M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Sur ce dossier, je rappelle d’abord qu’un accord de financement entre l’ONCFS et l’AFB vient d’être trouvé. Il ne nous a pas échappé. Il est l’une des raisons qui ont conduit, si j’ai bien compris, au départ de Nicolas Hulot.

Ces deux amendements tendent à le remettre en cause. Or, par principe, je pense que lorsqu’un accord intervient, il doit être mis en œuvre. Ma chère collègue, on peut considérer, comme vous l’avez d’ailleurs dit, que le projet de loi ordinaire que vous visez permettra au Gouvernement, comme il s’y est engagé, de trouver un équilibre sur les modalités pratiques et de participation financière. Je lui fais confiance. Nous verrons de quelle manière les choses évoluent.

Cela étant, je rappelle qu’il va manquer 20 millions d’euros au budget de l’ONCFS, ce qui n’est pas sans soulever des interrogations au moment où l’on prépare la fusion de l’Office avec l’Agence française pour la biodiversité. Il faut pourtant que la nouvelle structure ait demain les moyens de bien travailler.

En conclusion, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Vous l’avez rappelé, un accord global est intervenu il y a quelques semaines, afin de moderniser l’organisation de la chasse et développer la protection de la biodiversité. Cet accord prévoit notamment la réduction du prix du permis de chasse national, ce qui devrait permettre d’améliorer l’attractivité de ce permis et la mobilité des chasseurs, qui sont utiles pour maîtriser les populations de grands gibiers et réduire les dégâts que causent ces derniers.

Cet accord prévoit aussi la création d’un grand établissement de développement et de protection de la biodiversité, que nous allons proposer d’appeler l’office français de la biodiversité. Le projet de loi prévoyant sa création sera discuté cette semaine en commission à l’Assemblée nationale. Dans ce texte, nous rappelons et nous confirmons les missions régaliennes de cet établissement, que ce soit en matière de développement et de protection de la biodiversité ou de régulation de la chasse.

La remise à plat budgétaire se fera plutôt dans le projet de loi de finances pour 2020. Cette année, la baisse du prix du permis de chasse ne sera pas compensée dans le budget de l’ONCFS, son important fonds de roulement autorisant un prélèvement à titre exceptionnel pour l’exercice 2019 tout en permettant le maintien de la totalité de ses dépenses classiques et normales.

Enfin, les 5 euros de contribution sur chaque permis de chasse afin de financer des actions en faveur de la biodiversité sont bien mentionnés dans le projet de loi précité. C’est la raison pour laquelle ils ne figurent pas dans le présent projet de loi de finances.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-150 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-317 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° II-119 est présenté par Mme Préville, MM. Bérit-Débat, Kanner et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° II-151 rectifié est présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéas 13 à 17

Supprimer ces alinéas.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° II-119.

Mme Angèle Préville. L’article 75, en ses alinéas 13 à 17, modifie les modalités de répartition des contributions des agences de l’eau à l’Agence française pour la biodiversité et à l’ONCFS. Il vient ainsi rompre avec le principe, de plus en plus détourné, selon lequel « l’eau paie l’eau ». De manière générale, la pédagogie relative aux taxes doit être plus claire si on veut le consentement. Il faut pour cela affecter le produit d’une taxe à ce à quoi elle est destinée.

En matière de fiscalité, trois maîtres-mots doivent prévaloir : transparence, justice, efficacité.

Les agences de l’eau n’ont pas à compenser la diminution des redevances cynégétiques mise en œuvre dans le présent article. Selon certains chiffrages, le montant à compenser pourrait s’élever à 21 millions d’euros.

Cette situation est d’autant plus anormale que le budget des agences de l’eau est de plus en plus contraint et qu’il paraît nécessaire aujourd’hui de le sanctuariser. Or, dans le cadre du plan 2019-2024, le plafond des recettes a été fixé à 12,6 milliards d’euros sur six ans, soit une baisse de 1 milliard d’euros par rapport à la période 2013-2018.

Les missions des agences de l’eau sont pourtant grandissantes et les besoins sur nos territoires impérieux, car il est nécessaire de poursuivre les travaux d’assainissement, de rénovation et de mise en conformité des réseaux pour lutter contre les pollutions et préserver les ressources en eau. Partout en France, notamment dans les territoires ruraux, des communes et des collectivités territoriales ont besoin et espèrent des subventions des agences de l’eau pour pouvoir boucler financièrement leurs projets et mener à bien leurs travaux.

Les enjeux sont considérables. Ainsi, à titre d’exemple, dans le bassin Adour-Garonne, alors que Bordeaux et Toulouse comptent chacune 15 000 habitants supplémentaires par an, que les périodes de sécheresse se reproduisent, année après année, il est urgent d’anticiper un avenir qui pourrait se révéler très problématique.

Les agences de l’eau ont la responsabilité de prévoir d’importants investissements, et elles le font, tout comme les élus des communes et des communautés de communes, car ils se préoccupent du bien commun.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression des alinéas visés.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° II-151 rectifié.

M. Guillaume Gontard. Nous l’avons rappelé, nous sommes très attachés au principe selon lequel « l’eau paie l’eau ». Ce principe est pourtant largement bafoué depuis plusieurs années. En effet, les agences de l’eau subissent une double peine.

En premier lieu, un plafond dit « mordant » est instauré chaque année, qui permet de réaffecter les ressources vers le budget général, comme le prévoit l’article 29 du présent projet de loi de finances. Nous avions déposé des amendements visant à supprimer ce plafond mordant ; ils ont malheureusement et abusivement été déclarés irrecevables. Nous le déplorons.

En second lieu, un prélèvement est opéré sur les ressources des agences pour financer l’Agence française pour la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, ainsi que les parcs naturels.

Les agences de l’eau, les syndicats et les associations de protection de l’environnement dénoncent cette saignée pratiquée au nom de la maîtrise des dépenses publiques.

L’eau devient ainsi une simple assiette fiscale. Pourtant, compte tenu des nombreuses missions qui incombent aux agences de l’eau, il semble nécessaire de préserver le principe selon lequel « l’eau paie l’eau ».

Cette situation est d’autant plus grave que tous les signaux de qualité de l’eau sont au rouge et que les agences de l’eau se sont déjà engagées dans des programmes ambitieux pour les six prochaines années.

Les six agences de l’eau subissent aujourd’hui une telle contrainte budgétaire qu’elles ne seront plus en capacité de remplir l’intégralité de leurs missions, alors même que celles-ci se multiplient pour faire face au réchauffement climatique.

Je rappelle que la France s’est engagée, conformément à la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et à la directive européenne à atteindre un bon état des eaux.

Nous demandons donc la suppression des alinéas 13 à 17 de l’article 75 et le retour à une clef de financement des opérateurs de la biodiversité qui ne repose pas exclusivement sur un financement par les agences de l’eau.

M. le président. L’amendement n° II-551, présenté par MM. Kern et Longeot et Mme Billon, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 13 à 17

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

II. – Le I de l’article 135 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 est abrogé.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement, qui émane de Claude Kern, a été remarquablement défendu par mon collègue Gontard.

J’insiste néanmoins à mon tour sur le fait que nous devons respecter le principe selon lequel « l’eau paie l’eau », car nos collectivités ont aujourd’hui beaucoup de mal à financer leurs projets.

Il est effectivement important que l’on revienne sur ce système, qui donne lieu à des dérives. Sur nos factures d’eau, la redevance n’est pas bien affectée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Ce sujet reste sensible.

La loi de finances pour 2018 a instauré une contribution des agences de l’eau au financement des opérateurs de la biodiversité. En contrepartie, les principales subventions pour charges de service public du programme 113 ont été supprimées, traduisant un désengagement de l’État du financement de la politique de la biodiversité. Je m’étais opposé l’an passé à ce transfert de financement injustifié aux agences de l’eau, d’autant qu’il rompait, cela a été dit, avec le principe selon lequel l’eau paie l’eau et qu’il s’éloignait également du principe du pollueur-payeur qui préside à la politique de l’eau.

