Sommaire

Présidence de M. Philippe Dallier

Secrétaires :

Mme Annie Guillemot, M. Dominique de Legge.

1. Procès-verbal

2. Ouverture de la session extraordinaire 2017-2018

3. Démission et remplacement d’un sénateur

4. Élection d’un sénateur

5. Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 14 (supprimé)

Amendements identiques nos 195 de Mme Cécile Cukierman, 486 rectifié de M. Joël Labbé, 551 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy et 633 rectifié de Mme Noëlle Rauscent. – Retrait des amendements nos 486 rectifié et 551 rectifié ; rejet des amendements nos 195 et 633 rectifié.

Amendement n° 749 du Gouvernement. – Rejet.

L’article demeure supprimé.

Articles additionnels après l’article 14

Amendement n° 757 rectifié du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 570 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Article 14 bis

Amendements identiques nos 32 rectifié de M. Stéphane Piednoir 38 rectifié quater de M. Marc-Philippe Daubresse et 646 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Adoption des trois amendements supprimant l’article.

Amendement n° 746 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 421 rectifié de Mme Élisabeth Lamure. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 552 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy et 634 de Mme Patricia Schillinger. – Devenus sans objet.

Amendement n° 686 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Devenu sans objet.

Amendement n° 688 rectifié bis de Mme Nathalie Delattre. – Devenu sans objet.

Amendement n° 647 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Devenu sans objet.

Articles additionnels après l’article 14 bis

Amendement n° 473 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 557 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Article 14 ter

M. Joël Labbé

Amendements identiques nos 198 de Mme Cécile Cukierman, 344 rectifié de M. Antoine Karam, 345 rectifié ter de M. Maurice Antiste, 437 rectifié bis de M. Claude Bérit-Débat et 456 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet des amendements nos 198, 344 rectifié, 345 rectifié ter et 456 rectifié, l’amendement n° 437 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendement n° 88 de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 14 quater AA (nouveau)

M. Joël Labbé

Amendements identiques nos 89 de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis, 463 rectifié de M. Joël Labbé, 558 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy et 748 du Gouvernement. – Adoption par scrutin public n° 180, des quatre amendements supprimant l’article.

Article additionnel après l’article 14 quater AA

Amendement n° 199 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 14 quater A

Amendement n° 200 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 233 rectifié de M. Richard Yung. – Non soutenu.

Amendement n° 276 rectifié de M. Jean Bizet. – Retrait.

Amendement n° 779 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 747 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Adoption de l’article modifié.

Article 14 quater

Amendement n° 197 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 14 quinquies

Amendement n° 605 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 14 quinquies

Amendement n° 554 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.

Amendement n° 555 rectifié ter de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.

Amendement n° 556 rectifié ter de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.

Amendement n° 559 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.

Amendement n° 560 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Adoption, par scrutin public n° 181, de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 14 sexies

M. François Patriat

Amendements identiques nos 201 rectifié de Mme Cécile Cukierman et 474 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 249 rectifié de M. Bernard Delcros et 561 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 14 sexies

Amendement n° 128 rectifié septies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.

Amendements identiques nos 638 rectifié bis de Mme Noëlle Rauscent et 752 rectifié du Gouvernement. – Retrait de l’amendement n° 752 rectifié, l’amendement n° 638 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 495 rectifié bis de M. Joël Labbé et 562 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 90 de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. – Rejet.

Amendement n° 789 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 406 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Amendement n° 211 rectifié bis de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 475 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 476 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet par scrutin public n° 182.

Amendement n° 494 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 649 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 14 septies (supprimé)

Amendement n° 459 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 108 rectifié sexies de Mme Colette Mélot. – Rejet.

Amendement n° 91 rectifié de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. – Adoption, par scrutin public n° 183, de l’amendement rétablissant l’article.

Amendement n° 750 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 109 rectifié septies de Mme Colette Mélot, 196 rectifié de Mme Cécile Cukierman, 458 rectifié de M. Joël Labbé et 636 rectifié de Mme Patricia Schillinger. – Devenus sans objet.

Amendement n° 563 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Devenu sans objet.

Amendement n° 319 rectifié de M. Bernard Delcros. – Devenu sans objet.

Amendement n° 141 rectifié quinquies de Mme Colette Mélot. – Devenu sans objet.

Articles additionnels après l’article 14 septies

Amendement n° 565 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Amendements identiques nos 247 rectifié bis de M. Bernard Delcros et 479 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 443 rectifié quater de M. Bernard Jomier et 477 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet des deux amendements.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

6. Candidature à une commission

7. Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Articles additionnels après l’article 14 septies (suite)

Amendements identiques nos 194 rectifié de Mme Cécile Cukierman et 373 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Rejet par scrutin public n° 184.

Amendement n° 564 rectifié bis de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Amendement n° 375 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Non soutenu.

Amendement n° 478 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendements identiques nos 346 rectifié de M. Michel Amiel, 640 rectifié de Mme Fabienne Keller. – Rejet de l’amendement n° 346 rectifié, l’amendement n° 640 rectifié n’étant pas soutenu.

Amendement n° 232 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 295 rectifié de M. Jean-Marie Vanlerenberghe. – Non soutenu.

Article 14 octies

Amendement n° 500 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 14 nonies

Amendement n° 313 rectifié de M. Claude Bérit-Débat et sous-amendement n° 780 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Adoption de l’article modifié.

Article 14 decies – Adoption.

Article 14 undecies (supprimé)

Amendement n° 182 de M. Jean-Pierre Grand. – Non soutenu.

Amendement n° 751 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement rétablissant l’article.

Article additionnel après l’article 14 undecies

Amendement n° 444 rectifié ter de M. Bernard Jomier. – Rejet.

Article 15

M. Fabien Gay

M. Didier Rambaud

Amendement n° 689 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.

Amendements identiques nos 710 rectifié de M. Joël Labbé et 754 du Gouvernement. – Rejet, par scrutin public n° 185, des deux amendements.

Amendement n° 567 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Amendement n° 753 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 15

Amendement n° 455 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 787 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 15 bis – Adoption.

Articles additionnels après l’article 15 bis

Amendements identiques nos 18 rectifié ter de M. Maurice Antiste et 706 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 424 rectifié de Mme Patricia Schillinger. –Non soutenu.

Amendement n° 568 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy. – Rejet.

Amendement n° 756 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 15 ter – Adoption.

Article 15 quater

Amendement n° 755 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 15 quater

Amendements identiques nos 39 rectifié de Mme Viviane Malet et 144 rectifié septies de M. Jean-Louis Lagourgue. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 119 rectifié septies de M. Jean-Pierre Decool, 216 rectifié de Mme Cécile Cukierman et 616 rectifié de M. Maurice Antiste. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 120 rectifié octies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.

Amendement n° 320 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Rejet.

Amendement n° 3 rectifié bis de M. Roland Courteau. – Retrait.

Amendement n° 4 rectifié bis de M. Roland Courteau. – Retrait.

Amendement n° 445 rectifié quater de M. Bernard Jomier. – Rejet.

Amendement n° 480 rectifié ter de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 149 rectifié nonies de M. Daniel Chasseing. – Rejet.

Amendements identiques nos 127 rectifié octies de M. Jean-Pierre Decool et 168 rectifié quater de Mme Brigitte Micouleau. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 150 rectifié nonies de M. Daniel Chasseing. – Rejet.

Amendement n° 151 rectifié octies de M. Daniel Chasseing. – Rejet.

Amendement n° 179 rectifié ter de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.

Article 16 A

Amendement n° 760 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Amendement n° 381 rectifié bis de M. Laurent Duplomb. – Devenu sans objet.

Article 16 B – Adoption.

Article 16 CA (nouveau)

Amendement n° 764 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 16 C

Amendement n° 761 rectifié du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 569 rectifié bis de M. Franck Montaugé. – Retrait.

Amendement n° 782 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 263 rectifié quinquies de M. Jean-François Husson et 781 de la commission. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 783 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 16 D (nouveau)

Amendement n° 609 rectifié de M. Claude Bérit-Débat. – Rejet.

Amendement n° 610 rectifié de M. Claude Bérit-Débat et sous-amendement n° 784 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 758 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 16 E (nouveau)

Amendement n° 762 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 785 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 378 rectifié bis de M. Laurent Duplomb. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article 16 F (nouveau)

Amendement n° 763 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 16

Amendements identiques nos 133 rectifié sexies de Mme Colette Mélot, 251 rectifié bis de M. Bernard Delcros et 612 rectifié de M. Joël Bigot. – Adoption des trois amendements.

Amendement n° 759 du Gouvernement. – Retrait.

Rappel au règlement

M. François Patriat ; M. le président.

Article 16 (suite)

Adoption de l’article modifié.

Articles 17 et 17 bis (nouveau) – Adoption.

Vote sur l’ensemble

M. Franck Montaugé

Mme Noëlle Rauscent

M. Daniel Gremillet

Mme Cécile Cukierman

M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques

M. Franck Menonville

M. Bernard Delcros

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques

Adoption, par scrutin public n° 186, du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation

8. Ordre du jour

Nomination d’un membre d’une commission

compte rendu intégral

Présidence de M. Philippe Dallier

vice-président

Secrétaires :

Mme Annie Guillemot,

M. Dominique de Legge.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Ouverture de la session extraordinaire 2017-2018

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date du 18 juin 2018 et modifié par le décret du 27 juin dernier portant convocation du Parlement en session extraordinaire.

Acte est donné de cette communication.

Ce décret, qui vous a été adressé, mes chers collègues, a été publié sur le site internet du Sénat.

En conséquence, la session extraordinaire est ouverte.

3

Démission et remplacement d’un sénateur

M. le président. M. Dominique Watrin a fait connaître à la présidence qu’il se démettait de son mandat de sénateur du Pas-de-Calais, à compter du 30 juin 2018, à minuit.

En application de l’article L.O. 320 du code électoral, il est remplacé par Mme Cathy Apourceau-Poly, dont le mandat de sénatrice du Pas-de-Calais a commencé le 1er juillet, à zéro heure.

Au nom du Sénat tout entier, je souhaite à notre nouvelle collègue la plus cordiale bienvenue.

4

Élection d’un sénateur

M. le président. En application de l’article 32 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, une communication de laquelle il résulte que, à la suite des opérations électorales du dimanche 1er juillet 2018, M. Vincent Segouin a été proclamé sénateur de l’Orne. Son mandat a débuté lundi 2 juillet, à zéro heure.

Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue.

5

Article additionnel après l'article 13 quinquies - Amendement n° 501 rectifié (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article 14 (supprimé)

Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (projet n° 525, texte de la commission n° 571, rapport n° 570, tomes I et II, avis n° 563).

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du titre II, aux amendements tendant à rétablir l’article 14.

TITRE II (suite)

MESURES EN FAVEUR D’UNE ALIMENTATION SAINE, DE QUALITÉ, DURABLE, ACCESSIBLE À TOUS ET RESPECTUEUSE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL

Chapitre III

Renforcement des exigences pour une alimentation durable accessible à tous

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 - Amendement n° 757 rectifié

Article 14

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les quatre premiers sont identiques.

L’amendement n° 195 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 486 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Corbisez, Guérini et Vall.

L’amendement n° 551 rectifié est présenté par Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, M. Houllegatte, Mmes Tocqueville et Préville, M. Fichet et Mme Blondin.

L’amendement n° 633 rectifié est présenté par Mme Rauscent, M. Théophile, Mme Schillinger, MM. Amiel, Bargeton et les membres du groupe La République En Marche.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Après la section 4 du chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime, est insérée une section ainsi rédigée :

« Section …

« Pratiques commerciales prohibées

« Art. L. 253-5-1. – À l’occasion de la vente de produits phytopharmaceutiques définis à l’article L. 253-1, les remises, les rabais, les ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du code de commerce ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution de remises, de rabais ou de ristournes sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces produits est prohibée. Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux produits de biocontrôle définis à l’article L. 253-6, ni aux substances de base au sens de l’article 23 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, ni aux produits à faible risque au sens du même règlement.

« Art. L. 253-5-2. – I. – Tout manquement aux interdictions prévues à l’article L. 253-5-1 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« II. – Le montant de l’amende mentionnée au I est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

« Cette amende peut être assortie d’une astreinte journalière d’un montant maximal de 1 000 € lorsque l’auteur de l’infraction n’a pas mis fin au manquement à l’issue d’un délai fixé par une mise en demeure.

« III. – L’autorité administrative compétente avise préalablement l’auteur du manquement des faits relevés à son encontre des dispositions qu’il a enfreintes et des sanctions qu’il encourt. Elle lui fait connaître le délai dont il dispose pour faire valoir ses observations écrites et, le cas échéant, les modalités selon lesquelles il peut être entendu s’il en fait la demande. Elle l’informe de son droit à être assisté du conseil de son choix.

« La décision de sanction ne peut être prise plus d’un an à compter de la constatation des faits. Elle peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative. »

II. – L’article L. 511-12 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … Les manquements aux interdictions prévues à l’article L. 253-5-1 du code rural et de la pêche maritime. »

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 195.

M. Guillaume Gontard. L’article 14, tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale, permettait une réduction de l’usage des produits phytopharmaceutiques, ou PPP. Il s’agissait non pas d’une interdiction directe de leur usage, qui aurait pu être contraire au droit européen, mais d’une interdiction de certaines pratiques commerciales : les remises d’unités à titre gratuit, les rabais ou les ristournes pratiqués par les vendeurs. En effet, l’étude d’impact souligne que ces pratiques auraient pour effet d’encourager l’acquisition et l’utilisation de plus de produits que strictement nécessaire pour répondre aux besoins de leurs exploitations.

L’article 14 du projet de loi marquait une avancée importante, car, aujourd’hui, nous ne pouvons plus nier que l’utilisation abusive des pesticides pose un problème de santé publique. Pour les agriculteurs et leurs proches, pour les riverains et les consommateurs, l’utilisation de ces produits se traduit par une augmentation des risques d’apparition de maladies graves, de complications dans le développement des fœtus et des très jeunes enfants exposés, sans parler des effets cumulés sur la santé de l’ensemble des expositions aux PPP, qu’on appelle « effet cocktail ».

Dès lors, nous nous interrogeons sur la position du Sénat, qui semble céder à des intérêts purement économiques de court terme, face aux enjeux immenses que l’utilisation des PPP représente en matière de santé et d’environnement. C’est pourquoi nous proposons de rétablir l’article 14 dans sa rédaction initiale. Il est impératif de réduire l’utilisation des pesticides, et ce dès maintenant.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 486 rectifié.

M. Joël Labbé. Comme vient de le dire mon collègue et ami écologiste Guillaume Gontard, cet amendement a pour objet de rétablir l’interdiction des remises, rabais et ristournes sur les produits phytosanitaires, telle que prévue par la rédaction de l’Assemblée nationale, qui faisait partie des nettes avancées permises par nos collègues députés.

Les produits phytosanitaires ne sont pas des produits comme les autres. Leur utilisation présente des risques importants pour les agriculteurs, dont les maladies professionnelles se développent, ainsi que pour l’environnement. De plus en plus d’études démontrent l’étendue de leur effet.

En parallèle, malgré les sommes d’argent public importantes consommées par les plans Écophyto successifs, la quantité de pesticides utilisés continue d’augmenter.

Accepter des pratiques commerciales poussant à la consommation, comme des remises et des rabais, paraît ainsi complètement inapproprié au regard de la volonté publique politique nationale.

De plus, en exemptant de cette interdiction les produits à moindre risque – je veux parler des produits de biocontrôle et des biostimulants –, les prix des alternatives aux pesticides dangereux, qui, elles, méritent rabais et ristournes, seront peut-être plus attractifs.

Cette mesure était l’une des rares avancées sur la question du nécessaire changement des pratiques agricoles. Sa suppression par le Sénat est un très mauvais signe. Là encore, j’ose le dire, on sent l’influence des groupes de pression pour que le système actuel perdure.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Ça, c’est honteux !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 551 rectifié.

Mme Nicole Bonnefoy. Il s’agit d’un amendement de rétablissement d’un article, supprimé en commission, qui visait à interdire certaines pratiques commerciales se déroulant traditionnellement à l’occasion de la vente de produits phytopharmaceutiques : les « 3 R » – remises, rabais, ristournes –, les différenciations des conditions de vente en fonction des acheteurs, la remise d’unités gratuites ou des pratiques équivalentes.

Puisque nous considérons que les produits phytopharmaceutiques ne sont pas des produits comme les autres, Joël Labbé vient encore de le rappeler, en raison de leur dangerosité potentielle et avérée, il nous semble nécessaire d’adopter des comportements visant à réduire leur usage et, surtout, de ne pas les assimiler à des produits agricoles classiques qui ne présentent pas de danger pour la santé des utilisateurs ou des consommateurs finaux.

Je rappelle que la mission d’information sur les pesticides que nous avions menée ici même en 2012, dont j’étais la rapporteur et Sophie Primas la présidente, a mis en évidence, dans l’une de ses recommandations, la nécessité de ne pas opérer de ristournes ou de rabais de ce type. J’entends déjà certains de mes collègues me dire que ce n’est pas parce que les prix seront réduits qu’on utilisera davantage ces produits. Soit ! Mais il s’agit d’un marqueur : puisque ce ne sont pas des produits comme les autres, il est nécessaire de ne pas les commercialiser avec des remises, rabais ou ristournes.

M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 633 rectifié.

M. Dominique Théophile. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 749, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après la section 4 du chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime, est insérée une section 4 bis ainsi rédigée :

« Section 4 bis

« Pratiques commerciales prohibées

« Art. L. 253-5-1. – À l’occasion de la vente de produits phytopharmaceutiques définis à l’article L. 253-1, les remises, les rabais, les ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du code de commerce ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution de remises, de rabais ou de ristournes sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces produits est prohibée. Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux produits de biocontrôle définis à l’article L. 253-6, ni aux substances de base au sens de l’article 23 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, ni aux produits à faible risque au sens du même règlement.

« Art. L. 253-5-2. – I. – Tout manquement aux interdictions prévues à l’article L. 253-5-1 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« II. – Le montant de l’amende mentionnée au I est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

« Cette amende peut être assortie d’une astreinte journalière d’un montant maximal de 1 000 € lorsque l’auteur de l’infraction n’a pas mis fin au manquement à l’issue d’un délai fixé par une mise en demeure.

« III. – L’autorité administrative compétente avise préalablement l’auteur du manquement des faits relevés à son encontre des dispositions qu’il a enfreintes et des sanctions qu’il encourt. Elle lui fait connaître le délai dont il dispose pour faire valoir ses observations écrites et, le cas échéant, les modalités selon lesquelles il peut être entendu s’il en fait la demande. Elle l’informe de son droit à être assisté du conseil de son choix.

« La décision de sanction ne peut être prise plus d’un an à compter de la constatation des faits. Elle peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre de lagriculture et de lalimentation. Il s’agit de rétablir la rédaction de l’article 14 relatif aux remises, rabais, ristournes pour les produits phytopharmaceutiques, telle qu’elle est issue des débats de l’Assemblée nationale.

L’article 14 a pour objectif d’éviter toute incitation commerciale à utiliser des produits phytosanitaires de manière inappropriée, alors que, pour des raisons de santé publique et de protection de l’environnement, il est essentiel de diminuer l’utilisation de ces produits, conformément aux engagements pris par le Gouvernement dans son plan d’actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides.

Cet article est analogue à l’article introduit dans le code de la santé publique par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui a interdit les remises, rabais et ristournes à l’occasion de la vente de médicaments vétérinaires contenant une ou plusieurs substances antibiotiques et qui a grandement contribué au succès du plan Écoantibio dont j’ai fait état ici même la semaine passée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, nous pouvons être en désaccord sur le fond, mais je trouve regrettable que l’on remette en cause notre intégrité (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.),…

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Très bien !

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. … d’autant que, sur ce point, la commission a estimé, au même titre que le Conseil d’État, que, en l’absence d’étude mesurant l’impact de l’interdiction des remises, rabais et ristournes sur les produits phytopharmaceutiques pour le monde agricole, il était difficile, voire impossible de se prononcer en toute connaissance de cause. Aujourd’hui, nous ne disposons toujours pas de ces éléments chiffrés.

L’argument qui a été avancé par le Gouvernement sur ce sujet est la mise en place d’une disposition identique, semble-t-il, à celle qui prévaut pour les médicaments vétérinaires contenant des antibiotiques. Or le caractère transposable de cette mesure n’est pas convaincant. En tout état de cause, il est assez douteux ! L’usage de médicaments diffère totalement de celui des produits phytopharmaceutiques.

En outre, les professionnels de l’élevage ont indiqué à plusieurs reprises que la tendance à la baisse de la consommation était liée non pas uniquement à cet encadrement des pratiques commerciales, mais bien davantage à une adaptation des pratiques des agriculteurs eux-mêmes et à la mise en place d’une véritable politique de prévention des maladies dans les élevages.

Nous savons, monsieur le ministre, que cette volonté d’interdire les remises, rabais et ristournes se traduira par une augmentation considérable des charges des agriculteurs. Elle est donc quelque part en totale contradiction avec l’objet même de votre projet de loi, qui est d’améliorer le revenu de ces derniers. Ce texte ne saurait revenir à augmenter les revenus des agriculteurs dans leurs relations avec l’aval pour, finalement, les amener à dépenser encore davantage en intrants.

Enfin, sur la forme, cette mesure semble traduire l’idée que, si l’agriculteur utilise davantage de produits, c’est parce qu’il les achète en promotion. Je crois qu’il faut bien réaffirmer que les agriculteurs sont les premières victimes de ces produits et que c’est non pas la promotion qui fait l’usage, mais bien la nécessité et l’absence d’alternative de traitement.

Dès lors, la commission est défavorable à l’ensemble des amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Bien évidemment, je partage l’idée que l’on n’utilise jamais un produit phytopharmaceutique par plaisir. On le fait pour répondre à un certain nombre de contraintes.

Il faut pouvoir travailler sur ces contraintes. Quelles solutions innovantes, quelles pratiques, quelles solutions alternatives pouvons-nous mettre en place ? Comment, dans le même temps, pouvons-nous parvenir à atteindre notre objectif d’une réduction de 50 % de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ?

De ce point de vue, le plan Écoantibio a été une réussite : la suppression des remises, rabais, ristournes inscrite dans la loi d’avenir pour l’agriculture a permis cette baisse. Toutefois, elle ne l’a pas permise seule : cette diminution s’explique aussi par le travail extraordinaire réalisé par les éleveurs comme les vétérinaires, en milieu rural, pour limiter l’utilisation des antibiotiques dans l’élevage, au service de la qualité alimentaire des filières, ainsi que du bien-être des animaux.

Je suis bien évidemment plutôt favorable aux amendements qui ont été présentés, parce qu’ils rétablissent une disposition que nous estimons essentielle. Cependant, l’amendement du Gouvernement ne reprend pas les pouvoirs de sanction que le II de l’article 14 prévoyait d’inscrire dans le code de la consommation. Ces pouvoirs de sanction sont élargis et repris dans un autre amendement, que je vous présenterai tout à l’heure.

Par conséquent, je sollicite le retrait de ces amendements, au profit de l’amendement gouvernemental. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. « Rabais », « remises », « ristournes » seraient-ils des mots à proscrire de notre vocabulaire ? La volonté d’interdire aux agriculteurs de bénéficier de ces pratiques sur les produits phytosanitaires me conduit à formuler quelques remarques.

Tout d’abord, c’est un véritable message de mépris adressé à nos agriculteurs. Comment expliquer cette décision sans remettre en cause l’intégrité de toute une profession, qui ne se résout pas à utiliser ces produits pour faire plaisir au prétendu lobbying de Monsanto ou de Bayer ?

Ensuite, c’est une méconnaissance totale des efforts menés par toute une profession pour utiliser les meilleures techniques, afin de limiter au maximum leur emploi. Informatique embarquée, bas dosage, Certiphyto… Tous ces mots riment avec technicité, responsabilité et application.

Enfin, c’est une réelle injustice. Comment expliquer que seuls les agriculteurs seraient punis, alors que, partout ailleurs, les rabais, remises et ristournes font partie intégrante des négociations commerciales et sont les éléments clés d’une diminution des charges que toute entreprise bien gérée se doit de faire ?

Comment peut-on maintenir que cette mesure est une bonne mesure, compte tenu de l’actualité et des ristournes accordées durant la campagne du candidat Macron ? (M. Fabien Gay et Mme Catherine Procaccia sesclaffent.)

Comment le Gouvernement pourra-t-il maintenir devant tous les agriculteurs de France qu’il rencontrera dans les jours à venir que cette mesure n’est pas le nouveau produit d’une politique du « deux poids, deux mesures » ?

Interdire 1 % de remise aux paysans, alors que notre Président de la République a bénéficié de remises pouvant atteindre 60 % à 70 %, est tout simplement indécent.

Mes chers collègues, permettez-moi de vous citer la fin de la fable Le Lion et le moucheron, de Jean de La Fontaine :

« Quelle chose par là nous peut être enseignée ?

« J’en vois deux, dont l’une est qu’entre nos ennemis

« Les plus à craindre sont souvent les plus petits ;

« L’autre, qu’aux grands périls tel a pu se soustraire

« Qui périt pour la moindre affaire. »

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Je suis assez d’accord avec Mme la rapporteur, même si, comme mes collègues, notamment Nicole Bonnefoy, je pense que ces produits ne sont pas comme les autres, qu’ils sont dangereux et que nous devons faire très attention à leur emploi. Mais, ne pas accorder une ristourne ou un rabais, c’est diminuer le pouvoir d’achat de l’agriculteur.

Comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, ce n’est pas parce qu’on lui aura accordé une ristourne à la morte-saison que, la saison suivante, l’agriculteur emploiera une plus grande quantité de ces produits, qui sont homologués sur la base d’une dose par hectare. Pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires, comme le souhaite une large majorité d’entre nous, il faut explorer d’autres pistes : réflexion sur le conseil et la vente, formation des agriculteurs, moindre diffusion des appareils de traitement, sur lesquels il faudra certainement avoir davantage de vision…

J’en suis désolé, mais, sur ce point, je ne suis pas d’accord avec certains de mes collègues. Comme Mme la rapporteur, je considère que l’interdiction des ristournes n’engendrera pas de baisse de consommation de la part de l’agriculteur : elle ne fera que diminuer son pouvoir d’achat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Le fait qu’on puisse ne pas être d’accord, c’est la base du débat démocratique. C’est pourquoi je ne voudrais surtout pas que les propos que j’ai tenus soient interprétés comme une atteinte à l’intégrité de mes collègues ou comme du mépris à l’égard des exploitants agricoles, que je respecte autant que quiconque ici.

M. René-Paul Savary. Ah bah, ça alors !

M. Joël Labbé. Il se trouve que ces produits pesticides sont toxiques pour la santé humaine comme pour l’environnement. Il se trouve également que les alternatives existent et que nous n’avons pas travaillé sur certaines de manière suffisamment approfondie.

Monsieur Duplomb, vous évoquiez le moucheron de la fable. Mais, dès qu’on veut éradiquer les moucherons avec des produits chimiques, on éradique aussi leurs prédateurs ! Travaillons sur les équilibres environnementaux. La recherche doit avancer sur ce plan. Elle est engagée, avec, déjà, une mise en application dans certains domaines. Je maintiens donc mon point de vue sur les rabais et ristournes.

On a évoqué le paiement des services environnementaux. On ne peut pas, dans le même temps, autoriser les rabais et ristournes sur les services non environnementaux. Ce serait un très mauvais signe !

Enfin, cette mesure a été adoptée à l’Assemblée nationale à une large majorité.

Mme Catherine Procaccia. Ce n’est pas un critère !

M. Joël Labbé. Je le répète, j’estime que notre rôle est d’enrichir le texte, pas de l’appauvrir.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Pour ma part, je ne crois pas qu’on appauvrisse le texte. J’ai plutôt l’impression que, une fois de plus, ce sont les agriculteurs qu’on appauvrit ! (MM. Laurent Duplomb et Jackie Pierre applaudissent.) Pourtant, l’objectif de ce texte était, me semble-t-il, de prendre en compte la situation difficile des agriculteurs.

Il a été dit qu’il y avait de plus en plus de produits phytosanitaires. Non ! C’est une contre-vérité. On utilise de moins en moins de produits phytosanitaires : la baisse a été de 40 % en vingt ans. Toutefois, leur coût est toujours plus élevé : il a augmenté de 40 % sur la même durée,…

M. Laurent Duplomb. C’est vrai !

M. Joël Labbé. Avec des concentrations plus importantes !

M. René-Paul Savary. … en raison notamment de taxes, mais aussi de la rareté des produits.

Contrairement à ce que certains pourraient laisser croire, je ne suis soumis à aucun lobby.

Je sais que la France est le pays le plus important de l’Europe en surface, mais qu’elle n’est que neuvième pour l’utilisation des produits phytosanitaires, ce qui confirme bien l’effort qui a été consenti par un certain nombre d’agriculteurs.

Je veux également rappeler que nous avons rencontré de nombreuses difficultés, en 2014 – souvenez-vous, mes chers collègues, de la discussion que nous avions eue alors –, lorsque nous avons voulu prendre des mesures concernant les produits de biocontrôle, qui constituent une alternative tout à fait intéressante.

