M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France a toujours été une nation donnant à la pratique physique et à la compétition sportive une place éminente au cœur de sa société. Il y a, dans notre pays, une culture active du sport qui se trouve au croisement d’importants enjeux sociétaux, sociaux et économiques.

Dans ce cadre, la puissance publique est un partenaire engagé, présent aussi bien à l’échelle locale des associations sportives, qui dynamisent nos territoires et constituent un fort levier de cohésion sociale, qu’à l’échelon international du sport de haut niveau, garant du rayonnement et de l’influence de la France.

De grands chantiers se trouvent aujourd’hui engagés, et ils représentent de fortes opportunités pour le constant développement de la culture et de la pratique sportives.

Les jeux Olympiques de 2024 constituent bien sûr un rendez-vous majeur. L’événement donnera à notre pays et à sa capitale une visibilité considérable. Nous connaissons tous les enjeux économiques et d’influence qui sont liés à l’organisation des jeux Olympiques, mais il convient d’aller plus loin et de souligner à quel point cet événement sportif constitue un catalyseur en matière, par exemple, de développement des infrastructures et des transports. Les jeux Olympiques créent du lien, de toutes les manières possibles.

La réussite de ces jeux Olympiques et Paralympiques ne passera pas seulement par le nombre de médailles récoltées. L’engouement qu’ils susciteront dans notre pays est une opportunité, dont il faut se saisir, pour amener vers la pratique sportive ceux qui en sont, ou s’en sont, éloignés. Je rappelle que l’ambition a été affirmée jusqu’au sommet de l’État de porter le nombre de pratiquants à 3 millions d’ici à 2022.

Le second chantier réside dans la création d’une agence nationale du sport en remplacement du Centre national pour le développement du sport, CNDS.

J’ai eu plaisir à vous entendre, madame la ministre, lors des débats avec nos collègues députés, développer les contours de cette future agence, ainsi que les objectifs que vous lui assignez. Je ne doute pas que vous aurez l’occasion d’éclairer la chambre haute sur les missions et la forme de cette agence.

J’ajoute simplement que, si le CNDS avait quelques défauts, dont celui d’avoir accumulé quelques dizaines, voire centaines de millions d’euros de factures impayées, il avait aussi le mérite d’avoir fortement soutenu la pratique sportive, notamment dans nos territoires. Je formule ainsi le vœu, madame la ministre, que ce lien étroit avec les territoires ne soit pas rompu avec la création de l’agence et que son action s’inscrive, au moins sur ce plan, dans la droite ligne d’une coopération renforcée avec les élus et les associations.

Une ambition commune s’affirme à travers ces chantiers : démocratiser la pratique sportive et la rendre non seulement plus accessible, mais aussi plus évidente.

Et nous pouvons nous réjouir de la double volonté de renforcer le nombre de licenciés dans les clubs, celles et ceux qui constituent le terreau fertile sur lequel éclosent les champions qui font rayonner le France, et d’inciter un nombre croissant de personnes à faire du sport, un indispensable facteur de santé, de bien-être et de plaisir.

Cette ambition nécessite des moyens, et le budget qui nous est présenté sert d’impulsion.

J’ai pris connaissance de manière très attentive, comme nous tous, dans cette enceinte, sans doute, des tribunes et lettres ouvertes publiées par de grands quotidiens. D’un côté, trois cent quatre-vingts sportifs, de l’autre, quatre-vingts présidents de fédération, ainsi que quatre-vingts médaillés olympiques, et non des moindres, se sont adressés au Président de la République et aux élus de la Nation, s’inquiétant d’une possible remise en cause des moyens alloués aux fédérations et d’une baisse du budget du ministère.

