. Voilà nos divergences !

Nous jugeons, certes, que les tribunaux d’instance et de grande instance peuvent être regroupés, mais cela ne peut se faire en vidant nos territoires d’un certain nombre de tribunaux. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité spécialiser les compétences des tribunaux d’instance et des chambres déléguées afin d’assurer cette présence territoriale.

Nous avons en revanche été absolument déterminés à supprimer de ce texte la spécialisation des tribunaux de grande instance. En effet, nous savons tous ici, de façon honnête et certaine, que cela signifiera, à terme, la disparition d’un certain nombre de TGI dans nos départements. Nous ne voulons pas de cette disparition, car la présence de la justice au service de nos concitoyens n’est pas uniquement un service public : elle participe aussi fortement à l’aménagement du territoire. Voilà où nous en sommes en matière civile.

Nous avons proposé des évolutions en matière de droit commercial ; vous les avez refusées, alors que tout le monde était d’accord !

Nous avons également proposé un certain nombre d’évolutions en matière pénale. Nous n’avons pas refusé les principes de cette réforme en la matière, nous avons même accepté l’expérimentation du tribunal criminel de première instance. En revanche, concernant les pouvoirs d’enquête renforcés du parquet, dont nous ne contestons pas le principe, nous avons décidé que l’avocat pourra, dans ce cadre, être informé d’une perquisition. Nous n’avons même pas demandé qu’il soit présent, nous avons simplement souhaité qu’il soit informé. Vous nous l’avez refusé !

Nous avons estimé que certaines procédures exorbitantes d’enquête, dont on peut comprendre la nécessité dans certains cas, devraient pouvoir s’appliquer quand la peine encourue est supérieure à cinq ans d’emprisonnement, plutôt que trois ans, comme vous le proposiez. En effet, on ne peut pas utiliser ces moyens exorbitants dans toutes les circonstances. Voilà ce que nous avons dit !

Nous désapprouvons par ailleurs le choix que vous avez fait d’une procédure quelque peu exotique, à délai différé. Un dossier non bouclé pendant l’enquête préliminaire pourrait être renvoyé devant le tribunal correctionnel, qui devrait en juger, après un délai minimum de deux mois. Or, pendant ce temps, un mandat de dépôt pourrait être prononcé contre la personne poursuivie, alors même que vous nous dites qu’il faut vider les prisons ! Nous ne sommes pas d’accord avec cette procédure. De deux choses l’une : soit le dossier est prêt, auquel cas il va au tribunal, soit il ne l’est pas, et une information judiciaire est ouverte. Si vous faites le choix inverse, faites-le, mais faites-le clairement !

Nous avons en revanche accepté – je l’ai déjà dit – le tribunal criminel de première instance. Faisons-en l’expérience, regardons si cela fonctionne ! Nous savons que des inquiétudes s’expriment, mais le Sénat a accepté d’avancer sur ces sujets.

Le Sénat s’est efforcé d’être le plus constructif possible, mais à chaque fois que nous avons proposé des sujets de débat dans cet hémicycle, le Gouvernement s’y est fermement opposé.

Lorsque nous avons évoqué la politique des mineurs et la réforme de l’ordonnance de 1945, vous nous avez rassurés : il y aura un texte ! Or vous avez demandé, à l’Assemblée nationale, une habilitation de légiférer dans ce domaine par voie d’ordonnance. Comment voulez-vous que nous l’acceptions ? Vous le justifiez en affirmant que vous voulez vous contraindre vous-mêmes. En quoi légiférer par voie d’ordonnance représenterait-il une contrainte ? Vous auriez pu déposer un projet de loi : nous l’aurions examiné avec beaucoup d’intérêt et de manière très constructive.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il n’est pas acceptable, pour la Haute Assemblée, de ne pas pouvoir lire et examiner ces textes. Je vous le dis très librement, très simplement, très directement, mais aussi, madame, très sincèrement.

M. Jean-Pierre Sueur. Assurément !

M. François-Noël Buffet, rapporteur. J’ai également remarqué que, dans le texte qui nous est revenu de l’Assemblée nationale, les greffes des conseils de prud’hommes et ceux des tribunaux d’instance avaient été fusionnés à la demande du Gouvernement. Nous ne sommes pas d’accord avec cette fusion, qui ne figurait pas dans le texte initial. Les auditions que nous avons réalisées, notamment celles de greffiers, démontrent à l’évidence que ces fonctions sont incompatibles.

Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres : vous avez également introduit à l’Assemblée nationale des mesures relatives aux procédures de tutelle. Peu à peu, par petites touches, vous avez modifié la législation sur les tutelles. Dieu sait que c’est un sujet sensible ! Nous avons pour notre part veillé, dans le texte, à permettre les évolutions, mais aussi à garantir les contrôles effectués par le juge, que vous souhaitiez à un moment écarter. Il s’agit du droit des personnes et, de surcroît, de celui des plus fragiles, que le Sénat a voulu protéger encore plus, tout en acceptant les évolutions.

Toutes les petites touches que vous avez ainsi apportées à l’Assemblée nationale ont considérablement modifié l’état du texte. En commission mixte paritaire, nos collègues députés membres de la majorité présidentielle nous ont déclaré qu’il n’y avait rien à discuter. Ce serait le texte du Gouvernement, seulement le texte du Gouvernement, rien que le texte du Gouvernement : fermez le ban, la messe est dite ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mmes Brigitte Lherbier et Maryse Carrère applaudissent également.)

Ensuite, madame le ministre, vous êtes retournée à l’Assemblée nationale avec votre projet de loi. Vous avez rétabli le texte du Gouvernement et rajouté ce que je viens d’évoquer, sans que nous puissions le voir.

Le texte revenu au Sénat, il nous restait à déterminer une stratégie. Nous pouvions décider de le rejeter par une motion préjudicielle ; nous ne l’avons pas fait. Nous avons plutôt souhaité que le Sénat réaffirme ses positions.

La semaine dernière, lors de leur audition, les professions judiciaires – avocats, magistrats et greffiers, pour une fois à l’unisson – ont salué dans leur ensemble le travail accompli par le Sénat, lors de sa première lecture, et le texte sorti de cette maison.

Or, à l’issue de cette audition, madame le ministre, vous avez considéré, une fois de plus, que la messe était dite, qu’il n’y avait rien à dire et que vous ne changeriez rien. Vous êtes de nouveau montée à cette tribune, aujourd’hui, pour nous redire la même chose.

Madame le ministre, dans un monde qui bouge, dans une France qui doute, et alors que nos concitoyens vivent des situations difficiles, nous ne voyons pas ici les signes de l’apaisement. J’ai eu, dans le passé, à discuter avec d’autres ministres, avec des membres d’autres gouvernements, y compris récents ; on sentait chez eux une possibilité d’ouverture et de discussion. Nous ne l’avons pas sentie avec ce gouvernement sur ce projet de loi.

En conclusion de mon intervention, je voudrais redire que nous avons fait aujourd’hui le choix de conserver dans le texte les petites avancées que l’Assemblée nationale a retenues, sur une toute petite partie des avancées du Sénat. Gardons ce qui peut être gardé !

Nous avons en revanche décidé de rejeter tout ce qui a été rajouté à l’Assemblée nationale : la réforme de l’ordonnance de 1945, la fusion des greffes des conseils de prud’hommes et des tribunaux d’instance, ou encore les modifications que vous avez faites sur les tutelles.

Nous avons également décidé de réintroduire ce que nous avions jugé juste, à la fois en matière civile et en matière pénale, mesures que le Sénat a défendues et que j’ai évoquées au début de mon propos.

Nous avons enfin redit, très clairement, que les moyens budgétaires devraient être remis à niveau si l’on veut une ambition pour notre justice.

Voilà ce qu’a fait la commission des lois, la semaine dernière et encore ce matin. Voilà ce qu’elle souhaite, aujourd’hui, devant notre assemblée.

Yves Détraigne et moi-même restons convaincus, au nom de la commission des lois – j’espère que le Sénat nous suivra – que nous avons besoin de réformer ce grand ministère de la justice, qui est depuis de nombreuses années, malgré des investissements importants, le parent pauvre de l’administration, et qui a besoin d’être remis à très haut niveau.

Il y a un besoin d’organisation interne, de numérisation, bien évidemment, et de meilleure adaptation des procédures, mais cela se fera à l’unique condition que les justiciables y retrouvent leur compte et qu’ils puissent à tout moment rencontrer leur juge. Ainsi seulement, ceux qui doivent se défendre pourront le faire dans d’excellentes conditions. C’est le seul gage d’une justice acceptée, respectée, apaisante et garante du lien social absolument nécessaire dans notre pays qui est en train de souffrir de la douleur de la fraction. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

Mme Brigitte Lherbier. Bravo !

 
 
 
 
Dossier législatif : projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
Question préalable (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable sur le projet de loi

Mme la présidente. Je suis saisie, par M. Masson, d’une motion n° 101.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3 du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de programmation 2018–2022 et de réforme pour la justice (n° 288, 2018–2019).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la motion.

M. Jean Louis Masson. Madame le président, madame le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord souligner que, si un certain nombre de problèmes sont évoqués dans le projet de loi qui nous est soumis, ce texte ne prend toutefois pas en compte le problème fondamental de la justice, à savoir l’insuffisance de ses moyens.

Certes, madame le ministre, vous n’êtes pas responsable de l’héritage que vous avez reçu, et qui s’est constitué, au moins, au fil des deux précédents mandats présidentiels. Cela dit, nous sommes face à cette situation, et c’est donc à vous que l’on s’adresse quand on doit proclamer que le système judiciaire actuel ne peut pas continuer ainsi.

Vous proposez un certain nombre de réformes, mais pour qu’une réforme puisse fonctionner, il faut un minimum de moyens ; or ces moyens ne sont pas présents. Il n’est pas possible que des juges n’aient pas de secrétaire pour taper les jugements, ou que des tribunaux n’aient même plus, à partir du mois de septembre, les moyens de payer des traducteurs ou des experts.

Il n’est pas acceptable que des juges d’instruction soient tellement surchargés que, pendant les deux ou trois ans où ils restent en poste quelque part, ils n’aient même pas le temps d’ouvrir certains dossiers. En matière pénale, ce sont les personnes poursuivies qui font les frais de ces carences. Très souvent, en trois ans, le juge d’instruction n’a pas le temps d’ouvrir le dossier de M. Dupont ou de Mme Durand, qui ne peuvent qu’attendre. Ensuite, si le juge d’instruction suivant ne va pas plus vite – parfois, cela prend un temps considérable –, pour éviter la prescription du dossier, on l’ouvre pendant une heure, pour faire un acte quelconque, et on le referme aussitôt.

Je crois, madame le garde des sceaux, que cette situation ne peut absolument pas se pérenniser. C’est un problème qu’il faut vraiment prendre à bras-le-corps. Or, malheureusement, vous faites comme tous ceux qui vous ont précédée : ce que je vous dis, je l’avais déjà dit à Mme Rachida Dati, qui n’a pas fait mieux que vous, si ce n’est pire.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est difficile !

M. Jean Louis Masson. Le vrai problème, à ce niveau, est la nécessité de ne pas nous déterminer en fonction de critères politiques. Je fais un constat objectif. Il ne s’agit pas de voter pour les réformes de Mme Dati parce qu’on appartient à tel ou tel parti, ou contre celles de Mme Belloubet, parce qu’on n’appartient pas au même parti qu’elle.

Pour ma part, étant complètement indépendant, quand j’estime que certaines politiques qui nous sont proposées sont bonnes, je vote en leur faveur. Par exemple j’avais voté pour les propositions de M. Hollande instaurant l’interdiction du cumul des mandats, parce que je jugeais que c’était une bonne chose. En revanche, dans d’autres domaines, il m’arrive de voter exactement dans le sens contraire quand je ne suis pas d’accord.

La deuxième raison pour laquelle je défends cette motion tendant à opposer la question préalable est que cette affaire ressemble quelque peu à ce que nous avons vécu à l’occasion de la loi NOTRe. Que voulait-on faire par cette loi ? On a cru que d’énormes gains de productivité résulteraient de la création de grandes régions et de grandes intercommunalités et de la disparition de toute la gestion de proximité des collectivités territoriales.

De fait, madame le ministre, c’est un peu la même chose qui est à l’œuvre ici. Il ne faut en effet pas être dupe : quand vous annoncez la spécialisation des cours d’appel, c’est tout comme quand M. Sarkozy annonçait que les intercommunalités auraient des compétences obligatoires. Rassurez-vous, disait-il : les communes sont importantes. Eh bien, M. Sarkozy voulait la mort des communes, et M. Hollande a continué à la vouloir !

De même, Mme Dati voulait la mort d’une partie des cours d’appel, et vous poursuivez exactement la même logique. Votre réforme, madame, correspond exactement aux ambitions de Mme Dati, et elle ne vaut pas mieux qu’elles, parce qu’il s’agit d’éloigner la justice du terrain. Le justiciable est de plus en plus éloigné de son juge, sans que les moyens de la justice ne soient en rien améliorés.

Cet éloignement du justiciable est évident dans ces histoires de cours d’appel spécialisées. Vous avez déjà écrit ce qui arrivera ensuite. Dans chaque région, il existe déjà une cour d’appel dotée d’une compétence régionale pour organiser la gestion des affaires ; c’est déjà fait, cela remonte à Mme Dati, à l’époque de laquelle on avait amorcé l’évolution vers une seule cour d’appel par région.

M. Bruno Sido. Même pas !

M. Jean Louis Masson. Aujourd’hui, du fait de cette gestion, on transfère petit à petit les compétences. Ainsi, on voit très bien, dans la région Grand Est, quelle cour d’appel a toutes les spécialisations, et lesquelles sont de moins en moins spécialisées, à tel point qu’il ne leur reste plus rien du tout. On voit très bien à quoi cela va aboutir !

C’est d’autant plus désastreux que, durant le quinquennat de M. Hollande, le gouvernement de M. Valls a créé des régions démesurément étendues. Quand, avec de telles régions, il n’y aura plus qu’une cour d’appel par région, on ne saura pas trop où aller. Dites-vous bien, par exemple, que la région Grand Est est deux fois plus grande que la Belgique ; elle est plus grande que les trois Länder allemands qui lui sont contigus. Le pauvre justiciable qui habite à Troyes a besoin d’une heure de train pour se rendre à Paris, mais de quatre heures pour aller à Strasbourg.

M. Bruno Sido. Au moins !

M. Jean Louis Masson. Simplement, il habite la région Grand Est, dont Strasbourg est le chef-lieu. C’est si flagrant que tout le monde sait que la cour d’appel régionale que vous envisagez sera non pas à Strasbourg, mais dans une autre ville. L’exemple des distances à parcourir pour les administrés est réellement flagrant.

Ce que je dis au sujet des cours d’appel est aussi valable pour les tribunaux de grande instance, ainsi que pour la justice de proximité que représentent notamment les tribunaux d’instance.

Tout cela va avoir un effet désastreux pour les gens modestes, sans améliorer du tout le fonctionnement de la justice. Celle-ci a besoin de moyens, beaucoup plus que de réformes. Voilà l’interpellation qu’il faut lancer !

Face à cette double situation, deux attitudes sont possibles.

On peut négocier, comme on l’avait fait pour la loi NOTRe, et adopter tout de même le texte parce qu’il pourrait être pire. C’est ce que beaucoup de parlementaires ont fait pour la loi NOTRe : elle aurait pu être pire, et ce n’était pas si grave ! De fait, il y avait une logique, quand on avait voté les lois sur les collectivités territoriales de M. Sarkozy, à faire de même pour les lois de M. Hollande qui allaient dans le même sens. (M. François Bonhomme et Mme Françoise Férat protestent.) Or, après les avoir toutes votées, on s’est ensuite mis à hurler contre la loi NOTRe !

Pour ma part, j’affirme que, quand on est contre une réforme ou un projet de loi, il faut être clair jusqu’au bout et voter contre ! Il faut rejeter ces propositions de réformes !

Je n’ai pas voté la loi NOTRe ; quant à votre projet, madame le ministre, je ne l’ai pas voté en première lecture et je ne le voterai pas en nouvelle lecture. (MM. Bruno Sido et François Bonhomme sexclament.)

Si j’ai proposé cette motion, c’est parce que nous avons à faire un choix très clair. Adopter une question préalable signifie qu’on est massivement et clairement contre ce qui nous est proposé. En revanche, si l’on adopte le texte en faisant semblant de l’améliorer un peu, mais tout en sachant très bien à quoi cela aboutira, on est alors complice du système. Je ne serai pas complice du système !

C’est la raison pour laquelle j’ai présenté cette motion. Même si nous ne sommes que deux ou trois à la voter, nous aurons au moins marqué clairement notre positionnement sur le sujet. (Mme Claudine Kauffmann et M. Pierre-Yves Collombat applaudissent.)

M. François Bonhomme. Splendide isolement !

Mme la présidente. Y a-t-il un orateur contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Comme je l’ai expliqué précédemment, le dépôt d’une telle motion aurait pu être le choix de la commission des lois, mais ce ne l’a pas été. Nous avons préféré qu’un texte sorte de cette maison, et que ce soit le texte du Sénat.

Monsieur Masson, en votant le texte du Sénat, vous ne voteriez pas complètement le projet de loi du Gouvernement, mais un texte sur lequel nous avons entériné des points d’accord et proposé des améliorations. Voilà ce qui constituera la version sénatoriale de la réforme de la justice.

L’avis de la commission sur cette motion est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je voudrais tout d’abord dire un mot à M. le rapporteur Buffet. Je crains d’avoir eu un mot qui a peut-être été mal compris : celui de « slogan ». Je faisais allusion à des propos que j’ai trop entendus – justice déshumanisée, justice robotisée – sans qu’ils soient réellement argumentés. Je ne les ai pas entendus dans votre bouche, monsieur le rapporteur, mais j’ai estimé qu’ils relevaient du slogan. Il va de soi que j’ai bien trop de respect pour le travail accompli par les parlementaires, en particulier dans cette maison, pour vous les attribuer, mesdames, messieurs les sénateurs.

Monsieur Masson, je considère que les arguments que vous avez développés avec beaucoup de force ne sont pas recevables.

Le premier portait sur les moyens. Il est irrecevable, car notre budget augmente de 24 % en cinq ans. C’est plus que les augmentations réalisées dans la décennie précédente et même au-delà. Rien n’est jamais assez pour la justice, j’en conviens avec vous, mais il faut aussi s’inscrire – je le répète – dans des contraintes globales. Or 25 % de crédits supplémentaires, monsieur le sénateur, permettent de payer tous les frais de justice. À la fin de l’année 2018, il ne restait plus de frais de justice qui n’aient pas été réglés. Je m’inscris donc en faux par rapport à vos propos.

Vous avez également laissé entendre qu’il n’y avait pas assez de personnel. Or 100 magistrats supplémentaires seront affectés dans les juridictions en 2019 ; il y en a déjà eu un nombre important en 2018. Cela fait qu’aujourd’hui, si les juridictions demandent toujours, bien sûr, des magistrats, elles le font de manière moindre que par le passé. Les tribunaux ont surtout besoin de personnel de greffe ; nous aurons peut-être l’occasion de revenir sur ce point auquel j’accorderai toute mon attention. Je vous affirme donc que les moyens sont au rendez-vous pour la justice ambitieuse que nous voulons.

Je ne partage pas non plus votre opinion, monsieur le sénateur, quand vous déclarez que nous avons besoin de moyens, et non de réformes. Cela n’est pas possible. Il faut faire évoluer nos process de jugement et les secteurs sur lesquels nous intervenons, parce que cela répond aux attentes des justiciables et aux évolutions générales de notre monde. On ne peut pas se contenter d’abonder la justice en moyens sans jamais s’interroger sur la manière dont ces moyens sont utilisés.

J’en viens à mon dernier point, que je ne développerai pas, parce que nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de ce débat. Monsieur le sénateur, je l’ai dit et je le redis de nouveau, je suis même allée à Metz pour le dire, d’ailleurs : aucune cour d’appel ne sera fermée !

Quand vous évoquez une seule cour d’appel par région administrative, les bras m’en tombent. Rien dans ce projet de loi, si ce n’est quelque fantasmagorie, ne vous permet de dire cela. Il faut un peu d’honnêteté intellectuelle quand on lit un texte. Je suis certaine que vous en avez, et c’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur cette motion.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Le problème est évident ; notre groupe aurait pu, lui aussi, déposer une motion préjudicielle.

Comme je l’ai dit en commission des lois, Mme Belloubet a réussi l’exploit de faire mieux que Mme Rachida Dati ! Toutes les lois qui nous viennent vont dans le même sens, on l’a dit. Que de sophismes !

On ne peut pas, bien sûr, ne pas se préoccuper de l’argent qu’on investit dans la réforme de la justice. On ne peut pas toujours réclamer des moyens sans vérifier comment ils sont utilisés et si l’on peut mieux les utiliser. Certes, mais regardez la place de la France en Europe ! Regardez les dépenses que nous consacrons à la justice ! Vous savez mieux que moi, madame la ministre, comment cela se passe dans les tribunaux, qui n’ont plus de moyens : ils font avec des bouts de ficelle et des bouts de bois !

Ce ne sont pas des fantasmes ! Il faut faire un effort bien plus important que celui qui est prévu. D’ailleurs, quand vous aurez tenu compte de l’inflation sur la période de programmation considérée, si le rythme de 1,8 % d’inflation par an se maintient, il ne restera plus grand-chose du milliard qui est prévu.

Ensuite, comment peut-on prétendre que, si l’on s’oppose à l’utilisation qui est faite de l’informatique pour économiser en personnel et éviter d’avoir à fournir les moyens nécessaires pour une administration digne de ce nom, on est contre la modernisation ? Ce sont de purs sophismes, et on nous en abreuve à longueur de journée.

S’il y a bien un secteur qui est en péril alors qu’il est fondamental pour le fonctionnement de notre République, c’est bien celui-ci. Alors, madame la ministre, ne venez pas nous dire que votre projet est quelque chose de tout nouveau. Non ! C’est la suite de tout ce que l’on a connu jusqu’à présent, en pire ! (Mme Sophie Joissains applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 101, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

(La motion nest pas adoptée.)

Discussion générale commune (suite)

Question préalable (début)
Dossier législatif : projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
Article 1er et rapport annexé
 
 
 

Mme la présidente. Dans la suite de la discussion générale commune, la parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le 30 janvier dernier, la commission des lois de notre assemblée eut l’heureuse initiative d’organiser une table ronde avec des représentants des syndicats, des associations et des conseils engagés dans l’action contre le projet de loi de réforme de la justice. Voyez-y la preuve, madame la ministre, de la rigueur intellectuelle du Sénat, malgré les divergences profondes qui existent entre groupes parlementaires.

À l’occasion de cette table ronde fut lue une déclaration commune qui résumait le point de vue de ces représentants. Je souhaite, en ouverture de mon propos, vous en citer une phrase qui, selon moi, résume parfaitement la situation : « En tout domaine, le texte entérine un retrait et un affaiblissement de la justice dans le seul souci d’économiser des bouts de chandelles. »

La justice de notre pays va mal ; les femmes et les hommes qui la portent au quotidien, quelles que soient leurs fonctions, sont à bout, usés par le flux tendu qui leur est imposé depuis des années.

Des chiffres éloquents ont été rappelés le 30 janvier : notre pays consacre 0,20 % de son PIB à la justice, contre 0,31 % en moyenne en Europe. La France se situe au trente-septième rang sur quarante-deux membres du Conseil de l’Europe.

Comment accepter qu’un procureur de la République ait à traiter 3 465 procédures par an dans notre pays, contre une moyenne européenne de 578 ?

Madame la ministre, vous me répondrez que le budget de la justice a été augmenté de 24 %. Il faut pourtant rappeler que c’est l’administration pénitentiaire qui percevra, pour l’essentiel, les fruits de cette progression. Certes, il y a urgence, au vu de l’état déplorable des prisons françaises, mais n’est-il pas tout aussi urgent de permettre à la justice d’être plus efficace, non pas simplement pour condamner et pour sanctionner, mais aussi pour réinsérer et pour prévenir la récidive ?

Désengorger les prisons requiert évidemment – pardonnez-moi cette lapalissade – que l’on cesse d’adopter des lois qui entraînent la surpopulation.

Nous aurons l’occasion de constater une nouvelle fois, lors de l’examen des articles, que ce texte est truffé de mesures d’économie sur le rendu de la justice lui-même.

J’en citerai pour preuve l’effacement, à plusieurs reprises, des magistrats face à la police judiciaire, ou encore la centralisation du dispositif des injonctions de payer. Que dire de la mise à mal, la mise à mort des tribunaux d’instance ? Tout cela souligne cette volonté de réduire la justice pour économiser. La dématérialisation à tout va, liée au développement de la procédure de conciliation, s’inscrit bien entendu elle aussi, sous un couvert grossier de simplification ou d’efficacité, dans cette logique d’austérité.

La justice est ainsi traitée comme les autres services publics : on privatise, on externalise, on dématérialise, avec pour principales victimes non seulement les principes et les libertés, mais aussi, et surtout, les usagers et les personnels concernés. Sans reprendre mes propos de première lecture, je ne peux pas dissimuler un doute sur l’attitude de la majorité de la commission des lois dans ce débat.

Bien entendu, comme nous l’avons souligné, l’intervention sénatoriale en matière civile est positive, en particulier dans le domaine de la conciliation et de la dématérialisation. Mais elle est marquée du sceau du « tout-répressif » et du « tout-sécuritaire » en matière pénale.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Mais non !

Mme Éliane Assassi. Mais si ! Double peine, remise en cause du sursis, renforcement des conséquences de la récidive, et j’en passe… le juge est préservé, mais poussé à toujours plus de répression, sans place aucune pour une réflexion alternative dont l’objectif serait moins de prison, plus de réinsertion, en un mot plus d’apaisement. Punir serait ainsi la seule fonction de la justice. Un tel dogme conduit tout droit à l’échec.

En revanche, nous nous félicitons de la suppression par notre commission de l’article habilitant le Gouvernement à modifier l’ordonnance des mineurs de 1945 par voie d’ordonnance. Madame la garde des sceaux, nous espérons vivement que le Gouvernement se rangera à cet avis, renvoyant à un projet de loi cette nécessaire réflexion.

Vous le savez, nous vivons un moment particulier de l’histoire de notre pays. Poussé par le mouvement des « gilets jaunes », le pouvoir organise un grand débat national. Peut-on concevoir que le service public de la justice, dont le bon fonctionnement garantit l’État de droit, ne soit pas l’un des sujets de cette discussion ? (M. le président de la commission des lois acquiesce.)

Mme Éliane Assassi. L’égalité face à la justice est un questionnement démocratique fort. Vous le savez tous et toutes ici, l’accès au droit n’est pas le même selon que l’on est riche ou pauvre.

Les professions de la justice ne s’y sont pas trompées. Elles se sont lancées dans un mouvement d’ampleur, symbolisé par celui des robes noires, aux côtés des gilets jaunes ou des blouses blanches, pour défendre cet élément clé de la République qu’est la justice.

La majorité sénatoriale a écouté ; c’est bien. Elle a en partie entendu. Mais, sur le fond, elle suit la voie du Gouvernement, en substituant de-ci de-là des possibilités à des obligations.

Au groupe CRCE, nous estimons que ce projet ne laisse pas de place à la tergiversation ; il exige une opposition franche. Nous voterons donc contre ce texte sans hésitation, ici, au Sénat. Nous savons bien évidemment que c’est le texte de l’Assemblée nationale qui sera, pour l’essentiel, rétabli. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes donc réunis pour examiner en nouvelle lecture un texte qui nous vient de l’Assemblée nationale. Ce texte est tel que nous l’avions anticipé au vu des amendements que vous aviez déposés, madame la garde des sceaux. En effet, les députés ont, pour l’essentiel, rétabli sans coup férir votre projet.

Il s’agit donc non pas du projet de l’Assemblée nationale contre celui du Sénat, mais du projet du Gouvernement adopté par sa majorité à l’Assemblée nationale. Vous omettez de dire que toute l’opposition, de droite comme de gauche, s’est exprimée contre ce texte.

À l’inverse, nous sommes parvenus ici – MM. les rapporteurs le savent – à trouver des points très consensuels sur ce qu’il faudrait faire pour la justice. Il y a d’abord eu une mission sur la justice, puis un récent rapport sur la nature de la peine et son exécution. Ces réflexions ont été partagées, échangées. Beaucoup sont consensuelles ; certes, pas toutes, et heureusement ! Le débat suppose qu’il y ait aussi des désaccords, et nous le verrons au cours de la discussion. Mais vous devriez entendre tout cela.

Quand les organisations professionnelles de cet univers que vous et moi connaissons bien – nous savons qu’elles sont rarement unanimes – s’expriment à l’unanimité contre ce texte, il faut peut-être s’interroger : est-on sûr que le Gouvernement ait raison contre tous ?

Dans le contexte d’un grand débat lancé parce que des manifestants exprimaient leur exaspération contre cette technocratie qui gouverne et pense avoir toujours raison, on ne peut plus s’enfermer dans de telles certitudes. C’est pourtant ce que vous faites !

En réalité, il y a bien deux projets : d’un côté, celui d’une vision et d’une ambition pour la justice ; de l’autre, le vôtre. Vous vous bornez à constater que la justice a besoin de moyens et que ceux-ci ne sont pas satisfaits. Certes, vous faites quelques efforts – nous le reconnaissons –, mais comme ils ne suffiront pas, vous voulez simplement gérer la pénurie. C’est ce que vous reprochent tous les participants que nous avons réunis lors de la table ronde. Ils constatent, rejoignant ce que nous disions en première lecture, que tout est manifestement fait pour désengorger la justice, l’amener à s’organiser de manière différente et, surtout, faire en sorte que le justiciable y ait de moins en moins recours.

Or, précisément, dans une société démocratique, dans un État de droit, il est logique que chacun veuille faire valoir ses droits. Le nombre des divorces augmente, de même que celui des conflits familiaux, celui des conflits de la consommation, celui des conflits des particuliers ou celui des conflits entre les entreprises. C’est normal dans un État de droit. Si l’on ajoute à cela les actes de délinquance, qu’il faut évidemment poursuivre, il est évident que notre justice n’est pas à la hauteur des besoins d’une société moderne.

Je vous renvoie aux chiffres qui ont été rappelés par notre collègue Éliane Assassi ; tout le monde les connaît. Les crédits concernés s’élèvent à 0,2 % du PIB seulement, contre 0,31 % en moyenne dans tous les pays du Conseil de l’Europe. Nous sommes en dessous de tout par rapport aux autres pays. La comparaison avec l’Allemagne nous ferait honte à tous : nous consacrons 65,9 euros par habitant à la justice, contre le double outre-Rhin. Notre justice est donc manifestement exsangue.

Certes, tout ne se refera pas du jour au lendemain. Mais faut-il pour autant abandonner, comme cela est fait pour partie dans le texte, le recours à la justice ? Je ne le crois pas.

Dans le rapport de la mission, nous n’avons jamais dit que nous étions hostiles à la numérisation. Au contraire ! Nous relevions le retard pris, l’incohérence des systèmes informatisés au sein du ministère – en l’occurrence, c’est un problème administratif, et non législatif –, les erreurs et les échecs constatés. Nous insistions sur la nécessité de trouver d’autres systèmes plus performants.

Pour autant, on peut rejoindre ce qui se dit sur les alternatives à la justice : trouver un mode de règlement contentieux différent. C’est ce que vous avez donné comme chantier à MM. Jean-François Beynel et Didier Casas. L’un est haut magistrat ; l’autre est maître des requêtes au Conseil d’État, mais, surtout, secrétaire général de Bouygues Télécom. Ils ont travaillé sur les modalités d’utilisation de la médiation, de la conciliation et du traitement participatif par le biais de l’internet. Mais ils ont insisté sur la nécessité d’une labellisation contrôlée. C’est ce que les rapporteurs ont proposé en première lecture sur la notion de certification. Pourquoi ne veut-on pas garantir le justiciable en lui suggérant d’essayer de trouver une solution amiable, mais par le biais de la certification avant de faire trancher le contentieux par la justice ? C’est normal que l’État certifie. Mais non : vous refusez !

De même, vous ne pouvez pas, mais vous le savez, être insensible aux craintes des territoires quant à l’organisation des juridictions. Vous avez raison de dire à notre collègue Jean Louis Masson qu’il n’y a pas de décision de fusion de cour d’appel dans le Grand Est pour l’instant.

M. Pierre-Yves Collombat. Mais ça va venir !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je n’ai jamais dit : « pour l’instant » !

M. Jacques Bigot. Mais l’inquiétude existe. Et le simple fait de dire que l’on pourrait rapprocher des présidents et des procureurs généraux l’accentue, même si je ne dis pas que c’est le projet que vous avez en tête.

Nous étions favorables à la fusion des tribunaux d’instance au sein de tribunaux de grande instance, appelés dans le texte dont nous sommes saisis « tribunaux judiciaires » – le terme me semble pertinent, puisqu’il y a des tribunaux administratifs –, ce qui relève notamment de l’article 53. Nous l’avions signifié dans le rapport de la mission, ainsi qu’en première lecture.

Mais, comme je vous l’ai dit lorsque nous nous sommes rencontrés, il faut absolument rassurer les territoires, qui sont inquiets. Il faudra mener un travail de fond avec les collectivités territoriales sur l’organisation territoriale. J’aimerais bien que des juges des enfants, des juges aux affaires familiales, des juges de la proximité puissent siéger et recevoir les justiciables dans les lieux de justice qui seront maintenus, comme les anciens tribunaux d’instance. Ce n’est pas tout à fait dans l’état d’esprit des magistrats. Il faudra peut-être les faire évoluer sur ce point.

En revanche, votre projet sur la spécialisation des TGI n’est pas réaliste. Cela conduira incontestablement à la crainte – nous l’avons déjà souligné – que certains tribunaux de grande instance ne disparaissent à terme. Cela ne se fera sans doute pas du temps de votre ministère, madame la garde des sceaux. Mais rien que cette inquiétude est dangereuse. Elle a été renforcée par l’ajout, à l’Assemblée nationale, de la fusion des greffes des conseils des prud’hommes et des greffes des tribunaux de première instance.

Je pense que nous n’avons pas du tout la même vision sur le plan pénal. Certes, il est normal que nous divergions les uns et les autres. Mais vous n’avez pas su proposer une nouvelle vision de la justice pénale dans ce texte. M. Bruno Cotte et Mme Julia Minkowski, à qui vous avez fait confiance pour les chantiers de la justice, déclarent à propos de la peine de probation, que vous fustigez : « La plupart des personnes entendues comme le résultat de nombre des consultations ont mis l’accent sur l’intérêt d’une peine de probation combinant ce qu’il y a de meilleur dans l’actuel sursis avec mise à l’épreuve qui est fréquemment prononcé et dans la contrainte pénale à laquelle, contrairement à ce qu’il était souhaité, il n’a pas été fréquemment recouru. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. C’est exactement ce que je fais, monsieur le sénateur !

M. Jacques Bigot. Vous refusez de suivre leurs propositions.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Pas du tout !

M. Jacques Bigot. Vous dites vous-même que vous faites une synthèse avec la proposition de Mme Taubira.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Non, je fais ce qu’ils disent !

M. Jacques Bigot. Alors, vous nous l’expliquerez mieux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Oui !

M. Jacques Bigot. À la peine de probation, vous préférez la détention à domicile, qui est une façon d’exécuter une peine d’emprisonnement. Alors que ce n’est pas une peine en soi, vous en faites une peine en soi. Là encore, cela signifie que vous gérez la pénurie. Faute de places dans les prisons, vous proposez aux gens d’être incarcérés à domicile, ce qui n’est pas simple. Nous aurons peut-être l’occasion d’y revenir. Mais nous avons déjà su échanger sur ce point en première lecture.

En résumé, vous nous donnez globalement le sentiment d’être partie sur une certitude depuis le début et de n’avoir rien ouvert au débat. Même dans le grand débat, vous refusez encore de débattre ! Vous nous expliquez que vous allez sur le terrain pour « convaincre ». Mais convaincre, ce n’est pas débattre. Au fond, vous faites comme votre gouvernement. Nous voyons aujourd’hui les députés La République En Marche, le Président de la République, le Premier ministre et des ministres aller dans les grands débats citoyens pour, en fait, expliquer ce qu’ils font. Or débattre, c’est écouter les autres. En l’occurrence, ce serait écouter le Sénat.

En tout cas, madame la garde des sceaux, je vous remercie d’avoir, à l’occasion de ces débats, montré l’intérêt et la place du Sénat. Je ne m’attendais pas à entendre des syndicats de la justice plutôt marqués à gauche déclarer que le Sénat avait mieux travaillé que l’Assemblée nationale ! (Mme la garde des sceaux sourit.) Il est vrai qu’ils nous ont dit aussi que le Sénat les avait écoutés alors que l’Assemblée nationale ne semblait pas vouloir les entendre… (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Joissains applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je voudrais commencer par remercier nos deux rapporteurs et l’ensemble de nos collègues de leur investissement sur ce projet de loi très important. Avant même les mobilisations provoquées par l’examen du texte à l’Assemblée nationale, le Sénat avait identifié les sujets les plus problématiques et y avait apporté des réponses pour la plupart satisfaisantes et consensuelles. L’organisation d’une nouvelle table ronde après l’échec de la commission mixte paritaire illustre la particulière implication de notre chambre sur le sujet.

Nous n’ignorons pas que toutes les réformes sont difficiles à conduire, surtout quand elles affectent un grand nombre d’acteurs ayant des intérêts divergents. C’est le cas en matière de justice.

Mais ici, ce sont tous les Français qui sont concernés. Notre devoir est de protéger les justiciables de manière équitable, de défendre les libertés individuelles et d’assurer la proximité du service public de la justice. Les préoccupations peuvent d’ailleurs sensiblement varier selon que l’on se situe en zone urbaine ou en zone rurale.

Avec la complexification des parcours de vie familiaux, professionnels et géographiques, notre réflexion doit se poursuivre. On ne peut pas se cantonner dans une attitude seulement conservatrice consistant à vouloir maintenir l’existant. Ce n’est pas la position de notre Haute Assemblée. Dès 2017, l’investissement de l’ensemble de l’hémicycle sur la proposition du président Bas a montré notre volonté de prendre à bras-le-corps tous les défis qui s’imposent aux justiciables et aux professionnels du droit, malgré plusieurs points de désaccord.

L’article 1er du projet de programmation budgétaire est certainement le plus important. La justice souffre d’un manque d’investissement substantiel. L’effort budgétaire consenti, qu’il soit de 20 % ou 30 % sur quatre ans, devrait permettre d’améliorer les conditions de travail dans les juridictions. Quand on voit les résistances que le reste des dispositions suscitent, on n’est pas loin de se demander s’il n’aurait pas fallu se limiter à cet engagement budgétaire à droit constant ou presque, avant d’ouvrir les chantiers de la justice. À l’avenir, il serait peut-être sage de s’imposer comme doctrine de n’ouvrir que des chantiers que l’on est certain de pouvoir sereinement conduire à leur terme.

En effet, aucun aspect de la justice n’échappe à ces projets de loi : développement de la médiation et de la conciliation, justice civile, affaires familiales, plateformes de services juridiques en ligne, justice administrative, procédure pénale, droit pénal et même justice pénale des mineurs, que vous proposez de réformer par ordonnance. Par la multitude des sujets qu’ils abordent, les effets escomptés de ces textes sont devenus impossibles à anticiper.

Nous regrettons particulièrement que la réforme pénale n’ait pas fait l’objet d’un texte distinct, en lien avec les très nombreuses réformes de sécurité intérieure qui se sont succédé après les attentats de 2015. Car, dans ce domaine, la défiance s’ajoute aux manques de moyens.

Là plus qu’ailleurs, il est dangereux de vouloir réformer sans s’assurer que des garanties élémentaires seront effectivement observées. Je pense en particulier au développement des techniques spéciales d’enquête, qui font reposer la protection des libertés individuelles sur un contrôle aujourd’hui purement formel des juges.

Parmi les points de consensus dans notre chambre – le sujet inquiète également de nombreux collègues députés –, il y a évidemment la question de la carte judiciaire et l’inscription de la justice dans l’espace national. Nous avons pris acte de votre engagement personnel et sincère à maintenir des lieux de justice à bonne distance de tous les justiciables, madame la garde des sceaux. Mais notre rôle est de nous assurer que cet engagement vous survivra sur du plus long terme.

À ce titre, la rédaction adoptée par la commission des lois offre de meilleures garanties que le texte résultant des travaux de l’Assemblée nationale.

Sur la question de la dématérialisation, de la même manière qu’il faut veiller à se départir de tout conservatisme, je crois qu’il est nécessaire de relativiser les retombées potentielles d’une transformation numérique des relations entre la justice et le justiciable.

Il faut bien le reconnaître, il existe aujourd’hui un fantasme administratif transversal selon lequel le recours aux nouvelles technologies serait la solution à tous les problèmes. Ce projet de loi n’y échappe pas. S’agit-il de rendre justice ou, pour l’administration, de limiter ses rapports avec les justiciables ? S’agit-il d’instituer une nouvelle intermédiation fragilisant l’accès au juge ? Le dernier rapport du Défenseur des droits dénonçant les liens entre la dématérialisation et les inégalités d’accès aux services publics abonde dans notre sens.

De la même manière, il est probable que les plateformes numériques en ligne serviront de miroir aux alouettes pour les justiciables les moins bien informés. Les autres continueront de solliciter des juges.

Sur d’autres questions, comme la lutte contre les violences sexuelles et la création d’un tribunal criminel départemental, nous avancerons également sans dogmatisme. C’est dans cet esprit que nous abordons cette nouvelle lecture. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Mme Sophie Joissains applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, je voudrais évoquer un point relatif au fonctionnement de la justice qui n’est pas pris en compte dans ce texte alors qu’il mériterait, me semble-t-il, une réflexion : la mobilité des magistrats.

Partout, dans la fonction publique, on pousse et on incite à la mobilité des fonctionnaires, parce que c’est un gage d’expérience, de diversification et de meilleure administration. Dans l’administration de la justice, la mobilité répond également à cette finalité. Mais, pour la justice, je crois qu’il y a une autre nécessité dans la mobilité : celle de l’indépendance des juges par rapport au contexte local.

Vous le savez très bien, quand on est pendant vingt ans quasiment au même endroit, des liens se créent. Or cela peut poser des problèmes lorsque l’on est ensuite confronté à des réseaux d’influence. Les liens ainsi noués peuvent avoir une influence sur les décisions rendues, au détriment des principes de neutralité et d’équité de la justice.

Certes, il y a une mobilité pour les magistrats. Mais elle répond essentiellement à la même logique que pour tous les fonctionnaires. Il s’agit de changer d’activité, de fonction et de responsabilités. En revanche, elle ne répond pas du tout à l’exigence d’indépendance des magistrats et à la nécessité de les déconnecter des réseaux d’influence qui peuvent les entourer s’ils restent trop longtemps sur un même poste.

Je pense donc qu’il y a un problème. La mobilité ne doit pas être simplement conçue comme un changement d’activité. Il doit s’agir d’un changement géographique. Or nombre de magistrats parviennent à faire quasiment toute leur carrière au même endroit, en se faisant muter dans un TGI ou une cour d’appel situés à quinze ou vingt kilomètres, pour y rester seulement deux ans, le plus souvent sans même déménager.

Or un magistrat étant un homme – au sens générique du terme, bien entendu –, s’il reste trente ans au même endroit, il finit par bien connaître ceux qui y vivent. Et des réseaux d’influence plus ou moins occultes, ainsi que d’éventuelles affinités directes ou indirectes, peuvent exister localement.

Mme la présidente. Il faut conclure, car vous avez dépassé de dix-sept secondes le temps qui vous était imparti.

M. Jean Louis Masson. Je conclus.

J’aimerais bien que nous ayons un jour une réflexion sur le sujet. Il y va de la neutralité de la justice.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Joissains. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme Sophie Joissains. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes de nouveau réunis pour l’examen de ce texte d’une importance capitale.

La justice est, certes, un service public, mais c’est surtout l’incarnation d’un pilier de la démocratie, du « troisième pouvoir » décrit par Montesquieu. Faute d’effectifs suffisants ou de respect vigilant de certains principes, elle peut faire basculer un régime démocratique, et également broyer des vies. Il importe donc de se montrer particulièrement vigilant lorsqu’il s’agit d’en modifier les règles ou le fonctionnement.

C’est un pouvoir régalien qui doit être accessible à tous. Son efficacité et son organisation ne peuvent pas se mesurer à l’aune d’un prisme purement comptable.

En première lecture, le Sénat a apporté des évolutions avisées et nécessaires à ce projet de loi.

On peut évoquer ici une trajectoire budgétaire ambitieuse, avec une création de 13 700 emplois là où – il faut bien le dire – le Gouvernement n’en prévoit que 6 500.

Le budget proposé par le Gouvernement est, certes, important, mais son affectation concernant les juridictions est loin d’être satisfaisante. Je ne reviendrai pas sur les chiffres qui ont été rappelés par mes collègues.

Dans l’objectif de garantir l’équilibre de la procédure pénale et de limiter le renforcement excessif des pouvoirs du parquet, le Sénat a veillé à ne pas marginaliser le juge d’instruction et à maintenir la collégialité des travaux de la chambre de l’instruction.

La collégialité est une garantie en matière d’échanges, d’ajustements, d’examen concerté et minutieux des cas d’espèce, en bref d’impartialité et de considération de la situation du justiciable.

Nous savons tous combien, particulièrement dans le domaine pénal, une affaire apparemment simple peut se révéler complexe. Nous savons aussi que les juges sont surchargés. À l’évidence, comme pour tout un chacun, leur attention ne peut pas être aussi aiguë à la vingtième ou trentième affaire de la journée qu’à la première. J’aurais pour ma part souhaité une réduction des formations à juge unique.

L’inflation des missions dévolues au parquet est une caractéristique majeure du texte. Sur le plan de l’efficacité et de la rapidité – c’est à l’évidence le premier objectif du projet de loi –, une telle orientation laisse dubitatif.

En effet, le Conseil de l’Europe désigne nettement la surcharge des procureurs de la République comme responsable de l’allongement des procédures.

Notre système change. Je pourrais évoquer la loi sur la liberté d’expression, à laquelle le Sénat a, dans sa sagesse, opposé un refus sans appel, ou la loi substituant l’intention supposée à la commission de l’infraction. Un fait est certain : la logique inquisitoire se substitue insidieusement à la logique accusatoire, et les droits de la défense se font de plus en plus timides.

Accroître les pouvoirs du parquet, c’est aussi occulter le fait que, quelles que soient les compétences et l’évidente valeur professionnelle de ses membres, celui-ci ne constitue pas une « autorité judiciaire » au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La France a déjà été condamnée plusieurs fois. La situation ne pourra pas s’améliorer tant que des garanties supplémentaires d’indépendance statutaire n’auront pas été apportées par une révision constitutionnelle. Tant qu’une telle révision n’aura pas été adoptée, il ne sera pas raisonnable de continuer à confier au parquet des pouvoirs toujours plus importants et de le rendre seul décisionnaire de l’utilisation de techniques d’enquête les plus intrusives qui soient pour la vie privée et les libertés individuelles. Avec le projet de loi, ces techniques, jusqu’alors réservées au terrorisme et à la criminalité organisée, seront exerçables à l’encontre de tout justiciable soupçonné d’un délit quel qu’il soit, même le plus mineur.

La question des moyens et de leur affectation est essentielle pour offrir à nos concitoyens une justice de qualité, une justice accessible offrant protection et garanties d’impartialité.

Elle ne saurait en aucun cas trouver une solution dans de simples réorganisations : suppression de tribunaux d’instance, déjudiciarisation ou encore dématérialisation débridée des procédures.

Les crédits dévolus au programme « Justice judiciaire » seront-ils suffisants pour redresser le service public de la justice ? Non, sauf à réduire drastiquement son rôle auprès des citoyens. C’est malheureusement le chemin qui semble être pris : déjudiciarisations coûteuses pour le contribuable ; règlements amiables de litiges en ligne non sécurisés, ce qui laissera les plus vulnérables de nos concitoyens être la proie des pires escrocs ; plaintes en ligne, alors que, pour information, presque le quart des Français ne sait pas utiliser l’outil numérique – je crois que le chiffre exact est 23 % ; disparition progressive des audiences de conciliation ; disparition programmée des jurés, et ne parlons même plus du juge de paix, passé, lui, aux oubliettes. L’individu, le justiciable, existe-t-il encore face à cette – oui, madame la garde des sceaux – déshumanisation de la justice ? La question se pose.

S’agit-il d’une justice à deux vitesses ou d’une justice en perte de vitesse ? À l’évidence, des deux.

Les professionnels du droit sont très inquiets. Le 29 janvier dernier, la commission des lois du Sénat a invité à débattre les représentants du monde judiciaire : avocats, bâtonniers, magistrats et fonctionnaires des greffes.

La Confédération nationale des avocats, par l’intermédiaire de son président, M. Spitz, a souligné l’unanimité des professionnels du droit pour défendre l’intérêt du justiciable. Cette unanimité est en effet rare, très inhabituelle.

Me Marie Aimé Peyron, bâtonnier du barreau de Paris, a salué le travail sénatorial sur le rééquilibrage entre les droits des victimes et les droits de la défense en matière pénale, et lourdement insisté sur le cruel manque de moyens humains et financiers.

L’affectation des moyens laisse le monde des juridictions bien à l’écart de la manne budgétaire, les moins bien lotis étant les greffiers, grands oubliés de la réforme, ainsi que le personnel affecté au réseau judiciaire de proximité. Il n’y a pas de hasard.

Jérôme Gavaudan, président de la Conférence des bâtonniers, et Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature, ont dénoncé la fusion des tribunaux comme la fin des juridictions de proximité.

Certaines des juridictions transformées en chambres seront inévitablement fermées à l’avenir, nonobstant vos engagements, que je pense profondément sincères, madame la garde des sceaux. Ce sont encore les habitants des territoires ruraux qui en feront les frais.

Face à ce projet de loi, contesté et profondément rejeté par l’ensemble des professionnels du droit, je salue la démarche du président de notre commission des lois, M. Philippe Bas : tenter jusqu’au bout d’obtenir un compromis avec vous, madame la garde des sceaux.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Merci !

Mme Sophie Joissains. Je salue également encore une fois les professionnels du droit, qui ont su faire fi d’intérêts parfois très divergents pour s’unir dans la défense de la justice et du justiciable.

La réforme de la justice, ses enjeux et les obstacles que rencontrent chaque jour les justiciables et les professionnels doivent faire partie intégrante du grand débat national.

Pourtant, cette réforme essentielle tant sur le plan pratique que sur le plan fondamental de nos principes démocratiques en est exclue ! Exclue de facto parce que la procédure législative est en cours et qu’il ne faut toucher à rien de ce qui est engagé. C’est inouï, c’est ubuesque : c’est tout simplement antidémocratique !

Tout est encore possible, vous pouvez encore entendre le Sénat, madame la garde des sceaux, vous pouvez encore entendre les professionnels du droit et surtout entendre les citoyens. Ce sont eux les premiers concernés et ils doivent pouvoir, à l’heure de ce grand débat national, donner leur avis !

L’Assemblée nationale a d’office quasiment rétabli le texte initial du Gouvernement, en balayant comme billevesées les modifications apportées par le Sénat.

Il est ici nécessaire d’insister sur les difficultés croissantes des deux chambres à s’entendre sur un texte commun ou plutôt sur le refus du groupe majoritaire de l’Assemblée nationale à accepter un point de vue différent de celui du Gouvernement.

Le nombre de commissions mixtes paritaires conclusives est en diminution drastique depuis juillet 2017. Depuis 1958, la règle a toujours été l’accord entre nos deux assemblées. Entre 1958 et octobre 2017, seulement 12 % des textes ont été adoptés par la procédure dite du « dernier mot » à l’Assemblée nationale. Les dernières évaluations font état d’un taux de 37 %. Ces chiffres sont profondément inquiétants et révèlent l’abus par le Gouvernement de la procédure du dernier mot, de même que le recours abusif aux ordonnances, notamment, s’agissant du présent texte, en ce qui concerne la justice des mineurs.

Les commissions mixtes paritaires ont pour objet de permettre l’avènement du jeu démocratique. Le bicamérisme est essentiel parce qu’il reflète l’accord entre l’avis d’une chambre dédiée au pouvoir exécutif et celui d’une chambre qui ne dépend pas de lui, entre la France du moment d’une élection présidentielle et celle d’une élection à mi-mandat. Enfin, le bicamérisme est issu de l’essence même de la démocratie et de la théorie des contre-pouvoirs.

Les corps intermédiaires, les contre-pouvoirs sont essentiels à la République, ne pas les entendre est extrêmement dangereux. Entendez les voix qui s’élèvent, madame la garde des sceaux, cette unanimité doit vous alerter. Aujourd’hui, nous sommes responsables pour demain. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui, en nouvelle lecture, le projet de loi de programmation 2018–2022 et de réforme pour la justice et le projet de loi organique relatif au renforcement de l’organisation des juridictions, les commissions mixtes paritaires du 13 décembre dernier n’ayant pas été conclusives.

Au vu du texte résultant des travaux de l’Assemblée nationale et compte tenu de la forte hostilité exprimée au sein des milieux judiciaires contre la réforme telle qu’elle est envisagée par le Gouvernement, la commission des lois a organisé à la fin du mois de janvier une table ronde avec les représentants des avocats, des magistrats et des fonctionnaires de greffe.

Trouver des solutions d’avenir, nourrir le dialogue, tels étaient les objectifs de cette initiative visant à écouter les inquiétudes exprimées par les professionnels de la justice. Je me félicite donc de cette volonté de travailler à la recherche de convergences, mais également de se situer au-delà des clivages. C’est cet esprit de compromis et de dialogue qui permet au Sénat d’avoir des travaux de grande qualité !

C’est précisément cet esprit qui a conduit la commission à conserver les modifications et ajouts de l’Assemblée nationale lorsque ceux-ci s’avéraient pertinents et ne soulevaient pas de difficulté de principe.

C’est toujours cet esprit qui a permis de prendre en compte les craintes du monde judiciaire et des territoires. La commission a bien entendu les interrogations relatives à la pérennité de la carte judiciaire.

En tant que rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Administration pénitentiaire », je me réjouis particulièrement que la commission ait rétabli la trajectoire budgétaire de la mission « Justice », telle qu’adoptée par le Sénat en première lecture. Elle prévoit une augmentation des crédits de 33,8 % entre 2017 et 2022, et la création de 13 700 emplois.

La programmation du Gouvernement, rétablie par l’Assemblée nationale en première lecture, prévoyait une progression des crédits de 23,5 % et la création de 6 500 emplois sur la même période. Or cela paraît bien insuffisant pour assurer le redressement budgétaire des juridictions et de l’administration pénitentiaire. En effet, cette trajectoire doit également permettre de mettre en œuvre le programme de construction de 15 000 places supplémentaires de prison, figurant dans les engagements de campagne du Président de la République.

En matière de justice civile, la commission a largement rétabli le texte adopté par le Sénat en première lecture, avec l’intention d’améliorer les procédures et de mieux protéger les personnes les plus fragiles.

Elle a en effet conforté et mieux encadré le recours aux modes alternatifs de règlement des différends, dans l’intérêt des justiciables.

Elle a notamment rétabli l’exigence de certification obligatoire par le ministère de la justice des services en ligne de résolution amiable des litiges et d’aide à la saisine des juridictions, dans l’objectif d’imposer des garanties pour les justiciables pouvant recourir à ces services.

Elle a ensuite choisi de maintenir la phase de conciliation judiciaire dans la procédure de divorce contentieux, compte tenu de son intérêt pour les parties. Elle a également veillé à mieux protéger les personnes les plus vulnérables en préservant le rôle protecteur du juge.

Enfin, s’agissant de la réforme de l’organisation judiciaire, si le regroupement du tribunal de grande instance et du tribunal d’instance cristallise à lui seul une large part de l’opposition du monde judiciaire, qui craint un éloignement pour le justiciable et la suppression de sites judiciaires, la commission a repris les garanties que le Sénat avait déjà apportées en première lecture, et qui sont susceptibles d’apaiser certaines des craintes exprimées.

Parmi ces garanties, je citerai la suppression de la possibilité de spécialiser certains tribunaux en matière civile et pénale lorsqu’il existe plusieurs tribunaux au sein d’un même département.

Je fais également référence à la fixation au niveau national d’un socle minimal de compétences des chambres détachées remplaçant les tribunaux d’instance situés en dehors du siège du nouveau tribunal unifié, afin d’éviter qu’elles ne soient définies au cas par cas, de façon trop limitée ou résiduelle, des compétences supplémentaires pouvant en outre leur être attribuées par les chefs de cour sur proposition des chefs de juridiction.

Je veux aussi mentionner la création d’un dispositif d’encadrement de toute modification de la carte judiciaire, laquelle relève de la compétence du pouvoir réglementaire, comportant une évaluation, au vu des observations présentées par les chefs de cour ainsi que par le conseil départemental, dont il serait rendu compte dans un rapport public, et sur la base de critères objectifs préexistants.

Concernant le régime des peines, je me réjouis particulièrement que la commission ait rétabli le texte que le Sénat avait voté en première lecture, lequel prévoyait notamment une importante refonte du système de l’aménagement des peines, de façon que la peine prononcée soit en principe la peine exécutée

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants votera en faveur de ces deux textes ainsi modifiés par la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions. – Mme Maryse Carrère applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous avons tenté de nous accorder avec l’Assemblée nationale sur des textes communs de réforme pour la justice le 13 décembre dernier. Malheureusement, nous n’y sommes pas parvenus et les commissions mixtes paritaires ont échoué…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Hélas !

M. Thani Mohamed Soilihi. … malgré le formidable travail des rapporteurs,…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. En effet.

M. Thani Mohamed Soilihi. … notamment.

C’est la raison pour laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui pour les examiner en nouvelle lecture.

Alors même que ces deux textes ont fait l’objet de larges consultations, qu’ils ont évolué au cours des discussions entre la Chancellerie et le milieu judiciaire, un mouvement de contestation semble s’être cristallisé.

La commission des lois a, pour chercher à sortir de cette impasse, organisé le 30 janvier dernier une table ronde avec les représentants des milieux judiciaires, qui a été suivie par votre audition, madame la garde des sceaux.

Si je n’ai pu physiquement y assister, j’ai suivi ces discussions avec grand intérêt grâce à la captation vidéo qui a été retransmise sur le site internet du Sénat.

Je voudrais néanmoins effectuer une correction, qui a son importance, quant aux termes choisis par notre commission. Il ne s’agissait pas, comme j’ai pu le lire, de « tenter de renouer le dialogue », car celui-ci n’a jamais cessé.

Vous avez entrepris, madame la garde des sceaux, un grand tour des juridictions françaises afin de présenter votre réforme et vous avez, depuis le printemps, régulièrement rencontré les avocats. Vous vous êtes d’ailleurs rendue à la rentrée du barreau de Paris et, très récemment, à l’assemblée générale statutaire de la Conférence des bâtonniers.

Si ces échanges n’ont pas répondu à l’ensemble des attentes des acteurs de la justice, il est inexact de dire que votre position n’a jamais pu être infléchie et que vous vous êtes montrée hermétique aux arguments qui vous ont été opposés.

Au contraire, ces échanges nourris ont permis de faire évoluer sensiblement les textes examinés par notre assemblée.

Je pense, notamment, au renforcement des obligations des plateformes numériques ; à la simplification de la procédure de divorce contentieux qui permet de ne pas causer le divorce dès l’introduction de la procédure ; à la généralisation des règles protectrices en matière de perquisitions effectuées dans le cabinet d’un avocat, à son domicile, dans les locaux de l’ordre des avocats ou des caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats, les CARPA ; ou encore à l’encadrement du rôle des CAF dans la révision des pensions alimentaires en rendant possible la suspension provisoire de la décision et le recours devant un juge.

Je pense également à la réforme des ordonnances d’injonction de payer, qui vise à centraliser le traitement des injonctions de payer aux fins d’une meilleure efficacité.

Paradoxalement, ces compromis ont parfois été qualifiés de reculs du Gouvernement. C’est à n’y rien comprendre !

Concernant l’organisation judiciaire, vous n’avez jamais cessé de tenter de rassurer les professionnels qui redoutent légitimement que la réorganisation des juridictions ne se traduise par la fermeture de sites, en martelant que vous maintiendrez les hommes, les lieux et les compétences existants. Lorsqu’il existe plusieurs TGI, le texte offre, je dis bien « offre », la possibilité aux juridictions de spécialiser les contentieux techniques et – et non pas ou, car la conjonction de coordination a ici son importance – de faibles volumes, ce qui exclut les contentieux de masse.

Face à la crainte légitime d’une « robotisation », d’une « déshumanisation » de la justice que pourrait induire la dématérialisation des procédures, vous avez précisé que le numérique ne viendra pas se substituer, mais viendra s’ajouter à l’accueil physique. Ainsi, pour les justiciables peu familiarisés avec les nouvelles technologies ou habitant dans une zone qui les prive d’un accès internet de qualité, un guichet d’accueil physique sera maintenu dans chaque lieu de justice.

La numérisation présente un intérêt tant pour les victimes, qui peuvent être intimidées par un dépôt de plainte dans un commissariat, que pour les praticiens du droit, lesquels se heurtent souvent – croyez-en mon expérience – à des temps d’attente téléphonique particulièrement longs pour obtenir parfois la seule confirmation qu’un acte a bien été enregistré.

L’Assemblée nationale a procédé à des améliorations intéressantes telles que l’extension des possibilités d’anonymisation des policiers et gendarmes dans les procédures ou encore le dossier entièrement numérique dans le cadre de la procédure pénale.

En revanche, si comme nombre de mes collègues, je suis favorable à réformer la justice des mineurs afin de la rendre plus lisible pour les professionnels et les justiciables, et de renouer avec son esprit fondateur, tendant à faire primer l’éducation sur la répression, je regrette néanmoins que vous ayez choisi de passer par la voie de l’ordonnance pour ce faire. J’aurais préféré que le Parlement ne soit pas ainsi dessaisi ab initio.

Je forme malgré tout le vœu que la réforme que vous envisagez tiendra compte des travaux de nos assemblées sur ce sujet – je pense, notamment, au rapport de la mission d’information sur la réinsertion des mineurs enfermés ou à la mission en cours à l’Assemblée nationale sur la justice des mineurs –, et qu’elle sera menée en toute transparence, avec le concours des parlementaires. Je vous fais d’ores et déjà savoir que nous voulons y être associés. (Mme Sophie Joissains applaudit.)

Pour conclure, malgré nos divergences d’opinions, j’avais formulé, en première lecture, le vœu que le débat se poursuive à l’Assemblée nationale, parce que nous souscrivons tous à cet objectif d’une justice plus simple, plus rapide et plus efficace. Dans ce même esprit, j’espère encore que des compromis raisonnables puissent être trouvés avec nos collègues de l’Assemblée nationale sur certains sujets comme le dispositif de certification obligatoire des plateformes de résolution amiable des litiges, la suppression de l’extension de l’obligation de tentative de règlement amiable préalable à toute saisine du juge en matière civile ou la limitation de l’extension des techniques spéciales d’enquête.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe La République En Marche s’abstiendra sur ces textes. (Mme Maryse Carrère applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)

Mme Sylviane Noël. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi entend répondre au besoin d’équité de notre société, qui dénonce avec pugnacité la lenteur de la justice, et parfois la distance qu’elle observe par rapport aux réalités vécues par nos concitoyens.

Pourtant, force est de constater que cette réforme ne tient absolument pas compte des caractéristiques de certaines zones géographiques. Car si la France est une et indivisible, elle n’est pas uniforme ! Oui, la France est un grand pays fort de la diversité de ses territoires où tout ne fonctionne pas comme à Paris !

Dans le contexte de crise que nous traversons, le Gouvernement assure avoir saisi la portée de la colère des Français. Ces mêmes Français qui se retrouvent dans l’incompréhension face à toutes les réformes qui ne vont résolument pas dans leur sens.

Prenons la modification de la carte judiciaire. Elle est vécue comme un coup de grâce porté au rôle pourtant prépondérant que joue l’institution judiciaire dans nos territoires.

Par ce texte, notamment au travers de l’article 53, les juridictions se retrouveront demain vidées d’une grande partie de leurs compétences puisque vous entendez fusionner les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance pour créer un seul tribunal de première instance dans chaque département.

Vous centralisez l’activité judicaire alors qu’il conviendrait dans certaines zones de maintenir une proximité qui permettrait de conserver un lien cher avec nos administrés. Cela n’est pas sans conséquence. Par exemple la Haute-Savoie compte actuellement trois tribunaux de grande instance : Bonneville, Thonon et Annecy. Ils devront, si cette loi est adoptée, transférer leurs compétences au tribunal de première instance, qui traitera les matières dans des pôles dédiés, et deviendront par ailleurs des centres d’accueil qui permettront aux justiciables d’entamer toutes les étapes préalables à l’audience.

Or c’est oublier que dans ces départements de montagne, les distances ne se comptent pas en kilomètres, mais en temps de parcours. Ce sont des territoires reculés, enneigés une grande partie de l’année, où il faut parfois faire plusieurs heures de voiture pour atteindre une destination éloignée de quelques kilomètres ! Ce sont des départements qui, malgré leur éloignement, sont pourtant des territoires extrêmement vivants et qui connaissent une activité judiciaire intense.

Comme en Haute-Savoie, territoire pour le moins atypique, dont l’activité judiciaire n’est pas en reste puisque ce département enregistre à la fois la plus forte croissance démographique de notre pays, la plus forte concentration mondiale d’entreprises de la mécatronique, compte plus de lits touristiques que d’habitants permanents et est de surcroît doublement frontalier avec la Suisse et l’Italie.

Pour ces territoires, un tel schéma de délocalisation de certains contentieux entraverait considérablement l’accès des citoyens à la justice puisque ces derniers devront parcourir plus de 100 kilomètres pour se rendre à une audience.

Au-delà de l’aspect géographique, la réalité est bien entendu fonctionnelle.

Les professionnels de la justice, les élus locaux, dont je suis l’un des porte-parole dans cet hémicycle, s’inquiètent, eux aussi, de pouvoir garantir une certaine proximité de leurs actions, d’autant que l’efficacité et la performance de ces juridictions sont unanimement reconnues.

Comment sauront-ils rester à l’écoute des justiciables, d’une part, en les accueillant physiquement au sein des services d’accueil unique du justiciable et, d’autre part, avec des moyens qui seront demain dématérialisés ? Comment assureront-ils un contact décent au cours des diverses procédures, de l’audience jusqu’à la décision finale, afin de faciliter les démarches de nos administrés ?

Comprenez, madame la ministre, que dans la période difficile que nous traversons, la justice ne saurait être un facteur supplémentaire de fracture sociale et territoriale.

À l’instar de Joseph Joubert qui aimait à rappeler que la justice est le droit du plus faible, souvenons-nous que la justice doit être plus que jamais un point de cohésion et d’équité nationale ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je veux d’abord dire toute ma reconnaissance à nos rapporteurs qui, avec beaucoup de persévérance, ont poursuivi la tâche pour donner jusqu’au bout toute leur chance aux mesures d’apaisement et de raison proposées par le Sénat.

Au moment de prendre la parole, je veux exprimer le sentiment d’un certain gâchis. Après l’échec de la commission mixte paritaire, nous avons renoncé, ce que nous avons confirmé par notre vote aujourd’hui, à adopter une motion tendant à opposer la question préalable à la présentation en nouvelle lecture de ce projet de loi. Grâce à une concertation approfondie, nous avons voulu essayer de trouver les voies du plus large accord possible sur les axes fondamentaux de la réforme avec les professions de justice.

Vous me rétorquerez que nous nous sommes élevés un peu au-dessus de notre condition de sénateur en prétendant apporter notre secours au Gouvernement, qui se heurte aujourd’hui à de très graves tensions,…

M. Gérard Longuet. Nous sommes de bons Samaritains !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. … puisque la table ronde que nous avons organisée il y a quinze jours a fait apparaître une très large convergence des avocats, des syndicats de magistrats et des syndicats de personnels des greffes autour d’un certain nombre de demandes.

Madame la garde des sceaux, les professions de justice ont des attentes. Chacun est conscient de la nécessité de réformer. Nous partageons le même diagnostic sur la situation de notre justice. Les délais de traitement des affaires – la Cour des comptes vient encore de le rappeler – ne cessent de s’allonger. L’efficience de l’utilisation des crédits et des ressources humaines de la justice peut encore très largement progresser. De ce fait, nous aurions aimé collaborer plus étroitement avec vous à une réforme prenant en compte les années de travail de la commission des lois du Sénat, années qui ont donné lieu au rapport intitulé ambitieusement Cinq ans pour sauver la justice ! publié en avril 2017.

Je regrette que l’ultime chance que nous avons voulu proposer en déposant nos amendements de rouvrir la concertation afin de trouver des solutions consensuelles ne soit pas saisie. Cette impasse n’est pas une impasse législative.

Bien sûr, vous disposez, madame la garde des sceaux, d’une majorité à l’Assemblée nationale pour voter votre texte, car les institutions de notre pays apportent au Gouvernement la stabilité dont il a besoin : un Président de la République tout-puissant, un gouvernement qui lui est naturellement subordonné et une Assemblée nationale, dans sa majorité, qui a été désignée peu après l’élection présidentielle pour soutenir le Président de la République. C’est donc seulement ici, au Sénat, que vous pouvez trouver les voies d’un dialogue avec d’autres que ceux qui vous soutiennent, mais qui sont de bonne volonté pour permettre à la justice d’échapper au clivage partisan, ce qui est notre souhait le plus profond.

Nous avons vu récemment quels sont les résultats d’une méthode de gouvernement pouvant se résumer par la volonté d’un passage en force quand on est sûr d’avoir raison. Mais si le Gouvernement a une pédagogie, il lui manque une capacité de dialogue. Nous étions nombreux à penser que les leçons de l’expérience récente allaient servir et que la justice pourrait être le terrain d’expérimentation d’une autre méthode de gouvernement. Cet espoir est aujourd’hui largement déçu : j’en suis profondément navré, car c’est une occasion manquée.

Vous l’avez relevé vous-même, madame la ministre, il existe entre nous des divergences politiques sur certains points, ce qui est bien naturel en démocratie. Nous aurions pu, au fond, les laisser de côté pour nous intéresser surtout à ce qui nous réunit, car ce qui paraissait l’objet d’accords possibles avec le Gouvernement est tout à fait essentiel.

Le premier point de divergence politique – ce n’est pas une antienne que je répète à l’excès – est bien sûr l’abandon par le Gouvernement du programme du Président de la République de construction de places de prison. Vous avez affirmé que nous préférions la prison aux alternatives : c’est faux ! Dois-je vous rappeler que la période durant laquelle les alternatives à la prison – c’est-à-dire le bracelet électronique – se sont le plus développées, c’est la fin du mandat du Président Sarkozy ? Depuis, calme plat ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Cependant, il ne suffit pas de développer les alternatives à la prison pour s’accommoder de la situation de surpopulation carcérale que nous connaissons. Si les magistrats prononcent aujourd’hui des peines de prison, ce n’est pas simplement parce qu’ils préfèrent la prison c’est aussi parce que les alternatives à la prison ne bénéficient pas des moyens nécessaires à leur développement.

Nous en arrivons alors à notre deuxième point de divergence, qui est celui du budget. Certes, dans cette loi de programmation, est fait un effort méritoire, mais elle comporte des faiblesses. Une programmation pour cinq ans intervenant deux ans après le début du quinquennat n’engage le Gouvernement que pour la fin de ce quinquennat, et pas pour les années qui commenceront après le prochain quinquennat. Il s’agit à nos yeux d’un point important.

Au fond, une vraie loi de programmation doit commencer dans les trois mois qui suivent l’élection présidentielle, sinon cela n’a guère de sens ! Vous n’avez plus aujourd’hui que deux lois de finances pour mettre en œuvre cette programmation !

Par ailleurs, si l’effort paraît important, il doit être mesuré à l’aune des besoins de rattrapage des moyens de la justice, en ancrant cette évaluation dans une comparaison européenne. Or nous sommes vraiment très en retard et il convient de mettre les bouchées doubles !

Une loi de programmation des moyens de la justice avait été promulguée en septembre 2002, trois mois après l’élection présidentielle. À cette occasion, les moyens avaient été augmentés de 39 % sur cinq ans. Vous proposez aujourd’hui une augmentation de 23 %. Certes, je suis conscient de l’état de dégradation de nos finances publiques par rapport à la période antérieure. Je comprends que l’on ne puisse pas faire autant qu’en 2002, mais l’effort consenti ici ne me paraît pas suffisant.

Enfin, nous ne sommes pas d’accord avec le parquet national antiterroriste et nous regrettons que ce texte ne contienne pas de disposition pour assurer la pérennité du financement de l’aide juridictionnelle, qui est la condition de l’accès de nos concitoyens les plus démunis à la justice. Bref, nous sommes en désaccord sur un nombre important de points.

Pour autant, ce n’est pas à cause de ces désaccords que nous n’avons pas pu conclure. En effet, je le redis, nous aurions pu les laisser de côté. Si nous n’avons pas pu conclure, c’est tout simplement parce que sur un certain nombre de points qui rendaient possible un accord vous n’avez pas voulu faire mouvement. Vous avez purement et simplement voulu rétablir votre texte initial et faire l’économie du dialogue avec le Sénat. De la même façon, vous faites, selon moi de manière excessive, l’économie d’un dialogue approfondi avec les professions de justice au moment où elles vous demandent d’infléchir votre réforme.

Un certain nombre de points ont été parfaitement abordés par notre collègue corapporteur François-Noël Buffet. J’y reviens brièvement.

En ce qui concerne le champ d’intervention du juge, vous auriez pu faire un effort sur la certification des plateformes proposant des possibilités de conciliation sur internet. Ce n’eût pas été de votre part un effort disproportionné…

La pension alimentaire en cas de conflit sera traitée par un directeur de caisse d’allocations familiales et non par un juge. Cette mesure n’offre pas à nos yeux de garanties suffisantes. Cela n’aurait pas bouleversé votre réforme de nous écouter sur ce point et de prêter attention aux professions judiciaires qui s’inquiètent.

S’agissant de la procédure pénale, ce texte porté par le ministre de la justice est un texte de ministre de l’intérieur ! Sur la prolongation de la garde à vue, sur le refus d’informer l’avocat sur des perquisitions, sur la comparution différée, sur l’accès au dossier par l’avocat, vous avez pris des mesures qui vont toutes dans le même sens, et qui n’est pas celui des garanties offertes à nos concitoyens face au ministère public.

Quant à l’organisation judiciaire, c’est évidemment pour nous un sujet de vive préoccupation. Au fond, nous vous demandions de sécuriser les chambres détachées en prévoyant la création d’un juge chargé des contentieux de proximité, une garantie de localisation des emplois pour les fonctionnaires de greffe dans ces chambres détachées et la définition d’un socle minimal de compétences au niveau national pour ces chambres. De la sorte, vous auriez pu tenir en échec tous ceux qui affirment – peut-être à tort – que vous préparez la suppression de lieux de justice, alors que vous proclamez régulièrement qu’il n’en est rien et que vous voulez conserver ces lieux de justice. Donnez-nous des gages de cette volonté de les conserver et nous pourrons vous soutenir.

Vous auriez pu accepter la mise en place d’un mécanisme d’encadrement de toute modification de la carte judiciaire : ce n’est pas extravagant eu égard aux contraintes que cela vous imposerait. Vous auriez pu accepter aussi qu’un avis soit donné par le conseil départemental.

Mme la présidente. Monsieur le président, je suis obligée de vous demander de conclure.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Alors, je conclus. Aujourd’hui, un simple décret peut modifier la carte des tribunaux. Il serait utile d’y apporter une garantie législative.

Quoi qu’il en soit, madame la garde des sceaux, je regrette beaucoup que nous ne parvenions pas à nous entendre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Maryse Carrère applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je répondrai aux différentes observations qui ont été présentées en trois points.

