M. Patrice Joly. Le Gouvernement a indiqué vouloir assurer la réussite de tous les élèves, ce qui implique de doter les enseignants d’une formation initiale et continue de qualité tout au long de leur carrière.

Dans ce contexte, il ne paraît pas judicieux de diminuer les crédits qui y sont alloués. Il est donc proposé de maintenir les crédits au niveau qui était le leur dans la loi de finances pour 2018. Les crédits supplémentaires prévus à cet effet sont gagés sur la baisse des crédits d’un autre programme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission suggère à notre collègue de retirer son amendement ou, à défaut, elle émettra un avis défavorable, bien qu’elle reconnaisse l’importance du sujet.

Environ 687 millions d’euros sont consacrés à la formation des enseignants. Or ces crédits ne sont pas tous consommés, tant s’en faut. En 2017, 100 millions d’euros de crédits n’avaient pas été consommés.

La priorité va donc à la consommation totale du budget existant. La mise en place d’une politique de ressources humaines plus décentralisée et plus proche des enseignants devrait le permettre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. La formation continue est absolument essentielle. C’est d’ailleurs un enjeu qualitatif plus encore que quantitatif.

Malgré les apparences, il y a à la fois une sincérisation et une augmentation.

La dotation, fixée à 31,5 millions d’euros pour 2019, semble en diminution par rapport aux crédits pour 2018, fixés à 36,8 millions d’euros. Or la dernière consommation annuelle connue, celle de 2017, s’élevait à 19,3 millions d’euros. Sans présumer de la dépense totale au titre de l’exercice 2018, on peut donc déjà établir que, si tous les crédits inscrits dans le projet de loi étaient consommés, l’augmentation serait de 12,2 millions d’euros, soit 65 %, en deux ans. Ces chiffres expriment donc, contrairement aux apparences, un volontarisme en faveur de la formation continue.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Monsieur Joly, l’amendement n° II-212 est-il maintenu ?

M. Patrice Joly. Oui, je le maintiens, parce qu’on ne saurait se satisfaire de l’absence d’initiative en faveur de la consommation de ces crédits. Il est indispensable de permettre l’accompagnement des enseignants à travers les formations en question.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-212.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-90, présenté par M. Grosperrin, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

10 000 000

 

10 000 000

 

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Enseignement scolaire public du second degré

 

10 000 000

 

10 000 000

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à transférer 10 millions d’euros de crédits de personnels du programme 141, « Enseignement scolaire public du second degré », vers le programme 140, « Enseignement scolaire public du premier degré », afin de financer la création de 300 emplois supplémentaires dans le primaire, compensée par la suppression d’un nombre équivalent d’emplois dans le second degré.

Pourquoi ce chiffre ? Parce qu’il correspond au nombre de classes supprimées à la rentrée de 2018 en milieu rural, de l’aveu même du ministère. Le Président de la République s’était pourtant engagé ici même, au Sénat, en juillet 2017, à ce qu’il n’y ait plus de fermeture de classes en milieu rural. Cette promesse n’a pas été tenue.

J’ai bien entendu les propos du ministre, et je connais son honnêteté. Mais fermer une classe en milieu rural – il le sait très bien –, c’est contraindre les enfants et leurs parents à de longs trajets ; c’est programmer la fin de l’école rurale et, dans les territoires concernés, la fin du service public. S’il est parfois vrai que la démographie ne joue pas en la faveur de ces écoles, elles sont souvent, là où elles se trouvent, le dernier bastion. Je sais que vous y êtes attentif, monsieur le ministre, mais ce n’est pas ce que ressentent les maires.

L’adoption de cet amendement, dont la portée est fondamentalement symbolique, permettrait d’envoyer un signal fort en faveur de l’école rurale, à laquelle tous les sénateurs sont attachés et dont le maintien est essentiel à la vitalité et à l’attractivité de nos territoires. Une école qui ferme dans un village, c’est bien sûr le village qui meurt.

Je le répète, quels qu’aient été les propos très rassurants de M. le ministre, dont je connais l’honnêteté, cette disposition est importante et son adoption rassurerait tous les maires.

M. le président. L’amendement n° II-679 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Artano, A. Bertrand, Gabouty et Gold, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Mézard, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

10 000 000

 

10 000 000

 

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

 

10 000 000

 

10 000 000

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Ma proposition commence comme la précédente, mais finit différemment : nous avons les mêmes objectifs, mais nous ne tapons pas sur la même ligne !