L’article 75 du projet de loi de finances pour 2019 ne revient pas sur cette contribution des agences de l’eau, mais il propose de nouvelles modalités de répartition de la contribution entre les agences.

À ce jour, la clef de répartition de la contribution entre les agences est déterminée en fonction de la part du total des redevances. Cette modalité de répartition a eu pour effet de favoriser les agences de l’eau situées dans les zones peuplées, au détriment des agences de l’eau situées en zone rurale.

Il est proposé que, chaque année, un arrêté conjoint des ministres chargés de l’écologie et du budget fixe le montant de cette contribution et la répartisse entre les agences de l’eau en fonction du potentiel économique du bassin hydrographique, pondéré par l’importance relative de sa population rurale.

L’adoption des amendements que nous examinons aurait pour conséquence de supprimer les nouvelles modalités de répartition de la contribution entre agences, mais elle n’entraînerait pas la suppression de la contribution des agences de l’eau aux opérateurs de la biodiversité, contrairement à l’intention de leurs auteurs.

Cette nouvelle clé de répartition de la contribution m’apparaît comme un moindre mal, dans la mesure où elle entend réduire la charge imposée aux bassins les moins favorisés. Par ailleurs, les agences de l’eau et les comités de bassin ont d’ores et déjà adopté le onzième programme d’intervention.

Pour cette raison, je ne souhaite pas m’opposer à cette mesure et je sollicite le retrait des deux amendements identiques. À défaut, l’avis sera défavorable.

L’amendement n° II-551 est plus abouti, mais les opérateurs n’auraient plus de ressources, faute de financement. En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Je partage l’avis de M. le rapporteur. Cet article permet de répartir plus justement la contribution entre les agences de l’eau, selon une nouvelle clé de répartition définie après une très large concertation avec les comités de bassin et les agences.

Je vous rassure toutefois sur un point, mesdames, messieurs les sénateurs : il n’y aura pas de prélèvement supplémentaire à cette occasion, puisque nous sommes à ressources constantes.

En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-119 et II-151 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-551.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 75.

(Larticle 75 est adopté.)

Article 75
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article 76 bis (nouveau)

Article 76

L’article L. 213-10-8 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi rédigé :

« II. – L’assiette de la redevance est la masse de substances contenues dans les produits mentionnés au I :

« 1° Appartenant, en raison de leur cancérogénicité, de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n° 1907/2006 ;

« 2° Appartenant, en raison de leur toxicité aiguë de catégorie 1, 2 ou 3 ou en raison de leur toxicité spécifique pour certains organes cibles, de catégorie 1, à la suite d’une exposition unique ou après une exposition répétée, soit en raison de leurs effets sur ou via l’allaitement, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;

« 3° Appartenant, en raison de leur toxicité aiguë pour le milieu aquatique de catégorie 1 ou de leur toxicité chronique pour le milieu aquatique de catégorie 1 ou 2, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;

« 4° Appartenant, en raison de leur toxicité chronique pour le milieu aquatique de catégorie 3 ou 4, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;

« 5° Qui ne répondent pas aux critères des paragraphes 3.6 et 3.7 de l’annexe II au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil mais qui sont encore commercialisées ;

« 6° Dont on envisage la substitution au sens de l’article 24 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précité.

« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture fixe la liste des substances relevant des 1° à 6° du présent II. » ;

2° Les trois premiers alinéas du III sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :

« III. – Le taux de la redevance, exprimé en euros par kilogramme, est fixé selon le tableau suivant :

« 

Substances

Taux

(en euros par kg)

Substances relevant du 1° du II

9,0

Substances relevant du 2° du II

5,1

Substances relevant du 3° du II

3,0

Substances relevant du 4° du II

0,9

Substances relevant du 5° du II

5,0

Substances relevant du 6° du II

2,5

« Lorsqu’une substance relève de plusieurs catégories mentionnées aux 1° à 4° du II, le taux de redevance appliqué est le plus élevé parmi les catégories dont elle relève.

« Lorsqu’une substance relève de plusieurs catégories mentionnées aux 5° et 6° du même II, le taux de redevance appliqué est le plus élevé parmi les catégories dont elle relève.

« Lorsqu’une substance relève d’une ou de plusieurs catégories mentionnées aux 1° à 4° et aux 5° et 6° dudit II, le taux retenu est la somme des taux calculés en application des troisième et quatrième alinéas du présent III. »

M. le président. L’amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Gremillet, H. Leroy et Genest, Mme Deroche, MM. Magras, Pierre, Bonhomme, Cuypers, Poniatowski, Longuet, B. Fournier, Babary, Savary, Pillet et Sido, Mmes Gruny et A.M. Bertrand, M. Revet, Mmes Lassarade et Morhet-Richaud, M. Pellevat, Mme Micouleau, MM. Chaize et Raison, Mme Deromedi, M. Lefèvre, Mme Bruguière, M. Vogel, Mme L. Darcos, M. Mouiller, Mme M. Mercier, M. Cardoux, Mmes Chain-Larché et Thomas, M. Savin, Mme Imbert et MM. Mayet, de Nicolaÿ, Morisset, Moga et D. Laurent, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Aujourd’hui, nous avons la preuve que la redevance pour pollutions diffuses payée par les agriculteurs n’apporte pas de réponses concrètes à la problématique des produits phytosanitaires.

L’augmentation prévue, qui consisterait à faire supporter, encore une fois, un peu plus de fiscalité aux seuls agriculteurs, pénaliserait encore un peu plus l’agriculture.

Il y a en outre une certaine incohérence à augmenter cette taxe, alors que le Gouvernement – nous l’avons dit au ministre de l’agriculture – n’a pris aucune mesure concrète sur les produits de biocontrôle. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises françaises sont prêtes à commercialiser ce type de produits, mais, faute d’agrément, elles ne le peuvent pas.

C’est donc pour éviter une double peine que je présente cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. La révision de l’assiette et des taux de la redevance pour pollutions diffuses est issue des États généraux de l’alimentation. On peut comprendre qu’il est nécessaire de faire évoluer les pratiques agricoles.

La redevance augmente, certes, mais de manière modérée, et je crois aussi savoir qu’elle doit servir à financer des aides pour que les agriculteurs aient un mode de production plus respectueux de l’environnement.

Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, son avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur.

Cette mesure est issue des États généraux de l’alimentation et elle a vocation à financer des aides à la conversion, notamment au bio.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. J’ai bien fait de rester… (Sourires.) Vous dites, madame la secrétaire d’État, que cette taxe va financer la conversion au bio. On croit rêver ! C’est même une insulte vis-à-vis du monde paysan !

Nous avons débattu dans cet hémicycle du compte d’affection spéciale « Développement agricole et rural », ou CASDAR, des fonds destinés au développement de l’agriculture et payés à 100 % par les paysans. Pas un centime n’est payé par l’État. Or cet argent est souvent confisqué ; il n’est pas nécessairement orienté vers l’objet que vous venez d’évoquer, madame la secrétaire d’État.

J’étais prêt à retirer cet amendement au profit de l’amendement de repli qui suit et qui vise une augmentation d’une taxe acquittée non par les agriculteurs, mais par les entreprises. Aujourd’hui, les producteurs sont complètement exemptés du paiement de cette contribution, et vous pouvez leur faire confiance pour en répercuter le coût sur les agriculteurs.

Nous sommes en panne sur les produits de substitution. Je le redis : de nombreuses entreprises investissent en France sur les produits de biocontrôle, mais elles n’obtiennent pas d’autorisation de mise sur le marché. Vous prenez en otage les agriculteurs ! Je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. À entendre l’explication de vote de Daniel Gremillet, il semblerait que votre réponse soit plutôt vécue comme une provocation, madame la secrétaire d’État.

Je pensais, moi aussi, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel et qu’une solution serait proposée à travers l’amendement suivant.

Je me dis que vous avez peut-être commis une erreur, madame la secrétaire d’État, et qu’il est encore temps de la réparer. On vous laisse une deuxième chance…

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Je crois aux deuxièmes chances, et je vais essayer de saisir celle-ci.