La première question qui m’a été posée, par M. le sénateur Jacques Bigot, était la suivante : le Gouvernement a-t-il raison contre tous ?

La réponse est non, le Gouvernement ne prétend pas avoir raison contre tous ! La preuve en est qu’entre le texte que je vous ai présenté au mois d’octobre et celui qui vous est parvenu il y a quelques semaines, les choses ont beaucoup évolué. Cela montre que la version initiale proposée par le Gouvernement n’était pas figée et qu’elle a fait l’objet d’un véritable dialogue et avec les professionnels et avec les parlementaires.

J’ajouterai à l’intention de M. Bigot, mais aussi de Mmes Joissains et Assassi, que, si le Gouvernement n’a pas raison contre tous, nombreux sont ceux qui le soutiennent. C’est ainsi le cas des présidents de tribunaux de grande instance, que la commission des lois, me semble-t-il, n’a pas auditionnés ou n’a pas pu entendre. (Protestations au banc des commissions.) Que réclament-ils ? Beaucoup de souplesse, ce qui figure dans notre texte !

Qu’entend-on lors de la Conférence nationale des procureurs de la République ? Que demandent ces magistrats, que, je crois, la commission des lois n’a pas pu entendre ? De l’efficacité ! (Nouvelles protestations au banc des commissions.) Pardonnez-moi si je commets une erreur, messieurs les rapporteurs, mais, la semaine dernière, si je ne m’abuse, leur audition n’était pas prévue à l’ordre du jour de vos auditions…

Lors de leur Conférence nationale, les procureurs de la République ont souhaité que soient prises les mesures que nous avons prévues dans la loi.

Que réclame l’Union syndicale des magistrats, l’USM, syndicat majoritaire de la profession, que, je crois, la commission des lois n’a pas auditionnée la semaine dernière ? D’une part, l’USM est favorable à la mise en place du juge de l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme, le JIVAT. D’autre part, elle demande des procédures de simplification, celles-là mêmes qui constituent l’objet principal de notre texte.

Que demandent les associations de victimes que j’auditionne ? Elles demandent les mesures que nous avons prises dans le texte.

Je pourrais ainsi continuer longtemps… Il y a dans ce texte des éléments – certes, pas tous – qui sont soutenus par un certain nombre de représentants des professions de justice. C’est la raison pour laquelle nous ne prétendons pas avoir raison contre tous, tout d’abord parce que nous écoutons et, ensuite, parce que des points de cette réforme sont soutenus par les différentes parties concernées.

La deuxième question qui m’a été posée était : le texte se suffit-il à lui-même ? Elle me donne l’occasion de répondre à plusieurs d’entre vous.

La réponse est évidemment non ! Le texte que je vous propose ne se suffit pas à lui-même, dans la mesure où nous ne prétendons pas engager à travers lui une réforme absolue et générale de la justice.

Ce texte a une ambition claire : faire évoluer la justice de notre pays. Il ne prétend pas, à lui seul, embrasser toutes les évolutions qui seraient envisageables pour la justice en France.

Il faudra, bien sûr, monsieur le sénateur Masson, que nous soyons attentifs à la gestion des ressources humaines. Vous évoquiez la question de la mobilité des magistrats. C’est une vraie question, même si je ne l’entends pas exactement dans le sens que vous avez évoqué. Par parenthèse, je vous rappelle que les magistrats sont soumis à une déclaration d’intérêt, à l’occasion de laquelle ils ont un entretien avec le président du tribunal, qui leur permet de se positionner.

Au-delà de cette question, il est vrai que j’ai ouvert un sixième chantier, à la suite des cinq premiers que j’avais lancés il y a plus d’un an. Ce chantier, qui concerne la gestion des ressources humaines, nous entendons le conduire à l’intérieur du ministère de la justice, pour faire évoluer ces situations.

Vous avez raison, monsieur le président Bas – j’ai eu l’occasion de m’en expliquer à de nombreuses reprises devant vous –, la question de l’aide juridictionnelle doit être traitée. Je me suis engagée, dès la fin de cette réforme, à évoquer ce sujet extrêmement vaste avec les organisations professionnelles compétentes. Il s’agit de faire avancer ce dossier, dont j’ai dit que l’on trouverait les premières traductions dans le projet de loi de finances pour 2020.

Madame la sénatrice Carrère, je ne prétends pas avoir, par ce texte, réformé totalement la procédure pénale.

Il faudrait réécrire le code de procédure pénale, mais, je l’ai dit clairement, je n’avais pas le temps de le faire en deux ans. Même si le délai nécessaire pour faire advenir cette loi a été plus long que ce qui était initialement prévu, je le redis, je n’avais pas le temps de réécrire ce code ! Il faudra sans doute le faire à terme, mais, de la même manière que la réforme du droit des contrats a été précédée par de très longues consultations, il faudra engager une procédure de ce type pour réformer le code de procédure pénale.

Madame la sénatrice Joissains, nous devons faire une révision constitutionnelle pour accroître l’indépendance statutaire des membres du parquet. Vous savez que telle est notre volonté, sur la base, d’ailleurs, d’un texte qui a été adopté par le Sénat.

En revanche, je ne saurais partager votre avis lorsque vous dites qu’il aurait fallu, si je vous ai bien compris, cesser d’examiner le projet de loi relatif à la justice pour le soumettre à la discussion à l’occasion du grand débat national. Vous avez même employé le mot « antidémocratique »… Je ne crois pas, quant à moi, que le fait de poursuivre une procédure parlementaire déjà engagée soit antidémocratique, bien au contraire ! (Mme Sophie Joissains sexclame.)

Enfin, on m’a posé une troisième et dernière question : la lettre du texte doit-elle se prolonger par une application scrupuleuse ? La réponse est oui : le Gouvernement sera extrêmement attentif, et moi également, à sa mise en œuvre.

Monsieur le sénateur Mohamed Soilihi, vous m’alertez, ainsi que d’autres de vos collègues, sur l’ordonnance de 1945, et vous vous interrogez sur la procédure suivie.

J’ai déjà dit que je comprenais ce point de vue. À cet égard, je me suis engagée à respecter un certain nombre de principes, notamment ceux qui avaient été dégagés par le Conseil constitutionnel.

Je me suis également engagée sur une méthode de très large concertation, que je mettrai en œuvre dès que la loi sera adoptée, visant à aboutir à un texte que le Parlement aura le temps de discuter. Dans un délai de six mois à un an, un débat se tiendra au Parlement et un travail approfondi sera mené sur ce texte.

Sur la question de la territorialité, madame la sénatrice Noël, je m’étonne des inquiétudes que vous avez rapportées ici. On vous laisse entendre, dites-vous, que les tribunaux d’instance de Haute-Savoie, d’Annecy, de Bonneville et de Thonon vont disparaître ou, en tout cas, qu’ils ne serviront que pour des étapes préalables à l’audience. Où avez-vous lu cela dans le projet de loi que je vous ai présenté ? Nulle part !

En effet, dans le texte que je propose, il est clair non seulement que tous les tribunaux d’instance seront maintenus, mais aussi qu’un juge y sera spécifiquement affecté. Je le dis également pour le sénateur Bas, ce juge des contentieux de la protection, nommé dans chaque tribunal d’instance, gérera notamment le contentieux des tutelles, le contentieux du surendettement et le contentieux des baux d’habitation.

Il y aura donc, je le répète, un juge statutaire spécifiquement affecté dont les compétences seront fixées par un texte. Par ailleurs, ces tribunaux de proximité pourront avoir davantage de compétences que celles dont ils disposent aujourd’hui, dans la mesure où pourra y être traité, en cas de besoin, le contentieux familial post-divorce.

Comment pouvez-vous dire que ces tribunaux vont disparaître, sauf à faire de la justice prédictive sur la base d’une information fondamentalement inexacte ?

Je veux vous rassurer : les trois tribunaux que vous avez évoqués demeureront, exerceront leurs compétences, continueront à accueillir les justiciables qui souhaiteront s’y rendre pour des audiences, et rendront des jugements.

Il n’y a donc ni carte judiciaire – j’ai déjà eu l’occasion de le dire : j’ai une méthode, je n’ai pas de carte ! –, ni coup de grâce. Au contraire, ce que je propose permettra, je le crois, de revivifier un certain nombre de tribunaux.

Pour ce qui concerne les peines, toute une série de dispositions devront être concrétisées. J’entends bien qu’il ne suffit pas d’édicter une loi pour que, d’un seul coup, tout se transforme ! Il faudra accompagner tous les personnels pour leur faire mesurer et prendre en compte les avancées de ce texte.

Lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, j’ai pris connaissance de deux documents. Le premier, que j’avais en fait lu très peu de temps auparavant, était la lettre de Jean-Jacques Urvoas à son successeur – je n’imaginais pas alors que je succéderai à son successeur. Le second document, comme je l’ai déjà dit à Philippe Bas, était le rapport de la commission des lois du Sénat, que j’avais trouvé extrêmement intéressant et riche.

Je n’ai pas le sentiment, monsieur le président de la commission des lois, que ce soit un gâchis, pour reprendre le terme que vous avez employé. Je regrette que nous n’ayons pas pu parvenir à un accord, mais je suis persuadée que, lors de l’application effective du texte, nous saurons retrouver des capacités de dialogue.

Mme la présidente. La discussion générale commune est close.

 
 
 

Nous passons à la discussion du texte de la commission sur le projet de loi.

projet de loi de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX OBJECTIFS DE LA JUSTICE ET À LA PROGRAMMATION FINANCIÈRE

Question préalable (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
Article 1er bis

Article 1er et rapport annexé

Le rapport définissant les orientations et la programmation des moyens de la justice pour la période 2019-2022, annexé à la présente loi, est approuvé.

Les crédits de paiement de la mission « Justice », hors charges de pensions, exprimés en milliards d’euros courants, évolueront comme suit :

 

2019

2020

2021

2022

7,29

7,65

8,20

8,99

Les créations nettes d’emplois du ministère de la justice s’élèveront à 12 628 équivalents temps plein et s’effectueront selon le calendrier suivant :

 

2019

2020

2021

2022

2987

3095

3213

3333

RAPPORT ANNEXÉ

Trait d’union indispensable entre liberté et sécurité, la justice fonde le contrat social et forge l’esprit républicain. De son bon fonctionnement dépend le caractère harmonieux de la régulation sociale. La justice est en conséquence au centre des préoccupations du Gouvernement.

La présente loi de programmation, annoncée par le Premier ministre dès son discours de politique générale du 4 juillet 2017, garantit à la justice, dans la durée, des moyens pour lui permettre d’accomplir les réformes nécessaires à l’amélioration du service dû à nos concitoyens.

La progression des crédits, inscrite dans la loi de programmation, de 33,8 % à horizon 2022 par rapport à la loi de finances pour 2017, traduit de manière concrète la priorité donnée par le Gouvernement à la modernisation de la justice. Dès 2018, les crédits augmentent de 3,9 % et un effort significatif, à la hauteur des enjeux, est initié en matière de recrutements. Il se concrétise, sur la période 2019-2022, par la création de 12 628 emplois.

Cette trajectoire ambitieuse est néanmoins soutenable pour les finances publiques. Partant du cadrage budgétaire global de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2019 à 2022, la présente loi de programmation pour la justice précise l’effort supplémentaire requis par la nécessaire modernisation du service public de la justice, et en sécurise les moyens. D’ici à 2022, la progression des crédits se décline comme suit :

 

En milliards deuros et en crédits de paiement

Moyens de la mission justice HT2 + T2HCAS

2019

2020

2021

2022

Mission justice

7,29

7,65

8,20

8,99

La traduction en emplois de cet investissement sans précédent s’échelonne de la manière suivante sur la période considérée :

 

En équivalents temps plein (ETP)

2019

2020

2021

2022

Création d’emplois de la mission justice

2 987

3 095

3 213

3 333

Disposer d’une trajectoire budgétaire sécurisée sur cinq ans permettra au ministère de la justice de conduire résolument et sans à-coups les investissements d’ampleur indispensables, tant dans les domaines informatique qu’immobilier et d’accompagnement en matière de ressources humaines, pour évoluer vers un service public moderne, davantage attentif aux besoins des justiciables qu’il accueille et plus respectueux encore des personnes qui lui sont confiées.

Grâce à ces moyens en forte augmentation, le ministère s’engage dans des réformes puissantes afin de redonner confiance au citoyen dans la capacité de la justice à rendre des jugements de qualité, dans des délais maîtrisés, et à réinsérer les personnes qu’elle condamne.

Les réformes portées ici par le Gouvernement intéressent tout à la fois les procédures, les organisations et les outils du ministère. Les plus structurantes de ces réformes sont le fruit des « chantiers de la justice », lancés par le Premier ministre et la garde des sceaux le 6 octobre 2017. Au nombre de cinq, ces chantiers ont traité de la transformation numérique, de l’amélioration et de la simplification des procédures civile d’une part, pénale, d’autre part, de l’adaptation du réseau des juridictions, du sens et de l’efficacité des peines. Deux référents ont été désignés sur chaque chantier afin de conduire une intense concertation avec les acteurs concernés. Plusieurs centaines d’auditions, l’envoi de questionnaires, une consultation numérique ont donné aux référents une matière riche pour faire des propositions d’évolution souvent ambitieuses, toujours en réponse aux attentes des acteurs consultés. Ce projet de loi de programmation met ainsi en œuvre les propositions de niveau législatif qui ont été retenues pour concrétiser les ambitions d’une justice rénovée. Il sera complété des textes réglementaires nécessaires à la conduite des réformes ainsi initiées.

Le projet de loi s’est également attaché à promouvoir la diversification des modes de prise en charge des mineurs auteurs d’infractions pénales en accompagnant la création de 20 centres éducatifs fermés et en promouvant de nouveaux modes de réponses pénales.

Il intègre également une autre priorité annoncée dans le programme du Président de la République : la mise en œuvre d’un « plan pénitentiaire » permettant, notamment, d’atteindre d’ici décembre 2022 un taux de 80 % d’encellulement individuel.

L’ensemble de ces évolutions fortes, résultat d’une démarche de concertation de plus de cinq mois, permettra d’aller vers une justice simple, efficace, moderne, proche des gens (I), de rendre le service public de la justice plus protecteur et attentif aux plus démunis et aux personnes en souffrance (II), de consacrer un engagement sans faille pour mieux prévenir la radicalisation et lutter contre le terrorisme (III), de prononcer des peines plus efficaces et mieux adaptées tout en confortant les personnels dans leurs missions (IV), de diversifier et d’individualiser la prise en charge des mineurs délinquants (V). Une stratégie ministérielle des ressources humaines est définie pour accompagner tous les personnels du ministère dans cette transformation (VI).

1. Vers une justice simple, efficace, moderne, proche des gens

1.1. État des lieux

Le constat d’une justice qui fonctionne de moins en moins bien est connu de tous et partagé. Les délais de jugement ne cessent de s’allonger en dépit de la mobilisation des magistrats et fonctionnaires. Ils sont, en 2016, à plus de 11 mois pour les affaires civiles dans les tribunaux de grande instance, à près de 14 mois en appel dont plus de 18 mois dans les chambres sociales, à 17 mois dans les conseils de prud’hommes.

La justice apparaît souvent au justiciable comme un labyrinthe, avec une organisation à la lisibilité incertaine, des procédures difficilement intelligibles et des décisions qui peuvent parfois sembler peu prédictibles voire difficilement compréhensibles. L’organisation judiciaire, en décalage avec celle des autres administrations de l’État, pose également question pour la conduite de la politique publique de la justice qui nécessite une interaction étroite avec les services de la police et de la gendarmerie ainsi qu’avec les préfets, les autres administrations de l’État et les collectivités territoriales.

Les juridictions se plaignent souvent d’un manque de moyens. Des efforts importants ont été faits dans le budget 2018 pour augmenter de 9 % les crédits de fonctionnement desdites juridictions. Les charges à payer ont été significativement réduites en 2017. Toutefois, un effort de long terme, au travers d’une action structurelle, est indispensable pour améliorer durablement la situation des juridictions.

L’amélioration du quotidien de travail est une attente très forte des magistrats et des fonctionnaires. La mise à disposition d’équipements et d’applications informatiques modernes, répondant aux besoins de mobilité et permettant de gagner en efficacité, constitue une demande récurrente, également remontée de la consultation numérique réalisée auprès des agents du ministère dans le cadre du chantier relatif à la transformation numérique. Le besoin de formation et d’un soutien informatique renforcé est aussi affirmé.

La dématérialisation s’impose comme un besoin pour les justiciables et les partenaires de la justice qui souhaitent saisir et communiquer avec elle en ligne, comme ils le font désormais avec la plupart des services publics. Le ministère doit s’engager résolument dans la démarche de l’État-plateforme, tout en garantissant aux publics éloignés du numérique un accès proche et de qualité.

Face à ces constats, la réforme est urgente car la confiance du citoyen dans la justice, instance privilégiée de régulation des relations sociales et pilier déterminant de la démocratie, est émoussée. La lassitude des magistrats et fonctionnaires, soucieux de rendre un service public de qualité, s’exprime de plus en plus vivement.

1.2. Une réforme densemble de linstitution judiciaire est devenue nécessaire

La loi de programmation pour la justice prévoit une véritable remise à niveau des moyens des juridictions. 2 328 emplois seront créés sur la période 2019–2022 et les gains d’emplois dégagés par les réformes seront intégralement redéployés vers les juridictions.

Mais les moyens ne constituent pas à eux seuls une réponse suffisante et ne sont légitimes, dans un contexte budgétaire contraint, que s’ils permettent une transformation de la justice.

La loi de programmation développe cette ambition en simplifiant tout à la fois la procédure pénale et la procédure civile, en organisant la déjudiciarisation des demandes dont la satisfaction sera plus rapide et certaine par des services administratifs ou des professions réglementées (tout en maintenant la possibilité d’une contestation devant le juge), en développant des modes alternatifs de règlement des litiges, en donnant les moyens d’une véritable transformation numérique de la justice et en proposant une approche modernisée de l’organisation du travail judiciaire.

1.2.1. Simplifier la procédure pénale pour faciliter laction des services enquêteurs et de la justice, tout en veillant au respect des libertés fondamentales

Afin de répondre aux légitimes attentes de nos concitoyens qui aspirent à une justice plus accessible, plus proche et plus rapide dans le traitement de leurs requêtes ou de leur situation, il a été décidé de faciliter le travail quotidien de tous les acteurs de la chaîne pénale. Il s’agit ici d’amplifier l’effort de simplification déjà engagé mais dont les résultats paraissent encore insuffisants.

Ont ainsi été retenues dans le projet de loi de programmation des mesures concrètes, dont l’objectif n’est pas de réformer en profondeur l’architecture de notre procédure pénale mais de faciliter l’action des magistrats, des fonctionnaires de justice, des services enquêteurs, sans jamais porter atteinte aux exigences conventionnelles et constitutionnelles.

Les simplifications proposées concernent les différentes phases de la procédure pénale, qu’il s’agisse de la phase d’investigation (enquête et instruction) ou de ses suites judiciaires (alternatives aux poursuites, poursuites et jugement).

Les simplifications envisagées pour la phase d’investigation portent notamment sur la suppression d’autorisations préalables à certaines actions des officiers de police judiciaire ou sur la possibilité de les déléguer à des agents de police judiciaire, ainsi que sur l’information judiciaire.

Il est également prévu de modifier les règles relatives à la garde à vue afin d’en rendre le traitement moins lourd. Le projet de loi de programmation pour la justice ne modifie pas l’économie du régime actuel de la garde à vue et maintient des garanties strictes en termes de protection des libertés.

Les simplifications des suites judiciaires proposées par le projet de loi s’effectuent au travers de la fusion de la transaction et de la composition pénales, de l’extension de la forfaitisation d’un certain nombre de délits dont l’usage de stupéfiants, de l’extension de l’ordonnance pénale et des décisions pouvant intervenir dans le cadre de la procédure de comparution avec reconnaissance préalable de culpabilité, de l’extension de la compétence du juge unique, de la rationalisation de la procédure devant la cour d’assises et de la possibilité de regrouper toutes les procédures en cours visant un même prévenu devant le tribunal correctionnel.

Enfin, il est prévu d’expérimenter dans plusieurs ressorts pendant trois ans une cour criminelle, qui jugera en premier ressort les crimes commis par des majeurs et punis d’une peine de 20 ans de réclusion criminelle au plus, en substitution de la cour d’assises. Cette cour composée uniquement de magistrats permettra un audiencement plus rapide des affaires tout en garantissant la qualité des débats.

1.2.2. Harmoniser la procédure civile et la rendre plus accessible pour le justiciable

Il existe actuellement une multiplicité de procédures en matière civile, différentes entre le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance, variables selon la nature du contentieux. Ces procédures sont en outre portées par des systèmes d’information séparés, souvent très anciens, et reposant sur des bases locales. En dépit des efforts d’information déjà entrepris avec la création du site internet justice.fr et du développement dans les tribunaux de services d’accueil unique du justiciable (SAUJ), la procédure civile reste inaccessible pour la plupart des justiciables du fait de sa complexité et de son absence de dématérialisation.

La simplification, pour les justiciables, de ces modes et procédures distincts de saisine doit être recherchée.

L’objectif est donc d’évoluer progressivement vers deux types de procédure selon la nature du contentieux : une procédure orale sans représentation obligatoire pour les contentieux les plus simples, une procédure écrite avec représentation obligatoire pour les autres contentieux. Le contentieux traité actuellement dans les tribunaux d’instance doit rester sans représentation obligatoire pour faciliter l’accès au juge. L’orientation retenue consiste à étendre la représentation obligatoire à certains contentieux devant le tribunal de grande instance et la cour d’appel pour assurer un meilleur conseil au justiciable, à l’exception de certains contentieux dits de proximité concernant souvent les publics les plus fragiles (surendettement, instances modificatives en matière familiale, baux d’habitation, crédit à la consommation, sécurité sociale).

Le seuil de 10 000 € en-dessous duquel il est possible de saisir le juge d’instance sans avocat est maintenu. En revanche, la représentation obligatoire devant le juge de l’exécution serait étendue lorsque le litige est supérieur à ce même seuil. Il en va de même pour l’ensemble des appels, sauf contentieux particuliers tenant par exemple au surendettement ou aux appels prud’homaux. Enfin, la représentation obligatoire serait encore étendue à plusieurs contentieux complexes ou très sensibles comme les litiges relatifs aux élections professionnelles. En revanche, l’absence de représentation obligatoire par avocat serait maintenue devant les tribunaux paritaires des baux ruraux, tout comme devant les conseils de prud’hommes. De surcroît, le principe de la libre représentation des parties devant le tribunal de commerce serait consacré dans la loi. En première instance et en appel, il serait rappelé que les autorités administratives parties à l’instance (maisons départementales des personnes handicapées ou présidents des conseils départementaux) ont la possibilité d’être représentées par un de leurs agents.

L’entreprise d’unification du contentieux de l’aide sociale et de la sécurité sociale est poursuivie par la suppression de la distinction entre le contentieux général et le contentieux technique, devenue obsolète au regard de la compétence donnée aux tribunaux de grande instance spécialement désignés à compter du 1er janvier 2019.

L’exécution forcée des décisions du juge aux affaires familiales est confiée au parquet. Un tribunal de grande instance à compétence nationale sera également spécialement désigné pour assurer le traitement des requêtes en injonction de payer, à l’exception de celles relevant du tribunal de commerce. Le créancier pourrait saisir ce tribunal de grande instance spécialement désigné par la voie dématérialisée, sans que cela soit obligatoire. Les oppositions seront formées auprès du tribunal spécialement désigné, qui connaîtra de celles tendant exclusivement à l’obtention de délais de paiement et orientera les autres demandes vers les tribunaux territorialement compétents.

Les modalités de ces procédures devront être harmonisées avec un acte de saisine unique, en ligne (sauf pour les justiciables ne disposant pas d’outil de communication numérique), la généralisation de la signification par acte d’huissier, ce qui déchargera les greffes des tâches de convocation, le développement de la procédure de mise en état participative, la possibilité de statuer sans audience avec l’accord des parties.

Les procédures civiles d’exécution seront enfin modernisées pour les rendre plus rapides et plus efficaces. Ainsi, dans les procédures de saisie-attribution et de saisie conservatoire des créances de sommes d’argent, les actes de saisie ne seront plus transmis aux établissements bancaires que par la voie électronique. Les procédures de saisie immobilière et d’expulsion seront également modifiées pour soulager les juridictions de tâches inutiles et pour améliorer l’efficacité de ces procédures tout en préservant les droits des débiteurs.

La plupart de ces évolutions sont de niveau réglementaire et ne nécessitent pas de disposition dans ce projet de loi. En revanche, le calendrier de leur mise en œuvre sera déterminé en lien avec celui de l’évolution de l’organisation judiciaire et celui du développement des applications informatiques associées.

1.2.3. Un recentrage de la justice sur ses missions premières : trancher les conflits et protéger les droits et libertés des citoyens

Depuis plusieurs années, la tendance est à l’octroi de nouvelles compétences au juge. Cette tendance s’inscrit en partie dans une dynamique de meilleure protection des droits et libertés des justiciables. Mais il s’agit aussi souvent d’une facilité pour le législateur quand il a besoin de l’intervention d’un tiers de confiance dans une procédure. La loi relative à la modernisation de la justice du XXIe siècle a réalisé une première œuvre utile de recentrage du juge sur ses missions principales en ouvrant notamment la possibilité de divorcer par acte d’avocat quand les parties en sont d’accord.

Le projet de loi de programmation pour la justice s’attaque pour sa part à un autre domaine emblématique : la réforme de la protection juridique des majeurs protégés, dont le rapport de la Cour des comptes de 2016 a montré les dysfonctionnements. En outre, la charge de travail pesant sur les juridictions ne permet pas aux magistrats et aux greffiers d’assurer toute la plénitude de la mission de contrôle des mesures de protection juridique qui leur est conférée par la loi. En conséquence, plusieurs mesures seraient envisagées. En premier lieu, il s’agirait d’alléger le contrôle du juge sur certains actes de gestion patrimoniale (partage judiciaire et acceptation pure et simple d’une succession échue à la personne protégée). En deuxième lieu, il s’agirait de faciliter le recours à l’habilitation familiale, en étendant son champ d’application à l’assistance, et en créant une passerelle avec les mesures de protection judiciaire. En troisième et dernier lieu, il s’agirait de garantir un contrôle effectif de la gestion du budget de la tutelle, en permettant un contrôle gradué de la transmission de l’inventaire, d’une part, et en maintenant un contrôle des comptes de gestion de toutes les personnes sous tutelle, d’autre part, qui serait assuré par défaut par le directeur des services de greffe judiciaires sous le contrôle du juge.

Au-delà de la réforme des tutelles, d’autres voies innovantes de déjudiciarisation sont poursuivies comme en matière de délivrance des apostilles, pour décharger les parquets généraux d’une tâche purement administrative. Il est également prévu d’uniformiser les règles régissant les actes de notoriété établis dans diverses matières en les transférant tous au notaire.

1.2.4. Un développement des modes alternatifs de règlement des litiges

Les modes alternatifs de règlement des litiges doivent continuer à se développer pour alléger l’activité des juridictions mais, surtout pour favoriser des modalités plus apaisées et plus rapides de règlement des différends pour les citoyens. La loi relative à la modernisation de la justice du XXIe siècle a d’ores et déjà rendu systématique le recours préalable au conciliateur pour les litiges de moins de 4 000 euros. La loi de finances pour 2016, mise en application par le décret n° 2016-1876 du 27 décembre 2016, a solvabilisé le recours à la médiation pour les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle en créant une aide à la médiation, en cas de médiation judiciaire ou de médiation conventionnelle homologuée par le juge, et en étendant la rétribution des avocats en cas de médiation. La loi de programmation pour la justice va plus loin en prévoyant que le juge pourra plus largement enjoindre de rencontrer un médiateur pour une information sur l’objet et le déroulement d’une médiation.

L’expérimentation de tentative de médiation familiale préalable obligatoire introduite par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle sera poursuivie, avant le cas échéant d’être généralisée à partir de 2020, si ses résultats sont concluants.

Pour promouvoir le recours aux modes alternatifs de règlement des litiges, il est nécessaire d’étendre l’offre en la matière tout en veillant à sa qualité. Il convient à cet effet d’encadrer les obligations pesant sur les prestataires offrant en ligne des services d’aide à la résolution amiable du litige, de prévoir les sanctions pénales applicables en cas d’inobservation de certaines obligations et de proposer une certification facultative.

Cette promotion des modes alternatifs de règlement des litiges s’appuiera sur une progression des moyens dédiés à la médiation et aux espaces de rencontre sur le quinquennat, la montée en puissance de l’aide à la médiation introduite par décret en 2016, et le recrutement de conciliateurs, mieux rétribués pour leurs interventions.

1.2.5. Une transformation numérique de la justice

Pour bâtir, avant 2022, un véritable service public numérique de la justice, qui permette à l’ensemble des usagers de gérer en ligne leurs procédures et leurs démarches, et aux magistrats et agents du ministère de bénéficier d’applicatifs et d’outils de travail adaptés, réduisant les tâches répétitives et de faible valeur ajoutée, un effort inégalé sera engagé, qui portera sur trois axes indissociables.

– L’adaptation du socle technique : le renforcement des réseaux du ministère doit permettre de les sécuriser et de tripler, au minimum, les débits offerts, en commençant dès 2018 et en couvrant la totalité des sites d’ici 2020, tout en poursuivant la migration vers la téléphonie IP ; les magistrats et agents bénéficieront d’outils répondant aux exigences de leur métier, en matière de téléphonie sécurisée ou d’outils de communication mobiles, en veillant désormais à homogénéiser le parc d’équipements et ses modalités de renouvellement ; les juridictions et services du ministère seront dotés d’outils permettant le développement d’échanges sécurisés (mise en service dès 2018 d’une plateforme d’échange de documents volumineux, dispositif permettant l’envoi de LRAR par voie électronique, consolidation du dispositif de visio-conférence) et facilitant le travail quotidien au profit des magistrats et agents comme des justiciables eux-mêmes (poursuite du déploiement des centres d’appel permanence parquet, outils de prise de rendez-vous en ligne et de signalétique dynamique dans les juridictions…).

– Les applications du ministère évolueront pour permettre une généralisation de la communication électronique et de la gestion en ligne des procédures et des démarches. Dès 2018, le déploiement du portail des SAUJ et du portail des justiciables permettra de connaître, en ligne, l’état d’avancement des procédures aussi bien pénales que civiles, quelle que soit la juridiction territorialement compétente ; l’opportunité de saisir la juridiction en ligne, pour certains contentieux dans un premier temps, sera effective à la fin de l’année 2018 ; le travail des juridictions sera facilité, notamment par la poursuite du déploiement de l’application Cassiopée aux juridictions d’appel et le déploiement d’outils industrialisés à partir d’expérimentations locales ; les demandes d’extraits de casier judiciaire seront totalement gérées en ligne.

En 2019, une nouvelle application permettra également de gérer en ligne l’ensemble de la procédure d’aide juridictionnelle et les possibilités de communication électronique seront étendues à la totalité des juridictions.

Le déploiement de nouvelles applications, à compter de 2020, en matière civile (projet Portalis) comme en matière pénale (projet Procédure pénale numérique, conduit conjointement avec le ministère de l’intérieur), développées en intégrant les exigences de l’État-plateforme et d’interopérabilité avec l’ensemble des partenaires du service public de la justice, permettra une gestion entièrement numérique des procédures, où chacun des acteurs de celle-ci pourra accéder, en fonction de ses droits, à un dossier numérique partagé. Les applications du ministère seront décloisonnées, dans le respect des principes de confidentialité propre à chacun des domaines concernés, favorisant ainsi le suivi et la gestion des parcours individuels, tout en allégeant les tâches des agents. Ces évolutions concerneront les juridictions, mais également la protection judiciaire de la jeunesse (programme Parcours) et l’administration pénitentiaire (gestion des détenus, numérique en détention, renseignement pénitentiaire…).

– Le soutien aux utilisateurs et l’accompagnement du changement : le dispositif de soutien aux utilisateurs internes au ministère sera substantiellement renforcé et rationalisé et le déploiement d’applications nouvelles s’accompagnera d’actions de formation et d’appui à la conduite du changement à la mesure de l’importance des évolutions programmées et de la place désormais conférée aux applications informatiques dans le travail quotidien. La mise en place d’un véritable service public numérique de la justice devra également s’accompagner d’une assistance aux usagers de ce service public, y compris en veillant à l’accueil, dans le réseau des juridictions et de l’accès au droit, mais aussi en partenariat avec l’ensemble des acteurs mobilisables à cet effet, des usagers les plus éloignés du numérique.

La transformation numérique offre l’opportunité unique de rendre notre justice accessible très simplement, à tous, de rendre des décisions plus rapidement, de réduire les distances géographiques, d’introduire de la transparence sur l’avancée des procédures. La réussite de cette transformation, qui irrigue toutes les structures et toutes les activités du service public de la justice, conditionne en bonne partie le succès des autres réformes.

C’est pourquoi le pilotage de la transformation numérique est renforcé, placé sous l’égide d’un comité stratégique présidé par la ministre. L’accroissement substantiel des moyens consacrés au virage numérique sera de la sorte dirigé, orienté et suivi à haut niveau. Il convient, en effet, d’encadrer strictement et d’être en capacité de rendre compte du caractère optimal des choix d’utilisation des crédits d’investissement spécifiquement dévolus au plan de transformation numérique, dont les autorisations d’engagement s’élèveraient à 530 millions d’euros sur la période 2019-2022.

Afin de doter le service des systèmes d’information et de communication du secrétariat général des capacités de conduire et de mettre en œuvre opérationnellement cette révolution numérique, 260 recrutements supplémentaires seront réalisés sur cette même période. Cet effort sur le programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice » s’ajoute aux moyens par ailleurs consacrés à cette priorité par chacun des autres programmes de la mission justice.

1.2.6 Une organisation judiciaire adaptée à ces évolutions conjuguant proximité et compétence

L’organisation judiciaire doit être plus lisible et plus efficace et s’adapter aux réformes de simplification des procédures engagées et à la transformation numérique engagée. Il est devenu nécessaire de repenser l’organisation des juridictions tant la répartition des contentieux entre les juridictions, notamment en première instance, est devenue illisible pour les citoyens.

Pour conduire la réflexion en ce domaine, la démarche adoptée a été celle de la concertation. Une mission a été confiée à Dominique Raimbourg et Philippe Houillon qui ont auditionné plus de 200 personnes. La concertation menée par les référents a permis de montrer que cette adaptation était nécessaire mais qu’elle devait accompagner une évolution portée par les acteurs de terrain.

Toutes les implantations judiciaires actuelles seront maintenues pour répondre au besoin de proximité et d’accessibilité de la justice.

Afin d’améliorer la lisibilité de la répartition des contentieux en première instance et pour répondre aux besoins de spécialisation des magistrats dans les domaines les plus complexes, le projet de loi prévoit que le contentieux civil des actuels tribunaux d’instance relève de la compétence du tribunal de grande instance qui deviendra ainsi la juridiction de droit commun en première instance, sous la nouvelle dénomination de tribunal de première instance.

Pour garantir un maillage territorial répondant aux besoins de proximité et garantissant l’accès de tous à la justice, le tribunal de première instance pourra comprendre en dehors de son siège une ou plusieurs chambres, correspondant à la localisation des actuels tribunaux d’instance, dont les compétences seront fixées par décret pour répondre au mieux au besoin de justice dans chacun des territoires concernés. Au-delà d’un socle de compétence commun à l’ensemble de ces chambres, les chefs de cours, sur proposition conjointe des chefs de juridictions, présidents et procureurs de la République, pourront leur attribuer un ou plusieurs contentieux supplémentaires afin de prendre en compte la réalité des bassins économique et sociologique de leur ressort, renforçant ainsi la justice de proximité.

Il n’y aura donc aucun éloignement de la justice du quotidien pour le justiciable et aucune désertification du territoire.

Dans les départements dans lesquels sont implantés plusieurs tribunaux de première instance, la multiplicité des interlocuteurs judiciaires vis-à-vis des services et administrations de l’État peut nuire à l’efficacité des politiques menées, notamment en matière pénale et affaiblir la position de l’institution judiciaire dans la conduite de politiques partenariales. Pour remédier à cette situation, tout en préservant l’implantation actuelle des tribunaux de première instance, il est envisagé d’offrir la possibilité au procureur général de désigner un des procureurs de la République du département pour représenter, sous son autorité, l’ensemble des parquets dans le cadre de leurs relations avec les autorités administratives du département et d’assurer la coordination des activités s’y rapportant.

En matière pénale, il est prévu la possibilité de regrouper au sein d’une seule juridiction du département certains magistrats spécialisés, juges de l’application des peines et juges d’instruction. Ces évolutions nécessaires permettront de garantir une justice de qualité pour les citoyens, notamment en garantissant une meilleure spécialisation des juges dans les matières les plus complexes.

Elles faciliteront également l’harmonisation de la jurisprudence sur le ressort d’un département en matière civile comme en matière pénale, offrant plus de prévisibilité pour les justiciables. Enfin, elles visent à remédier à l’isolement de certains juges, intervenant ponctuellement dans des domaines complexes sans capacité d’échange sur les pratiques et la jurisprudence et sans équipe autour de lui dédiée au traitement de certains contentieux.

L’association des chefs de juridiction et des chefs de cours au plus près des réalités judiciaires de leur ressort est essentielle pour garantir une parfaite adéquation entre les besoins de justice et l’organisation judiciaire et il leur appartiendra en ce domaine de proposer à la garde des sceaux l’organisation la plus efficace dans chacun des départements concernés.

En appel, le besoin de proximité doit s’appréhender différemment au regard notamment de la représentation obligatoire des justiciables. Cependant, il est nécessaire d’éviter un trop fort éloignement des auxiliaires de justice et des justiciables des cours d’appel. Ainsi, l’ensemble des implantations actuelles des cours sera préservé.

Pour accompagner ces évolutions, une enveloppe de plus de 400 M€ sera consacrée aux investissements immobiliers, à l’amélioration du fonctionnement des juridictions, à la réforme des TASS et des TCI et aux mesures d’accompagnement des réorganisations qui découleront de l’adaptation du réseau des juridictions.

1.2.7. Une justice plus prévisible

Il convient en premier lieu de donner une portée concrète aux dispositions de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, prévoyant la mise à disposition du public, à titre gratuit, des décisions de justice, dans le respect de la vie privée des personnes et en prévenant les risques de ré-identification. Conformément aux préconisations du rapport remis à la garde des sceaux, le 9 janvier 2018, par la mission d’étude et de préfiguration de l’open data des décisions de justice, cette mise à disposition devra respecter un principe d’une occultation des éléments d’identification des personnes mentionnées dans la décision, y compris les magistrats et les fonctionnaires de greffe, et sera confiée aux cours suprêmes de l’ordre administratif et de l’ordre judiciaire. Elle devra s’accompagner d’une régulation des algorithmes qui exploitent les données issues de décisions, afin d’assurer une transparence sur les méthodologies mises en œuvre. Le profilage des magistrats et des fonctionnaires du greffe sera également interdit afin de ne pas porter atteinte au bon fonctionnement de la justice.

Le service public de la justice doit également mettre en capacité l’ensemble de ses usagers, mais aussi de ses acteurs, de mieux mesurer l’évolution de son activité et de la qualité du service rendu. Le système d’information décisionnel du ministère évoluera pour fournir, au niveau national comme au niveau local, des outils efficaces d’analyse et de pilotage de l’activité. Les usagers devront pouvoir accéder en ligne à une information pratique nourrie, enrichissant ce qui figure déjà sur le site Justice.fr (accessibilité des juridictions, pédagogie des procédures, simulateurs…), mais aussi, par exemple, à des indicateurs de délai de procédure devant la juridiction qu’ils envisagent de saisir, ou encore à des barèmes ou à des référentiels jurisprudentiels indicatifs. La qualité du service rendu sera également mesurée par le biais d’enquêtes de satisfaction auprès des usagers, avec des indicateurs adaptés aux spécificités du service public de la justice.

1.2.8. (Supprimé)

1.3. Cette réforme doit redonner du souffle au fonctionnement de linstitution

1.3.1. La conjonction de toutes ces réformes permet de redéployer des emplois

Simplification de procédure, déjudiciarisation, dématérialisation des processus, organisation adaptée, compte tenu de la concertation locale, de la première instance, toutes ces réformes vont transformer en profondeur l’activité des magistrats et des fonctionnaires des services judiciaires, et redonner de la force de travail au profit de la qualité et de la célérité des jugements.

Sur la période 2019-2022, il est ainsi prévu de redéployer les emplois dans le but d’optimiser le traitement des litiges. À l’effet des mesures législatives contenues dans cette loi de programmation s’ajoutent celui de dispositions de niveau réglementaire, qui entraîneront également un gain de temps important pour les personnels. C’est le cas particulièrement de l’acte unique de saisine dématérialisée, de l’assignation du défendeur par huissier, du développement des procédures participatives pour la mise en état.

Le plan de transformation numérique, dont ce n’est cependant pas l’objet premier, contribuera aussi à dégager temps et ressource humaine au profit des activités du cœur de métier des juridictions. En effet, la dématérialisation de toutes les procédures, tant pénales que civiles, avec la constitution d’un dossier unique numérique, limitera considérablement les actes de saisie et de traitement sur support papier.

Ces différentes évolutions permettent, dans le même mouvement, de renforcer le taux d’encadrement des juridictions et d’étoffer les missions d’appui et de soutien. En outre, ces redéploiements autorisent le renfort des équipes autour du magistrat, au siège et au parquet, notamment pour le traitement des contentieux les plus spécialisés.

1.3.2. Un renouveau des méthodes de travail

Ces possibilités de redéploiement ouvrent la perspective d’une véritable amélioration de la situation des juridictions, au sein desquelles le malaise des agents est aujourd’hui patent. S’y ajouteront 2 328 emplois sur la période 2019–2022.

La résorption des vacances d’emploi est en effet une priorité, car elles pèsent lourdement sur les conditions de travail des agents exerçant dans les services concernés, soumis à la pression de l’urgence et du retard dans le traitement des dossiers. Toutes les vacances d’emplois de magistrats et de greffiers seront notamment résorbées d’ici la fin du quinquennat.

Il conviendra de ne plus ajouter de charges nouvelles pour la justice sans en évaluer au préalable la pertinence et l’impact. Un effort particulier sera ainsi fait sur les prochaines années pour adapter les emplois de juge des libertés et de la détention à l’élargissement de leurs missions.

Ces possibilités de redéploiement vont encore conduire à une redéfinition de la structure d’emplois, en tenant compte des conséquences de la réforme de l’adaptation du réseau des juridictions, de la transformation numérique et de la mise en œuvre des nouveaux modèles d’organisation à travers les équipes de magistrats et fonctionnaires.

En effet, la constitution d’équipes autour du magistrat permet de concentrer le temps de travail des magistrats sur leur cœur d’activité et de les appuyer quand le contentieux nécessite des compétences spécialisées. La création de juristes assistants est d’ores et déjà un succès dans les juridictions et permet de créer un nouveau vivier pour de futurs magistrats. 248 emplois de juristes assistants seront créés au cours du quinquennat. Les greffiers assistants du magistrat seront étendus au sein du parquet, avec la création de 250 emplois. Le recrutement d’assistants de justice et d’assistants spécialisés sera poursuivi. Des interprètes seront recrutés à plein temps, en substitution de collaborateurs occasionnels du service public là où le besoin le justifie.

La transformation numérique va changer très profondément les méthodes de travail des magistrats et fonctionnaires. Conjuguée aux évolutions de procédure qui sont envisagées, elle va rendre nécessaire bien plus qu’une formation aux nouveaux outils, un accompagnement fort de la conduite du changement. Des emplois seront ainsi créés pour accompagner cette transformation et des efforts de redéploiements internes seront accomplis. C’est cette nouvelle allocation des ressources qui permet de créer des emplois de correspondants locaux informatiques, dont l’utilité pour le plein déploiement de la réforme numérique est certaine. Enfin, la transformation numérique impliquera des actions de formation afin que chacun puisse s’approprier les nouvelles méthodologies de travail induites par ces changements.

Par ailleurs, la formation des magistrats, tant initiale que continue, devra s’adapter à ces évolutions pour que les magistrats, au-delà de leur expertise juridique, acquièrent davantage la dimension liée au management, à la gestion budgétaire et administrative afin, notamment de mieux prendre en compte, dans le respect de leur indépendance juridictionnelle, l’impact financier de leur activité en optimisant davantage les frais de justice. La formation des fonctionnaires s’adaptera aussi à ces nouveaux outils et le travail en équipe devra être valorisé, tant pour les magistrats que pour les fonctionnaires au sein des deux écoles de formation. La formation des juges consulaires sera mise en œuvre par l’école nationale de la magistrature qui devra donc assumer l’augmentation du public à former.

1.3.3. Des moyens humains et matériels pour améliorer la qualité de lenvironnement de travail et laccueil du justiciable

L’amélioration des moyens de fonctionnement a été une priorité du budget 2018 avec une hausse de 9 % des crédits hors masse salariale des juridictions. Le maintien de dotations suffisantes au cours du quinquennat est indispensable pour assurer de manière structurelle le bon fonctionnement des juridictions. Ainsi les économies rendues possibles par la dématérialisation (économies d’affranchissement notamment) seront redéployées. L’équipement en ultraportable des magistrats et fonctionnaires qui en ont besoin pour leur activité sera poursuivi en 2019.

La remise à niveau des infrastructures et des équipements informatiques précédemment évoqué améliorera très sensiblement les conditions de travail des magistrats et fonctionnaires. Le renforcement du réseau des correspondants locaux informatiques, avec la création pérenne d’emplois et une professionnalisation de leur formation, participera du confort de travail des fonctionnaires comme des magistrats. Un renfort encore plus important est prévu jusqu’en 2022 pour accompagner les transformations en cours et l’adaptation du réseau judiciaire.

L’investissement immobilier accompagnera l’adaptation du réseau judiciaire, dans les cas où il nécessitera des travaux, afin de donner aux agents des conditions de travail de qualité. Les crédits dédiés aux opérations classiques conduites par les délégations interrégionales du secrétariat général seront maintenus autour de 70 millions d’euros sur toute la période. Les opérations conduites par l’APIJ (Aix, Lisieux, Lille, Mont-de-Marsan, Perpignan) conservent toute leur pertinence et seront poursuivies. La restructuration de l’Ile de la Cité sera également une priorité immobilière suite au départ du tribunal de grande instance de Paris, à la fois pour assurer la remise aux normes techniques du bâtiment et permettre le regroupement des services de la cour de cassation et de la cour d’appel, facilitant de la sorte leur travail tout en étant source d’importantes économies de loyer. L’amélioration de la situation immobilière outre-mer sera poursuivie avec l’achèvement des opérations en cours à Pointe-à-Pitre, Saint -Martin et Basse-Terre et le lancement de la construction d’un tribunal judiciaire à Saint-Laurent du Maroni, en Guyane.

L’attention à la situation des agents des services judiciaires sera une préoccupation forte dans cette période d’intense évolution. Il est ainsi prévu de renforcer le réseau des assistants de prévention. La création d’un emploi de psychologue du travail et d’un infirmier du travail dans chaque DRHAS viendra également améliorer le suivi de la santé au travail des agents du ministère.

1.3.4. Une recherche déterminée de lefficacité de gestion

Le niveau élevé des charges à payer et le risque de reconstitution de retards de paiement dans les juridictions, préjudiciables à la bonne conduite des procédures pénales, font de la maîtrise de l’évolution des dépenses de frais de justice un enjeu budgétaire majeur pour le ministère de la justice. Le ministère mène, depuis plusieurs années, une action résolue de maîtrise des frais de justice qui va se poursuivre sur les années 2019-2022. Il met notamment en œuvre les recommandations de la revue des dépenses réalisée par l’IGJ et le CGEFI en 2015.

Les économies sur les interceptions judiciaires montent en puissance avec la mise en œuvre effective de l’obligation d’usage de la plateforme nationale des interceptions judiciaires (PNIJ), qui assure désormais plus de 90 % des prestations annexes et des interceptions judiciaires, et la baisse des tarifs des opérateurs de communication électronique (OCE). Dans les années à venir, ces économies devraient s’accroître grâce à l’extension du périmètre de la PNIJ (prise en compte dès 2018 de la géolocalisation des terminaux en temps réel) et la poursuite des baisses de tarifs des OCE. D’ici à 2022, l’économie espérée grâce à la PNIJ est estimée à 50 millions d’euros par an sur l’enveloppe allouée aux frais de justice.

Atteindre cette cible implique de continuer à améliorer la performance de la PNIJ, de l’adapter en permanence aux évolutions technologiques et de travailler d’ores et déjà à la conception d’une plateforme de nouvelle génération, qui succédera à l’actuelle plateforme, lorsque celle-ci sera frappée d’obsolescence et favorisera une internalisation du dispositif. Un budget d’environ 30 millions d’euros par an est ainsi prévu pour poursuivre l’évolution technologique de la PNIJ et des nouvelles techniques d’enquête.

Des travaux sont par ailleurs en cours avec le ministère de l’intérieur pour la mise en œuvre des nouvelles techniques d’enquête (balises de géolocalisation, IMSI catcher, captation de données informatiques…).

Le ministère cherche également à rendre plus efficiente la gestion des scellés en agissant sur trois leviers : limitation de l’entrée des scellés dans les juridictions, rationalisation de la gestion des scellés et fluidification des mécanismes de sortie des scellés. Parmi les actions les plus significatives, des plans d’apurement des scellés (automobiles, scellés biologiques) adossés à un mécanisme d’intéressement des juridictions sur leurs crédits de fonctionnement permettent de réaliser des économies très significatives (5 millions d’euros d’économies supplémentaires en 2018). La dématérialisation de la gestion des scellés est par ailleurs inscrite dans le plan de transformation numérique, avec le déploiement du module « scellés » de Cassiopée et le développement d’un outil de gestion des scellés, qui sera utilisé dans un premier temps par le tribunal de grande instance de Paris.

La professionnalisation du traitement des dépenses et des achats sera poursuivie dans tous les domaines de frais de justice, dans le respect de l’indépendance de prescription des magistrats. Ainsi au plan organisationnel, la direction des services judiciaires s’est engagée dans le processus visant à la mise en place, à l’issue d’une phase expérimentale, de services centralisateurs régionaux des frais de justice en charge du traitement des mémoires et de la certification sur l’ensemble du ressort de la cour d’appel. Des évolutions importantes sont en cours sur chaque grand pan de dépenses. La direction des services judiciaires, à travers plusieurs cycles de négociations avec les prestataires et notamment les experts de justice, a consolidé, segment par segment, des stratégies d’achat utilisant des leviers efficaces comme la tarification (analyse toxicologique), l’appel d’offres (analyse génétique des individus – fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG)) ou l’instauration de barèmes (expertise informatique).

Un logiciel de traduction automatisée est en cours d’acquisition pour tester la possibilité de limiter l’intervention de traducteurs personnes physiques. Une cellule opérationnelle intervient en soutien des juridictions pour des affaires importantes pour réaliser des mises en concurrence, négocier des devis.

Les efforts d’économies des services judiciaires ne s’arrêtent pas aux frais de justice. La performance de gestion est recherchée également pour le fonctionnement des juridictions. L’effort de dématérialisation va permettre de réaliser d’importants gains sur l’affranchissement (14 millions d’euros prévus en 2022).

1.4. Améliorer la qualité et lefficacité de la justice administrative

La juridiction administrative doit faire face à une augmentation constante du contentieux dans un cadre budgétaire contraint.

Depuis quinze ans, les recours ont augmenté en moyenne de 3,8 % par an devant les tribunaux administratifs (112 700 affaires en 2002, 197 000 en 2017). À cette augmentation tendancielle du nombre de recours, s’ajoutent :

– la charge d’un nombre toujours croissant de contentieux de l’urgence et de contentieux sous délai de jugement contraint qui pèse sur l’organisation des juridictions ;

– en 2019, le transfert aux tribunaux administratifs d’une partie des contentieux d’aide sociale actuellement traités par les commissions départementales d’aide sociale en application de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle ;

– en 2020, le transfert aux tribunaux administratifs du contentieux des pensions militaires d’invalidité actuellement traité par des juridictions spécialisées (loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense).

S’agissant du Conseil d’État, malgré les très importantes réformes opérées dans le but de le recentrer sur son rôle de juridiction suprême, le nombre des entrées n’est pas descendu en - dessous du niveau élevé de 9 000 à 10 000 affaires par an constaté depuis trente ans. Il est aujourd’hui ce qu’il était avant la création des cours administratives d’appel.

Le contentieux s’est en outre alourdi, car la stabilité globale des entrées recouvre une diminution des requêtes simples affectées aux juridictions subordonnées (appel des reconduites à la frontière, recours contre les refus de visas d’entrée en France, affaires individuelles dont le Conseil d’État connaissait en premier ressort) entièrement compensée par des affaires plus difficiles, en premier ressort et en cassation. De nouvelles procédures génératrices de contentieux supplémentaires, comme la question prioritaire de constitutionnalité et le contentieux du renseignement, se sont en outre ajoutées.

Les recours en cassation sur les contentieux de masse traités par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) (les recours devant la CNDA ont crû de 34 % en 2017 ; 61 000 sont attendus en 2018) et la nouvelle commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) (qui devrait enregistrer au minimum 100 000 requêtes par an) pourraient peser à l’avenir sur les missions juridictionnelles du Conseil d’État.

Cette augmentation continue du contentieux ne saurait être absorbée par une augmentation proportionnelle du nombre de magistrats. Le budget pluriannuel 2018-2022 prévoit des créations de postes de magistrats pour les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, mais en augmentation bien moindre que l’augmentation moyenne du contentieux, de 3,8 % constatée depuis quinze ans. Certains de ces postes devront, au demeurant, être affectés à la CNDA et à la CCSP.

L’amélioration de la performance et l’équilibre à moyen terme de la juridiction administrative ne pourront être trouvés, compte tenu de la croissance nécessairement limitée du nombre de magistrats, que dans l’augmentation de l’aide à la décision, c’est-à-dire de la collaboration apportée aux magistrats par des assistants juristes, et dans une redéfinition de l’office du juge administratif, de telle sorte que ce juge ne soit pas systématiquement et directement saisi de toutes les difficultés résultant de l’activité des services publics.

Les mesures législatives proposées visent à permettre aux juridictions administratives de faire face à leur charge croissante. Elles permettent ainsi de recentrer les magistrats sur leur cœur de métier en élargissant les possibilités de recours aux magistrats honoraires, en autorisant le recrutement de juristes assistants et en tenant compte de l’intérêt du service public de la justice pour apprécier les mérites d’une demande de maintien en activité des magistrats administratifs et membres du Conseil d’État au-delà de la limite d’âge. Elles réduisent également le nombre de litiges soumis au juge en allongeant la durée d’expérimentation de la procédure de médiation préalable obligatoire pour certains contentieux. Au-delà, il convient de réexaminer et de simplifier en profondeur les procédures qui engendrent des contentieux systématiques sans gain réel pour le justiciable.

L’amélioration de l’efficacité et la qualité de la justice rendue est par ailleurs recherchée avec l’ouverture de la possibilité de statuer en formation collégiale pour les référés précontractuels et contractuels et l’accroissement de l’effectivité des décisions de justice en renforçant les pouvoirs d’injonction du juge.

2. Un service public de la justice plus protecteur et attentif aux plus démunis et aux personnes en souffrance

2.1. Promouvoir laccès au droit

Dans un contexte de profonde évolution de l’institution judiciaire, les dispositifs d’accès au droit seront essentiels pour que le justiciable ne soit pas désorienté. Ils devront s’adapter à l’organisation judiciaire et à la répartition des contentieux telles qu’issues de la concertation locale pour que le maillage de l’accès au droit soit optimisé, favoriser le développement des modes alternatifs de règlement des litiges et accompagner la transformation numérique.

Pour la plupart des citoyens, l’accès au droit sera en effet facilité avec la dématérialisation progressive des procédures de justice, la possibilité de saisir en ligne la justice, le développement de l’offre en ligne de résolution amiable des différends, l’open data. Mais il conviendra de veiller à ce que les personnes les plus éloignées du numérique trouvent également une réponse dans les points d’accès au droit et soient accompagnées dans leurs contacts avec la justice pour que la dématérialisation ne devienne pas, pour elle, un obstacle vers le juge et la justice.

2.2. Une aide juridictionnelle rationalisée et permettant à chacun davoir une défense de qualité

Depuis 2015, l’État a entrepris une réforme progressive de l’aide juridictionnelle visant principalement à mieux rétribuer les avocats, à trouver des ressources nouvelles et à mieux protéger les plus démunis en relevant les plafonds de ressources. Les moyens consacrés à l’aide juridictionnelle ont ainsi augmenté de près de 40 % entre 2014 et 2018. L’unité de valeur servant de référence pour le calcul de la rétribution des avocats a fortement progressé, passant de 22,5 euros hors taxes à 32 euros. Le plafond de ressources pour une personne seule atteint désormais 1 017 € contre 941 euros en 2015.

Les crédits prévus sur le quinquennat progressent de façon modérée, afin de financer l’augmentation structurelle de l’aide juridictionnelle, tout en prévoyant des mesures de rationalisation de ces dépenses et en incluant la perspective de nouvelles recettes.

Il est également nécessaire de simplifier l’accès à l’aide juridictionnelle qui fait l’objet d’un million de demandes par an. Elle sera accessible en ligne, dans une version simplifiée, au plus tard le 31 décembre 2019. Elle sera numérisée de bout en bout, de la demande initiale à l’instruction et l’attribution, pour les justiciables comme pour les auxiliaires de justice.

Une mission, conduite conjointement par l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale de la justice, a par ailleurs expertisé des solutions d’organisation nouvelle, comme la mise en place au sein des barreaux de structures spécifiquement destinées à l’aide juridictionnelle, notamment en matière pénale.

Elle a aussi étudié les pistes d’une meilleure prise en charge de la rémunération de l’avocat par les assurances de protection juridique. Les conclusions et préconisations de cette mission nourriront la préparation, en concertation avec les avocats, de mesures et dispositifs adéquats qui viendront compléter les mesures introduites dans la loi de programmation pour la justice, telles que le rétablissement, en première instance, du « droit de timbre » pour la partie qui introduit l’instance, modulable de 20 à 50 euros ou la mise en place d’une consultation préalable au dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle auprès d’un avocat, financée sur le budget de l’aide juridictionnelle, afin de vérifier le bien-fondé de l’action.

2.3. Accompagner les victimes

Les crédits en faveur de la politique d’aide aux victimes continueront à progresser au cours du quinquennat pour atteindre près de 30 millions d’euros en fin de période, soit trois fois plus qu’en 2012. Ils permettent un véritable soutien dans la durée des associations d’aide aux victimes, qui peuvent ainsi mettre en place des actions de long terme et recruter des personnels, sans crainte d’une restriction non anticipée des financements. Il s’agit ainsi d’améliorer :

– le maillage territorial en augmentant la présence de permanences notamment au sein des commissariats, des brigades de gendarmerie, et des hôpitaux ;

– la qualité des prises en charge par le renforcement des effectifs et le développement des compétences spécialisées pour les victimes particulièrement vulnérables comme les victimes mineures ou les plus gravement traumatisées ;

– la capacité du réseau associatif à se mobiliser en urgence et à prendre en charge, dans ces conditions, des victimes, en particulier les plus gravement traumatisées, ou leurs proches, notamment en cas d’événement de grande ampleur, ce qui implique une grande disponibilité des associations, voire l’organisation de permanences ou d’astreintes.

Ces moyens permettent également de financer des actions ciblées sur l’accompagnement des victimes de terrorisme et d’accidents collectifs comme la professionnalisation du réseau référents associatifs « victimes d’actes de terrorisme », le renforcement des moyens des associations d’aide chargées d’accompagner les victimes lors de procès hors normes (accidents collectifs, attentats) ou à l’occasion de faits commis à l’étranger, la participation des associations aux comités locaux d’aide aux victimes.

Un agrément des associations d’aide aux victimes sera mis en place au niveau national. Il s’appuiera sur un référentiel de bonnes pratiques en faveur des victimes, offrira une garantie de la qualité de l’activité de l’association et du professionnalisme de ses salariés ainsi qu’un gage de fiabilité et de transparence dans l’organisation de celle-ci.

Le dispositif de téléphone « grave danger », qui a montré son utilité pour la prévention de la récidive dans les violences faites aux femmes, sera étendu, notamment en outre-mer.

L’amélioration du dispositif d’aide aux victimes passe également par la concrétisation d’une coordination interministérielle renforcée, sous l’égide de la délégation interministérielle à l’aide aux victimes placée auprès de la garde des sceaux, par le développement de schémas départementaux d’aide aux victimes et une optimisation de la conduite et du pilotage de la politique d’aide aux victimes. Un système d’information interministériel sur les victimes d’attentats et de catastrophes (SIVAC) sera construit afin de doter les différents acteurs publics d’un outil de travail informatisé pour conduire les actions nécessitées par des évènements générant de nombreuses victimes (acte de terrorisme, accidents collectifs, catastrophes). En orchestrant les échanges d’informations utiles, au travers d’un « hub » d’échange de données, le SIVAC évitera aux opérationnels des tâches de manipulation des données et leur permettra ainsi de se concentrer sur les actes au cœur de leur métier.

3. Un engagement sans faille pour mieux prévenir la radicalisation et lutter contre le terrorisme

3.1. Mieux prévenir la radicalisation dans les établissements pénitentiaires

Le ministère de la justice a été très impliqué dans la conception du plan national de prévention de la radicalisation. Pour la mise en œuvre des mesures annoncées par le Premier ministre lors du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation du 23 février 2018, la direction de l’administration pénitentiaire doublera en 2018 les capacités d’évaluation des détenus terroristes et radicalisés dans les quartiers d’évaluation de la radicalisation (QER) et créera deux nouveaux quartiers de prise en charge des détenus radicalisés les plus prosélytes (QPR). Elle s’applique également à développer l’accès des chercheurs au milieu carcéral.

En outre, dans la suite du relevé de conclusions du 29 janvier 2018, elle créera 450 places de détention étanches pour le regroupement des terroristes et radicalisés d’ici à la fin de l’année 2018 et poursuivra un objectif de 1 500 places dans des quartiers étanches du reste des détentions. Ces structures dédiées aux détenus radicalisés et violents seront implantées dans près de 80 établissements pénitentiaires, au sein desquels, par ailleurs, seront étendus les programmes de prévention de la radicalisation violente. Enfin, la direction de l’administration pénitentiaire (DAP) créera en province trois centres de prise en charge individualisée des personnes radicalisées suivies en milieu ouvert sur le modèle du dispositif RIVE, à Paris.

La montée en puissance du renseignement pénitentiaire sera poursuivie. Une centaine de personnels dédiés au renseignement seront recrutés sur les cinq années. En parallèle, l’administration pénitentiaire se dote d’un système d’information dédié au renseignement. Une première version sera mise à disposition de l’ensemble des agents du réseau d’ici à la fin de l’année 2018.

3.2. Renforcer la prise en charge éducative des jeunes radicalisés et des mineurs de retour de Syrie

La prise en charge des mineurs radicalisés constitue également une politique publique à part entière, assumée par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse. Elle a dû adapter ses modalités de prise en charge à ce nouveau public particulièrement complexe pour être capable d’intervenir rapidement et de façon adaptée. Les crédits dédiés à la lutte contre le terrorisme permettent de former les personnels à la prévention de la radicalisation et de faire vivre le réseau des référents laïcité. La direction de la protection judiciaire de la jeunesse étudie également des dispositifs de prise en charge innovants pour ces publics. Depuis fin 2016, elle expérimente ainsi le dispositif d’accueil spécialisé et individualisé (DASI), qui propose une prise en charge éducative individuelle renforcée et thérapeutique en faveur de jeunes filles et garçons poursuivis pour des faits d’association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste ou en situation de radicalisation.

La DPJJ va également être confrontée à un nouveau public nécessitant une prise en charge éducative adaptée : les mineurs de retour de zone de guerre irako-syrienne. Leur nombre est estimé à plus de 400, la moitié d’entre eux étant âgés de moins de cinq ans. La protection judiciaire de la jeunesse voit ses moyens renforcés à compter de 2019 pour systématiser les mesures judiciaires d’investigation éducative à destination des mineurs de retour de Syrie ou en voie de radicalisation.

3.3. Améliorer encore lefficacité de la justice antiterroriste

Il apparaît particulièrement nécessaire de procéder à une spécialisation du ministère public en matière de lutte contre le terrorisme. Plusieurs facteurs conduisent, de fait, à inscrire dans la présente loi les dispositions relatives à la création d’un parquet national antiterroriste (PNAT).

Tout d’abord, une menace exogène d’actions terroristes planifiées de l’extérieur comme ce fut le cas pour les attentats du 13 novembre 2015. Ensuite, une menace endogène de la part de néophytes se radicalisant très rapidement ou d’individus plus endurcis qui, faute de n’avoir pu partir sur des théâtres d’opération, passent à l’acte dans le cadre des appels au meurtre régulièrement diffusés par l’organisation « DAESH ». Enfin, un milieu carcéral qui apparaît comme un incubateur préoccupant de la menace en raison de l’activité prosélyte de détenus déjà radicalisés.

Des principes complémentaires de spécialisation et d’optimisation des moyens, dans le but de mettre en œuvre une politique pénale antiterroriste la plus efficace possible, amènent à concentrer l’action du ministère public dans la lutte contre le terrorisme.

Plusieurs objectifs sont poursuivis :

– améliorer l’efficacité de la justice pénale antiterroriste, permettant de disposer d’une force de frappe judiciaire à hauteur des enjeux. C’est la condition d’une réactivité accrue grâce à des échanges plus nourris, mieux construits avec l’ensemble des autres acteurs régaliens de la lutte contre le terrorisme, y compris aux niveaux européens et internationaux ;

– renforcer le contrôle de l’exécution des peines et le suivi des détenus terroristes notamment par le développement du renseignement pénitentiaire qui doit davantage encore monter en puissance et par le renforcement des mesures de prévention de la radicalisation ;

– améliorer la formation dans le domaine de la lutte antiterroriste afin que l’ensemble des acteurs concernés disposent du bagage et des outils adéquats.

Le parquet national antiterroriste sera placé auprès du tribunal de Paris mais disposera d’un mécanisme procédural innovant lui permettant de requérir de tout procureur de la République la réalisation d’actes d’enquête afin de répondre efficacement à l’ampleur des investigations nécessaires en cas d’attaque terroriste. Il pourra s’appuyer également sur un réseau de procureurs délégués à la lutte contre le terrorisme au sein des parquets de première instance dont les ressorts sont particulièrement exposés à la montée de l’extrémisme violent.

3.4. Simplifier et améliorer le parcours procédural des victimes dactes de terrorisme

Les victimes d’actes de terrorisme, déjà dramatiquement éprouvées, se trouvent aujourd’hui confrontées à un parcours procédural complexe lorsqu’elles sollicitent la réparation des préjudices subis, ce parcours s’inscrivant souvent dans le sillage de la procédure pénale et faisant intervenir de multiples acteurs. Prenant appui sur les travaux de la mission confiée par la garde des sceaux à Chantal Bussière, il est proposé de simplifier ce parcours, d’accélérer leur indemnisation tout en favorisant leur égalité de traitement.

Dans cette perspective, il est tout d’abord donné compétence exclusive au tribunal de grande instance de Paris pour connaître l’ensemble des litiges liés à la reconnaissance de leur droit à indemnisation, à l’organisation d’une expertise judiciaire et à la réparation des préjudices des victimes de terrorisme, au fond comme en référé, selon les règles applicables à la procédure civile, ce qui permettra d’éviter que le traitement de ce contentieux particulièrement technique retarde le déroulement de l’information judiciaire et la tenue du procès.

Cette compétence exclusive a pour corollaire l’incompétence des juridictions pénales pour connaître de l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction constituant un acte de terrorisme. Les victimes d’un acte de terrorisme conserveront en revanche la possibilité de se constituer partie civile devant les juridictions pénales afin de mettre en mouvement ou de soutenir l’action publique et se voir reconnaître la qualité de victime. À cette fin, elles pourront notamment avoir accès au dossier de la procédure, formuler toute demande d’acte utile à la manifestation de la vérité.

Dans la phase amiable, il est par ailleurs prévu de renforcer les garanties offertes aux victimes de terrorisme s’agissant du choix par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) du médecin procédant à l’examen médical de la victime et de conférer au FGTI des pouvoirs d’auditions et d’investigations en vue d’accélérer l’indemnisation des victimes de terrorisme.

4. Des peines plus efficaces et mieux adaptées, des personnels confortés dans leurs missions

4.1. Renforcer lefficacité des peines

Un double objectif doit être poursuivi : assurer le prononcé de peines efficaces et adaptées aux infractions sanctionnées et garantir leur exécution effective.

Ce double objectif est, cependant, loin d’être atteint aujourd’hui. Près de 90 000 peines prononcées sont des courtes peines d’emprisonnement, de moins de six mois. Elles ne permettent pas un réel travail de prévention de la récidive. En leur sein, près de 10 000 sont d’une durée inférieure ou égale à un mois. Elles se révèlent particulièrement désocialisantes. Cette inefficacité est renforcée par la situation actuelle de surpopulation carcérale qui atteint, en moyenne, 140 % dans les maisons d’arrêt.

Dans le même temps, depuis dix ans, dans une simple perspective de gestion des flux de la population dans les établissements pénitentiaires, s’est développé un système d’examen automatique d’aménagement des peines de moins de deux ans. Cette procédure a été introduite à l’article 723-15 du code de procédure pénale par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Elle a été modifiée par la loi pénitentiaire de 2009 pour en prévoir l’application à toutes les personnes non incarcérées condamnées à des peines dont la durée est inférieure ou égale à deux ans.

Ce système crée une véritable complexité dans l’exécution des peines d’emprisonnement. Plus profondément, il dénature le sens de la peine en prévoyant le prononcé d’une peine d’emprisonnement qui peut ensuite être totalement transformée par un juge d’application des peines.

Dans le cadre des chantiers de la justice, un certain nombre de propositions ont été formulées, à la fois pour favoriser le prononcé de peines plus efficaces que les courtes peines d’emprisonnement et pour assurer la pleine exécution des peines d’emprisonnement effectivement prononcées.

Il est prévu de donner aux juridictions de jugement la pleine responsabilité d’aménager elles-mêmes ou de décider, pour les peines d’une durée inférieure ou égale à un an, s’il y aura ou non aménagement par le juge de l’application des peines : tout examen automatique des peines d’emprisonnement aux fins d’aménagement par le juge de l’application des peines est supprimé.

La possibilité de décerner un mandat de dépôt à effet différé, avec convocation devant le procureur de la République sous un mois, offrira également au juge correctionnel une alternative pour placer en détention un condamné comparaissant libre plutôt que de le renvoyer devant le juge d’application des peines, quand le mandat de dépôt à l’audience n’est pas adapté.

La contrainte pénale, dispositif novateur et spécialement intéressant en vue d’individualiser la peine, s’avère peu utilisée (1 200 contraintes pénales prononcées) en raison de la trop grande complexité des conditions de sa mise en œuvre et de l’impossibilité de principe qu’elle pose de prononcé d’une peine mixte, de prison et de suivi.

Le sursis mise à l’épreuve (SME) fait l’objet d’un recours plus intensif puisque 80 000 sont infligés par an. Toutefois, cette mesure ne bénéficie pas des modalités de suivi de la contrainte pénale, qui garantissent une évaluation renforcée par le service pénitentiaire d’insertion et de probation. Il est donc proposé de fusionner la contrainte pénale et le SME pour créer une peine autonome de probation, qui préserve la possibilité de mettre en place un suivi renforcé et évolutif adapté à la situation du condamné. Cette mesure dynamique induit un renforcement de l’activité des services pénitentiaires d’insertion et de probation, pour nourrir les enquêtes de personnalité et surtout au travers de la systématisation d’un suivi socio-éducatif de qualité dont le rôle est majeur pour la prévention de la récidive.

De façon globale et dans un but de prévention de la récidive, une intervention renforcée des services d’insertion et de probation ou des associations habilitées est recherchée, tant en présentenciel, pour aider les magistrats dans la recherche de la sanction la plus adaptée, au travers d’enquêtes de personnalité abouties, que dans l’exécution de la peine.

Rendant le dispositif des sanctions plus lisible, facilitant pour le juge la possibilité de prononcer des peines adaptées et favorables à la réinsertion, renforçant la certitude de l’exécution de la peine décidée, cette réforme est essentielle pour asseoir la confiance du citoyen dans la justice. Elle permet, de manière secondaire, de lutter contre la surpopulation carcérale en maison d’arrêt en évitant le prononcé de peines conduisant à l’incarcération lorsqu’elle n’est pas la meilleure solution de réparation.

La mise en œuvre de cette politique pénale refondée est, en conséquence, prise en compte dans le programme immobilier nécessaire pour garantir que l’objectif d’encellulement individuel soit atteint d’ici décembre 2022.

4.2. Conforter la sécurité et lautorité des personnels et mieux reconnaître leurs métiers et leurs missions

Afin de sécuriser les établissements pénitentiaires et leurs abords, des crédits complémentaires sont prévus. Ils vont permettre d’assurer la sécurisation périmétrique des établissements pénitentiaires : face à l’accroissement des saisies de matériels illicites (33 521 portables découverts en 2016), des systèmes de détection de nouvelle génération et plus performants pour les produits illicites ou dangereux seront déployés dans les établissements pour permettre d’améliorer significativement leur dépistage, notamment celui des téléphones portables. En parallèle, le déploiement d’un système de brouillage des communications est prévu, échelonné au regard de son coût important sur une période de cinq ans. L’objectif est de couvrir tous les établissements sensibles à l’horizon 2022. De plus, l’administration pénitentiaire se dote d’un système de lutte contre les drones malveillants. En effet, les intrusions des drones sur des sites sensibles se multiplient : une quinzaine de survols ont été constatés sur des établissements pénitentiaires en 2016 ; certains drones ont été retrouvés échoués sur des domaines ou des chemins de ronde.

Dans le but de prévenir les actes de violence contre les personnels, les systèmes de vidéo-surveillance des établissements pénitentiaires seront rénovés. Afin de renforcer la protection des personnels, les dotations seront complétées par des tenues redéfinies en fonction des missions (tenues pare-coups, vêtements anti-coupures, gants adaptés pour tous…) et les équipements de sécurité seront améliorés (passe-menottes, arrêtoirs de portes…).

Plus de 80 millions d’euros sont donc consacrés sur la période 2018-2022 à la sécurité des sites pénitentiaires et du personnel qui y travaille.

En outre, des équipes locales de sécurité pénitentiaire dans les établissements les plus exposés seront créées.

L’amélioration des conditions de travail du personnel, au-delà de la résorption de la surpopulation carcérale, requiert la réalisation des effectifs à la hauteur de l’armement théorique des structures. Les vacances de postes nombreuses qui sont aujourd’hui constatées correspondent à l’écart entre les effectifs cibles et les effectifs affectés en établissements ; elles baissent au moment des sorties de promotions de l’école nationale d’administration pénitentiaire (ENAP) pour remonter chaque mois au gré des départs en retraite, détachements et disponibilités. La réactivité pour combler les départs est aujourd’hui très faible car soumise au cadencement des sorties de formation. À partir de 2019, le cadencement des formations de surveillants sera rationalisé en revoyant le rythme des sorties de promotions. Cela permettra une réactivité plus grande par rapport aux départs qui se réalisent tout au long de l’année et une meilleure prise en charge par l’ENAP des promotions dont le volume correspond davantage aux capacités d’accueil de l’école. Le pic des vacances, qui est actuellement atteint plusieurs mois après la dernière arrivée de stagiaires, devrait baisser sensiblement.

Le relevé de conclusions signé le 29 janvier 2018 prévoit une accélération du comblement des vacances à hauteur de 1 100 postes sur 4 ans (100 en 2018, 400 en 2019, 300 en 2020 et 2021).

