Administration générale et territoriale de l'État
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article 71 quater (nouveau) (début)

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Administration générale et territoriale de lÉtat

2 783 507 218

2 836 090 211

Administration territoriale

1 655 814 971

1 656 116 999

Dont titre 2

1 481 418 343

1 481 418 343

Vie politique, cultuelle et associative

206 691 242

206 311 242

Dont titre 2

18 191 202

18 191 202

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

921 001 005

973 661 970

Dont titre 2

519 106 568

519 106 568

M. le président. L’amendement n° II-444, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale

dont titre 2

 

1 100 944

1 100 944

1 100 944

1 100 944

Vie politique, cultuelle et associative

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 100 944

1 100 944

SOLDE

- 1 100 944

- 1 100 944

La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Castaner, ministre. Cet amendement technique de minoration des crédits du programme 307, « Administration territoriale », vise à tirer les conséquences de décisions déjà prises.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances. Cet amendement est parvenu tardivement à la commission. De ce fait, nous aurions plutôt tendance à émettre un avis défavorable… Toutefois, dès lors qu’il ne s’agit somme toute que d’une affaire de vases communicants, nous nous en remettons à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-444.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-289 rectifié bis, présenté par MM. Kerrouche, Sueur et Kanner, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Durain, Marie, Fichet, Sutour, J. Bigot, Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale

dont titre 2

6 000 000

6 000 000

Vie politique, cultuelle et associative

dont titre 2

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

dont titre 2

6 000 000

6 000 000

TOTAL

6 000 000

6 000 000

6 000 000

6 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement vise à augmenter de 6 millions d’euros les crédits du programme « Administration territoriale » afin d’améliorer l’accompagnement du public confronté à la dématérialisation des demandes de titres.

Le 3 septembre 2018, le Défenseur des droits a rendu un avis dans lequel il fustige la mise en œuvre de cette réforme : « Ces derniers mois, le Défenseur des droits a traité plusieurs milliers de saisines relatant les difficultés rencontrées avec l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS, qui remplace l’accueil auparavant assuré en préfecture ou sous-préfecture par des démarches en ligne. »

Cette dématérialisation a permis à l’État d’économiser 24 millions d’euros en supprimant 400 équivalents temps plein, mais cela ne peut pas se faire au détriment de la qualité du service aux administrés. Il faut tenir compte de la rupture numérique.

Dans cette perspective, cet amendement vise à maintenir 100 équivalents temps plein afin d’assurer un meilleur accompagnement du public. À cette fin, nous proposons de flécher 6 millions d’euros au profit de l’action n° 02 du programme 307 et de compenser cette mesure en réduisant du même montant les crédits du programme 216.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances. Il s’agit là d’un sujet d’importance, que l’ensemble des orateurs ont d’ailleurs mentionné. Le Défenseur des droits a en effet attiré l’attention des autorités sur les problèmes posés par les démarches à effectuer en ligne. Il me semble que les économies dégagées à ce titre sont bien plus importantes encore que ne l’a dit notre collègue. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christophe Castaner, ministre. Je comprends la philosophie qui sous-tend l’avis du Défenseur des droits, mais celui-ci porte non sur la décision politique prise en 2015, mais sur la phase de démarrage de la procédure. Or, pour la plupart, les difficultés survenues à compter de mars 2017 ont été résolues.

Le secrétaire général du ministère de l’intérieur a répondu de manière très précise aux observations du Défenseur des droits. Je vous communiquerai cette réponse si vous le souhaitez, monsieur Kerrouche. L’ensemble des remarques formulées ont été prises en compte et les modifications nécessaires ont été apportées.

Pour ce qui concerne les moyens, votre demande me paraît satisfaite : en 2018, 90 agents supplémentaires ont été affectés aux centres d’instruction des demandes d’usagers, situés à Amiens, à Charleville-Mézières et à la préfecture de police. En outre, les effectifs de l’ANTS dédiés à la prise en charge directe des usagers ont été triplés. Ils ont ainsi été portés à 180 personnes.

La préoccupation que vous exprimez est donc également celle du Gouvernement. Pour garantir l’accompagnement des usagers dans les procédures dématérialisées, nous avons déployé 310 points numériques dans les préfectures et sous-préfectures, y compris dans des sites où l’accueil du public n’était plus assuré. Certes, la rupture numérique concerne de moins en moins d’usagers, mais elle demeure une réalité, non seulement dans le monde rural, mais aussi dans les villes.

En termes tant d’analyses techniques que de moyens humains ou de proximité, il me semble que nous avons déjà répondu à la demande que vous exprimez. Aussi, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. Je comprends tout à fait l’esprit de cet amendement.