Si nous ne pouvons que souscrire à leur volonté de voir la France conserver sa place dans le concert des grandes nations sportives, voire de l’améliorer, si nous devons entendre ces inquiétudes, il faut aussi examiner les moyens alloués à travers le prisme de la réforme en profondeur de notre politique sportive, sur laquelle je m’exprimais à l’instant. La question qui guide la majorité et le Gouvernement depuis le début de ce quinquennat est en effet de savoir non pas s’il faut dépenser plus, mais comment dépenser mieux.

J’entends bien, déjà, les critiques de nos collègues qui nous accusent de mettre à mal le modèle sportif français à la lumière de cette diminution constatée du montant du budget des sports. Cette diminution, cependant, j’oserai la qualifier de trompe-l’œil, car je fais confiance aux explications données par le ministère – pourquoi ne le ferais-je pas ? – sur la surévaluation de l’ordre de 30 millions d’euros dans le budget précédent de certaines dépenses en matière de remboursement de cotisations sociales pour les joueurs et les arbitres.

Nous devons par ailleurs garder à l’esprit la disparition en début d’année prochaine du CNDS, remplacé avant l’automne par l’agence nationale du sport, l’ANS. Chacun imagine bien que le CNDS n’engagera pas d’argent en début d’année, sachant sa disparition proche, et alors que l’ANS sera à même de reprendre cette activité mi-2019, selon toute vraisemblance.

Les moyens de cette nouvelle agence sont non seulement préservés, mais également augmentés, puisque le Gouvernement et Mme la ministre nous proposent d’augmenter de 55 millions d’euros les fonds alloués, d’une part, à la haute performance, et, d’autre part, au développement des pratiques. Ce sont 25 millions d’euros d’un côté, 30 millions d’euros de l’autre, au bénéfice de la nouvelle agence nationale du sport, qui sera ainsi portée sur les fonts baptismaux sous les meilleurs auspices.

D’une manière générale, avec ce budget des sports, il convient de souligner la volonté du ministère de réorienter son action vers les pratiquants en général, et de mieux répartir les moyens entre le sport professionnel et le sport amateur. Ce budget manie l’ambition « en même temps » de donner aux sportifs les moyens de s’épanouir, à tout niveau, dans leur discipline, et d’engager, avec toute la prudence requise lorsque l’on gère l’argent public, les fonds nécessaires pour leur donner cette possibilité.

Aucun moyen n’est donc ôté au milieu sportif, comme on a pu l’entendre dire par ailleurs, ou comme certains grands sportifs ont pu s’en inquiéter. Plus de projets pourront être menés en 2019, et, par effet de levier, nous savons bien que les collectivités locales, d’ailleurs souvent subventionnées par l’État, alimentent largement les budgets des associations, directement sur le terrain.

Je crois donc pouvoir affirmer, avec l’ensemble de mes collègues du groupe La République en Marche, que le budget que nous propose d’adopter le Gouvernement est à la hauteur de toutes nos ambitions et qu’il servira les intérêts de toutes celles et de tous ceux qui contribuent à diffuser toujours davantage la culture sportive au cœur de notre société.

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après un budget des sports en baisse en 2018, une nouvelle diminution s’annonce pour 2019. C’est tout à fait contradictoire avec l’ambition affichée d’aller vers 3 millions de sportifs supplémentaires, et cela risque de donner un goût amer aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024, comme aux autres grandes compétitions que la France accueillera dans les prochaines années. Mais nous sommes malheureusement désormais habitués à ce décalage entre les annonces et la réalité …

Plus largement, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, les orientations mêmes que vous donnez à l’organisation du sport en France inquiètent de nombreux acteurs, jusqu’à provoquer une réaction sans précédent du mouvement sportif, tant de la part des professionnels que des bénévoles.

L’augmentation des crédits destinés au sport professionnel et de haut niveau ne masque pas les ponctions, à hauteur de 40 millions d’euros, sur le sport amateur.