La reprise par le ministère de la justice de la compétence en matière d’extractions judiciaires des forces de sécurité intérieure à la direction de l’administration pénitentiaire, décidée en 2010, s’est traduite par le transfert de 1 200 emplois du ministère de l’intérieur. En outre, 450 emplois supplémentaires ont été recrutés à ce titre grâce au second volet du plan de lutte antiterroriste.

Malgré ces emplois supplémentaires, la reprise de ces missions reste délicate et fortement consommatrice de ressources pour les services de l’administration pénitentiaire. Ces difficultés se traduisent par un niveau important d’annulation ou de recours aux forces de sécurité intérieure. La cause en est double : d’une part un sous-dimensionnement initial des emplois nécessaires à la reprise totale, d’autre part une organisation territoriale des services pénitentiaires en charge des extractions judiciaires qui ne permet pas une gestion optimale des missions à réaliser.

Pour répondre à cette dernière difficulté, la direction de l’administration pénitentiaire met en œuvre, dès 2018, des extractions judiciaires de proximité, dites extractions vicinales, qui permettent le renforcement du maillage territorial. Pour réaliser cette réorganisation et ainsi limiter à un nombre résiduel les impossibilités de faire, 150 surveillants supplémentaires, dédiés à ces missions, seront recrutés entre 2018 et 2020, portant à 1 800 les recrutements à ce titre depuis la reprise de la mission.

L’amélioration des conditions d’exercice du personnel pénitentiaire passe encore par la reconnaissance de ses métiers, de leurs spécificités et des contraintes qui y sont associées. Ainsi, les réformes statutaires engagées pour la filière de surveillance seront poursuivies.

La filière dite de commandement sera revalorisée, avec la création d’un corps de catégorie A et un important plan de requalification, afin de mieux mettre en cohérence le statut et les missions exercées et renforcer l’encadrement des établissements.

Des mesures complémentaires concerneront également le corps d’encadrement et d’application (CEA) afin de redynamiser l’ensemble de la filière de surveillance : modernisation de ses modalités de recrutement, de classement et d’avancement, visant à la fois à accroître son attractivité ainsi qu’à fidéliser davantage les agents exerçant au sein d’établissements pénitentiaires jugés « difficiles ».

S’y ajoutent les mesures issues du relevé de conclusions du 29 janvier 2018 qui a entendu reconnaître les contraintes particulières et la pénibilité dans l’exercice des métiers de surveillance à travers plusieurs améliorations indemnitaires, au bénéfice des agents du corps d’encadrement et d’application et des officiers : la prime de sujétion spéciale (PSS) sera revalorisée progressivement de 2 points, d’ici à 2020 ; le taux de base de l’indemnité pour charges pénitentiaires est porté de 1 000 euros à 1 400 euros annuels ; la prime des dimanches et jours fériés est revalorisée de 26 euros à 36 euros ; une prime d’attractivité et de fidélisation est créée, afin d’inciter les lauréats des concours à rejoindre les établissements qui connaissent les situations les plus tendues en matière d’effectifs.

4.3. Donner aux détenus des conditions demprisonnement dignes

Le Président de la République a pris l’engagement d’augmenter les capacités nettes du parc pénitentiaire afin d’atteindre d’ici décembre 2022 notamment l’objectif de l’encellulement individuel dans les maisons d’arrêt où la très importante surpopulation carcérale dégrade fortement la prise en charge des détenus et les conditions de travail des personnels pénitentiaires.

La résorption de la sur-occupation des détentions est urgente afin de restaurer l’attractivité du métier de surveillant, de rendre effectif l’objectif de réinsertion sociale de la peine privative de liberté en permettant la mise en œuvre d’activités et d’améliorer la prise en charge sanitaire et psychologique des personnes détenues. Elle doit aussi permettre de garantir la dignité des conditions de détention, d’améliorer la sécurité et de mieux lutter contre la radicalisation violente.

Les projections de population pénale à dix ans ont permis d’objectiver les nouvelles implantations de maisons d’arrêt. Le calibrage intègre en outre l’impact de la réforme pénale projetée, notamment la réduction du recours à la détention provisoire.

L’objectif est de pouvoir créer 15 000 places de prison supplémentaires d’ici fin 2022, principalement au sein de maisons d’arrêt mais également de structures avec un niveau de sécurité adapté à la fois à des peines de durée peu importante ou pour préparer la sortie de détenus dont le potentiel de réinsertion est avéré. Ces structures permettront l’exécution de fin de peines ou de courtes peines traditionnellement effectuées en maison d’arrêt, au sein d’un environnement plus favorable à l’aménagement des peines et à l’engagement des démarches vers la réinsertion. Elles accueilleront aussi des personnes condamnées à de courtes peines dont le potentiel de réinsertion justifie un suivi socio-éducatif, tourné vers la société ouverte, plus aisé à mettre en œuvre dans de tels établissements qu’au sein de maisons d’arrêt fermées.

Dans l’immédiat, les besoins les plus urgents sont concentrés en Île-de-France, dans la région lyonnaise, sur le pourtour méditerranéen et dans les grandes agglomérations. En outre-mer, le programme devra répondre notamment aux situations tendues des Antilles et de la Guyane.

L’armement en ressources humaines des nouvelles structures requiert près de 8 000 créations d’emplois de surveillants pénitentiaires entre 2019 et 2022, afin de permettre l’arrivée de la ressource à bonne date par rapport à celle de livraison et de mise en service des nouvelles structures.

Cet effort conséquent ainsi que la refondation du dispositif de sanction et de l’échelle des peines sont de nature, en réduisant la surpopulation carcérale, à contribuer fortement à l’amélioration des conditions de détention. C’est aussi une nécessité pour favoriser les actions de lutte contre la récidive, dont le développement des activités en détention. À cet égard et afin de conférer toute leur efficacité aux dispositions de l’article 27 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, aux termes duquel toutes les personnes détenues condamnées doivent exercer au moins l’une des activités qui leur sont proposées par l’administration pénitentiaire dans les champs visés par l’article R. 57-9-1 du code de procédure pénale, le volume et la diversité des activités offertes seront enrichis grâce au développement de programmes d’insertion. Un peu plus de 14 millions d’euros, entre 2019 et 2022, seront dédiés au développement des activités dans des détentions plus adaptées pour les mettre en œuvre, car moins soumises à des phénomènes de surpopulation.

Par ailleurs, l’architecture des nouveaux établissements pénitentiaires prendra en compte le développement du travail en détention.

Afin de favoriser l’insertion professionnelle des détenus, à l’issue de l’expérimentation de chantiers d’insertion dans les centres pénitentiaires mise en place à compter de 2016, ce dispositif pourra être étendu à de nouveaux établissements pénitentiaires.

En parallèle, des crédits sont dégagés (plus de 4 millions d’euros par an à compter de 2019) afin de tirer, pour la rémunération horaire des détenus affectés au service général, toutes les conséquences de l’article 717-3 du code de procédure pénale. De fait, ce dernier prévoit de rémunérer les personnes détenues selon un taux horaire fixé par décret et indexé sur le SMIC.

L’administration pénitentiaire mettra également en chantier un nouveau service visant à moderniser le fonctionnement des établissements : le numérique en détention. Il s’agit de la création d’un portail destiné à dématérialiser les commandes de cantines, la gestion du pécule des détenus ou les échanges entre les personnes détenues et l’administration sur le suivi des requêtes formulées par les détenus. Ce service a donc également vocation à décharger le personnel de tâches répétitives dont la lenteur de réalisation est souvent source de conflit avec la population carcérale. À terme, ce portail permettra d’accéder à des modules pédagogiques numériques.

4.4. Développer des alternatives à lincarcération et favoriser le suivi des PPSMJ

La lutte contre la récidive requiert la meilleure individualisation des sanctions compte tenu, entre autre, du profil des personnes condamnées. Dès lors que cela est adapté, une alternative à l’incarcération doit être recherchée. L’accompagnement des personnes placées sous main de justice (PPSMJ) vers la sortie de la délinquance repose sur la qualité de l’intervention des personnels en service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP). Les recrutements prévus en accompagnement de la refondation du dispositif de sanction et de l’échelle des peines s’élèvent à 1 500 ETP, soit une progression des effectifs du corps des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation d’environ 30 %.

Les conseillers de probation et d’insertion intègreront la catégorie A à compter du 1er février 2019, marquant ainsi la reconnaissance du niveau de responsabilité qu’implique l’exercice de leurs missions.

Par ailleurs, le réinvestissement des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation en pré-sententiel, afin d’accroître la connaissance du public sous main de justice, doit augmenter les alternatives à la détention provisoire (700 assignations à résidence sous surveillance électronique ARSE supplémentaires escomptées).

Le placement extérieur sera développé. Il est prévu qu’environ 1 500 détenus pourraient bénéficier à terme d’un placement extérieur.

Enfin, 4 000 personnes supplémentaires pourraient bénéficier d’un travail d’intérêt général (TIG) grâce à l’extension des possibilités pour le juge de prescrire des TIG ainsi qu’à la création de l’agence nationale des TIG. L’action de cette agence permettra de développer l’offre de TIG et de faciliter l’accès du juge à l’offre, qui pourra ainsi prononcer plus aisément l’exécution d’un TIG. Une expérimentation d’extension du périmètre des personnes morales pouvant accueillir un TIG aux personnes morales de droit privé relevant de l’économie sociale et solidaire et poursuivant un but d’utilité sociale sera également réalisée.

Le coût de ces mesures d’aménagement de peines et d’alternatives à l’incarcération sera compensé par l’économie induite par un moindre flux d’entrée en détention.

5. La diversification et lindividualisation de la prise en charge des mineurs

La diversification de l’offre de prise en charge permet de mieux s’adapter à chaque situation individuelle. Elle favorise la continuité du parcours du mineur, évitant ainsi les ruptures et les interruptions de l’accompagnement éducatif qui constituent des obstacles à la sortie définitive de la délinquance. Elle est source d’efficience de la politique publique en réduisant le risque de récidive et en adaptant la prise en charge au plus près des besoins du mineur. Elle sera mise en œuvre au cours du quinquennat à travers :

– la création de vingt centres éducatifs fermés (CEF) pour répondre aux situations les plus aigües et fournir une alternative crédible à l’incarcération des mineurs multirécidivistes, multiréitérants ou ayant commis des faits d’une particulière gravité. Cinq CEF seront créés dans le secteur public et quinze seront confiés au secteur associatif habilité, portant ainsi à 73 le nombre de CEF. Ces établissements devront se répartir sur l’ensemble du territoire pour favoriser le rétablissement des liens familiaux ou permettre un éloignement temporaire, en fonction des situations individuelles. 133 emplois seront créés pour armer les CEF du secteur public. 35 millions d’euros sont consacrés au cours du quinquennat à la construction des CEF publics et au financement des CEF du secteur associatif habilité (SAH). Il convient également d’assouplir leur fonctionnement en rendant possible le passage progressif vers un autre type de placement ou vers un retour en famille dans la dernière phase de l’accueil, au moment de la préparation à la sortie, afin de faciliter la reprise d’une scolarité ou d’une formation, voire l’obtention d’un emploi. Il s’agit également d’autoriser un accueil temporaire du jeune hors du CEF. La loi de programmation autorise ainsi un placement séquentiel pour les jeunes en centre éducatif fermé ;

– la diversification des modes de placement en accroissant le recours aux familles d’accueil et en reconfigurant et rénovant le réseau des unités éducatives d’hébergement collectif. Cette orientation impliquera notamment de sécuriser le cadre juridique d’intervention des familles d’accueil. La diversification des modes de placement doit permettre d’optimiser la dépense tout en améliorant la prise en charge des mineurs, en offrant à chacun le dispositif de suivi le plus adapté ;

– une plus grande pluridisciplinarité de l’intervention en milieu ouvert afin d’adapter l’intensité et les techniques de prise en charge à chaque situation, en fonction des besoins du jeune et des ressources du territoire et d’offrir aux jeunes les plus en difficulté une prise en charge plus complète (insertion scolaire et professionnelle mais aussi état de santé, relations familiales, …). Un accueil de jour plus organisé et encadré, sous mandat judiciaire, tenant compte de l’ensemble de ces enjeux, devra être développé. La loi de programmation autorise ainsi l’expérimentation pendant trois ans d’une mesure éducative d’accueil de jour, troisième voie entre le placement et le milieu ouvert, garantissant à des mineurs sortant de CEF ou nécessitant un suivi éducatif renforcé une continuité de prise en charge en journée, intensive et pluridisciplinaire, pour leur permettre d’accéder le plus rapidement possible aux dispositifs de droit commun. Cette mesure éducative plus englobante permet d’éviter des placements par nature plus coûteux.

Un programme de rénovation du parc immobilier sans précédent sera également lancé pour améliorer les conditions d’accueil des jeunes.

Pour accompagner ces évolutions, il convient de mieux reconnaître les métiers de la protection judiciaire de la jeunesse. La réforme du statut des directeurs de service entrée en vigueur au 1er janvier 2017 et le passage des éducateurs en catégorie A au 1er février 2019 sont l’occasion pour la PJJ de revoir les modalités de recrutement et les contenus des formations statutaire et continue, qui se doit d’être un vecteur pour accompagnement les nouvelles orientations. Une attention particulière est portée à la fonction de responsables d’unité éducative, premier niveau d’encadrement des équipes éducatives et porteurs auprès de ces équipes des évolutions de la prise en charge des jeunes, qui doit faire l’objet d’une reconnaissance statutaire.

Enfin, l’insertion professionnelle et sociale des jeunes repose en partie sur le corps de professeurs techniques, dont l’action permet l’inclusion sociale vers des dispositifs de droit commun. Une évolution statutaire, pour accompagner l’évolution et le renforcement des missions et pour garantir l’attractivité de ce corps, sera conduite au profit des professeurs techniques.

6. Une stratégie ministérielle de ressources humaines pour accompagner ces réformes

Le succès des réformes ambitieuses contenues dans la loi de programmation repose, outre les moyens matériels et budgétaires qui doivent y être consacrés, en premier lieu sur les femmes et les hommes qui œuvrent au quotidien dans les directions et services du ministère. L’ampleur des réformes à conduire pour rendre un service public de la justice plus en cohérence avec les besoins de nos concitoyens requiert un accompagnement des professionnels aujourd’hui en fonction et de ceux que le ministère sera conduit à recruter.

L’ampleur des réformes à conduire appelle la mise en œuvre de nouvelles pratiques de ressources humaines (RH) pour attirer, motiver, fidéliser, développer les compétences des agents. La stratégie « RH » devra accompagner les enjeux auxquels doit faire face le ministère et construire dans la durée une politique « RH » exemplaire, reposant sur les besoins spécifiques du ministère, liés à ses métiers et à la nécessité de renforcer son attractivité, tout en tenant compte des objectifs interministériels et des meilleures pratiques existant au sein de l’État.

Elle tiendra compte des orientations issues de la concertation engagée par le Gouvernement avec les représentants des agents et des employeurs publics sur les quatre chantiers annoncés lors du Comité interministériel de la transformation publique du 1er février 2018.

La vocation de cette stratégie « RH » ainsi définie se concrétise au travers de plusieurs axes :

– les réformes statutaires, indiciaires et indemnitaires annoncées seront menées à bien, et les nouveaux outils de la politique indemnitaire seront complètement déployés. La mise en œuvre des évolutions indiciaires issues de l’accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) sera ainsi poursuivie pour tous les corps du ministère. Le déploiement du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) sera achevé pour tous les corps concernés. Il sera évidemment tenu compte des chantiers engagés par le Gouvernement, au fil de leur avancée et en fonction des moyens qui leurs seront dédiés, pour mieux reconnaître l’investissement, collectif comme individuel. Un corps de psychologues ministériel sera également créé ;

– la politique de recrutement s’appuiera sur le développement de la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC), une valorisation des métiers, une professionnalisation des pratiques, ainsi qu’une gestion ministérielle harmonisée des contractuels ;

– l’accompagnement des parcours professionnel sera développé et la politique de l’encadrement, public clef pour la réussite de toute réforme d’ampleur, permettra de mieux appuyer les encadrants pour conduire le changement ;

– le ministère de la justice s’attachera à offrir aux fonctionnaires des corps à statut interministériel des perspectives de mobilité, organisées et en cohérence avec les besoins des services du département de la justice, par une gestion plus harmonisée entre les différents réseaux et en coordination avec la direction générale de l’administration et de la fonction publique ;

– l’amélioration de la qualité de vie au travail s’appuiera sur un accord à négocier avec les organisations syndicales, destiné à favoriser l’autonomie et la reconnaissance des agents et à leur proposer des conditions de travail renouvelées (organisation du temps de travail, télétravail, nouveaux modes de travail…). Une attention particulière sera portée à la prévention des violences faites aux agents et au développement de la politique de santé et de sécurité au travail ;

– la politique d’action sociale sera rénovée et renforcée pour mieux contribuer à la qualité de vie et à la fidélisation des agents (soutien à la parentalité, facilitation de l’accès au logement, amélioration de l’accès à la restauration administrative…) ;

– l’exemplarité sera recherchée dans la mise en œuvre de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dans la reconnaissance de la diversité et la lutte contre les discriminations. Le recrutement et le maintien en fonctions des personnes en situation de handicap seront en outre poursuivis.

Le ministère de la justice s’engagera dans le processus de labellisation Diversité et Égalité professionnelle (dispositif Alliance). Cette démarche d’amélioration continue valorisera ainsi les engagements des services vers plus d’exemplarité.

La mise en œuvre de cette stratégie ministérielle en matière de ressources humaines donnera lieu à un suivi concerté et régulier avec les organisations syndicales représentatives au sein du comité technique ministériel. Elle sera, selon des modalités clairement définies, évaluée en fin de période.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, sur l’article.

M. Guillaume Chevrollier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, même si la discussion générale commune est close, je me permets de la prolonger pour faire brièvement état du décalage entre la réalité du terrain et les textes du Gouvernement, notamment ce projet de loi sur la justice.

On ne peut pas, d’un côté, organiser un grand débat sur tout le territoire pour tenter de recréer du lien avec les citoyens et, dans le même temps, entamer une réforme de la justice, décriée par de très nombreux professionnels qui manifestent et alertent sur le risque réel de perte de proximité entre la justice et le justiciable. Leur avis compte. Écoutez-les !

Que dit la crise sociale d’aujourd’hui, entre autres ? « Nous voulons plus de proximité, plus de liens, plus de services publics. »

Que fait cette réforme de la justice ? Elle éloigne la justice d’un citoyen qui souffre de cette déshumanisation progressive de la société.

Elle porte atteinte à l’oralité des débats dans la mesure où le tribunal criminel départemental prendra en charge une partie des affaires actuellement traitées par les cours d’assises et ne sera pas composé d’un jury populaire tiré au sort. C’est dommage, à l’heure même où le peuple demande à participer davantage à la vie de la cité.

De plus, la spécialisation des tribunaux est un piège pour la justice de proximité et renforcera le phénomène de métropolisation. On va vider chaque tribunal de son contentieux et on annoncera dans quelques années, peut-être, que les tribunaux n’ont plus d’utilité.

Le Sénat avait veillé à ce que la nouvelle organisation de la première instance préserve le maillage territorial et la proximité de l’institution judiciaire, en s’assurant, par la mise en place de chambres détachées, qu’aucun site judiciaire ne serait fermé, en prévoyant un mécanisme d’encadrement de toute évolution de la carte judiciaire, et en créant une fonction de juge chargé du contentieux de proximité.

C’est en effet une justice proche des citoyens, à la disposition des citoyens qu’il faut préserver. Jugeons des hommes et non des dossiers, n’allons pas vers une justice de médiation, une justice sans oralité des débats dans laquelle certains de nos concitoyens ne se reconnaîtront plus.

La justice, c’est l’égalité, l’égalité de toutes et tous devant la loi. Elle doit avant tout être humaine et préserver, bien sûr, la paix dans la société. C’est une impérieuse nécessité, a fortiori aujourd’hui.

Mme la présidente. L’amendement n° 100, présenté par MM. Buffet et Détraigne, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéas 149 à 156

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

Afin de renforcer l’efficacité de la lutte antiterroriste, le procureur de la République auprès du tribunal de Paris, compétent au niveau national en matière de lutte antiterroriste, disposera d’un mécanisme procédural innovant lui permettant de requérir de tout procureur de la République la réalisation d’actes d’enquête. Cette procédure l’aidera à répondre efficacement à l’ampleur des investigations nécessaires en cas d’attaque terroriste.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

La commission a rejeté la création d’un parquet national antiterroriste. Il convient de modifier en conséquence les dispositions du rapport annexé qui y font référence, ce que, je le reconnais bien humblement, la commission avait oublié de faire la semaine dernière.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Vous le savez, le Gouvernement souhaite vraiment la création du parquet national antiterroriste.

Par coordination avec moi-même (Sourires.), j’émets donc un avis défavorable sur votre demande de coordination.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 100.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de l’article 1er et du rapport annexé, modifié.

(Larticle 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

Article 1er et rapport annexé
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Article 1er ter

Article 1er bis

La progression du nombre de conciliateurs de justice, entre 2019 et 2022, s’effectuera selon le calendrier suivant :

 

2019

2020

2021

2022

Nombre de conciliateurs de justice

2 520

2 820

3 120

3 420

 – (Adopté.)

Article 1er bis
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Article 2

Article 1er ter

I. – Jusqu’en 2022, le Gouvernement présente chaque année au Parlement, préalablement au débat sur les orientations des finances publiques, un rapport sur l’exécution de la présente loi.

II et III. – (Supprimés)

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mme Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal, Lalande et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny et Mme Monier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport visant à étudier les modalités d’harmonisation de la rémunération des avocats pratiquant l’aide juridictionnelle tant du côté de la ou des victimes que du côté du ou des défendeurs.

La parole est à M. Bernard Lalande.

M. Bernard Lalande. J’ai l’honneur de présenter cet amendement à la place de Laurence Rossignol, qui ne peut être présente parmi nous.

Il vise à lutter contre une injustice trop souvent dénoncée dans le cadre des procédures de justice, en particulier par les victimes disposant de peu de ressources, et donc éligibles à l’aide juridictionnelle, l’AJ – cela concerne singulièrement les femmes – mais également par les avocates et avocats des parties civiles.

Pour un avocat ou une avocate, consacrer du temps à l’aide juridictionnelle peut représenter un risque ou un sacrifice financier. Ce risque est d’autant plus grand lorsque l’AJ est réalisée pour la victime. En effet, l’AJ est plus rémunératrice du côté du défendeur en raison de l’investissement horaire moindre que cette défense nécessite.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Cet amendement prévoit la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement sur les modalités d’harmonisation de la rémunération des avocats intervenant au titre de l’aide juridictionnelle.

En premier lieu, la commission des lois n’est, traditionnellement, pas favorable à la multiplication des rapports au Parlement. L’article 1er ter fait exception à ce principe en prévoyant un rapport au Parlement sur l’exécution de la présente loi préalablement au débat sur les orientations des finances publiques, pratique usuelle en matière de loi de programmation comprenant un volet budgétaire.

En second lieu, le projet de loi tel qu’il a été adopté par le Sénat prévoit plusieurs mesures en matière d’aide juridictionnelle, auxquelles le Gouvernement s’est d’ailleurs opposé en raison de la réflexion qu’il mène actuellement sur le sujet.

Un rapport conjoint de l’Inspection générale de la justice et de l’Inspection générale des finances a d’ailleurs été remis à la ministre à la fin de 2018, semble-t-il, ce qui permettrait de répondre par anticipation à la demande des auteurs de l’amendement.

Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis que M. le rapporteur.

Mme la présidente. Monsieur Lalande, l’amendement n° 3 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Bernard Lalande. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er ter.

(Larticle 1er ter est adopté.)

TITRE II

SIMPLIFIER LA PROCÉDURE CIVILE ET ADMINISTRATIVE

Chapitre Ier

Redéfinir le rôle des acteurs du procès

Section 1

Développer la culture du règlement alternatif des différends

Article 1er ter
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Article 3

Article 2

I. – La section 2 du chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative est ainsi modifiée :

1° (Supprimé)

2° Le début de la première phrase du second alinéa du même article 22-1 est ainsi rédigé : « En tout état de la procédure, y compris en référé, lorsqu’il estime qu’une résolution amiable du litige est possible, le juge peut… (le reste sans changement). » ;

3° Le début de la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 22-2 est ainsi rédigé : « Lorsque la médiation est ordonnée en cours d’instance, celle-ci est… (le reste sans changement). » ;

4° L’article 22-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article n’est pas applicable lorsque le juge ordonne la médiation dans la décision statuant définitivement sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale. »

II. – (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié, présenté par M. Mézard, Mmes M. Carrère et N. Delattre et MM. Arnell, Artano, Collin, Corbisez, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. L’article 2 vise à contraindre les parties à recourir davantage à la médiation et à la conciliation pour régler leurs différends, y compris après la saisine d’un juge.

Or nous ne disposons pas d’une démonstration claire de l’efficacité de ces procédures dans l’étude d’impact. Au contraire, celle-ci précise que le nombre de tentatives de conciliation judiciaire était faible jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 19 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21siècle, dite « J21 », qui instaure la tentative de conciliation préalable obligatoire devant le tribunal d’instance.

Aujourd’hui, ce nombre augmente du fait de cette obligation, mais non du fait de l’efficacité du dispositif. Par ailleurs, la médiation à un coût, qui risque de pénaliser les justiciables les plus pauvres. L’étude d’impact précise, là encore, que la médiation est payante – sauf la médiation familiale qui est prise en compte par la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF –, puisqu’il s’agit d’une activité libérale, et les tarifs sont libres.

Le coût horaire de médiation est alors variable, de 100 euros à plus de 500 euros, même si des forfaits assortis d’un tarif pour chaque heure supplémentaire effectuée sont souvent proposés, de 500 euros à 1 500 euros.

Cet amendement a donc pour objectif de supprimer ces dispositions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Si la commission a supprimé le II de l’article 2, c’est-à-dire l’extension du champ de l’obligation de tentative de règlement amiable des litiges préalable à la saisine du juge, elle a en revanche souhaité conserver le I de cet article relatif à l’extension du pouvoir du juge d’enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur, et à la possibilité pour le juge d’ordonner une médiation dans une décision statuant définitivement sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je rappelle que l’objectif poursuivi par le Gouvernement est le développement des modes alternatifs de règlement des différends pour favoriser l’émergence d’une solution qui ne soit pas nécessairement contentieuse, et ce à tous les stades de la procédure, un accord entre les parties étant susceptible d’intervenir.

C’est pourquoi je soutiens l’extension de la tentative obligatoire de résolution amiable des différends préalablement à l’instance, afin que seules les affaires contentieuses qui ont été « décantées » puissent être portées devant le juge. C’était l’objet du II de l’article 2 que votre commission a supprimé.

Il est également prévu qu’au cours de l’instance, en tout état de la procédure, le juge pourra enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur qui les informera sur l’objet et le déroulement d’une mesure de médiation.

Enfin, pour permettre une meilleure exécution des décisions en matière d’autorité parentale, le juge pourra ordonner aux parties, dans la décision qui statue sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, de rencontrer un médiateur. Tel était l’objet de la disposition que le Gouvernement avait proposée.

Je rappelle qu’il ne s’agit que d’une possibilité pour le juge. Ce dernier ne pourra enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur que, ainsi que cela est précisé au 2°, lorsqu’il estime qu’une solution amiable du litige est possible. Il me semble qu’il est particulièrement opportun de prévoir cette possibilité, qui sera utilisée au cas par cas par le magistrat.

Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable à l’amendement de M. Mézard et de ses collègues.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 4 rectifié bis est présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mmes Artigalas et Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal, Lalande et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny et Mme Monier.

L’amendement n° 96 est présenté par Mme Billon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Ledit article 22-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un médiateur ne peut être désigné par le juge pour procéder aux tentatives préalables de conciliation prescrites par la loi en matière de divorce et de séparation de corps si des violences intrafamiliales sont suspectées. » ;

La parole est à M. Bernard Lalande, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.

M. Bernard Lalande. Là encore, je parle au nom de Laurence Rossignol.

Le règlement amiable des conflits existe en droit de la famille. Cependant, en cas de violences conjugales, le recours à la médiation n’est possible qu’avec l’accord de la victime.

Ce principe n’écarte pas un risque majeur pouvant amener la victime à ne pas faire valoir ses droits : il s’agit des cas dans lesquels la victime se trouve dans une situation d’emprise, ce qui pourrait l’empêcher de refuser le recours à la médiation.

Le présent amendement vise à maintenir la force de ce principe en le précisant directement dans les articles organisant la médiation dans le cadre des tentatives préalables de conciliation prescrites par la loi en matière de divorce et de séparation de corps.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 96.

Mme Annick Billon. Dans son rapport intitulé Prévenir et combattre les violences faites aux femmes : un enjeu de société, la délégation aux droits des femmes du Sénat avait proposé diverses recommandations visant à mieux protéger les femmes victimes de violences.

Les rapporteurs Laurence Cohen, Nicole Duranton, Loïc Hervé, Françoise Laborde, Noëlle Rauscent et Laurence Rossignol avaient fait la proposition prévue dans le présent amendement. Je m’associe aussi, bien entendu, à la défense de l’amendement identique précédemment présenté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Ces deux amendements visent à interdire au juge de désigner un médiateur pour procéder aux tentatives de conciliation obligatoires prévues en matière de divorce et de séparation de corps, en cas de suspicion de violences intrafamiliales.

Ces deux amendements sont satisfaits de fait puisque la commission a supprimé le 1° du I de l’article 2, c’est-à-dire qu’elle a rétabli l’interdiction générale faite au juge de désigner un médiateur pour procéder aux tentatives de conciliation obligatoires prévues en matière de divorce et de séparation de corps, par coordination avec la suppression de l’article 12. Qu’il y ait donc suspicion de violences ou non, dans le cadre de la procédure de divorce ou de séparation de corps, le juge ne pourra pas désigner un médiateur.

Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je rappelle qu’en toute hypothèse la loi « J21 » interdit déjà au juge, en cas de violences intrafamiliales, d’enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur.

Il va de soi que lorsque le juge est informé de violences intrafamiliales, il ne va pas proposer de médiation aux parties. Il me semble qu’il est important de faire confiance aux juges, qui sont particulièrement sensibilisés sur ces questions.

Par ailleurs, je souligne que la nouvelle procédure de divorce prend en compte le dispositif de l’ordonnance de protection, qui est extrêmement utile et permet d’engager une mise en sécurité réelle pour les victimes de violences.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Je ne suis pas persuadée que les violences soient forcément visibles et effectives pour les magistrats. Pour autant, je vais suivre l’avis du rapporteur. Je retire donc mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 96 est retiré.

Monsieur Lalande, l’amendement n° 4 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Bernard Lalande. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
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Article 4

Article 3

Après l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, sont insérés des articles 4-1 à 4-7 ainsi rédigés :

« Art. 4-1. – Les personnes physiques ou morales proposant, de manière rémunérée ou non, un service en ligne de conciliation ou de médiation, telle que définie à l’article 21 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, administrative et pénale, sont soumises aux obligations relatives à la protection des données à caractère personnel et, sauf accord des parties, de confidentialité. Le service en ligne délivre une information détaillée sur les modalités selon lesquelles la résolution amiable est réalisée.

« Art. 4-2. – Les personnes physiques ou morales proposant, de manière rémunérée ou non, un service en ligne d’arbitrage sont soumises aux obligations relatives à la protection des données à caractère personnel et, sauf accord des parties, de confidentialité. Le service en ligne délivre une information détaillée sur les modalités selon lesquelles l’arbitrage est rendu.

« La sentence arbitrale peut être rendue sous forme électronique, sauf opposition de l’une des parties.

« Art. 4-3. – (Non modifié)

« Art. 4-4. – Les personnes physiques ou morales proposant, de manière rémunérée ou non, un service en ligne d’aide à la saisine des juridictions sont soumises aux obligations relatives à la protection des données à caractère personnel et de confidentialité.

« Art. 4-5. – Les personnes physiques ou morales mentionnées aux articles 4-1, 4-2 et 4-4 ne peuvent réaliser des actes d’assistance ou de représentation que dans les conditions prévues à l’article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. Elles ne peuvent donner des consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé qu’à la condition de respecter les obligations résultant de l’article 54 de la même loi.

« Art. 4-6. – Les personnes physiques ou morales qui concourent à la fourniture ou au fonctionnement des services en ligne mentionnés aux articles 4-1 et 4-2 accomplissent leur mission avec impartialité, indépendance, compétence et diligence.

« L’article 226-13 du code pénal leur est applicable.

« Art. 4-7. – Pour pouvoir être proposés au public, les services mentionnés aux articles 4-1, 4-2 et 4-4 doivent être certifiés par le garde des sceaux, ministre de la justice. La certification est accordée après vérification du respect des exigences mentionnées aux articles 4-1 à 4-6.

« Par exception, la certification est accordée de plein droit aux conciliateurs de justice, aux médiateurs inscrits sur la liste prévue à l’article L. 615-1 du code de la consommation au titre de leur activité de médiation de consommation ainsi qu’aux personnes inscrites, dans le ressort d’une cour d’appel, sur la liste des médiateurs prévue à l’article 22-1 A de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative.

« Un décret en Conseil d’État précise les procédures de délivrance et de retrait de la certification. »

Mme la présidente. L’amendement n° 45, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. La commission des lois du Sénat a, comme en première lecture, rétabli la certification obligatoire des services en ligne de règlement amiable des litiges. C’est un moindre mal, mais cette mesure ne s’oppose pas frontalement à une mesure forte de déjudiciarisation.

Comme cela a été dit lors de la table ronde organisée par de nombreux représentants des corps et professions, cette dématérialisation de la justice met en danger la notion même de justice. L’article 3 transfère en effet à des sociétés de droit privé, en quelque sorte, le pouvoir de rendre justice.

On voit bien le but de la manœuvre : désengorger les tribunaux et alléger les coûts. Mais je crois que cela va bien au-delà. Nous avions d’ailleurs contesté en première lecture l’instauration d’une obligation de consultation, car nous estimions qu’elle induisait une forme de privatisation de la justice. Nous y sommes avec cet article 3.

De plus, ces dispositions sont source d’inégalités : ces services auront un coût, les start-up du « nouveau monde » sauront en tirer profit, et les plus riches seront bien sûr les mieux servis.

Outre la question du coût immédiat de ces services, se pose la question de la fracture numérique. N’oublions pas que plus de 20 % de nos compatriotes sont encore exclus d’internet.

Cette mesure est donc grave. Elle est le symbole d’un monde où tout se vend et tout s’achète, y compris la justice ; personne ne souhaite ce modèle de société.

La modification prévue par la commission des lois apporte des garde-fous, mais elle ne vise pas à s’opposer sur le fond à la démarche gouvernementale. C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 3.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui a considéré en première lecture qu’il était nécessaire d’encadrer les nouveaux services en ligne d’aide au règlement amiable des litiges et d’aide à la saisine des juridictions.

Ces services existent déjà et il s’agit de les encadrer pour améliorer les garanties pour les justiciables. Supprimer cet article aboutirait à accepter l’absence de toute régulation, ce qui est sans doute contraire aux intentions des auteurs de l’amendement.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Comme vient de le préciser M. le rapporteur, on ne peut pas nier aujourd’hui que ces services en ligne existent. La volonté du Gouvernement est de les réguler et de les encadrer en vue d’assurer aux utilisateurs un accès beaucoup plus clair.

C’est la raison pour laquelle nous prévoyons : d’une part, pour toutes les plateformes, des obligations en termes de transparence, de respect de la protection des données personnelles, etc. ; d’autre part, pour les plateformes qui accepteront de s’y soumettre, une certification qui apparaîtra clairement sur les plateformes internet et qui permettra d’identifier celles qui respectent les règles induites par les obligations de certification.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 45.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Le non-respect de l’obligation de confidentialité qui pèse sur les personnes qui concourent à la fourniture ou au fonctionnement du service en ligne peut être sanctionné par application de l’article 226-13 du code pénal, outre des réparations civiles éventuelles.

2° Dernière phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Les plateformes numériques, personnes morales privées, auront vocation à faire payer leur prestation aux justiciables. Cela implique plusieurs conséquences, notamment le risque accru d’une justice à deux vitesses. Il risque d’y avoir, à terme, une justice coûteuse et rapide pour les uns, et une seconde lente avec prise en charge par l’aide juridictionnelle pour les autres.

La médiation telle qu’envisagée par la réforme risque de retarder et de limiter l’accès au juge et de décourager les justiciables de saisir la justice.

Il convient aussi de rappeler que rien n’empêche aujourd’hui les parties de tenter une conciliation ou une médiation, les avocats appliquant d’ores et déjà la règle suivant laquelle « il vaut mieux un mauvais arrangement qu’un bon procès ».

Il est clair que cette réforme répond à des préoccupations surtout budgétaires. Si le but est de déjudiciariser, ce délestage ne peut et ne doit pas se faire sans mise en place de garde-fous et sans contrôle de ces sociétés privées.

Il ne faudrait pas que, via la médiation, ces sociétés obtiennent une mainmise totale et sans contrôle sur les données judiciaires et personnelles des justiciables.

Mme la présidente. L’amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les cas dans lesquels la certification est exigée, la procédure de délivrance et la procédure de retrait de la certification mentionnée au présent article ainsi que les conditions dans lesquelles est assurée la publicité de la liste des services en ligne de conciliation, de médiation ou d’arbitrage sont précisés par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Même argumentaire que pour l’amendement précédent. En l’occurrence, je propose une nouvelle rédaction pour l’alinéa 12.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. L’amendement n° 13 rectifié est satisfait, puisque l’alinéa 9 de l’article 3 du projet de loi précise que l’article 226–13 du code pénal est applicable aux personnes physiques ou morales qui concourent à la fourniture ou au fonctionnement de services en ligne de résolution amiable des litiges, toute atteinte au secret professionnel de la part de ces acteurs numériques étant à ce titre punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Avis défavorable, donc.

Même argument s’agissant de l’amendement n° 14 rectifié : la commission a prévu une certification obligatoire de ces services en ligne afin qu’ils puissent être proposés au public, tout en indiquant que les modalités des procédures de délivrance et de retrait de la certification devront être précisées par un décret en Conseil d’État.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 13 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 est adopté.)

Section 2

Étendre la représentation obligatoire

Article 3
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Article 5

Article 4

I. – (Supprimé)

II. – (Non modifié) Le I de l’article 2 de la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit est ainsi rédigé :

« I. – Par dérogation au premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, dans certaines matières, en raison de leur nature, ou en considération de la valeur du litige, les parties peuvent se défendre elles-mêmes ou se faire assister ou représenter devant le tribunal de grande instance, outre par un avocat, par :

« 1° Leur conjoint ;

« 2° Leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un pacte civil de solidarité ;

« 3° Leurs parents ou alliés en ligne directe ;

« 4° Leurs parents ou alliés en ligne collatérale jusqu’au troisième degré inclus ;

« 5° Les personnes exclusivement attachées à leur service personnel ou à leur entreprise.

« Sous réserve des dispositions particulières, l’État, les régions, les départements, les communes et les établissements publics peuvent se faire représenter ou assister par un fonctionnaire ou un agent de leur administration.

« Un décret en Conseil d’État précise les critères mentionnés au premier alinéa qui dispensent de la représentation obligatoire par ministère d’avocat.

« Le représentant, s’il n’est pas avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »

II bis. – (Non modifié) Au début du chapitre III du titre V du livre IV de la première partie du code du travail, il est ajouté un article L. 1453-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 1453-1 A. – Par dérogation au premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, les parties peuvent se défendre elles-mêmes ou se faire assister ou représenter devant le conseil de prud’hommes, outre par un avocat, par :

« 1° Les salariés ou les employeurs appartenant à la même branche d’activité ;

« 2° Les défenseurs syndicaux ;

« 3° Leur conjoint, leur partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou leur concubin.

« L’employeur peut également se faire assister ou représenter par un membre de l’entreprise ou de l’établissement fondé de pouvoir ou habilité à cet effet.

« Le représentant, s’il n’est pas avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. Devant le bureau de conciliation et d’orientation, cet écrit doit l’autoriser à concilier au nom et pour le compte du mandant, et à prendre part aux mesures d’orientation. »

II ter. – Après la section 1 du chapitre II du titre II du livre VII du code de commerce, est insérée une section 1 bis ainsi rédigée :

« Section 1 bis

« De lassistance et de la représentation

« Art. L. 722-5-1. – Par dérogation au premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, les parties peuvent se défendre elles-mêmes ou se faire assister ou représenter, devant le tribunal de commerce, outre par un avocat, par toute personne de leur choix.

« Le premier alinéa du présent article est également applicable devant le tribunal de grande instance dans les matières prévues au livre VI de la partie législative du présent code.

« Le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »

III et IV. – (Non modifiés)

V et VI. – (Supprimés) – (Adopté.)

Section 3

Repenser l’office des juridictions

Article 4
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Article 6

Article 5

I. – (Non modifié) L’article 317 du code civil est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « au juge du tribunal d’instance du lieu de naissance ou de leur domicile » sont remplacés par les mots : « à un notaire » ;

2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Les mots : « , si le juge l’estime nécessaire, » sont supprimés ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’acte de notoriété est signé par le notaire et par les témoins. » ;

3° Le dernier alinéa est supprimé.

II à V. – (Non modifiés)

VI à VIII. – (Supprimés)

IX. – Après l’article 847 du code général des impôts, il est inséré un article 847 bis ainsi rédigé :

« Art. 847 bis. – Sont exonérés des droits d’enregistrement les actes prévus à l’article 311-20 du code civil. »

X. – (Non modifié) L’article 1119 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la référence : « la loi du 20 juin 1920, modifiée par la loi du 6 février 1941 » est remplacée par la référence : « l’article 46 du code civil » et, après la référence : « 679 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

2° Le second alinéa est complété par les mots : « ainsi qu’à l’article 4 de la loi n° 68-671 du 25 juillet 1968 relative à l’état civil des Français ayant vécu en Algérie ou dans les anciens territoires français d’outre-mer ou sous tutelle devenus indépendants ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 42 est présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 46 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 42.

M. Maurice Antiste. L’article 5 confie aux notaires l’établissement des actes de notoriété constatant la possession d’état en matière de filiation, l’établissement des actes de notoriété suppléant les actes d’état civil dont les originaux ont été détruits ou ont disparu à la suite d’un sinistre ou de faits de guerre, ainsi que le recueil du consentement en matière d’assistance médicale à la procréation.

En première lecture, le Sénat proposait d’exclure la déjudiciarisation, mais seulement en matière de procréation assistée. Le présent amendement vise à l’exclure dans les trois domaines cités.

Il convient, selon nous, de maintenir la compétence judiciaire en matière de filiation – cette compétence est actuellement exercée par le juge du tribunal d’instance –, ceci pour plusieurs raisons.

L’acte établissant la filiation d’un enfant et l’appréciation d’un mode de preuve nécessitent indubitablement un contrôle du juge, lequel est déjà doté du pouvoir d’appréciation et d’une expérience en la matière.

Nous considérons, par ailleurs, que l’ensemble de ces actes doit demeurer gratuit, conformément au principe de service public. Le recours à un notaire se traduira inévitablement par un surcoût pour le justiciable.

En outre, nous estimons que cet article, en l’état, constitue un recul intolérable de la protection judiciaire des enfants et des intérêts du plus faible, ce qui risque d’entraîner une fragilisation du droit de la famille.

Enfin, mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait qu’en outre-mer, et notamment à la Martinique, ces mesures seraient particulièrement dangereuses en raison de très nombreuses difficultés de règlement des successions.

C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de l’article 5

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 46.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Le présent article prévoit de confier aux notaires divers actes non contentieux, tels que les actes de notoriété constatant la possession d’état en matière de filiation ou les actes de notoriété qui suppléent les actes d’état civil dont les originaux ont été détruits ou ont disparu par suite d’un sinistre ou de faits de guerre.

Le Gouvernement a étendu le dispositif en confiant au seul notaire le recueil du consentement du couple ayant recours à une procréation médicalement assistée nécessitant l’intervention d’un tiers donneur.

Nous déplorons cette déjudiciarisation qui s’opère au bénéfice d’offices notariaux, donc d’acteurs privés, ce qui entraînera inévitablement un coût supplémentaire pour le justiciable, les sommes concernées n’étant pas négligeables. Il y a là un risque d’entrave à l’accès au droit.

Nous estimons que l’ensemble des actes mentionnés à cet article doit relever de la compétence du juge ; cette compétence ne saurait être transférée à des personnes morales de droit privé. L’efficacité et la force de la justice, en l’occurrence, exigent de conserver la compétence publique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Les dispositions de ces deux amendements sont contraires à la position de la commission. Leur adoption reviendrait à supprimer le transfert aux notaires des compétences en matière d’établissement des actes de notoriété constatant la possession d’état en matière de filiation et des actes de notoriété suppléant les actes de l’état civil dont les originaux ont été détruits ou ont disparu par suite d’un sinistre ou de faits de guerre.

La commission a estimé que ces transferts s’inscrivaient dans une logique d’uniformisation des règles de compétences applicables à la délivrance des actes de notoriété. Le code civil prévoit en effet deux autres hypothèses dans lesquelles des actes de notoriété peuvent être délivrés : la preuve de la qualité d’héritier et l’hypothèse dans laquelle il est impossible pour l’un des deux futurs époux de fournir un extrait de son acte de naissance avec indication de la filiation. Dans ces deux hypothèses, ces actes sont déjà délivrés par les notaires.

Avis défavorable, donc, sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable.

Je rappelle, à la suite de M. le rapporteur, que les notaires ont déjà, au moment où nous parlons, la possibilité d’établir des actes de notoriété : ce n’est pas quelque chose de nouveau.

Je rappelle également que les notaires ne sont pas des personnes privées comme les autres : ce sont des officiers publics ministériels. Ils ont donc une qualité particulière.

En outre, qui, sinon les notaires, peut se prévaloir de compétences réelles en matière de filiation ?

Pour ces raisons, nous avons proposé qu’ils puissent assumer l’intégralité de ces compétences.

Je rappelle qu’il y a très peu de demandes d’actes de notoriété : de telles demandes se comptent chaque année sur les doigts des deux mains, ou peu s’en faut. Il y a davantage de demandes liées à la procréation médicalement assistée, mais, comme vous l’avez noté, les droits d’enregistrement ont été supprimés sur l’acte en question.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 42 et 46.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5
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Article 7

Article 6

(Supprimé)

Article 6
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Article 8

Article 7

L’article 1397 du code civil est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est ainsi modifiée :

a) Au début, les mots : « Après deux années d’application du régime matrimonial, » sont supprimés ;

b) Les mots : « le modifier » sont remplacés par les mots : « modifier leur régime matrimonial » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas d’enfant majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique, l’information est délivrée à son représentant, qui agit sans autorisation préalable du conseil de famille ou du juge des tutelles. » ;

3° (Supprimé) – (Adopté.)

Article 7
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Articles 8 bis à 8 quater et 9

Article 8

I. – Le code civil est ainsi modifié :

1° A (Supprimé)

1° L’article 116 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« En cas d’opposition d’intérêts entre le représentant et le présumé absent, le juge des tutelles autorise le partage, même partiel, en présence du remplaçant désigné conformément à l’article 115. » ;

b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans tous les cas, l’état liquidatif est soumis à l’approbation du juge des tutelles. » ;

1° bis (Supprimés)

3° L’article 507 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « En cas d’opposition d’intérêts avec la personne chargée de la mesure de protection, le partage à l’égard d’une personne protégée peut être fait à l’amiable sur autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge. » ;

b) Au début du deuxième alinéa, sont ajoutés les mots : « Dans tous les cas, » ;

4° La seconde phrase du premier alinéa de l’article 507-1 est ainsi rédigée : « Toutefois, il peut l’accepter purement et simplement si l’actif dépasse manifestement le passif, après recueil d’une attestation du notaire chargé du règlement de la succession ou, à défaut, après autorisation du conseil de famille ou du juge. » ;

5° Au second alinéa de l’article 836, la référence : « et XI » est remplacée par les références : « , XI et XII ».

II II bis. – (Supprimés)

Mme la présidente. L’amendement n° 47, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Notre groupe, comme vous le savez, est contre tout allégement du contrôle a priori du juge des tutelles s’agissant de majeurs.

Il est d’autant plus étonnant que ce sujet vienne en discussion que, d’après les informations dont nous disposons, une réforme d’ampleur est en préparation, paraît-il, précisément sur ce sujet de la protection juridique des majeurs.

Une fois n’est pas coutume – on nous reproche généralement de ne pas tenir compte des projets du Gouvernement et de légiférer intempestivement, mais c’est, en l’occurrence, exactement l’inverse qui est vrai –, nous anticipons sur une réforme que le Gouvernement lui-même a annoncée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Le présent amendement est en partie satisfait par le texte adopté par la commission, qui reprend la version adoptée par le Sénat en première lecture.

Pour rappel, la commission des lois a supprimé l’allégement le plus contestable, qui concernait les actes du tuteur réalisés en matière financière sans contrôle.

Elle a par ailleurs refusé de reprendre à son compte toutes les dispositions nouvelles introduites par l’Assemblée nationale en première lecture tendant à accroître le nombre des actes que le tuteur pourrait effectuer seul, sans autorisation préalable du juge. Seraient concernées toutes sortes de décisions : les actes médicaux les plus graves, la gestion des comptes bancaires ou encore la souscription d’une convention obsèques – vos rapporteurs estiment que de telles dispositions porteraient gravement atteinte aux intérêts des personnes protégées.

Elle a en outre écarté l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, également introduite par l’Assemblée nationale en première lecture – cette habilitation, destinée à permettre une réforme plus large du régime de la protection des majeurs, revenait à dessaisir le Parlement de ce sujet important.

Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable.

Je voudrais juste dire à M. le sénateur Collombat que cet article 8 traduit le premier des deux volets de la grande réforme des tutelles dont il parlait à l’instant. En effet, nous avons reçu un rapport, qui a été rédigé par Mme Anne Caron-Déglise, sur cette question des tutelles. Dans ce rapport figuraient plusieurs recommandations.

Les mesures que nous avons introduites dans ce texte, à l’article 8 ainsi qu’à un autre article qui sera bientôt examiné, concernent, d’une part, la restitution aux personnes sous tutelle d’une forme de dignité et, d’autre part, des mesures de simplification relatives, par exemple, à la gestion de leurs comptes ou à l’accès à des soins médicaux : à la fois, donc, des mesures d’allégement et des mesures de dignité, celles qui ont trait au droit de vote – ce dernier sujet nous semble tout à fait essentiel.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. En général, madame la garde des sceaux, on présente ensemble les panneaux d’un diptyque ou d’un triptyque, sauf quand le temps les disperse.

Le problème, donc, reste entier. Cela dit, pour tenir compte du travail approfondi de la commission des lois, nous retirons cet amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 47 est retiré.

Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
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Article 9 bis

Articles 8 bis à 8 quater et 9

(Supprimés)

Articles 8 bis à 8 quater et 9
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Article 9 ter

Article 9 bis

(Non modifié)

Le code des procédures civiles d’exécution est ainsi modifié :

1° A À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 125-1, après le mot : « réception », sont insérés les mots : « ou d’un message transmis par voie électronique » ;

1° Le premier alinéa de l’article L. 311-5 est ainsi rédigé :

« Le créancier ne peut procéder à la saisie de plusieurs immeubles de son débiteur que dans le cas où la saisie d’un seul ou de certains d’entre eux n’est pas suffisante pour le désintéresser et désintéresser les créanciers inscrits. » ;

2° L’article L. 322-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas d’accord entre le débiteur, le créancier poursuivant, les créanciers inscrits sur l’immeuble saisi à la date de la publication du commandement de payer valant saisie, les créanciers inscrits sur l’immeuble avant la publication du titre de vente et qui sont intervenus dans la procédure ainsi que le créancier mentionné au 1° bis de l’article 2374 du code civil, ils peuvent également être vendus de gré à gré après l’orientation en vente forcée et jusqu’à l’ouverture des enchères. » ;

3° L’article L. 322-4 est ainsi modifié :

a) Les mots : « et des frais de la vente » sont supprimés ;

b) Après le mot : « paiement », sont insérés les mots : « des frais de la vente et » ;

4° L’article L. 433-2 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« À l’expiration du délai imparti, il est procédé à la mise en vente aux enchères publiques des biens susceptibles d’être vendus. Les biens qui ne sont pas susceptibles d’être vendus sont réputés abandonnés. » ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé. – (Adopté.)

Article 9 bis
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Article 10 ter A

Article 9 ter

(Non modifié)

I. – Le code des procédures civiles d’exécution est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 211-1, il est inséré un article L. 211-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 211-1-1. – Lorsque le tiers saisi est un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt, les actes lui sont transmis par voie électronique. » ;

2° La section 1 du chapitre III du titre II du livre V est complétée par un article L. 523-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 523-1-1. – Lorsque le tiers saisi est un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt, les actes lui sont transmis par voie électronique. »

II. – Au I de l’article L. 151 A du livre des procédures fiscales, après le mot : « exécutoire », sont insérés les mots : « ou lorsqu’il est saisi par une juridiction d’une demande d’informations en application de l’article 14 du règlement (UE) n° 655/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 portant création d’une procédure d’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires, destinée à faciliter le recouvrement transfrontière de créances en matière civile et commerciale ». – (Adopté.)

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Article 9 ter
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Article 10 ter

Article 10 ter A

(Non modifié)

L’article L. 111-6-6 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : « dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État » ;

2° Le second alinéa est ainsi rédigé :

« Les huissiers de justice ont accès aux boîtes aux lettres particulières selon les mêmes modalités que les agents chargés de la distribution au domicile agissant pour le compte des opérateurs mentionnés à l’article L. 111-6-3. » – (Adopté.)

Article 10 ter A
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Article 11

Article 10 ter

(Non modifié)

Le chapitre II du titre III du livre III de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 3332-3, les mots : « procureur de la République ainsi qu’au » sont supprimés ;

2° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 3332-4-1, les mots : « procureur de la République ainsi qu’au » sont supprimés. – (Adopté.)

Article 10 ter
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Article 11 bis

Article 11

(Non modifié)

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° L’article L. 444-2 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En application des deux premiers alinéas du présent article, l’arrêté conjoint mentionné au même article L. 444-3 fixe les tarifs sur la base d’un objectif de taux de résultat moyen, dont les modalités de détermination sont définies par un décret en Conseil d’État, et dont le montant est estimé globalement pour chaque profession pour l’ensemble des prestations tarifées en application de l’article L. 444-1. » ;

b) Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, pour certaines prestations et au-delà d’un montant d’émolument fixé par l’arrêté mentionné au même article L. 444-3, le professionnel et son client peuvent convenir du taux des remises. » ;

2° L’article L. 444-7 est ainsi modifié :

a) Le 1° est ainsi rédigé :

« 1° Les modalités selon lesquelles les coûts pertinents et la rémunération raisonnable, mentionnés au premier alinéa de l’article L. 444-2, sont évalués globalement pour l’ensemble des prestations tarifées en application de l’article L. 444-1 ; »

b) Au 3°, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

c) Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les conditions dans lesquelles, en application du dernier alinéa de l’article L. 444-2, le professionnel et son client peuvent convenir du taux des remises. » ;

3° La vingt-cinquième ligne du tableau du second alinéa du 4° du I de l’article L. 950-1 est remplacée par quatre lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 444-1

la loi n° 2015-990 du 6 août 2015

Article L. 444-2

la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice

Articles L. 444-3 à L. 444-6

la loi n° 2015-990 du 6 août 2015

Article L. 444-7

la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice

»

.

 – (Adopté.)

Article 11
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Article 12 (supprimé)

Article 11 bis

(Supprimé)

Chapitre II

Assurer l’efficacité de l’instance

Section 1

Simplifier pour mieux juger

Article 11 bis
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Article 12 bis A

Article 12

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 40, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code civil est ainsi modifié :

1° L’article 233 est ainsi rédigé :

« Art. 233. – Le divorce peut être demandé conjointement par les époux lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci.

« Il peut être demandé par l’un ou l’autre des époux ou par les deux lorsque chacun d’eux, assisté d’un avocat, a accepté le principe de la rupture du mariage par acte sous signature privée contresigné par avocats, qui peut être conclu avant l’introduction de l’instance.

« Le principe de la rupture du mariage peut aussi être accepté par les époux à tout moment de la procédure.

« L’acceptation n’est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l’appel. » ;

2° L’article 238 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « lors de l’assignation en divorce » sont remplacés par les mots : « lors de la demande en divorce » ;

b) Le second alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Si le demandeur a introduit l’instance sans indiquer les motifs de sa demande, le délai caractérisant l’altération définitive du lien conjugal est apprécié au prononcé du divorce.

« Toutefois, sans préjudice des dispositions de l’article 246, dès lors qu’une demande sur ce fondement et une autre demande en divorce sont concurremment présentées, le divorce est prononcé pour altération définitive du lien conjugal sans que le délai d’un an ne soit exigé. » ;

3° Le second alinéa de l’article 246 est supprimé ;

4° L’article 247-2 est ainsi rédigé :

« Art. 247-2. – Si le demandeur forme une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal et que le défendeur demande reconventionnellement le divorce pour faute, le demandeur peut invoquer les fautes de son conjoint pour modifier le fondement de sa demande. » ;

5° (Supprimé)

6° La section 3 du chapitre II du titre VI du livre Ier est ainsi modifiée :

a) Le paragraphe 1 est ainsi rédigé :

« Paragraphe 1

« De l’introduction de la demande en divorce

« Art. 251. – L’époux qui introduit l’instance en divorce peut indiquer les motifs de sa demande si celle-ci est fondée sur l’acceptation du principe de la rupture du mariage ou l’altération définitive du lien conjugal. Hors ces deux cas, le fondement de la demande doit être exposé dans les premières conclusions au fond.

« Art. 252. – La demande introductive d’instance comporte le rappel des dispositions relatives à :

« 1° La médiation en matière familiale et à la procédure participative ;

« 2° L’homologation des accords partiels ou complets des parties sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et les conséquences du divorce.

« Elle comporte également, à peine d’irrecevabilité, une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux.

« Art. 253. – Lorsqu’il rejette définitivement la demande en divorce, le juge peut statuer sur la contribution aux charges du mariage, la résidence de la famille et les modalités de l’exercice de l’autorité parentale. » ;

b) Le paragraphe 2 est abrogé, le paragraphe 3 devient le paragraphe 2, le paragraphe 4 est abrogé et le paragraphe 5 devient le paragraphe 3 ;

c) L’article 254 est ainsi rédigé :

« Art. 254. – Le juge tient, dès le début de la procédure, sauf si les parties ou la partie seule constituée y renoncent, une audience à laquelle les époux sont convoqués et à l’issue de laquelle il prend les mesures nécessaires pour assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande en divorce à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée, en considération des accords éventuels des époux. » ;

d) L’article 257 est abrogé ;

7° À la fin de l’avant-dernier alinéa et à la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 262-1, les mots : « l’ordonnance de non-conciliation » sont remplacés par les mots : « la demande en divorce » ;

7° bis (nouveau) À l’article 262-2, les mots : « requête initiale » sont remplacés par les mots : « demande en divorce » ;

8° À la première phrase du troisième alinéa de l’article 311-20, les mots : « de dépôt d’une requête » sont remplacés par les mots : « d’introduction d’une demande » ;

9° À la seconde phrase de l’article 313, les mots : « , en cas de demande en divorce ou en séparation de corps, » sont supprimés et les mots : « la date soit de l’homologation de la convention réglant l’ensemble des conséquences du divorce ou des mesures provisoires prises en application de l’article 250-2, soit de l’ordonnance de non-conciliation » sont remplacés par les mots : « l’introduction de la demande en divorce ou en séparation de corps ou après le dépôt au rang des minutes d’un notaire de la convention réglant l’ensemble des conséquences du divorce » ;

10° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article 375-3 et à la deuxième phrase de l’article 515-12, le mot : « requête » est remplacé, deux fois, par le mot : « demande ».

II. – L’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « par une ordonnance de non-conciliation » et les mots : « par une décision du juge prise en application de l’article 257 du code civil ou » sont supprimés ;

2° À la seconde phrase du g, les mots : « par une décision du juge prise en application de l’article 257 du code civil ou » sont supprimés.

III. – À la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, les mots : « le dépôt d’une requête » sont remplacés par les mots : « l’introduction d’une demande ».

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Madame la ministre, une fois n’est pas coutume, l’amendement que je propose vise à reprendre le texte adopté par l’Assemblée nationale sur l’organisation du divorce.

Nous avions eu, en première lecture, un débat sur la suppression de l’audience de conciliation. Nous avions dit que cette suppression revenait à supprimer le moment où le juge rencontre les époux pour négocier avec eux, discuter et décider des mesures provisoires. Ces discussions donnent lieu, de fait, à très peu de conciliations ; cette audience n’en reste pas moins indispensable et fondamentale.

L’Assemblée nationale a rétabli le texte de votre projet, supprimant l’audience de conciliation dans la procédure de divorce, c’est-à-dire l’obligation, pour l’époux qui veut divorcer, de solliciter l’autorisation d’introduire la demande et de respecter, ensuite, un délai de réflexion de trois mois avant de pouvoir assigner l’autre conjoint en divorce – tout cela me semble franchement justifié.

Dans la rédaction nouvelle issue de l’Assemblée nationale, à l’alinéa 28 de l’article 12, vous prévoyez, ce qui me paraît satisfaisant, que le juge aux affaires familiales doit immédiatement procéder à une audience pour fixer les mesures provisoires. Vous rétablissez donc ce temps important des mesures provisoires sans alourdir le dispositif par la conciliation préalable, ce qui me paraît une bonne mesure – tel était le sens, d’ailleurs, de la discussion que nous avions eue en première lecture.

Je propose donc de reprendre intégralement les dispositions de l’article 12 issu de l’Assemblée nationale, en y ajoutant, à l’alinéa 28, que le juge convoque les époux à cette audience ; il me semble indispensable, en effet, que soit ménagé ce temps d’audition.

Si on ne le fait pas figurer dans la loi, ou, éventuellement, dans le règlement, le juge pourrait se contenter d’avoir un débat avec les avocats, puisque nous sommes dans la période de représentation obligatoire. Or il est essentiel que, à un moment ou à un autre, les époux qui divorcent puissent rencontrer le juge : il est fondamental que les époux souhaitant divorcer puissent discuter non seulement des pensions alimentaires mais surtout de la résidence des enfants et des modalités de garde.

D’où la rédaction que je propose, qui, sans doute, ne satisfera pas les rapporteurs ; mais lorsque le Gouvernement accepte de faire évoluer son texte, il faut le souligner, madame la ministre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Notre collègue a subodoré l’avis de la commission.

Cet amendement vise à rétablir l’article 12 supprimé par la commission. Ses auteurs estiment que, dès lors que le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale prévoit que le juge aux affaires familiales, le JAF, tient, dès le début de la procédure, une audience pour fixer les mesures provisoires nécessaires à assurer l’existence des époux et des enfants, la phase de tentative de conciliation ne serait plus nécessaire.

Or la commission a considéré que la suppression de la phase de conciliation risquerait de favoriser une logique d’affrontement des parties et, par là même, d’entraîner une augmentation du nombre de divorces pour faute, car la phase de conciliation est une phase de réflexion et de maturation du divorce.

Elle a estimé que le problème de la lenteur de la procédure de divorce ne résultait pas tant de la phase de conciliation que de l’insuffisance des moyens octroyés aux juridictions pour se prononcer dans des délais raisonnables.

Par ailleurs, si la nouvelle rédaction proposée par l’Assemblée nationale prévoit bien une audience au cours de laquelle le JAF fixe les mesures provisoires, le texte prévoit également que « les parties ou la partie seule constituée » peuvent renoncer à cette audience. En cas de relations houleuses entre les époux, et notamment si une seule des parties est constituée, cette audience pourrait donc ne pas avoir lieu. Cette disposition est par conséquent susceptible de placer l’intérêt supérieur de l’enfant entre les mains de parents qui se déchirent.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. À l’inverse de M. le rapporteur, j’émets un avis favorable sur l’amendement présenté par M. le sénateur Bigot.

Il me semble que l’article 12, qui traite de l’évolution de la procédure du divorce contentieux, est le témoignage parfait d’un travail fait d’écoute des professionnels, notamment des avocats, et d’échanges avec les parlementaires, qui nous ont permis de faire évoluer le texte initial.

La procédure que nous instaurons, issue de ce travail, va considérablement raccourcir la durée du divorce contentieux, satisfaisant une attente émise par toutes les parties concernées. Il me semble, en outre, que nous préservons l’intérêt des enfants en mettant en place des mesures provisoires qui peuvent s’inscrire très tôt dans la procédure.

L’ensemble des parties prenantes verront ainsi leurs demandes satisfaites.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Je me permets d’attirer l’attention de MM. les rapporteurs et de M. le président de la commission des lois sur le fait que, lors de la table ronde qui a été organisée, aucune des organisations présentes n’a soulevé de problème s’agissant du divorce.

Or, en première lecture, lors des auditions que nous avons faites, tout le monde nous avait alertés sur la disparition de ce temps important consacré aux mesures provisoires.

La conciliation obligatoire telle qu’elle figure aujourd’hui dans le code civil est complètement désuète. L’idée est la suivante : non, les époux ne peuvent pas divorcer comme ils veulent ; ils doivent d’abord être autorisés à introduire une demande de divorce, puis doivent réfléchir pendant trois mois, ou, si le défendeur n’a pas accepté la demande, pendant six mois. On ne saurait, me semble-t-il, maintenir ce système dépassé, qui ne correspond plus à la réalité des vies de couple.

En revanche, en précisant que le juge aux affaires familiales doit convoquer les époux sauf avis contraire – il arrive quand même de temps en temps qu’il n’y ait pas de problème –, l’Assemblée nationale a trouvé avec vous, madame la ministre, la bonne solution.

C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je pense que nous devrions nous aussi écouter les professionnels et adopter cet article 12 dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, assortie de la petite modification que j’ai présentée.

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

M. Thani Mohamed Soilihi. J’irai dans le même sens que notre collègue Jacques Bigot, qui sait ce qui se passe dans la réalité : vouloir à tout prix maintenir la phase de tentative de conciliation serait contre-productif. Nous savons en effet que cette étape, en pratique, est le plus souvent une perte de temps : de conciliation, il n’y a quasiment jamais.

La rédaction proposée via cet amendement est un bon compromis : lorsqu’il y a besoin de mesures provisoires, il est possible d’y recourir. Mais se raccrocher à tout prix au maintien de la tentative de conciliation ne me semble pas une bonne chose, dans la mesure où, dans les faits – je le répète –, il y a très peu de conciliations.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. Je trouve cette proposition assez intéressante. Les procédures existantes sont très longues. Je parle d’expérience : j’ai été avocat pendant une trentaine d’années – avocat pénaliste, j’ai fait aussi beaucoup de droit matrimonial. Je vois bien, aujourd’hui, à quel point les procédures sont longues et compliquées.

La rédaction de cet amendement me paraît tout à fait intelligente ; des garanties sont apportées et son adoption rendrait les procédures beaucoup plus rapides. Par conséquent, je le voterai.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 12 demeure supprimé.

Article 12 (supprimé)
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Article 12 bis

Article 12 bis A

(Supprimé)

Article 12 bis A
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Article 12 ter

Article 12 bis

(Non modifié)

Le chapitre IV du titre VI du livre Ier du code civil est ainsi modifié :

1° À l’article 296, les mots : « à la demande de l’un des époux » sont remplacés par les mots : « ou constatée » et, à la fin, le mot : « judiciaire » est supprimé ;

2° À l’article 298, la référence : « à l’article 228 » est remplacée par les références : « aux articles 229-1 à 229-4 » ;

3° À la seconde phrase de l’article 300, après le mot : « Toutefois, », sont insérés les mots : « la convention de séparation de corps par acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d’un notaire, » ;

4° Le début de la seconde phrase de l’article 301 est ainsi rédigé : « En cas de séparation de corps par consentement mutuel… (le reste sans changement). » ;

5° Le premier alinéa de l’article 303 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La pension alimentaire peut aussi être prévue par la convention de séparation de corps par consentement mutuel. » ;

6° Le second alinéa de l’article 307 est ainsi rédigé :

« En cas de séparation de corps par consentement mutuel, la conversion en divorce ne peut intervenir que par consentement mutuel. » – (Adopté.)

Article 12 bis
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Article 13

Article 12 ter

(Non modifié)

Le 1° de l’article 1175 du code civil est complété par les mots : « , sauf les conventions sous signature privée contresignées par avocats en présence des parties et déposées au rang des minutes d’un notaire selon les modalités prévues aux articles 229-1 à 229-4 ou à l’article 298 ». – (Adopté.)

Article 12 ter
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Article 14

Article 13

La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est complétée par des articles L. 212-5-1 et L. 212-5-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 212-5-1. – Devant le tribunal de grande instance, la procédure peut, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, se dérouler sans audience. En ce cas, elle est exclusivement écrite.

« Toutefois, le tribunal peut décider de tenir une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande.

« Art. L. 212-5-2. – Les oppositions aux ordonnances portant injonction de payer statuant sur une demande initiale n’excédant pas un montant défini par décret en Conseil d’État et les demandes formées devant le tribunal de grande instance en paiement d’une somme n’excédant pas ce montant peuvent, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, être traitées dans le cadre d’une procédure dématérialisée. Dans ce cas, la procédure se déroule sans audience.

« Toutefois, le tribunal peut décider de tenir une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande. »

Mme la présidente. L’amendement n° 48, présenté par Mmes Assassi, Benbassa et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud, M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. En première lecture, nous avons proposé la suppression de cet article qui prévoit la mise en place d’une procédure exclusivement écrite pour juger certains litiges dès lors que les parties seraient en accord. Ceux-ci pourraient alors être jugés sans audience.

Le règlement des litiges inférieurs à un certain montant, qui sera donc fixé par décret, se ferait également sans audience par le biais de la procédure dématérialisée.

Ces nouvelles mesures portent gravement atteinte au droit des justiciables à un procès équitable et à notre modèle juridictionnel tout entier. Leur seul motif est d’ordre économique et ne saurait justifier les conséquences déplorables qui s’ensuivront.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Ma chère collègue, le texte de la commission, qui rétablit la version adoptée par le Sénat en première lecture, répond aux griefs que vous évoquez.

Il permet la comparution des parties à l’audience si le tribunal l’estime nécessaire ou si l’une des parties le demande.

Conformément à la position du Sénat en première lecture, la commission des lois a supprimé la faculté offerte au tribunal de refuser une demande d’audience formulée par l’une des parties, considérant qu’une telle faculté pourrait constituer un obstacle inutile à l’accès au juge.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable, selon un raisonnement quasi identique à celui de M. le rapporteur.

Mme Éliane Assassi. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 48 est retiré.

Je mets aux voix l’article 13.

(Larticle 13 est adopté.)

Article 13
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Article 16

Article 14

La sous-section 2 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est complétée par des articles L. 211-17 et L. 211-18 ainsi rédigés :

« Art. L. 211-17. – Un tribunal de grande instance spécialement désigné par décret connaît :

« 1° Des demandes d’injonction de payer, à l’exception de celles relevant de la compétence d’attribution du tribunal de commerce lorsqu’elle est exercée par la juridiction mentionnée à l’article L. 721-1 du code de commerce ;

« 2° Des demandes formées en application du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer ;

« 3° (Supprimé)

« Art. L. 211-18. – Les demandes d’injonction de payer peuvent être formées par voie dématérialisée devant le tribunal de grande instance spécialement désigné mentionné à l’article L. 211-17.

« Les oppositions sont formées devant le tribunal de grande instance spécialement désigné.

« Les oppositions aux ordonnances portant injonction de payer sont transmises par le greffe du tribunal de grande instance spécialement désigné aux tribunaux de grande instance territorialement compétents. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 49 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 80 rectifié est présenté par M. Mézard, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Arnell, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 49.

M. Pierre-Yves Collombat. Après la plateforme de conciliation, voici la constitution d’une instance juridictionnelle nationale qui sera saisie de tous les problèmes d’injonction : cinq magistrats et une vingtaine de greffiers traiteront les 500 000 procédures annuelles d’injonction de payer ! Comme vous le voyez, mes chers collègues, la « start-up justice » (M. Yvon Collin sourit) est en marche.

Quant à savoir si le respect des parties est garanti et si un examen minimal du bien-fondé des injonctions demandées est effectué, c’est un autre problème : il faut aller vite ; il faut être compétitif !

Vous pensez bien que nous ne saurions accepter ce type de justice automatique. Ce n’est plus de la justice, c’est de la régulation de flux, pour désencombrer les juridictions et faire des économies.

Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 80 rectifié.

M. Yvon Collin. La procédure d’injonction de payer permet à un créancier de saisir une juridiction par voie de requête, par opposition à l’assignation, et afin d’obtenir une décision de justice enjoignant au débiteur de verser les sommes dues.

Cette procédure se déroule sans audience : concrètement, le créancier adresse un dossier au juge, qui apprécie le bien-fondé de la demande. Si le débiteur conteste la décision dans le mois suivant la signification de l’ordonnance par un huissier de justice, les parties sont convoquées devant le juge pour un débat dit contradictoire.

Il y a chaque année 470 000 requêtes en injonction de payer. Cet article, en instaurant une seule juridiction pour tout le territoire s’agissant des injonctions de payer, pose un problème en termes d’accès au juge.

Cet accès sera rendu plus difficile et plus complexe, car les justiciables devront former opposition devant la juridiction nationale unique, et donc se déplacer jusqu’à cette juridiction pour assister à l’audience.

Il sera désormais impossible de se rendre sur place pour obtenir des informations ; aussi est-il peu probable que cette nouvelle juridiction dispose des moyens humains suffisants pour garantir que le justiciable pourra accéder de manière satisfaisante aux informations nécessaires à l’exercice de ses droits.

Cet article est donc contraire à la nécessaire proximité du citoyen avec la justice.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Ces deux amendements visent à supprimer l’article regroupant le contentieux des injonctions de payer au sein d’un tribunal de grande instance à compétence nationale qui serait spécialement désigné à cet effet.

Le Sénat en avait approuvé le principe.

Toutefois, comme en première lecture, le texte de la commission des lois rend optionnelle la saisine par voie dématérialisée de cette juridiction, afin de garantir l’accès au juge tant pour le créancier que pour le débiteur.

Je demande donc aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable sur ces amendements.

Il faut bien tenir compte de ce que signifie le traitement des injonctions de payer.

Il y a deux phases.

La première phase, qui correspond à la délivrance de l’injonction de payer et qui se déroule aujourd’hui dans les quelque 300 tribunaux d’instance, est non contradictoire. Nous la centralisons dans un tribunal unique, avec des magistrats. Il va de soi que les justiciables pourront saisir la juridiction nationale des injonctions de payer en déposant leur requête, y compris par voie papier auprès du tribunal de proximité, qui la transmettra à la juridiction nationale des injonctions de payer. Ainsi, ce traitement non contradictoire sera traité plus rapidement, de la même manière, par la juridiction nationale des injonctions de payer.

La seconde phase correspond à l’éventuelle contestation de l’injonction de payer, qu’il s’agisse d’une contestation des délais ou d’une contestation au fond. Dans les deux cas, cela se passera devant le tribunal de proximité et prendra la forme d’une procédure contradictoire, comme cela se déroule aujourd’hui.

De mon point de vue, mettre en place la procédure nationale de traitement des injonctions de payer ne présente donc que des avantages. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Dans la mesure où nous connaissions déjà l’avis de la commission – en première lecture, celle-ci avait accepté, en le modifiant un peu, le système de la centralisation des injonctions de payer –, nous n’avons pas déposé d’amendement de suppression au nom du groupe socialiste et républicain.

Pour autant, nous voterons les amendements de suppression déposés. Je les voterai d’autant plus volontiers, madame la garde des sceaux, que je constate que l’un des signataires de l’amendement n° 80 rectifié est l’un de vos anciens collègues au Gouvernement, avocat du centre de la France, qui connaît fort bien le monde judiciaire : il n’est manifestement pas totalement convaincu par vos arguments sur le système des injonctions de payer.