Tout d’abord, je le rappelle, cette mesure est issue des États généraux de l’alimentation. Le Gouvernement s’est engagé à lutter contre ces substances, notamment dans le plan Écophyto, et c’est la raison pour laquelle nous proposons de modifier cette redevance pour pollutions diffuses. Son produit sera versé directement aux agences de l’eau, à charge pour elles de conduire des actions d’appui à la conversion agricole.

Celles-ci, au demeurant, ne se limiteront pas au bio. L’idée est de soutenir une agriculture plus durable ou plus régénératrice, et les agences de l’eau utiliseront le produit de cette redevance au bénéfice de différentes formes d’agriculture. Cette redevance contribuera donc à la conversion agricole dans son ensemble, le bio n’étant qu’un exemple parmi d’autres.

Quoi qu’il en soit, je ne prétends pas répondre à travers cette mesure précise à la question de la transition agricole dans son ensemble. C’est un sujet plus large, qui devra être traité avec mon collègue ministre de l’agriculture et l’ensemble des parties prenantes.

L’avis du Gouvernement reste défavorable sur cet amendement.

M. Daniel Gremillet. Je retire mon amendement !

M. le président. L’amendement n° II-91 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-321 rectifié est présenté par M. Duplomb, Mme Férat, M. Bascher, Mmes A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme Bories, MM. J.M. Boyer, Brisson et Charon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme L. Darcos, MM. Darnaud et Daubresse, Mme de la Provôté, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mme Di Folco, MM. B. Fournier et Genest, Mme Goy-Chavent, MM. Grand et Gremillet, Mmes Gruny et Keller, MM. Kennel et Kern, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme Loisier, MM. Longeot, Louault, Mandelli, Mayet et Moga, Mmes Morin-Desailly et Morhet-Richaud, M. Morisset, Mme Noël, M. Pellevat, Mme Perrot, MM. Pierre, Poniatowski, Reichardt, Revet, Savary, Schmitz, Sol et Vogel et Mme Vullien.

L’amendement n° II-561 est présenté par M. Cabanel et Mme Tocqueville.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le IV de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Les mots : « , plafonné à 0,3 % du chiffre d’affaires mentionné au III, » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur des produits mentionnés au I contenant des substances appartenant, en raison de leur cancérogénicité ou de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n° 1907/2006, le taux est plafonné à 10 % du chiffre d’affaires mentionné au III du présent article.

« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur des produits qui ne répondent pas aux critères des paragraphes 3.6 et 3.7 de l’annexe II au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil mais qui sont encore commercialisées ou dont on envisage la substitution au sens de l’article 24 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précité, le taux est plafonné à 5 % du chiffre d’affaires mentionné au III du présent article.

« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur un produit de biocontrôle figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 253-5, le taux prévu au présent IV est plafonné à 0,1 % du chiffre d’affaires mentionné au III du même article.

« Pour les autres produits, le taux est plafonné à 0,3 % du chiffre d’affaires mentionné au III. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État due au remplacement de la majoration de la redevance pour pollutions diffuses par une augmentation de la taxe due par les fabricants de produits phytosanitaires sur leurs ventes est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° II-321 rectifié.

M. Daniel Gremillet. Comme je l’ai expliqué précédemment, cet amendement de repli vise à faire supporter l’augmentation de redevance, non pas aux agriculteurs, mais aux industriels qui fabriquent les produits phytosanitaires.

On risque certes d’assister à une refacturation aux agriculteurs, mais l’avantage de cet amendement est de flécher précisément l’utilisation de cet argent vers la recherche et à l’innovation. Cette taxe complémentaire supportée par la filière et les agriculteurs bénéficierait donc à la recherche sur les produits de substitution.

La mise en œuvre de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi ÉGALIM, montre toutefois que nous sommes très forts pour instaurer des taxes nouvelles, mais bien plus faibles pour accorder des moyens supplémentaires à l’agriculture au regard des ambitions des États généraux de l’alimentation. Le budget pour 2019, très pauvre en la matière, ne traduit pas ces engagements.