Monsieur le ministre, le Défenseur des droits a appelé votre attention sur ce problème par un récent avis, mais de nombreux usagers qui sollicitent la délivrance d’un permis de conduire ou d’un certificat d’immatriculation de véhicule manifestent depuis longtemps leur mécontentement, lié au délai excessif de traitement de leur demande, à la fréquence des pannes informatiques ou à la difficulté de joindre les services de l’ANTS.

Voilà des mois que les élus ont donné l’alerte ! Les usagers n’ont pas été suffisamment informés en amont de la réforme et ils ont été trop peu accompagnés après la généralisation de celle-ci. A-t-on vraiment besoin du Défenseur des droits pour découvrir ces problèmes ? (Marques dapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Exactement ! C’est une catastrophe !

M. François Bonhomme. Il avait bien été souligné qu’il ne fallait pas dématérialiser une procédure sans laisser la possibilité de recourir à une alternative « papier » ou à une intervention humaine, faute de quoi l’usager perdrait tout moyen d’échanger avec l’administration en cas de bug informatique ou de perte de dossier.

Pardonnez mon mauvais esprit, mais j’estime que le Défenseur des droits ferait mieux de se pencher sur des questions laissées dans l’ombre : je pense à la discrimination que subissent les femmes dans certains cafés ou certains quartiers. Ce phénomène lui est signalé depuis plusieurs années, mais, étrangement, il reste sans réaction ! (MM. Laurent Duplomb et Jackie Pierre applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. J’approuve la proposition de notre collègue Éric Kerrouche.

Monsieur le ministre, vous nous avez livré la version pour enfants des faits… (Mme Sophie Primas rit.)

M. Christophe Castaner, ministre. Je n’ai fait aucun commentaire !

M. Pierre-Yves Collombat. En réalité, les choses ne se sont pas passées exactement comme ça ! Ce n’est pas le Gouvernement qui a réagi, mais l’ANTS, qui, en catastrophe et pour sauver les meubles, a embauché environ 700 personnes… Et elle a bien fait, car pour en être réduits à saisir le Défenseur des droits d’un tel problème, il fallait vraiment que les gens ne sachent plus vers qui se tourner !

Un certain nombre de bugs ont certes été réparés, des mesures ont été prises et le gros des problèmes est peut-être derrière nous, mais tout n’est pas réglé !

M. Pierre-Yves Collombat. Si la dématérialisation de la procédure de délivrance pour certains titres, comme les cartes d’identité, a réussi, c’est parce que l’on n’a pas supprimé tout interlocuteur humain pour le public. Pour aider ceux qui ne parviennent pas à maîtriser l’outil numérique, il faut conserver des personnels à la fois compétents en informatique et capables, le cas échéant, de reformuler les demandes pour faire avancer les dossiers.

M. Pierre-Yves Collombat. En effet, il n’y a pas que les illettrés en informatique à être confrontés à des difficultés : la complexité des procédures pose des problèmes aux usagers.

Que faut-il faire pour être entendu ? Endosser un gilet jaune ? Accroître le nombre des points de contact et améliorer la qualité du service rendu, cela relève du bon sens et ne coûtera pas très cher.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Dans un département très rural comme le mien, il faut également prendre en compte le cas des personnes âgées qui ne sont absolument pas en mesure de naviguer sur l’internet. Pour ce public, les secrétaires de mairie jouent un rôle essentiel : ils constituent une interface humaine entre l’usager et la nouvelle technologie.

À mon sens, il est encore nécessaire de mener un travail d’adaptation dans un certain nombre d’endroits et à l’égard de certaines personnes. Non seulement les réseaux ne fonctionnent pas toujours très bien…

M. Jean-François Husson, vice-président de la commission des finances. C’est effectivement un sujet !

Mme Nathalie Goulet. … – la fracture numérique reste une réalité –, mais aussi, et surtout, une partie de la population est complètement démunie face aux procédures dématérialisées.

M. François Bonhomme. C’est ça, la start-up nation !

Mme Nathalie Goulet. Un certain nombre de nos concitoyens ont encore besoin de temps : pour l’heure, ils ne sont pas en mesure d’utiliser les nouvelles technologies.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. La dématérialisation des procédures de délivrance des titres s’est faite très rapidement.

Auparavant, un accueil du public était assuré dans les préfectures et les sous-préfectures et les cartes d’identité étaient délivrées par l’intermédiaire des mairies, y compris dans les petites communes.