Si Jacques Mézard a cosigné cet amendement – il en est d’ailleurs le premier signataire –, c’est bien qu’il a conscience qu’aucune procédure contradictoire n’est prévue dans l’injonction de payer, même si de nombreux magistrats nous expliquent qu’ils réalisent un travail de contrôle et vérifient que les pièces sont là, que les délais sont respectés, etc.

Comme le souligne l’objet de l’amendement présenté par le groupe CRCE, les magistrats et les greffiers, qui sont peu nombreux, crouleront sous ces procédures et l’on risque à terme – mais c’est sans doute l’objectif – d’avoir un système complètement informatisé, avec des algorithmes.

Où sera alors la vérification exacte des pièces ? Certes, elle aura lieu dans un second temps, si le débiteur prend la précaution de faire opposition à l’injonction de payer. Or il s’agit souvent de débiteurs impécunieux et peu avertis des règles de droit. Je pense que cette procédure facilitera l’obtention de titres définitivement exécutoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

M. Thani Mohamed Soilihi. Nous ne voterons pas ces amendements de suppression.

Je reviens sur le caractère non contradictoire de la procédure d’injonction de payer. Lorsque la requête aux fins d’injonction de payer est déposée, le débiteur n’est pas au courant – il faut insister sur ce point – et les pièces complémentaires sont demandées au créancier, qui est à l’origine de la demande. Le débiteur n’est pas au courant de la procédure jusqu’à ce que l’ordonnance soit rendue.

On affirme qu’avec cette nouvelle procédure de nationalisation des injonctions de payer et la dématérialisation, en cas d’opposition d’injonction de payer, on revient en quelque sorte au système actuel : en d’autres termes, la procédure est renvoyée devant le tribunal du ressort du débiteur.

Par conséquent, pour le débiteur, rien ne change. Telle qu’elle est préconisée, cette procédure ne présente que des avantages, parce qu’elle est centralisée et systématisée. Lorsque le débiteur fait opposition à l’injonction de payer, il recouvre tous ses droits comme dans le système actuel.

C’est pourquoi je ne vois pas ce que cette procédure a de négatif, dans la mesure où, comme pour la situation actuelle, rien ne change pour le débiteur, qui est celui qu’il faut protéger.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. M. le sénateur Bigot a cité mon ancien collègue Jacques Mézard, qui est de nouveau votre collègue aujourd’hui. Je précise que le deuxième paragraphe de l’objet de l’amendement qu’il a déposé est inexact – sans doute n’a-t-il pas une connaissance très précise de ce sujet. Il est écrit que « cet accès sera rendu plus difficile et plus complexe car les justiciables devront former opposition devant la juridiction unique nationale et donc se déplacer jusqu’à cette juridiction pour assister à l’audience ». Cela n’est pas exact. Cette juridiction ne fera que délivrer les injonctions de payer. À ce stade-là, il n’y a pas d’audience ; l’audience intervient, par la suite, comme c’est le cas actuellement, s’il y a une contestation.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 49 et 80 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 43, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 6 à 8

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 211-18. – Les demandes d’injonction de payer et les oppositions sont formées par voie dématérialisée devant le tribunal de grande instance spécialement désigné mentionné à l’article L. 211-17. Toutefois, lorsqu’elles émanent de personnes physiques n’agissant pas à titre professionnel et non représentées par un mandataire, elles peuvent être adressées, sur support papier, au greffe du tribunal de grande instance spécialement désigné ou au greffe de tout tribunal judiciaire, auquel il appartient de les transmettre à la juridiction territorialement compétente. »

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Cet amendement a deux objets.

D’une part, il s’agit de rendre possible la dématérialisation de « l’opposition aux demandes d’injonction de payer » et non pas seulement la dématérialisation des « demandes d’injonction de payer », comme le prévoit l’article dans la rédaction issue de l’examen en commission.

D’autre part, il s’agit de revenir sur la suppression des audiences pour le traitement des oppositions aux demandes d’injonction de payer, lorsque l’opposition tend exclusivement à l’obtention de délais de paiement. Beaucoup de justiciables poursuivis par des organismes de crédit ou des bailleurs ont déjà du mal à exprimer oralement leur prétention, qu’en sera-t-il lorsqu’ils devront le faire exclusivement par écrit, par le biais d’une plateforme numérique ?

En l’état, cette disposition est susceptible de porter atteinte au principe du contradictoire, notamment au regard du taux d’illettrisme de certains départements, tels que la Martinique, où ce taux est près de six fois supérieur à celui de l’Hexagone.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement tend à modifier la procédure relative aux oppositions aux injonctions de payer pour prévoir qu’elle peut se faire par voie dématérialisée et supprimer la possibilité de traitement de ces dossiers sans audience devant le juge.

Or l’article 13 prévoit que les oppositions aux injonctions de payer en deçà d’un certain montant pourront se faire par voie dématérialisée, si les parties en sont expressément d’accord. De même, ces oppositions ne pourront être traitées sans audience que si les parties en sont, là encore, expressément d’accord.

Cet amendement semble donc largement satisfait. C’est pourquoi la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Antiste, l’amendement n° 43 est-il maintenu ?

M. Maurice Antiste. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 43 est retiré.

Je mets aux voix l’article 14.

(Larticle 14 est adopté.)

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Section 2

Simplifier pour mieux protéger

Article 14
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Article 17

Article 16

Le chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 428 est ainsi modifié :

a) Après la première occurrence du mot : « protection », il est inséré le mot : « judiciaire » ;

b) Après le mot : « personne », sont insérés les mots : « par la mise en œuvre du mandat de protection future conclu par l’intéressé, » ;

c) La référence : « 1429, » est remplacée par la référence : « 1429 ou » ;

d) Le mot : « judiciaire » et, à la fin, les mots : « ou par le mandat de protection future conclu par l’intéressé » sont supprimés ;

1° bis (Supprimé)

2° Le premier alinéa de l’article 494-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « hors d’état de manifester sa volonté pour l’une des causes prévues à l’article 425 » sont remplacés par les mots : « dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté » ;

b) Après le mot : « représenter », sont insérés les mots : « , à l’assister dans les conditions prévues à l’article 467 » ;

3° L’article 494-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « par », sont insérés les mots : « la personne qu’il y a lieu de protéger, par » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La désignation d’une personne habilitée est également possible à l’issue de l’instruction d’une requête aux fins d’ouverture d’une mesure de protection judiciaire ou lorsque, en application du troisième alinéa de l’article 442, le juge des tutelles substitue une habilitation familiale à une mesure de curatelle ou de tutelle. » ;

4° L’article 494-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si l’habilitation familiale sollicitée ne permet pas d’assurer une protection suffisante, le juge peut ordonner une des mesures de protection judiciaire mentionnées aux sections 3 et 4 du présent chapitre. » ;

5° Au quatrième alinéa de l’article 494-6, après le mot : « accomplir », sont insérés les mots : « en représentation » ;

6° À l’article 494-7, après le mot : « habilitée », sont insérés les mots : « à représenter la personne protégée » ;

7° L’article 494-8 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « habilitée », sont insérés les mots : « à la représenter » ;

b) Au second alinéa, après le mot : « générale », sont insérés les mots : « à la représenter » ;

8° Après le premier alinéa de l’article 494-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si elle accomplit seule un acte dont l’accomplissement nécessitait une assistance de la personne habilitée, l’acte ne peut être annulé que s’il est établi que la personne protégée a subi un préjudice. » ;

8° bis Au premier alinéa de l’article 494-10, les mots : « de l’une des personnes mentionnées à l’article 494-1 » sont remplacés par les mots : « de tout intéressé » ;

9° Au 2° de l’article 494-11, après le mot : « demande », sont insérés les mots : « de la personne protégée, ». – (Adopté.)

Article 16
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Article 18

Article 17

Le code civil est ainsi modifié :

1° À la fin du second alinéa de l’article 486, la référence : « 511 » est remplacée par la référence : « 512 » ;

2° L’article 503 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « avec le budget prévisionnel » ;

a bis) (Supprimé)

b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« En cas de retard dans la transmission de l’inventaire, le juge peut accorder un délai supplémentaire au tuteur, si celui-ci n’a pu obtenir communication des renseignements et documents nécessaires à son établissement auprès des personnes mentionnées au deuxième alinéa.

« Lorsque les conditions de l’avant-dernier alinéa ne sont pas remplies, le juge peut également désigner une personne qualifiée, choisie sur une liste établie par le procureur de la République, pour procéder à l’inventaire aux frais du tuteur. Le juge fixe dans sa décision le délai accordé à la personne qualifiée pour procéder à l’inventaire, ainsi que sa rémunération, qui ne peut excéder un plafond fixé par décret. » ;

3° Les articles 511 et 512 sont ainsi rédigés :

« Art. 511. – Pour les mineurs sous tutelle, la vérification annuelle du compte de gestion du tuteur s’exerce dans les conditions prévues à l’article 387-5, sous réserve des dispositions de l’article 513.

« Art. 512. – Pour les majeurs protégés, les comptes de gestion sont vérifiés et approuvés annuellement par le subrogé tuteur lorsqu’il en a été nommé un ou par le conseil de famille lorsqu’il est fait application de l’article 457. En cas de difficulté, le juge statue sur la conformité des comptes à la requête de l’une des personnes chargées de la mesure de protection.

« Par dérogation au premier alinéa du présent article, lorsque les ressources de la personne protégée le permettent et si l’importance ou la composition de son patrimoine le justifie, le juge peut désigner, dès réception de l’inventaire et du budget prévisionnel, une personne qualifiée choisie sur une liste établie par le procureur de la République, chargée de la vérification et de l’approbation des comptes annuels de gestion. Le juge fixe dans sa décision les modalités selon lesquelles le tuteur soumet à cette dernière le compte de gestion, accompagné des pièces justificatives, en vue de ces opérations, ainsi que sa rémunération, qui ne peut excéder un plafond fixé par décret.

« En l’absence de désignation d’un subrogé tuteur ou d’un conseil de famille, et lorsque le juge ne désigne pas de personne qualifiée pour y procéder, les comptes de gestion sont vérifiés et approuvés annuellement par le directeur des services de greffe judiciaires :

« 1° Du tribunal de grande instance, s’agissant des mesures de protection des mineurs ;

« 2° Du tribunal d’instance, s’agissant des mesures de protection des majeurs.

« À l’issue de la vérification du compte de gestion, un exemplaire est versé sans délai au dossier du tribunal par la personne chargée de cette mission.

« En cas de refus d’approbation des comptes, le juge est saisi d’un rapport de difficulté par la personne en charge de vérifier et d’approuver les comptes, et statue sur la conformité du compte.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

4° L’article 513 est ainsi rédigé :

« Art. 513. – Par dérogation aux articles 510 à 512, lorsque la tutelle n’a pas été confiée à un mandataire à la protection des majeurs, le juge peut, en considération de la modicité des revenus et du patrimoine de la personne protégée, dispenser le tuteur d’établir le compte de gestion et de le faire approuver. » ;

5° Après le même article 513, il est inséré un article 513-1 ainsi rédigé :

« Art. 513-1. – La personne chargée de vérifier et d’approuver les comptes peut faire usage du droit de communication prévu au deuxième alinéa de l’article 510, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou le secret bancaire. Elle est tenue d’assurer la confidentialité du compte de gestion. » ;

6° L’article 514 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– le mot : « annuel » est supprimé ;

– à la fin, les références : « 511 et 513 » sont remplacées par les références : « 511 à 513-1 » ;

b) À la fin du troisième alinéa, la référence : « 512 » est remplacée par la référence : « 513 ». – (Adopté.)

Article 17
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Article 18 bis

Article 18

I. – Après le deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À cette fin, après échec de toute démarche engagée auprès d’un officier de police judiciaire en cas de manquement à l’exécution de la décision du juge aux affaires familiales, à la demande de la personne directement intéressée ou du juge aux affaires familiales, le procureur de la République peut requérir le concours de la force publique pour faire exécuter une décision du juge aux affaires familiales, une convention de divorce par consentement mutuel prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d’un notaire ou une convention homologuée fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale. »

II. – L’article 373-2-6 du code civil est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « , y compris assortir toute mesure d’une astreinte » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut également, lorsqu’un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l’exécution d’une décision, d’une convention de divorce par consentement mutuel prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d’un notaire ou d’une convention homologuée fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le condamner au paiement d’une amende civile d’un montant qui ne peut excéder 10 000 €. »

III. – (Non modifié)

Mme la présidente. L’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mmes Artigalas et Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny et Mme Monier, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise à supprimer la notion de recours aux forces de police pour faire exécuter les décisions des juges aux affaires familiales, au regard des dérives d’ores et déjà constatées du point de vue de l’utilisation du syndrome d’aliénation parentale pour faire peser sur les mères une présomption de culpabilité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission. Il tend en effet à supprimer tous les outils prévus à l’article 18 pour améliorer l’exécution des décisions prises en matière d’exercice de l’autorité parentale.

L’objectif de cet article est d’apporter une réponse graduée à ces inexécutions, allant de la médiation familiale jusqu’à la réquisition des forces de l’ordre pour les hypothèses les plus graves.

L’avis est par conséquent défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 5 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18.

(Larticle 18 est adopté.)

Article 18
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Article 19

Article 18 bis

(Non modifié)

I. – Après l’article 373-2-9 du code civil, il est inséré un article 373-2-9-1 ainsi rédigé :

« Art. 373-2-9-1. – Lorsqu’il est saisi d’une requête relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge aux affaires familiales peut attribuer provisoirement la jouissance du logement de la famille à l’un des deux parents, le cas échéant en constatant l’accord des parties sur le montant d’une indemnité d’occupation.

« Le juge fixe la durée de cette jouissance pour une durée maximale de six mois.

« Lorsque le bien appartient aux parents en indivision, la mesure peut être prorogée, à la demande de l’un ou l’autre des parents, si durant ce délai le tribunal a été saisi des opérations de liquidation partage par la partie la plus diligente. »

II. – L’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Des demandes d’attribution à un concubin de la jouissance provisoire du logement de la famille en application de l’article 373-2-9-1 du code civil. » – (Adopté.)

Section 3

Concilier la publicité des décisions de justice et le droit au respect de la vie privée

Article 18 bis
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Article 19 bis

Article 19

I A. – (Supprimé)

I. – Le code de justice administrative est ainsi modifié :

1° Les deuxième à avant-dernier alinéas de l’article L. 10 sont supprimés ;

2° Au titre V du livre VII, sont ajoutés des articles L. 751-1 et L. 751-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 751-1. – Les décisions sont mises à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique, dans des conditions de nature à garantir leur authenticité.

« Par dérogation à l’article L. 10, les modalités de cette mise à disposition garantissent le respect de la vie privée des personnes mentionnées dans la décision et préviennent tout risque de ré-identification des magistrats, des fonctionnaires de greffe, des parties et de leur entourage et de toutes les personnes citées dans la décision, ainsi que tout risque, direct ou indirect, d’atteinte à la liberté d’appréciation des magistrats et à l’impartialité des juridictions.

« Les articles L. 321-1 à L. 326-1 du code des relations entre le public et l’administration sont applicables à la réutilisation des informations publiques figurant dans ces décisions.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.

« Art. L. 751-2. – Les tiers peuvent se faire délivrer copie des décisions, sous réserve des demandes abusives, en particulier par leur nombre ou par leur caractère répétitif ou systématique.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »

II. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Les deux premiers alinéas de l’article L. 111-13 sont ainsi rédigés :

« Sans préjudice des dispositions particulières qui régissent l’accès aux décisions de justice et leur publicité, les décisions rendues par les juridictions judiciaires sont mises à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique, dans des conditions de nature à garantir leur authenticité.

« Les modalités de cette mise à disposition garantissent le respect de la vie privée des personnes mentionnées dans la décision et préviennent tout risque de ré-identification des magistrats, des fonctionnaires de greffe, des parties et de leur entourage et de toutes les personnes citées dans la décision, ainsi que tout risque, direct ou indirect, d’atteinte à la liberté d’appréciation des magistrats et à l’impartialité des juridictions. » ;

2° Après l’article L. 111-11, sont insérés des articles L. 111-11-1 à L. 111-11-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 111-11-1. – En matière civile, les débats sont publics.

« Sans préjudice de l’application des autres dispositions législatives, et sauf devant la Cour de cassation, ils ont toutefois lieu en chambre du conseil :

« 1° En matière gracieuse ;

« 2° Dans les matières relatives à l’état et à la capacité des personnes déterminées par décret ;

« 3° Dans les matières intéressant la vie privée déterminées par décret.

« Le juge peut en outre décider que les débats auront lieu ou se poursuivront en chambre du conseil s’il doit résulter de leur publicité une atteinte à l’intimité de la vie privée, si toutes les parties le demandent ou s’il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice.

« Art. L. 111-11-2. – En matière civile, les jugements sont prononcés publiquement.

« Sans préjudice de l’application des autres dispositions législatives, et sauf devant la Cour de cassation, ils ne sont toutefois pas prononcés publiquement :

« 1° En matière gracieuse ;

« 2° Dans les matières relatives à l’état et à la capacité des personnes déterminées par décret ;

« 3° Dans les matières intéressant la vie privée déterminées par décret.

« Art. L. 111-11-3. – Les tiers peuvent se faire délivrer copie des jugements prononcés publiquement en matière civile.

« La copie est limitée au dispositif lorsque le jugement est rendu après débats en chambre du conseil.

« Art. L. 111-11-4. – Les tiers peuvent se faire délivrer copie des décisions de justice par le greffe de la juridiction concernée conformément aux règles applicables en matière civile ou pénale et sous réserve des demandes abusives, en particulier par leur nombre ou par leur caractère répétitif ou systématique.

« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. »

III. – Le titre III bis de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 instituant un juge de l’exécution et relative à la réforme de la procédure civile est abrogé.

IV. – Au 10° du II de l’article 8 et au 5° de l’article 9 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, la référence : « L. 10 » est remplacée par la référence : « L. 751-1 ».

V. – (Supprimé) – (Adopté.)

TITRE II bis

DISPOSITIONS RELATIVES AUX JURIDICTIONS COMMERCIALES

Article 19
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Article 19 ter

Article 19 bis

Le livre VII du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 713-7 est ainsi modifié :

a) Après le b, sont insérés des b bis et b ter ainsi rédigés :

« b bis) Les agriculteurs inscrits au registre des actifs agricoles situés dans ce ressort ;

« b ter) Les personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, inscrites à un ordre professionnel ou déclarées auprès de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, situées dans ce ressort ; »

b) Le c est complété par les mots : « ainsi que les conjoints des personnes énumérées au b ter qui collaborent à l’activité de leur époux sans autre activité professionnelle » ;

2° Après le mot : « en », la fin du premier alinéa de l’article L. 713-11 est ainsi rédigée : « six catégories professionnelles correspondant, respectivement, aux activités commerciales, artisanales, agricoles, libérales, industrielles ou de services. » ;

3° Au 5° de l’article L. 723-4, les mots : « ou au répertoire des métiers » sont remplacés par les mots : « , au répertoire des métiers ou au registre des actifs agricoles » et la référence : « au d » est remplacée par les références : « aux b ter et d » ;

4° Au premier alinéa et à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 723-7, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq ». – (Adopté.)

Article 19 bis
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Article 19 quater

Article 19 ter

I. – L’article L. 234-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Aux première et troisième phrases du deuxième alinéa et à la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

2° À la dernière phrase du deuxième alinéa et à la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « second » est remplacé par le mot : « deuxième ».

II. – Le livre VI du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 611-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « ou une entreprise individuelle, commerciale ou artisanale » sont remplacés par les mots : « , une entreprise individuelle commerciale ou artisanale, une personne morale de droit privé ou une personne physique exerçant une activité agricole ou indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, » et les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception, lorsque la personne physique ou morale concernée exerce la profession d’avocat, d’administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire ou d’officier public ou ministériel, le président du tribunal ne procède qu’à l’information de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente dont elle relève, sur les difficultés portées à sa connaissance relativement à la situation économique, sociale, financière et patrimoniale du professionnel. » ;

2° L’article L. 611-2-1 est abrogé ;

3° Le deuxième alinéa de l’article L. 611-3 est ainsi rédigé :

« Le tribunal compétent est le tribunal des affaires économiques. » ;

4° À l’article L. 611-4, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » et les mots : « exerçant une activité commerciale ou artisanale » sont supprimés ;

5° Le premier alinéa de l’article L. 611-5 est supprimé ;

6° Le premier alinéa de l’article L. 621-2 est ainsi rédigé :

« Le tribunal compétent est le tribunal des affaires économiques. » ;

7° Au dernier alinéa de l’article L. 640-5, les mots : « de grande instance » sont supprimés ;

8° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 662-3, les mots : « de commerce et le tribunal de grande instance » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

9° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 662-6, les mots : « de commerce et celui du tribunal de grande instance établissent » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques établit ».

III. – Le livre VII du code de commerce est ainsi modifié :

1° À l’intitulé, le mot : « commerciales » est remplacé par le mot : « économiques » ;

2° Le titre Ier est ainsi modifié :

a) À la fin de l’article L. 713-6, aux a et e du 1° de l’article L. 713-7 et au premier alinéa de l’article L. 713-11, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

b) Au I de l’article L. 713-12, la première occurrence des mots : « de commerce » est remplacée par les mots : « des affaires économiques » ;

3° Le titre II est ainsi modifié :

a) À la fin de l’intitulé, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

b) À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 721-1 et à l’article L. 721-2, deux fois, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

c) À la fin de l’intitulé de la section 1 du chapitre Ier, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

d) Au premier alinéa de l’article L. 721-3, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

e) À l’article L. 721-3-1 et au premier alinéa de l’article L. 721-4, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

f) L’article L. 721-5 est abrogé ;

g) Au premier alinéa des articles L. 721-6 et L. 721-7, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

h) À la fin de l’intitulé de la section 2 du chapitre Ier, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

i) L’article L. 721-8 est ainsi modifié :

– le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Des tribunaux des affaires économiques spécialement désignés connaissent : » ;

– au 4°, au dixième alinéa, aux première et seconde phrases du onzième alinéa, à la première phrase de l’avant-dernier alinéa, deux fois, et au dernier alinéa, deux fois, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

j) À la fin de l’intitulé de la section 1 du chapitre II, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

k) À l’article L. 722-1, aux articles L. 722-2 et L. 722-3, à l’article L. 722-3-1, deux fois, à la première phrase du premier alinéa, deux fois, et au second alinéa de l’article L. 722-4 et aux première et deuxième phrases de l’article L. 722-5, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

l) À la fin de l’intitulé de la section 2 du chapitre II, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

m) Aux première et seconde phrases du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 722-6, aux premier, deux fois, et second, deux fois, alinéas de l’article L. 722-6-1, au premier alinéa de l’article L. 722-6-2, aux première et deuxième phrases de l’article L. 722-6-3, aux premier et dernier, deux fois, alinéas de l’article L. 722-7, au premier alinéa de l’article L. 722-8, à la première phrase du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 722-9, à l’article L. 722-10, au premier alinéa, deux fois, et à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 722-11, au premier alinéa de l’article L. 722-12, à l’article L. 722-13, aux premier et second alinéas de l’article L. 722-14 et aux articles L. 722-15 et L. 722-16, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

n) Aux premier et second alinéas de l’article L. 722-17, dans sa rédaction résultant de l’article 95 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

o) Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 722-18, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 722-19, au premier alinéa de l’article L. 722-20, au premier alinéa et aux 1° et 2° du I de l’article L. 722-21, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

p) À la fin de l’intitulé du chapitre III, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

q) Au premier alinéa et au 2° de l’article L. 723-1, aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article L. 723-3, au premier alinéa, au 1°, deux fois, et au dernier alinéa, deux fois, de l’article L. 723-4, au premier alinéa, deux fois, et à la première phrase du second alinéa de l’article L. 723-7, aux premiers alinéas des articles L. 723-9, L. 723-10 et L. 723-11 et à l’article L. 723-12, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

r) À la fin de l’intitulé du chapitre IV, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

s) À l’article L. 724-1, à l’article L. 724-1-1, deux fois, au 3°, deux fois, de l’article L. 724-2, à l’article L. 724-3, au premier alinéa de l’article L. 724-3-1, à la première phrase, deux fois, du premier alinéa, au deuxième alinéa, au 1°, aux première et deuxième phrases du neuvième alinéa et au douzième alinéa de l’article L. 724-3-3, aux première, deux fois, et dernière phrases de l’article L. 724-4 et à l’article L. 724-7, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

4° Le titre III est ainsi modifié :

a) À l’intitulé, le mot : « commerciales » est remplacé par le mot : « économiques » ;

b) À l’article L. 731-2, au premier alinéa de l’article L. 731-4 et aux articles L. 732-1 et L. 732-2, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

c) L’article L. 732-3 est ainsi modifié :

– à la première phrase du premier alinéa, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

– le second alinéa est ainsi rédigé :

« Le greffe des tribunaux mixtes des affaires économiques est assuré par un greffier de tribunal des affaires économiques. » ;

d) À l’article L. 732-4, deux fois, à la première phrase de l’article L. 732-5, à l’article L. 732-6, deux fois, et à la deuxième phrase de l’article L. 732-7, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

5° Le titre IV est ainsi modifié :

a) À la fin de l’intitulé, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

b) Au premier alinéa de l’article L. 741-1, au premier alinéa, deux fois, à la première phrase du sixième alinéa et au dernier alinéa de l’article L. 741-2, au premier alinéa de l’article L. 742-1 et à l’article L. 742-2, à la première phrase de l’article L. 743-1, au premier alinéa de l’article L. 743-2, à la fin de la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 743-3, au premier alinéa, trois fois, de l’article L. 743-4, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 743-5, à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 743-6, au premier alinéa de l’article L. 743-7, aux premier et second alinéas de l’article L. 743-8, à la première phrase, deux fois, de l’article L. 743-12 et aux première, deux fois, et seconde, trois fois, phrases du premier alinéa, aux première, deux fois, et seconde phrases du deuxième alinéa et au dernier alinéa, trois fois, de l’article L. 743-12-1, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

c) Après le mot : « tarification », la fin de l’intitulé de la section 3 du chapitre III est supprimée ;

d) Au premier alinéa de l’article L. 743-13, à la première phrase de l’article L. 743-14, au premier alinéa et à la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 743-15, à l’article L. 744-1, trois fois, à l’article L. 744-2, quatre fois, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques ».

IV. – À l’article L. 351-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « de grande instance » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques ».

V. – À la fin du I de l’article L. 145 A du livre des procédures fiscales, les mots : « et au premier alinéa de l’article L. 611-2-1 du code précité » sont supprimés.

VI. – À la fin de la dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 2315-74 et au premier alinéa de l’article L. 7322-5 du code du travail, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques ».

VII. – Le livre II du code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° À la fin du premier alinéa de l’article L. 215-1, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » ;

2° À la fin du 1° de l’article L. 261-1, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques ». – (Adopté.)

Article 19 ter
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Article 20 A

Article 19 quater

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À l’article L. 145-56, les mots : « de compétence et » sont supprimés ;

2° Après l’article L. 622-14, il est inséré un article L. 622-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 622-14-1. – Le tribunal statue sur toute contestation relative au bail des immeubles donnés à bail au débiteur. » ;

3° Après l’article L. 721-3-1, il est inséré un article L. 721-3-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 721-3-2. – Les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux baux commerciaux, aux baux professionnels et aux conventions d’occupation précaire conclus entre les personnes mentionnées à l’article L. 721-3. » – (Adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AUX JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

Chapitre Ier

Alléger la charge des juridictions administratives

Article 19 quater
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Article 21

Article 20 A

Avant l’article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires, il est inséré un article 54 A ainsi rédigé :

« Art. 54 A. – La consultation juridique consiste en une prestation intellectuelle personnalisée tendant à fournir un avis ou un conseil sur une question de droit en vue d’une éventuelle prise de décision. » – (Adopté.)

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Article 20 A
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Article 22 bis

Article 21

I. – Le chapitre II du titre II du livre II du code de justice administrative est ainsi modifié :

1° L’article L. 222-2-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 222-2-1. – Le président du tribunal administratif peut désigner des magistrats administratifs honoraires choisis parmi les magistrats inscrits, pour une durée de trois ans renouvelable, sur une liste arrêtée par le vice-président du Conseil d’État, pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale dans la limite d’un magistrat honoraire par formation de jugement.

« Les magistrats honoraires peuvent également statuer :

« 1° Sur les recours relevant de la compétence du juge statuant seul lorsqu’il ne statue pas en premier et dernier ressort ;

« 2° Sur les référés présentés sur le fondement du livre V ;

« 3° Sur les recours en annulation dont le tribunal est saisi en application des III et IV de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. » ;

2° La section 2 est complétée par des articles L. 222-2-2 et L. 222-2-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 222-2-2. – Les magistrats honoraires mentionnés à l’article L. 222-2-1 sont soumis aux dispositions des articles L. 231-1 à L. 231-9. Pour l’application de l’article L. 231-4-1, ils remettent leur déclaration d’intérêts aux présidents des juridictions où ils exercent leurs fonctions. Ils ne peuvent ni être membres du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel ni participer à la désignation des membres de cette instance.

« Les magistrats honoraires peuvent exercer une activité professionnelle concomitamment à leurs fonctions juridictionnelles, sous réserve qu’elle ne soit pas de nature à porter atteinte à la dignité ou à l’indépendance de leurs fonctions. Toutefois, ils ne peuvent exercer aucune activité d’agent public, à l’exception de celles de professeur des universités ou de maître de conférences.

« Dans le ressort de la juridiction où ils sont désignés, les magistrats honoraires ne peuvent ni exercer une profession libérale juridique et judiciaire soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ni être salariés d’un membre d’une telle profession, ni effectuer aucun acte d’une telle profession.

« Les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ne peuvent ni mentionner cette qualité ni en faire état dans les documents relatifs à l’exercice de leur activité professionnelle, tant pendant la durée de l’exercice de leurs fonctions qu’à l’issue de celles-ci.

« Le pouvoir disciplinaire à l’égard des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles est mis en œuvre dans les conditions définies au chapitre VI du titre III du présent livre. Outre le blâme et l’avertissement prévus à l’article L. 236-1, peut seule être prononcée, à titre de sanction disciplinaire, la cessation des fonctions.

« Les magistrats honoraires ne peuvent exercer de fonctions juridictionnelles au-delà de l’âge de soixante-quinze ans. Il ne peut être mis fin à leurs fonctions qu’à leur demande ou pour un motif disciplinaire.

« Les activités accomplies en application du présent article sont indemnisées dans des conditions prévues par décret.

« Art. L. 222-2-3. – Sur leur demande, le président du tribunal administratif peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer des fonctions d’aide à la décision au profit des magistrats. L’exercice de ces fonctions est incompatible avec celui des activités juridictionnelles prévues au même article L. 222-2-1.

« Les magistrats honoraires exerçant les fonctions mentionnées au premier alinéa du présent article ne peuvent ni exercer de profession libérale juridique ou judiciaire soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ni être salariés d’un membre d’une telle profession, ni effectuer aucun acte d’une telle profession dans le ressort de la juridiction à laquelle ils sont affectés.

« Les magistrats honoraires exerçant les fonctions mentionnées au même premier alinéa sont tenus au secret professionnel. Ils ne peuvent exercer ces fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans.

« Les activités accomplies en application du présent article sont indemnisées dans des conditions prévues par décret. » ;

3° La section 3 est ainsi modifiée :

a) L’article L. 222-5 est ainsi rétabli :

« Art. L. 222-5. – Le président de la cour administrative d’appel peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale ou pour statuer sur les référés présentés sur le fondement du livre V.

« L’article L. 222-2-2 est applicable. » ;

b) Il est ajouté un article L. 222-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-6. – Le président de la cour administrative d’appel peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer des fonctions d’aide à la décision au profit des magistrats.

« L’article L. 222-2-3 est applicable. »

II. – (Non modifié)

Mme la présidente. L’amendement n° 50, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Comme nous le précisons dans l’objet de cet amendement, l’article 21 permet à un chef de juridiction de confier à un magistrat honoraire des fonctions d’aide à la décision, qui, en principe, se caractérisent par le fait que leurs titulaires n’ont pas la qualité de magistrat. Nous partageons l’avis des professionnels qui considèrent que cette possibilité serait « symboliquement désastreuse pour des magistrats par nature très expérimentés qui se trouveraient ainsi, dans le cadre de l’honorariat, dans une situation d’infériorité par rapport à leurs collègues en activité ».

L’objectif est clair pour le Gouvernement mais aussi pour la majorité sénatoriale qui accepte cette disposition : faire des économies. Faire partager l’expérience des plus anciens est une bonne chose, mais cela ne doit pas se substituer au recrutement de nouveaux magistrats, dans une justice administrative qui est sous grande pression. À nos yeux, cette disposition est un pis-aller et nous ne l’acceptons pas.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la possibilité pour des magistrats honoraires d’assurer des fonctions d’aide à la décision auprès d’autres magistrats. Or cette possibilité est déjà prévue pour les magistrats honoraires de l’ordre judiciaire à l’article 40 de la loi organique du 8 août 2016. Par ailleurs, la commission a précisé, comme à l’article 40, que ce n’est qu’à leur demande que les magistrats honoraires des juridictions administratives pourront être désignés pour assurer ces fonctions.

Par conséquent, l’avis est avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable également. Pour exercer de telles fonctions, des magistrats de cet acabit sont extrêmement précieux.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 50.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 86 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Mézard, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Alinéas 11 et 17

Compléter ces alinéas par les mots : en France et à l’étranger

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Selon l’article 71 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, « tout fonctionnaire admis à la retraite est autorisé à se prévaloir de l’honorariat dans son grade ou son emploi à condition d’avoir accompli vingt ans au moins de services publics ». L’étude d’impact établit le nombre de magistrats concernés à 73.

Le recours à ces magistrats a progressivement été étendu à partir de 2006, d’abord pour les litiges relatifs aux arrêtés de reconduite à la frontière. Le CESEDA, ou code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, permet qu’ils statuent seuls sur les recours formés par les demandeurs d’asile placés en rétention ou qu’ils soient rattachés à certaines juridictions spécialisées, comme la CNDA, la Cour nationale du droit d’asile. Cette faculté a par ailleurs été considérablement ouverte dans l’ordre judiciaire par la loi organique du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature.

Dans la continuité des évolutions antérieures, ce projet de loi prévoit donc d’étendre le recours à ces magistrats dans l’ordre administratif.

En parallèle, les règles de déontologie s’imposant aux magistrats honoraires voulant exercer comme avocat relèvent du « droit mou » de la charte de déontologie de la juridiction administrative du 14 mars 2017. Compte tenu des nouvelles fonctions juridictionnelles qu’il est prévu de leur confier et qui leur permettront de « garder un pied » dans les juridictions, il convient de prévenir au maximum les risques de conflits d’intérêts pouvant survenir à cette occasion, en étendant l’encadrement du cumul d’activité juridique et judiciaire en France et à l’étranger. En effet, il n’est pas rare que d’anciens magistrats administratifs ou membres du Conseil d’État soient recrutés par des cabinets étrangers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement vise à interdire aux magistrats honoraires d’exercer une profession libérale juridique et judiciaire soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, d’être salariés d’un membre d’une telle profession, ou d’effectuer un acte d’une telle profession à l’étranger.

L’article 18 ne prévoit de telles incompatibilités qu’en France. Cela nous paraît suffisant, d’autant qu’une telle interdiction pour des activités menées à l’étranger ne nous semble pas exister pour les magistrats administratifs en fonction ou pour les magistrats judiciaires en fonction ou honoraires.

S’il existe des risques ponctuels de conflits d’intérêts, les règles de déport existantes devraient suffire à les régler.

Par conséquent, l’avis est défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis que M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Requier. Je retire cet amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 86 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 21.

(Larticle 21 est adopté.)

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Article 21
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Article 23

Article 22 bis

(Supprimé)

Article 22 bis
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Article 24

Article 23

(Non modifié)

I et II. – (Non modifiés)

III. – La première phrase de l’article L. 233-8 du code de justice administrative est ainsi modifiée :

1° Au début, les mots : « Les personnes visées à l’article précédent » sont remplacés par les mots : « Les magistrats maintenus en activité en application de l’article L. 233-7 » ;

2° Les mots : « qu’elles détenaient lorsqu’elles » sont remplacés par les mots : « qu’ils détenaient lorsqu’ils ».

IV. – L’article 1er de la loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 relative à la limite d’âge et aux modalités de recrutement de certains fonctionnaires civils de l’État est ainsi modifié :

1° Au début, les mots : « Les membres du Conseil d’État, » sont supprimés ;

2° Les mots : « de conseiller d’État, » sont supprimés. – (Adopté.)

Chapitre II

Renforcer l’efficacité de la justice administrative

Article 23
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Article 25

Article 24

(Non modifié)

L’article L. 511-2 du code de justice administrative est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le troisième alinéa est applicable aux référés en matière de passation de contrats et marchés prévus au chapitre Ier du titre V du présent livre. » – (Adopté.)

Article 24
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Article 25 bis A

Article 25

I. – Le livre IX du code de justice administrative est ainsi modifié :

1° L’article L. 911-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure. » ;

2° L’article L. 911-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La juridiction peut également prescrire d’office l’intervention de cette nouvelle décision. » ;

3° Au début de l’article L. 911-3, les mots : « Saisie de conclusions en ce sens, » sont supprimés ;

4° L’article L. 911-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 911-4. – En cas d’inexécution d’un jugement ou d’un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d’en assurer l’exécution.

« Si le jugement ou l’arrêt dont l’exécution est demandée n’a pas défini les mesures d’exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d’exécution et prononcer une astreinte. » ;

5° Les deux premiers alinéas de l’article L. 911-5 sont ainsi rédigés :

« En cas d’inexécution d’une de ses décisions ou d’une décision rendue par une juridiction administrative autre qu’un tribunal administratif ou une cour administrative d’appel, le Conseil d’État peut, même d’office, lorsque cette décision n’a pas défini les mesures d’exécution, procéder à cette définition, fixer un délai d’exécution et prononcer une astreinte contre les personnes morales en cause.

« Lorsqu’une astreinte a déjà été prononcée en application de l’article L. 911-3, il n’est pas prononcé de nouvelle astreinte. »

II. – Après l’article L. 2333-87-8 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2333-87-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2333-87-8-1. – Lorsque sa décision implique nécessairement que la collectivité territoriale, l’établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte concerné prenne une mesure d’exécution, la commission du contentieux du stationnement payant peut, même d’office, prononcer à son encontre une injonction, assortie, le cas échéant, d’une astreinte. » – (Adopté.)

Article 25
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Articles 25 bis à 25 quater

Article 25 bis A

(Non modifié)

Le code de justice administrative est ainsi modifié :

1° L’article L. 611-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 611-1. – Les exigences de la contradiction mentionnées à l’article L. 5 du présent code sont adaptées à celles de la protection du secret des affaires répondant aux conditions prévues au chapitre Ier du titre V du livre Ier du code de commerce.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » ;

2° L’article L. 77-13-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 77-13-1. – Lorsque les actions tendant à prévenir, faire cesser ou réparer une atteinte portée au secret des affaires relèvent de la juridiction administrative, le juge peut mettre en œuvre les mesures prévues au chapitre II du titre V du livre Ier du code de commerce, sous réserve des adaptations réglementaires nécessaires.

« Les décisions rendues en référé en application du présent article sont rendues en dernier ressort. » ;

3° Les articles L. 775-2 et L. 77-13-2 sont abrogés. – (Adopté.)

Article 25 bis A
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Article 26

Articles 25 bis à 25 quater

(Suppression maintenue)

TITRE IV

DISPOSITIONS PORTANT SIMPLIFICATION ET RENFORCEMENT DE L’EFFICACITÉ DE LA PROCÉDURE PÉNALE

Chapitre Ier

Dispositions relatives au parcours judiciaire des victimes

Articles 25 bis à 25 quater
Dossier législatif : projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
Article 26 bis A

Article 26

I AA, I AB et I A. – (Supprimés)

I. – Après l’article 15-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-1 ainsi rédigé :

« Art. 15-3-1. – Lorsque, dans les cas et selon les modalités prévues par décret, la plainte de la victime est adressée par voie électronique, le procès-verbal de réception de plainte est établi selon les modalités prévues à l’article 801-1 et le récépissé ainsi que, le cas échéant, la copie du procès-verbal peuvent être adressés, selon les modalités prévues par décret, à la victime dans les meilleurs délais.

« Le lieu de traitement automatisé des informations nominatives relatives aux plaintes adressées conformément au présent article est considéré comme le lieu de constatation de l’infraction. Il en est de même s’agissant des traitements des informations relatives au signalement des infractions.

« Au moment du dépôt de plainte par voie électronique, les poursuites encourues en cas de dénonciation calomnieuse sont expressément mentionnées.

« Les plaintes relatives à des crimes ou à des délits contre les personnes mentionnés au livre II du code pénal ne peuvent être adressées par voie électronique.

« La plainte par voie électronique ne peut être imposée à la victime. »

II et III. – (Non modifiés)

III bis et IV. – (Supprimés)

V à VII. – (Non modifiés)

Mme la présidente. L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mmes Artigalas et Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal, Lalande et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny et Mme Monier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Si la plainte adressée par voie électronique concerne des infractions semblant constitutives des infractions listées aux 3° à 13° de l’article 706–47 du code de procédure pénale ou du délit de harcèlement mentionné à l’article 222-33-2 du code pénal, l’instruction doit garantir au plus tôt l’oralité du témoignage de la victime. »

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise à garantir le maintien de l’oralité lors de la révélation des faits de violences à caractère sexuel. Cette oralité est indispensable pour poursuivre le mouvement de libération de la parole des victimes, mais également parce que les témoignages de vive voix, dans la mesure du possible filmés, constituent des éléments de preuve cruciaux dans le cadre de la procédure d’instruction, puis du jugement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Le texte prévoit déjà que sont exclus des dépôts de plaintes en ligne les agressions contre les personnes. Par conséquent, l’amendement de Laurence Rossignol est satisfait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, mais pour des raisons différentes. Cela relève des modalités d’application du dépôt de plainte en ligne, qui figureront dans les dispositions réglementaires.

Mme la présidente. Madame Meunier, l’amendement n° 6 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Michelle Meunier. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 6 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 7 rectifié bis est présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mmes Artigalas et Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal, Lalande et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny, Mme Monier et M. Jomier.

L’amendement n° 97 est présenté par Mme Billon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 15-3-… – Les victimes mineures comme majeures des infractions listées aux articles 222-1 à 222-5, 222-9 à 222-14, 222-22 à 222-33 et 227-25 à 227-27-2-1 du code pénal ont le droit, si elles en manifestent la volonté, de témoigner des faits subis dans un local leur garantissant intimité et discrétion. »

La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié bis.

Mme Michelle Meunier. Il s’agit de garantir aux victimes d’infractions sexuelles le droit à l’intimité lorsqu’elles viennent témoigner de l’agression subie. En effet, les témoignages de victimes ayant souffert d’avoir dénoncé leur agression en présence de tiers, voire à l’accueil du commissariat ou de la gendarmerie sont nombreux. Ce traumatisme s’ajoute à celui qu’elles ont subi lors de l’agression sexuelle ou du viol, nuit au processus de reconstruction des victimes et crée chez elles un fort sentiment d’injustice.

Cet amendement vise donc à permettre aux victimes de témoigner dans un lieu apte à recevoir leur parole.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 97 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 7 rectifié bis ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Sur le fond, nous partageons l’objectif exprimé par les signataires de cet amendement. Reste que cela revient à faire figurer dans la loi un vœu sympathique, mais sans effet.

Les conditions matérielles dans les commissariats, notamment pour accueillir les victimes, sont ce qu’elles sont. L’enjeu, c’est plutôt d’améliorer ces locaux et de procéder aux aménagements nécessaires, mais cela relève sans doute d’un autre véhicule législatif.

Il s’agit donc non de contester le fond de cet amendement, mais d’être réaliste quant à l’opportunité et à l’efficacité d’un tel amendement dans le présent projet de loi.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement. Toutefois, madame la garde des sceaux, il est impérieux que les commissariats disposent de lieux dédiés, qui existent déjà pour partie, ou que ces lieux soient améliorés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je partage pleinement la motivation exprimée par M. le rapporteur et son avis sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Je ne suis pas convaincu par les explications de M. le rapporteur et de Mme la garde des sceaux.

Il s’agit d’une question extrêmement sensible.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Bien sûr !

M. Jean-Pierre Sueur. Lorsqu’une personne est victime de viol et qu’elle doit aller faire une déclaration au commissariat ou à la gendarmerie, la situation est très traumatisante. Le fait d’inscrire dans la loi que l’intimité de la personne doit être respectée dans les conditions dans lesquelles elle est accueillie ne me paraît pas superfétatoire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Mais non !

M. Jean-Pierre Sueur. Certes, on peut dire que l’on n’y peut rien, que les locaux sont comme ils sont, etc. Dans ce cas-là, on ne fait rien. Toutefois, le fait de l’inscrire dans la loi sera un argument dans un certain nombre de situations et une incitation à faire en sorte qu’il y ait une salle, un lieu où l’intimité puisse être respectée.

Il me paraîtrait assez léger ou assez irrespectueux que, sur cette question-là, on se satisfasse de réponses de circonstance en affirmant que cela ne constitue pas un véritable sujet. À mon sens, c’en est un et, madame la garde des sceaux, je pense que vous le penserez aussi.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. Je me range à ce que vient de dire Jean-Pierre Sueur. Dans de nombreux endroits, en France, un certain nombre de gendarmeries ont été refaites à neuf avec l’argent des collectivités et celui de l’État. Lorsque l’on traverse le pays, on s’aperçoit que c’est de mieux en mieux, même si, dans certaines villes, des commissariats posent problème.

Il est vrai que le manque d’intimité est terrible. Par conséquent, inscrire cette disposition dans la loi permettra de faire avancer les choses et poussera le Gouvernement – s’il en a les moyens, j’espère qu’il le fera – à améliorer les locaux des commissariats.

Pour ma part, je voterai cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je souhaite répondre à MM. Sueur et Fouché. Évidemment, il ne s’agit pas de notre part d’un manque de respect à l’égard des victimes ni même d’une façon de considérer, d’une manière un peu légère et sans fondement, qu’il faut prendre les installations physiques telles qu’elles sont.

Nous soulignons le fait que ces dispositions ne sont pas de nature législative, mais relèvent de textes réglementaires d’application. D’ailleurs, l’article D1–7 du code de procédure pénale précise que l’« audition de la victime a lieu dans des locaux conçus ou adaptés à sa situation ». Bien évidemment, cela ne signifie pas pour autant qu’il faille s’en contenter.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 8 rectifié bis est présenté par Mmes Rossignol et Lepage, M. Assouline, Mmes Lubin et Meunier, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Féret, M. P. Joly, Mmes Artigalas et Perol-Dumont, MM. Raynal, Duran et Lurel, Mme Préville, M. Manable, Mmes Espagnac et Blondin, MM. Temal, Lalande et Kerrouche, Mme Conway-Mouret, M. Daudigny, Mme Monier et M. Jomier.

L’amendement n° 98 est présenté par Mme Billon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 15-3-… – Lorsqu’une victime, majeure ou mineure, de faits semblant constitutifs des infractions listées aux articles 222-1 à 222-5, 222-9 à 222-14, 222-22 à 222-33 et 227-25 à 227-27-2-1 du code pénal, dénonce la ou les infractions devant les autorités judiciaires, la prise d’une plainte est obligatoire sauf refus express de la victime. »

La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié bis.

Mme Angèle Préville. De très nombreux témoignages de victimes d’infractions sexuelles attestent que celles-ci se voient refuser de déposer plainte lors de la dénonciation des faits. C’est une dure réalité. Récemment, dans mon département, ce genre de situation a été porté à ma connaissance par la victime elle-même. Or c’est déjà si difficile et si compliqué de venir déposer plainte !

Une fois amendé, cet article renforcera le droit au dépôt de plainte, en prévoyant que, sauf refus express de la victime, la prise de plainte est obligatoire lors de la dénonciation d’infractions à caractère sexuel.

Mme la présidente. L’amendement n° 98 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 8 rectifié bis ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le code de procédure pénale dispose déjà, à l’article 15–3, que la police judiciaire qui recueille le dépôt de plainte « est tenue de recevoir la plainte des victimes d’infractions » : il s’agit d’une obligation qui ne peut en aucun cas être refusée.

En revanche, et l’on peut entendre, une difficulté locale peut surgir, ce qui est tout à fait regrettable. Dans ces conditions, il revient à l’administration et au garde des sceaux de rappeler les dispositions de l’article 15–3.

C’est la raison pour laquelle la commission considère que cet amendement est satisfait par le droit positif. Par conséquent, elle en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

Si une difficulté ponctuelle surgit – nous ne nions pas que cela puisse arriver –, la procédure consiste à écrire au procureur de la République, qui demande immédiatement au commissaire de police de prendre en charge cette plainte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Je souhaite insister. Lorsque l’on essuie un refus de dépôt de plainte, une forme d’intimidation entre en jeu – c’est plus vrai pour la gendarmerie que pour la police judiciaire – et il est très difficile pour la victime de revenir déposer plainte. Vous vous rendez bien compte qu’il est extrêmement compliqué pour une femme à qui l’on a dit : « C’est votre parole contre la sienne, il vaut mieux pas dépoter déposer plainte », de se présenter de nouveau et de s’imposer pour que sa plainte soit reçue.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. On peut entendre l’argument de Mme la garde des sceaux sur la loi et la procédure réglementaire. Néanmoins, les cas existent : ils n’ont pas été inventés, nous en sommes trop souvent saisis, hélas.

Ne conviendrait-il pas au moins que, sur les dispositions prévues à cet amendement comme à l’amendement précédent, une circulaire soit rédigée par l’exécutif rappelant, d’une part, les conditions de respect et, d’autre part, l’obligation prévue par la procédure pénale d’enregistrer le dépôt de plainte ? Cela n’exclut pas que le procureur de la République puisse être saisi, mais ce serait de bon aloi, car il est étonnant que ce genre de témoignage se répète de façon récurrente, paradoxalement moins en ville que dans les zones périurbaines, voire à la campagne.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 8 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 26.

(Larticle 26 est adopté.)

Article 26
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Article 26 bis B

Article 26 bis A

Le 3° du IV de l’article 707 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« 3° D’être informée, si elle le souhaite, des modalités d’exécution d’une peine privative de liberté, notamment les conditions de sortie d’incarcération, dans les cas et conditions prévus au présent code ; ». – (Adopté.)

Article 26 bis A
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Articles 26 bis et 26 ter

Article 26 bis B

(Non modifié)

Au premier alinéa du I de l’article 15-4 du code de procédure pénale, après le mot : « établit », sont insérés les mots : « ou dans lesquels il intervient ». – (Adopté.)

Article 26 bis B
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Article 27

Articles 26 bis et 26 ter

(Suppression maintenue)

Chapitre II

Dispositions relatives aux phases d’enquête et d’instruction

Section 1

Dispositions communes aux enquêtes et à l’instruction

Sous-section 1

Dispositions relatives au recours aux interceptions par la voie des communications électroniques, à la géolocalisation, à l’enquête sous pseudonyme et aux techniques spéciales d’enquête

Articles 26 bis et 26 ter
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Article 28

Article 27

I A. – (Supprimé)

I. – Après l’article 60-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 60-4 ainsi rédigé :

« Art. 60-4. – Si les nécessités de l’enquête de flagrance portant sur un crime ou sur un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement l’exigent, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques selon les modalités prévues au second alinéa de l’article 100 et aux articles 100-1 et 100-3 à 100-8, pour une durée maximale d’un mois, renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de durée. L’ordonnance est motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires. Ces opérations sont faites sous le contrôle du juge des libertés et de la détention.

« En cas de délit puni d’une peine d’emprisonnement commis par la voie des communications électroniques sur la ligne de la victime, l’interception peut également être autorisée, selon les mêmes modalités, si elle intervient sur cette ligne à la demande de cette dernière.

« Pour l’application des articles 100-3 à 100-5 et 100-8, les attributions confiées au juge d’instruction ou à l’officier de police judiciaire commis par lui sont exercées par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire requis par ce magistrat.

« Le juge des libertés et de la détention qui a autorisé l’interception est informé sans délai par le procureur de la République des actes accomplis en application du troisième alinéa du présent article. Les procès-verbaux dressés en exécution de son autorisation lui sont communiqués. S’il estime que les opérations n’ont pas été réalisées conformément à son autorisation ou que les dispositions applicables du présent code n’ont pas été respectées, il ordonne la destruction des procès-verbaux et du support des enregistrements effectués. Il statue par une ordonnance motivée qu’il notifie au procureur de la République qui peut former appel devant le président de la chambre de l’instruction dans un délai de dix jours à compter de la notification. »

bis. – (Supprimé)

II. – Après l’article 77-1-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 77-1-4 ainsi rédigé :

« Art. 77-1-4. – Si les nécessités de l’enquête préliminaire portant sur un crime ou sur un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement l’exigent, l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques peuvent être autorisées conformément à l’article 60-4. »

III. – L’article 100 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de délit puni d’une peine d’emprisonnement commis par la voie des communications électroniques sur la ligne de la victime, l’interception peut également être autorisée, selon les mêmes modalités, si elle intervient sur cette ligne à la demande de cette dernière. »

III bis, IV, IV bis et IV ter. – (Non modifiés)

V. – L’article 230-32 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le 1° est ainsi rédigé :

« 1° D’une enquête ou d’une instruction portant sur un crime ou sur un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement ; »

2° Les 3° et 4° deviennent les 2° et 3°.

VI. – L’article 230-33 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le 1° est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « huit » ;

b) À la seconde phrase, les mots : « d’un mois » sont remplacés par les mots : « de quinze jours » ;

2° Après le 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette opération ne peut être renouvelée que dans les mêmes conditions de forme et de durée, sans que la durée totale de l’opération puisse excéder deux ans. » ;

3° La première phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « et motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires ».

VI bis. – (Non modifié)

VI ter. – Le dernier alinéa de l’article 230-35 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Le juge des libertés et de la détention confirme cette autorisation, par une ordonnance motivée, dans un délai maximal de vingt-quatre heures. À défaut, il est mis fin à l’opération, les données ou correspondances recueillies sont placées sous scellés fermés et elles ne peuvent pas être exploitées ou utilisées dans la procédure. Le juge des libertés et de la détention peut également ordonner la destruction des procès-verbaux et du support des enregistrements effectués. Dans les cas prévus au premier alinéa du présent article, l’autorisation comporte l’énoncé des circonstances de fait établissant l’existence du risque imminent mentionné à ce même alinéa. »

VI quater. – Au dernier alinéa de l’article 709-1-3 du code de procédure pénale, les références : « aux 1° et 2° » sont remplacées par la référence : « au 1° ».

VII. – (Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 17 rectifié est présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal.

L’amendement n° 51 est présenté par Mmes Assassi, Benbassa et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

L’amendement n° 81 rectifié est présenté par M. Mézard, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Arnell, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié.

M. Maurice Antiste. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication permettent une intrusion sans commune mesure dans la vie privée du justiciable. Les mesures qu’elles permettent, extrêmement attentatoires au respect de la vie privée, sont autorisées avec beaucoup de précautions et ont commencé à être encadrées en France par la loi du 28 mars 2014.

Cette ingérence généralisée ne semble pas poursuivre un but nécessaire et légitime. Par ailleurs, l’article prévoit une nette extension des pouvoirs du parquet, ce qui fait craindre un cruel manque d’indépendance dans la tenue des enquêtes et la disparition, in fine, du juge d’instruction.

En effet, on observe une extension inquiétante des pouvoirs du parquet et des officiers de police judiciaire, les pouvoirs initialement dévolus au juge d’instruction étant étendus au procureur de la République.

Un tel article ne saurait être accepté ni même amendé.

Certains ont proposé de porter le seuil de trois ans à cinq ans pour que ces mesures ne s’appliquent légalement qu’aux crimes et délits punis d’une peine de cinq ans d’emprisonnement. Toutefois, au nom du principe de précaution, eu égard aux risques de dérives sécuritaires, nous demandons la suppression pure et simple de cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 51.

Mme Éliane Assassi. L’article 27 comporte des dispositions pénales qui, comme beaucoup d’autres dans ce texte, sont particulièrement régressives et portent gravement atteinte aux libertés publiques.

Nous regrettons que la navette parlementaire n’ait pas permis d’avancer sur ce point. La majorité sénatoriale, pourtant consciente des menaces potentielles contre les libertés individuelles, s’est obstinée dans la recherche d’un hypothétique compromis, lequel ne viendra pas.

Cet article étend le recours à la géolocalisation et aux interceptions par voie de communications électroniques aux enquêtes préliminaires et de flagrance pour les crimes et délits punis d’au moins trois ans d’emprisonnement.

Alors que l’opinion et les juristes s’inquiètent depuis des années de l’intrusion de Big Brother dans la justice, le Gouvernement propose, plutôt qu’une régulation, une extension considérable des méthodes évoquées à la quasi-totalité des crimes et délits.

Comme en première lecture, nous dénonçons l’évolution intrusive de la procédure pénale et des moyens de l’enquête.

On ne peut, au nom de la sécurité et de la justice, justifier une perpétuelle fuite en avant vers une remise en cause des libertés fondamentales.

Nous demandons donc la suppression de cet article, dont la conformité à la Constitution nous paraît du reste douteuse.

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 81 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces trois amendements visent à supprimer l’article 27. D’autres tendront ensuite à supprimer les articles 28 et 29.

Je rappelle que ces trois articles prévoient respectivement d’étendre le recours aux techniques d’interception et de géolocalisation, d’étendre le recours à l’enquête sous pseudonyme et d’étendre le recours aux techniques spéciales d’enquête. Voter ces amendements, c’est supprimer ces dispositifs.

La commission des lois n’a pas fait ces choix-là. Elle maintient ces dispositifs, considérant qu’ils ont leur utilité. Elle les a simplement encadrés, singulièrement le quantum des peines à partir duquel ils peuvent être appliqués, soit au moins cinq ans d’emprisonnement, comme je l’ai rappelé brièvement il y a quelques instants.

Dans ces conditions, nous avons émis un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements.

Je rappelle que les mesures que nous proposons résultent des propositions formulées dans le cadre des chantiers de la justice, qui ont eu lieu l’année dernière. Au fond, nous avons voulu simplifier et rapprocher les régimes d’utilisation de ces interceptions téléphoniques ou de la géolocalisation.

Il me semble en effet que rien ne justifie que les interceptions téléphoniques ne soient actuellement autorisées au cours d’une enquête que pour des faits de délinquance ou de criminalité organisée alors qu’elles sont très largement possibles à l’instruction pour toute infraction punie d’une peine de deux ans d’emprisonnement. Cette différence de champs d’application, selon le type de procédure, qu’il s’agisse de l’enquête ou de l’instruction, est propre aux écoutes et n’existe pas pour les autres mesures. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité procéder à une simplification.

En outre, les garanties qui sont prévues lors de l’enquête sont équivalentes à celles de l’instruction dès lors que, dans les deux cas, elles seront autorisées par un magistrat du siège, soit le juge d’instruction, soit le juge des libertés et de la détention.

Enfin, il nous semble que la seule différence qui soit justifiée, et qui demeure dans notre texte, c’est la durée des écoutes, laquelle varie selon que l’on soit dans le cadre d’une enquête ou dans le cadre d’une instruction.

Pour la géolocalisation, c’est pareil. Il nous a semblé que les différences de seuil de trois ans et de cinq ans, assortis d’exceptions, étaient très complexes et injustifiées. Je rappelle que les pouvoirs qui sont conférés au juge des libertés et de la détention sont renforcés puisqu’il pourra ordonner la destruction des procès-verbaux qui auront été recueillis lors d’écoutes illégales. Par ailleurs, le texte réduit la durée pendant laquelle la géolocalisation pourra être mise en œuvre sur seule autorisation du parquet.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié, 51 et 81 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 27, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

cinq

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Cet amendement vise à modifier le texte de la commission.

Je tiens à souligner que le texte de la commission est plus prudent en termes de libertés – cela a d’ailleurs été dit lors de la table ronde – que le texte issu de l’Assemblée nationale. Vous avez ainsi supprimé la procédure d’urgence, qui aurait permis la mise en place d’interceptions avec la seule autorisation préalable du procureur de la République et un contrôle a posteriori du juge des libertés et de la détention, l’obligation de motivation d’usage des écoutes téléphoniques par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires, l’amélioration du contrôle, ainsi que les limites du recours à la géolocalisation.

Toutefois, il faut être bien conscient que ces techniques sont très intrusives. Elles portent nécessairement atteinte à la vie privée. On peut comprendre que les enquêteurs aient envie de ne pas en être privés dans le cadre de leurs recherches. Pour notre part, nous pensons que l’atteinte à la vie privée est si grave que leur utilisation doit être réservée aux crimes et délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée de cinq ans au moins, comme l’avaient d’ailleurs proposé les rapporteurs dans le cadre de vos chantiers de la justice, MM. Natali et Beaume, si mes souvenirs sont exacts, madame la ministre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cela m’ennuie toujours d’être désagréable avec notre collègue Jacques Bigot, mais la commission a émis un avis défavorable sur son amendement, et je vais m’en expliquer.

En première lecture, le Sénat avait effectivement retenu le seuil de trois ans d’emprisonnement, et non de cinq ans, comme le proposent les auteurs de l’amendement, afin que les techniques de géolocalisation puissent être utilisées dans le cadre d’affaires d’évasion. Je parle bien d’évasions. Il nous semble en effet utile que la géolocalisation puisse être utilisée en pareille circonstance. Nous avions également considéré que cette technique n’impliquait pas le même degré d’intrusion dans la vie privée que d’autres techniques d’enquête et que le seuil de trois ans était, de ce fait, parfaitement acceptable.

En contrepartie, nous avions demandé que l’autorisation de recourir à la géolocalisation soit motivée et renouvelée tous les quinze jours, et non tous les mois, par le juge des libertés et de la détention afin d’assurer un contrôle plus fréquent de cette mesure.

C’est la raison pour laquelle la commission a proposé de conserver ce dispositif en nouvelle lecture. Nous prions donc notre collègue Jacques Bigot de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, nous émettrons un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Défavorable également.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le rapporteur, les dispositions que vous venez d’évoquer – le renouvellement tous les quinze jours de l’autorisation de recourir à la géolocalisation et le recours au juge des libertés et de la détention figurent donc dans le texte de l’Assemblée nationale ? Elles n’y sont pas inscrites. Vous évoquez en fait les mesures que le Sénat aurait souhaité adopter pour compenser le passage de cinq à trois ans. Nous sommes d’accord. Malheureusement, cette bonne intention, que je salue, n’a pas été prise en compte et ne figurera donc pas dans le texte de la loi.

Aussi, je reste pour ma part sceptique. J’avais été très attentif à ce que vous aviez dit, messieurs les rapporteurs, en première lecture et aux véritables interrogations dont vous nous aviez fait part sur ce sujet. Je ne vous le reproche pas, je crois que ces interrogations étaient justifiées.

Depuis quelques années, nous avons adopté de nombreuses dispositions sur le recours aux interceptions de sécurité et à la géolocalisation. Ces réactions étaient nécessaires, bien entendu, face aux attentats. Le champ de recours à ces techniques intrusives et qui portent atteinte à la vie privée a été très largement étendu. Je ne dis pas que nous avons eu tort. J’ai moi-même été rapporteur d’un certain nombre de ces mesures, et je les ai soutenues alors qu’on nous accusait d’être liberticides, car j’ai considéré qu’il fallait les prendre pour lutter contre le terrorisme, qui est une horreur.

Nous faisons face à un dilemme, c’est vrai. Je suis toutefois réticent à l’idée de continuer à aller dans ce sens, car cela finit par poser un véritable problème pour le Sénat, qui est défenseur des libertés.

Je me satisferai donc, comme le propose très sagement notre collègue Jacques Bigot, des cinq ans. Je ne pense pas qu’il soit utile d’en faire plus en l’état actuel des choses.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 27.

(Larticle 27 est adopté.)

Article 27
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Article 29

Article 28

I. – Le titre IV du livre Ier du code de procédure pénale est complété par un chapitre VII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII

« De lenquête sous pseudonyme

« Art. 230-46. – Aux seules fins de constater les crimes et les délits punis d’une peine d’au moins trois ans d’emprisonnement commis par un moyen de communication électronique, et lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction le justifient, les officiers ou agents de police judiciaire agissant au cours de l’enquête ou sur commission rogatoire peuvent, s’ils sont affectés dans un service spécialisé et spécialement habilités à cette fin dans des conditions précisées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de l’intérieur, procéder sous pseudonyme aux actes suivants sans en être pénalement responsables :

« 1° Participer à des échanges électroniques, y compris avec les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions ;

« 2° Extraire ou conserver par ce moyen les données sur les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions et tout élément de preuve ;

« 3° Après autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction saisi des faits, acquérir tout contenu, produit, substance, prélèvement ou service, y compris illicites, ou transmettre en réponse à une demande expresse des contenus illicites.

« À peine de nullité, l’autorisation prévue au 3° est écrite et motivée.

« À peine de nullité, les actes mentionnés au présent article ne peuvent constituer une provocation ou une incitation à commettre une infraction et ne peuvent recourir à des procédés frauduleux ou à des stratagèmes de nature à déterminer des agissements délictueux.

« Les actes mentionnés au présent article s’effectuent sous le contrôle du procureur de la République ou du juge d’instruction. »

II. – (Non modifié)

III. – Sont abrogés :

1° Les articles 706-2-2, 706-2-3, 706-35-1 et 706-47-3 du code de procédure pénale ;

2° La section 2 bis du chapitre II du titre XXV du livre IV du même code.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 18 rectifié est présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal.

L’amendement n° 52 est présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

L’amendement n° 82 rectifié est présenté par M. Mézard, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Arnell, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié.

M. Maurice Antiste. Cet article prévoit la généralisation de l’enquête sous pseudonyme à l’ensemble des crimes et délits passibles d’une peine égale ou supérieure à trois ans d’emprisonnement. Il étend la possibilité pour les cyberpatrouilles de réaliser des enquêtes sous pseudonyme.

Dans le texte initialement présenté par le Gouvernement, ces enquêtes devaient être ouvertes pour tous les crimes et délits. La condition des trois ans d’emprisonnement, introduite lors des travaux au Sénat, vient un peu limiter sa portée, qui avait été jugée trop large.

La logique qui prévaut dans l’ensemble de ce projet de loi est de nouveau à l’œuvre ici : il s’agit de généraliser des mesures exceptionnelles, particulièrement attentatoires aux libertés individuelles, dans un objectif sécuritaire. Les risques de dérives en cas de légalisation de telles mesures pour l’ensemble des infractions pénales, et a minima celles qui sont punies de trois ans d’emprisonnement, sont évidentes.

Le contrôle par l’autorité judiciaire n’est pas suffisant, d’autant que c’est une fois encore sous l’autorité du procureur de la République que s’effectueraient de tels actes. Le risque d’incitation à la commission de l’infraction est patent.

Il convient donc de supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 52.

Mme Esther Benbassa. L’article 28 vise à étendre le recours et l’enquête sous pseudonyme aux cyberinfiltrations. Ce dispositif existe déjà dans le droit pénal français, mais il est pour le moment limité aux enquêtes en matière de criminalité et de délinquance organisée, soit pour des méfaits extrêmement graves, ce qui classe cette mesure dans le régime d’exception.

L’article initial du projet de loi était excessif, car il visait à généraliser cette mesure à toutes les enquêtes liées à un délit ou un crime entraînant une peine d’emprisonnement.

Cette extension paraissait dangereuse dans la mesure où elle mettait fin au monopole de l’emploi de cette mesure par des services spécialisés. Or une telle technique d’enquête, équivalant à l’infiltration, ne peut être efficace que si elle est mise en œuvre par des personnels spécialement formés à la spécificité de la cybercriminalité, et plus particulièrement aux techniques d’infiltration numérique.

La commission des lois a assoupli le dispositif prévu dans le texte au travers d’un amendement du rapporteur visant à cantonner l’extension de cette mesure aux infractions punies d’une peine d’au moins trois ans d’emprisonnement. Elle a également accru le contrôle des magistrats lorsqu’une enquête sous pseudonyme sera diligentée.

Mes chers collègues, nous notons évidemment les améliorations et apports venus modifier l’article 28. Nous réprouvons simplement le recours même à ce type d’enquêtes qui portent atteinte au principe de la loyauté de la preuve. Aussi le présent amendement tend-il à supprimer l’article 28.

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 82 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Je ne reviens pas sur les explications que j’ai données sur l’article 27. Elles valent pour les articles 28 et 29.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’émets un avis défavorable sur les amendements identiques de M. Antiste, de Mme Benbassa et de M. Mézard.

Encore une fois, nous avons là aussi souhaité harmoniser le régime applicable à l’enquête sous pseudonyme, ce qui nous semble extrêmement important au regard du développement actuel de la criminalité sur internet. Ces dispositions sont tout à fait essentielles.

Par ailleurs, nous avons souhaité, contrairement à ce que j’ai entendu, renforcer le contrôle de l’autorité judiciaire : nous exigeons l’autorisation préalable d’un magistrat lorsqu’il y a acquisition ou transmission de produits illicites, soit du procureur de la République, soit du juge d’instruction qui intervient sur autorisation préalable.

Enfin, je dois dire que je regrette que la commission des lois du Sénat ait restreint le champ de l’enquête sous pseudonyme aux seules infractions punies d’une peine d’au moins trois ans d’emprisonnement. J’avais eu l’occasion de le dire en première lecture, il nous semble que cela constitue un recul par rapport au droit actuel. L’enquête sous pseudonyme est aujourd’hui possible dans les affaires d’acquisition ou de consultation d’images pédopornographiques, ce délit étant puni d’au moins deux ans d’emprisonnement, ou en cas de propositions sexuelles à mineurs de 15 ans par une personne qui utilise un moyen de communication électronique, ce délit étant lui aussi puni de deux ans d’emprisonnement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. À titre personnel, je ne voterai pas ces amendements de suppression, car je pense qu’il faut trouver de bons compromis. Il s’agit ici de permettre à la police de mener des enquêtes sous pseudonyme, notamment dans les communications électroniques. On sait très bien quel est l’enjeu aujourd’hui : il s’agit de pouvoir traquer un certain nombre d’acteurs qui commettent des infractions ou qui provoquent à la commission d’infractions par ce biais-là.

Vous avez proposé, messieurs les rapporteurs, que le recours à cette mesure soit limité à des infractions sanctionnées de peines d’emprisonnement de trois ans. Mme la ministre dit que cela ne couvre peut-être pas tous les champs ; dans ce cas, il faudrait les préciser.

Il est vrai que ce sont des sujets extrêmement délicats. On ne peut pas à la fois demander aux services d’enquête de traquer des délinquants qui peuvent être à l’origine de graves nuisances tout en trouvant les équilibres qui conviennent pour protéger la liberté et l’anonymat des personnes.

Personnellement, je pense que la proposition de la commission est la bonne, car elle est nuancée. Notre objectif – peut-être est-il illusoire, mais conservons-le jusqu’à la fin de nos débats – étant de convaincre les collègues députés à l’Assemblée nationale qu’il y a du bon dans le texte du Sénat et qu’ils doivent en reprendre certains éléments. Prenons peut-être ce chemin-là sur cet article-là.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 18 rectifié, 52 et 82 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 71, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

IV. – Le premier alinéa du VI de l’article 28-1 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, ils ne peuvent disposer des prérogatives mentionnées à l’article 230-46 qu’après avoir été spécialement habilités à cette fin dans les conditions déterminées par le décret pris pour l’application de l’article 67 bis-1 du code des douanes. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. C’est un amendement de coordination.

Le nouvel article 230-46 du code de procédure pénale, relatif à l’enquête sous pseudonyme, prévoit que les officiers de police judiciaire doivent, pour procéder à de telles enquêtes, être spécialement habilités, dans des conditions déterminées dans un texte réglementaire.

Les officiers des douanes judiciaires, qui sont affectés dans le service national de douane judiciaire, disposent des mêmes prérogatives que les officiers de police judiciaire. Il apparaît également nécessaire de déterminer les conditions dans lesquelles ils seront spécialement habilités à procéder à des enquêtes sous pseudonyme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je tiens à redire au Gouvernement, devant la Haute Assemblée, que nous avons analysé avec beaucoup de rigueur cet amendement de coordination, sur lequel nous avons émis un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 71.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 28, modifié.

(Larticle 28 est adopté.)

Article 28
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Article 30

Article 29

I. – (Supprimé)

II. – La section 5 du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifiée :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « De l’accès à distance aux correspondances stockées par la voie des communications électroniques accessibles au moyen d’un identifiant informatique » ;

2° (Supprimé)

3° À la première phrase des articles 706-95-1 et 706-95-2, après les mots : « l’accès », sont insérés les mots : « pendant une durée de vingt-quatre heures ».

III. – La section 6 du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifiée :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Des autres techniques spéciales d’enquête » ;

2° Au début, il est ajouté un paragraphe 1 ainsi rédigé :

« Paragraphe 1

« Dispositions communes

« Art. 706-95-11. – Les dispositions du présent paragraphe sont applicables aux techniques spéciales d’enquêtes mentionnées à la présente section.

« Ces techniques spéciales d’enquête peuvent être mises en œuvre si les nécessités de l’enquête ou de l’information judiciaire relatives à l’une des infractions entrant dans le champ d’application des articles 706-73 et 706-73-1 l’exigent.

« Art. 706-95-12. – Les techniques spéciales d’enquête sont autorisées :

« 1° Au cours de l’enquête, par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République ;

« 2° Au cours de l’information, par le juge d’instruction, après information du procureur de la République.

« Art. 706-95-13. – L’autorisation mentionnée à l’article 706-95-12 fait l’objet d’une ordonnance écrite et motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires. Elle n’a pas de caractère juridictionnel et n’est pas susceptible de recours.

« Art. 706-95-14. – Ces techniques spéciales d’enquête se déroulent sous l’autorité et le contrôle du magistrat qui les a autorisées. Ce magistrat peut ordonner à tout moment leur interruption.

« Le juge des libertés et de la détention est informé sans délai des actes accomplis. Les procès-verbaux dressés en exécution de sa décision lui sont communiqués sans délai.

« S’il estime que les opérations n’ont pas été réalisées conformément à son autorisation ou que les dispositions applicables du présent code n’ont pas été respectées, il ordonne la destruction des procès-verbaux et du support des enregistrements effectués. Il statue par une ordonnance motivée qu’il notifie au procureur de la République. Ce dernier peut former appel devant le président de la chambre de l’instruction dans un délai de dix jours à compter de la notification.

« Les opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans les décisions du magistrat. Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans l’autorisation du magistrat ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.

« Art. 706-95-15. – En cas d’urgence résultant d’un risque imminent de dépérissement des preuves ou d’atteinte grave aux personnes, l’autorisation mentionnée à l’article 706-95-12 peut être délivrée selon les modalités suivantes :

« 1° Au cours de l’enquête, par le procureur de la République. Cette autorisation doit être confirmée par une ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention dans un délai maximal de vingt-quatre heures. À défaut, il est mis fin à l’opération, les données ou correspondances recueillies sont placées sous scellés fermés et ne peuvent être exploitées ou utilisées dans la procédure. Le juge des libertés et de la détention peut également ordonner la destruction des procès-verbaux et du support des enregistrements effectués ;

« 2° Au cours de l’information, par le juge d’instruction.

« L’autorisation doit être écrite et motivée. Elle comporte l’énoncé des circonstances de fait établissant l’existence du risque imminent mentionné au premier alinéa du présent article.

« Art. 706-95-16. – L’autorisation mentionnée au 1° de l’article 706-95-12 est délivrée pour une durée maximale d’un mois renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de durée.

« L’autorisation mentionnée au 2° du même article 706-95-12 est délivrée pour une durée maximale de quatre mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée, sans que la durée totale des opérations ne puisse excéder deux ans.

« Art. 706-95-17. – Les techniques spéciales d’enquêtes mentionnées à la présente section sont mises en place par l’officier de police judiciaire commis par le juge d’instruction ou requis par le procureur de la République ou, sous sa responsabilité, par l’agent de police judiciaire.

« En vue de procéder à l’installation, l’utilisation et au retrait des dispositifs techniques mentionnés à la présente section, le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire peut requérir tout agent qualifié d’un service, d’une unité ou d’un organisme placé sous l’autorité ou la tutelle du ministre de l’intérieur ou du ministre de la défense et dont la liste est fixée par décret.

« Art. 706-95-18. – Le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui ou requis par le procureur de la République, ou l’agent de police judiciaire agissant sous sa responsabilité, dresse procès-verbal de la mise en place des dispositifs techniques et des opérations effectuées en application de la présente section. Ce procès-verbal mentionne la date et l’heure auxquelles l’opération a commencé et celles auxquelles elle s’est terminée.

« Les enregistrements sont placés sous scellés fermés.

« L’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire agissant sous sa responsabilité décrit ou transcrit, dans un procès-verbal qui est versé au dossier, les données enregistrées qui sont utiles à la manifestation de la vérité. Aucune séquence relative à la vie privée étrangère aux infractions visées dans les ordonnances autorisant la mesure ne peut être conservée dans le dossier de la procédure.

« Les conversations et données en langue étrangère sont transcrites en français avec l’assistance d’un interprète requis à cette fin.

« Art. 706-95-19. – Les enregistrements et données recueillies en application des opérations mentionnées à la présente section sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l’expiration du délai de prescription de l’action publique. Il est dressé procès-verbal de l’opération de destruction. » ;

3° Après le paragraphe 1, tel qu’il résulte du 2° du présent III, il est inséré un paragraphe 2 intitulé : « Du recueil des données techniques de connexion et des interceptions de correspondances émises par la voie des communications électroniques » et qui comprend l’article 706-95-4 qui devient l’article 706-95-20 et qui est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– le début de la première phrase est ainsi rédigé : « Il peut être recouru à la mise en place et à l’utilisation d’un appareil… (le reste sans changement). » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

b) Le II est ainsi modifié :

– le début de la première phrase est ainsi rédigé : « Il peut être recouru à la mise en place ou à l’utilisation… (le reste sans changement). » ;

– à la deuxième phrase, la référence : « 100-4 » est remplacée par la référence : « 100-3 » ;

– à la même deuxième phrase, après les mots : « applicables et », sont insérés les mots : « lorsque ces interceptions sont autorisées par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République, » ;

– la dernière phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Les correspondances interceptées en application du présent alinéa ne peuvent concerner que la personne ou la liaison visée par l’autorisation d’interception. Par dérogation à l’article 706-95-16, les durées maximales d’autorisation de l’interception des correspondances prévue au présent II sont de quarante-huit heures renouvelables une fois. » ;

c) Le III est abrogé ;

4° Après le paragraphe 2, tel qu’il résulte du 2° du présent III, il est inséré un paragraphe 3 ainsi intitulé : « Des sonorisations et des fixations d’images de certains lieux ou véhicules » qui comprend les articles 706-96 à 706-98 tels qu’ils résultent des a à k suivants :

a) L’article 706-96 est ainsi rédigé :

« Art. 706-96. – Il peut être recouru à la mise en place d’un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics, ou de l’image d’une ou de plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé. » ;

b) L’article 706-96-1 est ainsi rédigé :

« Art. 706-96-1. – Au cours de l’enquête, en vue de mettre en place le dispositif technique mentionné à l’article 706-96, le juge des libertés et de la détention peut autoriser l’introduction dans un véhicule ou un lieu privé, y compris hors des heures prévues à l’article 59, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l’occupant des lieux ou de toute personne titulaire d’un droit sur ceux-ci. Ces opérations, qui ne peuvent avoir d’autre fin que la mise en place du dispositif technique, sont effectuées sous son contrôle. Le présent alinéa s’applique également aux opérations ayant pour objet la désinstallation du dispositif technique ayant été mis en place.

« Au cours de l’information, en vue de mettre en place le dispositif technique mentionné à l’article 706-96, le juge d’instruction peut autoriser l’introduction dans un véhicule ou un lieu privé, y compris hors des heures prévues à l’article 59, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l’occupant des lieux ou de toute personne titulaire d’un droit sur ceux-ci. S’il s’agit d’un lieu d’habitation et que l’opération doit intervenir hors des heures prévues au même article 59, cette autorisation est délivrée par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le juge d’instruction. Ces opérations, qui ne peuvent avoir d’autre fin que la mise en place du dispositif technique, sont effectuées sous l’autorité et le contrôle du juge d’instruction. Le présent alinéa est également applicable aux opérations ayant pour objet la désinstallation du dispositif technique ayant été mis en place.

« La mise en place du dispositif technique mentionné à l’article 706-96 ne peut concerner les lieux mentionnés aux articles 56-1, 56-2, 56-3 et 56-5 ni être mise en œuvre dans le véhicule, le bureau ou le domicile des personnes mentionnées à l’article 100-7. » ;

c) L’article 706-97 est ainsi modifié :

– le début de la première phrase est ainsi rédigé : « La décision autorisant le recours au dispositif mentionné à l’article 706-96 comporte… (le reste sans changement). » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

d) L’article 706-99, qui devient l’article 706-98, est ainsi modifié :

– le premier alinéa est supprimé ;

– au second alinéa, les mots : « mentionnés au premier alinéa du présent article » sont supprimés et les références : « auxdits articles 706-96 et 706-96-1 » sont remplacées par la référence : « à l’article 706-96 » ;

e) Les articles 706-98-1 et 706-100 à 706-102 sont abrogés ;

5° La section 6 bis du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale devient le paragraphe 4 de la section 6 du chapitre II du titre XXV du livre IV du même code, tel qu’il résulte des 6° à 9° suivants ;

6° L’article 706-102-1 est ainsi modifié :

a) Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « Il peut être recouru à la mise en place d’un dispositif… (le reste sans changement). » ;

b) Au deuxième alinéa, après les deux occurrences des mots : « procureur de la République », sont insérés les mots : « ou le juge d’instruction » ;

7° L’article 706-102-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction prise en application des articles 706-102-1 et 706-102-2 » sont remplacés par les mots : « autorisant le recours au dispositif mentionné à l’article 706-102-1 » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

8° À la première phrase des premier et deuxième alinéas de l’article 706-102-5, les références : « aux articles 706-102-1 et 706-102-2 » sont remplacées par la référence : « à l’article 706-102-1 » ;

9° Les articles 706-102-2, 706-102-4 et 706-102-6 à 706-102-9 sont abrogés.

IV. – (Non modifié)

V. – Au 1° de l’article 226-3 du code pénal, la référence : « et 706-102-2 » est supprimée.

VI. – (Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 19 rectifié est présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal.

L’amendement n° 53 est présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

L’amendement n° 83 rectifié est présenté par M. Mézard, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Arnell, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 19 rectifié.

M. Maurice Antiste. Le rapporteur a déjà annoncé qu’il émettrait un avis défavorable sur les amendements de suppression des articles 27, 28 et 29.

L’amendement n° 19 rectifié vise à supprimer l’article 29, qui prévoit une généralisation et une banalisation de mesures dérogatoires, applicables à ce jour uniquement à la criminalité organisée.

Rien ne justifie, dans une société démocratique, d’appliquer à l’ensemble des crimes et des délits de telles mesures. Elles ne sont ni nécessaires ni légitimes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 53.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement est également défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable. Je ne reviens pas sur les explications que j’ai données sur l’article 27.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 19 rectifié, 53 et 83 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 29.

(Larticle 29 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de programmation 2018–2022 et de réforme pour la justice et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif au renforcement de l’organisation des juridictions.

Dans la discussion du texte de la commission sur le projet de loi, nous en sommes parvenus à l’article 30.

Sous-section 2

Dispositions relatives au statut et aux compétences des officiers, fonctionnaires et agents exerçant des missions de police judiciaire

Article 29
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Article 31

Article 30

I. – (Non modifié)

II. – (Non modifié) Les troisième et quatrième alinéas de l’article 18 du code de procédure pénale sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Les officiers de police judiciaire peuvent se transporter sur toute l’étendue du territoire national, à l’effet d’y poursuivre leurs investigations et de procéder à des auditions, perquisitions et saisies, après en avoir informé le procureur de la République saisi de l’enquête ou le juge d’instruction. Ils sont tenus d’être assistés d’un officier de police judiciaire territorialement compétent si ce magistrat le décide. Le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel les investigations sont réalisées est également informé par l’officier de police judiciaire de ce transport. »

II bis. – Après l’article 20-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 20-2 ainsi rédigé :

« Art. 20-2. – Les sous-officiers et officiers de la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale peuvent également bénéficier de la qualité d’agent de police judiciaire lorsqu’ils sont appelés pour occuper un poste comportant cet exercice. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. Il précise les conditions d’expérience et les qualités requises pour bénéficier de la qualité d’agent de police judiciaire au titre du présent article. »

II ter. – À la fin du 1° bis de l’article 21 du code de procédure pénale, la référence : « l’article 20-1 » est remplacée par les références : « les articles 20-1 et 20-2 ».

III. – (Non modifié) L’article 28 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« D’office ou sur instructions du procureur de la République, ces fonctionnaires et agents peuvent concourir à la réalisation d’une même enquête avec des officiers et agents de police judiciaire.

« Ces fonctionnaires et agents peuvent, sur instruction du procureur de la République, procéder à la mise en œuvre des mesures prévues à l’article 41-1. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Nonobstant toute disposition contraire, lorsque les fonctionnaires et agents relevant du présent article doivent prêter serment avant d’exercer leur fonction, ce serment n’a pas à être renouvelé en cas de changement d’affectation. »

IV. – (Non modifié) Aux premier et dernier alinéas de l’article 60, à la première phrase du premier alinéa de l’article 60-1, au deuxième alinéa de l’article 60-2 et à la première phrase de l’article 60-3 du code de procédure pénale, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou, sous le contrôle de ce dernier, l’agent de police judiciaire ».

IV bis. – (Non modifié) Au premier alinéa de l’article 60-2 du code de procédure pénale, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou, sous le contrôle de ce dernier, de l’agent de police judiciaire ».

V et VI. – (Non modifiés)

VI bis A. – (Non modifié) Le titre II du livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa des articles 60-1 et 77-1-1, après le mot : « numérique, », sont insérés les mots : « le cas échéant selon des normes fixées par voie réglementaire, » ;

2° Au deuxième alinéa de l’article 60-1, les mots : « dans les meilleurs délais à cette réquisition » sont remplacés par les mots : « à cette réquisition dans les meilleurs délais et s’il y a lieu selon les normes exigées ».

VI bis. – (Non modifié) Au premier alinéa de l’article 390-1 du code de procédure pénale, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « , un fonctionnaire ou agent d’une administration relevant de l’article 28 ».

VI ter. – (Non modifié) La section 3 du chapitre III du titre XII du code des douanes est complétée par un article 365-1 ainsi rédigé :

« Art. 365-1. – Vaut citation à personne la convocation en justice notifiée au prévenu, sur instructions du procureur de la République, par un agent des douanes dans les conditions déterminées à l’article 390-1 du code de procédure pénale. »

VII. – (Non modifié)

Mme la présidente. L’amendement n° 54, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Nous proposons la suppression de cet article, car il marque une fois de plus un recul des prérogatives judiciaires. En effet, l’article 30 prévoit de simplifier la procédure d’habilitation des officiers de police judiciaire, de faciliter leur circulation sur le territoire national, d’étendre les compétences des agents de police judiciaire, de supprimer l’autorisation du procureur de la République pour certaines réquisitions, ainsi que l’obligation de prêter serment.

Non seulement cet article prévoit le recul des compétences des magistrats en matière de maîtrise de l’enquête, mais il s’inscrit dans une perspective d’économies budgétaires en supprimant l’obligation de compétence territoriale de l’officier de police judiciaire. Ainsi, non seulement on supprime une nouvelle fois un lien de proximité, mais, en plus, on renforce la charge de travail des officiers de police judiciaire, qui seront désormais opérationnels sur l’ensemble du territoire national.

Nous regrettons encore une fois que la majorité sénatoriale ait mis de côté son souci affiché de défendre l’institution judiciaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Dans le cadre de la simplification de la procédure d’habilitation des officiers de police judiciaire et de la facilitation de leurs déplacements sur le territoire, les assouplissements prévus par le texte sont intéressants, car ils facilitent le travail des enquêteurs.

La commission ayant déjà émis en première lecture un avis favorable sur le projet du Gouvernement sur ce point-là, elle émet ce soir un avis défavorable sur l’amendement de suppression de l’article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis que M. le rapporteur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 54.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 30.

(Larticle 30 est adopté.)

Sous-section 3

Dispositions relatives à la garde à vue

Article 30
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Article 31 bis

Article 31

I. – Le II de l’article 63 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou de permettre, dans les cas où il n’existe pas dans le tribunal de locaux relevant de l’article 803-3, la présentation de la personne devant l’autorité judiciaire » ;

2° (Supprimé)

3° La dernière phrase du même dernier alinéa est supprimée.

bis. – (Non modifié) Au premier alinéa du I de l’article 63-2 du code de procédure pénale, les mots : « , l’un de ses frères et sœurs ou son curateur ou son tuteur » sont remplacés par les mots : « ou l’un de ses frères et sœurs ».

II. – (Supprimé)

III. – (Non modifié) Après l’article 706-112 du code de procédure pénale, sont insérés des articles 706-112-1 et 706-112-2 ainsi rédigés :

« Art. 706-112-1. – Lorsque les éléments recueillis au cours de la garde à vue d’une personne font apparaître que celle-ci fait l’objet d’une mesure de protection juridique, l’officier ou l’agent de police judiciaire en avise le curateur ou le tuteur. S’il est établi que la personne bénéficie d’une mesure de sauvegarde de justice, l’officier ou l’agent de police judiciaire avise s’il y a lieu le mandataire spécial désigné par le juge des tutelles.

« Si la personne n’est pas assistée d’un avocat ou n’a pas fait l’objet d’un examen médical, le curateur, le tuteur ou le mandataire spécial peuvent désigner un avocat ou demander qu’un avocat soit désigné par le bâtonnier, et ils peuvent demander que la personne soit examinée par un médecin.

« Sauf en cas de circonstance insurmontable, qui doit être mentionnée au procès-verbal, les diligences incombant aux enquêteurs en application du présent article doivent intervenir au plus tard dans un délai de six heures à compter du moment où est apparue l’existence d’une mesure de protection juridique.

« Le procureur de la République peut, à la demande de l’officier de police judiciaire, décider que l’avis prévu au présent article sera différé ou ne sera pas délivré si cette décision est, au regard des circonstances, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne.

« Art. 706-112-2. – Lorsque les éléments recueillis au cours d’une procédure concernant un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement font apparaître qu’une personne devant être entendue librement en application de l’article 61-1 fait l’objet d’une mesure de protection juridique, l’officier ou l’agent de police judiciaire en avise par tout moyen le curateur ou le tuteur, qui peut désigner un avocat ou demander qu’un avocat soit désigné par le bâtonnier pour assister la personne lors de son audition. Si le tuteur ou le curateur n’a pu être avisé et si la personne entendue n’a pas été assistée par un avocat, les déclarations de cette personne ne peuvent servir de seul fondement à sa condamnation. »

IV. – (Non modifié) La première phrase du premier alinéa de l’article 706-113 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : « Lorsque la personne fait l’objet de poursuites, le procureur de la République ou le juge d’instruction en avise le curateur ou le tuteur ainsi que le juge des tutelles. »

Mme la présidente. L’amendement n° 84 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et M. Carrère, MM. Mézard, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Cet amendement vise à maintenir le droit en vigueur et à conditionner la prolongation d’une garde à vue à la présentation au procureur de la personne concernée, en l’absence d’éléments de nature à prouver qu’il s’agit là d’un formalisme excessif. L’étude d’impact précisait que cette option avait été écartée, car elle était excessive.

Elle s’appuyait sur le rapport de MM. Beaume et Natali, rendu dans le cadre des chantiers de la justice : « les institutions nationales, en particulier les diverses Conférences, restent attachées à la formalisation d’un contrôle du parquet dès 24 heures, en particulier s’agissant de procédures à très fort enjeu répressif. Elles rappellent au surplus, comme celles des juridictions qui n’y sont pas favorables, que ce renouvellement constitue pratiquement la première occasion obligatoire d’un véritable compte rendu au parquet sur le déroulement de l’enquête ».

Au-delà de vingt-quatre heures, la privation de liberté nécessite que l’intéressé puisse valablement présenter ses observations au magistrat sous le contrôle duquel cette mesure est mise en œuvre.

Rappelons que le procureur de la République est garant de la bonne tenue d’une garde à vue et que le parquet doit répondre de ses enquêtes. La suppression de cette obligation risque d’entraîner une prolongation de la garde à vue chaque fois que le service enquêteur le juge utile, sans véritable contrôle par l’autorité judiciaire.

C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à maintenir le droit en vigueur et à conditionner la prolongation d’une garde à vue à la présentation au procureur de la personne concernée, étant rappelé que cela n’induit pas un formalisme excessif ni des contraintes particulières.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’objet de l’amendement vise l’obligation de présentation au procureur pour la prolongation de la garde à vue.

Sur ce point, les auteurs de l’amendement ont satisfaction, puisque nous avons souhaité maintenir dans le texte de la commission cette obligation de présentation.

Le dispositif de l’amendement vise cependant un sujet un peu différent, puisqu’il concerne la possibilité de prolonger la garde à vue au-delà de vingt-quatre heures à fin de présentation au procureur.

Admise par la jurisprudence, cette faculté serait inscrite dans la loi. Il nous semble qu’elle tient compte de la réalité des conditions de fonctionnement des juridictions, et nous l’avions acceptée en première lecture.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

Si nous considérons que la présentation de la personne gardée à vue ne peut être que facultative pour le renouvellement de la mesure, nous jugeons en revanche nécessaire que la personne soit effectivement présente au moment du placement initial.

Le caractère facultatif de la présentation pour une prolongation correspond à une demande formulée par de très nombreux acteurs du monde judiciaire.

Mme la présidente. Madame Delattre, l’amendement n° 84 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nathalie Delattre. Non, le rapporteur m’a convaincue : je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 84 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 31.

(Larticle 31 est adopté.)

Article 31
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Article 32 (début)

Article 31 bis

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 10-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La victime est informée du droit d’être assistée par un avocat avant qu’il soit procédé à son audition. À l’issue de chaque audition de la victime, l’avocat peut poser des questions. Il peut également présenter des observations écrites. Celles-ci sont jointes à la procédure. » ;

2° Le premier alinéa de l’article 15-3 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les victimes ont le droit d’être assistées d’un avocat qu’elles peuvent choisir ou qui, à leur demande, est désigné par le bâtonnier de l’ordre des avocats près la juridiction compétente, les frais étant à leur charge, sauf si elles bénéficient d’une assurance de protection juridique. » ;

3° L’article 61-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « victime est », sont insérés les mots : « auditionnée ou » ;

b) À la première phrase du second alinéa, après le mot : « procédé », sont insérés les mots : « à l’audition ou ». – (Adopté.)

Section 2

Dispositions propres à l’enquête

Sous-section 1

Dispositions étendant les pouvoirs des enquêteurs

Article 31 bis
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Article 32 (interruption de la discussion)

Article 32

I. – L’article 53 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou, si la procédure porte sur un crime ou sur une infraction entrant dans le champ d’application des articles 706-73 et 706-73-1, pendant une durée de seize jours » ;

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsque des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité ne peuvent être différées, le procureur de la République peut, à l’issue du délai de huit jours prévu au deuxième alinéa du présent article, autoriser, par décision écrite et motivée, la prolongation de l’enquête, dans les mêmes conditions, pour une durée maximale de huit jours s’il s’agit d’un délit puni d’une peine supérieure ou égale à trois ans d’emprisonnement. »

bis. – L’article 56 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La personne chez qui l’officier de police judiciaire se transporte peut être assistée de son avocat. » ;

2° Au début du deuxième alinéa, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « L’officier de police judiciaire ».

II. – (Non modifié)

III. – (Supprimé)

IV. – Après le III de l’article 78-2-2 du code de procédure pénale, il est inséré un III bis ainsi rédigé :

« III bis. – Dans les mêmes conditions et pour les mêmes infractions que celles prévues au I, les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21, peuvent accéder à bord et procéder à une visite des navires présents en mer territoriale, se dirigeant ou ayant déclaré leur intention de se diriger vers un port ou vers les eaux intérieures, ou présents en amont de la limite transversale de la mer, ainsi que des bateaux, engins flottants, établissements flottants et matériels flottants se trouvant dans la mer territoriale ou en amont de la limite transversale de la mer, ainsi que sur les lacs et plans d’eau.

« La visite se déroule en présence du capitaine ou de son représentant. Est considérée comme le capitaine la personne qui exerce, de droit ou de fait, le commandement, la conduite ou la garde du navire, du bateau, de l’engin flottant, de l’établissement flottant ou du matériel flottant lors de la visite.

« Elle comprend l’inspection des extérieurs ainsi que des cales, des soutes et des locaux.

« La visite des locaux spécialement aménagés à un usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires.

« Le navire, le bateau, l’engin flottant, l’établissement flottant ou le matériel flottant ne peut être immobilisé que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite, dans la limite de douze heures.

« Un procès-verbal de fouille est établi et contresigné par le capitaine ou son représentant, à qui une copie est immédiatement remise.

« L’officier de police judiciaire responsable de la visite rend compte du déroulement des opérations au procureur de la République et l’informe sans délai de toute infraction constatée. »

IV bis. – À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 97 du code de procédure pénale, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

V. – Après l’article 802-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 802-2 ainsi rédigé :

« Art. 802-2. – Toute personne ayant fait l’objet d’une perquisition ou d’une visite domiciliaire en application des dispositions du présent code et qui n’a pas été poursuivie devant une juridiction d’instruction ou de jugement au plus tôt six mois après l’accomplissement de cet acte peut, dans un délai d’un an à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de cette mesure, saisir le président de la chambre de l’instruction d’une demande tendant à son annulation.

« La requête est formée par déclaration au greffe de la juridiction où la procédure a été menée ou, à défaut, de la juridiction dans le ressort de laquelle la mesure a été réalisée. Dans le second cas, elle est transmise sans délai à la juridiction ayant suivi la procédure. Elle n’a aucun effet suspensif sur les enquête ou instructions en cours.

« Le juge statue, dans le mois suivant la réception de la requête, après avoir recueilli les observations écrites du procureur de la République, du requérant et, le cas échéant, de son avocat. Si les nécessités de l’enquête le justifient, le procureur de la République peut, par réquisitions écrites, demander au président de la chambre de l’instruction de se prononcer dans un délai de huit jours. Le juge statue par une ordonnance motivée susceptible d’appel, dans un délai de dix jours à compter de sa notification, devant la chambre de l’instruction.

« Si la perquisition est intervenue à l’occasion d’une procédure pour laquelle des poursuites ont été engagées à l’encontre d’autres personnes que celle ayant formé la demande d’annulation, lorsqu’une juridiction de jugement est saisie, la demande d’annulation est transmise au président de cette juridiction par le président de la chambre de l’instruction.

« Dans le cadre des recours examinés conformément aux troisième et avant-dernier alinéas, le requérant ne peut prétendre qu’à la mise à disposition des seules pièces de la procédure se rapportant à la perquisition qu’il conteste. »

VI. – L’article 63 ter du code des douanes est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la visite concerne le domicile ou le cabinet d’un avocat, il est fait renvoi à l’article 56-1 du code de procédure pénale et le même article 56-1 est applicable. »

VII. – Au troisième alinéa du b du 2 de l’article 64 du code des douanes, au troisième alinéa du b du 2 de l’article 41 du code des douanes de Mayotte, à la première phrase du dixième alinéa de l’article L. 621-12 du code monétaire et financier, au dernier alinéa du III de l’article L. 16 B et au dernier alinéa du 3 de l’article L. 38 du livre des procédures fiscales, la référence : « troisième alinéa » est remplacée par la référence : « quatrième alinéa ».

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.

M. Maurice Antiste. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il convient de déplorer l’élargissement des modalités de l’enquête de flagrance prévu par le présent article. Cette évolution sera attentatoire aux libertés en raison des pouvoirs exorbitants de contrainte de la police en matière d’enquête de flagrance.

La prolongation de huit jours supplémentaires de la flagrance, autrefois réservée aux délits punis de cinq ans d’emprisonnement, sera élargie aux délits punis de trois ans d’emprisonnement, soit quasiment tous les délits donnant potentiellement lieu à la flagrance, notamment le vol simple.

Cette disposition, source de difficulté, causera l’affaiblissement des droits des justiciables. Il en sera de même pour ce qui concerne la faculté des enquêteurs de perquisitionner sans assentiment en matière d’enquête préliminaire pour les délits punis de trois ans de prison.

Cela constitue un élargissement dangereux des pouvoirs de contrainte de la police, en absence d’urgence, et cette mesure sera généralisée de surcroît à presque tous les délits !

Dans la même logique, il est dangereux d’élargir les pouvoirs de contrainte des services d’enquête dans le cadre de la flagrance, ceux-ci étant en principe réservés et strictement limités temporellement. On peut citer, par exemple, la possibilité donnée en matière d’enquête préliminaire de procéder à des interpellations domiciliaires, à la demande du parquet, ce qui n’était possible que dans le cadre d’un mandat de recherche.

Un tel projet illustre la volonté gouvernementale de déséquilibre des pouvoirs accordés aux autorités, au détriment des droits des individus et de leur vie privée, ainsi que de celle de leurs proches, alors même qu’ils sont à ce stade de simples suspects. Et cela vaudra y compris en l’absence d’urgence.

L’extension dangereuse de mesures de contrainte de la police en phase d’enquête préliminaire est critiquable, de même que la logique sécuritaire de faire des exceptions un principe, en abaissant les libertés individuelles.

C’est pourquoi je voterai les amendements socialistes sur ce sujet.

Mme la présidente. L’amendement n° 55, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Nous pensons qu’en matière pénale ce texte marque un recul de la place du juge d’instruction et des droits de la défense.

Il octroie aux policiers, sans garde-fou, des pouvoirs d’écoute, de géolocalisation et de perquisition pour une multitude de délits qui n’ont rien à voir avec le grand banditisme ou le terrorisme.

Il fait ainsi entrer encore davantage l’état d’urgence dans l’État de droit.

La justice repose sur le principe de la balance entre l’accusation et la défense. Sans équilibre, vous n’avez plus de justice. C’est la conception même de cette dernière qui est menacée, comme cela a déjà été plusieurs fois indiqué, en particulier lors de l’examen des articles 28 et 29.

L’article 32 étend le pouvoir des enquêteurs par l’intégration dans le droit commun des dispositifs actuellement prévus pour la seule poursuite des délits qui encourent une peine de prison de plus de cinq ans et les infractions de terrorisme ou de criminalité organisée.

Les pouvoirs exceptionnels confiés aux enquêteurs dans le cadre de l’enquête de flagrance, qui sont justifiés par un crime ou un délit qui vient d’être commis, n’ont aucune raison d’être étendus à un autre cadre juridique.

Alors qu’une réflexion sur la restriction de ce régime dérogatoire de l’enquête de flagrance à une durée strictement limitée à l’urgence serait nécessaire, le projet de loi prévoit au contraire l’extension et la banalisation de ce dispositif par deux moyens.

Il étend, premièrement, la durée de la flagrance à seize jours lorsque la procédure porte sur un crime de droit commun ou sur une infraction prévue aux articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale concernant la criminalité organisée.

Il étend, deuxièmement, la possibilité de prolongation de l’enquête de flagrance à l’ensemble des infractions punies de trois ans d’emprisonnement ou plus, la formulation de la disposition et la confusion de l’étude d’impact ne permettant pas d’exclure tout à fait formellement une application aux crimes de droit commun et aux infractions prévues par les articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale, ce qui porterait dans ce cas le délai maximal à vingt-quatre jours.

C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article particulièrement attentatoire aux libertés fondamentales, alors que, en parallèle, une réduction sensible de l’autorité judiciaire est à l’œuvre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission est défavorable à la suppression de l’article 32. Elle souhaite s’en tenir au texte qu’elle a adopté en première lecture, notamment parce que nous avons veillé à mieux encadrer la procédure d’enquête de flagrance et que nous avons renforcé les droits de la défense en matière de perquisition.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’émets également un avis défavorable sur cet amendement.

En m’appuyant sur votre présentation, madame Assassi, je souhaite toutefois apporter trois précisions.

Premièrement, dans le texte, les moyens d’action du parquet sont renforcés, je ne le nie pas. Je rappelle toutefois, de nouveau, que les membres du parquet sont des magistrats. En tant que tels, ils sont garants des libertés individuelles, ils ne reçoivent aucune instruction individuelle et, bien entendu, ils enquêtent à charge et à décharge.

Deuxièmement, les dispositions de l’article 32 ne me semblent pas porter une atteinte disproportionnée aux libertés publiques et fondamentales. Elles tendent au contraire à renforcer le contrôle judiciaire. Ainsi, la perquisition doit être autorisée par un juge des libertés et de la détention, ou JLD, qui exerce des fonctions spécialisées. En outre, dans ce type de situations, le procureur doit évidemment prendre une décision écrite et motivée, par exemple lorsqu’il prolonge l’enquête de flagrance. Je pourrais encore citer d’autres exemples qui vont dans le sens d’un renforcement des libertés fondamentales.

Enfin, troisièmement, le but du projet de loi n’est absolument pas de limiter les pouvoirs du juge d’instruction, mais au contraire de donner à celui-ci les moyens de se recentrer sur les instructions qui ont une véritable importance et qui nécessitent fondamentalement son intervention, notamment les affaires criminelles.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Madame la ministre, comment gérer la pénurie ? Nous sommes là au cœur de la question.

On veut cantonner le juge d’instruction à quelques matières, mais, dans peu de temps, il disparaîtra. Quant au juge des libertés et de la détention, son existence est encore très éphémère : il est surchargé, et ce n’est pas un juge assisté d’un greffier et disposant d’un cabinet.

Madame la garde des sceaux, vous avez lu, sans doute encore plus attentivement que moi, le rapport sur l’attractivité du parquet qui vous était destiné. Il relève une vraie difficulté. Les procureurs et leurs substituts n’ont pas le temps de répondre à toutes les exigences que vous voulez leur imposer. Nous sommes donc dans du formalisme apparent et il s’agit, en réalité, de renforcer les pouvoirs de la police, sans contrôle judiciaire.

L’encadrement de la flagrance devrait, a priori, selon moi, rester en l’état. Je soutiendrai donc l’amendement présenté par Mme Assassi et je présenterai ensuite, dans le droit fil du travail effectué avec la commission des lois, plusieurs amendements de repli tendant à supprimer certains alinéas de l’article 32.

Ces dispositions posent un vrai problème et renvoient à une évolution dangereuse que l’on observe dans différents domaines depuis quelque temps. Comment pouvons-nous encore sauvegarder notre État de droit ? C’est un vrai sujet pour nous, ici, au Sénat, sur lequel nous devons nous battre, car d’autres textes nous seront soumis prochainement. On peut comprendre la pression qui pèse sur un gouvernement face aux manifestations et au développement de la délinquance, mais on ne devrait jamais agir au mépris de l’État de droit. Lorsque ce dernier est remis en cause, le pire peut arriver. Et, selon certains, nous ne sommes pas très loin du pire…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 55.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 32, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 1 à 4

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. En 1999 – ce n’est pas si lointain –, le législateur s’est prononcé pour la première fois sur la question du temps de flagrance, en le limitant à une durée maximale de huit jours.

Afin de prendre en considération la continuité des actes d’enquête, la loi du 9 mars 2004 a prévu la possibilité d’une prolongation de l’enquête de huit jours supplémentaires par le procureur de la République pour un crime ou un délit puni d’une peine supérieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement.

Désormais, le présent projet de loi envisage l’allongement à seize jours pour un crime de droit commun ou une infraction prévue par les articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale, ces derniers visant les crimes organisés, et à huit jours pour les infractions punies de trois ans d’emprisonnement.

Cette extension de durée renforce donc la complexité, la création de deux régimes relatifs à des délits de flagrance ne simplifiant pas le travail des procureurs et des services d’enquête.

La seule solution nous semble être de fixer une durée limitée de l’enquête de flagrance. C’est la raison pour laquelle nous proposons, à travers l’amendement n° 32, de supprimer les alinéas 1 à 4 de l’article 32. Subsidiairement, l’amendement n° 34 vise à supprimer les seuls alinéas 3 et 4.

Nous aurions ainsi un dispositif plus équilibré, les rapporteurs eux-mêmes s’étant interrogés dans leur rapport sur « la pertinence de l’extension, non négligeable, des durées prolongées de l’enquête de flagrance, dès lors qu’elle semble de moins en moins caractérisée par l’urgence, de moins en moins placée sous le contrôle de l’autorité judiciaire et susceptible de concerner la quasi-totalité des délits, même mineurs ».

Nous sommes très éloignés de la jurisprudence constitutionnelle sur le contrôle qui doit être exercé par l’autorité judiciaire. Comme il est indiqué dans le rapport, on ne pourra envisager un réel contrôle que lorsque le procureur de la République sera vraiment indépendant et qu’il disposera des moyens adéquats, contrairement à aujourd’hui. Il conviendrait également que le juge des libertés et de la détention dispose de moyens plus importants.

Mme la présidente. L’amendement n° 33, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

sur un crime ou

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Défendu !

Mme la présidente. L’amendement n° 34, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Également défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable sur ces trois amendements.

S’agissant de l’amendement n° 32, l’allongement du délai de l’enquête de flagrance proposé pour les crimes nous avait paru acceptable en première lecture compte tenu de la brièveté du délai de droit commun de huit jours, souvent insuffisant pour mener à bien les enquêtes. Nous vous proposons de confirmer cette position, mes chers collègues.

Les dispositions de l’amendement n° 33 prévoient d’aller encore plus loin que la position adoptée par le Sénat en première lecture concernant la durée de l’enquête de flagrance, qui ne pourrait être prolongée pour les crimes.

Il nous semble que les crimes sont, par nature, des infractions suffisamment graves pour justifier que l’enquête de flagrance puisse durer seize jours. Il ne serait pas cohérent que cette durée soit admise pour certains délits, mais pas pour des crimes.

Enfin, l’amendement n° 34, également relatif à l’enquête de flagrance, appelle le même commentaire que l’amendement n° 32 : nous proposons d’en rester à la position équilibrée que le Sénat avait retenue en première lecture, laquelle nous paraît garantir les droits des uns et des autres.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 35, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Madame la ministre, vous avez confié à plusieurs éminentes personnalités le soin de travailler sur les chantiers de la justice. Dans leur rapport sur les chantiers de la procédure pénale, Jacques Beaume et Frank Natali estiment que les perquisitions ne devraient être autorisées dans le cadre d’une enquête préliminaire que pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement de plus de cinq ans, et non de trois ans. Or le texte du Gouvernement comme celui de la commission admettent le seuil de trois ans.

Dans votre rapport, vous jugez que cette disposition semble « poursuivre un mouvement ancien tendant à la marginalisation du juge d’instruction et à l’extension progressive des mesures coercitives dans le cadre des enquêtes. » Allez jusqu’au bout de cette logique, monsieur le rapporteur ! Suivez l’avis des éminents rédacteurs du rapport sur les chantiers de la procédure pénale et donnez un avis favorable à notre amendement, qui tend justement à supprimer l’alinéa 9 de l’article 32 pour que la perquisition sans assentiment ne puisse avoir lieu que pour les délits punis d’une peine de cinq ans ou plus d’emprisonnement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission des lois maintient sa position adoptée en première lecture. Elle a accepté l’abaissement du seuil de cinq ans à trois ans d’emprisonnement pour les perquisitions contraintes, en enquête préliminaire, ce qui répond à une attente des services enquêteurs, mais en l’assortissant de garanties renforcées.

En conséquence, son avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il est également défavorable. Je rappelle en outre qu’une autorisation systématique préalable du JLD est requise.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32.

(Larticle 32 est adopté.)

Article 32 (début)
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Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 56

8

Mise au point au sujet d’un vote

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Joissains, pour une mise au point au sujet d’un vote.

Mme Sophie Joissains. Madame la présidente, lors du scrutin n° 48 portant sur l’amendement n° 177 rectifié, à l’article 44 du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, M. Hervé Maurey a été déclaré comme votant contre, alors qu’il souhaitait s’abstenir.

Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

9

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – Renforcement de l’organisation des juridictions

Suite de la discussion en nouvelle lecture et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié et d’un projet de loi organique dans le texte de la commission

Mme la présidente. Dans la suite de la discussion du texte de la commission sur le projet de loi, nous en sommes parvenus à l’examen d’un amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 32.

Article 32 (interruption de la discussion)
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Article 32 bis

Article additionnel après l’article 32

Mme la présidente. L’amendement n° 56, présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Après l’article 32

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article 76 du code de procédure pénale est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , ni sans la présence de son avocat. Au cours de la perquisition, les frais d’avocat ne sont pas pris en charge par l’aide juridictionnelle d’État. »

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Le présent amendement tend à ajouter un article dans le projet de loi permettant la présence de l’avocat lors de la perquisition.

Alors qu’une telle présence est prévue dans le code de procédure pénale pour les visites domiciliaires, un vide juridique subsiste quant à la possibilité pour un avocat d’être présent lors de la perquisition pénale. Nous proposons ainsi de mettre fin à cette absence et aux incertitudes qui en résultent, notamment au regard de la législation européenne.

En effet, la directive 2013/48/UE de 2013 relative aux droits du justiciable énonce : « avant qu’ils ne soient interrogés par la police ou par une autre autorité répressive ou judiciaire, les suspects ou les personnes poursuivies ont accès à un avocat sans retard indu ».

Au-delà de la mise en conformité avec le droit communautaire, la présence de l’avocat, auxiliaire de justice, est une mesure de bon sens, contribuant à la transparence et au bon déroulement de la perquisition. Elle ne saurait de ce fait être perçue comme une obstruction à la procédure pénale et judiciaire.

Permettant de prévenir toute dérive au cours des perquisitions, la présence de l’avocat nous semble pertinente. Le présent amendement va en ce sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Lorsque l’enquête prévoit une perquisition, la commission et le Sénat avaient décidé que l’avocat de la personne perquisitionnée devait être informé, de manière qu’il puisse éventuellement assister à la perquisition, sans en avoir toutefois l’obligation.

Cette position présente un double avantage : elle permet aux enquêteurs de faire leur travail correctement, mais aussi, dans certaines situations, à l’avocat de ne pas venir s’il ne juge pas sa présence utile, en accord avec son client.

Rendre la présence de l’avocat obligatoire ne serait pas forcément efficace. C’est la raison pour laquelle la commission reste sur sa position. Son avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Nous avons déjà eu l’occasion de discuter de ce sujet à plusieurs reprises. Je ferai trois remarques.

Tout d’abord, les directives européennes n’imposent pas, en cas de perquisition, la présence d’un avocat.

Ensuite, et contrairement à vos affirmations, madame la sénatrice, il n’y a pas d’interrogatoire lors d’une perquisition. Celle-ci consiste à prendre des éléments et des pièces présents sur le lieu perquisitionné. Dès lors, la présence d’un avocat n’est pas absolument nécessaire. Si la perquisition devait se transformer en interrogatoire, il faudrait alors évidemment notifier à la personne son droit de faire appel à son avocat.

Troisièmement – sur ce point, mon avis diverge peut-être de celui de la commission des lois –, nous n’avons pas estimé nécessaire d’indiquer dans la loi que la personne pouvait appeler son avocat. Toutefois, quiconque fait l’objet d’une perquisition peut contacter son conseil. Soit la personne considérée est en garde à vue et elle se voit alors notifier ses droits, dont celui d’être assisté par un avocat ; soit elle ne l’est pas, et rien ne lui interdit dans ce cas de faire appel à son avocat. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas jugé nécessaire d’aller au-delà et d’inscrire cette obligation dans la loi.

En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 56.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 56
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Article 32 bis

Article 32 bis

I. – (Non modifié) Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 801-1 est ainsi rédigé :

« Art. 801-1. – I. – Tous les actes mentionnés au présent code, qu’il s’agisse d’actes d’enquête ou d’instruction ou de décisions juridictionnelles ou de toute autre pièce de la procédure, peuvent être établis ou convertis sous format numérique.

« Le dossier de la procédure peut être intégralement conservé sous format numérique, dans des conditions sécurisées, sans nécessité d’un support papier.

Article 32 bis
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Article 32 ter

« Lorsque ces actes sont établis sous format numérique et que les dispositions du présent code exigent qu’ils soient signés, ils font l’objet, quel qu’en soit le nombre de pages et pour chaque signataire, d’une signature unique sous forme numérique, selon des modalités techniques qui garantissent que l’acte ne peut plus ensuite être modifié. Ces actes n’ont pas à être revêtus d’un sceau.

« II. – Ne sont pas applicables au dossier de procédure numérique les dispositions du présent code :

« 1° Procédant à une distinction entre les actes originaux et leurs copies ;

« 2° Prévoyant la certification conforme des copies ;

« 3° Relatives au placement sous scellés, y compris sous scellés fermés, des documents, contenus multimédia ou données dès lors qu’ils sont versés au sein de ce dossier.

« III. – Les modalités d’application du présent article sont précisées par voie réglementaire. » ;

2° À l’article 66, après le mot : « sur-le-champ », sont insérés les mots : « ou dès que possible » ;

3° L’article 155 est abrogé ;

3° bis Au début du troisième alinéa du I de l’article 230-45, les mots : « Le second alinéa des articles 100-4, 100-6, 230-38 et 230-43 du présent code n’est pas applicable » sont remplacés par les mots : « Les dispositions du présent code relatives au placement des enregistrements sous scellés fermés et à l’établissement d’un procès-verbal lorsqu’il est procédé à leur destruction ne sont pas applicables » ;

4° Aux articles 495-22 et 530-6, les mots : « revêtu d’une signature numérique ou électronique » sont remplacés par les mots : « établi sous format numérique » ;

5° Après le mot : « registre », la fin du second alinéa de l’article 706-57 est ainsi rédigée : « , ouvert à cet effet et tenu sous format papier ou numérique. »

II. – Le titre III du livre Ier du code de la route est complété par un article L. 130-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 130-9-1 – À titre expérimental, les constatations relatives aux infractions mentionnées aux chapitres IV, V et VI du titre III du livre II peuvent faire l’objet d’un procès-verbal dématérialisé prenant la forme d’un enregistrement audio, accompagné d’une synthèse écrite.

« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. »

III. – L’expérimentation prévue au I s’applique pour une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur du décret mentionné au second alinéa de l’article L. 130-9-1 du code de la route, et au plus tard six mois après la date de promulgation de la présente loi.

Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d’évaluation de sa mise en œuvre. – (Adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 22 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal, est ainsi libellé :

Alinéas 16 à 20

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Le II de l’article 32 bis vise à légaliser, dans le cadre d’une expérimentation menée jusqu’au 1er janvier 2022, l’enregistrement numérique des formalités prévoyant, pour les personnes entendues, arrêtées ou placées en garde à vue, la notification de leurs droits.

Cette disposition, susceptible de porter une atteinte grave aux droits des individus, n’est pas acceptable. En effet, en pratique, les avocats seront alors dans l’impossibilité de contrôler en temps réel la procédure et de faire des observations qui lui seront associées. Le formalisme est une garantie importante du justiciable placé en garde à vue.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement est satisfait par le texte de la commission.

Dans le cadre de la notification des droits au gardé à vue, nous avons prévu de façon expérimentale la possibilité d’un procès-verbal dématérialisé pour un certain nombre d’infractions routières.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Vous voulez supprimer l’extension du périmètre de l’expérimentation proposée par la commission des lois du Sénat, monsieur le sénateur. L’Assemblée nationale avait adopté pour sa part un périmètre qui convenait mieux au Gouvernement.

Celui-ci s’en remet donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement et souhaite dans tous les cas poursuivre les expérimentations sur l’oralisation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32 bis.

(Larticle 32 bis est adopté.)

Article 32 bis
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Article 33

Article 32 ter

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le recours aux données issues des objets connectés dans le cadre du traitement juridique d’une affaire. – (Adopté.)

Sous-section 2

Dispositions diverses de simplification

Article 32 ter
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Article 33 bis

Article 33

I A. – (Non modifié) À l’article 15-2 du code de procédure pénale, les mots : « des services judiciaires » sont remplacés par les mots : « de la justice ».

I. – Après la première phrase du second alinéa de l’article 43 du code de procédure pénale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Si la personne en cause est en relation avec des magistrats ou fonctionnaires de la cour d’appel, le procureur général transmet la procédure au procureur général près la cour d’appel la plus proche, afin que celui-ci la transmette au procureur de la République auprès du tribunal de grande instance le plus proche. »

II. – (Non modifié)

III. – (Non modifié) Le titre III du livre II du code de la route est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa de l’article L. 234-4 est ainsi modifié :

a) Les deux occurrences du mot : « et » sont remplacées par le mot : « ou » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « À cette fin, l’officier ou l’agent de police judiciaire peut requérir un médecin, un interne en médecine, un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine à titre de remplaçant ou un infirmier pour effectuer une prise de sang. » ;

1° bis Au premier alinéa de l’article L. 234-5, les deux occurrences du mot : « et » sont remplacées par le mot : « ou » ;

2° L’article L. 234-9 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « officiers », sont insérés les mots : « ou agents » et les mots : « de ceux-ci, les agents de police judiciaire et » sont remplacés par les mots : « des officiers de police judiciaire, » ;

b) Au troisième alinéa, les deux premières occurrences du mot : « et » sont remplacées par le mot : « ou » ;

3° L’article L. 235-2 est ainsi modifié :

a) Au quatrième alinéa, les mots : « de police judiciaire de la gendarmerie ou de la police nationales territorialement compétents à leur initiative et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints, » sont remplacés par les mots : « ou agents de police judiciaire de la gendarmerie ou de la police nationales territorialement compétents à leur initiative et, sur l’ordre et sous la responsabilité des officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire adjoints » ;

b) Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « À cette fin, l’officier ou l’agent de police judiciaire peut requérir un médecin, un interne en médecine, un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine à titre de remplaçant ou un infirmier pour effectuer une prise de sang. »

Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 12 à 14

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. L’article 33 du projet de loi prévoit plusieurs mesures de simplification de l’enquête.

Concernant les règles relatives aux contrôles d’alcoolémie et d’usage de stupéfiants opérés sur les conducteurs, il envisage de confier aux agents de police judiciaire, les APJ, la possibilité de prendre seuls l’initiative d’un contrôle.

Or, comme vous le savez, mes chers collègues, en l’état du droit, l’initiative en la matière est prise soit à la suite d’une instruction du procureur de la République, soit sur l’initiative d’un officier de police judiciaire, ou OPJ.

Le contrôle peut alors être effectué par des APJ ou des agents de police judiciaire adjoints sur les instructions et sous la responsabilité d’un officier de police judiciaire.

La mesure prévue dans cet article est donc loin d’être neutre. Le fait de confier l’initiative de ces contrôles aux APJ, qui justifient d’un niveau de formation procédurale moindre et font l’objet d’un contrôle plus réduit, risque de fragiliser la qualité procédurale des opérations menées.

Nous vous demandons donc, mes chers collègues, d’être cohérents avec les mesures que vous avez adoptées à l’article 30 concernant les réquisitions prises par les agents de police judiciaire.

Il convient, à notre sens, d’en rester au niveau de garanties assuré par le droit en vigueur, en vertu duquel les agents de police judiciaire peuvent déjà être chargés de la réalisation concrète des opérations, mais seul un officier de police judiciaire peut en prendre l’initiative et les contrôler.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat en première lecture et nous avions alors estimé que les ajustements qui étaient proposés par le texte concernant les prérogatives des agents de police judiciaire étaient de portée limitée et parfaitement acceptables. La commission a souhaité rester sur cette position et émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 33.

(Larticle 33 est adopté.)

Article 33
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Article 34

Article 33 bis

(Non modifié)

Le titre XXIX du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa des articles 706-150, 706-153 et 706-158, les mots : « autoriser par ordonnance » sont remplacés par les mots : « ordonner par décision » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa des mêmes articles 706-150, 706-153 et 706-158, les deux occurrences des mots : « l’ordonnance » sont remplacées par les mots : « la décision » ;

3° À la première phrase du troisième alinéa de l’article 706-158, le mot : « autorise » est remplacé par le mot : « ordonne ». – (Adopté.)

Section 3

Dispositions propres à l’instruction

Sous-section 1

Dispositions relatives à l’ouverture de l’information

Article 33 bis
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Article 35

Article 34

I. – L’article 706-104 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :

« Art. 706-104. – Pour les investigations relatives aux infractions entrant dans le champ d’application des articles 706-73 et 706-73-1, lorsqu’il requiert l’ouverture d’une information, le procureur de la République peut, si la recherche de la manifestation de la vérité nécessite que les investigations en cours ne fassent l’objet d’aucune interruption, autoriser les officiers et agents de police judiciaire des services ou unités de police judiciaire qui étaient chargés de l’enquête à poursuivre les opérations prévues aux articles 60-4, 77-1-4, 230-32 à 230-35, 706-80, 706-81, 706-95-1, 706-95-20, 706-96 et 706-102-1 pendant une durée ne pouvant excéder quarante-huit heures à compter de la délivrance du réquisitoire introductif. Cette autorisation fait l’objet d’une ordonnance écrite, spéciale et motivée, qui mentionne les actes dont la poursuite a été autorisée.

« Le juge d’instruction peut à tout moment mettre un terme à ces opérations.

« L’autorisation délivrée par le procureur de la République n’est versée au dossier de la procédure qu’en même temps que les procès-verbaux relatant l’exécution et constatant l’achèvement des actes dont la poursuite a été autorisée et qui ont, le cas échéant, été prolongés par le juge d’instruction. »

II. – L’article 86 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Le procureur de la République peut demander au doyen des juges d’instruction un délai supplémentaire de trois mois pour permettre la poursuite des investigations avant de faire connaître ses réquisitions. La décision du doyen des juges d’instruction constitue une mesure d’administration judiciaire insusceptible de recours. » ;

2° Après la deuxième phrase de l’avant-dernier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Lorsque les investigations réalisées au cours de l’enquête effectuée à la suite de la plainte déposée conformément au deuxième alinéa de l’article 85 ont permis d’établir qu’une personne majeure mise en cause pour les faits de nature délictuelle reprochés par la victime pourrait faire l’objet de poursuites, mais que l’action publique n’a pas été mise en mouvement par le procureur de la République, celui-ci peut également requérir du juge d’instruction de rendre une ordonnance de non-lieu à informer, tout en invitant la partie civile à engager des poursuites par voie de citation directe. »

III. – À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 392-1 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « dernier ».

III bis. – (Supprimé)

IV à VI. – (Non modifiés) – (Adopté.)

Sous-section 2

Dispositions relatives au déroulement de l’instruction

Article 34
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Article 35 bis (Texte non modifié par la commission)

Article 35

I. – (Non modifié)

II. – La seconde phrase du sixième alinéa de l’article 97 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : « Toutefois, lorsque l’ouverture et la reconstitution du scellé fermé n’exigent pas que la personne mise en examen soit interrogée sur son contenu, elles peuvent être réalisées par le juge d’instruction assisté de son greffier hors la présence de celle-ci, en présence de l’avocat de la personne ou celui-ci dûment convoqué. »

II bis, II ter A et II ter. – (Supprimés)

III. – L’article 142-6 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ou au vu des réquisitions écrites du procureur de la République, dont il est donné lecture à la personne mise en examen, et après avoir entendu ses observations et celles de son avocat » ;

2° Les deux derniers alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Elle peut également être décidée, sans débat contradictoire ou recueil préalable des observations de la personne et de son avocat, par ordonnance statuant sur une demande de mise en liberté, ou décidant d’une mise en liberté d’office.

« Le juge statue après avoir fait vérifier la faisabilité technique de la mesure par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, qui peut être saisi à cette fin à tout moment de l’instruction.

« En matière correctionnelle, cette saisine est obligatoire si elle est demandée par la personne détenue ou son avocat un mois avant la date à laquelle la détention peut être prolongée, sauf décision de refus spécialement motivée du juge d’instruction. »

IV. – (Non modifié)

IV bis et IV ter. – (Supprimés)

V. – L’article 706-71 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Aux fins d’une bonne administration de la justice, il peut être recouru au cours de la procédure pénale, dans les cas et selon les modalités prévus au présent article, à un moyen de communication audiovisuelle. » ;

2° À la première phrase du troisième alinéa, après les mots : « prolongation de la détention provisoire », sont insérés les mots : « , y compris l’audience prévue à l’avant-dernier alinéa de l’article 179 » ;

3° (Supprimé)

4° Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « trois » est supprimé et les mots : « , celui-ci peut » sont remplacés par les mots : « ou par un interprète, ceux-ci peuvent » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « il » est remplacé par les mots : « l’avocat » ;

c) À la fin de la dernière phrase, les mots : « a déjà été remise à l’avocat » sont remplacés par les mots : « lui a déjà été remise » ;

d) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Si ces dispositions s’appliquent au cours d’une audience, celle-ci doit se tenir dans des conditions qui garantissent le droit de la personne à présenter elle-même ses observations. »

bis A. – (Supprimé)

bis. – (Non modifié)

VI. – Après l’article 51 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 51-1 ainsi rédigé :

« Art. 51-1. – Par dérogation aux articles 80-1 et 116 du code de procédure pénale, le juge d’instruction qui envisage de mettre en examen une personne pour le délit de diffamation procède conformément aux dispositions du présent article.

« Il informe la personne de son intention de la mettre en examen par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique et en l’avisant de son droit de faire connaître des observations écrites dans un délai d’un mois. Il peut aussi, par le même avis, interroger la personne par écrit afin de solliciter, dans le même délai, sa réponse à différentes questions écrites. En ce cas, la personne est informée qu’elle peut choisir de répondre auxdites questions directement en demandant à être entendue par le juge d’instruction.

« Lors de l’envoi de l’avis prévu au deuxième alinéa, la personne est informée de son droit de désigner un avocat. En ce cas, la procédure est mise à la disposition de l’avocat désigné durant les jours ouvrables, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet d’instruction. Les avocats peuvent également se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier dans les conditions mentionnées à l’article 114 du code de procédure pénale.

« À l’issue d’un délai d’un mois à compter de la réception de l’avis mentionné au deuxième alinéa du présent article, le juge d’instruction peut procéder à la mise en examen en adressant à la personne et à son avocat une lettre recommandée avec demande d’avis de réception selon les modalités prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article 113-8 du code de procédure pénale. Il informe à cette occasion la personne que, si elle demande à être entendue par le juge d’instruction, celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire.

« Les III à VIII de l’article 175 du même code ne sont pas applicables. S’il n’a pas reçu les réquisitions du procureur de la République dans un délai de deux mois après la communication du dossier prévu au I du même article 175, le juge d’instruction rend l’ordonnance de règlement. » – (Adopté.)

Article 35
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Article 36

Article 35 bis

(Non modifié)

I. – Après l’article 145-4-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 145-4-2 ainsi rédigé :

« Art. 145-4-2. – Lorsque la personne mise en examen est placée en détention provisoire, le juge d’instruction peut décider de prescrire à son encontre l’interdiction de correspondre par écrit avec une ou plusieurs personnes qu’il désigne, au regard des nécessités de l’instruction, du maintien du bon ordre et de la sécurité ou de la prévention des infractions. Il peut pour les mêmes motifs décider de retenir un courrier écrit par la personne détenue ou qui lui est adressé.

« Les décisions mentionnées au premier alinéa sont motivées et notifiées par tout moyen et sans délai à la personne détenue. Celle-ci peut les déférer au président de la chambre de l’instruction, qui statue dans un délai d’un mois par une décision écrite et motivée non susceptible de recours.

« Après la clôture de l’instruction, les attributions du juge d’instruction sont exercées par le procureur de la République selon les formes et conditions prévues au présent article. Il en est de même dans tous les autres cas où une personne est placée en détention provisoire.

« Lorsque la procédure est en instance d’appel, les attributions du procureur de la République sont confiées au procureur général.

« Les autres décisions ou avis conformes émanant de l’autorité judiciaire prévus par les dispositions réglementaires du présent code ou par la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire et relatifs aux modalités d’exécution d’une détention provisoire ou à l’exercice de ses droits par une personne placée en détention provisoire peuvent, conformément aux dispositions du présent article, faire l’objet d’un recours du détenu ou du ministère public devant le président de la chambre de l’instruction. »

bis. – L’article 148-5 du code de procédure pénale est abrogé.

II. – Au premier alinéa de l’article 40 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, les mots : « que l’autorité judiciaire ne s’y oppose pas » sont remplacés par les mots : « des dispositions de l’article 145-4-2 du code de procédure pénale ».

Mme la présidente. L’amendement n° 72, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 7 et 8

Remplacer ces alinéas par dix-huit alinéas ainsi rédigés :

I. bis. – L’article 148-5 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 148-5. – En toute matière et en tout état de la procédure, toute personne placée en détention provisoire peut, à titre exceptionnel, faire l’objet d’une autorisation de sortie sous escorte selon des modalités prévues par décret. Les décisions accordant ou refusant ces autorisations peuvent faire l’objet du recours prévu au dernier alinéa de l’article 145-4-2. »

II. – La loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifiée :

1° L’article 34 est ainsi rédigé :

« Art. 34. – Les prévenus dont l’instruction est achevée et qui attendent leur comparution devant la juridiction de jugement peuvent bénéficier d’un rapprochement familial jusqu’à leur comparution devant la juridiction de jugement, après avis conforme de l’autorité judiciaire susceptible d’être contesté selon les modalités prévus par le dernier alinéa de l’article 145-4-2 du code de procédure pénale. »

2° Le premier alinéa de l’article 40 est ainsi rédigé :

« Les personnes condamnées et, sous réserve des dispositions de l’article 145-4-2 du code de procédure pénale, les personnes prévenues peuvent correspondre par écrit avec toute personne de leur choix. »

III. – À compter du 1er juin 2019, l’article 61-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 61-1. – Sans préjudice des garanties spécifiques applicables aux mineurs, la personne à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu’après avoir été informée :

« 1° De la qualification, de la date et du lieu présumés de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

« 2° Du droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue ;

« 3° Le cas échéant, du droit d’être assistée par un interprète ;

« 4° Du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ;

« 5° Si l’infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, du droit d’être assistée au cours de son audition ou de sa confrontation, selon les modalités prévues aux articles 63-4-3 et 63-4-4, par un avocat choisi par elle ou, à sa demande, désigné d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats ; elle est informée que les frais seront à sa charge sauf si elle remplit les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle, qui lui sont rappelées par tout moyen ; elle peut accepter expressément de poursuivre l’audition hors la présence de son avocat ;

« 6° De la possibilité de bénéficier, le cas échéant gratuitement, de conseils juridiques dans une structure d’accès au droit.

« La notification des informations données en application du présent article est mentionnée au procès-verbal.

« Si le déroulement de l’enquête le permet, lorsqu’une convocation écrite est adressée à la personne en vue de son audition, cette convocation indique l’infraction dont elle est soupçonnée, son droit d’être assistée par un avocat ainsi que les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle, les modalités de désignation d’un avocat d’office et les lieux où elle peut obtenir des conseils juridiques avant cette audition.

« Le présent article n’est pas applicable si la personne a été conduite, sous contrainte, par la force publique devant l’officier de police judiciaire. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à tirer les conséquences de deux décisions adoptées par le Conseil constitutionnel le 8 février 2019 dans le cadre de la procédure des QPC, les questions prioritaires de constitutionnalité. De ce fait, il devrait, me semble-t-il, faire l’objet d’un consensus.

Ces décisions ont déclaré contraires à la Constitution, d’une part, les dispositions de la loi pénitentiaire de 2009 sur le rapprochement familial des prévenus, parce qu’elles ne prévoyaient pas de modalités de recours, et, d’autre part, des dispositions du code de procédure pénale sur l’audition libre, parce qu’elles ne comportaient pas de garanties spécifiques pour les mineurs.

Le Gouvernement vous propose donc, mesdames, messieurs les sénateurs, de modifier les dispositions correspondantes de la loi pénitentiaire et du code de procédure pénale, en instituant, dans le premier cas, un recours et en précisant, dans le second cas, les garanties nécessaires à l’audition libre des mineurs.

Ces modifications ont toute leur place dans l’article 35 bis du présent projet de loi, car cet article tire déjà les conséquences d’une décision QPC de juin 2018, qui avait déclaré contraires à la Constitution des dispositions de la loi pénitentiaire relatives aux décisions d’interdiction de correspondance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Favorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 72.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 35 bis, modifié.

(Larticle 35 bis est adopté.)

Sous-section 3

Dispositions relatives à la clôture et au contrôle de l’instruction

Article 35 bis (Texte non modifié par la commission)
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Article 37 A

Article 36

I. – (Non modifié)

II. – L’article 175 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 175. – I. – Aussitôt que l’information lui paraît terminée, le juge d’instruction communique le dossier au procureur de la République et en avise en même temps les avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, les parties. L’avis est notifié, soit verbalement avec émargement au dossier, soit par lettre recommandée. Lorsque la personne est détenue, il peut également être notifié par les soins du chef de l’établissement pénitentiaire, qui adresse sans délai au juge d’instruction l’original ou la copie du récépissé signé par l’intéressé.

« II. – Le procureur de la République dispose alors d’un délai d’un mois si une personne mise en examen est détenue ou de trois mois dans les autres cas pour adresser ses réquisitions motivées au juge d’instruction. Copie de ces réquisitions est adressée dans le même temps par lettre recommandée aux avocats des parties ou, si elles n’ont pas d’avocats, aux parties.

« III. – Dans un délai de quinze jours à compter de l’envoi de l’avis prévu au I du présent article, les parties peuvent faire connaître au juge d’instruction, selon les modalités prévues à l’avant-dernier alinéa de l’article 81, qu’elles souhaitent exercer l’un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI du présent article.

« IV. – Si elles ont indiqué souhaiter exercer ces droits conformément au III, les parties disposent d’un même délai d’un mois ou de trois mois, selon les distinctions prévues au II, pour :

« 1° Adresser des observations écrites au juge d’instruction, selon les mêmes modalités ; copie de ces observations est alors adressée en même temps au procureur de la République ;

« 2° Formuler des demandes ou présenter des requêtes, selon les mêmes modalités, sur le fondement du neuvième alinéa de l’article 81, des articles 82-1, 82-3, du premier alinéa de l’article 156 et du troisième alinéa de l’article 173, sous réserve qu’elles ne soient pas irrecevables en application des articles 82-3 et 173-1.

« À l’expiration du délai mentionné au II du présent article, les parties ne sont plus recevables à adresser de telles observations ou formuler ou présenter de telles demandes ou requêtes.

« V. – Si les parties ont adressé des observations en application du 1° du IV, le procureur de la République dispose d’un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d’un mois dans les autres cas pour adresser au juge d’instruction des réquisitions complémentaires à compter de la date à laquelle ces observations lui ont été communiquées.

« VI. – Si les parties ont indiqué qu’elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III, elles disposent d’un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d’un mois dans les autres cas pour adresser au juge d’instruction des observations complémentaires à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées.

« VII. – À l’issue, selon les cas, du délai d’un mois ou de trois mois prévu aux II et IV, ou du délai de dix jours ou d’un mois prévu aux V et VI, le juge d’instruction peut rendre son ordonnance de règlement, y compris s’il n’a pas reçu de réquisitions ou d’observations dans ces délais.

« VIII. – Le III, le 1° du IV, le VI et, s’agissant des requêtes en nullité, le 2° du IV sont également applicables au témoin assisté. »

II bis et III. – (Supprimés)

IV. – (Non modifié)

IV bis. – À la première phrase du dernier alinéa de l’article 173 du code de procédure pénale, la dernière occurrence du mot : « alinéa » est remplacée par les mots : « à septième alinéas ».

IV ter. – Au huitième alinéa de l’article 116 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ».

IV quater. – (Non modifié)

IV quinquies à IV septies et V à VII. – (Supprimés)

Mme la présidente. L’amendement n° 57, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. L’article 36 du présent projet de loi simplifie et élargit le renvoi par le juge d’instruction à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Je le rappelle, cette procédure a été instaurée en 2004, afin de désengorger les tribunaux correctionnels. Elle ne peut être mise en place que sous certaines conditions, notamment la reconnaissance des faits par la personne poursuivie, ce qui en fait une procédure de plaider-coupable à la française. Elle a été étendue en 2011, mais ne concerne pour l’instant que très peu d’affaires, une centaine par an à l’échelon national.

Comme nous l’avons expliqué en première lecture, l’article 36 étend le recours à une procédure qui est superficielle, qui entraîne un jugement dégradé, dont plus de six ans d’expérience n’ont pas démontré l’utilité et qui est de nature à créer de lourdes difficultés dans les quelques dossiers dans lesquels elle serait utilisée. Il nous semble que l’espérance de gain de temps est très hypothétique et que l’extension prévue n’est justifiée que par une foi aveugle, et quelque peu naïve, dans cette procédure.

De fait, cette mesure s’inscrit pleinement dans la philosophie que déploie ce projet de loi en matière de procédure pénale : aller vite, juger beaucoup et pour pas cher, peu importe le moyen !

Nous proposons par conséquent la suppression de l’article 36, les aménagements apportés par la commission des lois ne changeant rien à notre détermination.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission des lois reste également déterminée… Son avis est donc défavorable !

Mme Éliane Assassi. Nous nous en doutions !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 57.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 36.

(Larticle 36 est adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à l’action publique et au jugement

Section 1

Dispositions relatives aux alternatives aux poursuites et aux poursuites

Article 36
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Article 37

Article 37 A

(Supprimé)

Sous-section 1

Dispositions clarifiant et étendant la procédure de l’amende forfaitaire

Article 37 A
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Article 38 (Texte non modifié par la commission)

Article 37

I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 3353-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le délit prévu au premier alinéa du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 600 €. » ;

2° L’article L. 3421-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le délit prévu au premier alinéa du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 600 €. »

bis. – (Supprimé)

II. – (Non modifié)

II bis et II ter. – (Supprimés)

III. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 495-17 est ainsi rédigé :

« Lorsque la loi le prévoit, le procureur de la République peut recourir à la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle. Le paiement de l’amende forfaitaire délictuelle fixée par la loi, qui ne peut excéder le montant prévu au premier alinéa de l’article 131-13 du code pénal, éteint l’action publique dans les conditions prévues à la présente section. » ;

1° bis Après le même article 495-17, il est inséré un article 495-17-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-17-1. – Pour les délits, prévus par le code pénal, punis d’une peine d’amende, le procureur de la République peut recourir à la procédure de l’amende forfaitaire, conformément à la présente section, lorsque la personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés et que les victimes éventuelles ont été intégralement désintéressées.

« Sauf disposition contraire, l’action publique peut être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 600 €. » ;

1° ter à 1° quinquies (Supprimés)

2° L’article 495-23 est abrogé ;

2° bis (Supprimé)

3° L’article 768 est complété par un 11° ainsi rédigé :

« 11° Les informations relatives au paiement des amendes forfaitaires ou à l’émission du titre exécutoire des amendes forfaitaires majorées non susceptibles de réclamation pour les délits et pour les contraventions de la cinquième classe. » ;

4° Après le 4° de l’article 768-1, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les informations relatives au paiement des amendes forfaitaires ou à l’émission du titre exécutoire des amendes forfaitaires majorées non susceptibles de réclamation pour les délits et pour les contraventions de la cinquième classe. » ;

5° L’article 769 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « expiration de la peine », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « , la date du paiement de l’amende et la date d’émission du titre exécutoire de l’amende forfaitaire majorée non susceptible de réclamation. » ;

b) Le 6° est complété par les mots : « , soit fait l’objet d’une amende forfaitaire délictuelle mentionnée au 11° de l’article 768 du présent code » ;

c) Il est ajouté un 11° ainsi rédigé :

« 11° Les fiches relatives aux amendes forfaitaires mentionnées au 11° de l’article 768, à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de leur paiement, si la personne n’a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une composition pénale, soit fait de nouveau l’objet d’une amende forfaitaire délictuelle. » ;

6° Après le 15° de l’article 775, il est inséré un 16° ainsi rédigé :

« 16° Les amendes forfaitaires mentionnées au 11° de l’article 768 du présent code. »

6° bis et 7° (Supprimés)

IV. – (Non modifié)

Mme la présidente. L’amendement n° 58, présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Le présent article traite de l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants.

Cette mesure a été présentée par le ministre de l’intérieur comme une réponse permettant de simplifier le travail des forces de l’ordre et de la justice et d’automatiser les peines en la matière.

Le principe de l’individualisation de la peine est ici bafoué et la mesure octroie un pouvoir arbitraire aux forces de l’ordre chargées d’appliquer la contravention. Elles pourront de ce fait sanctionner sans limites et au plus grand mépris des droits des personnes suspectées.

En plus d’augmenter les inégalités des citoyens devant la loi, cette mesure est dénuée de toute réflexion sur les questions relatives à la santé publique pour ce qui a trait à la prévention et au traitement de l’addiction.

Le seul effet de l’amende sera d’aggraver par une sanction pécuniaire une situation souvent déjà précaire : nous savons que les comportements de consommation sont diversifiés et divergent entre les milieux paupérisés et mondains.

Ce dispositif, en plus d’accroître le millefeuille législatif en matière de répression de l’usage des stupéfiants, semble inefficace compte tenu de l’impossibilité juridique d’appliquer une amende forfaitaire délictuelle pour les mineurs. Il sera donc dénué de tout effet de dissuasion de la consommation chez les populations les plus jeunes.

Cette mesure, mes chers collègues, est quelque peu rétrograde. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 37. Englobant tous les stupéfiants, il paraîtra répressif pour les uns et laxiste pour les autres.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable. Cet amendement tend à supprimer l’article 37, au motif qu’il aggraverait la répression de l’usage de stupéfiants, qui pourrait être sanctionné par une amende forfaitaire.

La commission des lois estime que l’amende forfaitaire peut apporter une réponse pénale rapide et systématique à cette infraction.

Naturellement, cette procédure n’empêchera pas le magistrat d’imposer aux consommateurs une autre peine, par exemple un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage des produits stupéfiants, si cette sanction lui paraît plus appropriée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis, madame la présidente. J’insiste sur ce que vient d’indiquer à l’instant M. le rapporteur : cet article donne un outil supplémentaire, mais il n’interdit nullement d’autres types de peines, y compris celles qui peuvent être décidées en matière de soins.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Nous avions exprimé beaucoup de réserves sur la pratique de l’amende forfaitaire.

Madame la ministre, si elle ne constitue qu’un moyen, cela suppose la mise en place d’une véritable stratégie par le procureur de la République et les services de police, incluant notamment la définition des endroits où auraient lieu les interpellations, des méthodes de sensibilisation des parents, afin qu’ils ne soient pas amenés à payer par la suite et des procédures pour éviter que du deal ne se développe afin de payer ces mêmes amendes… Il faudra donc être extrêmement prudent dans la mise en œuvre de ce dispositif.

Je m’abstiendrai sur cet amendement, mais je pense que nous devrons travailler, sous la forme d’une mission d’information ou d’une commission d’enquête, pour voir comment les choses se sont mises en place sur le terrain.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 58.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 37.

(Larticle 37 est adopté.)

Sous-section 2

Dispositions relatives aux alternatives aux poursuites, à la composition pénale et à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

Article 37
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Article 39

Article 38

(Non modifié)

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après le 6° de l’article 41-1, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° Demander à l’auteur des faits de ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans un ou plusieurs lieux déterminés dans lesquels l’infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime. » ;

2° L’article 41-1-1 est abrogé ;

3° L’article 41-2 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Le 9° est ainsi rédigé :

« 9° Ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans le ou les lieux désignés par le procureur de la République et dans lesquels l’infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime ; »

b bis) Après la troisième phrase du vingt-septième alinéa, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Ce magistrat valide la composition pénale lorsque les conditions prévues aux vingt-quatrième à vingt-sixième alinéas sont remplies et qu’il estime les mesures proposées justifiées au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. Il refuse de valider la composition pénale s’il estime que la gravité des faits, au regard des circonstances de l’espèce, ou que la personnalité de l’intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient le recours à une autre procédure, ou lorsque les déclarations de la victime entendue en application du présent alinéa apportent un éclairage nouveau sur les conditions dans lesquelles l’infraction a été commise ou sur la personnalité de son auteur. » ;

c) Le même vingt-septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation aux huit premières phrases du présent alinéa, la proposition de composition n’est pas soumise à la validation du président du tribunal lorsque, pour un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à trois ans, elle porte sur une amende de composition n’excédant pas le montant prévu au premier alinéa de l’article 131-13 du code pénal ou sur la mesure prévue au 2° du présent article, à la condition que la valeur de la chose remise n’excède pas ce montant. » ;

d) Le trentième alinéa est ainsi modifié :

– la deuxième phrase est ainsi rédigée : « La victime peut toutefois demander au procureur de la République de citer l’auteur des faits à une audience devant le tribunal pour lui permettre de se constituer partie civile. » ;

– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le procureur de la République informe la victime de ses droits ainsi que, lorsqu’il cite l’auteur des faits devant le tribunal correctionnel, de la date de l’audience. » ;

4° Après l’article 41-3, il est inséré un article 41-3-1 A ainsi rédigé :

« Art. 41-3-1 A. – Les dispositions des articles 41-2 et 41-3, en ce qu’elles prévoient une amende de composition et l’indemnisation de la victime, sont applicables à une personne morale dont le représentant légal ou toute personne bénéficiant, conformément à la loi ou à ses statuts, d’une délégation de pouvoir à cet effet reconnait sa responsabilité pénale pour les faits qui lui sont reprochés.

« Le montant maximal de l’amende de composition pouvant être proposée est alors égal au quintuple de l’amende encourue par les personnes physiques. » ;

5° L’article 495-8 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « trois ans » ;

b) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République peut proposer que la peine d’emprisonnement proposée révoquera tels ou tels sursis précédemment accordés. Il peut également proposer le relèvement d’une interdiction, d’une déchéance ou d’une incapacité résultant de plein droit de la condamnation, en application du second alinéa de l’article 132-21 du code pénal, ou l’exclusion de la mention de la condamnation du bulletin n° 2 ou n° 3 du casier judiciaire en application des articles 775-1 et 777-1 du présent code. » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République peut, avant de proposer une peine conformément aux dispositions du cinquième alinéa du présent article, informer par tout moyen la personne ou son avocat des propositions qu’il envisage de formuler. » ;

5° bis À la première phrase de l’article 495-10, les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier » ;

6° Après l’article 495-11, il est inséré un article 495-11-1 ainsi rédigé :

« Art. 495-11-1. – Sans préjudice des cas dans lesquels les conditions prévues au premier alinéa de l’article 495-11 ne sont pas remplies, le président peut refuser l’homologation s’il estime que la nature des faits, la personnalité de l’intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire ou lorsque les déclarations de la victime entendue en application de l’article 495-13 apportent un éclairage nouveau sur les conditions dans lesquelles l’infraction a été commise ou sur la personnalité de son auteur. » ;

7° Après le 4° de l’article 768-1, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les compositions pénales dont l’exécution a été constatée par le procureur de la République. » ;

8° Après le 5° de l’article 775-1-A, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° Les compositions pénales mentionnées à l’article 768-1. »

II et III. – (Non modifiés)

Mme la présidente. L’amendement n° 10 rectifié bis n’est pas soutenu.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 29, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après le vingt-deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne est mineure, le président du tribunal désigne une juge des enfants. » ;

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Cet amendement vise à protéger les mineurs en matière de composition pénale, mais en réalité, il me semble qu’il est satisfait par les pratiques actuelles. En effet, il faut aujourd’hui qu’une enquête préalable soit menée et que les parents soient associés à la procédure. C’est pourquoi je retire cet amendement.