Le RDSE estime que l’enseignement scolaire public du second degré ne peut pas assumer une baisse de 10 millions d’euros supplémentaires de ses crédits. En effet, l’enseignement secondaire subira déjà la perte de 2 650 postes d’enseignants, alors même que 40 000 élèves de plus entreront dans le second degré à la rentrée de 2019. L’effet ciseaux risquerait donc d’aggraver la situation.

Nous proposons plutôt de faire peser cette baisse de 10 millions d’euros – et non de 5 milliards d’euros, je vous rassure, monsieur Longuet – sur le programme « Enseignement privé du premier et du second degrés », dont nous n’ignorons pas que son action dédiée à la formation des enseignants subit déjà une baisse pour 2019. Toutefois, les parents qui paient pour qu’un enseignement privé soit dispensé à leurs enfants peuvent être davantage mis à contribution que les autres, d’après nous, alors que le rééquilibrage n’est pas envisageable dans le domaine de l’enseignement public.

M. le président. L’amendement n° II-527, présenté par M. Decool, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Malhuret, Chasseing, Fouché, Wattebled, Guerriau, Lagourgue et A. Marc, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

5 000 000

 

5 000 000

 

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Enseignement scolaire public du second degré

 

5 000 000

 

5 000 000

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricole

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Il s’agit sensiblement de la même proposition, mais revue à la baisse.

Cet amendement vise à transférer 5 millions d’euros, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, de l’action n° 05, Enseignement post-baccalauréat en lycée, du programme 141 vers le programme 140, afin de financer la création de 150 postes d’enseignants supplémentaires au profit des écoles rurales. Il s’agit de soutenir les écoles rurales et les communes dont la survie est parfois en jeu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Le rapporteur spécial que je suis se trouve en quelque sorte face à un conflit d’intérêts : élu d’un département rural, ma sympathie va naturellement à vos amendements, mes chers collègues. Cependant, les contreparties envisagées diffèrent.

Madame Laborde, je suis un peu désolé que, pour financer votre proposition, vous preniez à un petit budget, celui de la formation des enseignants du privé. Les besoins en la matière sont relativement limités, mais ils existent. Pourquoi diable – c’est le cas de le dire – ces enseignants seraient-ils moins bien formés ?

La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement de Mme Laborde et s’en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements de M. Grosperrin et de Mme Mélot, partant du principe que ces deux derniers risquaient d’être satisfaits par la bonne volonté du ministre. En effet, l’enseignement primaire bénéficie de 1 800 emplois supplémentaires, qui ne sont pas fléchés. Les besoins, tels qu’exprimés par le rapporteur pour avis Jacques Grosperrin et, a fortiori, par Mme Colette Mélot, sont modestes : 150 ici, 300 là, quand vous disposez de 1 800 postes supplémentaires à répartir, monsieur le ministre.

Vous avez le souci de l’équité, vous connaissez la diversité des territoires et vos DASEN ne ménagent pas leurs efforts pour mieux affecter les personnels. S’il y a des besoins légitimes en milieu rural, je suis donc persuadé que, éclairé par la parole du Président de la République, que j’ai moi-même entendue, dans les sous-sols du Sénat, en juillet 2017, vous pourrez apaiser les auteurs de ces trois amendements. La commission attend donc l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Pour reprendre les termes de M. Longuet, je voudrais « apaiser » les inquiétudes, dans la lignée de ce que j’ai dit dans mon discours liminaire.

En réalité, l’école rurale bénéficie d’un effort budgétaire sans précédent depuis deux ans. Lors des deux dernières rentrées scolaires, nous aurions dû fermer près de 3 000 classes pour prendre en compte une démographie en baisse de 60 000 élèves dans le premier degré, au lieu de quoi nous avons créé des postes.

Je vous rappelle les grands équilibres de la rentrée de 2018 : 32 000 élèves en moins dans le premier degré et 3 881 postes créés. Ainsi, dans un département qui vous est cher, monsieur le rapporteur pour avis, le Doubs, 14 postes ont été créés à la rentrée de 2018 malgré 327 élèves en moins. Résultat : un « P sur E », c’est-à-dire un nombre de postes pour cent élèves, de 5,5, record historique, contre 5,43 l’année précédente.

L’exemple de ce département est généralisable : dans chaque département, le taux d’encadrement s’est amélioré.

Je voudrais une nouvelle fois démentir l’idée selon laquelle le dédoublement des classes de CP et de CE1 porterait préjudice aux classes rurales. En Lozère, la moyenne est de 14 élèves par classe, de la petite section au CM2. Dans le Cantal, la moyenne est de 17 élèves par classe, quand la moyenne nationale est de 23,3.

On ne peut donc pas dire que les zones rurales soient lésées. En revanche, on peut dire qu’il y a un problème démographique. Nous le compensons, comme vient de le dire M. Longuet, grâce à la très grande attention des DASEN.

Je rappelle aussi que les dédoublements de classes ne concernent pas que les zones urbaines : dans l’Aisne, 40 % des dédoublements que nous avons réalisés dans les REP et REP+ ont eu lieu en milieu rural.

Il importe de préciser aussi que la parole présidentielle sur les fermetures de classes, en juillet 2017, portait sur la rentrée suivante : il s’agissait d’avoir un débat sur cet enjeu et de ménager une pause pour cette rentrée-là – c’est ce qui s’est passé, pour l’essentiel.

En tout cas, je ne méconnais pas le problème démographique. Nous devons nous y atteler tous ensemble, notamment pour redonner de l’attractivité aux écoles en milieu rural, au travers par exemple des conventions de ruralité, qui permettent aussi de faire des regroupements d’écoles – on en compte environ 5 000 en 2018.

Nous devons aussi prendre en compte les questions périscolaires, avec le plan Mercredi, qui commence à s’appliquer.

Par ailleurs – vous y avez fait référence –, la mission « Égalité des territoires », conduite par l’inspectrice Ariane Azéma et par Pierre Mathiot, est chargée de réfléchir à un pilotage vraiment territorial des politiques éducatives, qui doit permettre, je pense, de répondre à vos attentes.

L’avis est donc défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.

M. Patrice Joly. La fermeture des classes est non seulement un enjeu d’éducation, un enjeu pédagogique, mais aussi un enjeu d’attractivité. Bien plus, c’est un enjeu d’image et de représentation des territoires pour les habitants, mais également pour les élèves qui s’y trouvent.

Il arrive que des décisions de fermeture de classes percutent des stratégies d’aménagement, de développement et de redynamisation des villages, ce qui devient incompréhensible aux yeux de nos concitoyens et des élus qui consentent des efforts, parfois avec l’accompagnement de l’État pour ce qui concerne un certain nombre d’investissements. Malgré ces démarches partenariales, on a l’impression que l’État ne parle pas d’une seule voix, puisque des décisions liées à des logiques de filières viennent les contrarier.

Pour éviter que cela ne se produise et permettre l’accompagnement en direction de la redynamisation des territoires, il peut être opportun de reporter des fermetures de classes, quand bien même elles apparaissent logiques ou légitimes au regard des critères que vous avez évoqués, monsieur le ministre. C’est une question d’estime du territoire pour les parents, les enfants et les enseignants, estime de soi indispensable pour un parcours scolaire réussi.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. J’entends les arguments de M. le ministre, mais l’adoption de mon amendement serait hautement symbolique.

Une vision très « macro » de la situation des départements n’est pas toujours pertinente. Il est vrai que, dans la ruralité, le nombre d’élèves diminue souvent, mais vous avez fort justement souligné, monsieur le ministre, que ce n’était pas toujours le cas. Il n’en reste pas moins que les territoires ne sont pas tous identiques et que certains ont des spécificités. Or, lorsque, dans un village, une classe est mise en difficulté, c’est toute la commune, tout le tissu qui est touché.

D’un point de vue macro, j’entends votre analyse, mais il faut penser à l’équilibre des territoires et à leurs spécificités : parfois, des classes ferment parce qu’il n’y a plus assez d’élèves ou qu’il y en a moins. Dans ces cas-là, un effort supplémentaire doit être accepté pour rééquilibrer ce qu’on appelle l’urbain et le rural.

M. Max Brisson. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-90.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos II-679 rectifié et II-527 n’ont plus d’objet.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à zéro heure trente, afin d’achever l’examen des crédits de la mission.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

État B (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Discussion générale

3

Remplacement d’un sénateur

M. le président. En application des articles L.O. 151 et L.O. 297 du code électoral, M. le président du Sénat a pris acte de la fin de plein droit, à compter du 5 décembre 2018, à minuit, du mandat de sénateur du Rhône de M. Gérard Collomb.

En application de l’article L.O. 320 du code électoral, il est remplacé par M. Gilbert-Luc Devinaz, dont le mandat de sénateur du Rhône commence aujourd’hui, 6 décembre, à zéro heure. (Applaudissements.)

4

État B (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Enseignement scolaire

Loi de finances pour 2019

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
État B (début)
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
État B (début)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale.

SECONDE PARTIE (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Enseignement scolaire (suite)

Seconde partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
État B (interruption de la discussion)

M. le président. Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-143, présenté par Mme Brulin, MM. Ouzoulias, Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

3 200 000

 

3 200 000

Enseignement technique agricole

3 200 000

 

3 200 000

 

dont titre 2

3 200 000

3 200 000

TOTAL

3 200 000

3 200 000

3 200 000

3 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Il s’agit de réabonder les crédits de l’enseignement agricole, qui est victime d’une suppression de 50 postes : une douzaine d’emplois administratifs et techniques, le reste concernant des postes d’enseignants.

Parce qu’il est nécessaire de former des jeunes techniciens de haut niveau dans le domaine agricole, notamment au regard des enjeux environnementaux, parce que nous constatons régulièrement que des jeunes sont refusés dans cette voie d’enseignement faute de place, parce que – chacun soutiendra cette idée ici – nous avons besoin de travailler au développement de l’agriculture et d’une agriculture d’avenir, parce que nous constatons des taux de réussite plutôt en baisse dans cette filière, parce qu’il y a des enjeux d’aménagement du territoire et qu’il y va de l’avenir de l’agriculture française, nous avons besoin d’un enseignement de qualité.

M. le président. L’amendement n° II-627 rectifié, présenté par Mme Doineau, M. Le Nay, Mme Vermeillet, MM. Henno et Détraigne, Mme Vérien, M. Luche, Mmes Férat, Vullien, Sollogoub, de la Provôté et Guidez, M. Vanlerenberghe et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

3 200 000

 

3 200 000

Enseignement technique agricole

3 200 000

 

3 200 000

 

dont titre 2

3 200 000

3 200 000

TOTAL

3 200 000

3 200 000

3 200 000

3 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement a un objet équivalent à celui de Mme Brulin.

Supprimer 50 emplois dans l’enseignement agricole est un mauvais signal, d’autant que cette filière souffre et connaît de grandes difficultés. Nous savons que cet enseignement manque sans doute de communication : sa promotion n’est pas aussi forte que celle de l’enseignement général et technique. Pourtant, les jeunes qui sortent de l’enseignement agricole trouvent souvent un emploi : le taux d’insertion des titulaires d’un diplôme de l’enseignement agricole est supérieur à celui des titulaires d’un diplôme équivalent de l’éducation nationale.

Ce sujet me tient vraiment à cœur, comme à beaucoup de mes collègues sur ces travées. L’amendement tend donc à prévoir un abondement de 3,2 millions d’euros.

M. le président. L’amendement n° II-628 rectifié, présenté par Mme Doineau, M. Le Nay, Mme Vermeillet, MM. Henno et Détraigne, Mme Vérien, M. Luche, Mmes Férat, Vullien, Sollogoub, de la Provôté et Guidez, M. Vanlerenberghe et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degré

dont titre 2

 

 

 

 

Vie de l’élève

dont titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrés

dont titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l’éducation nationale

dont titre 2

 

1 054 750

 

1 054 750

Enseignement technique agricole

1 054 750

 

1 054 750

 

dont titre 2

1 054 750

1 054 750

TOTAL

1 054 750

1 054 750

1 054 750

1 054 750

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Dans la mesure où la suppression de ces emplois n’interviendra qu’à partir d’une nouvelle année scolaire, cet amendement a pour objet de maintenir les emplois à partir de septembre 2019 : l’abondement supplémentaire de 1 054 700 euros tient compte de cette situation.

Mes chers collègues, si vous n’êtes pas convaincus par les deux premiers amendements, je vous invite à voter plutôt celui-ci, qui est un amendement de repli. Dans tous les cas, il s’agit de considérer que l’enseignement agricole est l’un des fleurons de notre enseignement. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. J’aime beaucoup l’enseignement agricole. J’ai présidé pendant douze ans le lycée agricole public Philippe-de-Vilmorin à Bar-le-Duc : j’y ai appris l’essentiel de ce que je sais en matière de direction d’un établissement scolaire, c’est-à-dire pas grand-chose. (Sourires.)

Plus sérieusement, on y rencontre des gens formidables : les élèves, les enseignants et les familles sont volontaires, ce qui est la condition essentielle du succès. Les lycées agricoles privés, moins fréquents dans l’Est, mais présents dans l’Ouest, et les maisons familiales rurales accomplissent également un excellent travail pour donner une deuxième chance à des enfants qui ont parfois manqué de réussite au collège.

Pourtant, la commission des finances ne peut soutenir ces amendements, pour des raisons budgétaires dont vous allez comprendre la valeur symbolique.

De 2012 à 2018, les effectifs de l’enseignement agricole au sens large – il regroupe trois filières – ont malheureusement évolué négativement, passant de 170 000 à 162 000, soit une baisse de 8 000 élèves. Pendant la même période, les effectifs d’enseignants des trois filières de l’enseignement agricole ont augmenté de 820 postes. En d’autres termes, chaque fois que l’on perd dix élèves, on gagne un poste. Il arrive un moment où il faut se poser des questions.

Je pense profondément que les lycées agricoles publics, les lycées agricoles privés, les maisons familiales rurales, par la diversification de leur offre, parce qu’ils proposent à la fois de l’enseignement initial – l’enseignement scolaire, qui nous rassemble aujourd’hui –, de l’apprentissage et de la formation permanente, sont en mesure de rebondir et, à travers ce réseau de services rendus et reconnus, qui sont des réseaux de qualité, d’augmenter leurs effectifs.

La commission des finances – j’y suis décidé – comme la commission de la culture soutiendront tout projet d’effectifs supplémentaires d’enseignants qui s’adossera à une reprise des effectifs d’élèves. Nous ne pouvons pas à la fois défendre l’idée que la dépense publique doit être maîtrisée et ne pas essayer de considérer, de temps en temps, que l’on ne peut pas augmenter des moyens lorsqu’il y a une difficulté. S’il s’agissait d’une impasse, nous pourrions consentir un effort, mais ces établissements ont des facultés de développement, surtout si les élus locaux qui les connaissent et qui les soutiennent les accompagnent. C’est la reprise des effectifs d’élèves qui entraînera la reprise des effectifs d’enseignants.

Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Même avis.

J’ajouterai un argument qualitatif. Je soutiens très fortement l’enseignement agricole : des rapprochements très forts ont lieu avec l’éducation nationale – c’est l’occasion pour moi de le souligner.

Tout cela ne signifie absolument pas que nous voulons marginaliser ou léser l’enseignement agricole. Je partage tout à fait les arguments du rapporteur spécial.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Antoine Karam, rapporteur pour avis. Lorsqu’il m’a été proposé de devenir rapporteur pour avis pour l’enseignement technique agricole au nom de la commission de la culture, j’ai accepté avec beaucoup d’enthousiasme et humilité.

M. le ministre le sait, j’ai fait construire l’un des plus beaux lycées agricoles de France en Guyane et deux maisons familiales rurales. J’ai toujours combattu l’idée que l’enseignement agricole était une voie de garage. J’ai donc considéré qu’il fallait franchir le saut qualitatif.

Pour autant, je ne peux pas soutenir les amendements de mes collègues. Même si une réduction de 50 emplois est toujours regrettable et représente une perte pour l’enseignement agricole, elle reste minime. Vous l’avez souligné, monsieur le ministre, il faut reconnaître que la baisse des effectifs se produit à tous les niveaux, soit dans les effectifs d’élèves, soit dans le nombre de classes.

Évidemment, rien n’est fermé, rien n’est bloqué. Lorsque nous aurons accompli le travail nécessaire pour relancer l’enseignement agricole et en assurer la promotion sur le territoire, nous pourrons reprendre ce qui a été perdu en donnant la place qui revient aux enseignants et corps administratif dans ces établissements.