Derrière ces chiffres, je l’affirme, il y a la volonté de mettre fin au modèle français du sport populaire, amateur, représenté notamment par 3,5 millions de bénévoles engagés dans leurs clubs locaux, dans nos villes, nos quartiers comme nos villages, au profit d’un modèle d’inspiration britannique, c’est-à-dire un modèle centré sur la performance, le haut niveau, où la salle de sport offre un service payant à ses clients, en lieu et place d’une licence dans un club ou une association.

Ce modèle démontre outre-Manche son incohérence et son inefficacité. En effet, assécher le sport de masse, c’est, à terme, se priver de la performance et du plus haut niveau.

C’est pourtant ce chemin que nous risquons d’emprunter, l’État n’entendant plus assumer sa mission de définition d’une politique sportive ni assurer le service public déclinant celle-ci. C’est bien de cela qu’il s’agit, avec le « transfert » de 1 600 postes de conseillers techniques sportifs, ou CTS, de l’État – 60 % des effectifs, tout de même –, qui signe un nouvel abandon de l’État, après la fermeture d’un tiers des CREPS, les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives, et la suppression de 40 % des agents « Jeunesse et sports » sur la dernière décennie.

Ces CTS jouent pourtant un rôle essentiel dans la formation des éducateurs sportifs, la détection des jeunes talents et les plans locaux de développement du sport.

Je mets le terme « transfert » entre guillemets, car nous avons bien noté que, face au mécontentement, le Gouvernement a indiqué que ces conseillers seraient non pas supprimés, mais réorientés. Toutefois, imaginer que les fédérations pourront les accueillir et les financer est tout simplement irresponsable, tout particulièrement dans un contexte où, cette année encore – faut-il le rappeler ? –, les associations sportives souffriront de la disparition des contrats aidés.

L’État souhaite donc se désengager de la pratique sportive, abandonner la promotion de notre modèle sportif populaire et accessible, mais au bénéfice de qui ?

Faut-il voir un signe dans la place donnée aux entreprises au sein de la nouvelle agence ? Nous le craignons. À affaiblir constamment le sport public, c’est son versant privé que l’on favorise, comme je l’ai déjà dit. Il vaudrait mieux libérer le sport de l’argent plutôt que d’y faire entrer davantage d’intérêts mercantiles.

Cette évolution est renforcée par la diminution des moyens des collectivités territoriales. Elles investissent plus de 12 milliards d’euros par an dans le sport, mais les premiers effets des baisses de dotations qu’elles subissent se font sentir, puisqu’un quart d’entre elles ont déjà diminué leurs subventions au sport. Au bout de la chaîne, les clubs, pour subsister, n’auront d’autre choix que d’augmenter le prix des licences. C’est évidemment impensable, sauf à vraiment refuser d’entendre le cri de colère de la France sur le pouvoir d’achat.

Quant aux 15 millions d’euros accordés à la réduction des inégalités d’accès à la pratique sportive sur les territoires carencés, axés notamment sur la natation, ce montant est si faible pour des enjeux si importants que cela n’est tout simplement pas sérieux.

Enfin, une des portes d’entrée dans la pratique sportive, c’est l’éducation physique et sportive, l’EPS. Là non plus, les perspectives ne sont pas brillantes. Toujours pas d’épreuve finale au baccalauréat, et la réforme du lycée amène à faire de l’EPS la seule discipline du bloc obligatoire à ne pas avoir de spécialisation.

Je terminerai, trop brièvement malheureusement, en évoquant les crédits de la jeunesse et de la vie associative. L’équation est une nouvelle fois simple : l’intervention de l’État, concentrée sur le service civique, ne vient même pas compenser la baisse des dons induite par la suppression d’une part importante de l’ISF, la diminution considérable des emplois aidés et la multiplication des missions que l’État confie aux associations, la ligne budgétaire consacrée au développement de la vie associative diminuant même d’un million d’euros. Vous ne serez donc pas surpris que le groupe CRCE vote contre ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve.

Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous évoquons ce jour les crédits alloués à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances.

Sur le volet sportif, l’an passé, nous déplorions un recul des moyens d’environ 7 %. L’essentiel de cette baisse a touché la part territoriale du CNDS.

Le budget qui nous est soumis pour 2019 s’inscrit dans la même tendance au repli. L’effort consacré à la pratique sportive dans nos territoires semble une nouvelle fois pâtir des moyens mobilisés pour accueillir les jeux de la XXXIIIe Olympiade en Île-de-France et à Marseille.

C’est un signal particulièrement inquiétant, au moment où la désaffection populaire pour ce type de manifestation est toujours plus significative. Pour mémoire, après quatre référendums perdus par des comités d’organisation, seule la ville de Milan est aujourd’hui un candidat certain pour accueillir les jeux Olympiques d’hiver en 2026.

Comment prétendre faire des jeux Olympiques en France un succès populaire si la concrétisation de ceux-ci est perçue comme faite au détriment du sport pour tous, que les valeurs olympiques sont pourtant censées aussi promouvoir ?

Le groupe du RDSE soutient donc pleinement la proposition réitérée par notre collègue rapporteur pour avis, Jean-Jacques Lozach, d’élaborer une loi de programmation budgétaire dédiée à cet événement et à la Coupe du monde de rugby, qui le précédera d’un an.

Il est nécessaire de sanctuariser les moyens alloués à ces manifestations, en isolant notamment les crédits alimentant la SOLIDEO, pour ne pas risquer de compromettre l’image de ces jeux, qui ont avant tout vocation à valoriser la pratique sportive dans notre pays. La SOLIDEO connaît une croissance pour le moins timide, puisque son budget s’établit à 113 millions d’euros, quand nos engagements auprès du CIO, le Comité international olympique, portent sur 1,1 milliard d’euros à l’échéance de 2022.

Le second point d’inquiétude des élus du groupe du RDSE porte sur la réforme de la gouvernance du sport à venir.

Nous sommes convaincus de l’utilité de la démarche, alors que la pratique sportive, amateur comme professionnelle, a connu de profondes mutations ces dernières années. Toutefois, cette réforme ne doit pas conduire l’État à se désengager progressivement du financement et de la gouvernance du mouvement sportif.

A minima, les dépenses supportées par le programme 219 et le CNDS devront donc être maintenues au sein de la future structure. Nous nous interrogeons, en outre, sur l’avenir même du ministère des sports après 2020, lorsque la nouvelle agence sera pleinement opérationnelle.

Ce désengagement devrait également se traduire par la suppression de 1 600 conseillers techniques sportifs à l’horizon 2022, ce qui représente plus de la moitié des agents du ministère. Compte tenu de l’ampleur de la réforme envisagée, nous souhaiterions disposer enfin d’informations plus détaillées, tout particulièrement sur l’association des collectivités territoriales, des fédérations et des entreprises au sein de la future agence.

Sur le volet jeunesse et vie associative, nous constatons la montée en puissance du service civique, qui sera en mesure d’accueillir 140 000 volontaires l’an prochain.

Nous continuons d’apporter notre soutien à ce dispositif créé en 2010. Nous demeurons en revanche beaucoup plus réservés sur la perspective de concrétiser l’engagement du Président de la République sur la mise en œuvre d’un service national universel, compte tenu du coût très important du déploiement de celui-ci.

Concernant la vie associative, force est de constater, en dépit de multiples mises en garde, que le Fonds pour le développement de la vie associative, qui ne fait pas l’objet d’une revalorisation dans ce projet de loi de finances, est très loin de pallier la disparition de la dotation d’action parlementaire.

Mme Mireille Jouve. Contrairement à ce qui avait été annoncé à la représentation nationale, les montants alloués précédemment à la réserve parlementaire n’ont pas été reconduits sous d’autres formes. Dans le même temps, la forte baisse des crédits relatifs aux contrats aidés se poursuit, alors que 40 % d’entre eux bénéficient aussi aux associations.