Pour autant, cette intervention me donne l’occasion de dire à Mme la garde des sceaux que nous nous opposerons à sa demande d’habiliter le Gouvernement à modifier l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs par ordonnance.

Ce sujet mérite d’importants débats, comme nous venons de le voir au sujet de l’amende forfaitaire ou comme c’est le cas dans cet article sur la composition pénale.

Nous sommes donc particulièrement demandeurs, dans cette enceinte, d’un véritable débat sur la politique à l’égard des mineurs pour qu’elle reste dans l’esprit de l’ordonnance de 1945 qui allie prévention, éducation et sanction, quand celle-ci est nécessaire.

Je regrette que nous ne puissions pas avoir ce débat, qui devrait aussi porter sur les centres éducatifs fermés. Il est vraiment dommage, madame la ministre, que vous nous priviez de cette possibilité.

Mme la présidente. L’amendement n° 29 est retiré.

L’amendement n° 85 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et M. Carrère, MM. Mézard, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Le vingt-neuvième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la personne est mineure, le président du tribunal désigne un juge des enfants. » ;

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Nous avions déjà présenté un amendement similaire, qui avait été rejeté, mais nous persistons ! Nous souhaitons que le président du tribunal nomme, lorsque la personne est mineure, un juge des enfants. Une telle mesure nous semble indispensable pour la protection des mineurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. En effet, nous avions déjà débattu de cette proposition et l’avis de la commission reste défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Pour les compositions pénales applicables aux mineurs et par un système de renvoi d’articles, c’est l’article 4 de l’ordonnance de 1945 qui s’applique, si bien que seul un juge des enfants peut valider les mesures en question. Cet amendement me semble donc satisfait.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 30, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 30 est retiré.

L’amendement n° 31, présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Je retire également cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 31 est retiré.

Je mets aux voix l’article 38.

(Larticle 38 est adopté.)

Section 2

Dispositions relatives au jugement

Sous-section 1

Dispositions relatives au jugement des délits

Article 38 (Texte non modifié par la commission)
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Article 40

Article 39

I. – (Non modifié)

II et III. – (Supprimés)

IV. – (Non modifié)

V. – (Supprimé)

VI, VI bis et VI ter. – (Non modifiés)

VI quater A. – À l’avant-dernière phrase du troisième alinéa de l’article 396 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

VI quater B. – (Supprimé)

VI quater. – (Non modifié)

VII. – (Supprimé)

VIII. – (Non modifié) – (Adopté.)

Article 39
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Article 41

Article 40

(Supprimé)

Article 40
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Article 42

Article 41

I. – Le deuxième alinéa de l’article 502 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« La déclaration indique si l’appel porte sur la décision sur l’action publique ou sur la décision sur l’action civile ou sur les deux décisions. Si l’appel concerne la décision sur l’action publique, la déclaration indique s’il porte sur l’ensemble de la décision ou s’il est limité aux peines prononcées, à certaines d’entre elles ou à leurs modalités d’application. Si la décision sur l’action publique a déclaré le prévenu coupable de plusieurs infractions, l’appel sur cette décision précise s’il concerne l’ensemble des infractions ou certaines d’entre elles. Si la déclaration ne comporte aucune de ces précisions, l’appel est considéré comme portant sur l’intégralité de la décision. Le prévenu qui a limité la portée de son appel sur l’action publique aux peines prononcées dans les conditions prévues au présent alinéa peut, selon les modalités prévues au premier alinéa, revenir sur cette limitation dans un délai d’un mois à compter de la déclaration d’appel ; si l’affaire est audiencée en appel avant ce délai d’un mois, il peut revenir sur cette limitation au moment de l’audience. Le prévenu qui n’a pas limité la portée de son appel lors de la déclaration d’appel peut toujours le faire ultérieurement, jusqu’à l’audience de jugement. »

II. – (Non modifié)

II bis. – (Non modifié) Après le premier alinéa de l’article 509 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la limitation de la portée de l’appel sur l’action publique aux peines prononcées n’a pas été faite par l’avocat du prévenu ou par le prévenu en présence de son avocat, le prévenu peut revenir sur cette limitation à l’audience. »

II ter. – (Non modifié) La section 1 du chapitre II du titre II du livre II du code de procédure pénale est complétée par un article 509-1 ainsi rédigé :

« Art. 509-1. – Le prévenu doit comparaître devant la chambre des appels correctionnels dans un délai de quatre mois à compter soit de l’appel, si le prévenu est détenu, soit de la date à laquelle le prévenu a été ultérieurement placé en détention provisoire, en application de la décision rendue en premier ressort.

« Toutefois, si l’audience sur le fond ne peut se tenir avant l’expiration de ce délai, le président de la chambre peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l’affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de quatre mois. La comparution personnelle du prévenu est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette décision peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes.

« Lorsqu’un des faits constitutifs de l’infraction a été commis hors du territoire national ou lorsque la personne est poursuivie pour une infraction mentionnée aux articles 706-73 et 706-73-1, le délai mentionné aux deux premiers alinéas du présent article est porté à six mois.

« Si le prévenu n’a pas comparu devant la cour d’appel avant l’expiration des délais prévus au présent article, il est remis immédiatement en liberté s’il n’est pas détenu pour une autre cause. »

III. – (Supprimé)

IV. – (Non modifié) À l’article 512 du code de procédure pénale, après le mot : « appel », sont insérés les mots : « , y compris les dispositions du troisième alinéa de l’article 464, ».

V. – (Non modifié) Après le mot : « ci-dessus », la fin du dernier alinéa de l’article 388-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : « , du deuxième alinéa de l’article 385-1, de l’article 388-2 et du dernier alinéa de l’article 509. » – (Adopté.)

Sous-section 2

Dispositions relatives au jugement des crimes

Article 41
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Article 42 bis AA (Texte non modifié par la commission)

Article 42

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° A L’article 249 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un des assesseurs peut être un magistrat honoraire exerçant les fonctions juridictionnelles mentionnées à l’article 41-25 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. » ;

1° L’article 281 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « vingt-quatre heures » sont remplacés par les mots : « un mois » ;

b) À la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « un mois et dix jours » ;

1° bis (Supprimé)

2° La section 1 du chapitre VI du titre Ier du livre II est complétée par un article 316-1 ainsi rédigé :

« Art. 316-1. – Une copie du dossier est mise à la disposition des assesseurs. » ;

3° L’article 331 est ainsi modifié :

a) L’avant-dernier alinéa est supprimé ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les témoins ne sont pas tenus de faire part de leur intime conviction concernant la culpabilité de l’accusé. » ;

4° (Supprimé)

5° Le deuxième alinéa de l’article 365-1 est ainsi rédigé :

« En cas de condamnation, la motivation consiste dans l’énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l’accusé, ont convaincu la cour d’assises et qui ont été exposés au cours des délibérations menées par la cour et le jury en application de l’article 356, préalablement aux votes sur les questions. La motivation consiste également dans l’énoncé des principaux éléments ayant convaincu la cour d’assises dans le choix de la peine, au vu des éléments exposés au cours de la délibération prévue à l’article 362. L’application des dispositions du troisième alinéa de l’article 706-53-13 est également motivée. La motivation des peines complémentaires obligatoires, de la peine de confiscation du produit ou de l’objet de l’infraction ou des obligations particulières de la peine de probation n’est pas nécessaire. » ;

6° (Supprimé)

7° Après l’article 380-2, il est inséré un article 380-2-1 A ainsi rédigé :

« Art. 380-2-1 A. – L’appel formé par l’accusé ou le ministère public peut indiquer qu’il ne conteste pas les réponses données par la cour d’assises sur la culpabilité et qu’il est limité à la décision sur la peine.

« Dans ce cas, seuls sont entendus devant la cour d’assises statuant en appel les témoins et experts dont la déposition est nécessaire afin d’éclairer les assesseurs et les jurés sur les faits commis et la personnalité de l’accusé, sans que soient entendues les personnes dont la déposition ne serait utile que pour établir sa culpabilité.

« Lorsque la cour d’assises se retire pour délibérer, les dispositions relatives aux questions sur la culpabilité ne sont pas applicables. » ;

7° bis Après l’article 380-3, il est inséré un article 380-3-1 ainsi rédigé :

« Art. 380-3-1. – L’accusé doit comparaître devant la cour d’assises statuant en appel sur l’action publique dans un délai d’un an à compter soit de l’appel, si l’accusé est détenu, soit de la date à laquelle l’accusé a été ultérieurement placé en détention provisoire en application de la décision rendue en premier ressort.

« Toutefois, si l’audience sur le fond ne peut se tenir avant l’expiration de ce délai, le président de la chambre de l’instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l’affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de six mois. La comparution de l’accusé est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette prolongation peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. La durée de six mois prévue au présent alinéa est portée à un an en cas de poursuites pour crime contre l’humanité ou pour un crime constituant un acte de terrorisme.

« Si l’accusé n’a pas comparu devant la cour d’assises avant l’expiration des délais prévus au présent article, il est remis immédiatement en liberté s’il n’est pas détenu pour une autre cause. » ;

8° Après le 3° de l’article 698-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les deux derniers alinéas de l’article 347 ne sont pas applicables et la cour d’assises peut délibérer en étant en possession de l’entier dossier de la procédure. »

II. – (Non modifié) Par dérogation à l’article 181 et aux chapitres Ier à V du titre Ier du livre II du code de procédure pénale, les personnes majeures accusées d’un crime puni de quinze ans ou de vingt ans de réclusion criminelle, lorsqu’il n’est pas commis en état de récidive légale, sont jugées en premier ressort par la cour criminelle. Cette cour est également compétente pour le jugement des délits connexes. Elle n’est pas compétente s’il existe un ou plusieurs coaccusés ne répondant pas aux conditions prévues au présent alinéa.

La cour criminelle, qui siège au même lieu que la cour d’assises, est composée d’un président et de quatre assesseurs, choisis par le premier président de la cour d’appel parmi, pour le président, les présidents de chambres et les conseillers du ressort de la cour d’appel et, pour les assesseurs, les conseillers et les juges de ce ressort. Deux des assesseurs peuvent être des magistrats exerçant à titre temporaire ou des magistrats honoraires exerçant les fonctions juridictionnelles mentionnées à l’article 41-25 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

Les personnes contre lesquelles il existe à l’issue de l’information des charges suffisantes d’avoir commis, hors récidive, un crime mentionné au premier alinéa du présent II sont, selon les modalités prévues à l’article 181 du code de procédure pénale, mises en accusation par le juge d’instruction devant la cour criminelle. Le délai d’un an prévu au huitième alinéa du même article 181 est alors réduit à six mois, et il ne peut être procédé qu’à une seule prolongation en application du neuvième alinéa dudit article 181.

Sur proposition du ministère public, l’audiencement de la cour criminelle est fixé par son président ou, à la demande du procureur général, par le premier président de la cour d’appel.

La cour criminelle applique les dispositions du titre Ier du livre II du code de procédure pénale sous les réserves suivantes :

1° Il n’est pas tenu compte des dispositions qui font mention du jury ou des jurés ;

2° Les attributions confiées à la cour d’assises sont exercées par la cour criminelle, et celles confiées au président de la cour d’assises sont exercées par le président de la cour criminelle ;

3° La section 2 du chapitre III du même titre Ier, l’article 282, la section 1 du chapitre V du titre Ier du livre II, les deuxième et dernier alinéas de l’article 293 et les articles 295 à 305 du même code ne sont pas applicables ;

4° Pour l’application des articles 359, 360 et 362 dudit code, les décisions sont prises à la majorité ;

5° Les deux derniers alinéas de l’article 347 du même code ne sont pas applicables et la cour criminelle délibère en étant en possession de l’entier dossier de la procédure.

Si la cour criminelle estime, au cours ou à l’issue des débats, que les faits dont elle est saisie constituent un crime puni de trente ans de réclusion criminelle ou de la réclusion criminelle à perpétuité, elle renvoie l’affaire devant la cour d’assises. Si l’accusé comparaissait détenu, il demeure placé en détention provisoire jusqu’à sa comparution devant la cour d’assises ; dans le cas contraire, la cour criminelle peut, après avoir entendu le ministère public et les parties ou leurs avocats, décerner, par la même décision, mandat de dépôt ou mandat d’arrêt contre l’accusé.

L’appel des décisions de la cour criminelle est examiné par la cour d’assises dans les conditions prévues au titre Ier du livre II du même code pour l’appel des arrêts rendus par les cours d’assises en premier ressort.

Pour l’application des dispositions relatives à l’aide juridictionnelle, la cour criminelle est assimilée à la cour d’assises.

III. – (Non modifié) Le II du présent article est applicable à titre expérimental dans au moins deux départements et au plus dix départements déterminés par un arrêté du ministre de la justice, pendant une durée de trois ans à compter de la date fixée par cet arrêté, pour le jugement des personnes mises en accusation au plus tard deux ans après cette date.

Six mois au moins avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport procédant à son évaluation. L’ensemble des acteurs judiciaires est associé à cette évaluation. Cette évaluation est étendue, sur le fondement du principe de bonne administration de la justice, aux modalités d’accès à l’instruction et aux conséquences de celles-ci, tant pour les victimes et les mis en cause qu’en matière de gestion des personnels, d’activité des juges d’instruction des pôles d’instruction seuls compétents sur le ressort de tribunaux de grande instance sans pôle de l’instruction.

Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, les personnes déjà mises en accusation devant la cour d’assises peuvent être renvoyées devant la cour criminelle, avec leur accord recueilli en présence de leur avocat, sur décision du premier président de la cour d’appel. Les personnes mises en accusation devant la cour criminelle dans un délai de deux ans à compter du début de l’expérimentation et non encore jugées dans un délai de trois ans à compter de cette date sont de plein droit mises en accusation devant la cour d’assises.

IV. – (Non modifié) L’article 689-11 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 689-11. – Hors les cas prévus au sous-titre Ier du titre Ier du livre IV pour l’application de la convention portant statut de la Cour pénale internationale, ouverte à la signature à Rome le 18 juillet 1998, peut être poursuivie et jugée par les juridictions françaises, si elle réside habituellement sur le territoire de la République, toute personne soupçonnée d’avoir commis à l’étranger l’une des infractions suivantes :

« 1° Le crime de génocide défini au chapitre Ier du sous-titre Ier du titre Ier du livre II du code pénal ;

« 2° Les autres crimes contre l’humanité définis au chapitre II du même sous-titre Ier, si les faits sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou si cet État ou l’État dont la personne soupçonnée a la nationalité est partie à la convention précitée ;

« 3° Les crimes et les délits de guerre définis aux articles 461-1 à 461-31 du même code, si les faits sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou si cet État ou l’État dont la personne soupçonnée a la nationalité est partie à la convention précitée.

« La poursuite ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public et si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne. À cette fin, le ministère public s’assure de l’absence de poursuite diligentée par la Cour pénale internationale et vérifie qu’aucune autre juridiction internationale compétente pour juger la personne n’a demandé sa remise et qu’aucun autre État n’a demandé son extradition. Lorsque, en application de l’article 40-3 du présent code, le procureur général est saisi d’un recours contre une décision de classement sans suite prise par le procureur de la République, il entend la personne qui a dénoncé les faits si celle-ci en fait la demande. S’il estime le recours infondé, il en informe l’intéressé par une décision écrite motivée. »

V. – (Non modifié) À compter de l’entrée en vigueur de l’article 42 bis C de la présente loi, le dernier alinéa de l’article 689-11 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« La poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu’à la requête du procureur de la République antiterroriste et si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne. À cette fin, le ministère public s’assure de l’absence de poursuite diligentée par la Cour pénale internationale et vérifie qu’aucune autre juridiction internationale compétente pour juger la personne n’a demandé sa remise et qu’aucun autre État n’a demandé son extradition. Lorsque, en application de l’article 40-3 du présent code, le procureur général près la cour d’appel de Paris est saisi d’un recours contre une décision de classement sans suite prise par le procureur de la République antiterroriste, il entend la personne qui a dénoncé les faits si celle-ci en fait la demande. S’il estime le recours infondé, il en informe l’intéressé par une décision écrite motivée. »

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.

M. Maurice Antiste. Le Gouvernement projette de réserver la cour d’assises en première instance aux crimes dits « les plus graves », à savoir ceux qui sont punis de plus de vingt ans de réclusion criminelle. Il s’agit a priori des meurtres et assassinats, ainsi que des crimes commis dans le cadre d’une récidive. Les crimes punis de vingt ans de réclusion ou moins, comme les viols et les vols criminels, seraient donc renvoyés non plus devant la cour d’assises, mais devant la cour criminelle départementale.

Il résulterait de cette décision une hiérarchisation de la gravité des crimes, certains étant de fait qualifiés de moins graves que d’autres.

Il convient aussi de souligner la régression qui en découlerait pour les viols, qui relèveraient désormais de la catégorie des crimes « moins graves ».

Ainsi, le but réel n’est pas la réduction des délais de jugement, mais la réduction budgétaire !

Pourtant, le dernier rapport de la Commission européenne sur l’efficacité de la justice, publié en 2016, est édifiant : avec 64 euros par habitant et par an consacrés au système judiciaire, la France figure en bas du classement des pays européens. Cette situation aurait dû amener le Gouvernement à augmenter significativement le budget de la justice, afin que la France rattrape son retard en la matière et qu’elle réponde aux exigences du droit européen.

Enfin, de telles infractions seraient jugées sans la garantie et le regard d’un jury populaire, mais les peines encourues seraient les mêmes que celles que l’on attribue habituellement en cour d’assises.

Pourtant, le jury est un échantillon parfaitement représentatif de la population d’un département et le contexte sociologique et historique permet parfois de comprendre les raisons d’un passage à l’acte.

En Martinique, la population est essentiellement créolophone et les mots employés n’ont pas toujours la même signification que celle qui est retenue dans l’Hexagone, même en français. La suppression des jurés au sein de notre territoire ne ferait donc qu’accroître le clivage culturel qui existe déjà entre les justiciables et leurs juges.

C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à la non-application de cette disposition à nos territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.

M. Jean-Pierre Sueur. Je veux aborder une question importante qui est relative à la Cour pénale internationale, pour laquelle cet article présente quelques avancées. Comme Mme la garde des sceaux a bien voulu engager un dialogue attentif sur ce sujet, je souhaite rappeler qu’en 2013 nous avons voté, ici même, sur le rapport de M. Anziani, une proposition de loi que j’avais présentée relative aux crimes relevant de la Cour pénale internationale et au rôle du juge français à leur égard. Ces crimes sont les crimes contre l’humanité, le génocide et les crimes de guerre.

Aujourd’hui, quatre verrous ne permettent pas aux juges français d’exercer les prérogatives qui sont les leurs en vertu de la Convention de Rome et le but de la proposition de loi votée de manière unanime par le Sénat était de lever trois d’entre eux. Nous avions en effet estimé, compte tenu de certaines expériences étrangères, qu’il était préférable de maintenir l’un de ces verrous, à savoir le monopole du parquet.

La question reste donc pendante pour trois de ces verrous.

En ce qui concerne l’inversion du principe de complémentarité entre les juridictions nationales et la Cour pénale internationale, le Gouvernement a présenté lors de nos débats un amendement, fruit du dialogue dont je parlais, pour faire disparaître ce verrou. Je tiens, madame la garde des sceaux, à vous en donner acte. L’exposé des motifs de cet amendement indique que supprimer cette exigence, comme l’a fait le Sénat, peut se justifier.

Un autre verrou est la double incrimination. C’est un problème, parce qu’il faudrait que l’incrimination soit la même en France et dans un certain nombre d’États qui n’ont pas du tout la même culture des droits de l’homme que notre pays. Je note toutefois une avancée, puisque nous allons obtenir, si ce projet de loi est voté en l’état – je pense qu’il le sera –, que pour le génocide la double incrimination tombe. En revanche, elle subsisterait pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, ce que je regrette.

Enfin, il reste la question de la résidence habituelle. Comme le disait Robert Badinter, les personnes qui sont coupables de ce type de crimes résident rarement dans un pavillon de banlieue de notre cher pays… Il serait donc justifié, à mon avis comme à celui de la coalition qui travaille sur ces questions – Robert Badinter en fait partie –, que cette condition de résidence habituelle soit supprimée : dès lors que des personnes sont sur notre territoire et qu’elles sont coupables de génocide, de crime contre l’humanité ou de crime de guerre, il serait juste de les interpeller.

En conclusion, je veux vous dire, madame la garde des sceaux, que vous faites certes un pas, mais il en reste à franchir et ils sont importants.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Fouché, Bouloux et Laufoaulu, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Chasseing et A. Marc, Mme Vermeillet, MM. Le Nay, Longeot et Henno et Mme Guidez, est ainsi libellé :

Alinéas 28 à 43

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Cet amendement vise à supprimer l’expérimentation de la chambre criminelle départementale composée uniquement de magistrats et qui jugerait les crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion. Cette expérimentation s’étendrait du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2022 dans un nombre de départements compris entre deux et dix.

Ce dispositif n’est pas du tout clair et je n’ai aucun doute sur le fait que l’expérimentation sera définitive !

L’objectif du Gouvernement est d’accélérer les procès d’assises et d’éviter ainsi la correctionnalisation de certains crimes. Un tel objectif peut paraître légitime, mais le moyen pour y parvenir est inadéquat. Depuis 1810 – deux siècles ! –, les crimes sont jugés par des cours d’assises, où siège, à côté des magistrats professionnels, un jury composé de citoyens tirés au sort. Ce sont des représentants du peuple, des ouvriers, des agriculteurs, des chômeurs, des commerçants, des directeurs, des fonctionnaires…

Les cours d’assises sont des juridictions qui fonctionnent : entre 90 % et 95 % des accusés sont condamnés en premier ressort.

Certes, toute institution est perfectible, mais les cours d’assises ne connaissent pas de dysfonctionnements majeurs qui devraient emporter leur disparition.

La question des moyens qui leur sont octroyés se pose en revanche, à l’heure où les citoyens sont en recherche d’expression directe – nous le constatons tous les jours dans la rue ! Il est plus que jamais indispensable de continuer à associer le peuple, par l’intermédiaire des jurés, à l’acte de juger. Le peuple veut être plus proche des institutions !

Les jurés ne sont pas des juristes, ils apprécient le déroulement du procès, l’interrogatoire, les réactions des individus, cela avec une certaine sagesse.

Pour ces raisons, le présent amendement prévoit la suppression de cette disposition incroyable, proposée sans aucune concertation avec les différents acteurs et qui annonce la fin des cours d’assises.

Si le Sénat adopte cette disposition, il devra assumer la suppression des cours d’assises, car tel est bien l’objectif du Gouvernement !

Mme la présidente. L’amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande et Mme Artigalas, est ainsi libellé :

Alinéa 41

Après la seconde occurrence du mot :

départements

insérer les mots :

, à l’exclusion des collectivités de l’article 73 de la Constitution,

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Je me suis déjà exprimé sur l’article et mes propos vont rejoindre ceux d’Alain Fouché.

La création de la cour criminelle considérée a pour conséquence de supprimer le jury populaire pour les crimes passibles d’une peine d’emprisonnement de moins de vingt ans.

Cette suppression des jurys populaires, représentatifs de la population locale, est particulièrement malvenue dans les outre-mer, où les justiciables ont plus de mal à se reconnaître dans des juges potentiellement venus d’ailleurs et qui ne possèdent pas forcément la connaissance spontanée des spécificités culturelles du langage oral ou gestuel – ces particularités doivent pourtant être prises en compte dans les procédures criminelles. Elle aura de fait des conséquences non négligeables sur la pertinence et la crédibilité des décisions rendues.

D’ailleurs, je rappelle que le Président de la République, Emmanuel Macron, a lui-même parlé récemment, comme il l’avait déjà fait auparavant, d’un droit à la différenciation !

Aussi, cet amendement vise à maintenir dans les outre-mer la présence de jurés issus du même contexte culturel et social, en excluant l’application du nouveau dispositif dans les collectivités de l’article 73 régies par la Constitution.

Je considère que cet amendement est un amendement de repli par rapport à celui qu’a déposé Alain Fouché.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements et je voudrais m’en expliquer très rapidement.

En première lecture, nous avons pris connaissance de la proposition du Gouvernement, qui visait alors un tribunal criminel, lequel est devenu depuis lors une cour criminelle.

Nous avions à l’époque fait deux observations.

Tout d’abord, en matière d’agressions sexuelles notamment, les procédures devant les cours d’assises sont extrêmement longues, alors même qu’il est souhaitable que la réponse pénale intervienne relativement rapidement, en particulier dans l’intérêt des victimes. C’est ce qui explique qu’aujourd’hui certaines de ces affaires sont finalement renvoyées, avec l’accord des parties, devant un tribunal correctionnel – c’est ce qu’on appelle la correctionnalisation. Le nombre d’affaires concernées par ce phénomène est assez important. C’est une réalité ! Juger plus vite ces crimes paraît infiniment souhaitable.

Ensuite, nous nous sommes interrogés sur le fait de renvoyer ces affaires devant une juridiction que l’on pourrait qualifier de spécialisée, puisqu’elle jugera de crimes, mais en l’absence de jury populaire.

Pour autant, le projet de loi prévoit uniquement une expérimentation et nous ne pouvons pas sérieusement la refuser à ce stade, même si des interrogations persistent sur les conséquences de la mise en place de cette nouvelle juridiction, ou encore sur les conditions de l’appel des décisions rendues.

Les réponses à ces interrogations ne peuvent pas toutes être apportées aujourd’hui, mais il est certain que ces crimes doivent être jugés plus rapidement. C’est pourquoi la commission des lois s’est prononcée en faveur d’une expérimentation et qu’elle émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’avis du Gouvernement est également défavorable et je ne saurais mieux m’exprimer que M. le rapporteur.

J’ajouterai simplement deux éléments. Tout d’abord, il s’agit d’une expérimentation qui ne s’appliquera que dans les départements ou les collectivités qui seront volontaires. Si vous estimez, monsieur le sénateur Antiste, qu’une difficulté existe de ce point de vue dans les collectivités d’outre-mer, il suffira de ne pas être candidat à cette expérimentation. Ensuite, le jury populaire ne sera pas supprimé, puisque, en toute hypothèse, la cour d’assises, dans son fonctionnement actuel, c’est-à-dire avec un jury populaire, sera compétente en appel.

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste, pour explication de vote.

M. Maurice Antiste. Je vous remercie, madame la ministre, des précisions que vous avez bien voulu apporter et je ferai tout, avec l’ensemble du barreau martiniquais qui est derrière moi sur ce dossier, pour faire en sorte que la Martinique ne soit pas candidate.

Au-delà, je veux vous inviter, à prendre l’initiative d’une réflexion sur ce que peut être la justice dans un pays du tiers-monde comme le nôtre, où les rapports sociaux sont extrêmement difficiles, notamment en raison du poids de notre passé encore récent.

Vous conviendrez avec moi du fait que la justice est d’abord une affaire culturelle et il y aurait beaucoup à dire de ce point de vue. Je me tiens à votre disposition pour lancer ce débat. En tout cas, j’y participerai volontiers et je suis prêt à vous démontrer, malgré le doute que vous semblez afficher, que rendre la justice est largement une affaire culturelle.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. À mon avis, cette expérimentation de 2019 à 2022, sur dix départements volontaires, paraît-il, durera définitivement. Il y aura deux sortes de juridiction : des cours avec cinq magistrats et des cours d’assises avec trois magistrats et douze jurés. Où est l’égalité devant la justice ?

L’objectif du Gouvernement est d’accélérer les procès d’assises, mais les procédures restent identiques. Aujourd’hui, des procédures en correctionnelle peuvent durer pendant des mois, voire des années. J’ai donc des doutes sur le résultat.

Je résume : il s’agit de remplacer les jurés par des professionnels, mais on n’est pas sûr que la procédure soit plus rapide. Ce faisant, on éloigne le peuple de l’acte de juger. De surcroît, madame la ministre, les professionnels ne sont pas toujours les meilleurs. Certes, de nombreux magistrats sont très bons, mais ils ne sont pas meilleurs que les jurés.

Madame la ministre, j’apprécierai que vous m’écoutiez…

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je vous écoute, monsieur le sénateur !

M. Alain Fouché. Je le répète, on l’a vu, les professionnels, parfois, ne sont pas meilleurs que les jurés. Je pense notamment au procès de l’affaire d’Outreau, qui fut un véritable scandale. En l’espèce, la défaillance ne venait pas des jurés, mais le petit juge a été totalement couvert, puisque, in fine, on l’a nommé à la Cour de cassation.

Cela dit, l’examen de ce texte au Parlement en quelques semaines remet en cause l’essence même du procès pénal.

Pour ma part, je voterai contre cette expérimentation, qui, à mon avis, deviendra définitive. C’est antidémocratique ! Vous êtes en train de casser un système qui fonctionne bien depuis deux siècles. J’ai honte !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 23 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 42.

(Larticle 42 est adopté.)

Chapitre IV

Dispositions relatives au terrorisme et au crime organisé

Article 42
Dossier législatif : projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
Article 42 bis AB

Article 42 bis AA

(Non modifié)

I. – Le chapitre VII du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Au début, est ajoutée une section 1 intitulée : « Les parquets spécialisés près le tribunal de grande instance de Paris » et comprenant les articles L. 217-1 à L. 217-4 ;

2° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :

« Section 2

« Lindemnisation des victimes dactes de terrorisme

« Art. L. 217-6. – Le tribunal de grande instance de Paris a compétence exclusive pour connaître, en matière civile, à moins qu’ils n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire :

« 1° Des demandes formées par les victimes mentionnées à l’article L. 126-1 du code des assurances contre le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, après saisine de ce dernier, et relatives :

« a) À la reconnaissance de leur droit à indemnisation ;

« b) Au versement d’une provision ;

« c) À l’organisation d’une expertise judiciaire en cas de contestation de l’examen médical pratiqué en application de l’article L. 422-2 du même code ou en cas de refus du fonds de garantie de désigner un médecin à cette fin ;

« d) À l’offre d’indemnisation qui leur est faite ;

« 2° Des recours subrogatoires du fonds de garantie en remboursement des indemnités ou provisions mentionnées au 1° du présent article ;

« 3° Des demandes formées contre toute personne, autre que le fonds de garantie, en réparation du dommage résultant d’un acte de terrorisme. »

bis. – Au premier alinéa de l’article 706-3 du code de procédure pénale, après la première occurrence du mot : « personne », sont insérés les mots : « , y compris tout agent public ou tout militaire, ».

II. – Après l’article 706-16 du code de procédure pénale, sont insérés des articles 706-16-1 et 706-16-2 ainsi rédigés :

« Art. 706-16-1. – Lorsqu’elle est exercée devant les juridictions répressives, l’action civile portant sur une infraction qui constitue un acte de terrorisme ne peut avoir pour objet que de mettre en mouvement l’action publique ou de soutenir cette action. Elle ne peut tendre à la réparation du dommage causé par cette infraction.

« L’action civile en réparation de ce dommage ne peut être exercée que devant une juridiction civile, séparément de l’action publique. L’article 5 n’est alors pas applicable.

« Lorsque la juridiction répressive est saisie d’une demande tendant à la réparation du dommage causé par cette infraction, elle renvoie l’affaire, par une décision non susceptible de recours, devant la juridiction civile compétente en application de l’article L. 217-6 du code de l’organisation judiciaire qui l’examine d’urgence selon une procédure simplifiée déterminée par décret en Conseil d’État.

« Art. 706-16-2. – La juridiction civile compétente en application de l’article L. 217-6 du code de l’organisation judiciaire peut procéder ou faire procéder à toutes auditions et investigations utiles, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. Elle peut notamment se faire communiquer, par le procureur de la République ou le juge d’instruction, copie des procès-verbaux constatant l’infraction ou de toute autre pièce de la procédure pénale, même en cours.

« Elle peut également requérir :

« 1° De toute personne ou administration la communication de renseignements sur la situation professionnelle, financière, fiscale ou sociale des personnes ayant à répondre du dommage causé par l’infraction ou du requérant ;

« 2° De toute administration ou tout service de l’État, collectivité publique, organisme de sécurité sociale, organisme assurant la gestion des prestations sociales ou entreprise d’assurance susceptible de réparer tout ou partie du préjudice la communication des renseignements relatifs à l’exécution de ses obligations éventuelles.

« Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d’autres fins que l’instruction de la demande d’indemnité et leur divulgation est interdite. »

II bis. – Au premier alinéa de l’article L. 126-1 du code des assurances, après la seconde occurrence du mot : « actes », sont insérés les mots : « , y compris tout agent public ou tout militaire, ».

III. – La section 1 du chapitre II du titre II du livre IV du code des assurances est ainsi modifiée :

1° Après l’article L. 422-1, il est inséré un article L. 422-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 422-1-1. – Le fonds de garantie mentionné à l’article L. 422-1 peut requérir de toute administration ou tout service de l’État et des collectivités publiques, de tout organisme de sécurité sociale, de tout organisme assurant la gestion des prestations sociales, de tout employeur ainsi que des établissements financiers ou entreprises d’assurance susceptibles de réparer tout ou partie du préjudice la réunion et la communication des renseignements dont ceux-ci disposent ou peuvent disposer relatifs à l’exécution de leurs obligations éventuelles, sans que ne puisse lui être opposé le secret professionnel.

« Le fonds de garantie informe la victime mentionnée à l’article L. 126-1 avant toute réquisition susceptible de porter sur des renseignements relatifs à sa personne ou à sa situation et sollicite son accord préalable lorsque la réquisition est adressée à son employeur.

« Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d’autres fins que l’instruction du dossier d’indemnisation et leur divulgation est interdite. Les personnes qui ont à connaître des documents et informations fournis au fonds de garantie sont tenues au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal. » ;

2° L’article L. 422-2 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour procéder à l’examen médical de la victime mentionnée à l’article L. 126-1, le fonds de garantie choisit un médecin spécialisé en évaluation des dommages corporels inscrit sur les listes des experts judiciaires dressées par les cours d’appel. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article s’applique lorsque la juridiction reconnaît le droit à indemnisation de la victime. En ce cas, le délai mentionné au deuxième alinéa court à compter du jour où la décision de la juridiction est exécutoire. »

IV. – Au 1° du I, à la première phrase du II et au a du 1° du III de l’article L. 169-4 et au premier alinéa du II de l’article L. 169-10 du code de la sécurité sociale ainsi qu’à la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 422-2 du code des assurances, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième ».

V. – L’article 9-2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du premier alinéa sont également applicables aux victimes de crimes d’atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité de la personne prévus et réprimés par le 1° de l’article 421-1 et les 1° à 4° de l’article 421-3 du code pénal ainsi qu’à leurs ayants droit en vue de leur constitution de partie civile au soutien de l’action publique. »

VI. – Le présent article, à l’exception du a du 2° du III et du IV, entre en vigueur le premier jour du mois suivant la publication de la présente loi. À cette date, les procédures en cours devant les juridictions civiles sont transférées en l’état au tribunal de grande instance de Paris.

Les affaires peuvent être renvoyées par la juridiction initialement saisie avant la date mentionnée au premier alinéa du présent VI pour une audience postérieure à cette date devant le tribunal de grande instance de Paris.

Il n’y a pas lieu de renouveler les actes, formalités et jugements régulièrement intervenus avant le transfert des procédures. Les parties sont informées par la juridiction antérieurement compétente qu’il leur appartient d’accomplir les actes de la procédure devant le tribunal de grande instance de Paris. Les archives et les minutes du secrétariat de la juridiction antérieurement compétente sont transférées au greffe du tribunal de grande instance de Paris.

Le a du 2° du III et le IV entrent en vigueur le premier jour du dix-huitième mois suivant la publication de la présente loi.

Mme la présidente. L’amendement n° 73, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 36

Remplacer les mots :

est complété

par les mots :

et l’article 5-1 de l’ordonnance n° 92-1147 du 12 octobre 1992 relative à l’aide juridictionnelle en matière pénale en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna sont complétés

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur le sénateur Fouché, je vous rassure, je vous ai bien écouté. J’avais une oreille qui était destinée à M. le président de la commission des lois, mais l’autre était entièrement dédiée à votre écoute. (Rires.)

Je comprends évidemment les réactions que l’on peut avoir à l’idée que soient modifiées les conditions…

M. Alain Fouché. J’ai plaidé pendant trente ans dans des procès d’assises !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je comprends, monsieur le sénateur, mais il ne faut pas penser que les magistrats professionnels ne rendent pas la justice au nom du peuple français. C’est bien évidemment le cas.

D’autre part, je le redis devant vous, les jurys populaires ne sont pas supprimés. Simplement, ils sont réservés aux appels en cour d’assises. Ainsi, nous avons à la fois le maintien de cette spécificité, dont on sait la qualité, et la possibilité d’avoir des jugements plus rapides rendus par des magistrats professionnels. Ces jugements, monsieur le sénateur, traduiront bien la vérité judiciaire, comme l’a dit M. le rapporteur : tous les crimes seront vraiment jugés en tant que crimes et ne seront pas correctionnalisés parce que les victimes le demandent ou parce que cela permet d’obtenir un jugement plus rapide.

Je vous prie de m’excuser, madame la présidente, mais j’ai tenu à répondre à M. le sénateur Fouché.

J’en viens maintenant à l’amendement n° 73, qui vise à étendre à la Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna le bénéfice de l’aide juridictionnelle pour les constitutions de partie civile aux fins de soutien de l’action publique en matière de terrorisme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 73.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 42 bis AA, modifié.

(Larticle 42 bis AA est adopté.)

Article 42 bis AA (Texte non modifié par la commission)
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Article 42 bis AC

Article 42 bis AB

I. – Le chapitre VIII du titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 228-2 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « La personne concernée peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat qu’il délègue l’annulation de la décision dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification. Il est statué sur la légalité de la décision au plus tard dans un délai de soixante-douze heures à compter de la saisine du tribunal. Dans ce cas, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande. » ;

b) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l’intéressé s’il en manifeste la volonté. Si ce dernier n’a pas fait l’objet d’un sauf-conduit délivré par le ministre de l’intérieur en raison de la menace pour la sécurité et l’ordre publics que constituerait un tel déplacement, il est représenté par un avocat. » ;

c) Le dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « peut, », sont insérés les mots : « dans un délai de deux mois » et les mots : « ou à compter de la notification de chaque renouvellement » sont remplacés par les mots : « , ou à compter de la notification de chaque renouvellement lorsqu’il n’a pas été fait préalablement usage de la faculté prévue au sixième alinéa » ;

– après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le tribunal administratif statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine. » ;

– la seconde phrase est ainsi rédigée : « Ces recours, dont les modalités sont fixées au chapitre III ter du titre VII du livre VII du code de justice administrative, s’exercent sans préjudice des procédures prévues au sixième alinéa du présent article ainsi qu’aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du même code. » ;

2° L’article L. 228-5 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du troisième alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées : « La personne concernée peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat qu’il délègue l’annulation de la décision dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification. Il est statué sur la légalité de la décision au plus tard dans un délai de soixante-douze heures à compter de la saisine du tribunal. Dans ce cas, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande. » ;

b) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public. Lorsque la présence du requérant à l’audience est susceptible de méconnaître les obligations résultant de la mesure de surveillance, le requérant peut solliciter un sauf-conduit pour s’y rendre. Le sauf-conduit n’est pas délivré si le déplacement du requérant constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics. » ;

c) Le dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « ou à compter de la notification de chaque renouvellement » sont remplacés par les mots : « , ou à compter de la notification de chaque renouvellement lorsqu’il n’a pas été fait préalablement usage de la faculté prévue au troisième alinéa » ;

– après la même première phrase, est insérée une phrase une rédigée : « Le tribunal administratif statue dans un délai d’un mois à compter de sa saisine. » ;

– la seconde phrase est ainsi rédigée : « Ces recours, dont les modalités sont fixées au chapitre III ter du titre VII du livre VII du code de justice administrative, s’exercent sans préjudice des procédures prévues au troisième alinéa du présent article ainsi qu’aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du même code. »

II. – (Non modifié) Le chapitre III ter du titre VII du livre VII du code de justice administrative est complété par un article L. 773-10 ainsi rédigé :

« Art. L. 773-10. – Les modalités selon lesquelles le tribunal administratif examine les recours en annulation formés contre les mesures individuelles de contrôle et de surveillance obéissent aux règles définies aux articles L. 228-2 et L. 228-5 du code de la sécurité intérieure.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » – (Adopté.)

Article 42 bis AB
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Article 42 bis B

Article 42 bis AC

(Non modifié)

Le chapitre IX du titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 229-1, après le mot : « saisie », sont insérés les mots : « des documents et » ;

2° Au premier alinéa du I de l’article L. 229-4, après le mot : « les », sont insérés les mots : « documents et » ;

3° Le I de l’article L. 229-5 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la troisième occurrence du mot : « de », sont insérés les mots : « documents ou » ;

b) À la deuxième phrase du second alinéa, après le mot : « des », sont insérés les mots : « documents et » ;

4° Le II du même article L. 229-5 est ainsi modifié :

a) À la fin de la première phrase du premier alinéa, à la fin du troisième alinéa et à la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « données saisies » sont remplacés par les mots : « documents et données saisis » ;

b) Au sixième alinéa, après la seconde occurrence du mot : « les », sont insérés les mots : « documents et » ;

c) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « article, », sont insérés les mots : « les documents, » ;

– au début de la deuxième phrase, sont ajoutés les mots : « Les documents ainsi que » ;

– à la même deuxième phrase, les mots : « la copie » sont remplacés par les mots : « leur copie ou à celle » et les mots : « l’exploitation » sont remplacés par les mots : « leur exploitation ou celle » ;

– à la dernière phrase, les mots : « données copiées » sont remplacés par les mots : « copies des documents ou des données ». – (Adopté.)

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Article 42 bis AC
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Article 42 bis C

Article 42 bis B

(Non modifié)

I. – Le titre XXV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 706-75 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, le tribunal de grande instance et la cour d’assises de Paris exercent une compétence concurrente sur l’ensemble du territoire national pour l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des crimes et délits mentionnés au premier alinéa du présent article, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d’une très grande complexité, en raison notamment du ressort géographique sur lequel elles s’étendent. » ;

2° Au premier alinéa de l’article 706-77, les mots : « autre que ceux visés à l’article 706-75 » sont supprimés ;

3° Au second alinéa de l’article 706-80, après le mot : « moyen, », sont insérés les mots : « au procureur de la République déjà saisi et » et, à la fin, les mots : « ou, le cas échéant, au procureur de la République saisi en application des dispositions de l’article 706-76 » sont supprimés ;

4° La section 1 du chapitre II est complétée par des articles 706-80-1 et 706-80-2 ainsi rédigés :

« Art. 706-80-1. – Lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner des personnes d’avoir commis l’une des infractions entrant dans le champ d’application des articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74, dans le cadre d’une opération de surveillance, et lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction l’exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l’autorisation du procureur de la République chargé de l’enquête ou du juge d’instruction saisi, qui en avise préalablement le parquet, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à l’interpellation de ces personnes afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« Dans le cadre d’une opération de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de l’une des infractions entrant dans le champ d’application des mêmes articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74 ou servant à les commettre, et lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction l’exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l’autorisation du procureur de la République chargé de l’enquête ou du juge d’instruction saisi, qui en avise préalablement le parquet, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à la saisie de ces objets, biens ou produits afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« L’autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, qui peut être donnée par tout moyen, est mentionnée ou versée au dossier de la procédure. Le procureur de la République informe sans délai le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de la délivrance de cette autorisation.

« Art. 706-80-2. – Dans le cadre d’une opération de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de l’une des infractions entrant dans le champ d’application des articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74 ou servant à les commettre, et lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction l’exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l’autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction saisi des faits, qui en avise préalablement le parquet, livrer ou délivrer à la place des prestataires de services postaux et des opérateurs de fret ces objets, biens ou produits, sans être pénalement responsables.

« À peine de nullité, l’autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction est écrite et motivée. Cette autorisation est versée au dossier de la procédure et les actes autorisés ne peuvent constituer une incitation à commettre une infraction. »

II. – La section 7 du chapitre IV du titre II du code des douanes est ainsi modifiée :

1° Le I de l’article 67 bis est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « procèdent » est remplacé par les mots : « peuvent procéder » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « selon le cas, » et, à la fin, les mots : « ou au procureur de la République saisi en application des dispositions de l’article 706-76 du code de procédure pénale » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés des articles 67 bis-3 et 67 bis-4 ainsi rédigés :

« Art. 67 bis-3. – Lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner des personnes d’avoir commis un délit douanier dont la peine d’emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans ou d’y avoir participé comme complices ou intéressées à la fraude au sens de l’article 399, dans le cadre d’une opération de surveillance, et lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret peuvent, sur l’ensemble du territoire national, avec l’autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à l’interpellation de ces personnes afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« Dans le cadre d’une opération de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d’un délit douanier ou servant à le commettre, lorsque la peine d’emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans, et lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret peuvent, sur l’ensemble du territoire national, avec l’autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à la saisie de ces objets, biens ou produits afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« L’autorisation du procureur de la République, qui peut être donnée par tout moyen, est mentionnée ou versée au dossier de la procédure. Le procureur de la République informe sans délai le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de la délivrance de cette autorisation.

« Art. 67 bis-4. – Dans le cadre d’une opération de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d’un délit douanier ou servant à le commettre, lorsque la peine d’emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans, et lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret peuvent, sur l’ensemble du territoire national, avec l’autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, livrer ou délivrer à la place des prestataires de services postaux et des opérateurs de fret ces objets, biens ou produits, sans être pénalement responsables.

« À peine de nullité, l’autorisation du procureur de la République est écrite et motivée. Cette autorisation est versée au dossier de la procédure et les actes autorisés ne peuvent constituer une incitation à commettre une infraction. » – (Adopté.)

Article 42 bis B
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Article 42 bis

Article 42 bis C

Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Au début de l’article L. 122-3, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions du code de procédure pénale, » ;

2° à 7° (Supprimés)

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 41 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il s’agit d’actes d’enquête devant être exécutés dans un autre ressort que celui du tribunal de grande instance, il peut demander au procureur de la République territorialement compétent d’y procéder ou d’y faire procéder par un officier de police judiciaire. Il peut toutefois également requérir directement tout officier de police judiciaire sur l’ensemble du territoire national de procéder à ces actes. » ;

1° bis A et 1° bis à 1° sexies (Supprimés)

2° Le deuxième alinéa de l’article 702 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont également compétents sur toute l’étendue du territoire national le procureur de la République, le tribunal de grande instance et la cour d’assises de Paris selon les modalités déterminées aux articles 628-1 à 628-6 et 698-6. » ;

2° bis (Supprimé)

3° L’article 706-17-1 devient l’article 706-17-2 ;

4° L’article 706-17-1 est ainsi rétabli :

« Art. 706-17-1. – Sans préjudice des dispositions du troisième alinéa de l’article 41, lorsqu’il exerce sa compétence en application de la présente section, le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris peut requérir par délégation judiciaire tout procureur de la République de procéder ou faire procéder aux actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-16 dans les lieux où ce dernier est territorialement compétent.

« La délégation judiciaire mentionne les actes d’enquête confiés au procureur de la République ainsi requis. Elle ne peut prescrire que des actes se rattachant directement à l’enquête pour laquelle elle a été délivrée.

« Elle indique la nature de l’infraction, objet de l’enquête. Elle est datée et signée par le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris et revêtue de son sceau.

« Le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris fixe le délai dans lequel la délégation doit lui être retournée accompagnée des procès-verbaux relatant son exécution. À défaut d’une telle fixation, la délégation judiciaire et les procès-verbaux doivent lui être transmis dans les huit jours de la fin des opérations exécutées en vertu de celle-ci.

« Les magistrats commis pour son exécution exercent, dans les limites de la délégation judiciaire, tous les pouvoirs du procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris prévus par la présente section. » ;

4° bis à 4° quater (Supprimés)

5° L’article 706-25 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l’article 34, le ministère public auprès de la cour d’assises statuant en première instance est représenté par le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris en personne ou par ses substituts. »

6° à 8° (Supprimés)

III et IV. – (Supprimés) – (Adopté.)

Chapitre V

Dispositions relatives à la cassation

Article 42 bis C
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Article 42 ter

Article 42 bis

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 567 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le ministère d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation est obligatoire pour le demandeur en cassation et les autres parties, sauf pour la déclaration de pourvoi prévue aux articles 576 et 577.

« Cet avocat est choisi par le demandeur en cassation ou par la partie ou, à sa demande, désigné par le président de l’ordre des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation. La désignation intervient dans un délai maximal de huit jours lorsque le pourvoi porte sur les matières dans lesquelles la chambre criminelle est tenue de statuer dans un délai légal en application des articles 567-2, 574-1 et 574-2. » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa des articles 567-2, 574-1 et 574-2, les mots : « ou son avocat » sont supprimés ;

3° Les articles 584 et 585 sont abrogés ;

4° L’article 585-1 est ainsi rédigé :

« Art. 585-1. – Sauf dérogation accordée par le président de la chambre criminelle, et sous réserve des articles 567-2, 574-1 et 574-2, la déclaration de l’avocat qui se constitue au nom d’un demandeur en cassation doit parvenir au greffe de la Cour de cassation un mois au plus tard après la date du pourvoi. » ;

5° À la fin de la première phrase de l’article 586, les mots : « , une expédition de l’acte de pourvoi et, s’il y a lieu, le mémoire du demandeur » sont remplacés par les mots : « et une expédition de l’acte de pourvoi » ;

6° Au début de l’article 588, les mots : « Si un ou plusieurs avocats se sont constitués, » sont supprimés ;

7° L’article 590-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « et n’a pas déposé son mémoire dans le délai prévu à l’article 584 » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « n’ayant pas constitué avocat » sont supprimés ;

8° L’article 858 est abrogé.

II. – Le second alinéa de l’article 58 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :

« Au-delà d’un délai de dix jours après la déclaration de pourvoi, la partie civile pourra transmettre son mémoire directement au greffe de la Cour de cassation sans le ministère d’un avocat à la Cour de cassation. Le mémoire devra être accompagné d’autant de copies qu’il y a de parties en cause. »

III. – L’article 49 de la loi n° 83-520 du 27 juin 1983 rendant applicable le code pénal, le code de procédure pénale et certaines dispositions législatives dans les territoires d’outre-mer est abrogé. – (Adopté.)

Chapitre VI

Dispositions relatives à l’entraide internationale

Article 42 bis
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Article 43

Article 42 ter

(Non modifié)

I. – L’article 230-19 du code de procédure pénale est complété par un 17° ainsi rédigé :

« 17° Les interdictions prévues aux 1° et 2° de l’article 515-11 du code civil et celles prévues par une mesure de protection en matière civile ordonnée dans un autre État membre de l’Union européenne reconnue et ayant force exécutoire en France en application du règlement (UE) n° 606/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile, ainsi que celles prévues par une décision de protection européenne reconnue conformément à l’article 696-102 du présent code en application de la directive 2011/99/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la décision de protection européenne. »

II. – Le titre X du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 4° de l’article 694-31, les mots : « relève des dispositions du deuxième alinéa de l’article 694-17 du présent code » sont remplacés par les mots : « concerne une procédure mentionnée à l’article 694-29 du présent code et qui n’est pas relative à une infraction pénale » ;

2° Au début de la première phrase du deuxième alinéa de l’article 695-26, les mots : « L’article 74-2 est applicable » sont remplacés par les mots : « Les articles 74-2 et 230-33 sont applicables » ;

3° À la fin de la première phrase de l’article 696-9-1, les mots : « l’article 74-2 est applicable » sont remplacés par les mots : « les articles 74-2 et 230-33 sont applicables » ;

4° La section 5 du chapitre V est complétée par un article 696-47-1 ainsi rédigé :

« Art. 696-47-1. – Lorsqu’à la suite d’une demande d’extradition émanant du Gouvernement français la personne a déjà été remise et que, en l’absence de renonciation au principe de spécialité par la personne ou par le Gouvernement étranger, il est demandé l’autorisation d’étendre les poursuites à d’autres infractions commises avant l’arrivée de la personne sur le territoire national, cette demande est accompagnée d’un mandat d’arrêt si un tel mandat avait déjà été délivré et, dans le cas contraire, d’un mandat d’amener. » ;

5° Au a du 4° de l’article 696-73, les mots : « aux troisième à trente-quatrième alinéas de l’article 695-23 » sont remplacés par les mots : « à l’article 694-32 ».

III. – L’article 227-4-2 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les mêmes peines sont applicables à la violation d’une mesure de protection en matière civile ordonnée dans un autre État membre de l’Union européenne reconnue et ayant force exécutoire en France en application du règlement (UE) n° 606/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile. »

IV. – Après le premier alinéa de l’article 64 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’avocat assistant, dans les conditions fixées à l’article 695-17-1 du code de procédure pénale, une personne arrêtée dans l’État membre d’exécution d’un mandat d’arrêt européen qui remplit les conditions pour bénéficier de l’aide juridictionnelle a droit à une rétribution. » – (Adopté.)

TITRE V

RENFORCER L’EFFICACITÉ ET LE SENS DE LA PEINE

Chapitre Ier

Dispositions relatives aux peines encourues et au prononcé de la peine

Article 42 ter
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Article 43 bis

Article 43

I. – L’article 131-3 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 131-3. – Les peines correctionnelles encourues par les personnes physiques sont :

« 1° L’emprisonnement ;

« 2° La probation ;

« 3° Le travail d’intérêt général ;

« 4° L’amende ;

« 5° Le jour-amende ;

« 6° Le stage prévu à l’article 131-5-1 ;

« 7° Les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l’article 131-6 ;

« 8° Le suivi socio-judiciaire prévu à l’article 131-36-1.

« Ces peines ne sont pas exclusives des peines complémentaires prévues à l’article 131-10. »

1° à 7° (Supprimés)

II. – (Supprimé)

III. – L’article 131-5-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 131-5-1. – Lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement, la juridiction peut, à la place ou en même temps que l’emprisonnement, prescrire que le condamné devra accomplir, pendant une durée ne pouvant excéder un mois, un stage dont elle précise la nature, les modalités et le contenu eu égard à la nature du délit et aux circonstances dans lesquelles il a été commis.

« Sauf décision contraire de la juridiction, le stage, dont le coût ne peut excéder celui des amendes contraventionnelles de la 3e classe, est effectué aux frais du condamné.

« Le stage est exécuté dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle la condamnation est définitive, sauf impossibilité résultant du comportement ou de la situation du condamné. »

III bis. – Le début de l’article 131-6 du code pénal est ainsi rédigé : « En matière correctionnelle, la juridiction peut prononcer, à la place ou en même temps que l’emprisonnement ou que l’amende, une ou plusieurs… (le reste sans changement). »

III ter. – L’article 131-7 du code pénal est abrogé.

IV. – L’article 131-8 du code pénal est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la première occurrence du mot : « de » est remplacée par les mots : « ou en même temps que » ;

1° bis (Supprimé)

2° Les deuxième et dernier alinéas sont ainsi rédigés :

« Lorsque le prévenu est présent à l’audience, la peine de travail d’intérêt général ne peut être prononcée si celui-ci la refuse. Le président du tribunal, avant le prononcé du jugement, informe le prévenu de son droit de refuser l’accomplissement d’un travail d’intérêt général et reçoit sa réponse.

« Lorsque le prévenu n’est pas présent à l’audience mais y est représenté par son avocat, cette peine peut être prononcée s’il a fait connaître par écrit son accord. »

V. – Le premier alinéa de l’article 131-9 du code pénal est supprimé.

VI. – L’article 131-16 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le 7° est ainsi rédigé :

« 7° La peine de stage prévue à l’article 131-5-1 ; »

2° Les 8°, 9°, 9° bis et 9° ter sont abrogés ;

3° (Supprimé)

VI bis. – (Supprimé)

VII. – (Non modifié)

VII bis, VII ter A, VII ter, VIII et VIII bis. – (Supprimés)

IX. – Sont abrogés :

1° Les articles 131-35-1 et 131-35-2, les 4° bis et 8° de l’article 221-8, les 9°, 9° bis et 15° du I de l’article 222-44, les 4° et 5° de l’article 222-45, les 4° bis, 4° ter et 6° de l’article 223-18, le 4° du I de l’article 224-9, le 6° de l’article 225-19, les 7° et 8° du I de l’article 225-20, le 7° de l’article 227-29, l’article 227-32, le 6° du I de l’article 311-14, les 6° et 7° du I de l’article 312-13, le 10° de l’article 321-9, les 5° et 6° du I de l’article 322-15 du code pénal ;

2° Le 3° de l’article 24, le 2° de l’article 32 et de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

3° Le deuxième alinéa de l’article L. 3421-1 du code de la santé publique.

IX bis. – (Non modifié)

IX ter A. – (Supprimé)

IX ter. – (Non modifié)

IX quater. – Au second alinéa de l’article 3 de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, les mots : « de citoyenneté mentionné au 8° » sont remplacés par les mots : « mentionné au 7° ».

IX quinquies. – À la première phrase du premier alinéa de l’article 709-1-1 et au premier alinéa de l’article 709-1-3 du code de procédure pénale, les mots : « deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « premier alinéa ».

X. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication du décret prévu au deuxième alinéa du présent X, le travail d’intérêt général prévu à l’article 131-8 du code pénal peut également être effectué au profit d’une personne morale de droit privé remplissant les conditions définies à l’article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire et poursuivant un but d’utilité sociale au sens de l’article 2 de la même loi.

Les conditions spécifiques d’habilitation de ces personnes morales de droit privé et d’inscription des travaux qu’elles proposent sur la liste des travaux d’intérêt général ainsi que les obligations particulières mises à leur charge dans la mise en œuvre de ces travaux sont précisées par décret en Conseil d’État.

Les départements dans lesquels cette mesure peut être prononcée pendant la durée de l’expérimentation, dont le nombre ne peut excéder vingt, sont déterminés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice.

Six mois au moins avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport procédant à son évaluation. – (Adopté.)

Article 43
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Article 43 ter

Article 43 bis

Après l’article 131-30-2 du code pénal, il est inséré un article 131-30-3 ainsi rédigé :

« Art. 131-30-3. – L’interdiction du territoire français est prononcée par la juridiction de jugement dans les conditions prévues à l’article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable de l’un des délits ou crimes punis d’une peine au moins égale à cinq ans d’emprisonnement.

« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »

Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. L’article 43 bis, rétabli par la majorité de la commission des lois, résulte d’un amendement de nos collègues du groupe Les Républicains, adopté en première lecture par le Sénat.

Il vise à élargir l’application de l’interdiction du territoire, appelée communément la double peine, à tout étranger reconnu coupable d’un crime ou délit entraînant cinq ans ou plus d’emprisonnement.

Cette interdiction de territoire est actuellement réservée aux crimes et délits les plus graves, à commencer par les actes terroristes.

Ce nouvel article 43 bis entraînera, par exemple, l’application de la double peine à un individu auteur d’un vol de mobylette avec effraction, comme le rappelait Mme la garde des sceaux en première lecture, ici même.

À nos yeux, il s’agit d’une disposition dogmatique, qui créerait une discrimination lourde entre délinquants du fait de leur statut. Pour la majorité sénatoriale, tous les artifices sont bons pour justifier certaines adaptations aux principes de liberté publique. Nous souhaitons donc la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car elle souhaite conserver l’article 43 bis. Je le précise, cet article, que nous avons adopté sur l’initiative de notre collègue Bruno Retailleau, assortit d’une interdiction du territoire la condamnation de « tout étranger coupable de l’un des délits ou crimes punis d’une peine au moins égale – j’y insiste – à cinq ans d’emprisonnement », sauf exception dûment motivée.

Je rappelle que le Sénat a adopté à plusieurs reprises cette mesure.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. À l’inverse de M. le rapporteur, j’émets un avis favorable sur cet amendement, qui a pour objet de supprimer un article ayant pour effet, selon nous, d’étendre de manière excessive et disproportionnée la peine d’interdiction du territoire français. Aujourd’hui, vous l’avez rappelé, madame Cukierman, cette mesure est réservée uniquement aux infractions commises en matière terroriste. Le fait de l’étendre à des peines punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement nous paraît exagéré. Cette généralisation est d’autant moins nécessaire que cette peine est déjà encourue, à titre facultatif, pour de nombreux délits, et que la liste en cause a été encore récemment complétée par la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 43 bis.

(Larticle 43 bis est adopté.)

Article 43 bis
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Article 43 quater

Article 43 ter

L’article 132-16-5 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 132-16-5. – L’état de récidive légale est relevé par le procureur de la République dans l’acte de poursuites et au stade du jugement, sous réserve du principe d’opportunité des poursuites prévu à l’article 40-1 du code de procédure pénale.

« Il est relevé d’office par la juridiction de jugement, sauf décision spéciale et motivée, même lorsqu’il n’est pas mentionné dans l’acte de poursuites. La personne poursuivie en est informée et est mise en mesure d’être assistée d’un avocat et de faire valoir ses observations. »

Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. En bonne logique, les dispositions de l’article 43 ter, que la majorité sénatoriale entend rétablir à l’occasion de cette nouvelle lecture, résultent, comme celles de l’article précédent, de l’adoption d’un amendement d’affichage du groupe Les Républicains.

L’objectif est, de toute évidence, de satisfaire un certain électorat, sans prendre en considération jusqu’au bout l’intérêt et les conséquences des mesures que l’on propose.

Comme cela a été expliqué en première lecture, le juge dispose déjà d’une large latitude pour décider de relever ou non la récidive légale. Sa décision a évidemment des conséquences sur l’ampleur de la condamnation éventuelle.

La disposition introduite aura donc comme conséquence de forcer la main au juge, ce qui est contradictoire avec l’objectif affiché, que nous partageons toutes et tous, d’une grande écoute de la magistrature.

Nous proposons par conséquent de supprimer cet article à l’efficacité incertaine et, surtout, comme je le disais d’entrée, que l’on pourrait qualifier de mesure d’affichage. C’est de surcroît une sorte d’injonction sur ce que doit être l’attitude des juges.

Finalement, on propose toujours plus de répression, toujours plus de prison, alors que nous savons tous que la lutte contre la délinquance ne rentre malheureusement pas dans cette équation, car, en l’occurrence, plus ajouté à plus aboutit à moins de réinsertion, moins de lien social.

Nous avons déjà eu longuement ce débat et nous continuerons de l’avoir. Qu’est-ce qui empêche la récidive ? De nombreux textes et discussions tentent de répondre à cette question. On peut augmenter sans cesse le plafond des peines pour encadrer la récidive, mais, malheureusement, les hommes n’obéissent pas mécaniquement aux lois et procédures que nous votons ; il y a une part d’inconscient. Lutter contre la récidive est finalement plus un projet de société. Il ne sert à rien de renforcer l’arsenal, de faire de l’affichage, car on ne répond pas réellement à la préoccupation de nos concitoyennes et de nos concitoyens, qui est de limiter la récidive dans notre pays. (Mme Éliane Assassi applaudit.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable. Pour la commission, l’état de récidive légale doit être relevé immédiatement à l’audience par le juge. Naturellement, ce dernier garde toute liberté de le retenir ou non, voire de le modifier, pour tenir compte des circonstances de fait qui lui sont présentées.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis favorable sur cet amendement de suppression. J’avais d’ailleurs indiqué en première lecture que ces dispositions me semblaient à la fois peu utiles et excessives. Je partage pleinement vos arguments, madame la sénatrice.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. C’est l’un des points sur lesquels nous ne sommes évidemment pas d’accord avec la majorité de la commission. Une fois de plus, avec cet article 43 ter, qui ne figure pas dans le texte de l’Assemblée nationale, on retrouve une logique, souvent entendue dans cette enceinte : il faut que le magistrat retienne la récidive, et, s’il y renonce, il doit le faire par une décision spécialement motivée. Cela révèle une méfiance à l’égard des magistrats et alimente la réputation de laxisme de la magistrature que d’aucuns voudraient lui donner. Malgré tout, nos prisons sont pleines et nous manquons de places, ce qui prouve bien que ces politiques sont vaines. C’est un affichage auquel nous refusons de nous associer.

Je le répète, nous sommes en désaccord avec la majorité sénatoriale sur ce point, comme sur d’autres en matière pénale, même si un consensus a pu se faire jour sur certains aspects du texte. Nous voterons l’amendement de suppression de l’article 43 ter. Je m’apprêtais de toute façon à émettre un vote négatif sur cet article, mais je préfère encore voter officiellement sa suppression.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 43 ter.

(Larticle 43 ter est adopté.)

Article 43 ter
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Article 44

Article 43 quater

I. – Le chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi modifié :

1° Après le mot : « présent, », la fin du second alinéa de l’article 132-29 est ainsi rédigée : « des conséquences qu’entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction qui serait commise dans les délais prévus aux articles 132-35 et 132-37. » ;

2° L’article 132-35 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ayant ordonné la révocation totale du sursis dans les conditions définies à l’article 132-36 » sont remplacés par les mots : « sans sursis qui emporte révocation » ;

b) Les mots : « totale ou partielle » sont supprimés ;

3° L’article 132-36 est ainsi rédigé :

« Art. 132-36. – Toute nouvelle condamnation à une peine d’emprisonnement ou de réclusion révoque le sursis antérieurement accordé, quelle que soit la peine qu’il accompagne.

« Toute nouvelle condamnation d’une personne physique ou morale à une peine autre que l’emprisonnement ou la réclusion révoque le sursis antérieurement accordé qui accompagne une peine quelconque autre que l’emprisonnement ou la réclusion.

« La révocation du sursis est intégrale. » ;

4° L’article 132-37 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ayant ordonné la » sont remplacés par les mots : « sans sursis emportant » ;

b) La seconde occurrence des mots : « du sursis » est supprimée ;

5° L’article 132-38 est ainsi rédigé :

« Art. 132-38. – En cas de révocation du sursis simple, la première peine est exécutée sans qu’elle puisse se confondre avec la seconde.

« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, dire que la condamnation qu’elle prononce n’entraîne pas la révocation du sursis antérieurement accordé ou n’entraîne qu’une révocation partielle, pour une durée qu’elle détermine, du sursis antérieurement accordé. Elle peut également limiter les effets de la dispense de révocation à l’un ou plusieurs des sursis antérieurement accordés. » ;

6° À l’article 132-39, les mots : « totale du sursis n’a pas été prononcée dans les conditions prévues à l’article 132-36 » sont remplacés par les mots : « du sursis n’a pas été encourue » ;

7° Le premier alinéa de l’article 132-42 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;

c) À la dernière phrase, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « dix » ;

8° Au premier alinéa de l’article 132-47, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;

9° L’article 132-48 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « peut, après avis du juge de l’application des peines, ordonner » sont remplacés par les mots : « ordonne, après avis du juge de l’application des peines » ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, faire obstacle à la révocation du sursis antérieurement accordé. » ;

10° Au début de l’article 132-49, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La révocation partielle du sursis ne peut être ordonnée qu’une fois. » ;

11° L’article 132-50 est ainsi rédigé :

« Art. 132-50. – Si la juridiction ordonne l’exécution de la totalité de l’emprisonnement et si le sursis avec mise à l’épreuve a été accordé après une première condamnation déjà prononcée sous le même bénéfice, la première peine est d’abord exécutée à moins que, par décision spéciale et motivée, la juridiction ne dispense le condamné de tout ou partie de son exécution. »

II. – Le chapitre Ier du titre IV du livre V du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 735 est abrogé ;

2° À l’article 735-1, la référence : « 735 » est remplacée par la référence : « 711 ».

Mme la présidente. L’amendement n° 63, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Une fois de plus, ai-je envie de dire, cet article résulte d’un amendement adopté en première lecture sur l’initiative du groupe Les Républicains et s’inscrit dans la même démarche que les deux précédents. Aussi, nous souhaitons également le supprimer.

Nous sommes dans un vrai débat : que doit être la justice dans notre pays ? La majorité sénatoriale a fait le choix d’afficher une fermeté, une conviction sécuritaire qui, il faut bien le reconnaître, fait peu de cas des libertés fondamentales. Nous ne sommes pas les seuls à le dire : de nombreuses associations, voire le Défenseur des droits, le reconnaissent. Ces mesures votées par la commission remettent en cause l’efficacité du droit, du pouvoir du juge et ne tiennent absolument pas compte du souci, pourtant partagé par tous, d’éviter la surpopulation carcérale. Au-delà de nos positions sur les questions sécuritaires et sur l’enfermement, nous avons tous et toutes à cœur d’avoir dans notre pays des prisons dignes qui permettent réellement de réinsérer l’individu dans la société à l’issue de sa peine.

Le groupe Les Républicains entend revenir à la révocation automatique du sursis en vigueur avant 2014.

Cette disposition avait été supprimée, parce qu’elle avait fait la preuve de son inefficacité et même de sa dangerosité. Elle pouvait en effet conduire à l’incarcération de personnes condamnées à de petites peines.

Nous estimons que le présent article porte atteinte à l’important principe de l’individualisation des peines. La majorité sénatoriale, à nos yeux, brouille une nouvelle fois les pistes en dévoilant ses convictions sécuritaires, loin des opinions affichées par le mouvement en cours au sein de la justice.

On ne peut pas, d’un côté, appeler de ses vœux une prison qui réinsère, et, de l’autre, vouloir toujours punir plus lourdement, donc incarcérer davantage.

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Cécile Cukierman. Nous avons besoin d’une justice qui travaille à la réinsertion plus que d’un affichage de positions sécuritaires, lesquelles peuvent rassurer dans l’immédiat, mais jamais sur le long terme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable. Nous sommes sur le même dispositif que précédemment. L’article 43 ter concernait la récidive, tandis que celui-ci porte sur la révocation d’office du sursis. Il faut bien comprendre qu’il appartiendra toujours au magistrat de décider si le sursis doit être révoqué ou levé, en fonction des circonstances de fait. C’est un message fort qui est envoyé. Nous voulons être clairs à l’égard de l’ensemble des prévenus.

Madame Cukierman, la politique pénale ne se limite pas à ces éléments précis. Elle est beaucoup plus complexe et multifactorielle. Néanmoins, en matière d’exécution des peines, nous avons toujours dit que nous souhaitions donner au tribunal un large panel de mesures, justement pour tenir compte des situations particulières des personnes qui comparaissent. On ne peut pas voir la politique pénale uniquement à travers ces deux articles.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis favorable. Je considère en effet que les dispositions du présent article sur l’automaticité vont à l’encontre du principe de l’individualisation des peines, même si M. le rapporteur a présenté des mécanismes censés y remédier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 63.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 43 quater.

(Larticle 43 quater est adopté.)

Article 43 quater
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Article 45

Article 44

I. – L’article 41 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au septième alinéa, après les mots : « de probation », sont insérés les mots : « ou le service de la protection judiciaire de la jeunesse » et après les mots : « d’une enquête », sont insérés les mots : « , de vérifier la faisabilité matérielle de certaines peines ou aménagements de peine pouvant être prononcés » ;

2° Au même septième alinéa, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ces réquisitions peuvent également être faites après le renvoi d’une personne devant le tribunal correctionnel par le juge d’instruction, lorsque celle-ci est en détention provisoire. » ;

3° Au huitième alinéa, les mots : « , en cas de poursuites contre un majeur âgé de moins de vingt et un ans au moment de la commission de l’infraction, » sont supprimés.

II. – Le septième alinéa de l’article 81 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la première phrase, après les mots : « de probation », sont insérés les mots : « ou le service de la protection judiciaire de la jeunesse » ;

2° À la seconde phrase, les mots : « placer en détention provisoire un majeur âgé de moins de vingt et un ans au moment de la commission de l’infraction » sont remplacés par les mots : « saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de placement en détention provisoire de la personne mise en examen ».

III. – Les deux premiers alinéas de l’article 132-70-1 du code pénal sont ainsi rédigés :

« La juridiction peut ajourner le prononcé de la peine à l’égard d’une personne physique lorsqu’il apparaît opportun d’ordonner à son égard des investigations, le cas échéant complémentaires, sur sa personnalité ou sa situation matérielle, familiale et sociale de nature à permettre le prononcé d’une peine adaptée. Ces investigations peuvent être confiées au service pénitentiaire d’insertion et de probation ou à une personne morale habilitée.

« Dans ce cas, elle fixe dans sa décision la date à laquelle il sera statué sur la peine et ordonne, s’il y a lieu, le placement de la personne jusqu’à cette date sous contrôle judiciaire, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou en détention provisoire. »

IV. – (Non modifié) Il est créé, à titre expérimental, un répertoire des dossiers uniques de personnalité, placé sous l’autorité du ministre de la justice et sous le contrôle d’un magistrat, destiné à mutualiser et centraliser les informations relatives à la personnalité des personnes majeures faisant l’objet d’une enquête de police judiciaire, d’une information judiciaire ou de l’exécution d’une peine pour des faits punis d’une peine d’emprisonnement de trois ans, afin de permettre leur partage entre l’autorité judiciaire et les services d’insertion et de probation, pour faciliter la prise de décision par l’autorité judiciaire, pour améliorer la qualité de la prise en charge de ces personnes et pour prévenir le renouvellement des infractions.

Le dossier unique de personnalité centralise les rapports, expertises et évaluations relatifs à la personnalité et à la situation matérielle, familiale et sociale des personnes mentionnées au premier alinéa du présent IV qui ont été réalisés ou collectés :

1° Au cours de l’enquête ;

2° Au cours de l’instruction ;

3° À l’occasion du jugement ;

4° Au cours de l’exécution de la peine ;

5° Préalablement au prononcé ou durant le déroulement d’une mesure de surveillance ou de rétention de sûreté ;

6° En application des articles 706-136 ou 706-137 du code de procédure pénale ;

7° Durant le déroulement d’une hospitalisation d’office ordonnée en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale ou de l’article L. 3213-7 du code de la santé publique.

Les informations contenues dans le dossier unique de personnalité sont directement accessibles, par l’intermédiaire d’un système sécurisé de télécommunication :

a) À l’autorité judiciaire ;

b) Aux agents des services d’insertion et de probation chargés du suivi de ces personnes, au personnel des greffes des établissements pénitentiaires ainsi qu’aux agents de l’administration centrale en charge des orientations et affectations à compétence nationale.

Les avocats, les membres de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, les experts et les personnes chargées par l’autorité judiciaire ou l’administration pénitentiaire d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité ainsi que les personnes habilitées dans les conditions prévues au sixième alinéa de l’article 81 du code de procédure pénal peuvent également être destinataires, par l’intermédiaire de l’autorité judiciaire et pour l’exercice de leurs missions, des informations contenues dans le dossier unique de personnalité.

En cas de décision de classement sans suite ou de décision définitive de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement, les données concernant la personne poursuivie sont immédiatement effacées.

Les modalités d’application du présent IV sont précisées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret précise notamment les modalités de fonctionnement du système sécurisé de télécommunication et les conditions dans lesquelles le répertoire conserve la trace des interrogations et consultations dont il a fait l’objet ainsi que la durée de conservation des données inscrites et les modalités de leur effacement.

L’expérimentation du dossier unique de personnalité est prévue pour une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu à l’avant-dernier alinéa du présent IV. Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de sa mise en œuvre. – (Adopté.)

Article 44
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Article 45 bis AA

Article 45

I A. – Le deuxième alinéa de l’article 132-1 du code pénal est complété par les mots : « et motivée ».

I B. – Le premier alinéa de l’article 132-17 du code pénal est complété par les mots : « et motivée au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ».

I. – L’article 132-19 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 132-19. – Lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement, la juridiction peut prononcer une peine d’emprisonnement ferme ou assortie en partie ou en totalité du sursis pour une durée inférieure à celle qui est encourue.

« En matière correctionnelle, toute peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate.

« Dans ce cas, si la peine est inférieure ou égale à un an, elle fait l’objet d’une des mesures d’aménagement prévues à l’article 132-25 au regard de la personnalité du condamné et de sa situation matérielle, familiale et sociale, sauf impossibilité matérielle.

« Lorsque le tribunal correctionnel prononce une peine d’emprisonnement sans sursis et ne faisant pas l’objet d’une mesure d’aménagement, le tribunal doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale conformément à l’article 464-2 du code de procédure pénale. »

II. – La sous-section 1 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi rédigée :

« Sous-section 1

« Du placement sous surveillance électronique, de la semi-liberté et du placement à lextérieur

« Art. 132-25. – Lorsque la juridiction de jugement prononce une peine inférieure ou égale à un an d’emprisonnement, un emprisonnement partiellement assorti du sursis ou de la peine de probation dont la partie ferme de la peine est inférieure ou égale à un an, ou une peine dont la durée de l’emprisonnement restant à exécuter suite à une détention provisoire est inférieure ou égale à un an, la juridiction de jugement ordonne, sauf décision spécialement motivée au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que sa situation matérielle, familiale et sociale, que la peine sera exécutée en tout ou partie sous le régime du placement sous surveillance électronique, de la semi-liberté ou du placement à l’extérieur.

« La décision de placement sous surveillance électronique ne peut être prise qu’avec l’accord du prévenu, préalablement informé qu’il peut demander à être assisté par son avocat, le cas échéant désigné d’office par le bâtonnier à sa demande, avant de donner son accord.

« Art. 132-26. – Le condamné placé sous surveillance électronique est astreint à l’interdiction de s’absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par le tribunal correctionnel ou le juge de l’application des peines en dehors des périodes déterminées par celui-ci. Il est également astreint au port d’un dispositif intégrant un émetteur permettant de détecter à distance sa présence ou son absence dans ces lieux et pendant ces périodes.

« Le condamné admis au bénéfice de la semi-liberté est astreint à rejoindre l’établissement pénitentiaire pendant les périodes déterminées par le juge de l’application des peines.

« Ces périodes sont notamment déterminées en fonction du temps nécessaire pour le condamné à l’exercice d’une activité professionnelle, au suivi d’un enseignement, d’un stage, d’une formation ou d’un traitement, à la recherche d’un emploi, à la participation à la vie de famille ou à tout projet d’insertion ou de réinsertion.

« Le condamné admis au bénéfice du placement à l’extérieur est astreint, sous le contrôle de l’administration, à effectuer des activités ou à faire l’objet d’une prise en charge sanitaire en dehors de l’établissement pénitentiaire.

« Le placement sous surveillance électronique, la semi-liberté et le placement à l’extérieur emportent également pour le condamné l’obligation de répondre aux convocations de toute autorité publique désignée par le juge de l’application des peines.

« La juridiction de jugement peut également soumettre le condamné aux mesures prévues aux articles 131-4-2 à 131-4-5. »

II bis. – À l’article 132-27 du code pénal, les mots : « de deux ans, ou, si la personne est en état de récidive légale, égale ou inférieure à » sont remplacés par le mot : « d’ ».

III. – Après l’article 464-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 464-2 ainsi rédigé :

« Art. 464-2. – I. – Lorsque la durée totale de l’emprisonnement ferme prononcé, y compris en tenant compte le cas échéant de la révocation de sursis, est inférieure ou égale à un an, le tribunal correctionnel peut :

« 1° Soit ordonner que l’emprisonnement sera exécuté sous le régime du placement sous surveillance électronique, de la semi-liberté ou du placement à l’extérieur, selon des modalités fixées à l’audience ou déterminées par le juge de l’application des peines ;

« 2° Soit ordonner que le condamné est convoqué devant le juge de l’application des peines et le service pénitentiaire d’insertion et de probation conformément à l’article 474, afin que puisse être prononcée une telle mesure conformément à l’article 723-15 ;

« 3° Soit décerner un mandat de dépôt à effet différé, en ordonnant que le condamné soit convoqué dans un délai qui ne saurait excéder un mois devant le procureur de la République afin que ce dernier fixe la date à laquelle il sera incarcéré dans un établissement pénitentiaire ; le procureur de la République peut également donner connaissance au condamné de la date d’incarcération à l’issue de l’audience. Dans ce cas, il n’est pas fait application des articles 723-15 à 723-18 ;

« 4° Soit, dans les cas prévus aux articles 397-4, 465 et 465-1, décerner mandat de dépôt ou mandat d’arrêt contre le condamné.

« Dans les cas prévus aux 3° et 4° du présent I, en application de l’article 132-19 du code pénal, le tribunal doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale, afin de justifier les raisons pour lesquelles il estime devoir prononcer une peine d’emprisonnement sans sursis et pour lesquelles il considère que cette peine ne peut être aménagée.

« II. – (Supprimé)

« III . – Le 3° du I est également applicable lorsque la durée totale de l’emprisonnement ferme prononcé par le tribunal correctionnel est supérieure à un an.

« IV . – Lorsqu’il décerne un mandat de dépôt à effet différé, le tribunal correctionnel peut, dans les cas prévus aux articles 397-4, 465 et 465-1, assortir ce mandat de l’exécution provisoire. »

IV. – (Non modifié)

V. – L’article 474 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :

« Si le tribunal n’a pas prononcé un mandat de dépôt à effet différé en application du 3° du I de l’article 464-2, en cas de condamnation d’une personne non incarcérée à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an ou pour laquelle la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, la personne condamnée présente à l’audience peut être convoquée à comparaître devant le service pénitentiaire d’insertion et de probation, dans un délai qui ne saurait être supérieur à quarante-cinq jours, en vue de déterminer les modalités d’exécution de la peine, et devant le juge de l’application des peines, dans un délai qui ne saurait être supérieur à trente jours. Le présent alinéa est applicable au condamné exécutant une peine sous le régime de la semi-liberté, du placement sous surveillance électronique ou du placement à l’extérieur.

« L’avis de convocation devant le juge de l’application des peines précise que, sauf exercice par le condamné des voies de recours, la peine prononcée contre lui sera mise à exécution en établissement pénitentiaire s’il ne se présente pas, sans excuse légitime, devant ce magistrat. » ;

2° À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « une contrainte pénale, à une peine d’emprisonnement assortie du sursis avec mise à l’épreuve, à une peine d’emprisonnement avec sursis assortie de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général » sont remplacés par les mots : « une peine de probation ou une peine d’emprisonnement assortie d’une peine de probation » ;

3° à 5° (Supprimés)

bis. – (Supprimé)

VI et VII. – (Non modifiés)

VIII. – La première phrase du premier alinéa de l’article 723-15 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au début, sont ajoutés les mots : « Si le tribunal n’a pas prononcé un mandat de dépôt à effet différé en application du 3° du I de l’article 464-2 et qu’il a ordonné la convocation du condamné devant le juge de l’application des peines et le service pénitentiaire d’insertion et de probation, » ;

2° Les trois occurrences des mots : « deux ans » sont remplacées par les mots : « un an » et, à la fin, la référence : « à l’article 132-57 du code pénal » est remplacée par la référence : « à l’article 747-1 » ;

3° (Supprimé)

IX. – (Supprimé)

X. – À la première phrase de l’article 723-15-1 du code de procédure pénale, après le mot : « convocation, », sont insérés les mots : « mentionnée à l’article 474 ».

XI. – À la première phrase de l’article 723-17 et à la première phrase du premier alinéa de l’article 723-17-1 du code de procédure pénale, les mots : « mentionnée à l’article 723-15 » sont remplacés par les mots : « à une peine égale ou inférieure à un an d’emprisonnement, ou pour laquelle la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, ou en cas de cumul de condamnations concernant la même personne si le total des peines prononcées ou restant à subir est inférieur ou égal à un an ».

XII. – (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 64, présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Au sein de l’article 45 que nous examinons, l’alinéa 38 vise la suppression de l’automaticité de la procédure d’examen des peines d’emprisonnement d’une durée inférieure à deux ans, en vue d’un aménagement de peine.

En effet, les articles 474 et 723-15 du code de procédure pénale prévoient l’examen du dossier par le juge de l’application des peines selon la situation des personnes condamnées à des courtes incarcérations en vue de leur proposer une peine alternative à l’emprisonnement.

Rappelons donc que l’individualisation de la peine est le principe en matière d’exécution des sentences et que l’incarcération doit être considérée comme le dernier recours. Ce principe, inscrit à l’article 132-1 du code pénal, est purement occulté par notre gouvernement.

Pourtant, nous le savons, la courte incarcération a des effets délétères sur la personne condamnée. Elle peut également être la cause de suicide chez les personnes les plus vulnérables, à l’instar de ce jeune homme de 25 ans, condamné à une brève peine de prison pour délit de fraude dans les transports en commun, qui s’est donné la mort dans sa cellule de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis quelques jours avant sa sortie, l’année dernière. J’ai justement visité cet établissement voilà quelques semaines.

Adeline Hazan a rappelé à ce sujet que les politiques publiques doivent « avoir le courage d’instaurer un système de régulation carcérale, en s’interrogeant enfin sur le sens des très courtes peines » et en développant des mesures alternatives à l’incarcération.

Nous ne pouvons que regretter le parti pris de l’exécutif et le recul net de tous nos principes fondateurs en matière de pénologie. Nous proposons en conséquence de supprimer l’article 45.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable. Nous soutenons la position du Gouvernement sur ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’étais sur une lancée d’avis favorables, et je suis désolée que l’amendement de Mme Benbassa fasse l’objet d’un avis défavorable. (Sourires.)

À mes yeux, les dispositions prévues par l’article 45, telles que le Gouvernement les avait rédigées, et non pas telles que la commission des lois les a réécrites, sont utiles. Faire passer la durée de détention prévue à l’article 723-15 du code de procédure pénale de deux ans à un an nous permettra de mieux assurer la vérité des peines prononcées et de rendre plus conforme leur exécution par rapport au jugement. Par ailleurs, l’institution du mandat de dépôt à effet différé donnera au tribunal correctionnel la possibilité d’assumer une véritable responsabilité quant aux jugements prononcés, le cas échéant en décidant qu’il n’y a pas d’aménagement ab initio de la peine. Pour ces raisons, je souhaite le maintien de l’article 45.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 64.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal, est ainsi libellé :

Alinéas 11, trois fois, et 21

Remplacer les mots :

un an

par les mots :

deux ans

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Les prisons françaises sont surpeuplées, particulièrement dans les outre-mer : on dénombrait 70 710 détenus, dont 5 108 dans les collectivités d’outre-mer au mois de juillet dernier.

Tel est, par exemple, le cas de la maison d’arrêt du centre pénitentiaire de Ducos, mais également des prisons de Baie Mahaut et Basse-Terre en Guadeloupe, et de Remire-Montjoly en Guyane, qui connaissent un taux d’occupation supérieur à 130 %.

L’une des intentions affichées dans les motifs de ce projet de loi est le désengorgement des prisons. Dans le contexte actuel, le renforcement du recours à des peines alternatives à la détention, à l’aménagement de peine, ainsi qu’à la libération conditionnelle constitue effectivement un enjeu essentiel.

Or il existe une contradiction entre cette intention affichée et les effets des dispositions prévues, notamment, par l’article 45, lequel risque, au contraire, de renforcer la surpopulation carcérale.

Le renforcement de l’aménagement des peines inférieures ou égales à un an de prison que prévoit le projet de loi constitue, certes, une avancée de principe, mais elle ne fait qu’entériner la pratique des tribunaux correctionnels. Il est très rare, en effet, voire exceptionnel, que des peines de prison d’un mois fassent l’objet d’un mandat de dépôt. Les peines d’emprisonnement de six mois à un an, sauf motivation spéciale, font déjà souvent l’objet d’un aménagement.

En revanche, le projet de loi avalise un recul important en rendant impossible l’aménagement des peines de plus d’un an d’emprisonnement, alors qu’une telle mesure est actuellement possible jusqu’à deux ans d’emprisonnement. L’office du juge de l’application des peines sera donc considérablement réduit. Ce magistrat dispose pourtant d’un pouvoir important en vue de faciliter l’insertion ou la réinsertion des condamnés.

C’est pour ces raisons que nous proposons de remplacer, à l’alinéa 11, les mots « un an » par les mots « deux ans ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable. La commission souhaite rester au seuil d’un an fixé par le texte.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 20 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 24 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande, Mme Artigalas et M. Raynal, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 24, 28 et 29

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 33

Remplacer, deux fois, les mots :

un an

par les mots :

deux ans

III. – Alinéa 40

Supprimer cet alinéa.

IV. – Alinéa 41

Supprimer les mots :

Les trois occurrences des mots : « deux ans » sont remplacés par les mots : « un an » et, à la fin,

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. J’offrais au Gouvernement, ainsi qu’au rapporteur, l’occasion de se déculpabiliser d’avoir si souvent, ce soir, prononcé des avis négatifs, mais ils n’ont pas saisi la perche. C’est bien dommage ! Je fais tout de même une nouvelle tentative sur cet article. (Sourires.)

Cet amendement a pour objet de supprimer les dispositions instituant un mandat de dépôt différé, au profit d’un recours aux peines alternatives à l’incarcération.

Le mandat de dépôt doit en effet demeurer une exception, justifiée par l’absolue nécessité que le condamné aille directement en prison. Or le risque du mandat de dépôt différé est que la décision d’incarcération devienne moins exceptionnelle pour les magistrats du tribunal correctionnel. Cette disposition banalise l’acte d’emprisonnement et restreint de fait, encore une fois, les possibilités d’aménagement de peine.

Le Syndicat de la magistrature l’indique : « Le tribunal n’aura plus à assumer la violence de l’emprisonnement immédiat – l’émotion des proches, l’interpellation à la barre par les policiers –, mais l’incarcération sera inéluctable ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous pensons que le dispositif du mandat de dépôt différé est utile à un meilleur dialogue entre le procureur de la République et l’administration pénitentiaire. C’est une proposition intéressante que nous avons soutenue, d’autant plus que le Sénat en est à l’origine, dans le cadre d’une proposition de loi que nous avions adoptée au mois d’octobre 2017. L’avis de la commission est par conséquent défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 24 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 45.

(Larticle 45 est adopté.)

Article 45
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Article 45 bis A

Article 45 bis AA

(Supprimé)

Article 45 bis AA
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Article 45 bis B

Article 45 bis A

I. – Le livre V du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du cinquième alinéa de l’article 717-1, la référence : « 721 » et le mot : « supplémentaires » sont supprimés ;

2° L’article 721 est ainsi modifié :

a) Les trois premiers alinéas sont supprimés ;

b) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « compte tenu de la réduction de peine prévue au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « , de l’éventuelle réduction de la peine prévue à l’article 721-1 » ;

3° L’article 721-1 est ainsi rédigé :

« Art. 721-1. – Une réduction de la peine peut être accordée aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale. Cette réduction, accordée par le juge de l’application des peines après avis de la commission de l’application des peines, ne peut excéder trois mois la première année, deux mois par année supplémentaire d’incarcération ou sept jours par mois lorsque la durée d’incarcération restant à subir est inférieure à une année. Si le condamné est en état de récidive légale, cette réduction ne peut excéder deux mois la première année, un mois par année supplémentaire d’incarcération ou cinq jours par mois lorsque la durée d’incarcération restant à subir est inférieure à une année.

« Son quantum est fixé en tenant compte :

« 1° Des efforts de formation du condamné ;

« 2° De son travail en détention ou de sa participation à des activités culturelles ;

« 3° De ses recherches d’emploi ;

« 4° De l’indemnisation des parties civiles, selon ses capacités contributives et le montant des sommes restant à devoir ;

« 5° De sa soumission à des mesures d’examen, de traitement ou de soins, notamment aux fins de désintoxication et de prévention de la récidive.

« Sauf décision contraire spécialement motivée du juge de l’application des peines, aucune réduction de la peine ne peut être accordée à une personne condamnée :

« a) Pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, qui refuse ou ne suit pas de façon régulière le traitement qui lui a été proposé en application des articles 717-1 et 763-7 ;

« b) Dans les circonstances mentionnées à la première phrase du second alinéa de l’article 122-1 du code pénal et qui refuse les soins qui lui sont proposés ;

« c) Pour l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 du présent code si, lorsque leur condamnation est devenue définitive, le casier judiciaire faisait mention d’une telle condamnation.

« Une réduction supplémentaire de la peine peut être accordée aux condamnés qui passent avec succès un examen scolaire, professionnel ou universitaire. Cette réduction peut atteindre trois mois par année d’incarcération. Elle est réduite à deux mois si le condamné est en état de récidive légale. » ;

4° L’article 721-1-1 est abrogé ;

5° Au premier alinéa du I et à la première phrase du premier alinéa du II de l’article 721-2, les mots : « aux articles 721 et » sont remplacés par les mots : « à l’article » ;

6° À l’article 723-29, les mots : « au crédit de réduction de peine et » et le mot : « supplémentaires » sont supprimés.

II. – L’article 132-24 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les juridictions d’application des peines ne peuvent octroyer le bénéfice de l’une des mesures prévues à la présente section que sur demande du condamné. »

III. – Le 1° de l’article 41 de la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales est abrogé.

Mme la présidente. L’amendement n° 65, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement s’inscrit dans la lignée de ceux que nous avons déposés précédemment pour nous opposer au durcissement du texte proposé en matière pénale par le Gouvernement, puis, par la majorité sénatoriale.

La limitation du mécanisme de réduction de peine ne pourra qu’alourdir la surpopulation pénale.

Bien sûr, nous en convenons, il existe des erreurs judiciaires, ce qui ne nous satisfait pas, mais l’automaticité de la réduction de peine est une règle bien établie et prise en compte par les magistrats. Rendre cette règle floue peut, à notre sens, perturber l’organisation actuelle de l’échelle des peines.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis favorable. Je considère en effet que les crédits de réduction de peine sont extrêmement utiles dans la détention des personnes détenues et leur suivi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 65.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 45 bis A.

(Larticle 45 bis A est adopté.)

Article 45 bis A
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Article 45 bis

Article 45 bis B

À la fin du premier alinéa de l’article 785 du code de procédure pénale, les mots : « d’une année seulement à dater du décès » sont remplacés par les mots : « de vingt ans à compter du décès ». – (Adopté.)

Article 45 bis B
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Article 45 ter

Article 45 bis

L’article 709-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport annuel comprend également une présentation de la politique pénale et d’aménagement des peines du ministère public, une présentation de la jurisprudence du tribunal de grande instance en matière de peines privatives de liberté, ainsi qu’une synthèse des actions et conclusions de la commission de l’exécution et de l’application des peines du tribunal. » ;

2° À la dernière phrase, après le mot : « public », sont insérés les mots : « et transmis au Parlement » ;

3° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Ce rapport est présenté et fait l’objet d’échanges au sein du conseil de juridiction. Il est également présenté au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, ainsi qu’au sein des conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance. » – (Adopté.)

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Article 45 bis
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Article 46

Article 45 ter

I. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 131-36-1 est ainsi modifié :

a) Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « En matière criminelle ou correctionnelle, la juridiction de jugement… (le reste sans changement). » ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le suivi socio-judiciaire emporte, pour le condamné, l’obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l’application des peines et pendant une durée déterminée par la juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d’assistance, prévues aux articles 131-4-2 à 131-4-5, destinées à prévenir la récidive et à assurer sa réinsertion sociale.

« La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder trois ans en cas de condamnation pour un délit, dix ans pour un délit commis en récidive ou mentionné à l’article 706-47 du code de procédure pénale ou vingt ans en cas de condamnation pour crime. Toutefois, en matière correctionnelle, cette durée peut être portée à vingt ans par décision spécialement motivée de la juridiction de jugement ; lorsqu’il s’agit d’un crime puni de trente ans de réclusion criminelle, cette durée est de trente ans ; lorsqu’il s’agit d’un crime puni de la réclusion criminelle à perpétuité, la cour d’assises peut décider que le suivi socio-judiciaire s’appliquera sans limitation de durée, sous réserve de la possibilité pour le tribunal de l’application des peines de mettre fin à la mesure à l’issue d’un délai de trente ans, selon les modalités prévues à l’article 712-7 du même code. » ;

c) À la dernière phrase du troisième alinéa, les mots : « juge de l’application des peines » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance ou le juge par lui désigné » ;

2° Les articles 131-36-2 et 131-36-3 sont abrogés ;

3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 131-36-4 et au second alinéa de l’article 131-36-12, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

4° Les articles 221-9-1, 221-15, 222-65, 224-10, 227-31 et 421-8 sont abrogés ;

5° L’article 222-48-1 est ainsi rédigé :

« Art. 222-48-1. – En cas de condamnation pour une infraction définie aux articles 222-8, 222-10, 222-12, 222-13, 222-14 et 222-18-3 commise sur un mineur de quinze ans par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime, le suivi socio-judiciaire est obligatoire en matière correctionnelle lorsqu’il s’agit de violences habituelles, sauf en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement assortie du sursis avec mise à l’épreuve ou si le tribunal correctionnel considère, par décision spécialement motivée, qu’il n’y a pas lieu de prononcer cette mesure ; en matière criminelle, la cour d’assises délibère de façon spécifique sur le prononcé d’un suivi socio-judiciaire. »

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 763-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les références : « aux articles 131-36-2 et 131-36-3 » sont remplacées par la référence : « au deuxième alinéa de l’article 131-36-1 » ;

b) À la troisième phrase du troisième alinéa, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

2° Le premier alinéa de l’article 763-5 est ainsi modifié :

a) La première phrase est ainsi rédigée : « En cas d’inobservation des obligations mentionnées à l’article 131-36-1 du code pénal ou de l’injonction de soins, le juge de l’application des peines saisit, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, par requête motivée, le président du tribunal de grande instance ou un juge par lui désigné afin que soit mis à exécution tout ou partie de l’emprisonnement fixé par la juridiction en application du quatrième alinéa du même article 131-36-1. » ;

b) La seconde phrase est complétée par les mots : « du présent code » ;

3° Au quatrième alinéa de l’article 763-10, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ». – (Adopté.)

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Chapitre II

Dispositions relatives à la probation

Article 45 ter
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Article 47

Article 46

I. – L’article 131-4-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 131-4-1. – Lorsque la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l’auteur d’un crime ou d’un délit de droit commun, puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée de cinq ans au plus, ou d’une durée de dix ans au plus lorsque la personne est en état de récidive légale, le justifient, la juridiction peut prononcer à la place ou en même temps que la peine d’emprisonnement une peine de probation.

« Dès le prononcé de la condamnation, la personne condamnée est astreinte, pour toute la durée d’exécution de sa peine, aux mesures de contrôle prévues à l’article 131-4-3.

« Si elle dispose d’éléments d’information suffisants sur la personnalité du condamné et sur sa situation matérielle, familiale et sociale, la juridiction peut alors définir les obligations et interdictions particulières auxquelles celui-ci est astreint.

« Dans le cas contraire, ces obligations et interdictions sont déterminées par le juge de l’application des peines dans des conditions et selon des modalités précisées par le code de procédure pénale, après évaluation de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné par le service pénitentiaire d’insertion et de probation.

« Lorsque la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l’auteur d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement et les faits de l’espèce justifient un accompagnement socio-éducatif individualisé et soutenu, la juridiction peut décider que la peine de probation consistera en un suivi renforcé, pluridisciplinaire et évolutif, faisant l’objet d’évaluations régulières par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, afin de prévenir la récidive en favorisant l’insertion ou la réinsertion de la personne au sein de la société.

« La juridiction fixe également la durée maximale de l’emprisonnement encouru par le condamné en cas d’inobservation des obligations et interdictions auxquelles il est astreint. Cet emprisonnement ne peut excéder deux ans, ni le maximum de la peine d’emprisonnement encourue.

« Après le prononcé de la peine, le président de la juridiction notifie au condamné, lorsqu’il est présent, les obligations et interdictions à respecter au titre de la probation et l’avertit des conséquences qu’entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction commise au cours du délai de probation ou un manquement aux mesures de contrôle et aux obligations et interdictions particulières qui lui sont imposées. Il l’informe de la possibilité qu’il aura de voir déclarer sa condamnation non avenue s’il observe une conduite satisfaisante.

« Lorsque la juridiction prononce, à titre de peine complémentaire, la peine d’interdiction du territoire français pour une durée de dix ans au plus, il est sursis à son exécution durant le temps de la probation prévue au premier alinéa du présent article.

« La condamnation à la peine de probation est exécutoire par provision. »

1° à 13° (Supprimés)

II. – Après l’article 131-4-1 du code pénal, sont insérés des articles 131-4-2 à 131-4-8 ainsi rédigés :

« Art. 131-4-2. – La juridiction fixe le délai de probation qui ne peut être inférieur à douze mois ni supérieur à trois ans. Lorsque la personne est en état de récidive légale, ce délai peut être porté à cinq ans. Ce délai peut être porté à sept ans lorsque la personne se trouve à nouveau en état de récidive légale. Le délai de probation ne peut excéder la durée de la peine d’emprisonnement encourue.

« Au cours du délai de probation, le condamné doit satisfaire aux mesures de contrôle qui sont prévues à l’article 131-4-3 et à celles des obligations particulières prévues à l’article 131-4-4 qui lui sont spécialement imposées. En outre, le condamné peut bénéficier de mesures d’aide destinées à favoriser son reclassement social.

« Art. 131-4-3. – Les mesures de contrôle auxquelles le condamné doit se soumettre sont les suivantes :

« 1° Répondre aux convocations du juge de l’application des peines ou du travailleur social désigné ;

« 2° Recevoir les visites du travailleur social et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d’existence et de l’exécution de ses obligations ;

« 3° Prévenir le travailleur social de ses changements d’emploi ;

« 4° Prévenir le travailleur social de ses changements de résidence ou de tout déplacement dont la durée excéderait quinze jours et rendre compte de son retour ;

« 5° Obtenir l’autorisation préalable du juge de l’application des peines pour tout changement d’emploi ou de résidence, lorsque ce changement est de nature à mettre obstacle à l’exécution de ses obligations ;

« 6° Informer préalablement le juge de l’application des peines de tout déplacement à l’étranger.

« Art. 131-4-4. – La juridiction de jugement ou le juge de l’application des peines peut imposer spécialement au condamné l’observation de l’une ou de plusieurs des obligations suivantes :

« 1° Exercer une activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation professionnelle ;

« 2° Établir sa résidence en un lieu déterminé ;

« 3° Se soumettre à des mesures d’examen médical, de traitement ou de soins, même sous le régime de l’hospitalisation. Ces mesures peuvent consister en l’injonction thérapeutique prévue aux articles L. 3413-1 à L. 3413-4 du code de la santé publique, lorsqu’il apparaît que le condamné fait usage de stupéfiants ou fait une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques. Une copie de la décision ordonnant ces mesures est adressée par le juge de l’application des peines au médecin ou au psychologue qui doit suivre la personne condamnée. Les rapports des expertises réalisées pendant la procédure sont adressés au médecin ou au psychologue, à leur demande ou à l’initiative du juge de l’application des peines. Celui-ci peut également leur adresser toute autre pièce utile du dossier ;

« 4° Justifier qu’il contribue aux charges familiales ou acquitte régulièrement les pensions alimentaires dont il est débiteur ;

« 5° Réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l’infraction, même en l’absence de décision sur l’action civile ;

« 6° Justifier qu’il acquitte en fonction de ses facultés contributives les sommes dues au Trésor public à la suite de la condamnation ;

« 7° S’abstenir de conduire certains véhicules déterminés par les catégories de permis prévues par le code de la route ou de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé, par un professionnel agréé ou par construction, d’un dispositif homologué d’antidémarrage par éthylotest électronique ;

« 8° Sous réserve de son accord, s’inscrire et se présenter aux épreuves du permis de conduire, le cas échéant après avoir suivi des leçons de conduite ;

« 9° Ne pas se livrer à l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ou ne pas exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs ;

« 10° S’abstenir de paraître en tout lieu, toute catégorie de lieux ou toute zone spécialement désignés ;

« 11° Ne pas engager de paris, notamment dans les organismes de paris mutuels, et ne pas prendre part à des jeux d’argent et de hasard ;

« 12° Ne pas fréquenter les débits de boissons ;

« 13° Ne pas fréquenter certains condamnés, notamment les auteurs ou complices de l’infraction ;

« 14° S’abstenir d’entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, et notamment des mineurs, à l’exception, le cas échéant, de ceux désignés par la juridiction ;

« 15° Ne pas détenir ou porter une arme ;

« 16° Accomplir, à ses frais, un des stages prévus à l’article 131-5-1 du présent code ;

« 17° S’abstenir de diffuser tout ouvrage ou œuvre audiovisuelle dont il serait l’auteur ou le coauteur et qui porterait, en tout ou partie, sur l’infraction commise et s’abstenir de toute intervention publique relative à cette infraction ; les dispositions du présent 17° ne sont applicables qu’en cas de condamnation pour crimes ou délits d’atteintes volontaires à la vie, d’agressions sexuelles ou d’atteintes sexuelles ;

« 18° Remettre ses enfants entre les mains de ceux auxquels la garde a été confiée par décision de justice ;

« 19° En cas d’infraction commise soit contre son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, soit contre ses enfants ou ceux de son conjoint, concubin ou partenaire, résider hors du domicile ou de la résidence du couple et, le cas échéant, s’abstenir de paraître dans ce domicile ou cette résidence ou aux abords immédiats de celui-ci, ainsi que, si nécessaire, faire l’objet d’une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ; les dispositions du présent 19° sont également applicables lorsque l’infraction est commise par l’ancien conjoint ou concubin de la victime, ou par la personne ayant été liée à elle par un pacte civil de solidarité, le domicile concerné étant alors celui de la victime. Pour l’application du présent 19°, l’avis de la victime est recueilli, dans les meilleurs délais et par tous moyens, sur l’opportunité d’imposer au condamné de résider hors du logement du couple. Sauf circonstances particulières, cette mesure est prise lorsque sont en cause des faits de violences susceptibles d’être renouvelés et que la victime la sollicite. La juridiction peut préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement ;

« 20° Obtenir l’autorisation préalable du juge de l’application des peines pour tout déplacement à l’étranger ;

« 21° Respecter les conditions d’une prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique, destinée à permettre sa réinsertion et l’acquisition des valeurs de la citoyenneté ; cette prise en charge peut, le cas échéant, intervenir au sein d’un établissement d’accueil adapté dans lequel le condamné est tenu de résider ;

« 22° L’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général, selon les modalités prévues à l’article 131-8 ;

« 23° L’injonction de soins, dans les conditions prévues aux articles L. 3711-1 à L. 3711-5 du code de la santé publique, si la personne a été condamnée pour un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru et qu’une expertise médicale a conclu qu’elle était susceptible de faire l’objet d’un traitement.

« Art.131-4-5. – Les mesures d’aide ont pour objet de seconder les efforts du condamné en vue de son reclassement social.

« Ces mesures, qui s’exercent sous forme d’une aide à caractère social et, s’il y a lieu, d’une aide matérielle, sont mises en œuvre par le service pénitentiaire d’insertion et de probation avec la participation, le cas échéant, de tous organismes publics et privés.

« Art. 131-4-6. – Lorsque la peine de probation accompagne une peine privative de liberté sans sursis, elle s’applique, pour la durée fixée par la juridiction de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

« Art. 131-4-7. – En cas de non-respect de ses obligations par le condamné, le juge de l’application des peines peut ordonner l’emprisonnement de la personne.

« Art. 131-4-8. – La condamnation à la peine de probation est réputée non avenue lorsque le condamné n’a pas fait l’objet d’une décision ordonnant son emprisonnement. »

II bis. – (Supprimé)

III. – La sous-section 4 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est abrogée.

IV. – (Non modifié)

V. – L’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi modifiée :

1° À l’article 20-4, les mots : « contrainte pénale, la » sont supprimés ;

2° Au premier alinéa de l’article 20-5, les deuxième et dernière phrases sont supprimées ;

3° Au premier alinéa de l’article 20-10, la référence : « 132-43 » est remplacée par la référence : « 131-4-2 ».

VI. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 8° de l’article 230-19, les mots : « d’une contrainte pénale, d’un sursis avec mise à l’épreuve, d’un sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général » sont remplacés par les mots : « d’une peine de probation » ;

2° À la dernière phrase du premier alinéa de l’article 720-1, au sixième alinéa de l’article 720-1-1, à la première phrase de l’article 723-4, au second alinéa de l’article 723-10, au 1° de l’article 723-30 et à la seconde phrase du premier alinéa de l’article 731, les références : « 132-44 et 132-45 » sont remplacées par les références : « 131-4-3 et 131-4-4 » ;

3° Le I de l’article 721-2 est ainsi modifié :

a) Au 1°, la référence : « 132-44 » est remplacée par la référence : « 131-4-3 » ;

b) Au 2°, la référence : « 132-45 » est remplacée par la référence : « 131-4-4 » ;

4° Au premier alinéa de l’article 723-10, les références : « 132-43 à 132-46 » sont remplacées par les références : « 131-4-2 à 131-4-5 ».

VII. – À l’article 132-64 du code pénal, les mots : « de la mise à l’épreuve, tel qu’il résulte des articles 132-43 à 132-46 » sont remplacés par les mots : « de la peine de probation, tel qu’il résulte des articles 131-4-2 à 131-4-5 ».

VIII. – L’article L. 265-1 du code de justice militaire est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la référence : « 132-57 » est remplacée par la référence : « 132-39 » ;

2° Au dernier alinéa, la référence : « 132-44 » est remplacée par la référence : « 131-4-3 ».

Mme la présidente. L’amendement n° 37, présenté par Mme Lubin, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 5 et 6

Après les mots :

service pénitentiaire d’insertion et de probation

insérer les mots :

ou par la personne morale habilitée

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Il s’agit d’un amendement de cohérence. Le texte adopté par la commission des lois du Sénat en première et seconde lectures prévoit en effet, à l’article 47, que le suivi de la personne condamnée à une peine de probation est assuré aussi bien par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le SPIP, que par une association habilitée – une personne morale habilitée.

Aussi, la personne morale habilitée sera tout autant que le SPIP amenée à réaliser des évaluations régulières dans le cadre de la peine de probation.

Cet amendement vise à pallier un oubli rédactionnel en ajoutant, aux alinéas 5 et 6, la possibilité d’avoir recours aux personnes morales habilitées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. C’est un avis défavorable, car cette proposition est liée à la création de nouveau de la peine de probation à laquelle je ne suis pas favorable telle que le Sénat l’a conçue.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 46, modifié.

(Larticle 46 est adopté.)

Article 46
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Article 48

Article 47

I A et I B. – (Supprimés)

I. – Le titre Ier bis du livre V du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« TITRE IER BIS

« DE LA PEINE DE PROBATION

« Art. 713-42. – Lorsqu’une condamnation à une peine de probation est prononcée, le condamné est placé sous le contrôle du juge de l’application des peines territorialement compétent selon les modalités prévues à l’article 712-10.

« Au cours du délai de probation, le condamné doit satisfaire à l’ensemble des mesures de contrôle prévues à l’article 131-4-3 du code pénal et à celles des obligations particulières prévues à l’article 131-4-4 du même code qui lui sont spécialement imposées, soit par la décision de condamnation, soit par une décision que peut, à tout moment, y compris pendant une période d’incarcération du condamné, prendre le juge de l’application des peines en application des dispositions de l’article 712-8 du présent code.

« Art. 713-43. – Au cours du délai de probation, le juge de l’application des peines sous le contrôle de qui le condamné est placé s’assure, soit par lui-même, soit par toute personne qualifiée, de l’exécution des mesures de contrôle et d’aide et des obligations imposées à ce condamné.

« Art. 713-44. – Le condamné est tenu de se présenter, chaque fois qu’il en est requis, devant le juge de l’application des peines sous le contrôle duquel il est placé.

« En cas d’inobservation des obligations et mesures de contrôle, les dispositions de l’article 712-17 sont applicables.

« Art. 713-45. – En cas d’incarcération pour une condamnation à une peine d’emprisonnement assortie d’une peine de probation, il est remis au condamné avant sa libération un avis de convocation à comparaître devant le service pénitentiaire d’insertion et de probation ou devant une personne morale habilitée désignée par le juge de l’application des peines dans un délai qui ne saurait être supérieur à huit jours à compter de sa libération s’il s’agit d’une personne condamnée ou ayant été condamnée pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru et qui ne saurait être supérieur à un mois dans les autres cas. Le service pénitentiaire d’insertion et de probation ou la personne morale habilitée est alors saisi de la mesure de probation.

« Art. 713-46. – Lorsque le tribunal a fait application du cinquième alinéa de l’article 131-4-1 du code pénal et a prononcé une peine de probation avec un suivi renforcé, le service pénitentiaire d’insertion et de probation ou la personne morale habilitée désignée par le juge de l’application des peines évalue la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de la personne condamnée.

« À l’issue de cette évaluation, le service ou la personne morale habilitée adresse au juge de l’application des peines un rapport comportant des propositions relatives au contenu et aux modalités de mise en œuvre des mesures de contrôle prévues à l’article 131-4-3 du même code, d’assistance prévues à l’article 131-4-5 dudit code et des obligations et des interdictions mentionnées à l’article 131-4-4 du même code.

« Au vu de ce rapport, le juge de l’application des peines, lorsqu’il n’a pas été fait application du troisième alinéa de l’article 131-4-1 du même code, détermine les obligations et interdictions auxquelles est astreint le condamné, ainsi que les mesures d’aide dont il bénéficie. S’il a été fait application du même troisième alinéa, le juge de l’application des peines peut modifier, supprimer ou compléter les obligations et interdictions décidées par la juridiction ; il détermine les mesures d’aide dont le condamné bénéficie.

« Le juge statue, au plus tard dans les quatre mois qui suivent le jugement de condamnation, par ordonnance motivée, après réquisitions écrites du procureur de la République et après avoir entendu les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat. S’il envisage d’astreindre le condamné à l’obligation d’effectuer un travail d’intérêt général, il statue après que le condamné a été informé de son droit de refuser l’accomplissement d’un travail d’intérêt général et après avoir reçu sa réponse. Il lui notifie cette ordonnance et l’avertit des conséquences qu’entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction commise au cours du délai de probation ou un manquement aux mesures de contrôle et aux obligations particulières qui lui sont imposées.

« La situation matérielle, familiale et sociale de la personne est réévaluée à chaque fois que nécessaire au cours de l’exécution de la peine, et au moins une fois par an, par le service pénitentiaire d’insertion et de probation ou par la personne morale habilitée ainsi que par le juge de l’application des peines.

« Au vu de chaque nouvelle évaluation, le juge de l’application des peines peut, selon les modalités prévues à l’article 712-8 du présent code et après avoir entendu les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat modifier ou compléter les obligations et interdictions auxquelles la personne condamnée est astreinte ou supprimer certaines d’entre elles.

« Lorsque le tribunal n’a pas fait application de l’article 131-4-1 du code pénal, le juge de l’application des peines peut, s’il estime que la personnalité du condamné le justifie, décider, à tout moment au cours de l’exécution de la probation, d’ordonner un suivi renforcé.

« Art. 713-47. – Lorsque le condamné ne se soumet pas aux mesures de contrôle ou aux obligations particulières imposées en application de l’article 713-42, lorsque le condamné commet, pendant la durée d’exécution de la peine de probation, un crime ou un délit de droit commun suivi d’une condamnation à une peine privative de liberté sans sursis, le juge de l’application des peines peut, d’office ou sur réquisitions du parquet, ordonner par jugement motivé la prolongation du délai de probation. Il peut aussi ordonner la mise à exécution de tout ou partie de l’emprisonnement fixé par la juridiction en application du sixième alinéa de l’article 131-4-1 du code pénal.

« La décision est prise conformément aux dispositions de l’article 712-6 du présent code.

« Ces dispositions sont applicables même lorsque le délai de probation fixé par la juridiction a expiré, lorsque le motif de la prolongation du délai ou de l’emprisonnement s’est produit pendant le délai de probation.

« Art. 713-48. – Lorsque le juge de l’application des peines prolonge le délai de probation, ce délai ne peut, au total, être supérieur à trois années.

« Art. 713-49. – Si le condamné satisfait aux mesures de contrôle et d’aide et aux obligations particulières imposées en application de l’article 713-42 et si son reclassement paraît acquis, le juge de l’application des peines peut déclarer non avenue la condamnation prononcée à son encontre. Le juge de l’application des peines ne peut être saisi à cette fin ou se saisir d’office avant l’expiration d’un délai d’un an à compter du jour où la condamnation est devenue définitive.

« La décision est prise conformément aux dispositions de l’article 712-6.

« Art. 713-50. – Lorsque le condamné à une peine de probation doit satisfaire à l’obligation de s’abstenir de paraître dans un lieu ou une zone spécialement désigné, afin d’éviter un contact avec la victime ou la partie civile, ou à l’obligation de s’abstenir d’entrer en relation avec la victime ou la partie civile, prévues aux 10° et 14° de l’article 131-4-4 du code pénal, le juge de l’application des peines, le service pénitentiaire d’insertion et de probation ou la personne morale habilitée avise la victime ou la partie civile, directement ou par l’intermédiaire de son avocat, de la date de fin de la mise à l’épreuve.

« Cet avis n’est toutefois pas adressé lorsque la victime ou la partie civile a fait connaître qu’elle ne souhaitait pas être avisée des modalités d’exécution de la peine.

« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret.

« Art. 713-51. – La suspension de la peine ne s’étend pas au paiement des dommages-intérêts.

« Elle ne s’étend pas non plus aux incapacités, interdictions et déchéances résultant de la condamnation.

« Toutefois, ces incapacités, interdictions et déchéances cesseront d’avoir effet du jour où, par application des dispositions de l’article 713-48 du présent code ou de l’article 131-4-8 du code pénal, la condamnation aura été déclarée ou réputée non avenue. Cette disposition ne s’applique pas à la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. Les incapacités, interdictions et déchéances prononcées, comme peine complémentaire, à titre définitif cessent d’avoir effet à l’issue d’un délai de quarante ans à compter du jour où la condamnation a été réputée non avenue.

« Art. 713-52. – Les dispositions relatives aux effets de la peine de probation sont fixées à l’article 131-4-8 du code pénal. »

II. – Le chapitre II du titre IV du livre V du code de procédure pénale est abrogé.

III à V. – (Supprimés) – (Adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à l’exécution des peines

Article 47
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Article 48 bis

Article 48

(Supprimé)

Article 48
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Article 49

Article 48 bis

Au troisième alinéa de l’article 733 du code de procédure pénale, les mots : « doit subir, selon les dispositions de la décision de révocation, tout ou partie de » sont remplacés par les mots : « ne peut plus bénéficier d’une nouvelle libération conditionnelle et doit subir toute ».

Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 66.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 48 bis.

(Larticle 48 bis est adopté.)

Article 48 bis
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Article 49 bis A (Texte non modifié par la commission)

Article 49

(Supprimé)

Article 49
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Article 49 bis

Article 49 bis A

(Non modifié)

La section 5 du chapitre II du titre II du livre V du code de procédure pénale est complétée par un article 723-6-1 ainsi rédigé :

« Art. 723-6-1. – Les structures qui accueillent et accompagnent des personnes sous-main de justice faisant l’objet d’une mesure de placement à l’extérieur dans les conditions prévues aux articles 723 à 723-2 et 723-4 sont agréées par l’État.

« Une convention peut être conclue entre l’État et ces structures pour une durée de trois ans renouvelable. Elle définit la nature du projet de réinsertion proposé par la structure, les conditions d’accueil et d’accompagnement au sein de la structure des personnes mentionnées au premier alinéa, les droits et obligations de ces personnes ainsi que les modalités de financement de la mesure de placement.

« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. »

Mme la présidente. L’amendement n° 38, présenté par Mme Lubin, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

peut être

par le mot :

est

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Mme Lubin souhaitait, à juste titre, modifier l’article 49 bis A dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en remplaçant les mots « peut être » par le mot « est ».

Il s’agit de rendre obligatoire le statut destiné à sécuriser les associations qui vont accueillir les sortants de prison et procéder à ces accompagnements, qui sont indispensables.

Si l’Assemblée nationale a eu raison d’adopter cet article, nous pensons qu’il faut renforcer son efficacité en prévoyant la pérennisation du soutien juridique et financier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement, car il s’agit, en la circonstance, de créer une obligation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 38.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 49 bis A.

(Larticle 49 bis A est adopté.)

Article 49 bis A (Texte non modifié par la commission)
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Article 50

Article 49 bis

La section 8 du chapitre II du titre II du livre V du code de procédure pénale est ainsi rétablie :

« Section 8

« Modalités dexécution des fins de peine demprisonnement en labsence de tout aménagement de peine

« Art. 723-19. – Pour les peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans, lorsque aucune mesure d’aménagement n’a été ordonnée six mois avant la date d’expiration de la peine, toute personne condamnée à laquelle il reste quatre mois d’emprisonnement à subir ou, pour les peines inférieures ou égales à six mois, à laquelle il reste les deux tiers de la peine à subir, peut demander à exécuter le reliquat de sa peine selon les modalités du placement sous surveillance électronique. La demande doit être motivée par un projet sérieux d’insertion ou de réinsertion.

« Cette mesure est ordonnée par le juge de l’application des peines sauf en cas d’impossibilité matérielle, d’incompatibilité entre la personnalité du condamné et la nature de la mesure ou de risque de récidive.

« Le placement est mis en œuvre par le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation sous l’autorité du procureur de la République qui fixe les mesures de contrôle et les obligations énumérées aux articles 131-4-3 et 131-4-4 du code pénal auxquelles la personne condamnée devra se soumettre.

« Un décret précise les modalités d’application du présent article. » – (Adopté.)

Article 49 bis
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Article 50 bis A

Article 50

I A. – (Supprimé)

I BA et I B à I E. – (Supprimés)

I et II. – (Non modifiés)

III. – Après l’article 712-4 du code de procédure pénale, il est inséré un article 712-4-1 ainsi rédigé :

« Art. 712-4-1. – Lorsque la loi le prévoit, les décisions en matière d’application des peines sont prises après avis de la commission de l’application des peines présidée par le juge de l’application des peines et composée du procureur de la République, du chef d’établissement pénitentiaire et du service pénitentiaire d’insertion et de probation.

« Lorsque la commission donne son avis sur la situation d’un condamné placé sous surveillance électronique ou sous placement extérieur sans surveillance de l’administration pénitentiaire, la présence du chef d’établissement est facultative. »

IV et V. – (Non modifiés)

VI. – L’article 723-3 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Après avoir accordé, en application de l’article 712-5, une première permission de sortir à un condamné majeur, afin de préparer sa réinsertion professionnelle ou sociale ou de maintenir ses liens familiaux, le juge de l’application des peines peut déléguer cette prérogative au chef d’établissement pénitentiaire, selon des modalités déterminées par décret. En cas de refus d’octroi de la permission de sortir par le chef d’établissement pénitentiaire, celle-ci peut être demandée à nouveau au juge de l’application des peines qui statue conformément au même article 712-5. »

VII. – (Non modifié)

VIII. – L’intitulé du chapitre III du titre IV du livre V du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « De la conversion d’une peine d’emprisonnement ferme en peine de travail d’intérêt général ou de jour-amende ».

IX. – L’article 747-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 747-1. – En cas de condamnation définitive pour un délit à une peine d’emprisonnement ferme inférieure ou égale à six mois, ou dont la partie ferme est inférieure ou égale à six mois, y compris si cette peine résulte de la révocation d’un sursis, le juge de l’application des peines peut, avant la mise à exécution de l’emprisonnement ou en cours d’exécution de celui-ci, ordonner, d’office ou à la demande du condamné et selon les modalités prévues aux articles 712-6 ou 723-15, la conversion de cette peine en peine de travail d’intérêt général ou en peine de jour-amende lorsque cette conversion lui paraît de nature à assurer la réinsertion du condamné et à prévenir sa récidive.

« Lorsque la peine est convertie en travail d’intérêt général, la durée de la peine d’emprisonnement prononcée ou son reliquat peut être mis à exécution par le juge en cas de non accomplissement du travail par le condamné. Cette conversion n’est possible que si, après avoir été informé du droit de refuser l’accomplissement d’un travail d’intérêt général, le condamné a expressément déclaré renoncer à se prévaloir de ce droit.

« Lorsque la peine est convertie en peine de jour-amende, le nombre de jours est égal à celui de la peine d’emprisonnement prononcé ou du reliquat de cette peine.

« Dès sa saisine, le juge de l’application des peines peut ordonner la suspension de l’exécution de la peine jusqu’à sa décision sur le fond. »

X et XI. – (Supprimés)

XII. – L’article 747-2 du code de procédure pénale est abrogé.

XIII. – (Supprimé) – (Adopté.)

Article 50
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Article 50 bis

Article 50 bis A

(Supprimé)

Article 50 bis A
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Article 50 ter

Article 50 bis

Après l’article 707-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 707-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 707-1-1. – L’Agence de l’exécution des peines est un service à compétence nationale, placé auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, ayant pour mission de centraliser la gestion des procédures complexes d’exécution des peines.

« L’Agence de l’exécution des peines :

« 1° Participe à la coordination administrative, centralise et diffuse les informations permettant d’aider les juridictions dans leurs missions d’exécution des peines ;

« 2° Assure la gestion des dossiers d’exécution complexes en matière de peines privatives de liberté ou de peines restrictives de droit résultant de condamnations étrangères de personnes de nationalité française, ou de nationalité étrangère résidant en France ;

« 3° Assure la mise à exécution des peines de confiscation prononcées par les juridictions françaises concernant des biens ou une personne étrangère ;

« 4° Représente le ministère de la justice au sein des instances de la coopération internationale compétentes en matière d’exécution des peines ;

« 5° Élabore chaque année un rapport d’activité rendu public, qui peut comprendre des propositions d’évolution du droit de l’exécution des peines.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » – (Adopté.)

Chapitre III bis

Du droit de vote des détenus

Article 50 bis
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Article 50 quater

Article 50 ter

I. – À titre expérimental et pour le prochain renouvellement général du Parlement européen, les personnes détenues remplissant les conditions pour être électeur peuvent voter par correspondance sous pli fermé, dans les conditions fixées au présent article.

II. – Les personnes détenues sont informées de ce droit au moins huit semaines avant le scrutin. Elles reçoivent, à une date fixée par décret en Conseil d’État, les bulletins et le matériel de vote ainsi que les circulaires des candidats.

À partir du répertoire électoral unique, prévu à l’article L. 16 du code électoral, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales, l’Institut national de la statistique et des études économiques notifie au chef de l’établissement pénitentiaire les communes dans lesquelles les personnes sont inscrites sur la liste électorale ou sur la liste électorale complémentaire.

III. – Le jeudi précédant le scrutin, la personne détenue peut, après passage dans l’isoloir, remettre au chef de l’établissement pénitentiaire un pli contenant son bulletin de vote, par dérogation aux articles L. 54 et « L. 55 du code électoral.

La personne détenue signe une attestation de remise sur laquelle figure le numéro du pli.

Au plus tard le vendredi précédant le scrutin, le chef de l’établissement pénitentiaire transmet ce pli à la commune dans laquelle la personne détenue est inscrite sur la liste électorale ou sur la liste électorale complémentaire. Un avis de réception de son pli lui est transmis sans délai.

IV. – Les conditions de l’enregistrement, de conservation et de transfert du pli sont définies par décret en Conseil d’État.

V. – À la clôture du bureau de vote et par dérogation à l’article L. 62-1 du code électoral, le président du bureau de vote et ses assesseurs indiquent le numéro du pli sur la liste d’émargement et introduisent l’enveloppe contenant le bulletin de vote dans l’urne, après s’être assurés que l’électeur concerné n’a pas déjà voté.

VI. – Au plus tard six mois après le prochain renouvellement général du Parlement européen, le Gouvernement remet au Parlement un bilan de cette expérimentation. – (Adopté.)

Chapitre III ter

Dispositions pénitentiaires

Article 50 ter
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Article 50 quinquies

Article 50 quater

(Non modifié)

I. – L’article 714 du code de procédure pénale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« À titre exceptionnel, au regard de leur personnalité ou de leur comportement, les personnes mentionnées au premier alinéa peuvent être incarcérées dans un établissement pour peines lorsque cette décision apparaît nécessaire à la prévention des évasions ou au maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements pénitentiaires.

« Les prévenus peuvent également être affectés dans un établissement pour peines au sein d’un quartier spécifique, dans les conditions prévues à l’article 726-2. »

II. – Le second alinéa de l’article 717 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les condamnés peuvent également être affectés en maison d’arrêt au sein d’un quartier spécifique dans les conditions prévues à l’article 726-2. »

III. – L’article 726-2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 726-2. – Lorsqu’il apparaît que leur comportement porte ou est susceptible de porter atteinte au maintien du bon ordre de l’établissement ou à la sécurité publique, les personnes détenues majeures peuvent, sur décision de l’autorité administrative, être affectées au sein de quartiers spécifiques pour bénéficier d’un programme adapté de prise en charge et soumises à un régime de détention impliquant notamment des mesures de sécurité renforcée.

« La décision d’affectation dans ces quartiers spécifiques doit être motivée et ne peut intervenir qu’après une procédure contradictoire au cours de laquelle la personne concernée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. Cette décision fait l’objet d’un nouvel examen régulier.

« Cette décision n’affecte pas l’exercice des droits mentionnés à l’article 22 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, sous réserve des aménagements qu’imposent les impératifs de sécurité.

« L’exercice des activités mentionnées à l’article 27 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée par les personnes détenues affectées au sein de ces quartiers peut s’effectuer à l’écart des autres personnes détenues et sous réserve des aménagements qu’imposent les impératifs de sécurité.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » – (Adopté.)

Article 50 quater
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Article 51

Article 50 quinquies

(Supprimé)

Chapitre IV

Favoriser la construction d’établissements pénitentiaires

Article 50 quinquies
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Article 51 bis

Article 51

I. – Pour la réalisation des opérations d’extension ou de construction d’établissements pénitentiaires entrées en phase d’études opérationnelles avant le 31 décembre 2022, la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l’environnement concernant les projets définis à l’article L. 122-1 du code de l’environnement s’effectue dans les conditions définies à l’article L. 123-19 du même code.

La synthèse des observations et propositions déposées par le public est réalisée dans un délai d’un mois à compter de la clôture de la participation électronique du public par un ou plusieurs garants nommés par la Commission nationale du débat public dans les conditions fixées aux I et III de l’article L. 121-1-1 dudit code. Elle mentionne les réponses et, le cas échéant, les évolutions proposées par le maître d’ouvrage ou la personne publique responsable pour tenir compte des observations et propositions du public.

Le maître d’ouvrage verse l’indemnité relative à la mission des garants de la Commission nationale du débat public, qui la transfère ensuite à ces derniers.

Le présent article n’est pas applicable à l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique mentionnée au second alinéa de l’article L. 110-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

II. – (Supprimé)

III. – Une opération d’extension ou de construction d’un établissement pénitentiaire entrée en phase d’études opérationnelles avant le 31 décembre 2022 peut être réalisée selon la procédure définie par les II à VI de l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme.

Par dérogation au même article L. 300-6-1, la participation du public relative aux procédures de mise en compatibilité et d’adaptation est assurée conformément au I du présent article.

IV. – Pour la réalisation des opérations d’extension ou de construction d’établissements pénitentiaires entrées en phase d’études opérationnelles avant le 31 décembre 2022, les collectivités territoriales, leurs établissements publics ou leurs groupements peuvent céder à l’État à titre gratuit ou à une valeur inférieure à leur valeur vénale des terrains de leur domaine privé destinés à l’extension ou à la construction d’établissements pénitentiaires.

V. – Le premier alinéa de l’article 100 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifié :

1° Aux première et seconde phrases, l’année : « 2019 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;

2° Le début de la seconde phrase est ainsi rédigé : « Au dernier trimestre de l’année 2019, puis au troisième trimestre de l’année 2022, le Gouvernement… (le reste sans changement). » – (Adopté.)

Article 51
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Article 51 ter

Article 51 bis

La loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifiée :

1° Au second alinéa de l’article 4, les mots : « , les correspondances et tout autre moyen de communication » sont remplacés par les mots : « et les correspondances » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article 39 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les détenus ne sont pas autorisés à disposer, dans leur cellule, d’un terminal mobile ni de terminaux autonomes de connexion à Internet. » ;

3° Le premier alinéa de l’article 40 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « La correspondance écrite s’entend par voie postale à l’exclusion de la voie électronique. L’accès libre à Internet n’est pas autorisé aux détenus. » – (Adopté.)

Article 51 bis
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Article 51 quater

Article 51 ter

L’article 35 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les visiteurs font l’objet de toute mesure de contrôle jugée nécessaire à la sécurité et au bon ordre de l’établissement. »

Mme la présidente. L’amendement n° 67, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Un certain nombre d’associations et les auteurs de cet amendement estiment que le dispositif prévu à l’article 51 ter en matière de fouille entraîne un fort ralentissement de l’activité de ceux que l’on appelle communément les « visiteurs de prison ». Ces dispositions, qui visent à soumettre les personnes titulaires d’un permis de visite à toute mesure de contrôle jugée nécessaire à la sécurité et au bon ordre de l’établissement avant leur entrée en détention, ont été intégrées, en première lecture, à la suite de l’adoption d’un amendement du groupe Les Républicains.

Limiter ainsi la capacité d’action de ces visiteurs – chacun pensera à l’association Genepi – est contraire à la recherche d’un bon climat lors de la détention et d’une future bonne réinsertion.

Beaucoup de femmes et d’hommes reculent, à juste titre, devant ces pratiques peu conformes au respect de la dignité et de leur rôle, utile, pour la société.

Nous proposons au Sénat de s’opposer enfin à ces dispositions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission considère qu’il est parfaitement utile que les mesures de contrôle soient effectuées à l’entrée des maisons d’arrêt ou des centres pénitentiaires. Tel est d’ailleurs l’objet du texte que nous avons voté.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable ! En effet, si je partage l’avis de M. le rapporteur sur l’utilité des mesures de contrôle pour les visiteurs de prison, cela me paraît relever davantage de dispositions réglementaires. De plus, mentionner les personnes visées dans le texte de la commission des lois laisserait entendre que d’autres personnes qui pénètrent dans les prisons ne font pas l’objet de tels contrôles. Or toutes doivent faire l’objet des mêmes contrôles de sécurité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 67.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 51 ter.

(Larticle 51 ter est adopté.)

Article 51 ter
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Article 51 quinquies (Texte non modifié par la commission)

Article 51 quater

(Non modifié)

L’article 12-1 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « de l’emprise foncière affectée au service public pénitentiaire » sont remplacés par les mots : « du domaine affecté à l’établissement pénitentiaire ou à ses abords immédiats » ;

2° À la première phrase du troisième alinéa, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « peut la retenir en utilisant le cas échéant la force strictement nécessaire. Il » ;

3° Le dernier alinéa est supprimé. – (Adopté.)

Article 51 quater
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Article 52 A

Article 51 quinquies

(Non modifié)

L’article 57 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Le début de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigé : « Hors les cas où les personnes détenues accèdent à l’établissement sans être restées sous la surveillance constante de l’administration pénitentiaire ou des forces de police ou de gendarmerie, les fouilles intégrales des personnes détenues doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que leur comportement fait courir… (le reste sans changement). » ;

2° Le même premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Elles peuvent être réalisées de façon systématique lorsque les nécessités de l’ordre public et les contraintes du service public pénitentiaire l’imposent. Dans ce cas, le chef d’établissement doit prendre une décision pour une durée maximale de trois mois renouvelable après un nouvel examen de la situation de la personne détenue. » ;

3° Après le mot : « fouilles », la fin de la première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « de personnes détenues dans des lieux et pour une période de temps déterminés, indépendamment de leur personnalité. »

Mme la présidente. L’amendement n° 68, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement de suppression relève du même esprit que le précédent, défendu par Michelle Gréaume.

La vie en prison se déroule dans des conditions particulièrement détestables. Nous sommes assez nombreux ici à user de notre droit de visite dans les établissements pénitentiaires pour le savoir.

La multiplication des suicides, comme celui de ce jeune fraudeur du métro, il y a quelques jours, à Fleury-Mérogis, l’atteste.

Vouloir encore durcir ces conditions sans élaborer d’alternatives est, selon nous, un non-sens et ne peut qu’amener, à terme, une véritable explosion du système pénitentiaire français.

Nous estimons suffisantes les dispositions législatives et réglementaires qui régissent actuellement les fouilles en prison.

Réduire les tensions, violences, actes illégaux en prison dépendra, en premier lieu, d’une baisse de la surpopulation carcérale et du développement de peines de substitution, ainsi que d’une nouvelle politique de réinsertion, exigeant, bien entendu, des moyens budgétaires accrus. Des mesures telles que celles qui sont proposées par le biais du présent article tendent à gérer la situation dans les prisons françaises et donc, quelque part, à accepter sa détérioration sans viser une amélioration sur le fond.

C’est la raison pour laquelle nous proposons au Sénat de voter en faveur de cet amendement de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’article 51 quinquies résulte d’un article additionnel ajouté à l’Assemblée nationale, sur l’initiative de deux de nos collègues, MM. Houbron et Breton. Ces derniers avaient, dans le cadre d’une mission d’information relative au régime des fouilles en détention, fait un certain nombre de propositions sur les conditions dans lesquelles ces fouilles devaient avoir lieu, les fouilles intégrales restant naturellement l’exception.

Cet article a été adopté par l’Assemblée nationale et la commission des lois du Sénat a décidé de le conserver. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 68.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis que la commission !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 68.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 51 quinquies.

(Larticle 51 quinquies est adopté.)

Chapitre V

Diversifier les modes de prise en charge des mineurs délinquants

Article 51 quinquies (Texte non modifié par la commission)
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Article 52

Article 52 A

(Supprimé)

Article 52 A
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Article 52 bis

Article 52

I. – L’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi modifiée :

1° A à 1° H (Supprimés)

1° L’article 33 est ainsi modifié :

a) La dernière phrase du premier alinéa est supprimée ;

b) Après le même premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans le cadre du placement en centre éducatif fermé, le magistrat ou la juridiction peut, durant le temps et selon les modalités qu’il détermine, autoriser l’établissement à organiser un accueil temporaire du mineur dans d’autres lieux afin de préparer la fin du placement ou de prévenir un incident grave.

« La violation des obligations auxquelles le mineur est astreint en vertu des mesures qui ont entraîné son placement dans le centre, y compris en cas d’accueil dans un autre lieu, peut entraîner, selon le cas, le placement en détention provisoire ou l’emprisonnement du mineur. » ;

c) Au deuxième alinéa, les mots : « à l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;

2° Au premier alinéa de l’article 40, après le mot : « devra », sont insérés les mots : « fixer les modalités du droit de visite et d’hébergement des parents et » ;

3° (Supprimé)

II. – (Non modifié) À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi, le juge des enfants, le juge d’instruction, le juge des libertés et de la détention ou la juridiction de jugement peut prononcer une mesure éducative d’accueil de jour à l’égard d’un mineur dans les cas prévus aux cinquième et dixième alinéas de l’article 8, au 1° du II de l’article 10-2, aux articles 15 et 16, au premier alinéa de l’article 20-10 et à l’article 24-6 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

La mesure éducative d’accueil de jour consiste en une prise en charge pluridisciplinaire, en journée, collective, et dont la continuité est garantie à partir d’un emploi du temps individualisé, adapté aux besoins spécifiques du mineur.

Elle est ordonnée pour une durée de six mois renouvelable deux fois. Cette mesure peut se poursuivre ou être renouvelée après la majorité de l’intéressé, avec son accord, dans les mêmes conditions.

L’exécution de cette mesure est confiée par le magistrat ou la juridiction de jugement à un service ou un établissement du secteur public ou du secteur associatif habilité de la protection judiciaire de la jeunesse.

Les ressorts dans lesquels cette mesure peut être prononcée et exercée à titre expérimental, dont le nombre ne peut excéder vingt, sont définis par arrêté du ministre de la justice.

Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation.

III. – (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 41, présenté par Mme Lubin, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Après le premier alinéa de l’article 40, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le suivi de ces modalités peut être confié par le magistrat ou la juridiction de jugement à un service ou un établissement du secteur public ou du secteur associatif habilité de la protection judiciaire de la jeunesse. »

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Cet amendement vise à préciser les établissements et services pouvant exercer le suivi des modalités du droit de visite et d’hébergement des parents en citant nommément le secteur public et le secteur associatif, afin d’éviter toute confusion sur les opérateurs pouvant mener cette mission d’accompagnement renforcé.

En inscrivant dans la loi l’existence d’un suivi de ces modalités par un établissement ou un service du secteur public ou associatif, il est créé une nouvelle mesure judiciaire pénale d’accompagnement éducatif spécifique qui fait défaut dans le texte présenté.

En effet, le texte, tel qu’il est proposé aujourd’hui, ne rend pas obligatoire ce soutien renforcé à la parentalité au cours des droits de visite et d’hébergement qui doit pourtant être le corollaire obligatoire de ce nouveau droit, s’agissant des jeunes les plus en conflit avec la loi.

Nous proposons donc d’insérer, après le premier alinéa de l’article 40 de l’ordonnance du 2 février 1945, un alinéa ainsi rédigé : « Le suivi de ces modalités peut être confié par le magistrat ou la juridiction de jugement à un service ou un établissement du secteur public ou du secteur associatif habilité de la protection judiciaire de la jeunesse. »

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable sur cet amendement, relatif au droit de visite et d’hébergement des mineurs placés.

Je rappelle que les dispositions de l’article 52 reconnaissent aux parents d’un mineur qui fait l’objet d’une mesure de placement un droit de visite et d’hébergement, selon des modalités fixées par le juge des enfants.

Mes collègues signataires de l’amendement proposent de préciser que le suivi de ces modalités est confié par le magistrat à un service ou à un établissement du secteur public ou du secteur associatif habilité de la protection judiciaire de la jeunesse.

Cette précision a paru à la commission superfétatoire dans la mesure où ce suivi sera de fait assuré par la structure dans laquelle le mineur aura été placé – un centre éducatif fermé, par exemple –, qu’elle relève du secteur public ou du secteur habilité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Bigot, l’amendement n° 41 est-il maintenu ?

M. Jacques Bigot. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 52.

(Larticle 52 est adopté.)

TITRE V bis

ACCROÎTRE LA MAÎTRISE DES DÉPENSES D’AIDE JURIDICTIONNELLE

Article 52
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Article 52 ter

Article 52 bis

L’article 1635 bis Q du code général des impôts est ainsi rétabli :

« Art. 1635 bis Q. – I. – Par dérogation aux articles 1089 A et 1089 B, une contribution pour l’aide juridique de 20 à 50 € est perçue par instance introduite en matière civile, commerciale, prud’homale, sociale ou rurale devant une juridiction judiciaire ou par instance introduite devant une juridiction administrative.

« II. – La contribution pour l’aide juridique est exigible lors de l’introduction de l’instance. Elle est due par la partie qui introduit une instance.

« III. – Toutefois, la contribution pour l’aide juridique n’est pas due :

« 1° Par les personnes bénéficiaires de l’aide juridictionnelle ;

« 2° Par l’État ;

« 3° Pour les procédures introduites devant la commission d’indemnisation des victimes d’infraction, devant le juge des enfants, le juge des libertés et de la détention et le juge des tutelles ;

« 4° Pour les procédures de traitement des situations de surendettement des particuliers et les procédures de redressement et de liquidation judiciaires ;

« 5° Pour les procédures introduites par les salariés devant un conseil de prud’hommes ;

« 6° Pour les recours introduits devant une juridiction administrative à l’encontre de toute décision individuelle relative à l’entrée, au séjour et à l’éloignement d’un étranger sur le territoire français ainsi qu’au droit d’asile ;

« 7° Pour la procédure mentionnée à l’article L. 521-2 du code de justice administrative ;

« 8° Pour la procédure mentionnée à l’article 515-9 du code civil ;

« 9° Pour la procédure mentionnée à l’article L. 34 du code électoral ;

« 10° Pour les procédures de conciliation mentionnées à l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles déléguées par le juge, en vertu d’une disposition particulière, au conciliateur de justice.

« IV. – Lorsqu’une même instance donne lieu à plusieurs procédures successives devant la même juridiction, la contribution n’est due qu’au titre de la première des procédures intentées.

« V. – Lorsque l’instance est introduite par un auxiliaire de justice, ce dernier acquitte pour le compte de son client la contribution par voie électronique.

« Lorsque l’instance est introduite sans auxiliaire de justice, la partie acquitte cette contribution par voie de timbre mobile ou par voie électronique.

« Les conséquences sur l’instance du défaut de paiement de la contribution pour l’aide juridique sont fixées par voie réglementaire.

« VI. – La contribution pour l’aide juridique est affectée au Conseil national des barreaux.

« VII. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 2 est présenté par MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 87 rectifié est présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Mézard, Artano, Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 2.

M. Jean-Pierre Sueur. Comme vous le savez, la loi de finances rectificative du 29 juillet 2011 avait instauré une contribution pour l’aide juridique forfaitaire de 35 euros pour tout justiciable introduisant une instance.

Ce droit d’ester en justice, acheté sous la forme d’un timbre fiscal, concernait les justices judiciaire, civile, commerciale, prud’homale, sociale, rurale, voire administrative, à l’exception des situations de surendettement, de la saisine du juge des libertés et de la détention et du juge des enfants.

Cette contribution avait été créée pour assurer le financement de la réforme de la garde à vue à laquelle avait été conduit le gouvernement de M. François Fillon.

Elle avait été supprimée par la loi de finances pour 2014 sur proposition de Mme Taubira, alors garde des sceaux, au motif qu’elle constituait un véritable frein à l’accès au droit. Pour compenser la perte de recettes, une dotation budgétaire – sans doute insuffisante – avait été créée.

Le présent projet de loi prévoit de rétablir une contribution, cette fois pour financer l’aide juridictionnelle. Son montant s’établirait entre 20 et 50 euros.

Je crois savoir que de nombreux rapports ont été rédigés sur l’aide juridictionnelle. Je me demande même, madame Sophie Joissains, si vous n’aviez pas rédigé, avec M. Jacques Mézard, l’un d’entre eux. (Sourires.) Pour l’avoir lu avec une grande attention, je sais que cette contribution n’est pas, selon vous, une bonne piste. Vous évoquiez dans ce rapport d’autres projets de réforme – utiles – qui sont toujours devant nous.

Mes chers collègues, ne créons pas une sorte de droit à la justice qui s’établirait entre 20 et 50 euros. Cela serait forcément pénalisant pour les justiciables, notamment ceux dont les ressources sont les plus modestes. Nous pensons que nous avions bien fait de retirer ce droit de timbre et nous vous proposons de persévérer dans cette voie !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. De persévérer dans l’erreur ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 87 rectifié.

Mme Maryse Carrère. En première lecture, nous étions nombreux à nous opposer à la réintroduction de la contribution pour l’aide juridique. Comme cela avait été dit, cette proposition renforce le dualisme de la protection juridique en exonérant les personnes bénéficiant déjà de l’aide juridictionnelle et en faisant donc porter l’effort de cette nouvelle contribution sur les personnes assumant seules leurs frais de justice.

Nos préoccupations se portent en particulier sur les justiciables qui seraient alors victimes de l’effet de seuil.

À cette occasion, madame la ministre, vous nous aviez indiqué avoir engagé des négociations avec le Conseil national des barreaux, la Conférence des bâtonniers et la Bâtonnière de Paris, à la suite de la remise d’un rapport sur la question par l’Inspection générale de la justice, l’IGJ, et l’Inspection générale des finances, l’IGF.

Il existe en outre, cela a été dit, des pistes d’origine parlementaire, avancées dès 2014 dans le rapport de nos collègues Jacques Mézard et Sophie Joissains, qui pourraient être explorées – la hausse des droits d’enregistrement et la taxation des contrats d’assurance protection juridique. Elles semblent d’ailleurs avoir été en partie reprises par les inspections dans leur rapport.

Dans l’attente de solutions plus convenables, nous proposons donc la suppression de l’article 52 bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission des lois a souhaité réintroduire dans ce texte le financement de l’aide juridictionnelle, dont la dépense augmente chaque année, on le sait. Il ne serait donc pas tout à fait anormal de pouvoir demander une contribution. Celle-ci existait sous la forme d’un droit de timbre. Elle a été supprimée en 2013.

Nous proposons de la réintroduire selon un tarif modulé entre 20 et 50 euros. Ce système serait exonératoire pour un certain nombre de personnes, puisque cette contribution ne serait pas acquittée pour plusieurs contentieux auxquels le présent article ajoute les procédures engagées par les salariés devant le conseil de prud’hommes.

Comme par le passé, les personnes éligibles à l’aide juridictionnelle ne seraient pas non plus redevables de cette contribution, qui est susceptible de rapporter à peu près 50 millions d’euros.

La difficulté de l’aide juridictionnelle est aujourd’hui telle que cette idée ne serait pas complètement inintéressante !

Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur les amendements identiques nos 2 et 87 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. La commission des lois a souhaité réintroduire une contribution pour l’aide juridique en vue de financer l’aide juridictionnelle et de responsabiliser les justiciables à l’introduction d’une instance au civil en modulant son montant, cela a été rappelé, entre 20 et 50 euros.

Les amendements identiques visent à supprimer cette contribution, revenant en cela au texte de l’Assemblée nationale.

Réintroduire le droit de timbre fait débat, il faut le reconnaître. Le droit de timbre peut en effet être une manière de responsabiliser les justiciables en les sensibilisant au coût de la justice et en évitant des saisines abusives. Dans beaucoup de pays d’Europe, le paiement des frais de justice par le justiciable est une réalité, contrairement à ce qui se fait en France.

L’introduction d’un droit de timbre peut également faire craindre, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, de freiner l’accès à la justice.

Le sujet ne me semble pas aujourd’hui complètement mûr. Surtout, il ne doit pas être traité – je l’avais dit – sans une réflexion d’ensemble appréhendant plus globalement la question de l’accès à la justice.

Vous avez eu raison de rappeler, madame la sénatrice, que j’avais demandé à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale de la justice un rapport sur ces sujets. Il m’a été rendu. Dès le vote de la future loi, je prendrai, comme je m’y suis engagée, contact notamment avec le Conseil national des barreaux pour évoquer avec mes interlocuteurs la manière dont le sujet mérite d’être traité. À ce stade, j’émets, au nom du Gouvernement, un avis favorable sur les amendements identiques nos 2 et 87 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Joissains, pour explication de vote.

Mme Sophie Joissains. Comme vient de le dire Mme la garde des sceaux, cette contribution me paraît totalement contraire à la philosophie qui doit être celle de la justice : ouvrir l’accès à tous.

En effet, M. Mézard et moi-même avions commis un rapport préconisant de taxer la protection juridique des contrats d’assurance, ainsi que les actes réglementés, ce qui permettait d’avoir une base extrêmement large et de limiter les montants pour le justiciable.

Je pense, comme Mme la ministre, que nous pouvons attendre la prochaine réforme de l’aide juridictionnelle pour traiter ce problème.

En tout cas, je voterai évidemment les amendements identiques défendus par mes collègues Jean-Pierre Sueur et Maryse Carrère.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 et 87 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 52 bis.

(Larticle 52 bis est adopté.)

Article 52 bis
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Article 52 quater

Article 52 ter

Après l’article 18 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, il est inséré un article 18-1 ainsi rédigé :

« Art. 18-1. – Toute demande d’aide juridictionnelle est précédée de la consultation d’un avocat. Celui-ci vérifie que l’action envisagée n’apparaît pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement.

« Cette consultation n’est pas exigée du défendeur à l’action, de la personne civilement responsable, du témoin assisté, de la personne mise en examen, du prévenu, de l’accusé, du condamné et de la personne faisant l’objet de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

« La rétribution due à l’avocat pour cette consultation est prise en charge au titre de l’aide juridictionnelle si le demandeur remplit les conditions pour en bénéficier, à l’exception de celles fixées à l’article 7.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

Mme la présidente. L’amendement n° 88 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre et MM. Mézard, Artano, Collin, Corbisez, Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Il est proposé, dans le même esprit que celui qui a présidé au dépôt de l’amendement précédent, de supprimer la disposition visant à introduire une consultation obligatoire d’un avocat avant toute demande d’aide juridictionnelle.

En effet, cette mesure ne paraît ni utile ni souhaitable : d’une part, il est déjà possible pour les justiciables de bénéficier de consultations juridiques gratuites avant de solliciter l’aide juridictionnelle, d’autre part, une ambiguïté demeure sur la rémunération de cette consultation obligatoire : si elle était facturée, cela pourrait induire un coût élevé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la consultation obligatoire d’un avocat préalablement à un dépôt de demande d’aide juridictionnelle prévue par la commission.