Désormais, les procédures sont complètement dématérialisées et, dans leurs rapports avec l’ANTS, de nombreux usagers se heurtent à des difficultés. Il est essentiel de conserver des interlocuteurs de proximité, y compris pour répondre au téléphone, or il serait envisagé de délocaliser des plateformes téléphoniques de l’ANTS en dehors de nos frontières, alors même que nous souhaitons le maintien des emplois dans nos territoires !

Enfin, j’approuve ce qui a été dit sur l’intervention du Défenseur des droits.

Les problèmes soulevés méritent une particulière attention ; il faut mettre l’accent sur la proximité, l’écoute et le dialogue.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. On a réduit au fil du temps le champ d’intervention du personnel des préfectures. Monsieur le ministre, vous nous dites accorder beaucoup d’importance à la proximité, mais le service rendu à l’échelon local est de moins en moins bon. Je pense, en particulier, à la délivrance des cartes grises : pour un véhicule d’occasion, on peut attendre des mois, voire des années !

À mon sens, nous sommes devant un véritable paradoxe : comment voulez-vous que les Français comprennent que, d’un côté, on supprime des services de proximité et que, de l’autre, on augmente les rémunérations dans les cabinets ministériels ?

M. Laurent Duplomb. Par exemple, pour celui de M. Griveaux, elles passent de 295 530 euros à 550 000 euros, soit une augmentation de 86 % ; pour celui de M. Lemoyne, elles sont portées de 406 000 euros à 585 000 euros, soit une hausse de 47 % !

Comment expliquer aux « culs terreux », comme disait mon collègue Jacques Genest, qu’on leur supprime tous les services de proximité parce qu’ils coûtent trop cher quand les dépenses des cabinets ministériels augmentent dans des proportions faramineuses ?

M. le président. Monsieur Kerrouche, l’amendement n° II-289 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Éric Kerrouche. Bien entendu, je maintiens cet amendement, monsieur le président.

Je ne ferai pas miens les propos tenus par M. Bonhomme sur le Défenseur des droits, car cette institution joue un rôle important, notamment pour traiter des difficultés que les usagers rencontrent dans leurs relations avec l’administration.

Monsieur le ministre, il ne faut pas confondre dématérialisation et virtualité. D’une manière ou d’une autre, les services, même dématérialisés, doivent rester accessibles. En un sens, vous avez vous-même justifié cet amendement. Vous nous avez indiqué que 310 points de contact seront déployés dans les sous-préfectures et préfectures pour apporter une aide technique aux usagers.

M. Pierre-Yves Collombat. Mais où précisément ?

M. Éric Kerrouche. Mais il s’agit ici de l’accompagnement humain dont ont besoin les personnes peu familiarisées avec les outils numériques : c’est là qu’est la difficulté ! L’aiguillage des crédits proposé au travers de cet amendement doit précisément servir à assurer cet accompagnement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-289 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Administration générale et territoriale de lÉtat

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article 71 quater (nouveau) (interruption de la discussion)

Article 71 quater (nouveau)

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2019, un rapport dressant le bilan de la mise en œuvre du plan « préfectures nouvelle génération ». Ce rapport comporte notamment une évaluation de l’impact de cette réforme sur l’accomplissement des missions prioritaires confiées aux préfectures, sur les conditions de délivrance des titres, sur les modalités d’accueil des usagers ainsi que sur les mesures prises pour la gestion des ressources humaines.

M. le président. L’amendement n° II-73, présenté par M. Genest, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances.

M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances. Cet amendement tend à supprimer l’article 71 quater, introduit par l’Assemblée nationale, qui prescrit au Gouvernement la remise d’un rapport dressant le bilan du plan Préfectures nouvelle génération.

Le rapporteur spécial de la commission des finances, Jacques Genest, s’efforce d’accomplir ce travail chaque année. Il ne voit donc pas l’utilité de demander un tel rapport au Gouvernement.

M. Laurent Duplomb. Nous non plus !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christophe Castaner, ministre. Le député Jacques Savatier, qui a fait adopter l’amendement introduisant cet article par l’Assemblée nationale, ne doit pas avoir lu le rapport de M. Genest…

Mme Sophie Primas. Il ne sait peut-être même pas que le Sénat existe ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Christophe Castaner, ministre. Ayant donné un avis favorable à son amendement, je ne voudrais pas me déjuger devant le Sénat… Par cohérence, j’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-73.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 71 quater est supprimé.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Article 71 quater (nouveau) (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Discussion générale

4

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, samedi 30 novembre 2018, à neuf heures trente, quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (n° 146, 2018-2019) ;

-Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 73) ;

- Justice ;

- Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ;

- Compte spécial : Développement agricole et rural ;

- Défense.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à minuit.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD