M. Marc Fesneau, ministre. Je le considère comme défendu par notre présentation de l’amendement n° II–500. En déposant cet amendement-ci, le Gouvernement n’avait d’autre objectif que de garantir la recevabilité financière de l’amendement identique de Mme la sénatrice Tetuanui. C’est à elle et à son groupe que le mérite revient ; je lui laisse donc le soin de présenter cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour présenter l’amendement n° II–507.

Mme Lana Tetuanui. Cet amendement, identique à celui du Gouvernement, s’inscrit dans la continuité de l’amendement n° II-500, que nous avons adopté. Ce dernier visait à abonder les crédits du CIVEN ; en effet, nous sommes conscients que le nombre de malades victimes des essais nucléaires est susceptible d’augmenter.

Ensemble, l’amendement n° II-500 et ceux-ci, portés tant par le Gouvernement que par moi-même au nom de la collectivité polynésienne, ont pour objet de consolider le travail accompli et de mettre en œuvre les préconisations du fameux rapport que nous avons remis au Premier ministre le 21 octobre dernier.

Il s’agit, avant tout, de consolider la nouvelle méthodologie du CIVEN et d’offrir un nouveau délai de recours aux ayants droit des personnes décédées et, plus largement, à tous ceux qui ont vu leur dossier rejeté du fait d’une disposition de la loi Morin du 5 janvier 2010. En effet, ce texte contenait un membre de phrase, relatif au « risque négligeable », qui n’avait pas été initialement prévu et dont j’ai obtenu la suppression, grâce à un vote du Sénat, dans la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer. Cette fameuse disposition bloquait l’indemnisation de nos malades.

Aujourd’hui, à travers cet amendement nous venons apporter une rectification en faveur des victimes des essais nucléaires. Je préconiserais à ceux d’entre vous, mes chers collègues, qui voudraient connaître plus de détails, de lire le rapport que nous avons remis au Premier ministre. (Mme Michèle Vullien applaudit.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Canevet, rapporteur spécial. Sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-501 et II-507.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 74 septies.

Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents. (Mmes Élisabeth Doineau et Lana Tetuanui, ainsi que M. Jean-Yves Leconte applaudissent.)

M. Jean-Paul Émorine. Très bien !

budget annexe : publications officielles et information administrative

Article additionnel après l'article 74 septies - Amendements n° II-501 et n° II-507
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Budget annexe : publications officielles et information administrative - État C (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative », figurant à l’état C.

ÉTAT C

(En euros)

Mission/Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Publications officielles et information administrative

176 011 746

166 006 746

Édition et diffusion

62 240 000

52 535 000

Pilotage et ressources humaines

113 771 746

113 471 746

dont charges de personnel

65 912 746

65 912 746

Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État », « Direction de l’action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quarante, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Budget annexe : publications officielles et information administrative - État C (début)
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Discussion générale

5

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Monsieur le président, le 28 novembre dernier, lors du scrutin n° 28, notre collègue Valérie Létard a été portée comme ayant voté contre l’amendement n° I–393 rectifié, alors qu’elle souhaitait voter pour.

M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

6

Budget annexe : publications officielles et information administrative - État C (interruption de la discussion)
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Seconde partie

Loi de finances pour 2019

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
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Travail et emploi - État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Travail et emploi - État B

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Travail et emploi

Compte d’affectation spéciale : Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Travail et emploi » (et articles 84 et 84 bis) et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2019, les crédits de la mission « Travail et emploi » s’élèveront à 13,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 12,4 milliards d’euros en crédits de paiement.

Par rapport à 2018, la baisse prévue dans ce budget est importante, de l’ordre de 500 millions d’euros en autorisations d’engagement et de près de 3 milliards d’euros en crédits de paiement. Cette évolution était annoncée ; elle s’inscrit dans un double contexte.

D’une part, on constate une amélioration factuelle de la situation de l’emploi. Dans une note d’août 2018, l’INSEE rappelait que le taux de chômage au sens du Bureau international du travail, le BIT, s’élevait à 9,1 % au deuxième trimestre de 2018, contre 10,5 % en 2015, et que le taux d’emploi approchait 66 %, soit, selon l’institut, « son plus haut niveau depuis le début des années quatre-vingt ».

D’autre part, il est nécessaire de maîtriser la dépense publique. À cet égard, la contribution de la mission « Travail et emploi » et de ses opérateurs à cet effort est, il est vrai, significative.

Les effectifs de la mission diminueront ainsi de 233 équivalents temps plein, permettant une économie, hors pensions, de plus de 5 millions d’euros.

Le montant des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs sera également en baisse, de plus de 86 millions d’euros, et leurs plafonds d’emplois connaîtront une diminution sensible de 458 équivalents temps plein travaillé. L’essentiel de l’effort demandé aux opérateurs sera porté par Pôle emploi.

S’agissant des crédits, cette diminution sera plus que compensée par une hausse de la contribution de l’assurance chômage.

Néanmoins, si le nombre de demandeurs d’emploi devait progresser, ou si les missions confiées à l’opérateur dans le cadre de la future réforme de l’assurance chômage devaient s’accroître, il conviendrait sans doute de réexaminer la pertinence de la poursuite de la baisse des effectifs envisagée par le Gouvernement.

La diminution des crédits de la mission « Travail et emploi » ne se fait en outre pas à l’aveugle. Elle poursuit une logique de recentrage des moyens sur les publics les plus éloignés de l’emploi.

Moins nombreux, les contrats aidés ont vocation à devenir de véritables outils d’insertion des demandeurs d’emploi.

La transformation des contrats d’accompagnement dans l’emploi, les CUI-CAE, en parcours emploi compétences, ou PEC, intervenue en début d’année, participe de cette logique. Certes, les conditions pour y avoir recours sont plus restrictives : elles sont la contrepartie d’exigences plus grandes en matière d’accompagnement et de formation du bénéficiaire.

Je rappelle à ce sujet que le Sénat et, en particulier, sa commission des finances appelaient depuis longtemps de leurs vœux la diminution du nombre de contrats aidés utilisés par les gouvernements successifs pour diminuer artificiellement les chiffres du chômage.

En outre, la baisse des contrats aidés sera en partie compensée par un effort en faveur du secteur de l’insertion par l’activité économique, qui bénéficiera de moyens en hausse de 51 millions d’euros par rapport à 2018, permettant le financement de 5 000 équivalents temps plein supplémentaires.

Le présent projet de loi de finances porte également l’ambition de construire une « société de compétences ».

Sur la durée du quinquennat, un effort inédit sera consenti dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences, ou PIC. Ce plan favorisera la formation et l’accompagnement des jeunes et les demandeurs d’emploi les plus éloignés du marché du travail. Au total, le PIC sera doté de 15 milliards d’euros, parmi lesquels 13,8 milliards d’euros seront portés par la mission « Travail et emploi ». En 2019, les crédits du PIC s’élèveront à 1,4 milliard d’euros en autorisations d’engagement et à 979 millions d’euros en crédits de paiement.

Ces crédits permettront le financement de la généralisation effective de la garantie jeunes, ainsi que la montée en puissance du volet « formation » des PIC, 2019 constituant la première année de mise en œuvre des pactes régionaux d’investissement dans les compétences, qui seront conclus avec les conseils régionaux pour une durée de quatre ans, de 2019 à 2022.

Ces crédits budgétaires seront en outre complétés par un fonds de concours de 1,5 milliard d’euros versé par France compétences.

Mes chers collègues, le budget qui nous est présenté est donc un budget responsable, dont les orientations sont claires : mieux accompagner les personnes les plus en difficulté et investir dans l’avenir.

Aussi, je vous propose d’adopter les crédits de la mission « Travail et emploi », sous réserve de l’adoption d’un amendement, que j’ai déposé avec ma collègue rapporteur spécial Sophie Taillé-Polian, visant à renforcer les crédits consacrés aux maisons de l’emploi.

M. Antoine Lefèvre. Très bonne chose !

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je vous propose en outre d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » sans modification. (M. Marc Laménie applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur spécial. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour la deuxième année consécutive, il est prévu une diminution, importante, des crédits consacrés à la politique de l’emploi. L’ampleur exacte de cette baisse a été rappelée par mon collègue Emmanuel Capus : 500 millions d’euros en autorisations d’engagement et 3 milliards d’euros en crédits de paiement.

Certes, le taux de chômage diminue. Cela signifie-t-il pour autant que la situation de l’emploi s’est améliorée au cours des derniers mois ? Rien n’est moins évident.

Le nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois en catégorie A a bien diminué entre le premier trimestre 2015 et le troisième trimestre 2018, mais cette baisse a été plus que compensée par une progression du nombre de demandeurs d’emploi en catégories B et C, c’est-à-dire des demandeurs d’emploi ayant exercé une activité réduite. En outre, le chômage des plus de 50 ans a progressé de 3 % sur un an, toutes catégories confondues, et de près de 9 % pour les seules catégories B et C.

Dès lors, la logique baissière poursuivie par le Gouvernement se fera au détriment des personnes les plus éloignées de l’emploi, comme en témoigne la diminution drastique de l’enveloppe des contrats aidés.

Une amélioration de ce dispositif pouvait s’expliquer, au travers, par exemple, d’exigences renforcées en matière d’accompagnement et de formation des bénéficiaires. Cela ne justifie pourtant en rien une telle diminution, pour la deuxième année consécutive. L’argument selon lequel le taux d’insertion dans l’emploi à la sortie d’un contrat aidé était faible ne tient pas, dans la mesure où les bénéficiaires sont précisément les personnes les plus éloignées du marché du travail.

Le Gouvernement dit avoir voulu recentrer le dispositif sur les bénéficiaires, plutôt que sur les besoins des employeurs, mais il n’en est rien. En effet, si les contrats aidés correspondaient effectivement à des emplois nécessitant une aide d’amorçage, il s’agissait bien de vraies activités. Ce dispositif bénéficiait à des publics éloignés de l’emploi, qu’il était légitime d’accompagner, car cela leur permettait d’avoir un cadre de travail normal, de se sentir utiles et de l’être, au service d’associations ou de collectivités.

L’augmentation des moyens consacrés à l’insertion par l’activité économique, présentée comme la contrepartie de la réduction de l’enveloppe des contrats aidés, est positive. Néanmoins, l’insertion par l’activité économique ne doit pas être mise en concurrence avec les contrats aidés : ceux-ci pouvaient faire l’objet de pérennisations et ouvraient sur des métiers plus diversifiés que ceux que l’on peut trouver dans les entreprises d’accompagnement par l’insertion économique.

En bref, beaucoup moins de personnes seront aidées et accompagnées en 2019.

S’agissant du plan d’investissement dans les compétences, présenté comme l’innovation majeure de ce gouvernement en matière de politique de l’emploi, je rappelle qu’une part importante des crédits qui lui seront dévolus en 2019 était déjà inscrite dans le budget de la mission « Travail et emploi ». Cela était notamment le cas des moyens consacrés à la garantie jeunes, ou du plan « 500 000 formations », auquel a succédé le volet « formation » du PIC.

S’agissant plus spécifiquement de la garantie jeunes, il me semble que ce dispositif gagnerait à être assoupli afin, d’une part, de toucher un public plus nombreux et, d’autre part, d’en simplifier la gestion pour les missions locales.

Outre une diminution drastique des dépenses d’intervention de la mission, le Gouvernement a également fait le choix d’affaiblir les acteurs de la politique du travail et de l’emploi. Les missions locales voient ainsi leur budget global baisser.

À cet égard, la baisse des effectifs du ministère du travail et, notamment, de ceux de l’inspection du travail est un très mauvais signal alors que, d’une part, le travail illégal et la fraude au détachement constituent des enjeux de plus en plus prégnants et que, d’autre part, le droit du travail a fait l’objet de modifications substantielles au cours des années passées qui nécessitent contrôles et accompagnement.

Face à ce paradoxe, le ministère répond que, en France, le ratio des salariés par rapport aux agents de contrôle est conforme au standard fixé par l’Organisation internationale du travail. Néanmoins, au regard de la diversité des missions assignées à l’inspection du travail française, cette comparaison a peu de sens.

Plus généralement, l’affaiblissement des opérateurs du travail et de l’emploi est symptomatique de la politique de l’offre mise en œuvre par le gouvernement actuel et entre en contradiction avec la nécessité d’accompagner davantage les publics les plus éloignés de l’emploi, dont le nombre augmente et dont la situation est de plus en plus précaire.

Au vu des chiffres du chômage, on relève aussi le grand nombre de carrières précaires et de contrats extrêmement courts. Ces mutations font que les allers-retours entre chômage et emploi sont de plus en plus nombreux, ce qui enserre malheureusement un nombre important de nos concitoyens dans une carrière de précarité. C’est contre cela aussi qu’il faudrait lutter.

S’agissant de Pôle emploi, le ministère comme la direction générale de l’opérateur mettent en avant les gains de productivité pour justifier les suppressions de postes. On peut toutefois se demander si ces gains existent vraiment, car ils reposent sur une logique du tout-numérique, qui met de côté bon nombre de populations fragiles. Si la dématérialisation peut permettre de simplifier certaines procédures, elle peut aussi s’avérer dissuasive pour certains demandeurs d’emploi.

On observe également à Pôle emploi une baisse de l’accompagnement des demandeurs. Dans certaines agences où, auparavant, on pouvait immédiatement rencontrer des conseillers sur les questions d’indemnisations, on est à présent obligé de prendre rendez-vous. Ce sont pourtant des situations d’urgence sociale qui sont ainsi repoussées à plus tard !

Concernant l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, qui offre des formations qualifiantes longues permettant un encadrement social des bénéficiaires, le plan de transformation lancé par la direction générale le 16 octobre dernier ne manquera pas, malheureusement, d’affaiblir encore cet opérateur et risque de se traduire par une baisse de la qualité du service rendu et du nombre de bénéficiaires.

Mes chers collègues, le budget qui nous est présenté est donc un mauvais budget, qui nie la situation de millions de Français pour qui trouver un emploi ne se résume pas au fait de traverser la rue ! (M. Martin Lévrier sourit.)

Aussi, bien que vous invitant à adopter l’amendement que j’ai signé avec Emmanuel Capus sur les moyens consacrés aux maisons de l’emploi, qui nous semblent des outils intéressants et importants dans bon nombre de territoires, je vous propose, à titre personnel, de rejeter les crédits de la mission « Travail et emploi ».

Je vous propose en revanche d’adopter sans modification les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain – Mmes Cathy Apourceau-Poly, Céline Brulin, Michelle Gréaume et Martine Berthet applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Forissier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues rapporteurs de la commission des finances, mes chers collègues, alors que la baisse du chômage demeure très lente et fragile, la baisse du budget de la politique de l’emploi ne peut qu’interpeller.

Certes, cette baisse résulte en partie d’un effet de périmètre. Néanmoins, à périmètre constant, elle s’élèverait tout de même à 2 milliards d’euros, soit une baisse d’environ 14 %.

Elle résulte largement de l’extinction, décidée antérieurement, de dispositifs dont l’inefficacité a été démontrée. Le Sénat et ses différentes commissions ont d’ailleurs eu l’occasion d’approuver leur disparition.

Elle résulte, ensuite, de la poursuite de la politique amorcée l’année dernière en matière de recours aux contrats aidés. Si nous avons pu regretter la brutalité de cette mesure, je soutiens le recentrage de cet outil sur les publics les plus éloignés de l’emploi.

Néanmoins, les économies ainsi permises ne sont pas redéployées pour financer des dispositifs réellement efficaces. Vous avez décidé l’année dernière, madame la ministre – nous avons déjà dialogué à ce sujet –, sans étude d’impact, de relancer l’expérimentation des emplois francs, qui avait pourtant échoué de manière éloquente par le passé. La montée en charge de ce nouveau dispositif expérimental est largement en deçà des objectifs annoncés ; on peut donc légitimement douter de son succès.

Le renforcement des crédits en faveur de l’insertion par l’activité économique et des entreprises adaptées doit, en revanche, être salué.

Les autres orateurs ne manqueront pas de souligner les efforts demandés à Pôle emploi, aux missions locales ou encore à l’AFPA, alors qu’un service public de l’emploi fort apparaît toujours nécessaire.

La formation des jeunes et des demandeurs d’emploi est une nécessité. On ne peut donc qu’approuver le plan d’investissement dans les compétences, qui doit connaître en 2019 sa première année pleine de mise en œuvre.

L’ampleur de cet effort doit néanmoins être relativisée. Le PIC est en effet artificiellement gonflé par l’intégration de dispositifs déjà existants, dont certains étaient d’ailleurs financés par d’autres lignes budgétaires l’année dernière.

En outre, le fonds de concours qui doit être apporté par France compétences correspond en fait à une partie des fonds qui étaient déjà collectés par les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA. Ce n’est qu’en raison d’une réforme de la tuyauterie financière que ces fonds apparaissent cette année dans le budget de l’État.

Ce n’est qu’au prix de ces importants biais de présentation que le Gouvernement peut parler d’un effort sans précédent.

Enfin, un certain nombre de décrets nécessaires à la mise en œuvre de la réforme de l’alternance prévue par la loi du 5 septembre 2018 ne sont toujours pas parus. Cela est regrettable pour la sincérité des débats budgétaires, mais surtout pour les acteurs, qui se trouvent dans une situation de forte incertitude.

Malgré ces observations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi », des articles rattachés, ainsi que du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », qui apparaît au sein du projet de loi de finances pour la dernière fois cette année. (Mmes Patricia Morhet-Richaud et Frédérique Puissat applaudissent. – Des sénateurs du groupe Union Centriste applaudissent également.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de 20 minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Olivier Henno. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. Olivier Henno. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord remercier notre rapporteur pour avis Michel Forissier pour le climat de la discussion et la qualité de nos travaux en commission des affaires sociales.

Nos échanges ont permis, à mon sens, de jouer pleinement notre rôle d’enrichissement du texte adopté par l’Assemblée nationale, notamment sur la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2019.

Mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera donc en faveur de ce texte, car il contient des avancées réelles, notamment sur les compétences.

Il n’en demeure pas moins que les crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2019 diminuent de 500 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2,9 milliards d’euros en crédits de paiement. À périmètre constant de service, cette mission perd 2 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019. D’un autre côté, on ne peut pas prôner inlassablement la maîtrise de la dépense publique tout en s’opposant à tout questionnement à son sujet !

M. Michel Canevet. C’est vrai !

M. Olivier Henno. Cette diminution pose toutefois question aux élus que nous sommes, dans un contexte de reprise économique, certes, mais aussi de baisse encore lente et fragile du chômage.

Nous faisons, en outre, le constat des disparités régionales en matière de créations d’emplois : celles-ci interviennent en priorité sur les façades atlantique et méditerranéenne de notre pays ainsi que dans les métropoles, en fort contraste avec le reste du territoire, ce qui nous préoccupe.

La question de l’efficacité du service public de l’emploi reste posée dans notre pays. Nous le savons bien, reprise économique ne rime pas avec embellie de la situation de l’emploi dans tout le pays, même s’il faut laisser du temps aux politiques publiques en faveur de l’insertion, et notamment de l’insertion par l’activité économique, au travers de dispositifs individuels d’insertion professionnelle, car celles-ci en ont besoin pour apporter des résultats probants.

Nous serons bien évidemment vigilants sur le déploiement des crédits d’insertion par l’activité économique dans le courant de l’année 2019 afin de mesurer l’impact de leur augmentation.

Un autre constat s’impose, sur le fond comme sur la forme, à propos du fameux PIC, le plan d’investissement dans les compétences : annoncé comme un big-bang par le Gouvernement, ce plan se traduit finalement dans ce projet de loi de finances – mais la loi a été votée il y a seulement quelques mois – comme la continuité budgétaire des dispositifs existants et ne permet pas de repérer une volonté accrue du Gouvernement de renforcer son implication financière dans cette politique publique, au moins cette année.

Les nouvelles modalités de collecte et d’affectation de la contribution des entreprises au financement de la formation professionnelle permettront, certes, d’afficher un fonds abondé à hauteur de 1,5 milliard d’euros en provenance de la future agence France compétences, mais, en toute franchise, ce fonds ne bénéficiera pas de moyens supplémentaires par rapport à la réalité des crédits dépensés jusqu’en 2018 par les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA, et par le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le FPSPP. Nous veillerons donc également à ce que l’argent public soit mieux utilisé, ce qui, à défaut de moyens nouveaux, est le gage d’une plus grande efficacité des politiques publiques en faveur de la formation professionnelle. C’est là tout le défi qui est posé à la société de compétences.

Mes chers collègues, il est difficile pour l’ancien vice-président du département du Nord en charge de l’insertion et du RSA que je suis de ne pas digresser un peu pour partager avec vous une analyse plus proche du terrain.

Pour partie, les mécontentements présents portent des revendications liées à la crise du pouvoir d’achat dont nos concitoyens font l’expérience depuis plusieurs années et qui est ancrée dans les habitudes de vie des plus modestes d’entre eux.

Cette crise est devenue particulièrement aiguë avec l’annonce de nouvelles hausses de fiscalité. Nous sommes passés en quelques semaines d’un mal du pouvoir d’achat à une rage du pouvoir d’achat. Cette situation appelle aujourd’hui un traitement de fond de la question de l’emploi, du pouvoir d’achat et de la place de la valeur travail dans notre société.

Discuter avec des « gilets jaunes » – des gilets jaunes « canal historique », pas des casseurs perpétuellement à la recherche du conflit – c’est discuter avec des Françaises et des Français qui vivent mal de leur travail, qui sont exaspérés par les inégalités sociales, certes, mais aussi excédés de gagner à peine 100 euros ou 150 euros de plus, quand ils sont au SMIC, que leur voisin de palier qui vit d’aides sociales.

Le travail doit payer plus que l’inactivité, cela semble aller de soi, mais cela va mieux en le disant ! Refuser cette évidence et ne pas donner plus de valeur au travail qu’à toute autre forme de revenu, ce n’est pas favoriser l’emploi. (MM. Laurent Duplomb et Vincent Segouin applaudissent.) C’est un sujet de fond : faire de l’emploi et du travail une priorité, cela signifie adapter toutes les politiques publiques, fiscales, sociales, environnementales, en faveur de celles et ceux qui travaillent.

Je suis un peu sorti de mon texte, mais, voyez-vous, nous sommes aussi ici pour sortir des sentiers battus et affirmer nos valeurs !

Je termine, mes chers collègues, en vous indiquant que nous suivrons l’avis du rapporteur de la commission des affaires sociales : nous voterons en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » et en faveur de l’article 84 réformant les modalités de versement de l’aide aux entreprises au titre du dispositif d’activité partielle, ainsi que de l’article 84 bis, que nos collègues députés ont ajouté au projet initial, portant le financement de l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap.

Nous voterons, enfin, en faveur du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». Nous sommes heureux de constater un frissonnement sur ce sujet, susceptible d’apporter une solution, voire la solution, aux problèmes d’emploi et aux défis de la société de compétences, en ce qui concerne les emplois les moins qualifiés, au moins, mais peut-être aussi pour les autres. Nous saluons ces recettes dynamiques, qu’il faudra conforter, car elles résultent d’un élargissement de l’assiette des cotisants. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Alain Fouché applaudit également.)