Le dispositif mis en place a pour objet de rendre effectif le principe de filtre inscrit dans les dispositions de l’article 7 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, qui, dans la réalité, n’a jamais été appliquée.

L’article 52 ter prévoit que l’aide juridictionnelle est accordée à la personne dont l’action n’apparaît pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement.

Cette consultation serait rétribuée comme un acte d’aide juridictionnelle dès lors que le demandeur de l’aide remplirait les conditions et que le bien-fondé de son action serait établi.

Ce dispositif, s’il fonctionne correctement, devrait largement améliorer le contrôle de l’attribution de l’aide juridictionnelle.

Je vais citer quelques chiffres. Aujourd’hui, le dispositif fonctionne comme un système de guichet : 90 % des demandes formulées en première instance donnent lieu à une admission, alors même que ce taux est de 23 % devant la Cour de cassation, car l’aide juridictionnelle est refusée aux demandeurs si aucun moyen de cassation ne peut être relevé. Cela montre l’efficacité du dispositif !

Ce système de contrôle du bien-fondé et de la recevabilité de la demande a également d’autres vertus. Il permettra d’orienter les demandeurs vers des procédures de conciliation voulues par le texte et d’aboutir à un accord amiable pour une part sans doute importante des affaires traitées. De nombreux rapports consacrés au sujet rendus publics ces dernières années proposent divers dispositifs qui n’ont jamais été mis en œuvre jusqu’à cette date. L’objectif de la commission était de remettre en place un dispositif dont l’efficacité semble en tout cas assez évidente.

Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui vise à supprimer l’article réintroduit par la commission des lois et à revenir ainsi au texte de l’Assemblée nationale.

Des consultations juridiques gratuites sont évidemment d’ores et déjà délivrées dans le cadre des divers dispositifs d’accès au droit.

Nous cherchons en outre à promouvoir le développement des consultations juridiques au sein des juridictions pour mieux conseiller les justiciables et favoriser le recours notamment aux modes alternatifs de règlement des différends.

Il me semble que rendre obligatoire la consultation préalable d’un avocat et prévoir sa rétribution à l’aide juridictionnelle aurait pour conséquence inévitable un coût extrêmement élevé. Je rappelle qu’on recense chaque année près d’un million d’admissions à l’aide juridictionnelle.

J’estime, là encore, qu’une telle orientation doit être étudiée dans le cadre de la réflexion plus globale à laquelle je me suis engagée, ne serait-ce que pour en maîtriser le coût.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 88 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 52 ter.

(Larticle 52 ter est adopté.)

Article 52 ter
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Article 52 quinquies

Article 52 quater

L’article 21 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « peut recueillir » sont remplacés par le mot : « recueille » ;

2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« À cet effet, il consulte les services de l’État et des collectivités publiques, les organismes de sécurité sociale et les organismes qui assurent la gestion des prestations sociales. Ceux-ci sont tenus de lui communiquer, sans pouvoir opposer le secret professionnel, tous renseignements permettant de vérifier que l’intéressé satisfait aux conditions exigées pour bénéficier de l’aide juridictionnelle. » – (Adopté.)

Article 52 quater
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Article 53

Article 52 quinquies

Au premier alinéa de l’article 44 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, le mot : « étrangères » est remplacé par le mot : « relatives ». – (Adopté.)

TITRE VI

RENFORCER L’ORGANISATION DES JURIDICTIONS

Chapitre Ier

Améliorer l’efficacité en première instance

Article 52 quinquies
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Article 53 bis AA

Article 53

I. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 121-1, les mots : « , les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance » sont remplacés par les mots : « et dans les tribunaux de première instance » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 121-3 est ainsi modifié :

a) Les mots : « , le président du tribunal de grande instance, et le magistrat chargé de la direction et de l’administration du tribunal d’instance » sont remplacés par les mots : « et le président du tribunal de première instance » ;

b) Après le mot : « différents », sont insérés les mots : « pôles, chambres, » et après le mot : « services », sont insérés les mots : « et, s’il en existe, chambres détachées » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 121-4, les mots : « , les juges des tribunaux d’instance et de grande instance » sont remplacés par les mots : « et les juges des tribunaux de première instance » ;

3° bis Au premier alinéa de l’article L. 122-1 et à l’article L. 122-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

4° À l’article L. 123-1, les mots : « grande instance, les tribunaux d’instance, les tribunaux d’instance ayant compétence exclusive en matière pénale » sont remplacés par les mots : « première instance » ;

4° bis Après le même article L. 123-1, il est inséré un article L. 123-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 123-1-1. – Les fonctionnaires des greffes des tribunaux de première instance sont affectés soit au siège du tribunal, soit au siège d’une chambre détachée. Par décision conjointe du président du tribunal et du procureur de la République près ce tribunal, prise après avis du directeur des services de greffe, leur affectation peut être modifiée, pour nécessité de service et pour une durée limitée.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;

5° À la deuxième phrase de l’article L. 123-4, les mots : « d’instance, des tribunaux de grande instance et » sont supprimés ;

5° bis Le chapitre IV du titre II du livre Ier est complété par un article L. 124-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 124-1. – Tout projet de création ou de suppression et tout projet de modification du siège ou du ressort d’un tribunal de première instance ou d’une chambre détachée donnent lieu à une évaluation, au vu des observations présentées par le premier président de la cour d’appel et le procureur général près cette cour ainsi que par le conseil départemental, dont il est rendu compte dans un rapport public.

« La même procédure est applicable aux tribunaux pour enfants ainsi qu’aux juridictions mentionnées à l’article L. 261-1.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, notamment les critères sur la base desquels la création ou la suppression ou la modification du siège ou du ressort d’une juridiction ou d’une chambre détachée doit être justifiée. » ;

5° ter À l’intitulé du titre Ier du livre II, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

5° quater À la première phrase de l’article L. 211-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

5° quinquies À l’intitulé de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

5° sexies Aux articles L. 211-3 et L. 211-4, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

5° septies (Supprimé)

6° Après l’article L. 211-4-1, il est inséré un article L. 211-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 211-4-2. – Le tribunal de première instance connaît des demandes formées en application du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges. » ;

7° L’article L. 211-5 est abrogé ;

7° bis Aux articles L. 211-6, L. 211-7, L. 211-8 et L. 211-9-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

7° ter À l’intitulé de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

8° (Supprimé)

8° bis Aux articles L. 211-10, L. 211-11, L. 211-11-1, L. 211-12, L. 211-13 et L. 211-14, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

8° ter à 8° quinquies (Supprimés)

9° L’article L. 212-1 est ainsi modifié :

a) Le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« En matières disciplinaire ou relative à l’état des personnes, sous réserve des dispositions particulières aux matières de la compétence du juge aux affaires familiales, le tribunal de première instance ne peut statuer à juge unique. » ;

10° L’article L. 212-2 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsqu’une affaire, compte tenu de l’objet du litige ou de la nature des questions à juger, est portée devant le tribunal de première instance statuant à juge unique, le renvoi à la formation collégiale peut être décidé, d’office ou à la demande de l’une des parties, dans les cas prévus par décret en Conseil d’État. Cette décision constitue une mesure d’administration judiciaire qui n’est pas susceptible de recours. » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

10° bis À l’article L. 212-3 et au premier alinéa des articles L. 212-4 et L. 212-6, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

11° Au début de la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre II, il est ajouté un article L. 212-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 212-7. – À titre exceptionnel, les attributions du directeur des services de greffe mentionnées aux articles 26, 26-1, 26-3, 31, 31-2, 31-3, 33-1, 511 et 512 du code civil peuvent être exercées par un directeur des services de greffe du ressort de la cour d’appel ou, à défaut, par un greffier chef de greffe exerçant ses fonctions au sein du ressort du tribunal de première instance concerné, par décision conjointe du premier président de la cour d’appel et du procureur général près cette cour. » ;

11° bis (Supprimé)

12° Au début de la section 4 du chapitre II du titre Ier du livre II, il est ajouté un article L. 212-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 212-8. – Le tribunal de première instance peut comprendre, en dehors de son siège, des chambres détachées, dont le siège et le ressort sont fixés par décret.

« Les compétences matérielles minimales de l’ensemble des chambres détachées sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Des compétences supplémentaires peuvent être attribuées à ces chambres, par une décision conjointe du premier président de la cour d’appel et du procureur général près cette cour, sur proposition conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République près ce tribunal. » ;

12° bis À la fin de l’intitulé de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre II, les mots : « de grande instance » sont supprimés ;

12° ter Aux articles L. 213-1 et L. 213-2, au premier alinéa et au 1° de l’article L. 213-3 et au premier alinéa de l’article L. 213-4, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

13° Après la sous-section 3 de la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre II, est insérée une sous-section 3 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 3 bis

« Le juge des tutelles

« Art. L. 213-4-1. – Dans chaque tribunal de première instance, un ou plusieurs magistrats du siège sont délégués dans les fonctions de juge des tutelles des majeurs.

« Le juge des tutelles connaît :

« 1° De la sauvegarde de justice, de la curatelle, de la tutelle des majeurs et de la mesure d’accompagnement judiciaire ;

« 2° Des actions relatives à l’exercice du mandat de protection future ;

« 3° Des demandes formées par un époux, lorsque son conjoint est hors d’état de manifester sa volonté, aux fins d’être autorisé à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de ce dernier serait nécessaire, ou aux fins d’être habilité à le représenter ;

« 4° De la constatation de la présomption d’absence ;

« 5° Des demandes de désignation d’une personne habilitée et des actions relatives à l’habilitation familiale prévue à la section 6 du chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil. » ;

13° bis Aux premier et second alinéas de l’article L. 213-5, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

14° (Supprimé)

14° bis Au premier alinéa de l’article L. 213-7, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

14° ter La section 1 du chapitre III du titre Ier du livre II est complétée par une sous-section 6 ainsi rédigée :

« Sous-section 6

« Le juge chargé des contentieux de proximité

« Art. L. 213-8-1. – Dans chaque tribunal de première instance, un ou plusieurs magistrats du siège sont délégués dans les fonctions de juge chargé des contentieux de proximité.

« Le juge chargé des contentieux de proximité connaît, en matière civile, des actions personnelles ou mobilières jusqu’à la valeur de 10 000 € et des demandes indéterminées qui ont pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 €.

« Il connaît également :

« 1° De la saisie des rémunérations, à l’exception des demandes ou moyens de défense échappant à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire ;

« 2° Des actions tendant à l’expulsion des personnes qui occupent aux fins d’habitation des immeubles bâtis, sans droit ni titre ;

« 3° Des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion, ainsi que des actions relatives à l’application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement ;

« 4° Des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel ;

« 5° Des actions relatives à l’application du chapitre II du titre Ier du livre III du code de la consommation ;

« 6° Des actions relatives à l’inscription et à la radiation sur le fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels prévu à l’article L. 751-1 du même code. » ;

14° quater Au premier alinéa de l’article L. 213-9, à la première phrase de l’article L. 214-1 et à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 214-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

14° quinquies (Supprimé)

15° L’article L. 215-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

b) Après les mots : « siège du tribunal », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « de première instance. » ;

15° bis À l’article L. 215-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

16° Le chapitre V du titre Ier du livre II est complété par des articles L. 215-3 à L. 215-7 ainsi rédigés :

« Art. L. 215-3. – Le greffe du tribunal de première instance, sous le contrôle du juge, tient les registres de publicité légale tenus au greffe du tribunal de commerce.

« Art. L. 215-4. – Les fonctions de tribunal pour la navigation du Rhin sont exercées par un tribunal de première instance spécialement désigné, conformément à la convention révisée pour la navigation du Rhin, signée à Mannheim le 17 octobre 1868.

« Les fonctions de tribunal de première instance pour la navigation de la Moselle sont exercées par un tribunal de première instance spécialement désigné, conformément à la loi n° 66-379 du 15 juin 1966 déterminant, en application de la convention franco-germano-luxembourgeoise du 27 octobre 1956, les juridictions compétentes pour la navigation de la Moselle.

« Art. L. 215-5. – Le service du livre foncier est assuré au sein du tribunal de première instance selon des modalités fixées par décret.

« Art. L. 215-6. – Le tribunal de première instance connaît :

« 1° De la tutelle, des administrations légales et des curatelles de droit local ;

« 2° Du partage judiciaire et de la vente judiciaire d’immeubles, des certificats d’héritier et des scellés ;

« 3° Des registres des associations et des registres des associations coopératives de droit local.

« Art. L. 215-7. – Le tribunal de première instance connaît de la saisie conservatoire prévue à l’article L. 511-51 du code de commerce. » ;

16° bis Aux articles L. 216-1 et L. 216-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

16° ter À l’intitulé du chapitre VII du titre Ier du livre II, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

16° quater Aux articles L. 217-1 et L. 217-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

16° quinquies (Supprimé)

17° Le titre II du livre II est abrogé.

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après l’article 39-3, il est inséré un article 39-4 ainsi rédigé :

« Art. 39-4. – Quand un département compte plusieurs tribunaux de première instance, le procureur général peut désigner l’un des procureurs de la République de ce département pour représenter, sous son autorité, l’ensemble des parquets dans le cadre de leurs relations avec les autorités administratives du département, notamment pour l’application du dernier alinéa de l’article 39-2, et d’assurer la coordination des activités s’y rapportant. Celui-ci tient les autres procureurs informés de ses diligences et rend compte au procureur général. » ;

2° Au début de l’article 52-1, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Il y a un ou plusieurs juges d’instruction dans chaque département.

« Lorsqu’il existe plusieurs tribunaux de première instance dans un département, un décret peut fixer la liste des tribunaux dans lesquels il n’y a pas de juge d’instruction. Ce décret précise quel est le tribunal de première instance dont le ou les juges d’instruction sont compétents pour connaître des informations concernant des infractions relevant, en application de l’article 43, de la compétence du procureur de la République du tribunal dans lequel il n’y a pas de juge d’instruction. » ;

3° L’article 80 est ainsi modifié :

a) Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Le procureur de la République près le tribunal de première instance dans lequel il n’y a pas de juge d’instruction est compétent pour requérir l’ouverture d’une information devant le ou les juges d’instruction du tribunal de première instance compétents en application du deuxième alinéa ou des quatrième et avant-dernier alinéas de l’article 52-1, y compris en faisant déférer devant eux les personnes concernées.

« Dans les cas prévus au premier alinéa du présent II bis, le réquisitoire introductif peut également être pris par le procureur de la République près le tribunal de première instance au sein duquel se trouvent le ou les juges d’instruction et qui est à cette fin territorialement compétent sur l’ensemble du ressort de compétence de sa juridiction en matière d’information, y compris pour diriger et contrôler les enquêtes de police judiciaire.

« Le procureur de la République près ce tribunal de première instance est seul compétent pour suivre le déroulement des informations mentionnées aux deux premiers alinéas du présent II bis jusqu’à leur règlement.

« En cas de renvoi devant la juridiction de jugement, l’affaire est renvoyée, selon le cas, devant le tribunal de police, le tribunal correctionnel, le tribunal pour enfants ou la cour d’assises initialement compétents. » ;

b) Le début de la première phrase du III est ainsi rédigé : « Si le procureur de la République près le tribunal de première instance dans lequel il y a un ou plusieurs juges d’instruction ou dans lequel il y a un pôle de l’instruction constate qu’une personne est déférée devant lui en vue de l’ouverture d’une information en application du deuxième alinéa du II ou en application du deuxième alinéa du II bis et qu’il estime que ne doit être ouverte aucune information ou aucune information relevant de la compétence du pôle ne doit être ouverte… (le reste sans changement). » ;

4° Le premier alinéa de l’article 712-2 est ainsi rédigé :

« Un ou plusieurs magistrats du siège sont chargés des fonctions du juge de l’application des peines dans les tribunaux de première instance dont la liste est fixée par décret. Il existe au moins un juge d’application des peines par département. »

III à VI. – (Supprimés) – (Adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 44 est présenté par Mme Joissains, MM. Laugier et Canevet, Mmes Vermeillet et Billon, MM. Henno, Grosdidier et Guerriau, Mme N. Goulet, MM. Laménie, Decool et Le Nay, Mme Guidez, M. Moga, Mmes Goy-Chavent et Deseyne, MM. Dufaut, Delcros, B. Fournier, D. Laurent, Longuet et Kern et Mme A.M. Bertrand.

L’amendement n° 69 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 92 rectifié est présenté par Mme Noël, MM. Pellevat et Vial, Mme Deromedi, M. Cuypers, Mmes Garriaud-Maylam, Bories et Morhet-Richaud et M. Panunzi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Sophie Joissains, pour présenter l’amendement n° 44.

Mme Sophie Joissains. Cet amendement vise la suppression de l’article 53, qui, à mon sens, fragilise grandement la justice de proximité et l’égal accès au droit des justiciables. Ce texte instaure en effet un tribunal unique par département, ce qui va évidemment à l’encontre de la grande disparité de nos départements français.

La création de ces tribunaux ne permet pas d’assurer la proximité du justiciable avec les lieux de justice. En fait, elle l’aggrave en raison du risque de suppression de ces chambres détachées, beaucoup plus faciles à fermer qu’une juridiction à part entière.

La ruralité, confrontée à des problèmes de transport, de fermeture de commerces et d’accès aux écoles, est déjà aujourd’hui en grande difficulté. Le service public de la justice doit à tout prix continuer d’être accessible aux justiciables. Or, nonobstant l’engagement du Gouvernement – je ne remets pas sa sincérité en cause – à ne fermer aucun lieu de justice dans l’immédiat en tout cas, il n’en demeure pas moins qu’en leur ôtant leur statut protecteur, le texte permet de facto de faciliter la fermeture de ces lieux. Je suis évidemment opposée à cet article et à ce tribunal unique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 69.

Mme Céline Brulin. Nous proposons également la suppression de l’article 53. Dans sa version initiale, le Gouvernement entendait déjà mettre en place la fusion des tribunaux d’instance et des tribunaux de grande instance, au travers de la création de chambres détachées visant à remplacer les tribunaux d’instance vidés de leur substance ; la commission est allée encore plus loin en réintroduisant les tribunaux de première instance.

Aussi, alors que le Gouvernement n’excluait pas de conserver plusieurs TGI sur un même département, il s’agit ici de consacrer le principe du tribunal unique par département. Il me semble pourtant que, sur de nombreuses travées, nous nous sommes montrés très critiques envers une telle approche.

La seule logique pécuniaire et gestionnaire guide ces mesures, au détriment de la justice de proximité, alors même que la proximité est une aspiration très défendue en ce moment. Nous devons également défendre l’égal accès au droit pour tous les justiciables de notre pays.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 92 rectifié.

Mme Sylviane Noël. L’article 53 procède à la fusion du tribunal de grande instance et du tribunal d’instance, créant ainsi le tribunal de première instance.

Les élus locaux et les professionnels de la justice craignent que la mise en œuvre de cette disposition n’aboutisse à terme à la disparition de certaines juridictions. Pour un territoire rural et de montagne, cette situation pourrait porter gravement préjudice à l’accès des justiciables à la justice.

En effet, la délocalisation de certains contentieux et la nécessité pour le justiciable de parcourir parfois plus de cent kilomètres pourraient le décourager de se rendre à son audience. Dans les zones de montagne et les territoires ruraux, la proximité des services publics est un facteur important, car le problème des distances peut vite devenir rédhibitoire en raison des conditions imposées par le climat et le relief.

C’est pourquoi il convient de supprimer l’article 53 et de maintenir l’organisation judiciaire actuelle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer le rapprochement entre le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance. Je rappelle que, dès la première lecture de ce texte, la commission des lois a admis le principe de ce rapprochement, qui est notamment issu des propositions du rapport publié par son président en avril 2017.

Au-delà du principe, nous avons tenu à faire figurer à cet article un certain nombre de conditions qui manquaient dans le projet de loi initial.

D’abord, je tiens à faire remarquer à mes collègues auteurs de l’amendement n° 69 que le texte ne contient aucune disposition dont l’effet serait de ne laisser subsister qu’un seul tribunal de grande instance par département. Le principe affiché n’est pas la suppression du tribunal de grande instance.

Nous avons par ailleurs souhaité faire figurer dans la loi des garanties relatives au maillage territorial ; nous voulons être certains que, à terme, il n’y aurait pas de suppression de juridictions. C’est pourquoi nous avons pris plusieurs décisions.

Premièrement, nous avons supprimé la spécialisation d’une chambre au sein d’un tribunal de grande instance. Nous sommes en effet convaincus qu’une telle chambre, sinon dans l’immédiat, du moins dans le futur, pourrait dévitaliser un autre TGI et peut-être, à terme, mener à sa suppression.

Deuxièmement, garantie importante, nous avons décidé la mise en place d’un juge chargé des contentieux de proximité, non statutaire, sur le modèle du juge des tutelles et du juge aux affaires familiales. Il serait chargé d’une partie des contentieux traités dans les chambres détachées.

Troisièmement, nous avons institué une garantie de localisation des emplois pour les fonctionnaires du greffe, soit au siège du tribunal de première instance, soit dans une chambre détachée, et nous avons mis en place un mécanisme d’encadrement de toute modification de la carte judiciaire. Ce mécanisme associe les chefs de cour et les conseils départementaux.

Nous avons également prévu que soit défini, à l’échelon national, par décret en Conseil d’État, un socle minimal de compétences pour les chambres détachées, afin d’éviter tout risque de dévitalisation de ces sites. Ce socle minimal devra comprendre l’actuel contentieux du tribunal d’instance et le contentieux des affaires familiales, ou du moins les affaires consécutives à un divorce.

Les chambres détachées auront donc de vraies compétences, ainsi que les magistrats chargés de les exercer et des greffiers permanents. En outre, les élus seront associés à toute réflexion relative à la carte judiciaire. Voilà les règles que le Sénat et sa commission des lois ont fixées dès la première lecture de ce projet de loi et auxquelles nous voulons nous en tenir.

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les trois amendements de suppression de l’article 53.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Madame la sénatrice Brulin, concernant l’évolution que nous proposons, vous avez évoqué une logique pécuniaire et gestionnaire, qui s’opposerait à la logique de proximité. Je m’inscris totalement en faux par rapport à cette perception des choses.

Comme M. le rapporteur l’a bien précisé, nous ne réduisons en aucune manière ni les implantations des juridictions ni même les compétences qu’elles exercent. Fort au contraire, nous garantissons le maintien de tous les tribunaux d’instance actuels, même s’ils s’appelleront désormais tribunaux de proximité, et nous leur offrons la possibilité d’accroître leurs compétences, lorsque cela apparaîtra nécessaire.

Si nous n’avons pas repris la rédaction exacte que propose la commission des lois, les principes que je viens d’énoncer reçoivent de nombreuses garanties dans notre texte. Je pense notamment à la création d’un juge des contentieux de la protection, qui sera présent dans tous les tribunaux de première instance.

Nous garantissons le lieu, nous garantissons le juge, mais nous garantissons évidemment aussi le personnel. Cette garantie figurera, non pas dans la loi, mais dans les dispositions réglementaires qui accompagneront le présent texte : elles préciseront que les membres du personnel de justice seront affectés dans les lieux précis où ils exerceront leurs activités. Nous considérons en effet que nous ne pouvons pas déplacer ces personnes comme s’il s’agissait de simples pions ; ce n’est pas pensable !

Nous offrons donc toutes ces garanties de maintien de vitalité sur le territoire. Il n’y aura dans les dispositions que nous proposons que des éléments qui permettront de renforcer le rôle des juridictions.

Quant à la spécialisation de certaines chambres dans des contentieux spécifiques, qui a été supprimée par votre commission des lois, je tiens à réaffirmer qu’il ne s’agit pas de créer des chambres spécialisées. Il n’est question que de contentieux très techniques et très peu nombreux en volume, et en aucun cas des contentieux de masse. Lorsque, par exemple, trois tribunaux de grande instance existent dans un même département, un type de contentieux technique sera géré par l’un d’entre eux, un autre par un deuxième, un autre encore par le dernier. Nous aurons ainsi une forme de compétence spécialisée pour des contentieux qui représentent moins de 10 % du volume des affaires jugées par chacun des tribunaux.

Cela correspond à une réalité. Je me trouvais, il y a quelques jours, dans un modeste tribunal de grande instance, dont j’ai rencontré le personnel et les avocats. Ils me disaient eux-mêmes avoir très rarement à traiter du contentieux de la fiscalité indirecte. Ce contentieux pourrait donc être déplacé vers un autre tribunal. En revanche, me demandaient-ils, ne nous enlevez pas tel ou tel contentieux rural, car nous le rencontrons souvent ! Dont acte : la ville voisine n’a peut-être jamais à connaître de telles affaires. Il peut y avoir des équilibres sur des contentieux très techniques, très spécialisés. Cela représentera un progrès tant pour les magistrats que pour les justiciables.

Enfin, madame Noël, c’est avec grand plaisir que je me rendrai au tribunal d’instance de Bonneville pour rassurer son personnel et les magistrats qui y travaillent et continueront d’y travailler !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Sur ce point, la mission conduite par M. le président de la commission des lois était effectivement allée plus loin. Je comprends l’observation faite par les auteurs de ces amendements, puisque le rapport présenté ici en octobre 2017 en conclusion de cette mission concluait plutôt au maintien d’un seul tribunal de première instance par département, sauf exception. On a objectivement fait marche arrière sur ce point.

Le sujet est compliqué. Nous avons tous vu, sur nos territoires, quel que soit notre groupe politique, les réactions suscitées par cette évolution quand nous y étions favorables. Ces réactions peuvent apparaître contradictoires : j’ai interpelé des magistrats, en leur faisant remarquer que, dès lors qu’un tribunal d’instance, éloigné du tribunal de grande instance, sera une chambre détachée, ou chambre de proximité, rattachée à ce TGI, rien n’interdira dans l’organisation que vous pourrez mettre en place qu’un juge aux affaires familiales tienne des audiences dans ce lieu, ou qu’un juge des enfants devant prononcer des mesures d’assistance éducative pour des familles vivant sur ce territoire s’y rende. Les magistrats, me semble-t-il, n’y sont pas tout à fait prêts.

Nous aurions tout intérêt, de même que les élus locaux, sur place, dans les conseils de juridiction auxquels nous sommes invités, à travailler sur cette question d’organisation, afin que la proximité territoriale soit garantie. Cela permettrait d’assurer la continuité avec le travail que nous avons accompli ici et de répondre au mieux aux intérêts du justiciable.

Personnellement, dans la logique de mes déclarations depuis cette mission, je ne voterai évidemment pas ces amendements de suppression : il faut selon moi faire avancer cette réforme.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44, 69 et 92 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Madame la ministre, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger nos travaux afin de terminer ce soir l’examen de ce texte, puisqu’il ne reste qu’une dizaine d’amendements à examiner. Cela requiert simplement que chacun d’entre vous fasse preuve de concision.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

L’amendement n° 95 rectifié, présenté par Mme Noël, MM. Pellevat et Panunzi, Mme Deromedi, MM. Vial et Cuypers, Mme Garriaud-Maylam, M. Laménie et Mmes Bories et Morhet-Richaud, est ainsi libellé :

Alinéas 9 à 12

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Les alinéas 9 à 12 de l’article 53, introduits en première lecture par voie d’amendement, prévoient la fusion des greffes du tribunal judiciaire et des conseils de prud’hommes lorsqu’ils sont tous deux situés dans une même commune.

Ils auraient pour conséquence d’éliminer purement et simplement le poste de greffier attaché au conseil de prud’hommes. Or les représentants des salariés et des employeurs sont particulièrement attachés aux juridictions prud’homales.

Aussi, il convient de supprimer cette disposition récemment introduite dans le projet de loi ; tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement est satisfait, puisque la commission des lois a déjà supprimé les ajouts apportés par l’Assemblée nationale sur ce point. Je vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir le retirer, faute de quoi la commission sera obligée d’émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il est également défavorable, mais pour d’autres motifs…

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Inavouables ! (Sourires.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Au contraire, monsieur le rapporteur !

Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 95 rectifié est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 95 rectifié est retiré.

Les amendements nos 77 et 78 ne sont pas soutenus.

L’amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Antiste, Mme Conconne, MM. P. Joly et Lalande et Mme Artigalas, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le présent article n’est pas applicable dans les départements et collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution.

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Cet amendement vise à exclure les départements et collectivités d’outre-mer du champ d’application de l’article 53, lequel organise la fusion des tribunaux d’instance et des tribunaux de grande instance.

En effet, alors que l’exposé des motifs de ce projet de loi prétend rapprocher la justice des justiciables, cet article conduira au contraire à les en éloigner.

En outre-mer, la réduction croissante du service public de la justice contribuera, plus encore qu’ailleurs, à accroître le clivage culturel entre les institutions judiciaires et la population, au prix d’une incapacité toujours plus grande à assurer une régulation équitable et efficace des rapports sociaux. Le service public de la justice étant dans ces régions déjà suffisamment fragilisé, il semble nécessaire d’éviter de le fragiliser davantage par une réforme qui apparaît mal calibrée et dont l’objectif reste d’économiser des moyens humains supplémentaires pourtant indispensables.

C’est pourquoi nous proposons de compléter cet article par un paragraphe précisant qu’il n’est pas applicable dans les départements et collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission soupçonne un problème de constitutionnalité dans le dispositif de cet amendement, sur lequel elle émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il est également défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 53.

(Larticle 53 est adopté.)

Article 53
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Article 53 bis AB

Article 53 bis AA

(Supprimé)

Article 53 bis AA
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Article 53 bis AC

Article 53 bis AB

(Non modifié)

La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est complétée par un article L. 212-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 212-6-1. – Quand un département compte plusieurs tribunaux de grande instance, le procureur général peut désigner l’un des procureurs de la République de ce département pour représenter, sous son autorité, l’ensemble des parquets dans le cadre de leurs relations avec les autorités administratives du département et assurer la coordination des activités s’y rapportant. Celui-ci tient les autres procureurs informés de ses diligences et rend compte au procureur général. » – (Adopté.)

Article 53 bis AB
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Article 53 bis AD

Article 53 bis AC

(Non modifié)

Après le deuxième alinéa de l’article 20 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ces assistants peuvent également être nommés auprès du tribunal de première instance et de la cour d’appel de Papeete, dans les mêmes conditions qu’aux deux premiers alinéas du présent article. » – (Adopté.)

Article 53 bis AC
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Articles 53 bis AE et 53 bis AF

Article 53 bis AD

(Non modifié)

L’article 82 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 précitée est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application de l’article 20 de la présente loi dans les collectivités mentionnées au I du présent article. » – (Adopté.)

Article 53 bis AD
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Article 53 bis A

Articles 53 bis AE et 53 bis AF

(Supprimés)

Articles 53 bis AE et 53 bis AF
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Articles 53 bis B et 53 bis C

Article 53 bis A

(Non modifié)

I. – Au deuxième alinéa de l’article L. 148-1 du code de l’action sociale et des familles, les mots : « de magistrats » sont remplacés par les mots : « d’un magistrat ».

II. – À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 723-3 du code de commerce, après le mot : « un magistrat », il est inséré le mot : « honoraire ».

III. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase du premier alinéa du I de l’article L. 1114-1, les mots : « membre du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « membre de la juridiction administrative » ;

2° Le 2° des articles L. 3223-2 et L. 3241-2 et le 9° du II de l’article L. 3844-2 sont abrogés.

IV. – Le chapitre Ier du titre V du livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 251-4 est ainsi modifié :

a) Les mots : « un magistrat du siège ou » sont supprimés ;

b) Après le mot : « honoraire », sont insérés les mots : « ou, à défaut, une personnalité qualifiée, nommée par le premier président de la cour d’appel, » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La personnalité qualifiée est choisie en raison de sa compétence dans le domaine de la vidéoprotection ou des libertés individuelles. » ;

2° À la fin du 5° de l’article L. 251-6, les mots : « , dont au moins un magistrat du siège et un magistrat du parquet désignés par le premier président de la Cour de cassation » sont supprimés.

V. – À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 3452-3 du code des transports, les mots : « et présidée par un magistrat de l’ordre administratif » sont supprimés.

VI. – Au quatorzième alinéa de l’article 3 de la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, les mots : « ou ancien magistrat » sont remplacés par le mot : « honoraire ».

VII. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa du 1 de l’article 1651 H, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa du I de l’article 1653 F, les mots : « conseiller d’État » sont remplacés par les mots : « membre de la juridiction administrative » ;

3° L’article 1741 A est ainsi modifié :

a) Au 1°, les mots : « conseillers d’État » sont remplacés par les mots : « membres du Conseil d’État » ;

b) Au 2°, les mots : « conseillers maîtres à la Cour des comptes, en activité ou honoraires, » sont remplacés par les mots : « magistrats de la Cour des comptes ».

VIII. – À la fin de la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 111-4 du code du patrimoine, les mots : « du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « de la juridiction administrative ».

IX. – Au 1° de l’article L. 332-18 du code du sport, les mots : « membres du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « membres de la juridiction administrative ».

X. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 561-39 est ainsi modifié:

a) Le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

b) Les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

c) Les mots : « conseiller-maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de » ;

2° L’article L. 612-5 est ainsi modifié :

a) Au 3°, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

b) Au 4°, les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

c) Au 5°, les mots : « conseiller maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de » ;

3° L’article L. 612-9 est ainsi modifié :

a) Au 1°, le mot : « conseillers » est remplacé par les mots : « membres du Conseil » et les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

b) Au septième alinéa, le mot : « conseillers » est remplacé par les mots : « membres du Conseil » ;

4° L’article L. 621-2 est ainsi modifié :

a) Au 2° du II, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

b) Aux 3° du même II, les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

c) Au 4° dudit II, les mots : « conseiller maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de » ;

d) Au 1° du IV, le mot : « conseillers » est remplacé par les mots : « membres du Conseil » ;

e) Au 2° du même IV, les mots : « conseillers à » sont remplacés par les mots : « membres de ».

XI. – La section 1 du chapitre VII du titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifiée :

1° L’article L. 327-3 est ainsi modifié :

a) Au 1°, les mots : « conseiller maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de » ;

b) Au 2°, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

c) Au 3°, les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

2° L’article L. 327-4 est ainsi modifié :

a) Au 1°, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

b) Au 2°, les mots : « conseiller maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de » ;

c) Au 3°, les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de ».

XII. – Le II de l’article L. 228-2 du code de l’aviation civile est ainsi modifié :

1° Au quatrième alinéa, les mots : « ou ancien membre du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « de la juridiction administrative » ;

2° Au cinquième alinéa, les mots : « membre ou ancien membre de la Cour des comptes » sont remplacés par les mots : « magistrat de la Cour des comptes ou magistrat ou ancien magistrat des chambres régionales des comptes ».

XIII. – Au premier alinéa du II de l’article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « de la juridiction administrative » et les mots : « membre de la Cour des comptes » sont remplacés par les mots : « magistrat de la Cour des comptes ou magistrat ou ancien magistrat des chambres régionales des comptes ».

XIV. – Au 1° de l’article 18-1 de la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil ».

XV. – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 6 bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l’obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, les mots : « conseiller d’État » sont remplacés par les mots : « membre de la juridiction administrative ».

XVI. – La loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédures aux contribuables en matière fiscale et douanière est ainsi modifiée :

1° Au deuxième alinéa de l’article 1er, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil », les mots : « conseillers d’État » sont remplacés par les mots : « membres du Conseil d’État », les mots : « conseillers maîtres à » sont remplacés par les mots : « magistrats de » et le mot : « fonctionnaires » est remplacé par le mot : « membres » ;

2° Au deuxième alinéa de l’article 20, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil », les mots : « conseillers d’État » sont remplacés par les mots : « membres du Conseil d’État », les mots : « conseillers à » sont remplacés par les mots : « membres de », les mots : « conseillers maîtres à » sont remplacés par les mots : « magistrats de » et le mot : « fonctionnaires » est remplacé par le mot : « membres ».

XVII. – Au deuxième alinéa de l’article 72 de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes, les mots : « , d’un membre du Conseil d’État » sont supprimés.

XVIII. – Le II de l’article 2 de l’ordonnance n° 2009-79 du 22 janvier 2009 créant l’Autorité des normes comptables est ainsi modifié :

1° Au b, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil » ;

2° Au c, les mots : « conseiller à » sont remplacés par les mots : « membre de » ;

3° Au d, les mots : « conseiller maître à » sont remplacés par les mots : « magistrat de ».

XIX. – Au 1° du II de l’article 4 de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, le mot : « conseiller » est remplacé par les mots : « membre du Conseil ».

XX. – L’article 2 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique est ainsi modifié :

1° Au 1°, le mot : « conseillers » est remplacé par les mots : « membres du Conseil » ;

2° Au 2°, les mots : « conseillers à » sont remplacés par les mots : « membres de » ;

3° Au 3°, les mots : « conseillers maîtres à » sont remplacés par les mots : « magistrats de ».

XXI. – Le chapitre II de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa de l’article 13 est supprimé ;

2° Le troisième alinéa de l’article 14 est supprimé ;

3° L’article 16 est abrogé ;

4° Le cinquième alinéa de l’article 17 est supprimé ;

5° Le dernier alinéa du II de l’article 19 est supprimé ;

6° Le deuxième alinéa de l’article 20 est supprimé. – (Adopté.)

Chapitre Ier bis

Article 53 bis A
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Article 53 bis

Articles 53 bis B et 53 bis C

(Supprimés)

Chapitre Ier ter

Gestion électronique des registres des associations et des associations coopératives de droit local en Alsace-Moselle

Articles 53 bis B et 53 bis C
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Article 54 (supprimé)

Article 53 bis

(Non modifié)

I. – (Non modifié)

II. – L’article 2 de la loi n° 2002-306 du 4 mars 2002 portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière est ainsi modifié :

1° Le 1° est complété par les mots : « , du registre des associations et du registre des associations coopératives de droit local tenus par les tribunaux d’instance des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et peut assurer ou faire assurer l’informatisation de ces registres et de leurs annexes conservés sur support papier » ;

2° Les 2° et 3° sont complétés par les mots : « , des registres des associations et des registres des associations coopératives de droit local, ainsi que de leurs annexes » ;

3° Le 4° est complété par les mots : « pour ces registres informatisés » ;

4° Après le mot : « copies », la fin du 5° est ainsi rédigée : « des registres du livre foncier, des registres des associations et des registres des associations coopératives de droit local, ainsi que de leurs annexes. » – (Adopté.)

Chapitre II

(Division et intitulé supprimés)

Article 53 bis
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Article 55

Article 54

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 26 n’est pas soutenu et l’article 54 demeure supprimé.

Chapitre III

Dispositions diverses

Article 54 (supprimé)
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Article 56

Article 55

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :

1° Tirer les conséquences, dans les textes et codes en vigueur, de la suppression du tribunal d’instance et de la création du tribunal de première instance en résultant prévues à l’article 53 de la présente loi et abroger les dispositions devenues sans objet ;

2° Aménager et mettre en cohérence, par coordination, les dispositions des textes et codes en vigueur relatives à la compétence du tribunal de première instance et celles relatives à l’institution, la compétence, l’organisation, le fonctionnement et les règles de procédure de toute juridiction lorsque celles-ci sont définies par référence au tribunal d’instance ;

3° Tirer les conséquences de la suppression du tribunal d’instance dans les textes et codes en vigueur régissant les juridictions de Saint-Pierre-et-Miquelon, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna.

II. – L’ordonnance prévue au I est prise dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi.

III. – (Non modifié)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 70 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 94 rectifié est présenté par Mme Noël, M. Pellevat, Mme Deromedi, MM. Vial et Cuypers, Mme Garriaud-Maylam, M. Laménie, Mmes Bories et Morhet-Richaud et M. Panunzi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 70.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet article aura de lourdes conséquences sur l’organisation judiciaire de notre pays. Il habilite le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnances les mesures conséquentes à la suppression des tribunaux d’instance et à l’extension des compétences des tribunaux de grande instance.

Cette véritable refonte de la carte judiciaire qui ne dit pas son nom devrait faire l’objet d’un large débat public et d’un projet de loi distinct de cette réforme éparse. Nous proposons donc, comme au sujet de l’article 53 que nous venons d’examiner, de supprimer cet article : défendre les territoires et leur population exige que l’on garantisse de véritables services publics de proximité, qu’il s’agisse de la justice, de l’éducation, de la poste ou de la santé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 94 rectifié.

Mme Sylviane Noël. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’article 55 a été modifié à la suite de la réécriture complète de l’article 53 par la commission, qui a cherché à revenir à sa conception originelle du regroupement des tribunaux d’instance et de grande instance. Nous avons impérativement besoin des dispositions de l’article 55 pour pouvoir aller au bout, dans le domaine réglementaire, de la mise en œuvre de ce que nous avons voté.

La commission souhaite donc le retrait de ces amendements, faute de quoi son avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Les auteurs de ces amendements ont sans doute une mauvaise compréhension du sens de l’article qu’ils désirent supprimer. Il ne s’agit en rien de refaire la carte judiciaire par voie d’ordonnances ; il s’agit simplement de tirer les conséquences légistiques des dispositions qui auront été adoptées auparavant.

Dans les différents codes, on relève de nombreuses occurrences des terminologies amenées à être modifiées : tribunal d’instance, tribunal de grande instance. Si ces appellations sont remplacées, comme je le propose, par « tribunal de proximité » ou « tribunal judiciaire », il faudra opérer toutes ces modifications légistiques.

C’est uniquement à cette fin de coordination légistique que nous vous demandons la présente habilitation, de manière à vous éviter ce travail fastidieux sur de nombreux textes.

L’avis du Gouvernement sur ces amendements est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 70 et 94 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 55.

(Larticle 55 est adopté.)

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TITRE VII

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ENTRÉE EN VIGUEUR ET À L’APPLICATION OUTRE-MER

Article 55
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Article 57

Article 56

I A. – (Supprimé)

I. – L’article 4 s’applique aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, à l’exception des II bis et II ter qui s’appliquent aux instances introduites à compter du lendemain de la publication de la présente loi.

bis A et I bis B. – (Supprimés)

bis. – Les 1° A et 4° de l’article 9 bis entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er janvier 2020.

ter. – Le I de l’article 9 ter entre en vigueur le 1er janvier2021.

II. – (Supprimé)

II bis. – L’article L. 212-5-2 du code de l’organisation judiciaire, dans sa rédaction résultant de l’article 13 de la présente loi, entre en vigueur à une date définie par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er janvier 2022.

III. – L’article 14 entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er janvier 2021.

IV. – (Non modifié)

IV bis. – Les articles 19 bis et 19 quater entrent en vigueur le 1er janvier 2020.

IV ter. – L’article 19 ter entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2022.

IV quater. – Les I AB et III bis de l’article 26 entrent en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard un an après la publication de la présente loi.

V. – L’article 802-2 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant du V de l’article 32 de la présente loi, s’applique aux perquisitions et aux visites domiciliaires intervenues à compter du lendemain de la publication de la présente loi.

VI. – Les articles 27, 28 et 29, les III et IV de l’article 31, le II de l’article 34, les III à VI de l’article 35, les I, II et IV bis à IV quater de l’article 36, l’article 41 et le I de l’article 42, à l’exception de son 5°, entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi.

VI bis AA. – Le 5° du I de l’article 42 entre en vigueur le 1er mars 2019. Jusqu’à l’entrée en vigueur de l’article 46 de la présente loi, au deuxième alinéa de l’article 365-1 du code de procédure pénale dans sa rédaction résultant du 5° du I de l’article 42, les mots : « peine de probation » sont remplacés par les mots : « sursis avec mise à l’épreuve ».

VI bis A. – Les articles 380-3-1 et 509-1 du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant, respectivement, des articles 42 et 41 de la présente loi, sont applicables aux procédures dans lesquelles l’appel a été formé postérieurement à l’entrée en vigueur de ces dispositions.

VI bis. – Les 3° à 6° bis du III de l’article 37 et les 7° et 8° du I de l’article 38 entrent en vigueur le 1er juillet 2021.

VI ter. – L’article 40 et le 2° du III de l’article 57 entrent en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.

VI quater. – L’article 42 bis C entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2020.

Les dispositions du sous-titre II du titre Ier du livre IV du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant de la présente loi, sont applicables aux faits pouvant être qualifiés de crime contre l’humanité et de crimes ou délits de guerre commis avant l’entrée en vigueur de ces dispositions et qui peuvent être réprimés sous une autre qualification pénale en vigueur au moment où ils ont été commis.

VII. – L’article 43, à l’exception des IV, VII, VII ter, VIII bis et X, les I à III de l’article 44, les articles 45, 46, 47 et 48 ainsi que les VIII, IX et XII de l’article 50 entrent en vigueur un an après la publication de la présente loi. Les peines de contrainte pénale prononcées avant cette date s’exécutent jusqu’à leur terme conformément aux dispositions applicables au jour de leur prononcé, sous la réserve que les attributions confiées en application de l’article 713-47 du code de procédure pénale au président du tribunal judiciaire ou au juge désigné par lui sont exercées par le juge de l’application des peines.

VII bis A, VII bis et VIII. – (Supprimés)

IX. – Les articles 53 et 53 bis AB entrent en vigueur le 1er janvier 2020.

X. – (Non modifié) A. – Les I à IV et VI à XX de l’article 53 bis A entrent en vigueur à compter du prochain renouvellement de chaque commission.

B. – Le V de l’article 53 bis A entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er janvier 2020.

Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier et Rossignol, MM. Jacques Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Rétablir le I A dans la rédaction suivante :

I A. – Le I de l’article 2 entre en vigueur le 1er janvier 2022.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Cet amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 74, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer la référence :

le II de l’article 34,

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 74.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 56, modifié.

(Larticle 56 est adopté.)

Article 56
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 57

I. – (Supprimé)

bis. – (Non modifié)

ter. – (Non modifié) A. – L’article 511 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, reste applicable dans les îles Wallis et Futuna et en Polynésie française jusqu’à l’entrée en vigueur du deuxième alinéa de l’article 512 du code civil, dans sa rédaction résultant de l’article 17 de la présente loi, et dans les conditions prévues à la seconde phrase du IV de l’article 56.

B. – Les articles 373-2, 373-2-6, 373-2-9-1, 373-2-10 et 1397 du code civil sont applicables en Polynésie française, dans leur rédaction résultant de la présente loi.

C. – L’article 1397 du code civil est applicable dans les Terres australes et antarctiques françaises, dans sa rédaction résultant de la présente loi.

II. – (Non modifié) L’article 711-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 711-1. – Sous réserve des adaptations prévues au présent titre, les livres Ier à V du présent code sont applicables, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »

III. – Le titre Ier du livre VI du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 804 est ainsi rédigé :

« Le présent code est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, sous réserve des adaptations prévues au présent titre et aux seules exceptions : » ;

2° L’article 837 est ainsi rédigé :

« Art. 837. – Pour l’application de l’article 398-1 en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna :

« 1° Le 2° est ainsi rédigé :

« “2° Les délits prévus par les dispositions applicables localement en matière de circulation routière ;”

« 2° Le 4° est ainsi rédigé :

« “4° Les délits prévus par les dispositions applicables localement en matière de réglementations relatives aux transports terrestres ainsi qu’à la sécurité des navires et de la navigation, à la prévention de la pollution marine et à la sûreté des navires ;”

« 3° Le 6° est ainsi rédigé :

« “6° Les délits prévus par les dispositions applicables localement en matière de chasse, de pêche en eau douce, de pêche maritime, de protection de la faune et de la flore ;”

« 4° Le 7° est ainsi rédigé :

« “7° Les délits prévus par les dispositions applicables localement en matière de protection des bois et forêts ;”

« 5° Le 8° est ainsi rédigé :

« “8° Les délits prévus par la réglementation applicable localement en matière de travaux ou aménagement immobiliers et en matière d’installations classées ;”

« 6° Le 9° est ainsi rédigé :

« “9° Les délits prévus par la réglementation applicable localement en matière de garde et de circulation des animaux ;”

« 7° Le 12° est ainsi rédigé :

« “12° Les délits prévus par la réglementation applicable localement en matière d’habitat insalubre.” »

IV. – Le titre IV du livre II du code de la route est ainsi modifié :

1° Le treizième alinéa de l’article L. 243-1 et le douzième alinéa des articles L. 244-1 et L. 245-1 sont complétés par une phrase ainsi rédigée : « À cette fin, l’officier ou l’agent de police judiciaire peut requérir un médecin, un interne en médecine, un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine à titre de remplaçant ou un infirmier pour effectuer une prise de sang. » ;

2° Aux treizième, quatorzième et dernier alinéas de l’article L. 243-1 et aux douzième, treizième et dernier alinéas des articles L. 244-1 et L. 245-1, les mots : « et examens médicaux, cliniques et » sont remplacés par les mots : « ou examens médicaux, cliniques ou » ;

3° Le vingt-deuxième alinéa de l’article L. 243-1 et le vingt et unième alinéa des articles L. 244-1 et L. 245-1 sont ainsi rédigés :

« Art. L. 234-9. – Les officiers ou les agents de police judiciaire soit sur instruction du procureur de la République, soit à leur initiative et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire adjoints peuvent, même en l’absence d’infraction préalable ou d’accident, soumettre toute personne qui conduit un véhicule à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré. » ;

4° Les articles L. 243-2, L. 244-2 et L. 245-2 sont ainsi modifiés :

a) Le début du second alinéa est ainsi rédigé : « Le I de l’article L. 235-1 est applicable dans sa rédaction… (le reste sans changement). » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 235-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. »

V. – Le livre VIII de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° A Le premier alinéa de l’article L. 3823-2 est complété par les mots : « , dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

1° L’article L. 3826-3 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 3353-3 est applicable dans les îles Wallis et Futuna, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. » ;

b) Le début du second alinéa est ainsi rédigé : « L’article L. 3353-4 est applicable dans les îles Wallis et Futuna, dans sa rédaction… (le reste sans changement). » ;

2° L’article L. 3833-1 est complété par les mots : « dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

3° Le premier alinéa de l’article L. 3842-1 est complété par les mots : « dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice ».

bis. – Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa des articles L. 285-1, L. 286-1, L. 287-1 et L. 288-1, la référence : « loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » est remplacée par la référence : « loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

2° Au premier alinéa des articles L. 895-1 et L. 896-1, la référence : « loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense » est remplacée par la référence « loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice ».

VI. – L’article 69 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :

« Art. 69. – La présente loi est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises. »

VII. – Le premier alinéa de l’article 44 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi rédigé :

« Sous réserve des adaptations prévues aux articles 45 et 46, les dispositions de la présente ordonnance, à l’exception du deuxième alinéa de l’article 16 bis, des articles 25, 26 et 39 à 41, sont applicables, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »

VIII. – (Supprimé)

IX. – Le livre V du code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° L’article L. 531-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 531-1. – Sont applicables à Wallis-et-Futuna le livre Ier ainsi que les articles L. 211-17, L. 211-18, L. 212-5-1 et L. 212-5-2 du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. » ;

2° Au début du titre IV du livre V, il est ajouté un article L. 541-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 541-1. – Sont applicables aux Terres australes et antarctiques françaises les articles L. 211-17, L. 211-18, L. 212-5-1 et L. 212-5-2 du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. » ;

3° L’article L. 551-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 551-1. – Sont applicables en Polynésie française le livre Ier, les articles L. 211-17 et L. 211-18 ainsi que le 3° de l’article L. 261-1 du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. » ;

4° L’article L. 561-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 561-1. – Sont applicables en Nouvelle-Calédonie le livre Ier, les articles L. 211-17, L. 211-18 et L. 532-17 ainsi que le 3° de l’article L. 261-1 du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. »

X. – L’article L. 641-1 du code des procédures civiles d’exécution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 111-5, L. 121-4, L. 125-1, L. 211-1-1, L. 433-2 et L. 523-1-1 sont applicables, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. »

XI. – Le II de l’article 112 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle est ainsi modifié :

1° (Supprimé)

2° Il est ajouté un D ainsi rédigé :

« D. – Les articles 4-1 à 4-7 sont applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises. »

XII. – Le premier alinéa du I de l’article 99 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi rédigé :

« I. – Sous réserve des adaptations prévues au présent article, la présente loi est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna : ».

XIII. – Le livre VII du code du patrimoine est ainsi modifié :

1° L’article L. 740-2 est complété par les mots : « , dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 750-1 est complété par les mots : « , dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

3° L’article L. 760-3 est complété par les mots : « , dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice » ;

4° Après la référence : « L. 214-10 », la fin de l’article L. 770-1 est ainsi rédigée : « L. 221-1 à L. 222-1, L. 510-1, L. 532-1 à L. 532-14 et L. 544-5 à L. 544-11 sont applicables au territoire des Terres australes et antarctiques françaises, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice. »

XIV et XV. – (Supprimés)

XVI. – (Non modifié) L’article 50 ter de la présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

XVII. – (Non modifié) La loi du 20 juin 1920 ayant pour objet de suppléer par des actes de notoriété à l’impossibilité de se procurer des expéditions des actes de l’état civil dont les originaux ont été détruits ou sont disparus par suite de faits de guerre, le premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 68-671 du 25 juillet 1968 relative à l’état civil des Français ayant vécu en Algérie ou dans les anciens territoires français d’outre-mer ou sous tutelle devenus indépendants ainsi que les articles 1er et 2 de l’ordonnance n° 62-800 du 16 juillet 1962 facilitant la preuve des actes de l’état civil dressés en Algérie restent applicables dans les îles Wallis et Futuna dans leur rédaction antérieure à la présente loi.

Mme la présidente. L’amendement n° 75, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 54

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Aux articles L. 532-2 et L. 552-2, la référence : « et L. 211-12 » est remplacée par les références : « , L. 211-12 et L. 217-6 » ;

II. – Après l’alinéa 60

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À l’article L. 562-2, la référence : « L. 211-12 » est remplacée par les références : « L. 211-12, L. 217-6 » ;

2° Après l’alinéa 75

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les III et IV de l’article 42 bis AA de la présente loi sont applicables aux îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à permettre l’application outre-mer des dispositions relatives au JIVAT, le juge de l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Dans le cadre général de ce projet de loi, nous nous sommes montrés favorables au JIVAT. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Le JIVAT est un juge placé auprès du tribunal de grande instance de Paris ; il a compétence exclusive sur tous les territoires métropolitains pour statuer sur les droits des victimes d’attentats terroristes.

Il me semble qu’imposer sa juridiction aux ressortissants des territoires d’outre-mer cités dans le présent amendement n’est pas justifié : pourquoi dire à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, et à Wallis-et-Futuna qu’ils devront s’adresser à ce juge situé à Paris ? Je voterai donc contre cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je rappelle à M. Bigot que le JIVAT pourra à l’évidence tenir des audiences délocalisées ; nous l’avons précisé à plusieurs reprises.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 75.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 57, modifié.

(Larticle 57 est adopté.)

Mme la présidente. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

Article 57
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, je m’exprime au nom du groupe socialiste et républicain.

Comme je l’ai rappelé à plusieurs reprises, le texte du Sénat est meilleur que celui qui est issu des travaux de l’Assemblée nationale. Toutefois, sur une série de dispositions relatives à la procédure pénale, nous sommes en désaccord avec la majorité sénatoriale.

Dès lors, dans l’équilibre logique des choses, nous ne pouvons pas soutenir entièrement le texte issu des travaux du Sénat ; c’est pourquoi nous nous abstiendrons, comme nous l’avons fait en première lecture.

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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(Le projet de loi est adopté.)

projet de loi organique relatif au renforcement de l’organisation des juridictions

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT DE LA MAGISTRATURE

 
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Article 1er B

Article 1er A

I. – L’article 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice des articles 3-1, 28, 28-2, 28-3, 37, 38-1, 38-2, 40-2, 41-5, 41-12 et 41-27, nul magistrat ne peut être affecté moins de trois années et plus de dix années dans la même juridiction. Il peut être dérogé à ces règles sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. »

II. – L’article 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019.

La procédure prévue à l’article 2-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée s’applique à ces magistrats.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er A.

(Larticle 1er A est adopté.)

Article 1er A
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Article 1er

Article 1er B

I. – Après l’article 2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article 2-1 ainsi rédigé :

« Art. 2-1. – Neuf mois au plus tard avant la fin de la dixième année d’exercice de leurs fonctions, les magistrats soumis aux obligations résultant du dernier alinéa de l’article 2 font connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, l’affectation qu’ils désireraient recevoir, à niveau hiérarchique égal, dans trois juridictions au moins appartenant à des ressorts de cour d’appel différents. Les demandes d’affectation de ces magistrats ne peuvent porter exclusivement sur des emplois de chef de juridiction, ni sur des emplois du premier grade de la hiérarchie judiciaire comportant un huitième échelon.

« Six mois au plus tard avant la fin de la dixième année d’exercice des fonctions de ces mêmes magistrats, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut inviter ceux-ci à présenter trois demandes supplémentaires d’affectation dans trois autres juridictions appartenant à des ressorts de cour d’appel différents.

« À l’expiration de la dixième année d’exercice de leurs fonctions, ces magistrats sont nommés dans l’une des fonctions qui ont fait l’objet de leurs demandes dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas du présent article.

« Si ces mêmes magistrats n’ont pas exprimé de demande d’affectation dans les conditions prévues au premier alinéa et, le cas échéant, au deuxième alinéa, le garde des sceaux, ministre de la justice, leur propose une affectation, à égalité de niveau hiérarchique, à des fonctions du siège pour les magistrats du siège et du parquet pour les magistrats du parquet, dans trois juridictions. À défaut d’acceptation dans le délai d’un mois, ils sont, à l’expiration de la dixième année d’exercice de leurs fonctions, nommés dans l’une de ces juridictions aux fonctions qui leur ont été offertes.

« Les nominations prévues au présent article sont prononcées, le cas échéant, en surnombre de l’effectif budgétaire du grade auquel appartiennent les magistrats soumis aux obligations résultant du dernier alinéa de l’article 2 et, s’il y a lieu, en surnombre de l’effectif organique de la juridiction.

« Les magistrats intéressés sont nommés au premier poste, correspondant aux fonctions exercées, dont la vacance vient à s’ouvrir dans la juridiction où ils ont été nommés en surnombre. »

II. – L’article 2-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 1er B
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Article 1er bis

Article 1er

L’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifiée :

1° Au dernier alinéa de l’article 3, les mots : « de premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance, » sont supprimés ;

2° À la seconde phrase du neuvième alinéa de l’article 3-1, les mots : « premier vice-président chargé du service d’un tribunal d’instance, » sont supprimés. (Adopté.)

Article 1er
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Article 1er ter

Article 1er bis

Après l’article 3-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article 3-2 ainsi rédigé :

« Art. 3-2. – Lorsque la nature particulière d’une affaire le justifie, à la demande du président de la juridiction à laquelle ils appartiennent ou sont rattachés, les magistrats du siège qui ont prêté serment depuis moins de trois ans peuvent apporter au magistrat en charge de l’affaire leur concours à la préparation de la décision. » (Adopté.)

Article 1er bis
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Article 1er quater

Article 1er ter

I. – Après le mot : « apprécie », la fin de la seconde phrase du troisième alinéa de l’article 12-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi rédigée : « spécialement les critères pris en compte lors de la nomination de ces magistrats et mentionnés aux articles 28-1 A, 28-1 B, 37-1 A et 38-1-1. »

II. – L’article 12-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, s’applique aux nominations intervenant à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 1er ter
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Article 1er quinquies

Article 1er quater

Après le deuxième alinéa de l’article 14 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les magistrats nommés à des fonctions de premier président d’une cour d’appel, de président d’un tribunal de grande instance, de première instance ou d’un tribunal supérieur d’appel, ainsi que les magistrats nommés à des fonctions de procureur général près une cour d’appel, de procureur de la République près un tribunal de grande instance, de première instance ou un tribunal supérieur d’appel suivent, au plus tard dans les six mois de leur installation, une formation spécifique à l’exercice de leurs fonctions, qui a pour objet le développement des compétences d’encadrement, d’animation et de gestion au sein d’une juridiction. Cette formation est organisée par l’École nationale de la magistrature, dans des conditions et selon un programme fixés par décret. » (Adopté.)

Article 1er quater
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Article 1er sexies

Article 1er quinquies

La section 1 du chapitre II de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est complétée par un article 21-2 ainsi rédigé :

« Art. 21-2. – Les auditeurs de justice jugés aptes, à la sortie de l’école, à exercer les fonctions judiciaires peuvent être nommés en premier poste magistrats du siège auprès d’un magistrat exerçant ses fonctions au sein d’une juridiction qui détient des compétences particulières ou au sein d’une juridiction spécialisée.

« La liste des juridictions mentionnées au présent article est fixée par décret en Conseil d’État. » (Adopté.)

Article 1er quinquies
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Article 1er septies

Article 1er sexies

I. – Le dernier alinéa de l’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Après le mot : « durée », il est inséré le mot : « minimale » ;

2° Après les mots : « est de », la fin est ainsi rédigée : « trois années. » ;

3° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Il peut être dérogé à cette règle sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. La durée maximale d’exercice de ces mêmes fonctions est de dix années ; elle ne peut être ni renouvelée, ni prorogée. »

II. – L’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 1er sexies
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Article 1er octies

Article 1er septies

I. – Après l’article 28 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, sont insérés des articles 28-1 A et 28-1 B ainsi rédigés :

« Art. 28-1 A. – Pour arrêter chaque proposition de nomination de président de tribunal de grande instance, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 3° L’aptitude à participer aux politiques publiques judiciaires conduites dans le ressort de la cour d’appel ;

« 4° L’aptitude à diriger et gérer l’activité de la juridiction, et à en rendre compte au premier président de la cour d’appel du ressort ;

« 5° L’aptitude à animer le ressort de la juridiction et à coordonner l’arrondissement judiciaire ;

« 6° L’aptitude à conduire et animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à collaborer avec le procureur de la République près la même juridiction ;

« 8° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la juridiction, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 9° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire.

« Art. 28-1 B. – Pour donner son avis sur les propositions de nomination du garde des sceaux, ministre de la justice, aux fonctions de procureur de la République près un tribunal de grande instance, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 3° L’aptitude à mettre en œuvre les priorités de politique pénale définies par le garde des sceaux, ministre de la justice, sous l’autorité du procureur général près la cour d’appel du ressort ;

« 4° L’aptitude à diriger et gérer l’activité de la juridiction et à en rendre compte au procureur général près la cour d’appel du ressort ;

« 5° L’aptitude à animer le ressort de la juridiction et à coordonner l’arrondissement judiciaire ;

« 6° L’aptitude à conduire et à animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à collaborer avec le président de la même juridiction ;

« 8° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la juridiction, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 9° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire. »

II. – Les articles 28-1 A et 28-1 B de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans leur rédaction résultant du I du présent article, s’appliquent aux nominations intervenant à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 1er septies
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Article 2

Article 1er octies

I. – Le dernier alinéa de l’article 28-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « exercer », sont insérés les mots : « moins de trois années et » ;

b) Les mots : « la fonction » sont remplacés par les mots : « les fonctions » ;

2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut être dérogé à la règle de durée minimale d’exercice des fonctions sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. » ;

3° La deuxième phrase est ainsi modifiée :

a) Les mots : « cette période » sont remplacés par les mots : « la septième année d’exercice de ces fonctions » ;

b) Après le mot : « magistrat », il est inséré le mot : « en » ;

c) Les mots : « de cette fonction » sont supprimés ;

4° À la dernière phrase, les mots : « cette fonction » sont remplacés par les mots : « ces fonctions ».

II. – L’article 28-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 1er octies
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Article 2 bis

Article 2

I. – L’article 28-3 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « et celles de juge d’un tribunal de grande instance chargé du service d’un tribunal d’instance » sont supprimés ;

2° La première phrase des deuxième et dernier alinéas est ainsi modifiée :

a) Le mot : « enfants, » est remplacé par les mots : « enfants ou » ;

b) Les mots : « ou de juge chargé du service d’un tribunal d’instance » sont supprimés ;

3° La première phrase du dernier alinéa est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « exercer », sont insérés les mots : « moins de quatre années et » ;

b) Les mots : « la fonction » sont remplacés par les mots : « les fonctions » ;

4° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut être dérogé à la règle de durée minimale d’exercice des fonctions sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. » ;

5° La deuxième phrase du même dernier alinéa est ainsi modifiée :

a) Les mots : « cette période » sont remplacés par les mots : « la dixième année d’exercice de ces fonctions » ;

b) Après le mot : « magistrat », il est inséré le mot : « en » ;

c) Les mots : « de cette fonction » sont supprimés ;

6° À la dernière phrase du même dernier alinéa, les mots : « cette fonction » sont remplacés par les mots : « ces fonctions ».

II. – L’article 28-3 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant des 3° à 6° du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 2
Dossier législatif : projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions
Article 2 ter

Article 2 bis

I. – L’article 37 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « La fonction » sont remplacés par les mots : « Les fonctions » ;

b) Les mots : « est exercée » sont remplacés par les mots : « sont exercées » ;

2° L’antépénultième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « exercer », sont insérés les mots : « moins de trois années et » ;

b) Les mots : « la fonction » sont remplacés par les mots : « les fonctions » ;

3° Après le même antépénultième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut être dérogé à la règle de durée minimale d’exercice des fonctions sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. » ;

4° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « cette période » sont remplacés par les mots : « la septième année d’exercice de ses fonctions » ;

5° Après le mot : « terme », la fin de la seconde phrase du même avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « de cette période. » ;

6° Aux première et seconde phrases du dernier alinéa, les mots : « cette fonction » sont remplacés par les mots : « ces fonctions ».

II. – L’article 37 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 2 bis
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Article 2 quater

Article 2 ter

I. – Après l’article 37 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article 37-1 A ainsi rédigé :

« Art. 37-1 A. – Pour arrêter chaque proposition de nomination de premier président de cour d’appel, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’expérience antérieure d’une ou de plusieurs fonctions d’animation et de gestion ;

« 3° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 4° L’aptitude à conduire et mettre en œuvre les politiques publiques judiciaires relevant du ressort de la cour d’appel, en collaboration avec les juridictions de ce ressort ;

« 5° L’aptitude à diriger et gérer l’activité de la cour d’appel et de son ressort ;

« 6° L’aptitude à conduire et animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à assurer le rôle d’inspection, de contrôle et d’évaluation des juridictions du ressort de la cour d’appel ;

« 8° L’aptitude à collaborer avec le procureur général près la même cour d’appel ;

« 9° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la cour d’appel, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 10° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire. »

II. – Après l’article 38-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article 38-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 38-1-1. – Pour donner son avis sur les propositions de nomination du garde des sceaux, ministre de la justice, aux fonctions de procureur général près une cour d’appel, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature apprécie spécialement :

« 1° Les qualités juridictionnelles ;

« 2° L’expérience antérieure d’une ou de plusieurs fonctions d’animation et de gestion ;

« 3° L’aptitude à exercer des fonctions d’encadrement et à conduire des projets ;

« 4° L’aptitude à conduire et mettre en œuvre des priorités de politique pénale définies par le garde des sceaux, ministre de la justice, dans le ressort de la cour d’appel, et à coordonner à cet effet l’action des procureurs de la République près les tribunaux de grande instance de ce ressort ;

« 5° L’aptitude à diriger et gérer l’activité de la cour d’appel et de son ressort ;

« 6° L’aptitude à conduire et animer le dialogue social ;

« 7° L’aptitude à assurer le rôle d’inspection, de contrôle et d’évaluation des juridictions du ressort de la cour d’appel ;

« 8° L’aptitude à collaborer avec le premier président de la même cour d’appel ;

« 9° L’aptitude à dialoguer avec l’ensemble des auxiliaires de justice du ressort de la cour d’appel, ainsi qu’avec les services de l’État ;

« 10° L’aptitude à représenter l’institution judiciaire. »

III. – Les article 37-1 A et 38-1-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature s’appliquent aux nominations intervenant à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 2 ter
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Article 2 quinquies

Article 2 quater

I. – L’article 38-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « La fonction » sont remplacés par les mots : « Les fonctions » ;

b) Les mots : « est exercée » sont remplacés par les mots : « sont exercées » ;

2° L’antépénultième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « exercer », sont insérés les mots : « moins de trois années et » ;

b) Les mots : « la fonction » sont remplacés par les mots : « les fonctions » ;

3° Après le même antépénultième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut être dérogé à la règle de durée minimale d’exercice des fonctions sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. » ;

4° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « cette période » sont remplacés par les mots : « la septième année d’exercice de ces fonctions » ;

5° Après le mot : « terme », la fin de la seconde phrase du même avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « de cette période. » ;

6° Aux première et seconde phrases du dernier alinéa, les mots : « cette fonction » sont remplacés par les mots : « ces fonctions ».

II. – L’article 38-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

Article 2 quater
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Article 4

Article 2 quinquies

I. – L’article 38-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « exercer », sont insérés les mots : « moins de trois années et » ;

b) Les mots : « la fonction » sont remplacés par les mots : « les fonctions » ;

2° Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut être dérogé à la règle de durée minimale d’exercice des fonctions sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière. » ;

3° La première phrase de l’avant-dernier alinéa est ainsi modifiée :

a) Les mots : « cette période » sont remplacés par les mots : « la septième année d’exercice de ces fonctions » ;

b) Après le mot : « magistrat », il est inséré le mot : « en » ;

c) Les mots : « de cette fonction » sont supprimés ;

4° À la seconde phrase du même avant-dernier alinéa, les mots : « cette fonction » sont remplacés par les mots : « ces fonctions ».

II. – L’article 38-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux magistrats dont la nomination intervient à compter du 1er décembre 2019. (Adopté.)

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Article 2 quinquies
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Article 5

Article 4

Au premier alinéa de l’article 41-10 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, les mots : « d’instance » sont remplacés par les mots : « chargé du service d’une chambre détachée d’un tribunal de première instance ». (Adopté.)

Article 4
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Article 7 bis

Article 5

L’article 41-11 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « Lorsqu’ils sont affectés dans un tribunal d’instance, » sont supprimés ;

b) La dernière phrase est supprimée ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé ;

3° Le troisième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « formation collégiale », sont insérés les mots : « du tribunal de première instance » ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’ils sont affectés dans une chambre détachée d’un tribunal de première instance, ils ne peuvent assurer plus du tiers des services de ladite chambre. » (Adopté.)

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Article 5
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Article 7 ter

Article 7 bis

L’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifiée :

1° À la première phrase du dernier alinéa de l’article 2, les mots : « de tribunal de grande instance ou » sont supprimés ;

2° Au dernier alinéa de l’article 3, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

3° L’article 3-1 est ainsi modifié :

a) Au sixième alinéa, les deux occurrences du mot : « grande » sont remplacées par le mot : « première » ;

b) À la première phrase du neuvième alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

c) À la seconde phrase du même neuvième alinéa, les deux occurrences du mot : « grande » sont remplacées par le mot : « première » ;

d) Aux deuxième et troisième phrases de l’avant-dernier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

4° À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article 12-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

5° Au premier alinéa de l’article 13, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

6° Au premier alinéa de l’article 28, les mots : « d’un tribunal de grande instance ou » sont supprimés ;

7° L’article 28-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

c) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « d’un tribunal de grande instance, » sont supprimés et la seconde occurrence du mot : « grande » est remplacée par le mot : « première » ;

– à la deuxième phrase, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

d) Le dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

– à la deuxième phrase, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

8° L’article 28-3 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les deux occurrences des mots : « de grande instance ou » sont supprimées ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

d) À la deuxième phrase du même dernier alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

9° À la première phrase de l’article 32, les mots : « d’un tribunal de grande instance ou » sont supprimés ;

10° L’article 38-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

c) Au quatrième alinéa, les mots : « de grande instance ou » sont supprimés ;

d) Au dernier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

11° Au premier alinéa de l’article 41-10, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

12° Au dernier alinéa de l’article 41-13, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

13° L’article 41-14 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du premier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

b) À la deuxième phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot « première » ;

14° L’article 41-25 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les deux occurrences du mot : « grande » sont remplacées par le mot : « première » ;

b) À la seconde phrase, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

15° Aux première et dernière phrases de l’article 41-26, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

16° Au dernier alinéa de l’article 41-28, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

17° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 41-29, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

18° À la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article 72-3, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

19° À la première phrase du premier alinéa du II de l’article 76-1-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première ». (Adopté.)

Article 7 bis
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Article 8 A

Article 7 ter

(Supprimé)

TITRE II

DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES

Article 7 ter
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Article 8

Article 8 A

La loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature est ainsi modifiée :

1° Le 3° de l’article 1er est ainsi modifié :

a) La première occurrence du mot : « grande » est remplacée par le mot : « première » ;

b) Après les mots : « présidents de tribunal », les mots : « de grande instance, » sont supprimés ;

2° Au 3° de l’article 2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

3° Aux 3° et 4° de l’article 4-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

4° Au deuxième alinéa de l’article 15, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première ». (Adopté.)

Article 8 A
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Article 9

Article 8

I et I bis. – (Non modifiés)

II. – Aux premier et troisième alinéas du I et aux première et seconde phrases du premier alinéa du II de l’article 9 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l’élection du Président de la République, dans sa rédaction résultant de l’article 1er de la loi organique n° 2016-1047 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France, les mots : « d’instance » sont remplacés par les mots : « de première instance ». (Adopté.)

Article 8
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Article 9 bis

Article 9

(Non modifié)

I. – Sans préjudice des articles 41-10 et 41-25 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, les magistrats exerçant à titre temporaire et les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles mentionnées au même article 41-25 peuvent, entre le 1er juin 2019 et le 31 décembre 2022, exercer les fonctions d’assesseur dans les cours criminelles.

II. – La sous-section II de la section II du chapitre V bis de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifiée :

1° À la seconde phrase de l’article 41-25, après la première occurrence du mot : « appel », sont insérés les mots : « pour exercer les fonctions d’assesseur dans les cours d’assises ou » ;

2° L’article 41-26 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La cour d’assises ne peut comprendre plus d’un assesseur choisi parmi les magistrats recrutés en application de la présente sous-section. » (Adopté.)

Article 9
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Article 9 ter

Article 9 bis

(Supprimé)

Article 9 bis
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Article 9 quater

Article 9 ter

À compter du 1er janvier 2020, les magistrats exerçant à titre temporaire poursuivent leur mandat, pour exercer les fonctions prévues à l’article 41-10 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature dans sa rédaction résultant de l’article 4 de la présente loi organique, au sein du tribunal de première instance ayant succédé au tribunal de grande instance dans lequel ils ont été nommés. (Adopté.)

Article 9 ter
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Article 10

Article 9 quater

(Supprimé)

Article 9 quater
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 10

Les articles 1er, 2, 4, 5, 6, 7 bis et 8 A et le II de l’article 8 de la présente loi organique entrent en vigueur le 1er janvier 2020. (Adopté.)

Mme la présidente. Les autres dispositions du projet de loi organique ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

Article 10
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi organique dans le texte de la commission.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 55 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 297
Pour l’adoption 279
Contre 18

Le Sénat a adopté.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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10

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 13 février 2019, à quatorze heures trente et le soir:

Projet de loi organique portant modification du statut d’autonomie de la Polynésie française (procédure accélérée) (texte de la commission n° 294, 2018-2019) et projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française (procédure accélérée) (texte de la commission n° 293, 2018-2019).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 13 février 2019, à minuit quinze.)

 

nomination de membres dune éventuelle commission mixte paritaire

La liste des candidats désignés par la commission spéciale pour faire partie de léventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises a été publiée conformément à larticle 12 du règlement.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai dune heure prévu par larticle 9 du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :

Titulaires : Mme Catherine Fournier, M. Jean-François Husson, Mmes Élisabeth Lamure, Sophie Primas, M. Martial Bourquin, Mme Frédérique Espagnac et M. Georges Patient ;

Suppléants : MM. Serge Babary, Michel Canevet, Philippe Dominati, Jean-Marc Gabouty, Fabien Gay, Mme Christine Lavarde et M. Jean-Louis Tourenne.

 

 

Direction des comptes rendus

ÉTIENNE BOULENGER