Comme l’a très justement rappelé notre rapporteur, cet assèchement équivaut à la suppression de 1,5 milliard d’euros de subventions indirectes.

Le remplacement de l’ISF par l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, se traduit également par une baisse de 50 % des dons, ce qui représente, pour l’année en cours, une perte de 130 millions à 150 millions d’euros pour le milieu associatif.

Tous ces signaux sont extrêmement inquiétants et pourraient, à terme, conduire à décourager les nombreux bénévoles impliqués. Plus largement, nous devons éviter de dissuader celles et ceux qui, à l’instar des élus de communes modestes, remplissent aujourd’hui une mission d’intérêt général, de manière bénévole ou quasi bénévole, de poursuivre leur engagement faute de moyens suffisamment adaptés. Ne sous-estimons pas le rôle crucial joué par ces derniers dans la cohésion nationale.

Mes chers collègues, ce projet de budget comporte des points positifs. Toutefois, les motifs d’inquiétude qu’il suscite sont trop prégnants pour ne pas être mis en avant. J’attire l’attention des membres du Gouvernement sur l’unanimité qui a prévalu à la commission de la culture de la Haute Assemblée au moment d’émettre un avis défavorable sur l’adoption des crédits de cette mission.

Cette unanimité doit vous conduire à vous interroger, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État. Elle ne participe ni d’une volonté d’affichage ni d’une volonté d’obstruction politique. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste. – Mme la présidente de la commission de la culture applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon.

M. Laurent Lafon. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, c’est au nom de mon collègue Claude Kern, qui a dû s’absenter, que je m’exprime devant vous.

La mission « Sport, jeunesse et vie associative » voit cette année ses crédits augmenter de près de 4,1 %, soit plus de 39,7 millions d’euros supplémentaires. Si nous saluons cette hausse, la diversité des thématiques réunies ici impose de regarder davantage dans le détail.

Ainsi, le programme dédié au sport connaît un recul de 8,1 %, pour atteindre 319,2 millions d’euros. Madame la ministre, vous aviez défendu, lors de vos auditions, un budget préservé pour les sports, justifiant la baisse des crédits de votre ministère par des ajustements techniques. Cependant, cette baisse s’annonce lourde de conséquences pour le monde sportif français. En effet, la diminution du budget dédié à la promotion du sport pour tous de 44,9 % est particulièrement alarmante.

Je n’ai pas besoin de vous convaincre du rôle social extrêmement important que les clubs de proximité jouent dans nos villages et dans nos villes, dans nos quartiers et dans nos territoires, en particulier les plus délaissés. Ils constituent des lieux de sociabilité pour les jeunes, comme pour leurs familles, et participent de l’éducation de nos enfants à travers la promotion des valeurs éducatives, sociétales et citoyennes. Ils ont de plus une forte incidence en matière de santé publique.

Ce réseau de proximité est aussi essentiel à la bonne santé, ô combien importante, du sport de haut niveau français, alors que se profilent les jeux de Tokyo en 2020, puis, surtout, de Paris en 2024. Il s’agit de préparer nos sportifs de haut niveau à l’excellence, si nous voulons en faire de vrais champions. Or tout champion, quelle que soit sa pratique, a nécessairement commencé un jour au club de son village ou de son quartier, club qui l’a ensuite accompagné tout au long de son parcours. L’augmentation du budget dédié au sport de haut niveau, de 4,6 %, n’est donc à ce titre qu’une demi-satisfaction, tant elle est altérée par l’opposition créée entre deux pratiques qui sont pourtant complémentaires.

Au-delà du strict examen budgétaire, de nombreuses questions soulevées dans le cadre de cette mission restent sans réponse.

Ainsi, quel sera l’effet de l’intégration du CNDS au sein de la future agence nationale du sport sur les financements des clubs et associations ? Cette agence devrait reprendre en effet le budget du CNDS, bras financier du ministère des sports chargé d’en répartir les financements, soit 130 millions d’euros. Quid de la répartition des aides à l’avenir ?

Les 15 millions d’euros supplémentaires votés en première partie du PLF vont-ils réellement servir au sport pour tous, comme cela a été évoqué en commission à l’Assemblée nationale, ou plutôt à payer les restes à charge du CNDS, comme cela a été soutenu en séance publique, toujours à l’Assemblée nationale ?

De même, les inquiétudes sur le devenir des 1 600 conseillers techniques sportifs n’ont pas encore trouvé de raison de s’apaiser. Je veux parler du transfert de ces CTS vers les fédérations et les collectivités, alors que la grande majorité n’aura pas les moyens de se payer un cadre d’État, solution par ailleurs inacceptable. Ces agents jouent pourtant un rôle extrêmement important dans le monde sportif, notamment dans la démocratisation du sport, la formation des cadres sportifs et la détection de nouveaux talents, qui porteront haut les couleurs de la France. Leur disparition risque fort de rajouter à la fracture entre sport de haut niveau et sport de proximité. Nous nous acheminons donc vers une politique à deux vitesses, en contradiction avec le principe d’un service public à destination du plus grand nombre.

Le sport n’est pas le seul domaine concerné par cette mission. La jeunesse et la vie associative voient ainsi leur budget, rattaché au ministère de l’éducation nationale, augmenter de 8,9 %, pour atteindre 614 millions d’euros. À ce titre, nous saluons l’effort significatif porté sur le service civique.

Cependant, la diminution des crédits dédiés au développement de la vie associative, qui étaient déjà faibles, doit être mentionnée. Les associations, nous le savons, sont essentielles à notre cohésion nationale, mais force est de constater que, si on leur demande beaucoup, on leur donne peu. J’en profite pour saluer l’action et le dévouement des nombreux bénévoles au service de notre jeunesse, notamment.

La suppression de la réserve parlementaire vient encore aggraver cette situation, et ce d’autant plus que le FDVA, censé la remplacer, ne dispose que de la moitié de ses moyens. De plus, l’attribution des aides manque de transparence.

Une fois encore, la mission que nous examinons aujourd’hui, en particulier son volet sport, sert de variable d’ajustement budgétaire. Cela est difficilement supportable, dans la mesure où le budget dédié au sport ne représente que 0,13 % du PIB, ce qui est objectivement très peu au regard des enjeux que représentent l’organisation des jeux Olympiques de 2024 ou, plus généralement, le rôle du sport dans la société, notamment pour la santé publique.

Je le dis sans ambages, madame la ministre, le Gouvernement n’a pas choisi la bonne méthode. Alors même que la France ambitionne de ramener quatre-vingts médailles des prochains jeux Olympiques de 2024 et vise une augmentation sans précédent du nombre de licenciés, il faut se donner les moyens de nager dans le grand bain, si vous me permettez de reprendre cette expression.

Des efforts doivent donc être entrepris, et ce dès maintenant. Vous l’aurez compris, le groupe Union Centriste, que je représente, ne votera pas le budget de cette mission en l’état, car les moyens présentés ne sont pas à la hauteur des ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » connaissent une hausse de 22,3 % en autorisations d’engagement et de 4,1 % en crédits de paiement par rapport à l’année dernière. La hausse globale de l’enveloppe budgétaire masque des évolutions hétérogènes au sein de la mission. Si le financement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et les dépenses du service civique captent l’essentiel des crédits, le programme sport, hors jeux Olympiques, connaît une attrition de plus de 8 %, et les soutiens au secteur associatif restent bien en deçà des espérances et des besoins.

Sur la question sportive, nous constatons une réduction des crédits pour la deuxième année consécutive, hors financement des infrastructures pour les jeux Olympiques de 2024, alors que les priorités sont nombreuses dans ce domaine. Sous couvert d’efficacité et de bonne gestion financière, il ne faudrait pas que nous en arrivions à réduire certaines mesures visant à promouvoir les pratiques sportives ou à ne pas accompagner les petits clubs sportifs.

Nous suivrons avec attention la mise en place de l’agence nationale du sport au 1er mars 2019. Cette structure remplacera le Centre national pour le développement du sport. Ces objectifs doivent bien être complémentaires : le travail mené pour les jeux Olympiques de Paris en 2024 doit se faire en parallèle avec la promotion de la pratique d’activités sportives. L’objectif de 3 millions de pratiquants supplémentaires d’ici à 2022 est ambitieux, mais doit être atteint. Cette agence doit notamment être pourvue des moyens financiers nécessaires, notamment pour ce qui concerne le sport pour tous et les nouvelles mesures en faveur de la réduction des inégalités d’accès à la pratique sportive sur les territoires carencés.

Nous resterons aussi vigilants sur l’avenir des 1 600 conseillers techniques sportifs, pour lesquels les annonces du Gouvernement ont suscité des inquiétudes dans le milieu sportif.

Nous soulignons également qu’il ne faut pas négliger le soutien aux petites associations sportives – je suis issu du milieu rural et je les connais particulièrement bien –, qui doivent faire face à un contexte difficile, alors qu’elles assurent le maillage territorial de nombreuses pratiques sportives.

La conciliation entre l’organisation des jeux Olympiques et la maîtrise des comptes publics ne doit pas s’opérer au détriment des associations de nos territoires.

Les jeux de 2024, qui seront sans conteste un grand événement pour la France et ses territoires, ne seront une réussite qu’avec la participation active du tissu sportif de terrain.

Par ailleurs, la France est riche, en plus de son tissu sportif, de plus d’un million d’associations, animées par 13 millions de bénévoles passionnés et 80 000 jeunes en service civique. Les salariés du secteur représentent 9,7 % des salariés du privé.

Pour autant, le tissu associatif pâtit de la suppression de la réserve parlementaire et de la baisse du nombre de contrats aidés, qui ont dégradé les conditions de fonctionnement et de financement de bon nombre d’associations locales.

La France ne peut se concevoir sans l’engagement de ces citoyens, qui ne comptent pas leurs heures ni dans leur portefeuille pour donner du temps, de la compétence et faire preuve de générosité. Mes chers collègues, le tissu associatif est le ciment de la République, le dernier rempart contre l’isolement, le populisme et la montée des égoïsmes. Si l’État ne peut être partout, il doit cependant prendre ses responsabilités pour valoriser l’action de ceux qui agissent là où il ne peut lui-même aller, au cœur du terrain, au plus près des besoins et des initiatives.

La majoration de 25 millions d’euros de la dotation du Fonds pour le développement de la vie associative permettra de compenser, partiellement seulement, la suppression de la réserve parlementaire, mais cela reste insuffisant pour pallier la diminution des contrats aidés et la fragilisation des ressources des plus petites associations.

J’ai été longtemps élu local, et j’ai remplacé les mandats que je n’exerce plus à cause de l’interdiction du cumul par un engagement accru dans la vie associative. Très sincèrement, je souffre, à titre personnel, pour les associations, nombreuses, dont je m’occupe – Banque alimentaire, aide au soutien médical dans des zones désertifiées. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le secteur souffre vraiment de cette situation. Voilà bientôt quarante ans que je suis élu, et je n’ai jamais connu de telles difficultés pour aider le monde bénévole à avancer. En disant cela, je ne fais que partager le fruit de ma longue expérience, dont témoignent mes cheveux blancs et ma présence dans cette assemblée, que j’ai rejointe après avoir siégé très longtemps dans l’autre.

Madame la ministre, je vous remercie des efforts que vous faites, mais, malheureusement, le groupe Les Indépendants – République et Territoires, au nom duquel je m’exprime, ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)