M. Joël Labbé. Justement !

M. René-Paul Savary. Je ne suis pas sûr que ce ne soit pas dans cette direction qu’il faille aller aujourd’hui, en favorisant l’utilisation des biocontrôles et en faisant en sorte que, dans une stratégie bien définie avec les agriculteurs, conformément à ce que ceux-ci souhaitent à travers le projet de « contrat de solutions » proposé par certains, on parvienne, à terme, à utiliser moins de produits phytosanitaires.

Si tout le monde a le même objectif, il ne s’agit pas a priori de ne pas faire confiance au monde agricole et de prendre des mesures qui pénaliseront cet élan vers une stratégie définie.

Pour conclure, je veux évoquer les expériences très intéressantes qui sont actuellement menées dans mon département dans le domaine de la bioéconomie, mais également désormais dans celui des techniques de production, à travers le projet TerraLab. C’est à travers de telles innovations que nous parviendrons, tous ensemble, à ce qu’on utilise moins de produits phytosanitaires. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Nous avons prouvé, la semaine dernière, sur des sujets sensibles, que nous pouvions dépassionner le débat. Pourquoi ne pas continuer dans la même voie ?

Nous avons vu les dangers de la politisation et de la médiatisation à outrance de certains dossiers, comme celui du glyphosate. Je pense que, sur de tels dossiers, il y a un temps pour tout. Passé les moments de peur et d’émotion, il faut retrouver sérénité et lucidité et considérer les dossiers, qu’il s’agisse de ristournes ou d’interdictions, avec pragmatisme.

À la suite d’une saisine de la commission des affaires européennes et de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, j’ai été chargé de rédiger, pour l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport sur le glyphosate. Ce rapport sera rendu public au mois de novembre prochain. Le temps passant, on constate que, plus les informations s’accumulent, plus la littérature est abondante, plus la cancérogénicité de ce produit est improbable.

Nous parlerons également des produits voisins que sont les néonicotinoïdes.

Aujourd’hui, deux grandes tendances se dégagent à l’égard de notre pharmacopée : ceux qui voudraient tout garder et ceux qui voudraient vider complètement notre « trousse à pharmacie ». Prenons garde, mes chers collègues ! Le monde sans insecte et sans infection bactérienne ou fongique n’existe pas encore. Gardons quelques armes à notre disposition.

Faut-il tout conserver pour autant ? Je crois qu’il faut être raisonnable. Comme le disait notre collègue René-Paul Savary, observons les progrès accomplis depuis de nombreuses années dans l’utilisation de l’eau ou encore dans l’usage des produits phytosanitaires. Continuons dans cette voie avec pragmatisme.

De plus, depuis la fusion de l’AFSSA et de l’AFSSET, nous disposons, avec l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, d’une agence hyperperformante, que tout le monde nous envie et qui a mis en place un système de phytopharmacovigilance. Il serait totalement incohérent que l’on finance une telle agence pour s’asseoir in fine sur ses recommandations.

Nous avons également vu les dangers et les problèmes créés par la surtransposition de la réglementation européenne. Ce débat nous offre donc une excellente occasion de mettre en adéquation nos paroles et nos actions.

Quant aux ristournes, on ne peut évidemment pas voter une telle mesure : celle-ci impacterait directement le revenu des agriculteurs, qui n’ont pas besoin de cela en ce moment.

M. Gérard Longuet. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je veux intervenir non pas sur le fond, mais sur la forme.

Je veux aller dans le sens de notre rapporteur pour avis et dire que, sur les rabais et ristournes, comme, plus tard, sur le glyphosate ou les néonicotinoïdes, je souhaite que nous ayons un débat apaisé.

Nous avons tous des convictions. Écoutons-nous, respectons nos argumentations et évitons les accusations !

Monsieur Labbé, les propos que vous avez tenus sont accusatoires et très blessants. Ils ne donnent pas une image fidèle de notre assemblée, qui, vous le savez, travaille sur le fond et n’est pas sous l’influence des lobbies. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Très bien !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Nous ne sommes pas sensibles aux lobbies ! Je pense aux lobbies des produits phytopharmaceutiques, comme à ceux qui jettent en pâture sur les réseaux sociaux les images des parlementaires, pour qu’ils soient accusés…

J’appelle donc au calme et à la sérénité sur ces sujets graves, qui touchent au sens de notre agriculture et à sa transformation. Je voudrais vraiment que le Sénat fasse honneur à sa réputation de sagesse. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je souhaite moi aussi que ce débat se déroule dans la sérénité, mais je pense que, de fait, le débat est serein. Cela dit, il est normal que ce sujet suscite des propos passionnés.

Je pense qu’il ne faut surtout pas avoir de mépris pour les exploitants agricoles et pour les agriculteurs.

Il n’y a pas très longtemps, nous avons voté, à l’unanimité, le principe d’une indemnisation des victimes des produits phytosanitaires. Autrement dit, nous avons affirmé, à l’unanimité, que les produits phytosanitaires posaient un problème réel et qu’ils avaient causé des maladies, qu’il fallait indemniser. Il faut continuer dans cette logique.

On me dit que les promotions ne font pas vendre plus. En ce cas, à quoi servent-elles ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Expliquez-moi, chers collègues !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. À acheter moins cher !

M. Guillaume Gontard. Il me semble que, si l’on veut aider les agriculteurs, si l’on veut soutenir leurs revenus, il faut les accompagner pour qu’ils utilisent moins de produits phytosanitaires et pour qu’ils se tournent vers une autre agriculture. C’est justement l’achat des produits phytosanitaires qui leur coûte cher actuellement !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je suis, moi aussi, favorable à un débat apaisé. Pour ce faire, je crois que nous devons nous appuyer sur la réalité des chiffres.

Mon collègue Savary a affirmé que l’utilisation des produits phytosanitaires avait baissé de 40 % depuis vingt ans.

J’ai consulté rapidement le site internet du ministère de l’agriculture. Les derniers chiffres que j’y ai trouvés datent de 2015 – c’était alors M. Stéphane Le Foll qui était ministre de l’agriculture. Cette année-là, les produits phytosanitaires utilisés avaient effectivement baissé de 2,7 %, sans qu’on sache, comme le reconnaissait alors le ministère, si cette baisse était liée à la conversion d’agriculteurs au bio ou à une météo plus favorable. En revanche, depuis 2009, l’utilisation des produits phytosanitaires n’avait cessé d’augmenter. Elle avait même augmenté, en 2014, de 9,4 %. Je peux vous montrer ces chiffres, mes chers collègues. Leur source est on ne peut plus fiable !

Par ailleurs, il n’y a pas, d’un côté, les défenseurs du pouvoir d’achat des agriculteurs et des agricultrices et, de l’autre, ceux qui voudraient leur amputer leur budget. Il n’y a pas non plus des sénateurs qui se préoccupent de santé publique et d’autres qui n’en auraient rien à faire. La véritable question qui nous est posée est celle de l’application du principe de précaution, si nous pensons collectivement qu’un risque existe.

Je suis évidemment d’accord avec mes collègues qui appellent à ne pas culpabiliser les agriculteurs et les agricultrices. D’ailleurs, personne ne le fait ! Les agriculteurs font comme on leur a appris. La situation actuelle est le résultat de l’agriculture productiviste telle qu’elle existe depuis quarante ans. Si nous voulons en sortir, notamment sur cette question des promotions, il faut les accompagner vers autre chose. Certes, ces techniques sont aujourd’hui balbutiantes, mais nous avons le devoir d’y investir assez massivement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je rejoins la présidente de la commission : il n’y a aucune raison pour que le Sénat ne se rassemble pas sur cette question comme il a su le faire, par exemple, sur celle des cantines, pour parvenir à une réponse consensuelle qui permette de faire confiance aux femmes et aux hommes qui sont les acteurs de notre agriculture.

Ne parle-t-on pas du « bon sens paysan » en français ?

M. Daniel Gremillet. Mon père m’a toujours appris, et c’est ainsi que tous les paysans ont été élevés, que le premier argent gagné est celui qu’on ne dépense pas. Les rabais et ristournes ne vont pas du tout inciter les agriculteurs à mettre plus de produits pour soigner les plantes. Pas du tout !

Au cours du débat, on a beaucoup parlé de « collectif ». Certains semblent oublier qu’un homme seul n’est pas grand-chose en agriculture. Les rabais et ristournes viennent justement parce que les agricultrices et les agriculteurs ont su s’organiser sur le terrain pour acheter collectivement et n’avoir qu’un seul point de livraison, par exemple, pour faire diminuer les coûts. Un unique point de livraison a aussi des conséquences positives en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Les agriculteurs cherchent réellement l’efficacité au quotidien. Alors, de grâce, faisons confiance aux hommes !

Par ailleurs, si vous prenez les chiffres, production par production, vous constaterez que la consommation de médicaments des plantes à l’hectare, par rapport aux volumes produits, est bien inférieure aux objectifs assignés aux agriculteurs, à l’instar de ce qui s’est passé sur les antibiotiques dont la consommation est inférieure de 10 % par rapport à l’objectif fixé par Stéphane Le Foll.

Enfin, même l’agriculture biologique doit recourir à certains produits pour tuer les mauvaises herbes. De grâce, gardons tous notre bon sens paysan ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Cuypers. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.

Mme Nicole Bonnefoy. Je rejoins tout ce qu’ont dit le rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et la présidente de la commission des affaires économiques. Sur ces sujets éminemment graves, sensibles, personne ne détient la vérité.

En 2012, nous avons su avancer ensemble dans le cadre de la mission commune d’information que nous avons menée au Sénat et qui a abouti, au début de cette année, à l’adoption à l’unanimité de la proposition de loi portant création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. Nous sommes donc capables d’avancer sur ces sujets pour peu que nous dépassionnions le débat.

Pour ce qui concerne mon amendement, je le retire au profit de celui du Gouvernement.

M. le président. L’amendement n° 551 rectifié est retiré.

M. Joël Labbé. Monsieur le président,…

M. le président. Vous avez déjà pris la parole pour explication de vote, mon cher collègue.

M. Joël Labbé. … je veux dire…

M. le président. Je ne peux donc pas vous la redonner, sauf si vous souhaitez retirer votre amendement.

M. Joël Labbé. Oui, il est retiré, simplement,…

M. le président. Monsieur Labbé, soyez un tout petit peu respectueux du règlement du Sénat !

M. Joël Labbé. … je veux dire que je souhaite moi aussi un dialogue apaisé. Je vous explique pourquoi.

M. le président. Non, vous aurez l’occasion d’expliquer votre vote sur l’amendement du Gouvernement dans quelques instants, si vous le désirez.

M. Joël Labbé. Parce que l’amendement du Gouvernement est mesuré, et je tiens à le dire…

M. le président. Monsieur Labbé, respectez notre règlement !

L’amendement n° 486 rectifié est retiré.

La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

M. Jérôme Bignon. Comme tout le monde, je suis bien évidemment très favorable à un débat apaisé. Il est tellement plus agréable de se dire gentiment des choses vraies.

Cela étant, je ne comprends pas certains termes du débat. Peut-être allez-vous pouvoir m’éclairer : si l’on veut empêcher certains produits dangereux d’être davantage répandus dans les champs, il me semblerait logique de les interdire, ce qu’on ne veut ou ne peut faire. Or nous avons su le faire pour les néonicotinoïdes.

Je ne vois pas en quoi le fait de supprimer la ristourne va empêcher les paysans de mettre des produits dans les champs.

M. Gérard Longuet. Tout à fait !

M. Jérôme Bignon. Ils vont gagner un peu moins d’argent, mais cela n’influencera pas la quantité de produits utilisés. C’est une question de bon sens.

Il existe une solution que personne n’évoque, ce qui me surprend un peu : pourquoi ne pas travailler sur la taxe applicable aux produits phytosanitaires ? Son augmentation aurait un effet immédiat.

Par ailleurs, cette histoire de ristourne est blessante pour les cultivateurs, dont on pourrait penser qu’ils répandent certains produits en fonction de leurs combines avec les fabricants. Je ne trouve cela ni très sympa ni très sain pour les relations entre agriculteurs, citoyens, parlement et gouvernement.

Il serait plus juste d’interdire totalement ces produits si on n’en veut plus, ou de les taxer davantage pour en faire diminuer la consommation. Ce serait faire preuve de davantage de cohérence.

Je voterai contre la suppression des ristournes, disposition absolument pas efficace. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 195 et 633 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote sur l’amendement n° 749.

M. Joël Labbé. Merci de me donner la parole, monsieur le président.

Comme tout le monde, je souhaite un dialogue apaisé. Pour autant, la sérénité, ça ne se décrète pas. Et sur ce genre de sujet, je tiens à vous dire que je ne suis pas serein tant pour des raisons de santé humaine que de santé environnementale ! Bien que gravissime, la situation ne semble pas suffisamment palpable.

J’ai retiré de très bon cœur mon amendement au profit de celui du Gouvernement, dont les arguments m’ont convaincu. Je souhaite véritablement qu’on parvienne à un consensus.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je voudrais rectifier mes propos, pour que les choses soient bien claires : les chiffres que j’ai cités concernaient la filière céréalière, dont la consommation de produits a diminué de 40 % quand le coût des mêmes produits augmentait d’autant.

S’il en fallait une, c’est bien la preuve par neuf que des efforts sont aussi réalisés dans les grandes cultures intensives pour réduire l’usage des produits phytosanitaires. L’objectif des céréaliers, comme du monde viticole que je connais un peu, est bien d’arriver à terme à produire de la façon la plus propre possible en faisant appel à des techniques nouvelles et à des produits beaucoup plus intéressants pour l’ensemble de la chaîne humaine ou animale.

Le problème est qu’aujourd’hui nous n’avons pas de solution de remplacement. Prenons garde de ne pas remplacer ces produits par d’autres produits qui se révéleront demain encore plus dangereux. Bien souvent, les choses se passent ainsi.

N’oublions pas non plus que nous sommes en compétition avec nos amis Européens. Nos partenaires de l’Union européenne, avec lesquels nous partageons un certain nombre de valeurs dans le monde agricole, doivent être soumis aux mêmes règles et aux mêmes contraintes : ne pénalisons pas davantage le paysan français que les autres paysans européens. C’est la raison pour laquelle je reste particulièrement ferme – et serein – sur cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Jérôme Bignon et Franck Menonville applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Que les choses soient bien claires, monsieur Savary : le Gouvernement n’a pas déposé cet amendement en partant du postulat que les agriculteurs mettraient moins de produits s’ils coûtaient plus cher. Le dosage n’est pas fonction du prix, mais des besoins particuliers d’un territoire donné.

Nous n’avons pas décidé comme ça, un matin, de supprimer ces rabais, remises et ristournes pour le plaisir de faire supporter une charge supplémentaire aux agriculteurs.

M. Gérard Longuet. Ça y ressemble !

M. Stéphane Travert, ministre. Au contraire, à travers ce projet de loi, nous essayons de diminuer leurs charges, d’augmenter leurs revenus et de travailler sur la qualité. Pour ce faire, nous devons trouver ensemble les voies et moyens nous permettant de modifier les pratiques, à travers la formation, par exemple.

Vous avez évoqué une diminution de 40 % des produits phytosanitaires dans les grandes cultures céréalières. Je vous rejoins sur un point : la filière viticole a réalisé un très, très gros travail sur la diminution de ces produits. La filière céréalière conduit également ce travail, mais elle est moins avancée.

M. René-Paul Savary. C’est vrai !

M. Stéphane Travert, ministre. Notre idée n’est pas non plus d’interdire toute consommation de produits phytosanitaires pour les remplacer par d’autres, encore plus dangereux, ce qui n’aurait aucun sens au plan environnemental. Nous voulons travailler sur les pratiques vertueuses, sur la rotation des cultures, sur les changements de pratiques agronomiques et diminuer petit à petit l’utilisation de ces produits phytosanitaires, sans jamais laisser les gens sans solution – nous y reviendrons sur la question du glyphosate. Le Président de la République a toujours été clair sur ce sujet : pas d’interdiction sans solution alternative ; pas de surtransposition non plus.

Je vous rejoins sur autre un point : nous avons besoin de travailler au plan européen pour harmoniser les réglementations. Et, comme moi, vous savez que ce ne sera pas facile ! La France a choisi un chemin clair en prenant les devants sur ces questions. Nous espérons être accompagnés par le plus grand nombre, et nous menons un travail de persuasion auprès des autres États membres.

Les choses avancent chez certains et avancent même plutôt bien : j’ai reçu mon homologue allemande, la semaine dernière, pour entamer un travail conjoint sur ces questions de réduction des produits phytosanitaires. L’Allemagne a un rôle très important à jouer dans ce domaine. La société allemande est en train de bouger, tout comme bouge la société française. Les consommateurs, nos concitoyens, nous réclament des comptes sur ces sujets.

Pour autant, nous ne devons pas faire les choses n’importe comment. Nous devons accompagner cette transition. Vous aurez remarqué que je ne fais pas partie de ceux qui prennent pour postulat de départ d’interdire les choses de manière brutale. Au contraire, je souhaite utiliser le temps ; raison pour laquelle nous avons présenté une feuille de route de sortie des produits phytosanitaires et de réduction de leur utilisation qui s’inscrit sur la durée du quinquennat. Il s’agit de la feuille de route sur la politique alimentaire 2018-2022.

Nous travaillons sur des trajectoires nous permettant d’abord de diminuer les fréquences de traitement et ensuite d’aider chacune des filières à trouver sa place et à progresser. Au final, il s’agit de nous mettre d’accord sur ces principes. C’est tout le sens de cet amendement.

À un moment, il faut se décider à amorcer les choses, à l’instar de ce qui a été réalisé dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt sur la question des antibiotiques. Le sujet est différent, certes, mais les filières ont su s’emparer de cette question avec les vétérinaires et l’ensemble des professionnels pour parvenir à une réduction de 37 % de l’utilisation des antibiotiques, alors que l’objectif retenu dans la loi d’avenir était de 24 %, ce qui constitue une première en Europe. Je tiens d’ailleurs à saluer le travail des éleveurs.

Nous devons faire preuve de vigilance : les autres pays nous observent et s’intéressent à la manière dont nous accompagnons les choses. Nous voulons diminuer l’utilisation des produits phytosanitaires tout en accompagnant les agriculteurs. Il s’agit non seulement de bien faire les choses, mais aussi de le faire dans l’intérêt économique des agriculteurs et dans celui de leur compétitivité.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. À certains moments, je me pose la question de savoir si le ministre parcourt la campagne.

M. Stéphane Travert, ministre. Vous ne savez pas où j’habite !

M. Laurent Duplomb. Les agriculteurs pratiquent la rotation depuis des décennies, pour ne pas dire des siècles.

M. Stéphane Travert, ministre. Bien sûr !

M. Laurent Duplomb. Sur mon exploitation, par exemple, je ne fais jamais deux cultures identiques une année sur l’autre. La rotation permet de limiter la consommation de produits phytosanitaires et de fertilisants et donc de produire à moindre coût.

Observez ce qui se passe dans les campagnes : vous y verrez des agriculteurs qui binent des maïs et qui, au lieu de désherber avec de l’atrazine comme cela se faisait voilà vingt ans, limitent au maximum le désherbage au premier passage et favorisent le binage de façon à éliminer un maximum de plantes adventices.

Dans cet hémicycle, personne n’évoque la surveillance. Quand une plante adventice mesure dix centimètres, il faut mettre trois fois plus de produits que si elle n’avait que deux feuilles. Les agriculteurs vont donc très régulièrement dans leurs champs pour déterminer le moment optimal de la moindre utilisation de produits. Pour quelle raison, monsieur le ministre ? Tout simplement parce qu’ils paient ces produits ! À vouloir toujours augmenter les impôts comme vous le faites et à maintenir les prix au plus bas sur l’alimentation, le revenu des agriculteurs diminue. Et quand votre revenu n’est pas à la hauteur de ce que vous attendiez ni du travail fourni, vous faites attention à toutes vos dépenses !

Mes chers collègues, ne croyez pas que les agriculteurs achètent des désherbants ou des pesticides pour le plaisir. Quelqu’un sait-il, dans cet hémicycle, que laisser quatre plants de gaillet gratteron par mètre carré sur un blé équivaut à perdre quinze quintaux sur la culture ?

Hormis la question du rendement, se pose aussi celle des microtoxines : quand on laisse trop de coquelicots et de bleuets dans un champ, le blé a des difficultés pour se nourrir et faire monter l’amidon dans le grain, car trop concurrencé sur la culture. Au final, ce blé sera plein de microtoxines qui passent la barrière du four du boulanger et qu’on retrouve dans le pain. Ainsi, dans quelques années, on se rendra compte que ce qu’on croyait être exceptionnel, parce que bio, est encore plus chargé de microtoxines qu’auparavant.

Regardons un peu les choses en face. Je ne suis pas en train de dire qu’il ne faut pas d’agriculteurs en bio, mais penser que l’agriculture française, au milieu d’un monde concurrentiel,…

M. le président. Il faut conclure !

M. Laurent Duplomb. … puisse véritablement se passer des produits phytosanitaires que tout le monde utilise n’est pas sérieux. En utilisant ces produits, nous cherchons simplement à limiter la concurrence sur la culture – car un agriculteur ne sème pas pour récolter des plantes adventices – et à produire de la manière la plus saine possible,…

M. le président. Merci de conclure !

M. Laurent Duplomb. … même si cela ne va pas sans quelques inconvénients. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 749.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 14 demeure supprimé.

Article 14 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 - Amendement n° 570 rectifié

Articles additionnels après l’article 14

M. le président. L’amendement n° 757 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 511-12 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … Les manquements aux chapitres III et IV du titre V du livre II code rural et de la pêche maritime. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à étendre l’habilitation des agents des services de l’État pour constater les manquements liés à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques concernant notamment les conditions d’étiquetage qu’ils doivent respecter et l’interdiction de vente en libre-service de certains produits aux particuliers.

Le contrôle des produits phytopharmaceutiques est notamment réalisé par les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, raison pour laquelle nous vous proposons d’introduire cette habilitation dans le code de la consommation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement qui vise à renforcer le dispositif existant.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 757 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 14 - Amendement n° 757 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article 14 bis

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

L’amendement n° 570 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 31 décembre 2018, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dans lequel il présente les actions qu’il compte engager pour encourager la mise en place d’un fonds européen des agences sanitaires communautaires des États membres. Ce fonds, financé par les agences elles-mêmes, aurait pour but de financer des recherches notamment toxicologiques publiques indépendantes destinées à soutenir la réalisation d’études sur les risques sanitaires et environnementaux.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement d’appel vise à demander au Gouvernement de s’engager auprès de ses partenaires de l’Union européenne pour demander la création d’un fonds interagences sanitaires au niveau européen qui aurait pour but de financer des études et travaux de recherche sur les risques sanitaires et environnementaux insuffisamment documentés ou controversés.

Ce dispositif permettrait, d’une part, de répondre à des situations de crise se caractérisant par des controverses scientifiques ou sociétales et, d’autre part, d’agir de façon proactive en anticipant un manque de données sur certains sujets et de lancer en conséquence des études de grande ampleur.

Lors de l’élaboration de cet amendement, nous avons échangé avec l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui nous a confirmé la pertinence d’un tel fonds interagences. L’ANSES constate en effet que l’existence lacunaire de données scientifiques sur certaines thématiques conduit à des questionnements sur l’indépendance ou l’exhaustivité des études menées par les agences, comme nous avons pu le constater au gré de polémiques entourant telle ou telle substance active.

C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement d’appel, de mener une réflexion sur la mise en place d’une réelle stratégie européenne de collaboration entre agences nationales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Comme il s’agit d’un amendement d’appel, nous laissons le Gouvernement y répondre.

Toutefois, les budgets des agences sanitaires sont déjà contraints, ce qui explique largement les délais d’attente, souvent très longs, des remises de rapport et des évaluations. La commission est donc plutôt défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. La question est donc de savoir si le Gouvernement répond à l’appel…

Bien évidemment, nous soutenons la création d’un tel dispositif. Nous avons eu l’occasion de le réaffirmer à plusieurs reprises, notamment dans le cadre du plan de sortie des produits phytosanitaires que j’ai présenté le 25 avril dernier avec trois de mes collègues.

Nous avons salué la position de la Commission européenne, qui propose aussi la création d’un tel mécanisme. La Commission a accepté de mener des études depuis décembre 2017.

Dans la mesure où il s’agit d’une compétence européenne, nous ne pouvons décider seuls. Je ne suis donc pas favorable à la remise d’un rapport.

La Commission a enclenché une dynamique. Travaillons à l’échelon européen pour essayer d’obtenir un maximum d’informations et essayons de travailler avec la Commission sur ces sujets, comme elle nous a engagés à le faire.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la rapporteur, bien évidemment, les agences ont besoin de moyens. Toutefois, j’ai mené ce travail en amont avec l’ANSES, et c’est elle qui réclame cette coopération interagences à l’échelle européenne.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Comme le souligne Mme Bonnefoy, cela nous permettrait d’éviter certains débats franco-français, notamment sur l’interdiction de mise sur le marché de certains produits.

Comme beaucoup de sénatrices et de sénateurs ici présents, nous défendons une vision européenne qui permettrait, par exemple, d’informer les autres pays de la dangerosité d’un produit révélée par une agence nationale et d’étendre éventuellement son interdiction à l’ensemble des États membres.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 570 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 - Amendement n° 570 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 bis - Amendement n° 473 rectifié

Article 14 bis

I. – Le chapitre II du titre II du livre V du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° La section 1 est complétée par des articles L. 522-5-2 et L. 522-5-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 522-5-2. – Certaines catégories de produits biocides telles que définies par le règlement (UE) n° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 précité ne peuvent être cédées directement en libre-service à des utilisateurs non professionnels.

« Pour la cession des produits biocides mentionnés au premier alinéa à des utilisateurs non professionnels, les distributeurs fournissent des informations générales sur les risques pour la santé humaine et l’environnement liés à l’utilisation de ces produits, notamment sur les dangers, l’exposition, les conditions appropriées de stockage et les consignes à respecter pour la manipulation, l’application et l’élimination sans danger, ainsi que sur les solutions de substitution présentant un faible risque.

« Un décret en Conseil d’État précise les catégories de produits concernés en fonction des risques pour la santé humaine et pour l’environnement, ainsi que le délai dont disposent les distributeurs pour engager un programme de retrait de la vente en libre-service de ces produits.

« Art. L. 522-5-3. – Toute publicité commerciale est interdite pour certaines catégories de produits biocides définies par le règlement (UE) n° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 précité.

« Par dérogation au premier alinéa du présent article, la publicité destinée aux utilisateurs professionnels pour les produits concernés est autorisée dans les points de distribution de produits à ces utilisateurs et dans les publications qui leur sont destinées, sous réserve de contenir une information explicite relative aux risques que l’exposition à ces produits entraîne sur la santé et sur l’environnement.

« Un décret, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, définit les catégories de produits concernés en fonction des risques pour la santé humaine et pour l’environnement, les conditions dans lesquelles les insertions publicitaires sont présentées ainsi que le contenu et le format de l’information mentionnée au deuxième alinéa. » ;

2° (Supprimé)

II. – (Non modifié) Le présent article entre en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi et s’applique aux contrats conclus ou renouvelés à compter de cette même date.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 32 rectifié est présenté par M. Piednoir, Mmes Deroche, Lavarde et Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Poniatowski et Bascher, Mme Duranton, MM. Revet, Dallier et Savin, Mme Deromedi, M. Danesi, Mme Lamure, MM. Mayet, Sido et Chatillon et Mme Delmont-Koropoulis.

L’amendement n° 38 rectifié quater est présenté par MM. Daubresse, Adnot, Bazin et Bizet, Mme Bories, M. Charon, Mme L. Darcos, M. Henno, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mme Lherbier et MM. Mizzon, Moga et Savary.

L’amendement n° 646 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet et Duplomb, Mme Bruguière, MM. Pointereau, Reichardt et de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Paul, Mouiller et Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Joyandet, Morisset et Huré, Mme Lassarade, M. Priou, Mme Gruny, MM. de Legge, Longuet et Babary, Mmes Imbert et de Cidrac, MM. Pierre, Rapin et Laménie, Mme A.M. Bertrand et MM. Bonne, Vaspart, Cornu et Bouchet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Christine Lavarde, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié.

Mme Christine Lavarde. L’article 14 bis, introduit en commission à l’Assemblée nationale, prévoit l’interdiction de la vente en libre-service et de la publicité pour certaines catégories de produits biocides qui seront définies par décret. Il s’agit de produits de la vie courante – désinfectants ménagers, produits de protection du bois, insecticides… – ayant un intérêt sanitaire qui visent à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles par une action chimique ou biologique.

Dans un contexte de recrudescence des nuisibles, en France métropolitaine comme dans les départements et collectivités d’outre-mer, le maintien d’un accès raisonnable aux produits biocides constitue un enjeu de santé publique majeur. L’utilisation et la mise sur le marché de ces produits étant d’ores et déjà régies par le règlement européen n° 528/2012, l’article 14 bis constitue une surtransposition injustifiée susceptible de créer une distorsion réglementaire vis-à-vis des autres États membres. Or notre assemblée a voté, à la quasi-unanimité, un amendement visant à interdire toute surtransposition.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 38 rectifié quater.

M. René-Paul Savary. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 646 rectifié bis.

M. Daniel Gremillet. Il s’agit vraiment d’un sujet de fond : on est en train de restreindre notre capacité à lutter contre les nuisibles, alors qu’on n’a pas forcément l’arsenal nécessaire pour remplacer les produits qu’on est en train d’interdire, et de fragiliser certains secteurs de notre économie. Prenons l’exemple des raticides et des souricides. Il ne s’agit pas ici de lutter contre des espèces en voie de disparition !

Je ne parle pas que d’agriculture, la société tout entière est concernée. On sait que les épizooties peuvent avoir des conséquences sur la santé humaine. Or, monsieur le ministre, vous avez pour partie la responsabilité de la santé publique.

Nous reviendrons dans quelques instants sur la lenteur avec laquelle l’ANSES publie les expertises et les autorisations de mise sur le marché de certains produits de substitution aux biocides. Sans vouloir développer plus avant, il s’agit d’un exemple très concret de fragilisation non pas uniquement de l’agriculture, mais de la société française.

On met également en péril des commerçants qui, répartis sur notre territoire, peuvent conseiller les usagers pour lutter, par exemple, contre les souris et les rats, que l’on rencontre dans les champs et, de plus en plus, dans les villes. Il s’agit d’ailleurs d’un phénomène très inquiétant, qui ne peut laisser insensible.

Il ne s’agit donc pas que d’un sujet de paysan : il concerne l’ensemble de la sécurité sanitaire de notre pays.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La principale mesure de cet article concerne l’interdiction de certains produits biocides aux utilisateurs non professionnels.

Ce sujet soulève de véritables problèmes sanitaires : le contrôle des nuisibles est un enjeu de santé publique et l’accès à ces produits, y compris par les utilisateurs non professionnels, est nécessaire. Interdire l’utilisation de tels produits sans prévoir de dérogations pourrait avoir des effets – ils n’ont d’ailleurs pas été mesurés – sur la politique de contrôle de ces nuisibles.

Cet article constitue une surtransposition dans la mesure où il ne figurait pas dans la rédaction initiale du Gouvernement. Il n’a pas non plus beaucoup de rapport avec l’objet agricole du texte.

Enfin, multiplier les interdictions par le législateur au pouvoir réglementaire revient à remettre en cause le travail réalisé par l’ANSES – largement souligné aujourd’hui –, qui autorise les produits après évaluation de leur toxicité et qui fournit largement des recommandations d’usage.

Pour ces raisons, la commission est favorable à ces trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Certains biocides peuvent être identiques ou similaires à des produits phytosanitaires. C’est le cas pour une cinquantaine de substances. Certaines sont interdites en tant que produit phytosanitaire, mais ne le sont pas en tant que biocide.

Nous souhaitons maintenir les dispositions de l’article 14 bis, dans la mesure où certains produits présentent des caractéristiques communes avec des risques potentiellement similaires. Certaines molécules actives des biocides peuvent aussi être des perturbateurs endocriniens.

Pour ces raisons, je suis défavorable à la suppression de l’article 14 bis.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. La rédaction actuelle de l’article 14 bis a été modifiée sur l’initiative de notre commission.

Je le rappelle, un premier volet de cet article visait à transposer aux produits biocides les interdictions de pratiques commerciales prévues par l’article 14 pour les produits phytopharmaceutiques. Cette disposition a été supprimée par la commission des affaires économiques, par parallélisme avec la suppression de l’article 14.

L’article 14 bis comprenait deux autres dispositions, qui ont été maintenues : d’une part, une interdiction de la vente en libre-service aux particuliers de certaines catégories de produits biocides ; d’autre part, une interdiction de la publicité commerciale pour certains de ces produits biocides. Ces dispositions tendaient donc à transposer à certaines catégories de produits biocides des dispositions appliquées depuis plusieurs années aux produits phytopharmaceutiques.

Favorable à cette évolution, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a proposé d’apporter des précisions sur les obligations d’information à la charge des distributeurs. Nous avons par ailleurs prévu que le décret identifiant ces produits devra définir le calendrier du programme de retrait dans les lieux de vente pour donner de la prévisibilité aux entreprises concernées.

Ces modifications, qui avaient été acceptées par la commission des affaires économiques lors de l’élaboration du texte de la commission, ont permis d’améliorer la rédaction de l’article 14 bis. Compte tenu de l’avis favorable émis à l’instant sur ces amendements de suppression, je souhaite rappeler que cet article ne vise que certaines catégories de produits identifiés en raison de leurs risques sanitaires et environnementaux. En outre, il ne tend aucunement à interdire l’utilisation des produits concernés.

Je souligne enfin que de nombreuses substances actives utilisées dans les produits phytosanitaires se retrouvent également dans les produits biocides. Si l’on souhaite réduire l’exposition quotidienne de la population aux substances chimiques et mieux protéger l’environnement, il est pertinent d’encadrer la distribution et la publicité des biocides en s’inspirant de ce qui fonctionne bien pour les produits phytosanitaires.

La commission du développement durable est donc attachée au maintien de ces deux dispositions, telles qu’elles résultent des travaux de la commission.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Pour éviter de tomber dans l’autocensure, je ne vais pas développer mon propos. Je vais simplement souligner que je partage complètement le point de vue de M. le rapporteur pour avis et la position de la commission du développement durable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32 rectifié, 38 rectifié quater et 646 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

M. Daniel Gremillet. Très bien !

M. le président. En conséquence, l’article 14 bis est supprimé, et les amendements nos 746 et 421 rectifié, les amendements identiques nos 552 rectifié et 634, ainsi que les amendements nos 686 rectifié, 688 rectifié bis et 647 rectifié n’ont plus d’objet.

L’amendement n° 746, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Pour la cession de produits biocides à des utilisateurs non professionnels, les distributeurs fournissent des informations générales sur les risques pour la santé humaine et l’environnement liés à l’utilisation des produits biocides, notamment sur les dangers, l’exposition, les conditions appropriées de stockage et les consignes à respecter pour la manipulation l’application et l’élimination sans danger ainsi que sur les solutions de substitution présentant un faible risque.

II. – Alinéa 5

Supprimer les mots :

ainsi que le délai dont disposent les distributeurs pour engager un programme de retrait de la vente en libre-service

III. – Alinéa 7

Après les mots :

qui leur sont destinées

supprimer la fin de cet alinéa.

IV. – Alinéa 8

1° Supprimer les mots :

, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail,

2° Après les mots :

et pour l’environnement

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

Ces insertions publicitaires mettent en avant les bonnes pratiques dans l’usage et l’application des produits pour la protection de la santé humaine et animale et pour l’environnement ainsi que les dangers potentiels pour la santé humaine et animale et pour l’environnement. » ;

V. – Alinéa 9

Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :

2° Est ajoutée une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Pratiques commerciales prohibées

« Art. L. 522-18. – À l’occasion de la vente de produits biocides définis à l’article L. 522-1, les remises, les rabais, les ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du code de commerce ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution de remises, de rabais ou de ristournes sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces produits est prohibée.

« Art. L. 522-19. – I. – Tout manquement aux interdictions prévues à l’article L. 522-18 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« II. – Le montant de l’amende prévue au I est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

« Cette amende peut être assortie d’une astreinte journalière d’un montant maximal de 1 000 € lorsque l’auteur de l’infraction n’a pas mis fin au manquement à l’issue d’un délai fixé par une mise en demeure.

« III. – L’autorité administrative compétente avise préalablement l’auteur du manquement des faits relevés à son encontre, des dispositions qu’il a enfreintes et des sanctions qu’il encourt. Elle lui fait connaître le délai dont il dispose pour faire valoir ses observations écrites et, le cas échéant, les modalités selon lesquelles il peut être entendu s’il en fait la demande. Elle l’informe de son droit à être assisté du conseil de son choix.

« La décision de sanction ne peut être prise plus d’un an à compter de la constatation des faits. Elle peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative. »

VI. – Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

L’amendement n° 421 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Chatillon, Lefèvre, B. Fournier et de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Paccaud, Danesi, Chaize et de Legge, Mme Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mmes Deseyne, Gruny et Berthet, MM. Sido, Milon, Paul, Mandelli, Revet et Piednoir, Mme Lassarade, MM. Dufaut, Pellevat, Magras et Kennel, Mmes Chain-Larché, Delmont-Koropoulis et Deromedi, M. Rapin, Mme de Cidrac, M. Daubresse et Mme Lanfranchi Dorgal, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après les mots :

de l’environnement et du travail,

insérer les mots :

et après une large consultation des parties prenantes de la sécurité sanitaire et de la santé,

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 552 rectifié est présenté par Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, M. Houllegatte, Mmes Préville et Tocqueville, M. Fichet et Mme Blondin.

L’amendement n° 634 est présenté par Mme Schillinger, M. Patriat, Mme Rauscent, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :

2° Est ajoutée une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Pratiques commerciales prohibées

« Art. L. 522-18. – À l’occasion de la vente de produits biocides définis à l’article L. 522-1, les remises, les rabais, les ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du code de commerce ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution de remises, de rabais ou de ristournes sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces produits est prohibée.

« Art. L. 522-19. – I. – Tout manquement aux interdictions prévues à l’article L. 522-18 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« II. – Le montant de l’amende prévue au I est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

« Cette amende peut être assortie d’une astreinte journalière d’un montant maximal de 1 000 € lorsque l’auteur de l’infraction n’a pas mis fin au manquement à l’issue d’un délai fixé par une mise en demeure.

« III. – L’autorité administrative compétente avise préalablement l’auteur du manquement des faits relevés à son encontre, des dispositions qu’il a enfreintes et des sanctions qu’il encourt. Elle lui fait connaître le délai dont il dispose pour faire valoir ses observations écrites et, le cas échéant, les modalités selon lesquelles il peut être entendu s’il en fait la demande. Elle l’informe de son droit à être assisté du conseil de son choix.

« La décision de sanction ne peut être prise plus d’un an à compter de la constatation des faits. Elle peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative. »

L’amendement n° 686 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, A. Bertrand, Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve et M. Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :

2° Est ajoutée une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Pratiques commerciales prohibées

« Art. L. 522-18. – À l’occasion de la vente de produits biocides définis à l’article L. 522-1, les remises, les rabais, les ristournes, ainsi que la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l’article L. 441-6 du code de commerce, fondés sur les volumes, les montants d’achat ou les parts de marché de ces produits, ou la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits. Toute pratique commerciale visant à contourner, directement ou indirectement, cette interdiction par l’attribution de remises, rabais ou ristournes fondés sur les volumes, les montants d’achat ou les parts de marché de ces produits sur une autre gamme de produits qui serait liée à l’achat de ces produits est prohibée. Un décret en Conseil d’État précise les conditions de mise en œuvre du présent article. »

L’amendement n° 688 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. A. Bertrand et Gabouty, Mme Jouve et M. Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Remplacer les mots :

premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi

par les mots :

1er janvier 2019

L’amendement n° 647 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Duplomb, Mme Bruguière, MM. Pointereau et Reichardt, Mme Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Piednoir, Paul, Mouiller et Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Joyandet, Morisset, Revet, Huré et Savary, Mme Lassarade, M. Priou, Mme Gruny, MM. de Legge, Longuet et Babary, Mme Imbert, M. Lefèvre, Mmes de Cidrac, Lamure et Deromedi, MM. Pierre, Rapin et Sido, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Laménie, Mme A.M. Bertrand, MM. Bonne, Vaspart et Cornu, Mmes Berthet et Duranton et MM. Poniatowski et Bouchet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Des dérogations à l’interdiction mentionnée au premier alinéa de l’article L. 522-5-2 peuvent être accordées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé en l’absence de produits de substitution ou de méthodes alternatives disponibles et efficaces aux produits biocides entrant dans le champ d’application de présent article.

L’arrêté est pris sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui compare les bénéfices et les risques liés aux usages de produits biocides autorisés en France face aux organismes nuisibles et les risques pour la santé humaine et pour l’environnement dont ces dits organismes sont vecteurs.

Article 14 bis
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Article additionnel après l'article 14 bis - Amendement n° 557 rectifié

Articles additionnels après l’article 14 bis

M. le président. L’amendement n° 473 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Castelli, Corbisez, Guérini, Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 14 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le douzième alinéa de l’article L. 1313-1 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle prend en considération dans l’évaluation des risques, les effets combinés potentiels liés à la multi-exposition à une diversité de substances, à savoir les risques liés aux effets additifs, synergiques, potentialisateurs ou antagonistes de la combinaison de produits, au regard des principaux mélanges auxquels la population est exposée. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à intégrer à l’évaluation des risques l’analyse des « effets cocktail », à savoir les risques liés à la multi-exposition à une diversité de molécules.

Au cours d’une journée, un agriculteur, un consommateur ou un riverain d’une parcelle traitée se trouve en contact avec une variété de substances, dont les effets peuvent se combiner pour représenter une toxicité imprévisible et potentiellement supérieure à celle de chaque molécule prise séparément.

L’évaluation des risques est aujourd’hui fondée sur des méthodes qui n’intègrent pas, sauf cas spécifiques, les effets des mélanges de molécules, mais analysent les substances considérées séparément, sans tenir compte de l’ensemble des effets combinés potentiels. Or des études de plus en plus nombreuses témoignent de l’inquiétude relative aux effets de ces mélanges de polluants chimiques. Elles montrent que des substances classées inoffensives peuvent endommager certaines cellules du système nerveux lorsqu’elles sont combinées, avec des effets vingt à trente fois supérieurs à une utilisation indépendante.

L’évaluation des risques doit désormais aussi prendre en compte la réalité des effets cocktail et de leur impact sur la santé publique, notamment pour les plus vulnérables, comme les femmes enceintes et les jeunes enfants. L’ANSES a commencé ce travail, mais il reste encore marginal. Peu d’informations sont disponibles, alors qu’il s’agit là d’une mission essentielle.

On me dit que cette évaluation serait trop complexe. Mais comment justifier le renoncement à des informations essentielles à la santé publique ? On est toujours dans la même logique, celle d’une généralisation des produits chimiques, sans prise en compte de leurs effets combinés, à savoir l’effet cocktail. Pourtant, les conséquences sont là : développement des maladies environnementales et impact sur la biodiversité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il ne s’agit pas, mon cher collègue, de sous-estimer le risque de ces effets, qui sont encore à découvrir. Vous l’avez dit, l’ANSES a commencé un travail sur le sujet, via son projet Périclès, qui vise à développer une méthode pour déterminer les mélanges les plus fréquents auxquels la population est exposée dans son alimentation et appréhender les effets combinés potentiels.

Ce qui nous gêne plus, c’est leur prise en compte systématique, pour laquelle l’ANSES ne serait pas opérationnelle. C’est la raison pour laquelle la commission est défavorable à cet amendement, bien que, sur le fond, elle reconnaît la nécessité de s’intéresser, comme le fait l’ANSES, aux effets cocktail.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le travail mené par les agences doit se poursuivre pour améliorer la connaissance sur les effets cocktail potentiels.

La prise en compte de l’effet cocktail fait partie de la feuille de route mise en place avec mes collègues et présentée le 25 avril dernier. Ainsi quatre ministères sont-ils rassemblés pour travailler sur ces sujets.

Dans la mesure où il convient de laisser travailler la mission interministérielle, je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Pour moi, ces travaux sont absolument nécessaires. Ils doivent être poursuivis et amplifiés. Pour ce faire, des moyens sont indispensables. C’est pourquoi je m’inquiète du plafonnement de l’emploi à l’ANSES, compte tenu de ce qui est demandé à l’agence, notamment pour ce qui concerne les PNPP, les préparations naturelles peu préoccupantes. Il faut décupler ses moyens pour qu’elle puisse avoir le temps et la possibilité de mettre en œuvre ses investigations.

Je ne peux donc accepter qu’on me réponde que les travaux sont en cours et qu’on ne peut pas aller plus vite que la musique. La santé n’attend pas !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 473 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 bis - Amendement n° 473 rectifié
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Article 14 ter

M. le président. L’amendement n° 557 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les efforts de la recherche dans la prise en compte des effets cocktail sur la santé de l’homme. Ce rapport se base sur les travaux menés notamment par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et étudie les modalités d’une meilleure prise en compte, dans l’évaluation des risques des produits phytopharmaceutiques, des effets combinés potentiels des substances sur la santé.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Je crains que cet amendement n’ait pas une issue favorable, puisqu’il prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les efforts de la recherche dans la prise en compte des effets cocktail des produits phytopharmaceutiques sur la santé de l’homme.

Les études de l’INSERM et de l’ANSES montrent, dans un certain nombre de situations, des risques potentiels pour la santé humaine liés à ces effets cocktail ou « effets mélange ».

Comme le précisait le rapport d’information de 2012 Pesticides : vers le risque zéro, le danger de cet effet cocktail est le suivant : « Différentes substances peuvent avoir un effet additionnel, antagoniste, voire synergique, à savoir ne pas produire d’effet notable individuellement, mais produire un effet important lorsqu’elles sont administrées, de manière combinée, à des doses sans effet. » Or « les procédés d’évaluation des risques en place actuellement ne permettent aucunement de mesurer ces effets cocktail potentiels ».

Nous estimons que cette situation ne peut perdurer. La prise en compte des effets cocktail, notamment dans le cadre de l’évaluation des PPP, doit devenir demain une priorité. C’est pourquoi, afin qu’un travail clair soit engagé dans ce domaine, nous souhaitons que le Gouvernement nous remette un rapport dressant un bilan de la recherche dans ce domaine, qui nous servira de base à une modification de notre législation ou de notre réglementation pour une véritable prise en compte de ces effets cocktail.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’ANSES travaille sur ce sujet, et nous n’avons pas besoin d’un nouveau rapport. La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Outre le travail de l’ANSES, il y a la feuille de route du Gouvernement.

Aujourd’hui, force est de le constater, nous n’en sommes qu’au début de la connaissance des impacts des effets cocktail. Il faut donc continuer à travailler.

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 557 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 bis - Amendement n° 557 rectifié
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Article 14 quater AA (nouveau)

Article 14 ter

La dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigée : « Les substances naturelles à usage biostimulant sont autorisées selon une procédure et une évaluation simplifiées, dont les modalités sont fixées par voie réglementaire. »

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, sur l’article.

M. Joël Labbé. Je tiens à prendre la parole sur cet article, car je suis très déçu de la rédaction proposée par le Sénat. Elle s’oppose à celle de l’Assemblée nationale,…

M. Joël Labbé. … qui représentait une forte avancée concernant les alternatives aux pesticides, en légalisant, sans passage par l’ANSES comme c’est prévu aujourd’hui, l’usage biostimulant de toutes les plantes ou parties de plantes qui sont consommées dans l’alimentation humaine.

La nouvelle rédaction modifie complètement l’esprit de l’article, en réintroduisant une obligation d’évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail pour l’autorisation des préparations naturelles peu préoccupantes, les PNPP.

Permettez-moi de rappeler rapidement ce que sont les PNPP. Il s’agit de substances naturelles, biodégradables et utilisées à faible dose. Parce qu’elles sont à base de molécules naturelles, elles se dégradent facilement.

Actuellement, 148 PNPP sont autorisées. Les autres, soumises à évaluation, sont autorisées par une procédure nationale en dehors du cadre de la réglementation des pesticides. Or cette évaluation est inutile pour cette catégorie de plantes, à savoir les plantes autorisées pour l’alimentation humaine. Vous entendez bien, mes chers collègues, elles sont autorisées pour l’alimentation humaine !

Ces plantes ont déjà été évaluées en 2001, à la demande du ministère de l’agriculture, par la commission d’étude de la toxicité. Certes, cette commission n’est pas l’ANSES, mais elle remplissait la mission aujourd’hui dévolue à l’ANSES. Elle avait conclu que les parties consommables de plantes pouvaient entrer dans la composition des PNPP sans exigences particulières. L’article 14 ter adopté par l’Assemblée nationale mettait donc en application l’avis donné au Gouvernement par ses propres experts de la Comtox, chargée de l’évaluation, qui a été transférée à l’AFSSA, puis à l’ANSES.

Pourquoi prévoir une évaluation de l’ANSES pour des substances déjà évaluées ? Je tiens à votre disposition cette évaluation, pour quiconque souhaiterait la consulter !

La procédure simplifiée existant à l’heure actuelle n’est absolument pas opérante. Ces PNPP sont du domaine public.

Aujourd’hui, l’ANSES demande, pour des produits pour lesquels aucune entreprise ne peut capter de la valeur, de faire des dossiers quasi identiques à ceux qui sont présentés par des producteurs de produits phytosanitaires. Aucun acteur n’a les moyens de le faire, et la situation reste bloquée.

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.

L’amendement n° 198 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 344 rectifié est présenté par MM. Karam, Mohamed Soilihi, Théophile et Yung, Mme Schillinger et MM. Bargeton, Marchand, Gattolin et Lévrier.

L’amendement n° 345 rectifié ter est présenté par M. Antiste, Mme Conconne, M. Tissot, Mme Conway-Mouret, M. Dagbert, Mmes Ghali, Grelet-Certenais, Jasmin et Guillemot, M. Iacovelli, Mme G. Jourda et MM. Kerrouche, Tourenne et Lurel.

L’amendement n° 437 rectifié bis est présenté par MM. Bérit-Débat, Courteau, Joël Bigot, Daudigny, Roux et Lalande, Mme Monier et MM. Duran, Vaugrenard, Lozach et Manable.

L’amendement n° 456 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guillaume, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le deuxième alinéa de l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, toutes les parties consommables de plantes utilisées en alimentation animale ou humaine sont considérées comme substance naturelle à usage biostimulant autorisée. »

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 198.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement s’inscrit dans la logique défendue à l’instant par notre collègue Joël Labbé : il vise à rétablir cet article dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale. En effet, la version adoptée par notre commission ne change rien au droit actuel. Les termes « évaluation simplifiée » n’impliquent aucun changement, puisque les modalités sont toujours fixées par voie réglementaire. Or ce cadre réglementaire n’a jusqu’à présent autorisé que des plantes médicinales.

Je rappelle que les produits phytopharmaceutiques ont des conséquences graves pour les sols, l’air et l’eau. À l’heure où la valeur nutritionnelle de nos aliments diminue à force d’utiliser ces produits, il est essentiel d’en limiter l’usage pour la viabilité future de nos sols.

M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 344 rectifié.

M. Dominique Théophile. Le présent amendement vise à rétablir l’article 14 ter, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

La modification apportée par le Sénat n’est pas de nature à garantir la clarification et la simplification nécessaires pour l’utilisation des préparations naturelles peu préoccupantes.

Alors que la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt de 2014 les avait enfin reconnues, ces alternatives aux produits phytopharmaceutiques restent insuffisamment développées du fait d’une lourdeur et d’une complexité administratives.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 345 rectifié ter.

M. Jean-Claude Tissot. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 437 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 456 rectifié.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l’article 14 ter, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale. Il tend à autoriser l’usage de toutes les plantes ou parties de plantes consommables dans l’alimentation humaine comme biostimulants.

Il s’agit de promouvoir des alternatives naturelles aux pesticides, moins coûteuses et moins dangereuses pour les producteurs. Je l’ai rappelé, ces solutions ont déjà été évaluées en 2001. Nous parlons ici de parties de plantes consommables dans l’alimentation humaine ou animale, qui ont déjà été évaluées. Conservons notre bon sens ! On parle beaucoup du bon sens paysan, alors adoptons-le pour autoriser ces plantes, sans prévoir l’établissement de procédures spécifiques et de visas par l’ANSES, qui est par ailleurs débordée, je l’ai dit. Si ces plantes peuvent être consommées dans l’alimentation humaine, c’est bien qu’elles ne présentent pas de risques particuliers.

De telles solutions sont par ailleurs largement autorisées sur le terrain, jusque dans les jardins du Luxembourg, propriété du Sénat. J’ai ici une facture montrant que nos jardiniers utilisent des préparations à base d’ail et de purin de plantes, donc des PNPP. Comment justifier l’interdiction de ce qui est utilisé sous nos fenêtres ? Pourquoi maintenir dans l’illégalité des agriculteurs et des jardiniers, mais aussi de petites entreprises artisanales dont les pratiques sont vertueuses, alors que, au même moment, on retire régulièrement des pesticides du marché, car jugés trop dangereux ? L’utilisation sur le terrain que je viens d’évoquer n’a apparemment engendré aucune remontée négative.

Par ailleurs, j’ai été alerté sur l’importance de cette problématique dans nos outre-mer. Nos départements et régions d’outre-mer font face à une situation critique, 70 % des productions locales n’étant pas couvertes par la législation actuelle. Ce sont des productions vivrières, pour lesquelles on utilise des PNPP, en l’absence de solutions phytosanitaires. En Guyane, de nombreux produits alimentaires traités avec des produits interdits sont importés pour faire face à ces difficultés. Il est donc absolument nécessaire de faciliter l’usage des PNPP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il n’est absolument pas question, mon cher collègue Labbé, d’interdire quoi que ce soit. Je le rappelle, la commission a maintenu la liste des 148 plantes déjà autorisées automatiquement comme substances à usage biostimulant.

La commission déplore, comme vous, que cette liste ne soit pas plus importante, compte tenu notamment de nombreux blocages rencontrés dans le cadre de la procédure avant autorisation par arrêté. Elle propose donc d’inscrire dans la loi le fait que, pour tout ajout supplémentaire, la procédure et l’évaluation, y compris celle de l’ANSES, seront simplifiées. Il est essentiel de conserver cette évaluation : ce n’est pas parce qu’une plante est comestible qu’elle ne pose pas problème à forte dose.

Une évaluation simplifiée par l’ANSES permettra d’émettre des recommandations concernant l’utilisation plus rapidement et plus facilement, qui préciseront les doses à utiliser. Tous ces paramètres sont nécessaires avant une commercialisation.

Cette évaluation sera donc plus courte et simplifiée. Il s’agit bien d’une disposition simplificatrice, qui doit permettre un recours beaucoup plus important et beaucoup plus fréquent à ces plantes.

La commission est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Il n’y aura jamais de phobie administrative lorsque la santé de nos concitoyens est en jeu. Ce n’est pas possible !

Concernant les PNPP, un groupe de travail a été mis en place dans le cadre du plan Écophyto. Il y a également un appel à projets Écophyto.

Un certain nombre de dossiers ont été refusés par l’Union européenne, les plantes ayant été considérées comme trop toxiques. Vous le savez comme moi, certaines parties de plantes sont toxiques. Ainsi, une ingestion trop importante de courge peut entraîner une perte de cheveux. Une partie de la rhubarbe est consommable, mais ses feuilles sont toxiques. Il est même impossible de les mettre dans un composteur, cela tue même la vie du composteur !

Il y a donc nécessité de conserver l’article 14 ter dans la version du Sénat, qui me semble plus pertinente. Nous pourrons éventuellement la retravailler, pour la simplifier encore. On pourrait ainsi arrêter les évaluations sur les parties des plantes qui sont consommées, mais évaluer les parties non consommées, qui peuvent avoir un caractère toxique.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. La rédaction de l’article peut prêter à confusion, notamment après avoir entendu les propos de mon collègue Labbé.

Si j’ai bien compris, il s’agit des nouveaux produits biostimulants et non pas des anciens. L’article vise à instaurer une procédure et une évaluation simplifiées pour autoriser une substance naturelle à usage biostimulant. Il ne s’agit pas des produits dits de « biocontrôle », qui sont déjà reconnus.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il ne s’agit pas des 148 produits déjà autorisés !

M. René-Paul Savary. C’est un point important. À la lecture de l’article, on est en droit de se poser la question. Sans doute faudrait-il préciser qu’il s’agit bien des nouvelles substances naturelles.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. On parle de substances naturelles peu préoccupantes.

J’ai accompagné des entreprises artisanales auprès de l’ANSES, pour demander l’autorisation d’un certain nombre de plantes. Si 148 PNPP sont autorisées, il en reste environ 700 en attente. Monsieur le ministre, il faudrait vraiment prendre les mesures qui conviennent pour déplafonner l’emploi à l’ANSES !

Ces sociétés, qui sont installées dans l’ensemble du monde rural, produisent ces préparations peu préoccupantes. Mais elles se trouvent aujourd’hui coincées, alors qu’il s’agit de véritables alternatives aux pesticides chimiques.

Les grosses sociétés, celles qu’on appelle les firmes, que j’accuse régulièrement, s’efforcent d’acheter ces petites entreprises pour prendre leur savoir-faire. Elles savent que leurs produits poison ne dureront pas éternellement, et elles veulent garder la mainmise sur l’ensemble des traitements. Je tiens à le dire, c’est comme ça que ça se passe ! L’influence évidente des grosses firmes sur la Commission européenne est scandaleuse et inacceptable pour les politiques que nous sommes.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 198, 344 rectifié, 345 rectifié ter et 456 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 88, présenté par M. Médevielle, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

La procédure et l’évaluation sont adaptées lorsque la demande d’autorisation porte sur la partie consommable d’une plante utilisée en alimentation animale ou humaine.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rétablir une mention expresse des plantes utilisées dans l’alimentation animale ou humaine dans le dispositif d’autorisation et d’évaluation simplifiées des substances naturelles à usage biostimulant.

L’objectif de cet ajout est de prévoir par voie réglementaire une procédure adaptée à ces substances en vue de faciliter leur utilisation comme alternative aux produits conventionnels, sans pour autant les soustraire à toute évaluation préalable.

Une telle modification est cohérente avec les recommandations faites par l’ANSES dans son avis technique de mars 2018 sur les critères d’évaluation des substances naturelles à usage biostimulant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, raporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Je le reconnais volontiers, les parties consommables des plantes présentent a priori moins de risques, notamment pour la santé humaine. Comme l’ANSES l’indique dans son avis publié en mars dernier sur le sujet, des évaluations complémentaires sont en revanche nécessaires pour garantir leur innocuité environnementale.

Je suis donc favorable au fait d’adapter davantage les procédures d’autorisation et d’évaluation pour ces types de produits.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 88.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je mets aux voix l’article 14 ter, modifié.

(Larticle 14 ter est adopté.)

Article 14 ter
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Article additionnel après l'article 14 quater AA - Amendement n° 199 rectifié

Article 14 quater AA (nouveau)

Après le III de l’article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un III bis ainsi rédigé :

« III bis. – Par exception aux II et III, l’utilisation des produits mentionnés au premier alinéa de l’article L. 253-1 est autorisée lorsque les produits mentionnés au IV du présent article ne permettent pas de lutter contre les dangers sanitaires mentionnés à l’article L. 201-1. »

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, sur l’article.

M. Joël Labbé. Nous voici arrivés au cœur du débat sur les pesticides. C’est un sujet essentiel sur lequel, à notre sens, le projet de loi ne va pas assez loin, d’autant que des reculs ont été adoptés par le Sénat : retour sur la loi Labbé, pourtant équilibrée, appliquée sans difficulté sur le terrain, votée très largement au Sénat en 2014 et adoptée par l’Assemblée nationale ; recul sur l’épandage aérien des pesticides, qui n’est plus limité aux produits bio. Pourtant, l’interdiction des épandages aériens avait été l’une des avancées de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Sur ces deux points, on revient en arrière par rapport au droit existant. C’est inadmissible et incompréhensible !

De plus, le texte issu de la commission constitue un recul par rapport à la version adoptée par l’Assemblée nationale, s’agissant de l’extension de l’interdiction des néonicotinoïdes. Pourtant, vous le savez, la situation des abeilles et, donc, des apiculteurs est gravissime. Ce sont tous les pollinisateurs – les abeilles, les oiseaux et la faune – qui sont menacés.

Le texte est également en recul concernant la séparation de la vente et du conseil. Pourtant, les agriculteurs ont tout intérêt à avoir un conseil indépendant. Ils sont même 70 % à le réclamer. Un rapport de l’ANSES souligne un risque de conflit d’intérêts en cas de non-séparation de la vente et du conseil.

Ces mesures vont à contre-courant du sens de l’histoire. Il nous faut préparer l’ère de l’après-pesticide. On doit pouvoir se passer de ces produits dangereux pour la santé, en tout premier lieu la santé des agriculteurs.

Or les systèmes d’évaluation des molécules laissent à désirer. Peu transparents, ils se basent sur des dossiers fournis par les firmes de l’agrochimie. L’affaire des « Monsanto papers » l’a montré : ces études sont volontairement biaisées !

De plus, l’étude des effets chroniques se base uniquement sur la substance active, et non sur le produit avec ses coformulants, alors que ceux-ci se révèlent parfois plus toxiques que la substance active seule.

Dans les dossiers d’autorisation de mise sur le marché, il est considéré que tous les agriculteurs portent des équipements de protection. Nous savons que c’est faux. Et le chiffre selon lequel les équipements de protection réduisent de 90 % les risques d’utilisation des produits n’est absolument pas démontré ; il semble même invalidé par un rapport de l’ANSES, qui a montré que les équipements de protection peuvent même parfois accentuer les risques. Par exemple, si elle est réutilisée, une combinaison de protection peut concentrer les molécules.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 89 est présenté par M. Médevielle, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

L’amendement n° 463 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Castelli et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.

L’amendement n° 558 rectifié est présenté par Mme Bonnefoy, M. Bérit-Débat, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, MM. Tissot et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 748 est présenté par le Gouvernement.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 89.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. L’article 14 quater AA a été inséré en commission des affaires économiques contre l’avis de Mme la rapporteur. Il permet de déroger à l’interdiction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques par les personnes publiques dans les espaces verts – c’est le dispositif « zéro phyto » – ou par des non professionnels dès lors qu’il s’agit de lutter contre tout danger sanitaire.

Je rappelle que le droit en vigueur n’applique pas ces interdictions aux produits de biocontrôle, aux produits à faible risque et aux produits utilisés en agriculture biologique. Surtout, le code rural et de la pêche maritime prévoit déjà des dérogations à l’interdiction d’utiliser des produits phytopharmaceutiques conventionnels lorsque seuls ces produits permettent de lutter contre les organismes nuisibles définis par voie réglementaire comme « danger sanitaire majeur ». Si cela est nécessaire, le droit en vigueur permet au ministre de l’agriculture de modifier la classification des dangers sanitaires pour autoriser l’utilisation de produits conventionnels contre de nouvelles menaces.

A contrario, en visant l’ensemble des dangers sanitaires mentionnés à l’article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime, notamment ceux d’importance mineure, de troisième catégorie, l’article 14 quater AA constitue une remise en cause excessivement large de dispositions importantes pour limiter l’exposition de la population aux produits phytopharmaceutiques.

Pour toutes ces raisons, la commission du développement durable propose la suppression du présent article.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 463 rectifié.

M. Joël Labbé. L’article 14 quater AA permet l’utilisation des produits phytopharmaceutiques conventionnels autorisés lorsque l’application de produits de biocontrôle ou de préparations naturelles peu préoccupantes ne permet pas de lutter contre une maladie végétale connue.

Cet article revient sur la loi adoptée en 2014, qui était pourtant véritablement consensuelle. Elle prévoyait l’interdiction d’usage de produits phytopharmaceutiques pour les personnes publiques pour l’entretien des jardins, forêts et voiries accessibles au public et pour les utilisateurs privés non professionnels. Il s’agissait de mesures équilibrées. Des exceptions existent déjà pour les cas extrêmes. Généraliser la possibilité de recours à la chimie en dehors des cas déjà prévus viderait la loi de tout sens.

L’article 14 quater AA constitue donc un retour en arrière injustifié, d’autant qu’il existe des alternatives. J’ai déjà évoqué les PNPP, utilisées jusque dans le jardin du Luxembourg. Même pour la santé du buis, de petites entreprises proposent des solutions très efficaces et alternatives à la chimie. Certaines sont appliquées dans les jardins prestigieux et patrimoniaux.

Cet article est également injustifié du point de vue économique.

La loi de 2014 a permis à de nombreuses TPE et PME françaises avec lesquelles je suis régulièrement en contact de développer des produits alternatifs aux pesticides. Elle est bénéfique pour l’emploi, puisqu’elle permet de créer des emplois locaux nouveaux et des innovations très intéressantes pour notre économie locale. Elle est évidemment bénéfique pour la santé des travailleurs : comment justifier de continuer à exposer les travailleurs d’espaces verts à des risques professionnels alors que des produits alternatifs existent ?

En outre, l’article est injustifié du point de vue de la biodiversité.

Au regard de la situation actuelle, nous avançons trop lentement. Si nous nous permettons en plus de voter des reculs sur les protections existantes appliquées sans difficulté sur le terrain, c’est que nous sommes dans le déni des réalités. Au lieu de revenir en arrière, allons vers l’innovation, en encourageant les alternatives. Et il y a encore beaucoup de travail de recherche à faire sur les alternatives ! Derrière cela, il y a de l’économie !

La loi intéresse d’autres pays. Je l’ai présentée au mois de juin dernier au Comité économique et social européen.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 558 rectifié.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet article, introduit en commission, revient à déroger à la loi Labbé.

Cette loi, dont le contenu a déjà été rappelé, s’inscrivait dans la continuité des travaux de la mission d’information que nous avons menée au Sénat en 2012. Lors de son examen, nous pouvions entendre qu’une telle loi ne serait jamais applicable et que les collectivités se retrouveraient dans une impasse. Quelques années plus tard, on s’aperçoit qu’il n’en est rien et que les collectivités se sont parfaitement adaptées.

Nous ne comprenons donc pas que l’on tente de remettre cette loi en cause. Au demeurant, comme cela a été souligné, il existe déjà des dérogations, notamment s’agissant de la sécurité des personnes ou d’un danger sanitaire grave. À nos yeux, l’article 14 quater AA revient à réduire à néant la portée de la loi de notre collègue Joël Labbé.

Autoriser des dérogations pour tous les dangers sanitaires mentionnés à l’article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime, c’est-à-dire pour les trois catégories, revient à déroger trop largement à la législation actuelle. Nous vous proposons donc de supprimer cet article, qui n’a en outre que peu de lien avec le présent projet de loi.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 748.

M. Stéphane Travert, ministre. L’article 14 quater AA constitue effectivement un recul par rapport aux dispositions de la loi du 6 février 2014, dite loi Labbé, qui avait été modifiée par la loi d’août 2015, dite loi Potier.

L’article semble considérer que seuls les produits phytopharmaceutiques dits conventionnels permettent de lutter contre les dangers sanitaires méconnaissant les principes de la lutte intégrée. Celle-ci privilégie les méthodes non chimiques, la prophylaxie, la surveillance, la prévention, le choix des espèces, les variétés. En outre, le respect de ces dispositions ne serait pas contrôlable en pratique pour les particuliers, qui n’ont pas d’obligation de tenir un registre des traitements réalisés.

Dans le texte actuel, si une stratégie nationale collective est adoptée pour une maladie, par exemple Xylella fastidiosa ou la maladie du palmier, l’utilisation de produits phytopharmaceutiques et phytosanitaires dans les jardins publics et amateurs est déjà possible. L’article est donc totalement satisfait.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission a prévu une dérogation pour les utilisateurs non professionnels. L’interdiction sera opérationnelle au 1er janvier 2019 ; elle l’est déjà pour les collectivités publiques.

L’article adopté en commission prévoit une dérogation s’il n’existe aucun substitut pour traiter une maladie végétale. Les collectivités publiques et les utilisateurs non professionnels pourraient faire un usage encadré de produits phytopharmaceutiques ; je pense notamment à la problématique actuelle de la pyrale du buis, pour laquelle il n’existe a priori aucune méthode alternative efficace, cette maladie n’étant pas classée comme un danger suffisamment important.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous indiquer les dispositions que vous comptez mettre en place afin de nous éviter de revenir sur la législation existante ?

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Nous voterons ces amendements de suppression. Nous souscrivons aux propos de M. le rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Si nous voulons avoir un débat serein, ce qui a été souhaité par tous, nous ne pouvons pas revenir en arrière. Nous sommes, me semble-t-il, tous d’accord pour dire qu’il faut diminuer l’usage des produits phytosanitaires. Or il est envisagé de revenir sur la loi Labbé, qui fonctionne ; je ne connais pas de collectivité à qui cette loi pose problème.

Certains ont souligné la nécessité d’avoir des mesures à l’échelon européen. Or la loi Labbé est précisément reprise par l’ensemble des pays européens, qui envisagent actuellement de s’engager dans cette voie et citent la France en exemple.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je salue les propos de Mme la rapporteur. Contrairement à ce qu’affirment certains, nous ne revenons pas en arrière.

M. Joël Labbé. Mais si !

M. Daniel Gremillet. Nous sommes cohérents avec le dispositif que nous avions adopté à l’unanimité voilà un an et demi, alors que M. Le Foll était ministre de l’agriculture.

Si j’ai bonne mémoire – j’étais alors rapporteur du texte –, notre collègue Labbé avait voté cette mesure, qui visait à reconnaître que nous n’avions aucun produit de biocontrôle pour faire face à certaines maladies. Je pense, par exemple, à la pyrale du buis, qui est en train de décimer l’ensemble des parcs et jardins de notre pays. M. Le Foll avait jugé l’amendement du Sénat très intéressant, considérant qu’il permettait de sauvegarder le patrimoine.

Nous disons simplement qu’il faut garder la possibilité d’utiliser les produits qui permettent de sauver les plantes, la biodiversité et le patrimoine végétal, par cohérence avec ce que nous avions voté à l’unanimité à l’époque.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Alors que le débat dans la société porte sur la suppression, progressive ou totale, selon les sensibilités, des produits phytosanitaires, il est envisagé de revenir sur un progrès obtenu il y a quatre ans.

M. Fabien Gay. C’est ainsi que ce sera perçu ! Et, d’ailleurs, ça correspond à la réalité ! Il est incompréhensible qu’on veuille revenir sur ce progrès !

Nous débattrons tout à l’heure du glyphosate pour savoir s’il faut en sortir dès maintenant, dans trois ans ou à une échéance plus lointaine. Je me réjouis que nous puissions avoir ce débat ; chacun l’appelle de ses vœux.

Mais tenez-vous vraiment à ce que le seul message envoyé par le Sénat soit le retour sur une avancée acquise il y a quatre ans ? C’est pourquoi nous voterons ces amendements de suppression, et je vous invite à faire de même, mes chers collègues. À défaut, nous enverrions collectivement un très mauvais signal à l’extérieur.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Ainsi que je le soulignais précédemment, des dispositifs permettent déjà l’utilisation de produits phytopharmaceutiques pour certaines maladies qui font l’objet d’une stratégie nationale collective. M. Gremillet a, par exemple, évoqué la pyrale des buis. Or le code rural permet déjà de protéger les buis lorsqu’il y a un intérêt patrimonial. Nous savons qu’il est nécessaire de protéger certaines espèces présentes depuis des années.

Des produits de biocontrôle sont en cours de développement. Actuellement, deux sont disponibles, depuis près de deux mois. Nous avons engagé des travaux avec l’INRA pour envisager des solutions.

Au demeurant, la pyrale des buis est une sorte de marronnier au ministère de l’agriculture. Elle fait l’objet de questions écrites depuis des dizaines d’années auprès du ministère.

M. Didier Guillaume. Car c’est un vrai sujet !

M. Stéphane Travert, ministre. En effet, monsieur le sénateur !

La recherche avance. Nous avons des produits disponibles. L’INRA continue de travailler. Cela reste bien évidemment un point d’ancrage important de l’action du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Nous nageons en plein paradoxe : d’un côté, nous sommes tous pour le maintien des éléments patrimoniaux qui font la beauté de notre pays ; de l’autre, nous ne nous donnons pas les moyens de les protéger par obscurantisme et par peur de voir certains utiliser des produits phytosanitaires sans en avoir besoin. Je pense qu’à un moment le bon sens doit finir par s’imposer.

La France dispose d’un patrimoine végétal exceptionnel ; il suffit de visiter les jardins du manoir d’Eyrignac, puisque certains ont évoqué les buis, pour s’en rendre compte.

M. Stéphane Travert, ministre. C’est vrai !

M. Laurent Duplomb. Je ne vois pas ce qui peut gêner les opposants à l’utilisation des produits phytosanitaires – je ne suis moi-même pas favorable à leur utilisation lorsqu’elle n’est pas indispensable – dans le fait de se laisser la possibilité d’y avoir recours face à un parasite contre lequel il n’existe pas d’autre moyen de lutte pour garantir la pérennité de notre patrimoine. À force de ne pas vouloir utiliser les moyens qui permettraient de protéger l’espèce humaine, on va finir par accepter de la voir disparaître !

M. Joël Labbé. Ce sont les produits chimiques qui vont la faire disparaître !

M. Laurent Duplomb. Il ne s’agit pas de traiter préventivement tous les buis en utilisant des tonnes de phytosanitaires. Il s’agit simplement de maintenir dans la loi la possibilité d’y avoir recours face à une attaque contre laquelle il n’existerait pas d’autre solution.

Parfois, j’ai l’impression de rêver ! Si ça continue, il ne faudra plus rien faire sur cette planète et accepter que le peuple français disparaisse !

Mme Éliane Assassi. Et seulement le peuple français ? Pas les autres ? (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Comme je l’avais annoncé, j’ai demandé un scrutin public sur ces amendements de suppression.

M. le ministre a rappelé à très juste titre qu’il existe déjà des parades avec la loi actuelle.

Je reviens sur l’exemple emblématique des buis. Mes chers collègues, allez donc vous renseigner auprès des responsables du jardin du Luxembourg. Ils n’ont pas besoin de produits chimiques ! Et, dans les jardins de Marqueyssac, en Dordogne, ils sont en train de sauver leur parc avec des préparations naturelles peu préoccupantes !

Adopter l’article 14 quater AA, c’est mettre fin à toutes les recherches sur les alternatives. Ce seront alors les firmes qui reprendront la main !

M. Laurent Duplomb. C’est bien ce que je disais : c’est de l’obscurantisme !

M. Joël Labbé. Je ne vous permets pas !

M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour explication de vote.

Mme Anne Chain-Larché. Monsieur Labbé, vous avez évoqué le buis et les « alternatives ». Il faut le savoir, le produit bio, que je ne citerai pas, qu’on utilise tous paralyse les mâchoires des chenilles. C’est tout simplement épouvantable ! Le produit chimique, lui, les tue en quelques secondes. À vous de juger…

M. Laurent Duplomb. C’est le bien-être animal !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, j’aimerais savoir où en est la recherche s’agissant des palmiers ? J’ai eu l’occasion de faire un déplacement en Corse, où tous les palmiers sont en train d’être décimés.

Et quid des oliviers ? Eux aussi connaissent des maladies terribles en Italie, qui sont en train de gagner le sud de la France. Quelles sont les actions envisagées, si possible à titre préventif ou, à défaut, à titre curatif, par le Gouvernement ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison, il y a aujourd’hui un risque pathogène sur les végétaux que l’on nomme Xylella fastidiosa. Une conférence européenne s’est d’ailleurs tenue sur le sujet à Paris à la fin de l’année dernière. Sachez que le problème mobilise à la fois le Gouvernement et la Commission européenne ; je pense notamment à Vytenis Andriukaitis, commissaire chargé de la santé.

Des périmètres de protection sont mis en place autour des végétaux atteints par cette pathologie en Corse. Nous sommes également très vigilants sur les importations et les exportations de végétaux.

Il y a eu des cas dans les Alpes-Maritimes, notamment à Nice, de Xylella fastidiosa. Aujourd’hui, aucun traitement particulier ne permet d’enrayer cette pathologie végétale. La seule mesure que nous puissions prendre à ce stade est la mise en place d’un périmètre de protection autour des végétaux qui sont touchés.

Des agences européennes travaillent sur le sujet. Je vous invite à consulter les minutes du colloque que nous avions organisé à la fin de l’année dernière ; je peux vous les communiquer si vous le souhaitez. Le colloque a permis de créer une porte d’entrée unique pour les végétaux à l’échelon européen. Auparavant, cela existait pour les filières animales, mais pas pour les végétaux.

La pathologie appelée Xylella fastidiosa touche aussi bien la France que l’Italie, l’Espagne ou le Portugal. Elle fait de gros ravages sur la vigne, les oliviers et sur les patrimoines végétaux remarquables que nous pouvons avoir dans nos villes.

L’INRA travaille énormément sur le sujet, en lien avec d’autres agences européennes.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 89, 463 rectifié, 558 rectifié et 748.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 180 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 195
Contre 148

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 14 quater AA est supprimé.

Article 14 quater AA (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article 14 quater A (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel après l’article 14 quater AA

M. le président. L’amendement n° 199 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quater AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l’article L. 661-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le mot : « variétés », sont insérés les mots : « ou de mélanges de variétés » ;

2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Les semences peuvent être commercialisées sous forme de mélanges de variétés, pour autant que chaque composant du mélange réponde, avant mélange, aux dispositions du présent article. Les critères d’enregistrement au catalogue prendront en compte la capacité de la variété candidate à être cultivée en mélange. »

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. L’utilisation par les agriculteurs de mélanges de semences pour effectuer leurs semis est une pratique en constante augmentation, notamment en agriculture biologique. L’intérêt agronomique de l’utilisation de mélanges de semences consiste principalement à diminuer l’utilisation d’intrants par les agriculteurs, en sélectionnant des variétés complémentaires dans la résistance aux maladies.

En dépit de l’intérêt évident de cette pratique, de nombreux freins en pénalisent le développement.

Sur le plan du droit, la directive européenne 66/402 du 14 juin 1966, concernant la commercialisation des semences de céréales, précise ainsi que les États « admettent que des semences d’une espèce de céréales soient commercialisées sous forme de mélanges déterminés de semences de différentes variétés ». Cette directive n’a toutefois pas été transposée : la réglementation française maintient le principe de l’interdiction de la commercialisation de mélanges de semences.

C’est la raison pour laquelle, afin de lever ce frein et pour offrir une opportunité supplémentaire à nos agriculteurs, dans un contexte de réduction de l’usage des produits phytosanitaires, il est proposé, au travers de cet amendement, d’inscrire explicitement dans la loi la possibilité de commercialiser des semences sous forme de mélanges de variétés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. M. Gay a tout dit. La commission est donc favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. L’avis est défavorable. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Deux directives de l’Union européenne prévoient le mélange de semences et la commercialisation. Nous venons de signer un arrêté, qui sera publié dans les jours à venir. La transposition de cette possibilité de commercialiser les mélanges de variétés prévus par le droit européen sera donc effective. Il n’y a pas besoin de base législative particulière sur le sujet.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 199 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 quater AA.

Article additionnel après l'article 14 quater AA - Amendement n° 199 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article 14 quater

Article 14 quater A

(Non modifié)

Au dernier alinéa de l’article L. 661-8 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « gratuit », sont insérés les mots : « ou à titre onéreux ».

M. le président. L’amendement n° 200, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - Au même dernier alinéa, après les mots : « non professionnels », sont insérés les mots : « , en vue d’une utilisation » et les mots : « n’est pas soumis » sont remplacés par les mots : « , ne sont pas soumis ».

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement, qui est proposé, entre autres organisations, par la Confédération paysanne, vise à assouplir la réglementation sur les semences paysannes pour des usages non commerciaux.

Actuellement, l’échange de semences doit respecter une procédure complexe, qui oblige à enregistrer la variété de semences au catalogue. Cet impératif ne fait pas la différence entre un échange à but commercial et un autre. Nous proposons donc, en accord avec les règlements européens et français, d’opérer une simplification quant aux règles d’échange de semences à but non commercial.

Tandis que nous travaillons à réduire l’usage de produits phytopharmaceutiques, que nous cultivons de plus en plus de produits biologiques et agroécologiques et que nous opérons une transition vers une consommation durable et fondée sur les circuits courts, il est nécessaire de permettre une adaptation des cultures en fonction des régions. Les dernières décennies de standardisation des espèces de fruits et légumes nous ont fait perdre une pluralité qui témoignait des diversités régionales. Aujourd’hui, grâce à des variétés de semences anciennes, des paysans réussissent l’exploit de faire pousser en montagne des variétés rares de tomates, et ce sans intrants chimiques.

Ainsi, l’usage des semences paysannes est l’occasion de diversifier l’agriculture, mais aussi de faire revivre les particularités de nos régions. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cette mesure pour la biodiversité de nos territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement reprend la rédaction du code rural. Il apparaît plus simple de vérifier que l’utilisateur n’est pas professionnel plutôt que de contrôler que l’utilisateur, quel qu’il soit, envisage ou non de suivre une exploitation commerciale de la semence.

En outre, la rédaction proposée pourrait être interprétée de façon extensive et concerner plus que les jardiniers amateurs aujourd’hui visés par la dérogation.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. La modification ne change pas les difficultés que soulève pour le Gouvernement l’extension prévue à cet article de l’exemption d’inscription au catalogue des variétés cédées à titre onéreux à des utilisateurs professionnels. L’article, même ainsi rédigé, n’est pas conforme au droit européen et conduit à limiter l’information des utilisateurs sur les caractéristiques des semences achetées.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Ces deux avis défavorables sont très dommageables. Si nous votions cet amendement, la mesure pourrait être discutée et améliorée dans le cadre de la commission mixte paritaire. C’est par des mesures comme celles-là, monsieur Duplomb, qu’on préservera la biodiversité, notamment la biodiversité cultivée, et qu’on pourra sauver la planète !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 200.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 233 rectifié, présenté par MM. Yung et Amiel, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 276 rectifié, présenté par MM. Bizet, Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam et MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Priou, Rapin, Revet, Sol, Vaspart et Vogel, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 779, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Compléter cet article par des mots et une phrase ainsi rédigés :

et après le mot : « sélection » la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « , à la production et à la commercialisation. La cession, la fourniture ou le transfert à titre onéreux est subordonné à une déclaration dématérialisée préalable et gratuite des variétés, dont les modalités sont fixées par décret. »

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’objet de l’amendement est d’organiser un recensement des variétés non enregistrées au catalogue et cédées à titre onéreux au travers d’une simple déclaration préalable dématérialisée qui pourrait contenir une dénomination et une description de la semence. Cela permettra d’avoir une vision exhaustive des variétés anciennes utilisées par les jardiniers amateurs et non inscrites au catalogue, sans pour autant ajouter une charge trop lourde à ces derniers.

Je vous propose d’adopter cet amendement, mes chers collègues. C’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable sur l’amendement n° 747 que présentera le Gouvernement.

M. le président. L’amendement n° 747, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe :

… – Après les mots : « à la sélection », la fin du même dernier alinéa est ainsi rédigée : « la production et la commercialisation. La cession à titre onéreux n’est exemptée des dispositions du présent article que pour les variétés ayant fait l’objet d’un enregistrement, sur la base notamment d’une dénomination, d’une description et des connaissances acquises sur ces variétés. Les modalités de cet enregistrement sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Les directives concernant le catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles, applicable à la quasi-totalité des variétés de semences, prévoient, à leur article 3, que « chaque État membre établit un ou plusieurs catalogues des variétés admises officiellement à la certification et à la commercialisation sur son territoire ».

Les dispositions de l’article 14 quater A en ce qu’elles exonèrent d’inscription au catalogue la cession à titre onéreux de semences ne sont pas conformes aux règles européennes. La cour d’appel de Nancy a confirmé cette interprétation dans un arrêt rendu en 2014.

La directive de 2009 prévoit, par exception et pour les légumes, des critères d’admission allégés pour les variétés de conservation ou sans valeur intrinsèque, adaptées à des conditions géographiques particulières. Elle permet également d’exonérer de la procédure d’examen officiel les variétés créées pour répondre à des conditions de culture particulières lorsque les informations détenues sont suffisantes.

Dans ce contexte, et afin de faciliter encore la mise à disposition de ces semences tout en assurant une information minimale des jardiniers amateurs et le respect des dispositions européennes, il est proposé une procédure d’enregistrement des variétés qui répondent aux conditions mentionnées à l’article 23 de la directive de 2009. Cette disposition devrait permettre de satisfaire la demande d’une réglementation adaptée et allégée pour la vente aux jardiniers amateurs et aux utilisateurs, mais aussi pour des raisons de droit de concurrence.

Enfin, afin de prévenir les risques sanitaires ou l’introduction d’espèces invasives sur le territoire national, il importe que le respect des règles sanitaires et leur contrôle s’appliquent aussi à l’étape de la commercialisation.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. J’abonderai dans le sens de la commission.

De quoi parle-t-on exactement ? Je citerai juste un exemple : l’engrain ou triticum monococcum est la première céréale élevée par l’homme dans le croissant fertile – l’agriculture vient de là, entre l’Irak et la Syrie. C’est une céréale qui arrive dans l’Hexagone, soit l’actuel territoire de la France, 7 000 ans avant Jésus-Christ. Depuis cette date jusqu’à aujourd’hui, elle n’a cessé d’être cultivée. Elle l’est encore, notamment à Forcalquier et dans certaines zones, sous l’appellation « petit épeautre » ou « épeautre ».

Il s’agit simplement de reconnaître que certaines semences portent un patrimoine historique qui nous dépasse très largement et qu’elles ne doivent pas être soumises aux mêmes critères que des céréales qui ont été mises au point génétiquement il y a quelque temps. Souvenons-nous que l’agriculture est plus ancienne que les années cinquante. Voilà pourquoi il faut reconnaître à certaines variétés un statut particulier.

Ce petit rappel historique me semblait utile à un moment où l’agriculture semble oublier d’où elle vient.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Monsieur le président, j’étais cosignataire de l’amendement n° 276 rectifié. Je défends l’accès des jardiniers amateurs aux plantes anciennes, comme l’épeautre ou autres. Je suis absolument incompétent sur la question, mais j’aurais aimé être éclairé par l’avis de Mme le rapporteur et de M. le ministre.

M. le président. Votre amendement n’a pas été mis en débat, mon cher collègue. Tout à fait exceptionnellement, je le rappelle en discussion.

L’amendement n° 276 rectifié, présenté par MM. Bizet, Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam et MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Priou, Rapin, Revet, Sol, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Au même dernier alinéa, les mots : « et à la production » sont remplacés par les mots : « , à la production et à la commercialisation » et est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Ces variétés font l’objet d’un enregistrement automatique sur la base d’une déclaration de dénomination et d’une description dont les modalités seront fixées par un décret en Conseil d’État. »

Quel est donc l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement vise les mêmes objectifs que l’amendement de la commission des affaires économiques, sachant que le nôtre est plus « englobant ». L’avis est donc plutôt favorable, mais cet amendement est satisfait par celui de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement est satisfait par celui qu’a présenté le Gouvernement, plus précis.

Les semences peuvent être des vecteurs de maladies, notamment l’ambroisie. Une traçabilité via ce catalogue est donc nécessaire, y compris pour les jardiniers amateurs. Si ces derniers conservent ces semences dans leur sphère privée, il n’y a pas de problème. Mais, aujourd’hui, il existe des échanges entre jardiniers amateurs, ce qui est bien normal, puisqu’il s’agit d’un espace de loisir et de convivialité. Or ces échanges peuvent disséminer des pathologies et entraîner un certain nombre de difficultés sur une partie d’un territoire. D’où la nécessité de prévoir, même pour les jardiniers amateurs, une traçabilité des semences échangées et commercialisées.

M. le président. Monsieur Longuet, l’amendement n° 276 rectifié est-il maintenu ?

M. Gérard Longuet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 276 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 779.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 747 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 14 quater A, modifié.

(Larticle 14 quater A est adopté.)

Article 14 quater A (Texte non modifié par la commission)
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Article 14 quinquies

Article 14 quater

L’article L. 253-5 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « , sous réserve de contenir une information explicite relative aux risques que l’exposition à ces produits entraîne sur la santé et sur l’environnement » ;

2° La première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée : « Un décret, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, définit les conditions dans lesquelles les insertions publicitaires sont présentées ainsi que le contenu et le format de l’information mentionnée au deuxième alinéa du présent article. »

M. le président. L’amendement n° 197 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

II. - Le chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 253-5, les mots : « et dans les publications qui leur sont destinées » sont supprimés ;

2° Au 2° du I de l’article L. 253-16, les mots : « et des publications destinées aux » sont remplacés par les mots : « à destination des ».

III. – Le II du présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2022.

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. L’objet de cet amendement est de limiter la publicité pour les produits phytosanitaires.

Je crois qu’il a été question d’un parallélisme des formes entre l’alcool, le tabac et les produits phytosanitaires. Nous allons donc dans votre sens en réclamant une limitation de la publicité pour ces produits. C’est un minimum ! Nous pourrons ensuite débattre des produits eux-mêmes, mais ce serait une bonne chose de commencer déjà par ça.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La presse spécialisée joue un rôle crucial en matière de prescription de pratiques agronomiques pour les agriculteurs. Les recettes issues de la publicité lui permettent d’assurer cette mission. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 197 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 quater.

(Larticle 14 quater est adopté.)

Article 14 quater
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Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 554 rectifié bis

Article 14 quinquies

L’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « l’environnement, », sont insérés les mots : « les mesures de mobilisation de la recherche en vue de développer des solutions alternatives aux produits phytopharmaceutiques » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « prévoit des mesures tendant au développement des produits de » sont remplacés par les mots : « s’accompagne d’une stratégie nationale de déploiement du » ;

3° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le plan d’action national prévoit la réduction des délais d’évaluation des produits de biocontrôle et des produits à usage biostimulant, tout en veillant à alléger les démarches administratives pour les entreprises concernées. » ;

4° À la seconde phrase du même dernier alinéa, après le mot : « représentatives », sont insérés les mots : « , des organismes de recherche compétents ».

M. le président. L’amendement n° 605 rectifié, présenté par MM. Roux, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Raynal, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il prend en compte les expérimentations locales mises en œuvre par les agriculteurs et veille à la diffusion de celles-ci.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Des agriculteurs, pour la plupart regroupés en réseaux, élaborent des stratégies locales et des expérimentations qui permettent de chercher, de développer et de promouvoir des modes de production durables, adaptés aux cultures et aux territoires divers dans lesquels ils s’inscrivent. Ces recherches ne sont pas nécessairement organisées ni produites par des organismes de recherche compétents. Elles n’en sont pas moins précieuses.

Cet amendement vise à reconnaître l’engagement de ces agriculteurs attachés à sauvegarder le bien commun et à faire vivre un savoir-faire. Cette stratégie nationale doit en effet s’accompagner d’une collecte de bonnes pratiques locales qui ont déjà été testées sur le terrain ou peuvent l’être par des réseaux de paysans expérimentateurs, soucieux de faire évoluer les modes de production. Ceux-ci peuvent être considérés comme des partenaires à part entière.

Ces « paysans chercheurs » ne sont pas à ce jour éligibles au crédit d’impôt recherche, puisqu’ils ne consacrent pas l’exclusivité de leur travail à la recherche. À ce titre, cet amendement vise également à proposer la création d’un crédit d’impôt recherche agricole qui pourrait être adapté à ces expérimentations ou à susciter des appels d’offres beaucoup plus facilement accessibles à de petites unités économiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le plan Écophyto fait émerger des documents, il consolide, il valorise, il diffuse déjà les innovations du terrain à travers le réseau des fermes Dephy ou le portail de la protection intégrée des cultures écophyto.

Depuis le premier plan Écophyto de 2018, cette mention est l’un des piliers du plan d’action national. L’ajout proposé ici ne semble donc pas indispensable. Par conséquent, l’avis est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 605 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 quinquies, modifié.

(Larticle 14 quinquies est adopté.)

Article 14 quinquies
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Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 555 rectifié ter,

Articles additionnels après l’article 14 quinquies

M. le président. L’amendement n° 554 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dans lequel il précise les conditions de mise en place d’un dispositif de soutien et d’accompagnement spécifique pour les entreprises s’engageant dans le développement du biocontrôle. Il étudie également les dispositifs financiers pouvant être mis à leur disposition pour parvenir à développer ces substances d’origine naturelle. Ce rapport préfigure la mise en place d’un dispositif de soutien et d’accompagnement spécifique pour les entreprises s’engageant dans le développement du biocontrôle au plus tard au 1er septembre 2019.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement était initialement un amendement de repli, mais l’article 40 est malheureusement passé par là. Je le précise, car je ne voudrais pas que vous croyiez que je vous propose ici un énième rapport…

Dans notre amendement initial, nous proposions la mise en place d’un dispositif de soutien et d’accompagnement spécifique pour les entreprises s’engageant dans le développement du biocontrôle. En effet, aujourd’hui, beaucoup d’innovations en matière de biocontrôle sont le fait de start-up, de PME et de TPE. Or, souvent, ces dernières ne disposent pas des moyens suffisants pour produire des données nécessaires à l’autorisation de mise sur le marché.

L’ANSES, avec qui j’ai travaillé cet amendement, regrette ainsi de ne pas être en mesure d’instruire des dossiers ne comportant pas les données sur l’efficacité et la sécurité des produits exigées par la réglementation européenne. Cette situation est un frein évident au développement de ces techniques alternatives aux produits phytosanitaires classiques. C’est pourquoi nous estimons nécessaire, voire urgent, de permettre à ces entreprises de bénéficier des dispositifs de soutien à l’innovation.

Malheureusement, comme je le disais en préambule, notre amendement a été retoqué au titre de l’article 40. Pour autant, je souhaiterais, mes chers collègues, ne pas écarter ce sujet central, qui s’inscrit totalement dans la démarche agroécologique et la transition de nos modèles de production.

Je vous propose donc que le Gouvernement pose la première pierre de cet édifice en remettant un rapport au Parlement sur la mise en place d’un dispositif de soutien et d’accompagnement spécifique pour les entreprises s’engageant dans le développement du biocontrôle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Sur le fond, l’amendement aborde un sujet essentiel, celui de la structuration de l’offre des fabricants de produits de biocontrôle, qui rencontrent des difficultés dans la constitution des dossiers attendus à l’ANSES.

Comme cela existe dans la recherche pour répondre aux appels à projets, par exemple, il serait utile qu’un dispositif d’accompagnement soit effectivement mis en place. Toutefois, cet amendement s’apparente à une injonction au Gouvernement. Pour cette raison, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Un groupe de travail doit se réunir prochainement afin de dessiner l’ensemble des pistes pour l’accompagnement des entreprises. L’article 14 quinquies prévoit une stratégie nationale du biocontrôle, ce qui atteste de la volonté du Gouvernement de travailler sur le sujet. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir un rapport, d’autant que la contribution des parlementaires à nos côtés sera la bienvenue.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Madame Bonnefoy, l’amendement n° 554 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Nicole Bonnefoy. Non, je le retire, monsieur le président.

Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 554 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 556 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 554 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 555 rectifié ter, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Des pôles de recherche et de développement du biocontrôle sont constitués par le regroupement sur un même territoire d’entreprises, d’établissements d’enseignement supérieur et d’organismes de recherche publics ou privés qui ont vocation à travailler en synergie pour mettre en œuvre des projets de développement de produits de biocontrôle.

La désignation des pôles de recherche et de développement du biocontrôle est effectuée par un comité interministériel, après avis d’un groupe de personnalités qualifiées, sur la base des critères suivants :

- les moyens de recherche et de développement susceptibles d’être mobilisés dans le ou les domaines d’activité retenus ;

- les perspectives économiques, environnementales et d’innovation ;

- les perspectives et les modalités de coopération entre les différents acteurs concernés.

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement s’inscrit dans la continuité de celui que je viens de défendre. Il vise, sur le modèle des pôles de compétitivité mis en place par la loi de finances pour 2005, à instituer des pôles de recherche et de développement de produits de biocontrôle.

Si la France veut réellement amorcer un virage en matière de réduction de produits phytopharmaceutiques, notamment pour atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés dans le cadre du plan Écophyto, elle doit se doter d’une filière de recherche et de développement de produits alternatifs non chimiques. Les produits de biocontrôle sont l’un des leviers à activer.

Or, comme je l’ai souligné, beaucoup d’innovations en matière de biocontrôle sont le fait de PME, de TPE et de start-up, qui rencontrent des difficultés pour mener à bien leur projet. C’est pourquoi le présent amendement vise à mettre en place des pôles de recherche et de développement du biocontrôle afin de réunir dans une même entité toutes les forces en présence sur un territoire pour mettre en œuvre des dispositifs de substitution aux produits conventionnels. Là aussi, cette position s’intègre parfaitement dans la transition agroécologique que nous appelons de nos vœux.

Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 555 rectifié ter,
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Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendements n° 559 rectifié bis et n° 560 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 556 rectifié ter, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de mettre en place des pôles de recherche et de développement du biocontrôle. Ces pôles pourraient être constitués par le regroupement sur un même territoire d’entreprises, d’établissements d’enseignement supérieur et d’organismes de recherche publics ou privés qui ont vocation à travailler en synergie pour mettre en œuvre des projets de développement de produits de biocontrôle.

La désignation des pôles de recherche et de développement du biocontrôle pourrait être effectuée par un comité interministériel, après avis d’un groupe de personnalités qualifiées, sur la base des critères suivants :

- les moyens de recherche et de développement susceptibles d’être mobilisés dans le ou les domaines d’activité retenus ;

- les perspectives économiques, environnementales et d’innovation ;

- les perspectives et les modalités de coopération entre les différents acteurs concernés.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement de repli vise à prévoir un rapport sur la mise en place des pôles de recherche et de développement du biocontrôle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Sur l’initiative de l’INRA, plusieurs acteurs publics et privés de la recherche, de la recherche-développement et de l’innovation se sont associés pour créer un consortium public-privé sur le biocontrôle. De même, un réseau de chercheurs sur le biocontrôle, le « réseau EMBA », s’est créé en 2014 associant des chercheurs de l’INRA et des industriels pour partager leurs travaux sur le biocontrôle.

D’autres initiatives sont en cours, et il n’est pas évident que des pôles pilotés par des comités interministériels accélèrent la structuration déjà en marche. L’avis est donc plutôt défavorable sur les deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. L’idée de créer des pôles de recherche sur le sujet est intéressante et mérite d’être explorée. Toutefois, des dispositifs de ce type existent déjà. Je pense aux pôles d’excellence et aux pôles de compétitivité, que vous avez rappelés.

Dans le cadre du plan Écophyto, un groupe de travail rassemblant l’ensemble des parties prenantes du biocontrôle se réunira prochainement pour examiner comment accélérer la mise à disposition des produits de cette catégorie. À ce stade, il est donc prématuré de prévoir la création de pôles de recherche et de développement de produits de biocontrôle.

Je suis donc plutôt défavorable à l’inscription d’un tel dispositif dans la loi, notamment parce qu’on n’est pas certain de sa nature législative. Reste que, si vous le souhaitez, madame la sénatrice, vous pourrez être associée au groupe de travail qui est en train de se dessiner.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.

Mme Nicole Bonnefoy. J’entends que des dispositifs existent déjà. Pour autant, je constate, en particulier dans ma région, que des PME ou des start-up ont mis au point des systèmes alternatifs et qu’elles ont de grandes difficultés à trouver les financements nécessaires, par exemple pour les études. Elles ont de ce fait le plus grand mal à déposer des dossiers auprès de l’ANSES pour les demandes d’autorisation de mise sur le marché.

Je souhaitais mettre en évidence ces difficultés. Il serait intéressant que la loi apporte un « plus » pour permettre à ces entreprises de développer davantage le biocontrôle et les alternatives. Je le répète, j’ai l’expérience de ces difficultés dans ma propre région. Quoi qu’il en soit, je retire mes amendements.

Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendement n° 556 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article 14 sexies

M. le président. Les amendements nos 555 rectifié ter et 556 rectifié ter sont retirés.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 559 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat, Lurel et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Lienemann, MM. Jomier et Botrel, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre …

« Dispositions relatives à la réparation intégrale des préjudices directement causés par l’utilisation des produits phytopharmaceutiques

« Section 1

« Réparation des divers préjudices

« Art. L. 253-19. – Peuvent obtenir la réparation intégrale de leurs préjudices :

« 1° Les personnes qui ont obtenu la reconnaissance, au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité, d’une maladie professionnelle occasionnée par les produits phytopharmaceutiques mentionnés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime ;

« 2° Les personnes qui souffrent d’une pathologie résultant directement de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques sur le territoire de la République française ;

« 3° Les enfants atteints d’une pathologie directement occasionnée par l’exposition de l’un de leurs parents à des produits phytopharmaceutiques sur le territoire de la République française.

« Un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, des outre-mer et de l’agriculture établit la liste des pathologies mentionnées aux 2° et 3° du présent article.

« Section 2

« Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques

« Art. L. 253-20. – Il est créé un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, personne morale de droit privé. Il groupe toutes les sociétés ou caisses d’assurances et de réassurances mutuelles agricoles.

« Ce fonds a pour mission de réparer les préjudices définis à l’article L. 253-19. Il est représenté à l’égard des tiers par son directeur.

« Art. L. 253-21. – Le demandeur justifie de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et de l’atteinte à l’état de santé de la victime.

« Il informe le fonds des autres procédures relatives à l’indemnisation des préjudices définis au I du présent article éventuellement en cours. Si une action en justice est intentée, il en informe le juge de la saisine du fonds.

« Si la maladie est susceptible d’avoir une origine professionnelle et en l’absence de déclaration préalable par la victime, le fonds transmet sans délai le dossier à l’organisme concerné au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité. Cette transmission vaut déclaration de maladie professionnelle. Elle suspend le délai prévu à l’article L. 253-22 jusqu’à ce que l’organisme concerné communique au fonds les décisions prises. En tout état de cause, l’organisme saisi dispose pour prendre sa décision d’un délai de trois mois, renouvelable une fois si une enquête complémentaire est nécessaire. Faute de décision prise par l’organisme concerné dans ce délai, le fonds statue dans un délai de trois mois.

« Le fonds examine si les conditions d’indemnisation sont réunies. Il recherche les circonstances de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et ses conséquences sur l’état de santé de la victime ; il procède ou fait procéder à toutes investigation et expertise utiles sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou industriel.

« Au sein du fonds, une commission médicale indépendante se prononce sur l’existence d’un lien entre l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et la survenue de la pathologie. Sa composition est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, des outre-mer et de l’agriculture.

« Vaut justification de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques la reconnaissance d’une maladie professionnelle occasionnée par ces produits au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.

« Vaut également justification du lien entre l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et le décès la décision de prise en charge de ce décès au titre d’une maladie professionnelle occasionnée par des produits phytopharmaceutiques en application de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.

« Dans les cas valant justification de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques mentionnés aux deux alinéas précédents, le fonds peut verser une provision si la demande lui en a été faite. Il est statué dans le délai d’un mois à compter de la demande de provision.

« Le fonds peut demander à tout service de l’État, collectivité publique, organisme assurant la gestion des prestations sociales, organisme assureur susceptibles de réparer tout ou partie du préjudice, la communication des renseignements relatifs à l’exécution de leurs obligations éventuelles.

« Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d’autres fins que l’instruction de la demande faite au fonds d’indemnisation et leur divulgation est interdite. Les personnes qui ont à connaître des documents et informations fournis au fonds sont tenues au secret professionnel.

« Le demandeur peut obtenir la communication de son dossier, sous réserve du respect du secret médical et du secret industriel et commercial. »

« Art. L. 253-22. – Dans les neuf mois à compter de la réception d’une demande d’indemnisation, le fonds présente au demandeur une offre d’indemnisation. Il indique l’évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. À défaut de consolidation de l’état de la victime, l’offre présentée par le fonds a un caractère provisionnel.

« Le fonds présente une offre dans les mêmes conditions en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime.

« L’offre définitive est faite dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle le fonds a été informé de cette consolidation.

« Le paiement doit intervenir dans un délai d’un mois à compter de la réception par le fonds de l’acceptation de son offre par la victime, que cette offre ait un caractère provisionnel ou définitif.

« L’acceptation de l’offre ou la décision juridictionnelle définitive rendue dans l’action en justice prévue à l’article L. 253-23 vaut désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice. Il en va de même des décisions juridictionnelles devenues définitives allouant une indemnisation intégrale pour les conséquences de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques. »

« Art. L. 253-23. – Le demandeur ne dispose du droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation que si sa demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à l’article L. 253-22 ou s’il n’a pas accepté l’offre qui lui a été faite.

« Cette action est intentée devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le domicile du demandeur.

« Art. L. 253-24. – Le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes.

« Le fonds intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, notamment dans les actions en faute inexcusable, et devant les juridictions de jugement en matière répressive, même pour la première fois en cause d’appel, en cas de constitution de partie civile du demandeur contre le ou les responsables des préjudices ; il intervient à titre principal et peut user de toutes les voies de recours ouvertes par la loi.

« Si le fait générateur du dommage a donné lieu à des poursuites pénales, le juge civil n’est pas tenu de surseoir à statuer jusqu’à décision définitive de la juridiction répressive.

« La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, à l’occasion de l’action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime en application de la législation de sécurité sociale. L’indemnisation à la charge du fonds est révisée en conséquence. »

« Art. L. 253-25. – Le fonds est financé par :

« 1° L’affectation d’une fraction du produit de la taxe prévue à l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime ;

« 2° Les sommes perçues en application de l’article L. 253-23 ;

« 3° Les produits divers, dons et legs.

« Art. L. 253-26. – Les demandes d’indemnisation doivent être adressées au fonds dans un délai de dix ans.

« Pour les victimes, le délai de prescription commence à courir à compter de :

« – pour la maladie initiale, la date du premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l’exposition aux produits phytopharmaceutiques ;

« – pour l’aggravation de la maladie, la date du premier certificat médical constatant cette aggravation dès lors qu’un certificat médical précédent établissait déjà le lien entre cette maladie et une exposition aux produits phytopharmaceutiques.

« Art. L. 253-27. – L’activité du fonds fait l’objet d’un rapport annuel remis au Gouvernement et au Parlement avant le 30 avril.

« Les modalités d’application du présent chapitre III bis sont fixées par décret en Conseil d’État. »

« Le délai fixé au premier alinéa de l’article L. 253-23 est porté à douze mois pendant l’année qui suit la publication du décret mentionné au précédent alinéa. »

II. – Le VI de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« VI. – Le produit de la taxe est affecté :

« 1° En priorité, à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, dans la limite du plafond fixé au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, pour financer la mise en place du dispositif de phytopharmacovigilance défini à l’article L. 253-8-1 du présent code et pour améliorer la prise en compte des préjudices en lien direct avec l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ;

« 2° Pour le solde, au Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. »

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Avec votre permission, monsieur le président, je défendrai également l’amendement n° 560 rectifié bis.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 560 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat, Lurel et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Lienemann, M. Jomier, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le chapitre III du titre V du livre II du même code, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre …

« Dispositions relatives à la réparation intégrale des préjudices directement causés par l’utilisation des produits phytopharmaceutiques

« Section 1

« Réparation des divers préjudices

« Art. L. 253-19. – Peuvent obtenir la réparation intégrale de leurs préjudices : les personnes qui ont obtenu la reconnaissance, au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité, d’une maladie professionnelle occasionnée par les produits phytopharmaceutiques mentionnés à l’article L. 253-1.

« Section 2

« Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques

« Art. L. 253-20. – Il est créé un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, personne morale de droit privé. Il groupe toutes les sociétés ou caisses d’assurances et de réassurances mutuelles agricoles.

« Ce fonds a pour mission de réparer les préjudices définis à l’article L. 253-19. Il est représenté à l’égard des tiers par son directeur.

« Art. L. 253-21. – Le demandeur justifie de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et de l’atteinte à l’état de santé de la victime.

« Il informe le fonds des autres procédures relatives à l’indemnisation des préjudices définis au présent article éventuellement en cours. Si une action en justice est intentée, il en informe le juge de la saisine du fonds.

« En l’absence de déclaration préalable par la victime, le fonds transmet sans délai le dossier à l’organisme concerné au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité. Cette transmission vaut déclaration de maladie professionnelle. Elle suspend le délai prévu à l’article L. 253-23 jusqu’à ce que l’organisme concerné communique au fonds les décisions prises. En tout état de cause, l’organisme saisi dispose pour prendre sa décision d’un délai de trois mois, renouvelable une fois si une enquête complémentaire est nécessaire. Faute de décision prise par l’organisme concerné dans ce délai, le fonds statue dans un délai de trois mois.

« Le fonds examine si les conditions d’indemnisation sont réunies. Il recherche les circonstances de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et ses conséquences sur l’état de santé de la victime ; il procède ou fait procéder à toutes investigation et expertise utiles sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou industriel.

« Au sein du fonds, une commission médicale indépendante se prononce sur l’existence d’un lien entre l’exposition aux produits phytopharmaceutiques et la survenue de la pathologie. Sa composition est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, des outre-mer et de l’agriculture.

« Vaut justification de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques la reconnaissance d’une maladie professionnelle occasionnée par ces produits au titre de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.

« Vaut également justification du lien entre l’exposition à des produits phytopharmaceutiques et le décès la décision de prise en charge de ce décès au titre d’une maladie professionnelle occasionnée par des produits phytopharmaceutiques en application de la législation française de sécurité sociale ou d’un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d’invalidité.

« Dans les cas valant justification de l’exposition aux produits phytopharmaceutiques mentionnés aux deux alinéas précédents, le fonds peut verser une provision si la demande lui en a été faite. Il est statué dans le délai d’un mois à compter de la demande de provision.

« Le fonds peut demander à tout service de l’État, collectivité publique, organisme assurant la gestion des prestations sociales, organisme assureur susceptibles de réparer tout ou partie du préjudice, la communication des renseignements relatifs à l’exécution de leurs obligations éventuelles.

« Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d’autres fins que l’instruction de la demande faite au fonds d’indemnisation et leur divulgation est interdite. Les personnes qui ont à connaître des documents et informations fournis au fonds sont tenues au secret professionnel.

« Le demandeur peut obtenir la communication de son dossier, sous réserve du respect du secret médical et du secret industriel et commercial.

« Art. L. 253-22. – Dans les neuf mois à compter de la réception d’une demande d’indemnisation, le fonds présente au demandeur une offre d’indemnisation. Il indique l’évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. À défaut de consolidation de l’état de la victime, l’offre présentée par le fonds a un caractère provisionnel.

« Le fonds présente une offre dans les mêmes conditions en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime.

« L’offre définitive est faite dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle le fonds a été informé de cette consolidation.

« Le paiement doit intervenir dans un délai d’un mois à compter de la réception par le fonds de l’acceptation de son offre par la victime, que cette offre ait un caractère provisionnel ou définitif.

« L’acceptation de l’offre ou la décision juridictionnelle définitive rendue dans l’action en justice prévue à l’article L. 253-23 vaut désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice. Il en va de même des décisions juridictionnelles devenues définitives allouant une indemnisation intégrale pour les conséquences de l’exposition à des produits phytopharmaceutiques.

« Art. L. 253-23. – Le demandeur ne dispose du droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation que si sa demande d’indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné à l’article L. 253-22 ou s’il n’a pas accepté l’offre qui lui a été faite.

« Cette action est intentée devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le domicile du demandeur.

« Art. L. 253-24. – Le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge desdites personnes.

« Le fonds intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, notamment dans les actions en faute inexcusable, et devant les juridictions de jugement en matière répressive, même pour la première fois en cause d’appel, en cas de constitution de partie civile du demandeur contre le ou les responsables des préjudices ; il intervient à titre principal et peut user de toutes les voies de recours ouvertes par la loi.

« Si le fait générateur du dommage a donné lieu à des poursuites pénales, le juge civil n’est pas tenu de surseoir à statuer jusqu’à décision définitive de la juridiction répressive.

« La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, à l’occasion de l’action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime en application de la législation de sécurité sociale. L’indemnisation à la charge du fonds est révisée en conséquence.

« Art. L. 253-25. – Le fonds est financé par :

« 1° L’affectation d’une fraction du produit de la taxe prévue à l’article L. 253-8-2 ;

« 2° Les sommes perçues en application de l’article L. 253-23 ;

« 3° Les produits divers, dons et legs.

« Art. L. 253-26. – Les demandes d’indemnisation doivent être adressées au fonds dans un délai de dix ans.

« Pour les victimes, le délai de prescription commence à courir à compter de :

« – pour la maladie initiale, la date du premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l’exposition aux produits phytopharmaceutiques ;

« – pour l’aggravation de la maladie, la date du premier certificat médical constatant cette aggravation dès lors qu’un certificat médical précédent établissait déjà le lien entre cette maladie et une exposition aux produits phytopharmaceutiques.

« Art. L. 253-27. – L’activité du fonds fait l’objet d’un rapport annuel remis au Gouvernement et au Parlement avant le 30 avril.

« Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Le délai fixé au premier alinéa de l’article L. 253-23 est porté à douze mois pendant l’année qui suit la publication du décret mentionné au précédent alinéa. »

II – Le VI de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« VI. – Le produit de la taxe est affecté :

« 1° En priorité, à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, dans la limite du plafond fixé au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, pour financer la mise en place du dispositif de phytopharmacovigilance défini à l’article L. 253-8-1 du présent code et pour améliorer la prise en compte des préjudices en lien direct avec l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ;

« 2° Pour le solde, au Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Nicole Bonnefoy. Ces deux amendements portent sur le même sujet : la création d’un fonds d’indemnisation pour les victimes des produits phytopharmaceutiques, au premier rang desquelles les agriculteurs. Ils visent à reprendre la proposition de loi portant création de ce fonds d’indemnisation spécifique, qui a été déposée par le groupe socialiste et adoptée à l’unanimité par la Haute Assemblée le 1er février 2018.

Ce fonds vise à permettre la prise en charge de la réparation intégrale des préjudices des personnes atteintes de maladies liées à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques par la création d’un fonds d’indemnisation abondé par les fabricants de ces produits.

L’amendement n° 559 rectifié bis concerne tous les malades, qu’ils soient d’origine professionnelle ou non. Il vise à reprendre l’intégralité de la proposition de loi adoptée au Sénat en février.

L’amendement n° 560 rectifié bis est une forme de « repli » dans le sens où il prévoit, dans un premier temps, de restreindre le champ de ce fonds aux maladies reconnues professionnellement.

Notre proposition est totalement en adéquation avec les conclusions d’un rapport de janvier 2018 publié conjointement par l’Inspection générale des affaires sociales, l’Inspection générale des finances et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. Ce fonds permettra d’accompagner les victimes qui souffrent de maladies liées à l’utilisation de ces produits en facilitant leurs démarches, en leur offrant un cadre global pour une plus grande égalité et en les indemnisant en réparation de l’intégralité du préjudice subi. Il permettra également de mieux identifier toutes les victimes, puisqu’on estime que seulement un malade sur dix est actuellement suivi pour cette raison.

Monsieur le ministre, mardi, lors de la discussion générale au cours de laquelle j’ai évoqué ce sujet, vous avez déclaré que « nous avançons » sur la question du fonds d’indemnisation. Des paroles aux actes, il n’y a qu’un pas, et le moment est enfin venu d’accorder aux victimes la juste compensation qu’elles doivent recevoir.

J’appelle donc le Sénat à réparer la souffrance de ces victimes – majoritairement des agriculteurs – que notre société n’a pas encore su prendre en considération et à prolonger l’unanimité qui s’était dégagée de nos travées en février dernier par la création de ce fonds.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à reprendre le contenu d’une proposition de loi du Sénat largement adoptée.

L’amendement n° 559 rectifié bis vise à élargir l’accès à ce fonds à toutes les maladies, professionnelles comme non professionnelles. L’élargissement de l’indemnisation aux maladies non professionnelles rend le champ très large. La difficulté est d’estimer le nombre de victimes potentielles sans diluer l’ensemble du dispositif. L’avis est donc plutôt défavorable.

En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° 560 rectifié bis, qui vise essentiellement les maladies professionnelles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. C’est un sujet qui tient à cœur à beaucoup de parlementaires et à nombre de nos concitoyens. J’ai effectivement précisé l’autre jour que le travail avançait ; je ne parlais pas du fonds d’indemnisation en lui-même, mais de la question de la reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles. C’est le sens de l’action que nous menons.

Je sais le travail que vous avez réalisé, madame la sénatrice, avec Sophie Primas en 2012 sur ces sujets.

Un rapport des inspections générales, qui a été remis en février 2018, préconise d’améliorer la réparation dans le cadre du régime accidents du travail et maladies professionnelles. C’est sur ce point que nous avançons en particulier. Notre objectif est de faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles liées aux expositions aux produits pharmaceutiques et, bien sûr, d’améliorer leur prise en charge.

Nous avons souhaité une évaluation scientifique à la fois solide et robuste pour la reconnaissance des maladies professionnelles. Cette mission a été confiée à l’INSERM, en lien avec l’ANSES. Il importe notamment d’actualiser les liens entre les pathologies et les expositions professionnelles aux pesticides. La précédente étude avait compilé les données jusqu’en 2013. Or la connaissance depuis cette date a nettement progressé.

Notre deuxième souhait était de réviser le tableau des maladies professionnelles, afin qu’il prenne en compte les nouvelles données scientifiques depuis 2013. C’est un travail qui a été demandé aux présidents de commission. Il sera remis au plus tard à la fin de l’année 2019.

Nous avons également souhaité harmoniser les décisions de reconnaissance qui ne relèvent pas des tableaux de reconnaissance par les comités régionaux. Ce sera fait d’ici à la fin de l’année 2018. Nous avons voulu entamer une concertation pour améliorer l’indemnisation des exploitants agricoles dont le niveau d’indemnisation est moindre aujourd’hui que pour les salariés agricoles.

En résumé, nous souhaitons améliorer le système d’indemnisation pour les victimes des produits phytopharmaceutiques par le dispositif qui existe aujourd’hui pour les maladies professionnelles. Par ailleurs, nous souhaitons répondre aux besoins réels de simplification du dispositif pour le rendre beaucoup plus accessible. Il s’agit de mettre un terme au parcours du combattant auquel doivent se livrer les personnes touchées par ces maladies professionnelles, les procédures n’ayant jamais été aussi longues. Tout cela va dans le sens des préconisations de la mission que vous aviez conduite avec Mme Primas.

Pourquoi ne créons-nous pas un fonds spécifique, même si nous souhaitons faire en sorte que les victimes des produits phytopharmaceutiques puissent être mieux indemnisées, mieux traitées et qu’elles puissent faire valoir leurs intérêts ?

Votre proposition initiale a été modifiée pour la limiter aux seules personnes dont la maladie a été reconnue comme maladie professionnelle consécutive à l’exposition aux produits phytopharmaceutiques. Vous avez ainsi pris en considération l’une de nos préoccupations – mais ce n’était pas la seule – dans votre amendement de repli n° 560 rectifié bis. Un tel dispositif pose cependant un problème d’équité, parce qu’il ne concerne que les victimes des produits phytopharmaceutiques. Par conséquent, les personnes victimes de maladies professionnelles liées à d’autres causes seraient indemnisées de manière moins favorable. En outre, certaines de ces maladies peuvent être causées par l’exposition à d’autres risques chimiques que des produits phytopharmaceutiques.

Un tel dispositif, qui viserait à la réparation intégrale, exonérerait également les industriels de leurs responsabilités, ce qui ne doit pas être le cas. Cette indemnisation serait opérée sans détermination préalable de responsabilité, et les industriels bénéficieraient, de fait, d’une décharge de responsabilité individuelle contre une prise en charge mutualisée du risque, sachant que les contributions qu’ils peuvent apporter concourent au fonctionnement de l’ANSES, mais pas à la réparation des préjudices.

Je rappelle que des actions de prévention des utilisateurs, mais aussi un réel engagement en faveur d’une réduction des produits phytosanitaires iront dans le sens d’une meilleure reconnaissance et d’une meilleure traçabilité pour celles et ceux qui sont atteints par des maladies ou pathologies liées à l’utilisation ou à l’exposition à des produits phytosanitaires.

Avec Mme la ministre des solidarités et de la santé, nous allons engager un travail pour compléter le tableau des maladies professionnelles, car il est aujourd’hui absolument indispensable de le faire : un certain nombre de pathologies doivent être reconnues comme étant liées à l’exposition à des produits phytosanitaires ; je pense, par exemple, aux lymphomes ou à la maladie de Parkinson.

Tel est le sens de l’action que nous menons. Nous n’employons peut-être pas tout à fait le même chemin que celui que vous préconisez au travers de votre amendement, mais soyez sûre que l’objectif reste parfaitement le même, à savoir déterminer et accompagner les victimes des produits phytopharmaceutiques. Nous continuerons à travailler en ce sens, et vous serez la bienvenue – c’est une invitation que je vous adresse – pour vous joindre à nous sur l’ensemble de ces sujets.

En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.

Mme Nicole Bonnefoy. Faire évoluer le tableau des maladies professionnelles est une évidence quand on voit les difficultés que rencontrent les malades dans leur parcours de reconnaissance de la maladie, y compris parfois pour une reconnaissance post-mortem. L’association Phyto-Victimes avec laquelle je travaille depuis des années sur ces sujets demande depuis longtemps l’évolution de ce tableau et l’adaptation du régime AT-MP. D’ailleurs, le rapport des différentes inspections que j’ai mentionné précédemment le relève. Pour autant, cela ne règle en rien la réparation, y compris la réparation intégrale du préjudice.

La reconnaissance de la maladie est une chose, mais, après le parcours du combattant que vous avez évoqué, monsieur le ministre, les malades ne perçoivent qu’une indemnisation forfaitaire. Or nous demandons une indemnisation intégrale du préjudice, que le fonds proposé prendrait en charge. Les inspecteurs de l’IGAS et de l’IGF le relèvent, le fonds a une pertinence, et il s’avérerait tout à fait utile. Vous affirmez qu’il va déresponsabiliser les firmes, mais pas du tout ! Au contraire, celles-ci participeront au fonds par le biais de la taxe sur les autorisations de mise sur le marché : il s’agit du principe pollueur-payeur.

Je ne peux pas entendre ce que vous dites. Nous avons travaillé à la création de ce fonds d’indemnisation avec les juristes de l’association Phyto-Victimes, ceux-là mêmes qui ont construit le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. Vous arguez que le fait de n’indemniser que ces travailleurs conduira à une rupture d’égalité avec les autres malades. Mais que n’a-t-on fait quand on a créé un fonds pour indemniser les victimes de la Dépakine, de l’amiante, etc. ?

Ce fonds a une pertinence, sa création doit être votée. Aussi, j’appelle tous mes camarades… tous mes collègues, voulais-je dire – mes collègues sont des camarades ! (Sourires.) –, à voter en sa faveur.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je vais être bonne camarade, chère Nicole Bonnefoy ; nous avons travaillé ensemble durant plusieurs mois sur ces sujets.

Monsieur le ministre, nous ne nions pas tous les efforts réalisés depuis plusieurs années pour assurer une meilleure reconnaissance de ces maladies professionnelles et pour aller dans le sens de la simplification. Simplement, je n’entends pas, à l’instar de Nicole Bonnefoy, votre argument selon lequel cette mesure serait de nature à opérer une distinction entre les agriculteurs qui souffriraient d’autres maladies et ceux qui seraient victimes des produits phytosanitaires. Nicole Bonnefoy a évoqué le cas de l’amiante : des travailleurs ont été exposés à l’amiante et d’autres ont aussi été exposés à d’autres molécules ou d’autres produits – on a évoqué les goudrons –, et le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante existe bien.

Je ne pense pas non plus que nous allons décharger les firmes de leurs responsabilités, ces fameuses firmes dont parle souvent notre collègue. Au contraire, c’est un gage de responsabilisation : ce fonds indemnisera en totalité les préjudices subis par les agriculteurs. Ce sera une manière d’engager leur responsabilité.

Voter cette proposition au travers de l’amendement de repli de Nicole Bonnefoy, lequel est somme toute assez raisonnable, honorerait la Haute Assemblée. Ce serait reconnaître là le travail que nous avons engagé, vous comme nous, ainsi que les différents gouvernements qui se sont succédé, depuis des années : mettons nos propres agriculteurs à l’abri d’un certain nombre de maladies qui, nous le savons aujourd’hui, sont directement liées à l’usage intensif, trop important et sans réserve de ces produits.

Pour ma part, et au nom de la commission, je soutiendrai l’amendement n° 560 rectifié bis. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Saisie pour avis, notre commission n’a pas examiné cet amendement, mais je souligne que, à titre personnel, j’y suis favorable.

Il faut bien sûr agir prioritairement à la source du problème dans une logique préventive, en réduisant l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et l’exposition à ces produits à la fois pour leurs utilisateurs et la population ; nous en avons déjà parlé précédemment lors de l’examen d’amendements, et nous en reparlerons dans un instant.

Il faut également agir sur le volet curatif, en améliorant les conditions de prise en charge de celles et de ceux qui développent des pathologies liées à cette exposition. On ne peut l’ignorer, certains utilisateurs ont été exposés à ces produits pendant une dizaine d’années, à une époque où le risque sanitaire était moins bien identifié, il faut le reconnaître.

Lors d’une table ronde organisée par notre commission sur ce sujet, en janvier 2016, réunissant l’ensemble des parties prenantes, tous les acteurs convergeaient vers la nécessité d’assurer une meilleure indemnisation des victimes de ces produits, au premier rang desquels les agriculteurs.

Par ailleurs, nous connaissons les limites du tableau des maladies professionnelles, qui a certes connu des évolutions, mais qui ne répond pas pleinement à la diversité des difficultés rencontrées par les malades. Vous avez parlé de l’amiante. Que dire des pionniers qui utilisaient les premiers tracteurs et passaient des heures et des heures au milieu de poussières et ont développé des pathologies similaires à celles des mineurs ?

En créant un fonds dédié, cet amendement est de nature à nous permettre d’avancer sur ce sujet. Je salue l’initiative de notre collègue Nicole Bonnefoy, engagée sur ce sujet depuis de nombreuses années, et je remercie Mme la rapporteur de la commission des affaires économiques pour l’avis favorable donné à cet amendement de compromis.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Je ne veux pas laisser croire que le Gouvernement balaye d’un revers de main votre travail…

Mme Nicole Bonnefoy. Je n’ai pas dit ça !

M. Stéphane Travert, ministre. … et nie la nécessité de faire avancer les choses. Seulement, nous avons choisi un autre chemin.

Par ailleurs, on ne peut pas juxtaposer les exemples. Je viens d’un territoire où les associations de victimes de l’amiante sont très nombreuses,…

M. Stéphane Travert, ministre. … et nous savons le travail qu’elles mènent. Les maladies liées à l’amiante sont spécifiques dans la mesure où elles sont impactées par l’amiante, alors que, avec les produits phytosanitaires, le spectre est beaucoup plus large : comment apporter la preuve réelle que ce sont les produits phytosanitaires qui ont engendré la pathologie ? Voilà où est toute la difficulté. C’est pourquoi nous voulons compléter le tableau des maladies professionnelles.

Par ailleurs, la création d’un fonds pose aussi en quelque sorte un problème d’égalité auquel je suis sensible : cette question de principe mérite d’être prise en compte. Demain, une personne souffrant d’une maladie liée à une exposition à des produits phytosanitaires et reconnue comme étant atteinte d’une maladie professionnelle pourrait bénéficier d’une réparation intégrale, alors que les maladies liées aux produits phytosanitaires ne sont pas spécifiques. En clair, une même maladie peut être liée à une exposition à des produits phytosanitaires, mais aussi à l’exposition à d’autres produits. Certaines hémopathies peuvent être provoquées par des pesticides, mais aussi par le benzène auquel les agriculteurs peuvent être aussi exposés. Un agriculteur souffrant d’une hémopathie liée à une exposition aux pesticides pourrait bénéficier d’une réparation intégrale, contrairement à celui qui souffre de la même affection provoquée par une exposition à un autre produit comme le benzène. Cela pose un problème d’égalité.

Dans ces conditions, il nous semble important de pouvoir travailler sur les améliorations à apporter au dispositif relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles – la marge de manœuvre est très large –, afin que toutes les victimes puissent en bénéficier, qu’elles soient accidentées ou qu’elles souffrent d’une maladie reconnue d’origine professionnelle. La première des choses est de prendre en compte l’évolution des connaissances en vue de faire évoluer le tableau des maladies professionnelles. C’est la voie que nous avons choisie pour agir.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Monsieur le ministre, pardonnez-moi, mais vous parlez de cette question très tranquillement. Je vais aussi essayer de rester calme.

M. Stéphane Travert, ministre. Je ne vais pas m’énerver ! Qu’est-ce que ça veut dire !

M. Joël Labbé. Je ne vous demande pas de vous énerver, mais je vais vous dire une chose.

M. Stéphane Travert, ministre. C’est insultant !

M. Joël Labbé. On a évoqué la question de l’amiante et de son impact sur la santé humaine. Aujourd’hui, l’amiante est interdit, alors que l’on continue de mettre sur le marché les pesticides appelés CMR, cancérigènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction ! Je ne vous accuse pas, monsieur le ministre, mais je fais ce constat, et j’essaie de parler en restant calme.

Votre prédécesseur Stéphane Le Foll déclarait en 2015 – cette déclaration faisait la une de Libération – :…

M. Stéphane Travert, ministre. Ce n’est pas parce que c’est écrit dans Libération que c’est vrai !

M. Joël Labbé. … les produits phytosanitaires sont une véritable bombe à retardement. On est en plein dedans ; on commence à en voir les effets.

C’est pourquoi je me rangerai également derrière l’amendement de repli de Nicole Bonnefoy, même s’il ne me satisfait pas : il faut un amendement beaucoup plus dur. En effet, on demande un lien direct pour les professionnels. Mais que va-t-on faire pour les non-professionnels qui sont victimes de l’exposition à ces produits ?

À cet égard, je prendrai deux exemples : la question des malformations génitales des nourrissons – les conséquences ont lieu avant même la naissance – est scientifiquement avérée. Sophie Primas et Nicole Bonnefoy doivent s’en souvenir, lors de nos auditions, un chirurgien pédiatre de Lille nous a confié qu’il existe tellement de cas qu’il s’est spécialisé dans ce domaine. J’évoquerai aussi les perturbateurs endocriniens : des gamines de neuf ou dix ans sont victimes – je dis bien : victimes, parce que c’est le cas – d’une puberté précoce. Un grand-père m’a appelé il n’y a pas si longtemps pour me confier son désespoir : résidant dans une zone géographique qui subit des traitements, le médecin lui a affirmé qu’il existait un lien direct de cause à effet.

Vous avez parlé, monsieur le ministre, des lymphomes, qui seraient éventuellement liés aux pesticides, ou de la maladie de Parkinson. La maladie de Parkinson y est directement liée ; elle est maintenant reconnue maladie professionnelle. (M. le ministre opine.) Cela se comprend, puisqu’on utilise des neurotoxiques. Les néonicotinoïdes sont neurotoxiques ; on parlera ultérieurement de l’extension de la définition des néonicotinoïdes. C’est pour cette raison que je vous parlais de responsabilité.

M. le président. Il faut conclure, cher collègue !

M. Joël Labbé. Je le dis tranquillement, je ne veux pas accuser qui que ce soit, mais notre responsabilité est grande. Et je ne vous parle pas de celle des firmes : c’est de l’empoisonnement généralisé !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. J’ai écouté avec beaucoup d’attention tous mes collègues et ce que vous avez dit, monsieur le ministre, notamment à propos de l’amiante. Nous avons en partage la zone de Condé-Caligny, que nous connaissons bien et qui compte un nombre élevé de maladies et de décès lié au poison qu’est l’amiante. Joël Labbé a raison, l’amiante est aujourd’hui interdit.

Je comprends très bien votre argumentation, mais je suis un peu ennuyée : vous nous proposez d’attendre, alors que nous sommes face à des problèmes totalement humains et que nous sommes dans une course contre la montre pour faire reconnaître la maladie en vue d’indemniser et de soigner ceux qui en souffrent. Certes, la rédaction de l’amendement pourrait être améliorée, mais, comme tous les textes sont examinés dans l’urgence, on n’a absolument aucun moyen d’améliorer les dispositifs proposés. La navette aurait été une procédure adaptée pour un texte aussi important ! Vous n’y êtes pas pour grand-chose non plus, car cette méthodologie est appliquée depuis déjà très longtemps : on n’a plus qu’une seule lecture. Des textes importants pourraient être améliorés par l’Assemblée nationale et le Sénat, mais cela n’est pas possible pour cause de navettes avortées, si je puis dire.

Je comprends très bien ce que vous dites, et je partage votre méthodologie, mais il est aussi de notre devoir d’envoyer un signal fort ; je comprends aussi tout à fait la position de la présidente de la commission des affaires économiques, de la rapporteur et du rapporteur pour avis. Il appartiendra ensuite au Gouvernement et aux associations de mettre en place le dispositif le plus vite possible pour répondre aux besoins.

Il ne s’agit pas là de régler un problème administratif ; on pourra toujours améliorer le dispositif ultérieurement. Mais, reconnaissez-le avec moi, monsieur le ministre, quand nous avons dû faire face à tous les problèmes qui se sont posés à Caligny et à Condé, il y a des urgences. Songez que des personnes qui travaillaient chez Moulinex ne sont toujours pas indemnisées pour des problèmes liés à l’amiante, parce que les dispositifs applicables n’ont toujours pas été étendus, alors que l’usine est fermée depuis vingt ans ! Il y a quand même là un problème. C’est à ce type de problème que nous voulons répondre, même si le dispositif proposé n’est pas parfait.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Ce sujet est, me semble-t-il, très important, et il faut en débattre tranquillement, avec calme. Je veux remercier la présidente de la commission et le rapporteur pour avis de leurs propos.

Monsieur le ministre, il me semble, avec tout le respect que j’ai pour vous, que vous apportez à une question politique et sociétale portée par nos concitoyens une réponse administrative et technocratique. Considérant le débat que nous avons à l’instant, le Sénat semble s’orienter vers un vote très majoritaire. Aussi, parfois, le Gouvernement doit écouter le Parlement. En l’occurrence, ici, il faut envoyer des signaux : des signaux positifs et négatifs sont donnés dans cette loi. Alors, envoyons ce signal positif à nos concitoyens, qui, unanimement, le percevraient comme tel : lorsqu’une personne souffre d’une maladie liée aux produits phytosanitaires, elle doit être indemnisée.

On le sait très bien, le véritable danger réside aujourd’hui, comme cela a déjà été évoqué à plusieurs reprises, dans l’exposition à de faibles doses dans la durée ou à ces substances mélangées à d’autres produits. D’ailleurs, je vous engage, monsieur le ministre, à visiter le pôle européen de toxicologie environnementale et d’écotoxicologie construit à Valence, dans la Drôme, l’un des deux seuls en Europe qui travaille sur ce sujet.

Nous voterons l’amendement n° 560 rectifié bis : il n’est peut-être pas parfait, mais il va envoyer un signal, celui de dire aux Françaises et aux Français, aux agriculteurs et aux agricultrices que le Sénat les comprend et qu’ils pourront être indemnisés. Ce signal, vous pourriez, si ce n’est le soutenir, du moins l’accompagner, car il comptera dans le champ des orientations globales prévues dans votre projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. L’amiante est un grand scandale, connu depuis plus d’un siècle, et notre société a accusé du retard dans la prise en compte de ce problème. Il existe un fossé entre ces scandales du temps passé, d’un temps ancien, et le principe de précaution.

On a parlé d’une relation de cause à effet, mais, en médecine, il n’y a pas de relation de cause à effet : une maladie est souvent due à plusieurs effets. Actuellement, une polémique agite un peu l’opinion sur les perturbateurs endocriniens et, quelquefois, on aboutit un peu à la théorie du complot.

Il serait souhaitable de se remettre en question, comme l’a dit mon collègue Didier Guillaume, en légiférant ou en traitant les cas particuliers avec une plus grande empathie : il ne faut pas catégoriser les patients, comme cela a été fait pour l’amiante et comme on va le faire avec les perturbateurs endocriniens. Soyons beaucoup plus dans l’empathie !

Mme Nicole Bonnefoy. Je retire l’amendement n° 559 rectifié bis, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 559 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le sénateur Labbé, je ne peux pas vous laisser dire que nous devisons tranquillement, comme si nous parlions de sujets tout à fait basiques de la vie de tous les jours. Ne sous-estimez pas ou ne mésestimez pas l’importance que nous accordons à la question des victimes des produits phytosanitaires ou à celle des victimes de l’amiante. Point n’est besoin de sauter de son fauteuil pour évoquer de tels sujets ! Nous devons les aborder tranquillement, dans le respect des uns et des autres et surtout, d’ailleurs – nous leur devons ! –, dans le respect de celles et de ceux qui sont aujourd’hui malades et qui cherchent des solutions pour s’en sortir.

J’entends bien la réaction de chacun d’entre vous : répondre par la négative à la création d’un fonds pourrait être mal interprété. Mais nous n’avons pas pour objectif de ne pas vouloir créer un fonds.

M. Stéphane Travert, ministre. Comme cela a été souligné précédemment, vingt ou vingt-cinq ans après la fermeture de l’usine, un certain nombre de salariés de Moulinex ne sont toujours pas indemnisés, parce que la création d’un fonds demande des années et des années.

Je n’apporte pas ici de réponse administrative ni technocratique, j’essaie d’apporter une réponse pragmatique : comment faire pour aller plus vite, pour mieux protéger et mieux encadrer les malades au travers du tableau des maladies professionnelles. C’est cette méthode que je préconise, et elle de nature à nous permettre d’être demain plus réactifs pour indemniser celles et ceux qui souffrent de pathologies particulières. J’entends bien que nous puissions avoir un désaccord sur ce point, mais nous estimons que cette méthode peut être plus rapide pour traiter certains cas d’indemnisation des professionnels agricoles, notamment. L’amiante fait partie de cas spécifiques, je le répète, dans la mesure où l’on connaît précisément la nature de l’exposition ainsi que les dangers du produit.

C’est la raison pour laquelle j’incline à agir en ce sens. Je ne veux pas laisser dire que nous ne souhaitons pas avancer ni faire quoi que ce soit. C’est une autre voie que nous choisissons. D’ailleurs, je recevrai au ministère à la fin de cette semaine les associations, y compris le président de l’association visée dans les semaines à venir, parce que nous devons travailler ensemble. À ce propos, je réitère mon invitation : les parlementaires intéressés pour travailler sur ces sujets sont les bienvenus.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 560 rectifié bis.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 181 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 323
Pour l’adoption 323

Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 quinquies.

Article additionnel après l'article 14 quinquies - Amendements n° 559 rectifié bis et n° 560 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 128 rectifié septies

Article 14 sexies

Par dérogation au premier alinéa du I de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, une expérimentation de l’utilisation des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote pour la pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques est menée, pour une période maximale de trois ans à compter de la publication de l’arrêté prévu au dernier alinéa du présent article, sur des surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 %. Cette expérimentation, qui fait l’objet d’une évaluation par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, vise à déterminer les bénéfices liés à l’utilisation de drones pour limiter les risques d’accidents du travail et pour l’application de produits phytopharmaceutiques en matière de réduction des risques pour la santé et l’environnement.

Les conditions et modalités de cette expérimentation sont définies par arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement, de l’agriculture et de la santé, de manière à garantir l’absence de risque inacceptable pour la santé et l’environnement.

M. le président. La parole est à M. François Patriat, sur l’article.

M. François Patriat. Songez au territoire de Condrieu, ce patrimoine extraordinaire qui ne se situe pas en Bourgogne, malheureusement…

M. Didier Guillaume. Mais dans la vallée du Rhône !

M. François Patriat. Vous connaissez donc, cher ami Didier Guillaume et chers collègues de ce territoire, les difficultés de traitement sur ces terres merveilleuses, mais d’accès ô combien difficile.

Aujourd’hui, on dispose d’appareils tels que les aéronefs ou les drones, qui permettent de procéder au traitement de cultures en pente pour lesquelles les traitements traditionnels diffusés « à la main » ont tendance à exposer fortement les professionnels aux pesticides et, surtout, à déverser parfois trop de pesticides sur les pentes à accès difficile. Dans de telles configurations, on peut considérer que le traitement est parfois intensif, avec des produits agressifs et en surdosage. Une pulvérisation aérienne précise par drone permettrait l’utilisation à moindre dose de ces produits de traitement. L’utilisation d’appareils volant très bas évite la dispersion du produit à laquelle donnait lieu l’épandage par hélicoptère. Elle renforce la sécurité des travailleurs.

L’article 14 sexies n’ouvre pas la porte à un nouvel épandage aérien démesuré et généralisé. Il s’agit d’une expérimentation, encadrée dans le temps, sur des surfaces en particulier, avec des pentes supérieures à 30 %, et qui fera l’objet d’une évaluation de l’ANSES. Pour toutes ces raisons, notre groupe souhaite le maintien de cet article dans sa rédaction actuelle.

Je profite de cette occasion pour préciser que les drones ne sont pas uniquement utilisés pour l’épandage ; ils permettent également aux agriculteurs d’étudier l’évolution des cultures : ces derniers se servent des images de leurs champs pour optimiser l’usage des traitements et gérer au mieux les apports hydriques. Quand on possède un drone, encore faut-il pouvoir l’utiliser. Or la réglementation en vigueur me paraît complexe et contraignante, peu adaptée à l’usage que peuvent en faire les agriculteurs. C’est pourquoi j’encourage le Gouvernement à mener une réflexion sur la réglementation encadrant l’usage des drones, notamment pour nos agriculteurs.

Dans ces conditions, nous nous opposerons aux amendements identiques visant à la suppression de cet article.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 201 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 474 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 201 rectifié.

M. Fabien Gay. L’article 14 sexies va complètement à l’encontre de la philosophie de ce texte. En effet, au milieu d’une série d’articles visant à restreindre l’usage des intrants chimiques en agriculture, il autorise l’expérimentation d’épandage par drone. Il paraît que cela permettrait un épandage plus précis et moins dispendieux. Le bon sens paysan nous invite plutôt à penser que le moindre coup de vent capricieux viendra répandre les produits à côté de leur cible, abîmant un peu plus la biodiversité. C’est pour cette raison évidente que l’épandage aérien est interdit et qu’il doit le rester. N’ouvrons surtout pas la boîte de Pandore dans ce texte !

De surcroît, cette disposition ouvre la possibilité d’épandre des pesticides dans des zones jusque-là inaccessibles aux machines et aux pulvérisateurs. Nous pensons, notamment, aux cultures de moyenne montagne, que mon collègue Guillaume Gontard, qui siège à mes côtés, connaît bien. Ces terres jusqu’à présent préservées de pesticides seront désormais à la portée des intrants chimiques ; nous ne pouvons pas y voir un progrès.

Enfin, la mécanisation incessante de l’agriculture constitue une fuite avant, qui oblige les agriculteurs à s’endetter toujours davantage pour « moderniser » leur exploitation. Cela diminue d’autant plus leurs marges financières et les place dans une situation de dépendance à l’égard de l’industrie. Tout cela les maintient dans un cercle vicieux dont ils ne peuvent plus sortir.

N’aggravons donc pas les choses avec une nouvelle invention hors de prix, qui n’améliorera pas la situation des agriculteurs, mais aggravera encore peu plus la dégradation de nos sols.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 474 rectifié.

M. Joël Labbé. En avant-propos, je dirai simplement que ce qui est mauvais, nocif, doit être interdit.

L’épandage de pesticides par voie aérienne pose des problèmes de santé publique et d’environnement du fait de la dérive au vent des produits pulvérisés. Il s’agit d’une pratique inadaptée au contexte agricole français en raison du parcellaire et de la densité des cours d’eau et des habitations.

Les épandages aériens sont aujourd’hui interdits pour ces raisons. Il convient de rester sur cette position et d’éviter par cette expérimentation de rouvrir la porte aux épandages aériens.

Il est certes proposé ici une simple expérimentation, mais ne mettons pas un pied dans la porte, qui est une porte de sortie. Nous devons, plutôt que revenir en arrière, promouvoir les alternatives qui existent.

Par ailleurs, la législation actuelle et celle qui est proposée ne permettent pas d’assurer un contrôle efficace de l’usage des drones et, donc, une protection de la santé des riverains. Par conséquent, l’amendement vise à supprimer cette possibilité d’expérimentation.

Pourquoi vouloir faire des drones le futur de l’agriculture ? J’ai lu voilà peu de temps dans la presse que les super-fabricants de drones avaient réussi à imaginer des micro-drones à même de remplacer les abeilles pour assurer la pollinisation. C’est ce qu’on appelle l’« agriculture intelligente ». Si c’est ça l’intelligence, bonjour !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il s’agit non pas, avec cet article, de micro-drones, mais d’une dérogation à l’interdiction de l’épandage aérien, qui se justifie avant tout, mes chers collègues, par la dangerosité pour les agriculteurs qui pulvérisent manuellement sur des surfaces présentant des pentes supérieures à 30 %.

Compte tenu de cette réalité et des accidents qui mettent en danger la vie des agriculteurs, et grâce à une technologie qui permet aujourd’hui cette expérimentation, celle-ci se justifie pleinement. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Attention, monsieur le sénateur Gay, aux termes employés ! Il ne s’agit pas ici de réintroduire l’épandage aérien tel que nous pouvions le connaître lorsque nous étions adolescents, c’est-à-dire celui réalisé par des hélicoptères aux bras articulés en banderilles sur quatorze mètres !

M. Didier Guillaume. La Chevauchée des Walkyries ! (Sourires.)

M. Stéphane Travert, ministre. Les choses ne se passent plus ainsi aujourd’hui, puisque l’épandage aérien a été interdit. Ce que nous voulons, c’est éviter que les salariés ne se mettent en danger. Il y a des cas, notamment lorsqu’il faut traiter des vignes plantées sur des pentes à 35 %, dans lesquels des accidents se produisent, car les véhicules utilisés à cet effet se retournent. Mais si l’on n’utilise pas de véhicule et qu’il faut monter à pied, le travail est très pénible.

Nous avons souhaité lancer une expérimentation d’épandage, non pas aérien, mais par drone. Il s’agit d’une agriculture de précision.

Vous vous souvenez, comme moi, de l’époque de l’épandage aérien : les bras articulés épandaient dans un périmètre très large. Avec un drone, vous avez la possibilité de déposer une goutte de produit sur le pied de vigne qui doit être traité. Cela permet non seulement de pratiquer une agriculture de précision, mais aussi de soulager les salariés de la viticulture de leurs tâches les plus pénibles, ce qui est aussi un élément important.

L’interdiction de la pulvérisation est problématique pour les cultures en forte pente, où, je le répète, il y a un risque élevé d’accidents et de chutes encouru par les opérateurs. Il faut éviter que ceux-ci surviennent. Le recours à l’épandage par drone permet, à la fois, la diminution des risques et la réduction de la dérive, grâce à des vols précis et de faible hauteur.

Nous avons souhaité faire une expérimentation dans des conditions précises, prévues par arrêté conjoint du ministre de l’agriculture et du ministre de la santé, puis faire évaluer les résultats par l’ANSES. Cela permettra d’établir si ce mode d’application peut apporter les bénéfices attendus dans les conditions requises pour la santé et l’environnement.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je partage ce que vient de dire M. le ministre. Nous n’allons pas commencer à nous accuser de vouloir mettre des produits phytosanitaires partout, surtout après le vote qui vient d’intervenir. Pour ce qui me concerne, on ne peut pas m’accuser d’être défavorable à la transition vers l’agroécologie.

Cette expérimentation a pour cible des endroits très difficiles dans lesquels, si l’on ne traite pas, il peut y avoir un risque de récolte nulle et de prolifération de maladies. Je suis donc très favorable au maintien de l’article 14 sexies, et bien sûr défavorable à ces deux amendements identiques. Et comme l’ont très bien dit Mme la rapporteur et M. le ministre, il y a aussi dans ces zones difficiles un risque d’accidents !

Nous ne mettons pas le pied dans la porte, cher Joël Labbé. Nous devons être capables, en tant que parlementaires, de ne pas voir dans chaque mesure que l’on nous propose une arrière-pensée. Cet article prévoit tout simplement, dans des zones au relief très accidenté, potentiellement accidentogènes, la possibilité d’utiliser des drones. Cela permettra, comme vient de le dire M. le ministre, de traiter les cultures à la goutte près et d’obtenir une récolte.

Telle est la pierre que je voulais apporter à ce débat. Je voterai contre les amendements de suppression, car je pense qu’il est important, à titre d’expérimentation, de maintenir cet article.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Il n’y a évidemment, avec cet article, aucune volonté de revenir sur l’interdiction des pulvérisations par voie aérienne. Nous avons écarté cette pratique il y a quelques années ; nous n’allons pas la rétablir.

Adopter ces amendements reviendrait à envoyer un message contradictoire. En effet, alors que notre volonté permanente tend vers la recherche d’innovations, en l’occurrence pour renforcer la sécurité des agriculteurs ou pour permettre des traitements extrêmement fins et ciblés, nous rejetterions les innovations qui arrivent.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à rejeter ces amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je me réjouis de la position commune, que je soutiens, adoptée par Mme la rapporteur et M. le ministre.

Adopter ces amendements, ce serait tourner le dos à un progrès qui permettra de traiter les problèmes de manière très précise sur nos territoires. Je dirai à ceux qui ont pris l’initiative de proposer une expérimentation de l’épandage par drone que cela me fait penser aux progrès accomplis dans le domaine de la microchirurgie.

Je veux aussi dire aux auteurs des amendements, avec toute ma sympathie, que cette expérimentation permettra peut-être, demain, d’épandre de façon très ciblée des produits de biocontrôle. Cette expérimentation, limitée à des terrains difficiles d’accès et qui permettra de sauver des vies humaines, d’éviter des accidents, de préserver la biodiversité de ces territoires très précieux de notre pays, nous permettra peut-être demain d’avoir une vision encore plus ambitieuse de l’utilisation de ces nouvelles technologies et des services qu’elles peuvent rendre à l’homme.

Je voterai donc contre ces deux amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je suis, moi aussi, pour le progrès et l’innovation. Mais, en l’occurrence, j’ai l’impression que l’on fait marche arrière, dans la mesure où l’on avait interdit l’épandage par avion.

Pour ma part, je ne crois pas du tout à la théorie de la petite goutte de produit qui sera déposée bien comme il faut… Je pense au contraire que l’on pulvérisera, avec les drones comme on le faisait par avion, de la même manière les pollinisateurs. Comme le disait Joël Labbé, on ouvre la porte à quelque chose qui ne me semble pas aller dans le bon sens.

Nous examinerons ultérieurement des amendements relatifs aux distances par rapport aux habitations. Encore une fois, je ne suis pas certain qu’en autorisant cette méthode on aille dans la bonne direction.

L’innovation, on peut la trouver ailleurs, notamment dans l’agroécologie : un certain nombre de viticulteurs travaillent ainsi à moins traiter leurs vignes.

Mieux vaut rechercher l’innovation dans la diminution des traitements plutôt que dans ces drones censés déposer leur petite goutte là où il faut. Je n’y crois absolument pas !

M. Stéphane Travert, ministre. Pourtant, ça existe !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. J’entends les arguments.

Pour ce qui concerne l’innovation technologique, nous sommes évidemment pour toujours plus de progrès. Par ailleurs, nous ne sommes jamais opposés aux expérimentations, quelles qu’elles soient, même si elles se traduisent parfois par du bon et parfois par du moins bon. Mais, en l’occurrence, je m’interroge sur l’aspect expérimental de la chose.

Nous sommes bien conscients que l’épandage par drone n’équivaut pas à l’épandage par avion que nous avons connu autrefois. Mais, comme Guillaume Gontard, j’ai du mal à croire qu’un drone pourra déposer une goutte de produit au bon endroit. Il faut aussi prendre en compte la problématique du vent.

Surtout, pourquoi mettre en place une expérimentation visant à traiter par pesticides, même si ce n’est qu’une goutte, alors qu’a lieu actuellement un débat de société, y compris dans cet hémicycle, en vue d’interdire les pesticides à une échéance qui n’est pas encore déterminée. Nous pensons, pour notre part, qu’il faut y parvenir le plus rapidement possible ; d’autres disent qu’il faut attendre un peu, notamment parce qu’on ne dispose pas aujourd’hui de toutes les techniques permettant d’y arriver.

Pourquoi ne pas consacrer l’argent à d’autres formes d’expérimentation ? Il y a là, honnêtement, une contradiction un peu folle ! J’ai l’impression que nous allons à rebours de l’histoire…

Enfin, j’entendais nos collègues dire qu’ils étaient les ardents défenseurs du pouvoir d’achat des agriculteurs et des agricultrices. Très bien ! Quant à moi, je me demande combien vaut ce type de drone, car je n’en ai aucune idée.

Monsieur le ministre, combien vaut un drone capable de déposer, au millimètre près, une goutte de pesticide sur une fleur ? Lorsque nous connaîtrons ce prix, nous pourrons avoir un débat. Si on me dit qu’un tel drone vaut quelques dizaines d’euros et que tous les agriculteurs et toutes les agricultrices pourront se le payer, alors je veux bien… Mais je n’ai pas l’impression que ce soit le cas. Dans le cadre d’autres fonctions que j’ai exercées, j’ai eu à connaître du prix des drones : à ce niveau de précision, on parle de milliers d’euros !

Je vois là deux contradictions majeures. Nous maintenons donc notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Je maintiens également mon amendement. Vous l’aurez compris, il y a un débat interne au sein du groupe du RDSE, mais là réside toute la richesse des groupes politiques.

Il arrive que nous n’ayons pas la même idée de ce qu’est le progrès, et ça aussi c’est la démocratie. Votre progrès n’est pas le mien !

M. Daniel Gremillet. Le vôtre n’est pas le nôtre !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 201 rectifié et 474 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 249 rectifié est présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains, MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot et Mizzon, Mme Billon et MM. Kern, Canevet et Le Nay.

L’amendement n° 561 rectifié bis est présenté par Mme Bonnefoy, M. Bérit-Débat, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, MM. Tissot et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

Par dérogation au premier alinéa du I de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, une expérimentation de l’utilisation des aéronefs télépilotés pour la pulvérisation aérienne de produits autorisés en agriculture biologique ou faisant l’objet d’une certification du plus haut niveau d’exigence environnementale mentionnée à l’article L. 611-6 du même code est menée, pour une période maximale de trois ans à compter de la publication de la présente loi, sur des surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 %. Cette expérimentation, qui fait l’objet d’une évaluation par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, vise à déterminer les bénéfices liés à l’utilisation de drones pour limiter les risques d’accidents du travail et pour l’application de produits autorisés en agriculture biologique ou faisant l’objet d’une certification du plus haut niveau d’exigence environnementale mentionnée au même article L. 611-6 en matière de réduction des risques pour la santé et l’environnement.

La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 249 rectifié.

M. Bernard Delcros. Nous venons d’avoir un long débat sur l’utilisation des drones. Je le dis d’emblée, le présent amendement ne vise pas à remettre en cause d’une façon générale leur utilisation dans l’activité agricole. Il s’agit en effet d’un progrès technique, qui peut rendre un certain nombre de services. En revanche, comme pour tout progrès technique, il faut essayer d’en tirer les effets positifs, mais aussi d’éviter les effets négatifs. L’amendement vise donc à ce que soient prises des précautions pour ce qui est des produits épandus par drone et à revenir au texte de l’Assemblée nationale.

Au Sénat, la commission a souhaité élargir l’expérimentation de l’utilisation des drones d’épandage à tout type de produits. L’amendement vise à mieux encadrer cette utilisation en raison des risques pour la santé publique ou l’environnement, en permettant une expérimentation exclusivement avec des produits autorisés en agriculture biologique ou faisant l’objet d’une certification de très haut niveau d’exigence environnementale. Il s’inscrit pleinement dans la perspective française de réduction d’usage des produits phytopharmaceutiques, notamment au travers du plan Écophyto II.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 561 rectifié bis.

Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à revenir à la rédaction de l’article 14 sexies, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

Je tiens ici à faire un rappel de l’évolution de cet article. Introduit en commission à l’Assemblée nationale, il n’autorisait initialement la pulvérisation aérienne que pour les vignes présentant des pentes supérieures à 30 %. En séance publique, face aux critiques fortes émanant de plusieurs groupes politiques, il a été étendu à toutes les cultures présentant des pentes supérieures à 30 %. Il y était toutefois précisé que seuls les produits autorisés en agriculture biologique ou faisant l’objet d’une certification haute valeur environnementale, HVE, de niveau 3, pouvaient être épandus. Au Sénat, en commission, la rapporteur a étendu cette possibilité à tous les produits phytopharmaceutiques, tout en maintenant cette possibilité sur toutes les cultures.

Le texte que nous examinons aujourd’hui constitue donc clairement une dérogation totale au principe général d’interdiction d’épandage aérien, que nous avions pourtant réaffirmée lors de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Nous sommes totalement opposés à cette dérogation. Nous estimons que ce type d’article ne ferait qu’ouvrir la voie à d’autres dérogations, qui ne sont pas souhaitables.

Le rappel de l’évolution de cet article en est une illustration : au départ circonscrite, cette interdiction est désormais généralisée à l’ensemble du territoire avec des produits conventionnels. Si nous votons le texte en l’état, un autre viendra encore ouvrir le champ des dérogations et nous en reviendrons au point de départ.

De plus, pour ce qui est de la pente de 30 %, nous restons très dubitatifs sur les moyens dont nous disposerons pour vérifier que les conditions sont réellement remplies. Selon moi, nous ouvrons ici la voie à toutes les dérives. C’est pourquoi je vous propose d’en revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale : une dérogation pour les surfaces présentant une pente supérieure à 30 % uniquement pour les produits autorisés en agriculture biologique ou présentant une certification HVE de niveau 3.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je rappelle que cette expérimentation se justifie avant tout par la dangerosité existante pour les agriculteurs et non pas en fonction des produits autorisés.

J’ajoute que les surfaces concernées seraient réduites. L’expérimentation serait essentiellement concentrée sur ce qu’on appelle la viticulture héroïque, qui ne couvre que 5 % de la surface viticole européenne.

Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Je privilégie la version qui a été retenue par la commission des affaires économiques du Sénat. Nous souhaitons en effet que cette expérimentation soit riche de tous les enseignements et permette l’utilisation de tous les produits dûment autorisés. L’objectif est la sécurité de l’utilisateur, quel que soit le produit.

Il est possible de prévoir que l’arrêté interministériel qui définira les conditions d’expérimentation restreigne celles-ci à certains produits, mais selon des caractéristiques autres que leur origine naturelle. Aujourd’hui, aucun produit ne fait l’objet d’une certification du plus haut niveau d’exigence environnementale.

L’avis est donc défavorable aux deux amendements identiques.

M. Pierre Cuypers. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 249 rectifié et 561 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 sexies.

(Larticle 14 sexies est adopté.)

Article 14 sexies
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n°  752 rectifié

Articles additionnels après l’article 14 sexies

M. le président. L’amendement n° 128 rectifié septies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Dennemont, Moga et Lévrier, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le producteur utilise l’aéronef télépiloté pour son compte propre, hors espace aérien contrôlé sauf cas de droit d’usage établi, hors zone peuplée, sans tiers au sol dans la zone d’évolution, en vue, à une hauteur maximale de 50 mètres au-dessus de la surface et à une distance horizontale maximale de 500 mètres du télépilote. Le producteur procède à sa déclaration d’activités. Il n’est pas tenu d’adresser un manuel d’activités particulières ou de procéder à des déclarations de vols auprès des autorités territorialement compétentes. Sous réserve des dérogations spécifiques aux situations de vol dans les zones non peuplées, le producteur remplit les obligations de formation prévues par la loi n° 2016-1428 du 24 octobre 2016 relative au renforcement de la sécurité de l’usage des drones civils.

II. – Les aéronefs télépilotés utilisés ont une masse maximale de 800 grammes et disposent d’une attestation de conception.

III. – Sous réserve des conditions définies aux I et II du présent article, le producteur agricole peut utiliser un aéronef télépiloté, en dérogeant aux conditions fixées par le code de l’aviation civile et le code des transports.

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Cet amendement reprend une proposition du député Éric Bothorel, présentée lors de l’examen en séance publique du texte par l’Assemblée nationale et malheureusement rejetée. Il vise à fournir un cadre législatif pour l’utilisation de drones légers, non pas pour l’épandage de produits phytosanitaires, mais pour d’autres objets, par les agriculteurs dans des zones à faible risque.

L’agriculture utilise déjà – ce chiffre est d’ailleurs stupéfiant – la moitié des 20 000 drones civils en service. Grâce aux images prises par leur capteur, ces drones volants donnent des indications agronomiques, sans qu’il soit besoin d’effectuer de prélèvements.

En survolant une parcelle, un drone enregistre une multitude d’images géoréférencées avec une précision centimétrique. C’est sa faible altitude – 150 mètres –, par rapport à celle d’un satellite, qui lui permet cette précision.

Plus de 10 000 hectares ont été survolés en 2016. Dans mon département, la Somme, les drones sont même devenus un outil du quotidien depuis que la chambre d’agriculture s’est équipée en 2013 et les met à disposition des agriculteurs. La chambre d’agriculture poursuit ses expérimentations pour affiner la modulation intraparcellaire, en valorisant les informations captées par le drone directement par un épandeur avec modulation : le drone est en l’air et l’épandeur est au sol.

Il y a cependant une difficulté. L’agriculteur qui souhaite utiliser un drone doit passer un permis et effectuer une déclaration systématique en préfecture et en mairie avant de pouvoir effectuer son vol. Ces formalités rendent quasi obligatoire le passage par un prestataire, ce qui limite considérablement le développement de ces outils, qui sont pourtant facteur de durabilité de notre agriculture.

Cet amendement permettrait donc, s’il était adopté, comme je l’espère, de libérer l’usage des drones agricoles en respectant des conditions d’emploi strictes pour éviter tout incident avec l’aviation habitée. Les inquiétudes qui ont pu s’exprimer en commission trouvent une réponse, premièrement, dans la limitation de la masse – 800 grammes au lieu de 2 kilos –, afin d’entrer dans le champ d’application de la loi et, deuxièmement, dans la finalité économique et environnementale de l’usage des drones dans le milieu agricole. Cela explique la nécessité d’une réglementation différente pour les agriculteurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission ne voit pas en quoi les agriculteurs devraient se soustraire à une réglementation qui s’applique à tous.

En outre, l’amendement prévoit des dérogations spécifiques à la formation pour le survol dans les zones non peuplées qui ne sont pas prévues par la loi de 2016, qui n’est d’ailleurs pas encore en vigueur. Laissons-nous le temps d’apprécier l’efficacité de cette loi.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 128 rectifié septies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 128 rectifié septies
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendements n° 495 rectifié bis et  n° 562 rectifié

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 638 rectifié bis est présenté par Mme Rauscent, M. Théophile, Mme Schillinger et MM. Bargeton, Amiel et Lévrier.

L’amendement n° 752 rectifié est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le sixième alinéa du I de l’article L. 253-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … Sans préjudice des dispositions prévues au présent article, les zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties, à usage d’agrément, contiguës à ces bâtiments. » ;

2° Après le quatrième alinéa de l’article L. 253-7-1, sont insérés huit alinéas ainsi rédigés :

« 3° À l’exclusion des produits de biocontrôle mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 253-6, des produits composés uniquement de substances de base ou de substances à faible risque au sens du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/ CEE et 91/414/ CEE du Conseil, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties, à usage d’agrément contiguës à ces bâtiments, est subordonnée à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux. Ces mesures tiennent compte des dangers des produits et des techniques et matériels d’application employés, et sont adaptées au contexte topographique, pédoclimatique, environnemental et sanitaire.

« Ces mesures peuvent inclure :

« a) Des cahiers des charges professionnels, validés par l’État ;

« b) Des périodes, dates ou horaires de traitement où l’utilisation par pulvérisation ou poudrage est interdite ;

« c) L’instauration de zones non traitées à proximité des lieux mentionnés ci-dessus ;

« d) L’installation de dispositifs de protection physique ou l’utilisation de dispositifs ou matériels permettant de réduire la dérive ;

« e) Toute condition d’utilisation adaptée.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent 3°.

« Le présent 3° entre en vigueur le 1er janvier 2020. »

L’amendement n° 638 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 752 rectifié.

M. Stéphane Travert, ministre. Je le retire au profit de l’amendement n° 789, que je présenterai ultérieurement.

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n°  752 rectifié
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 90

M. le président. L’amendement n° 752 rectifié est retiré.

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 495 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Corbisez, Guérini et Vall.

L’amendement n° 562 rectifié est présenté par Mme Bonnefoy, MM. Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville, Tocqueville et Lienemann, M. Fichet et Mme Blondin.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 4° du I de l’article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … Les zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties, à usage d’agrément, contiguës à ces bâtiments. »

La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 495 rectifié bis.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à protéger les riverains contre l’utilisation des pesticides considérés comme dangereux, en autorisant l’autorité administrative à prendre des mesures localement pour interdire ou encadrer l’utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des résidences régulièrement habitées. Il répond à un enjeu d’exposition aux produits phytopharmaceutiques des habitants riverains des zones où ils sont utilisés.

Ces riverains sont impuissants face aux pratiques des agriculteurs, alors que ceux-ci épandent parfois des pesticides jusque sous leurs fenêtres. Ils réclament pourtant, à juste titre, une protection.

Certaines études tendent à établir un lien entre l’exposition non professionnelle aux produits phytopharmaceutiques et des pathologies chroniques. Par exemple, le rapport de l’INSERM de 2013 intitulé Pesticides : effets sur la santé atteste de leur impact non seulement sur les agriculteurs, mais aussi sur les riverains des zones cultivées. Il évoque ainsi plusieurs études montrant une augmentation du risque de malformations congénitales, de tumeurs cérébrales et de leucémies chez les enfants des femmes vivant au voisinage d’une zone agricole.

Ces effets liés à une exposition au long cours sont parfois très difficiles à établir. Bien des riverains témoignent de troubles de santé manifestes : irritations oculaires, problèmes respiratoires, malaises. Des mesures sont prévues pour protéger, par exemple, les écoles, mais les enfants peuvent aussi être exposés chez eux, dans leur habitation.

Pourquoi ne pas prévoir la possibilité de prendre des mesures en ce sens ? Certes, parfois, des solutions locales sont trouvées par le dialogue entre riverains et agriculteurs, ce qui est la meilleure des solutions, mais pas dans tous les cas. L’intervention de l’autorité administrative est donc essentielle pour trouver des solutions locales et protectrices.

Il s’agit là d’un amendement très modéré. L’autorité administrative n’est pas tenue de prendre des mesures : elle peut les prendre, par exemple, seulement pour certaines catégories de produits. Je pense notamment – et je n’ai pas fini d’en parler – aux pesticides cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques. Ces mesures sont d’ailleurs recommandées dans le cadre du règlement CE n° 1107/2009 et de la directive-cadre sur l’utilisation des pesticides.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 562 rectifié.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement vise à reprendre une proposition formulée par le Gouvernement à l’Assemblée nationale, mais qui n’a malheureusement pas abouti, du fait du désistement de M. le ministre. Il vise à autoriser l’autorité administrative compétente à prendre des mesures pour restreindre l’utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des résidences régulièrement habitées.

Il s’agit ici de prendre les dispositions adéquates pour protéger les riverains d’exploitations agricoles, ce qui est une demande très souvent formulée par les riverains de ces exploitations qui subissent des épandages de certains produits à quelques mètres de leur habitation, avec les conséquences que cela peut avoir pour la santé des personnes concernées. Je précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’interdire les épandages, car ce n’est pas l’objet de notre texte. Il s’agit de renforcer les pouvoirs du préfet, qui lui permettent, lorsque la situation l’exigera, de prendre des dispositions adéquates pour protéger nos concitoyens.

Les réponses à cette question sensible ne peuvent passer que par la discussion, l’échange, la concertation, le respect de tous. Je connais ce problème dans mon département, qui est très viticole. J’ai aussi bien connu cette problématique en Corrèze avec les pomiculteurs : les choses ont pu se régler grâce à la mise en place d’une charte.

Je sais quelles propositions fera M. le ministre en la matière, mais les chartes prévues, qui répondent à une nécessité, seront difficiles à mettre en œuvre. Il est nécessaire que le préfet puisse organiser ces discussions et, au-delà de cette impulsion, qu’il puisse, si besoin est, trancher. Car il faut, malheureusement, parfois le faire.

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendements n° 495 rectifié bis et  n° 562 rectifié
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 789

M. le président. L’amendement n° 90, présenté par M. Médevielle, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 4° du I de l’article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Après consultation des riverains, des exploitants des terrains et des collectivités territoriales concernées, l’autorité administrative peut également interdire ou encadrer l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et définir des mesures de protection adaptées dans les zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties, à usage d’agrément, contiguës à ces bâtiments. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à permettre aux préfets de définir des mesures d’interdiction ou d’encadrement de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et des mesures de protection adaptées dans les zones attenantes aux bâtiments habités. Un rapport d’inspection de décembre 2017 avait préconisé une telle mesure pour réduire l’exposition de la population aux produits phytopharmaceutiques, notamment celle des femmes enceintes et des enfants en bas âge, qui sont directement affectés, comme l’INSERM l’avait souligné dans son rapport de 2013.

Pas plus tard que lundi dernier, l’ANSES, l’INERIS et les associations de surveillance de la qualité de l’air ont annoncé une nouvelle campagne sur la mesure des pesticides dans l’air. Il s’agit donc d’un sujet sur lequel les pouvoirs publics convergent pour mieux protéger la population, et nous devons y contribuer.

La rédaction proposée par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable prévoit de faire précéder ces mesures d’une consultation des riverains, des exploitants agricoles et des collectivités territoriales concernées, afin de rechercher des solutions partenariales avec des utilisateurs de produits phytopharmaceutiques.

Par ailleurs, cette rédaction fait référence à des mesures de protection adaptées, par analogie avec le régime applicable à proximité des établissements accueillant un public vulnérable. Il s’agit de souligner que cette décision sera prise lorsque les circonstances locales le justifieront dûment et que les mesures pourront prendre différentes formes : plantations de haies, équipements utilisés au moment du traitement…

Au final, l’amendement de notre commission prévoit un dispositif clair et équilibré pour renforcer la prévention des risques et répondre à une attente forte, clairement exprimée lors des États généraux de l’alimentation.

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 90
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 406 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 789, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le quatrième alinéa de l’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° À l’exclusion des produits de biocontrôle mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 253-6, des produits composés uniquement de substances de base ou de substances à faible risque au sens du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, des chartes de bonne conduite pour l’utilisation des produits phytosanitaires sont mises en œuvre, après concertation entre riverains et utilisateurs de produits phytopharmaceutiques. Elles sont adaptées aux types de produits et à leurs caractéristiques de risques, aux techniques et matériels d’application employés, et au contexte topographique, pédoclimatique, environnemental et sanitaire. »

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2020.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement, que nous avons déposé en lieu et place de l’amendement n° 752 rectifié, vise à promouvoir le développement des concertations locales entre les agriculteurs et les riverains afin de conduire au développement de bonnes pratiques pour l’utilisation des produits phytosanitaires. Ces bonnes pratiques doivent porter sur l’utilisation de haies, le développement de matériels de protection, les heures d’utilisation et de traitement des produits phytosanitaires.

Pour ma part, j’ai choisi de faire confiance à cette intelligence collective, à l’intelligence du terrain et à la concertation, qui est nécessaire sur toutes les questions relatives aux traitements.

Les chartes existent d’ores et déjà en viticulture. Il convient d’en promouvoir le développement. Je veux appeler votre attention sur le fait qu’il n’y a plus de mesures administratives : celles-ci disparaissent au profit des chartes.

Comme vous le constatez, cette question a évolué depuis le début du débat et, non, madame Bonnefoy, nous n’avons pas battu en retraite ! Lorsqu’une disposition soumise à la représentation nationale n’est manifestement pas assez mûre pour être adoptée, il faut à l’évidence y travailler encore – le cas s’est déjà présenté. J’ai choisi de poursuivre la concertation avec la commission du Sénat pour trouver une solution qui convienne à tous.

Je prends l’exemple de la concertation locale avec les riverains. Que faire lorsque les sorties scolaires sont organisées sur le territoire ? Il vaut sans doute mieux qu’en accord avec le préfet, grâce aux chartes existantes, on décide qu’aucun traitement n’aura lieu la veille et le jour même. Il s’agit de privilégier les actions collectives et la concertation entre les habitants d’un même territoire, pour éviter les difficultés, les invectives et les oppositions entre producteurs et riverains. Pour cela, la meilleure façon de faire, c’est de s’entendre à l’échelon local.

Tel est l’objet de cet amendement ; c’est aussi celui de l’amendement du rapporteur pour avis. Je le répète, nous faisons le pari de la concertation et de l’intelligence collective, d’autant que, sur ces questions de protection, les Français nous attendent.

Faire preuve de cohérence, c’est rechercher une unanimité afin que nous avancions sur ce sujet. Il y a eu de la cohérence précédemment pour la création du fonds d’indemnisation des victimes des produits phytosanitaires. Il s’agit là aussi de protéger les riverains, en partenariat avec tous les acteurs et par la concertation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les traitements autour des habitations sont déjà très encadrés. Les autorisations de mise sur le marché délivrées par l’ANSES sont le plus souvent conditionnées au respect d’une distance avec les propriétés voisines et de diverses modalités. Si le risque pour les riverains apparaît, le produit n’est d’ailleurs pas autorisé.

De plus, les maires, à défaut les préfets, disposent d’un pouvoir de police générale sur leur territoire en cas de risque pour la salubrité publique. Ils peuvent déjà prendre ces dispositions et les adapter le plus finement à la réalité du terrain. Nous mesurons à quel point cette adaptation est importante. Dans les communes viticoles, les agriculteurs dialoguent avec les autorités et les riverains pour trouver des solutions adaptées et règlent très fréquemment le problème sans même qu’un tel arrêté ait besoin d’être pris, notamment grâce à des chartes qui existent en grand nombre dans ces territoires.

Les outils existent déjà. Or les amendements présentés aujourd’hui ouvrent la porte à une interdiction automatique par arrêté ministériel ou par arrêté préfectoral. C’est une remise en cause du pouvoir d’appréciation du maire et une véritable restriction de la libre administration des collectivités territoriales. Le maire est l’autorité la plus à même de réaliser des médiations entre les riverains et les agriculteurs sur ces sujets et d’identifier le plus précisément possible à la fois les parcelles concernées et le dispositif à mettre en place.

Prévoir de telles possibilités dans la loi reviendrait à limiter ces marges de manœuvre, d’autant que ces sujets sont susceptibles de trouver des solutions dans le cadre des plans locaux d’urbanisme. D’ailleurs, sur ce sujet, la question de l’urbanisme se pose de façon prégnante, monsieur le ministre.

C’est la raison pour laquelle la commission appelle à la sagesse : ces amendements ne font l’objet d’aucune mesure d’impact sérieuse. Je mentionne juste un chiffre évoqué en 2016, alors qu’un débat avait déjà lieu sur le sujet : l’enjeu était la réduction de près de 4 millions d’hectares de surface agricole utile, soit 14 % de la surface agricole dite utile.

La commission insiste sur le mécanisme des chartes entre riverains et producteurs sous l’égide du maire. Ces initiatives locales ont fait d’ores et déjà la preuve de leur efficacité et elles sont aujourd’hui nécessaires pour prendre des mesures réellement adaptées aux réalités du terrain.

Compte tenu de tous ces éléments et du droit en vigueur, qui permet déjà des mesures de restriction, l’avis est défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Remettons les choses à leur place. Aujourd’hui, il est uniquement possible de prendre des mesures administratives pour protéger les personnes vulnérables, c’est-à-dire les élèves dans les écoles. Pour les autres, rien n’est prévu. On ne peut pas laisser croire que le préfet peut prendre toutes les dispositions pour procéder à des interdictions comme il l’entend.

Nous devons donc étendre ces dispositions. Il ne s’agit ni de diminuer les zones de culture, parce qu’elles seraient trop proches des maisons, ni de réduire les traitements qui pourraient y être décidés. Nous souhaitons pouvoir nous appuyer sur des chartes qui seront élaborées et mises en application après accord des riverains, des professionnels et des autorités administratives. C’est ce que j’appelle faire fonctionner notre intelligence collective.

Nous avons pris un certain nombre de mesures pour les agriculteurs, notamment pour les protéger, nous l’avons vu tout à l’heure : l’amendement de Mme Bonnefoy a été adopté à l’unanimité, et j’en comprends parfaitement la raison. Reste que nous avons besoin aussi de faire un geste fort en direction des riverains. C’est pourquoi je demande au Sénat d’adopter ces amendements, qui ne remettent pas en cause la capacité à traiter des zones proches d’habitations, dès lors que ces traitements auront fait l’objet d’une concertation entre les différents acteurs.

Ce n’est pas l’administration qui impose, c’est l’intelligence collective qui entre en action pour que chacun donne son avis, que certaines pratiques puissent être encadrées et que, ainsi, le bon sens l’emporte dans le respect de tous. Il ne faudrait pas pour autant penser que l’on empêche les agriculteurs et les producteurs de travailler dans de bonnes conditions et de valoriser leur terre et leur territoire.

M. le président. Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser l’avis du Gouvernement sur les amendements ? (Sourires.)

M. Didier Guillaume. On l’a compris ! (Nouveaux sourires.)

M. Stéphane Travert, ministre. Sur l’amendement n° 90, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat ; il émet un avis défavorable sur l’ensemble des autres amendements, au profit de l’amendement n° 789, qu’il a présenté.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, je suis assez surpris des propos que vous venez de tenir en prenant l’exemple de l’amendement n° 560 rectifié bis. Je rappelle que vous avez été le seul à y être défavorable.

M. Stéphane Travert, ministre. Oui !

M. Henri Cabanel. Vous voulez donner un signe avec votre amendement, mais, sur l’amendement en question, vous n’en avez donné aucun !

M. Henri Cabanel. Il ne faut pas se méprendre : si votre amendement était adopté, les décisions qui seraient prises seraient toujours contre ceux qui utilisent les produits, c’est-à-dire les agriculteurs.

M. Laurent Duplomb. Exactement !

M. Henri Cabanel. J’insiste sur le fait que ce ne sont pas les agriculteurs qui vont vers l’urbanisation, c’est l’urbanisation qui vient vers les terres agricoles par l’artificialisation des sols.

De fait, monsieur le ministre, les préconisations que vous formulez existent déjà sur les territoires. Personnellement, j’ai coconstruit avec des riverains, des citoyens, des maires, la chambre d’agriculture et des promoteurs une charte définissant les règles à respecter pour chacun. Cela se passe très bien.

Vous allez penser que je suis entêté, mais ce qui est en cause, c’est la technique de pulvérisation. Il en existe trois sortes : par pneumatiques, par jets projetés, par jets portés. De nombreux appareils de traitement, notamment en viticulture, sont des pneumatiques dont les gouttes mesurent quelques dizaines de microns et qui dérivent pas mal. On peut très bien traiter à des dizaines ou à des centaines de mètres des habitations et ressentir les produits qui sont utilisés. Il est donc important de creuser la piste des appareils de traitement.

Vous voulez empêcher les agriculteurs d’utiliser des produits prétendument dangereux à proximité des habitations. Monsieur le ministre, prenez-vous-en à ceux qui fabriquent ces produits-là ! Prenez-vous-en à ceux qui autorisent la commercialisation de ces produits ! Arrêtez de taper sur les agriculteurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. C’est vrai !

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.

M. Pierre Cuypers. Depuis que nos débats ont débuté, je suis atterré que chacun parle sans arrêt de « pesticide ». Cela renvoie à cette maladie contagieuse qu’est la peste. C’est hors sujet ! Il faut savoir que, à notre époque, nos instituts sont capables, plus que quiconque, grâce à la recherche financée notamment par les agriculteurs, de travailler à des produits pour la protection, le développement, l’entretien et la santé des plantes. C’est comme cela qu’il faut voir les choses : il est évident que les produits sanitaires protègent la santé des plantes et celle de l’humain qui va les utiliser.

Nous devons conserver ce cadre si nous voulons être utiles à notre société. Or l’adoption de cette mesure rendrait impossible l’exercice de la profession, que ce soit la viticulture ou l’agriculture en général. Dans mon département, pour ne prendre que cet exemple, si cette mesure était adoptée, 15 % des zones ne pourraient plus être cultivées.

M. Stéphane Travert, ministre. Pas du tout !

M. Pierre Cuypers. Cela représenterait entre 50 000 et 60 000 hectares de perte de production, rien que pour mon département !

En outre, comme l’a dit tout à fait excellemment M. Cabanel, nos méthodes de travail et les outils que nous utilisons permettent de projeter des molécules sur les plantes à raison de 2 462 points d’impact recto verso sur une feuille grâce à des buses de pulvérisation, grâce à des adjuvants et à des buses anti-dérives, qui permettent de localiser le produit là où il faut, quand il faut.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Ces amendements nous donnent l’occasion d’être au plus près des utilisateurs comme des riverains.

Dans un contexte d’idéal absolu ou de pureté législative, nous aurions pu nous opposer à ces amendements, nous demandant s’il revenait véritablement à la loi de prévoir des chartes qui s’appliqueront localement. Cela serait revenu à nier le débat d’aujourd’hui et à nier les inquiétudes des riverains.

Je suis bien évidemment d’accord avec la remarque qui a été formulée : c’est l’urbanisation qui, depuis de nombreuses années, a conquis les terres agricoles. Mais l’inverse est aussi vrai : l’exploitation des terres agricoles à proximité de zones urbaines n’a plus rien à voir avec ce qui se passait voilà plusieurs décennies.

Nous avons besoin de continuer à travailler pour trouver la meilleure solution.

Certes, on peut jouer sur les mots et appeler ces produits pesticides, produits phytosanitaires ou produits youpi-tralala, peu importe. On peut se faire peur en utilisant de grands mots, on peut au contraire chercher à relativiser les pires risques, la problématique demeure. La question qui se pose est bien celle de la préservation de l’être humain, celui qui a recours à ce produit, le riverain, le consommateur.

Nous voterons par conséquent ces quatre amendements.

Monsieur le ministre, je profite du temps qui me reste pour saluer votre volonté de construire du dialogue territorial et de faire confiance aux acteurs du territoire. Pour ma part, je pense qu’en ce 2 juillet, alors que nous étions tous hier sur nos routes départementales et que ce matin nous avons tous mis à jour nos applications GPS, vous faites preuve de bon sens. Je vous invite à en parler à l’ensemble de vos collègues du Gouvernement : l’intelligence territoriale est primordiale, surtout dans notre pays.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le ministre, ce sont des zones de non-traitement ou des zones de non-agriculture ou de non-vigne que vous voulez mettre en place !

D’un côté, quand vous parlez à la profession, vous lui proposez des espaces de négociations et de discussions dans le plan de filière. La profession, notamment viticole, a pris des engagements très forts qu’elle va mettre ou qu’elle met déjà en œuvre : plantations de haies, remembrements de parcelles, essais de cépages résistants.

D’un autre côté, une fois dans l’hémicycle – loin des yeux, loin du cœur –, vous proposez un amendement customisé…

M. Stéphane Travert, ministre. Ah !

Mme Nathalie Delattre. … pour obtenir le sésame du Sénat. Pourtant, son adoption ne résoudra rien, car cette disposition est bien trop lourde à mettre en œuvre.

En outre, les préfets sont déjà à la manœuvre dans les départements, en lien avec la profession et les maires.

Avec cet amendement, vous allez même englober l’agriculture bio. C’est désespérant ! L’État ne doit pas faire dans le cosmétique : il doit prendre ses responsabilités. Vous devez demander à l’ANSES de définir au cas par cas les précautions à prendre pour les riverains, dans le cadre des autorisations de mise sur le marché, ainsi que l’Europe l’impose. Si l’ANSES ne veut pas le faire, car elle estime que le produit présente un risque, alors elle doit retirer l’homologation du produit. (Oui ! sur diverses travées.)

Monsieur le ministre, respectez vos engagements et votre promesse de discussions dans le plan de filière. Cessez de faire peur à la population !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, pas de vignes sans traitement, même dans le bio, où l’on utilise notamment du cuivre, avec les difficultés que l’on commence seulement à appréhender. Les difficultés surgissent au fur et à mesure des années, une fois que l’on connaît un peu mieux les produits. Il faudra donc être attentif.

Par ailleurs, toute parcelle de vigne qui n’est pas traitée est susceptible de développer des maladies qui se propageront aux parcelles voisines. Il faudra donc utiliser encore plus de produits pour enrayer les épidémies. Et il y en a ! Parfois, c’est l’oïdium, parfois c’est le mildiou. Si l’on ne traite pas tout de suite les endroits où se déclare la maladie, c’est l’ensemble du vignoble qui est touché.

Je suis élu de la Marne, laquelle, avec d’autres départements, forme la Champagne : 30 000 hectares y sont contingentés avec des pentes, puisque, par définition, par caractéristiques géologiques, la vigne appellation champagne pousse sur ces pentes-là. Les habitations se sont développées au cœur de ces cultures : la vigne est ancestrale et ceux qui viennent y habiter maintenant ont construit leur maison en toute connaissance de cause. C’est la raison pour laquelle il faut être attentif aux dispositions que l’on va prendre.

Les contraintes que vous êtes en train de mettre sur pied réduiront un certain nombre de parcelles : 35 % du vignoble pourrait être touché, parce que c’est un vignoble périurbain. La vie est ainsi faite : les villages sont au cœur du vignoble. En Bourgogne, par exemple,…

M. René-Paul Savary. … le paysage est identique. C’est la raison pour laquelle il faut fermement s’opposer à votre proposition, qui est très réductrice et qui ne fait absolument pas appel à l’intelligence collective. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je n’étais pas convaincu de la qualité de ce projet de loi avant qu’on commence son examen ; j’étais même extrêmement sceptique. Plus le temps passe, plus je me rends compte que j’avais raison d’être sceptique, et je suis d’ailleurs de moins en moins convaincu.

Monsieur le ministre, je vous rappelle que les États généraux de l’alimentation souhaitaient redonner une perspective à l’agriculture, améliorer le revenu des agriculteurs et corriger les difficultés des relations commerciales entre – faut-il le rappeler ? – trois centrales d’achat et 13 000 fournisseurs. Je pensais qu’on allait enfin, dans un nouveau monde, redonner une certaine fierté à l’agriculture française. Or à quoi assiste-t-on depuis le début de cet après-midi, sinon à une succession de contraintes supplémentaires pour des agriculteurs qui en sont déjà accablés ?

Ainsi, les agriculteurs sont obligés de se tenir à cinq mètres des ruisseaux, alors qu’en Allemagne le maïs est semé jusqu’au bord. Ils sont obligés de remplir un cahier d’épandage, alors que rien de tel n’existe au Brésil. Ils sont obligés d’identifier la totalité de leurs animaux dans les sept jours, sous peine de pénalités sur les primes PAC, alors qu’au Brésil les bêtes sont identifiées à l’abattoir. À cela vont maintenant s’ajouter des périmètres concernant les produits phytosanitaires !

Comment fait-on dans un département où l’habitat est diffus – Henri Cabanel l’a bien souligné –, parce qu’on n’a jamais eu le courage d’avoir une politique de l’urbanisation plus stricte,…

Mme Cécile Cukierman. Avec des normes supplémentaires pour l’urbanisation !

M. Laurent Duplomb. … pour annoncer aux agriculteurs qu’ils ont le droit de continuer de traiter au milieu du champ, mais plus au bord, parce qu’ils sont à côté d’une habitation ? A-t-on véritablement ici le sens de la réalité du terrain et de ce que cela va entraîner ? Non, pas du tout !

Plus on ajoute de contraintes, en particulier celles que visent à introduire ces quatre amendements, plus on tue l’agriculture française. J’en suis maintenant de plus en plus convaincu ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, avec cet amendement, vous voulez appréhender ce qui se passe dans l’environnement des habitations.

Vous affirmez que rien ne sera obligatoire. Pourtant, il est bien prévu que « des chartes de bonne conduite […] sont mises en œuvre ».

M. Gérard Longuet. Ce n’est pas du conditionnel !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. C’est donc qu’elles sont obligatoires, quand bien même elles sont issues de la concertation. C’est tellement vrai qu’il est précisé que cette disposition « entre en vigueur le 1er janvier 2020 ».

Vous affirmez également qu’une concertation aura lieu entre les différentes parties et que ce n’est pas l’autorité administrative qui décidera. Mais alors, qui pilotera : le maire, le préfet, la chambre d’agriculture, la direction départementale des territoires, les associations ?

Qui sera responsable si les chartes de bonne conduite ne sont pas mises à jour ? Qui aura la charge de les mettre en place et de lancer la concertation ? Que se passera-t-il si cette charte n’est pas élaborée ? Rien n’est indiqué dans cet amendement.

Je comprends votre volonté de faire adopter cet amendement, comme je comprends celle de Pierre Médevielle au nom de la commission du développement durable. Reste que ces amendements sont assez imprécis. Or je ne doute pas qu’ils seront précisés à l’Assemblée nationale, et, compte tenu du contexte, je me méfie.

Si nous rejetons ces amendements, nous saurons ce qu’il en est de cet article additionnel après l’article 14 sexies, alors que, si nous les adoptons, nous ignorons ce qu’il adviendra.

M. Laurent Duplomb. Exactement !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, pardonnez-moi, mais je préfère m’en tenir à ce que je sais. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Nous parlons bien de zones vulnérables. Je répète à ceux qui ont soutenu le contraire que les préfets ne peuvent intervenir aujourd’hui que pour les personnes vulnérables, c’est-à-dire les populations scolaires ; rien n’est fait pour les autres personnes.

J’en viens à la question de la responsabilité. Il s’agit d’une charte qui peut être établie entre un maire et des producteurs sur un territoire, une association de riverains, un conseil municipal, des représentants. C’est au cas par cas selon les territoires.

Chacun sait qu’une charte est un engagement mutuel consenti entre plusieurs personnes ou groupes de personnes, en l’occurrence entre des agriculteurs et des riverains. C’est ce qui est proposé de sorte que ce problème ne se pose plus.

Régulièrement, en France, on assiste à des attaques contre les agriculteurs pour les empêcher de faire leur travail. L’idée, c’est d’encadrer un peu les choses.

Je rappelle que l’amendement n° 789 est un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 752 rectifié et à la version qui est proposée par la commission du développement durable pour répondre aux inquiétudes des agriculteurs et à celles des riverains.

Les chartes sont adoptées localement, de manière à fixer les conditions de traitement les plus favorables au cas par cas. Il faut prendre en compte un certain nombre de principes, par exemple les haies ou la performance du matériel utilisé. Contrairement à ce que j’ai entendu, il s’agit non pas de réduire la surface de traitement,… (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Ça servira à quoi, alors ?

M. Stéphane Travert, ministre. … la surface de culture de vignes ou de céréales, mais d’encadrer les conditions dans lesquelles on appliquera ou non un traitement sur des surfaces à proximité de zones vulnérables. Voilà ce que nous proposons, dans la concertation entre les différents acteurs, les agriculteurs et ceux qui vivent sur le terrain au quotidien.

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.

M. Franck Menonville. Je trouve qu’il y a beaucoup de flou dans ces amendements, en termes d’objectifs ou de mise en place. Je ne suis donc favorable ni à l’amendement de la commission du développement durable ni à celui du Gouvernement.

J’appuie la proposition de Nathalie Delattre : les préconisations en matière d’utilisation de produits phytosanitaires et les restrictions doivent figurer dans les homologations des produits, et non dans des chartes locales.

Qui plus est, cela risque de créer des tensions importantes sur le terrain. Si certaines matières actives présentent des risques, il faut les identifier et les faire figurer dans les préconisations d’utilisation. Je suis contre une application à la carte.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Depuis que nous avons entamé l’examen de ce texte, au-delà des charges – et nous avons été un certain nombre à répéter que le revenu d’un agriculteur était composé d’une colonne recettes et d’une colonne dépenses –, nous n’avons cessé d’additionner les contraintes, allant au-delà de la réglementation européenne, au-delà des règles fixées pour les produits importés dans notre pays et consommés par les Français, et ce, comme nous l’avons répété en permanence, pour répondre à des attentes sociétales.

Monsieur le ministre, certains produits sont mis sur le marché après autorisation. Ils sont accompagnés, comme les médicaments, de notices d’utilisation. Il en est ainsi pour les produits utilisés en agriculture : les agriculteurs se les approprient après tout un travail de formation.

Je voudrais insister, à la suite de notre collègue Savary, sur le fait que nous sommes en pleine contradiction. Le parcellaire n’est pas cloisonné et, de ce fait, une parcelle non traitée peut contaminer une parcelle traitée. Les conséquences sont énormes. Monsieur le ministre, vous le savez, si nous avons pu combattre avec succès les épizooties, c’est parce que l’on a instauré des obligations. De même, en matière de vaccinations, toute lacune affaiblit la protection de l’ensemble de la population.

Il est impossible pour les membres de notre groupe de voter ces amendements, qui marquent une régression par rapport à la politique antérieure et, surtout, par rapport à toutes les dispositions adoptées au Sénat, voire à l’Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 495 rectifié bis et 562 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. L’amendement présenté par Pierre Médevielle au nom de la commission que je préside prévoit, contrairement aux autres amendements faisant l’objet de la discussion commune, une concertation avec les riverains, les exploitants et les collectivités locales. Il constitue donc un appel à l’intelligence collective : le préfet décidera au terme de cette concertation, et non pas seul. C’est un point important.

De plus, contrairement à ce que j’ai pu entendre, cet amendement ne vise pas à ouvrir au préfet la latitude de décréter une interdiction pure et simple. Il s’agit de lui reconnaître la possibilité de prendre des mesures adaptées, ce qui veut dire, dans certains cas, réglementer les horaires, les matériels ou les produits utilisés. Cet amendement est beaucoup plus souple, beaucoup moins technocratique que celui du Gouvernement, puisqu’il ne prévoit pas d’obligation d’élaborer des chartes.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Sur cet amendement, mon avis est exactement le même que sur le précédent : s’il est adopté, on en rajoutera en commission mixte paritaire, et l’on aboutira finalement à un texte encore plus restrictif ! Ne nous engageons pas dans cette voie !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 90.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 789.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 789
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 211 rectifié bis

M. le président. Mes chers collègues, pour votre information, je vous indique que nous avons examiné un peu plus de 50 amendements en quatre heures ; il en reste 88. L’idéal serait de terminer l’examen de ce texte avant minuit et demi, puisque la séance sera ouverte demain matin à neuf heures trente, pour des questions orales. Au rythme actuel, il semble assez peu probable que nous y parvenions !

L’amendement n° 406 rectifié ter, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Conway-Mouret, Jasmin, Lienemann et Meunier, MM. Devinaz et Kerrouche, Mme Lepage, M. Manable et Mme Préville, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’épandage et le traitement par des produits mentionnés à l’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime sont temporairement interdits dans tout lieu, autres que ceux mentionnés au 1° du même article, fréquenté occasionnellement par un groupe d’enfants ou d’élèves de l’enseignement scolaire ou supérieur dans le cadre d’activités pédagogiques, physiques ou sportives. L’autorité administrative détermine le périmètre et la durée, avant et pendant l’évènement, de la zone non traitée.

La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. Le 5 avril dernier, 217 élèves des écoles de plusieurs communes des Deux-Sèvres ont été incommodés par l’épandage de produits phytosanitaires sur le site même où ils étaient rassemblés à l’occasion d’une course d’orientation organisée dans le cadre d’une sortie scolaire.

Apparemment, d’après ce que vous nous avez dit, monsieur le ministre, cela n’aurait pas dû arriver, mais c’est un fait. Manifestement, le système de protection des enfants n’est pas suffisamment efficace. Pouvons-nous supporter que cela continue ? Il convient que la législation prenne en considération la nécessaire protection des enfants, non seulement dans les crèches et dans les écoles, mais aussi dans tout lieu où ils peuvent être amenés à se trouver rassemblés. Dans ce cas, l’autorité administrative doit pouvoir déterminer un périmètre de zone de non-traitement temporaire.

Vous l’aurez remarqué, j’ai employé les mots « produits phytosanitaires ». On trouve dans cette catégorie de produits les pesticides, les herbicides, les fongicides : ce qui tue, ce qui détruit. L’appellation « produits phytosanitaires » est ambiguë, elle masque certains effets de ces agents, qui certes soignent les plantes, mais ont aussi une incidence sur notre santé et, surtout, sur la biodiversité. Il s’agit non pas d’une attente sociétale, mais de notre santé, de notre avenir à tous.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Prononcer une interdiction temporaire relève des pouvoirs de police générale du maire et du préfet, la salubrité publique étant en jeu, dans la mesure, ma chère collègue, où ils ont bien été informés préalablement d’un risque occasionnel. J’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 406 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 406 rectifié ter
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 475 rectifié

M. le président. L’amendement n° 211 rectifié bis, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du 2° de l’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « pathologie grave », sont insérés les mots : « et des zones urbaines de culture biologique telles que définies par le règlement CE n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques ».

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à étendre les restrictions d’épandage de pesticides à proximité des zones de cultures biologiques. En effet, le caractère dangereux des pesticides est avéré. En 2013, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, a démontré qu’il existait un lien entre l’exposition aux pesticides et certaines pathologies chroniques, certains cancers et certaines maladies neurologiques. Compte tenu de cela et du caractère volatile des pesticides, leur épandage est déjà interdit près des écoles et des hôpitaux, pour protéger les populations les plus fragiles.

J’ai entendu tout à l’heure affirmer que les cultures bio pouvaient contaminer les autres : un comble ! Il nous semble important, a contrario, de protéger les cultures biologiques de la contamination par les pesticides. Les consommateurs se tournent vers les produits biologiques justement pour éviter ceux-ci. Ce label est garanti par l’Union européenne. C’est une boussole pour nombre de nos concitoyens désireux de consommer plus sainement. Nous ne pouvons pas, en toute honnêteté, imposer une réglementation exigeante aux agriculteurs pour l’obtention de ce label et fermer les yeux sur la contamination de leurs champs par les pesticides utilisés leurs voisins. C’est tromper le consommateur !

Enfin, cette mesure vise à protéger les agriculteurs qui font de gros efforts pour acquérir le label bio. De plus en plus, les agriculteurs se tournent vers la production biologique. Ils méritent d’être respectés dans leur choix et donc d’être assurés d’une protection contre la contamination par les pesticides.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement nous ramène au débat qui vient de se clore… En outre, il vise à résoudre par la loi des cas relativement isolés, qui se règlent, la plupart du temps, soit par le dialogue et la concertation sur le terrain – c’est ce que nous préconisons –, soit, éventuellement, devant les tribunaux.

J’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 211 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 211 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 476 rectifié

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 475 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Corbisez et Guérini, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° La dernière phrase du 2° est ainsi rédigée : « En complément de ces mesures, l’autorité administrative détermine une distance, qui ne peut être inférieure à 50 mètres, en deçà de laquelle il est interdit d’utiliser ces produits à proximité de ces lieux. » ;

2° Après le même 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation des produits mentionnés au même article L. 253-1 contenant des substances actives cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques au titre du règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances et des mélanges, ou perturbateur endocrinien est interdite à une distance inférieure à 20 mètres des constructions à usage d’habitation et de leur limite de propriété. » ;

3° Au quatrième alinéa, le mot : « au » est remplacé par les mots : « aux 1° et 2° du ».

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Je le sais, cet amendement va faire bondir certains, mais je tiens à le défendre, car il va plus loin que le précédent en matière de protection des riverains contre les pesticides. Il prévoit en effet que les produits contenant des substances cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques ne pourront être épandus à moins de 50 mètres des lieux accueillant des personnes vulnérables – on a parlé des enfants, mais il y a aussi les personnes âgées ou hospitalisées – et de 20 mètres des habitations.

Le dispositif de cet amendement reste plutôt modéré puisque, avec une distance minimale de 20 mètres, les surfaces agricoles ne pouvant être traitées sont peu étendues. Les riverains ont doit à un minimum de protection. Le rapport de l’INSERM de 2013 sur les pesticides atteste de leurs effets sur la santé des riverains des zones cultivées.

Les surfaces agricoles non traitées par des produits phytosanitaires dangereux ne sont pas des surfaces perdues pour l’agriculture. Il est tout à fait possible d’y pratiquer des formes d’agriculture alternatives.

Nous devons aussi prendre en compte la protection des riverains. Vouloir réduire son exposition aux traitements effectués juste à côté de chez soi, ce n’est pas une lubie de néo-rural ! Les risques sont réels, notamment pour les populations sensibles.

On a évoqué tout à l’heure les conseils d’utilisation donnés par les sociétés qui produisent les pesticides. Il est indiqué dans la notice du prosulfocarbe, un produit destiné au traitement des céréales d’hiver commercialisé par la société Syngenta, que l’exploitant doit veiller à ce qu’il n’y ait pas de cultures arboricoles dans un rayon d’un kilomètre autour de la zone d’épandage. En donnant de tels conseils, la société en question se défausse complètement de toute responsabilité. De fait, en raison de la volatilité de ce produit, des productions arboricoles bio ont été contaminées. De telles substances sont trop dangereuses, il faut les interdire.

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 475 rectifié
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Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 494 rectifié

M. le président. L’amendement n° 476 rectifié, présenté par MM. Labbé et Dantec, Mme Benbassa et MM. Gontard et Jomier, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° La dernière phrase du 2° est ainsi rédigée : « En complément de ces mesures, l’autorité administrative détermine une distance, qui ne peut être inférieure à 5 mètres, en deçà de laquelle il est interdit d’utiliser ces produits à proximité de ces lieux. » ;

2° Après le même 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation des produits mentionnés au même article L. 253-1 contenant des substances actives cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques au titre du règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances et des mélanges, ou perturbateur endocrinien est interdite à une distance inférieure à 5 mètres des constructions à usage d’habitation et de leur limite de propriété. L’autorité administrative peut déterminer un seuil de distance supérieur. » ;

3° Au quatrième alinéa, le mot : « au » est remplacé par les mots : « aux 1° et 2° du ».

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Je demanderai un vote par scrutin public sur cet amendement, qui est véritablement minimaliste : il vise à prévoir que les épandages ne puissent être réalisés à moins de cinq mètres des propriétés des riverains.

Si nous le votons, ce sera un excellent signal donné à la population et aux agriculteurs. Respecter une distance minimale de cinq mètres, ce n’est pas le bout du monde, et cela permettra d’éviter des conflits. Il s’agit de la santé des riverains et de leurs enfants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements prévoient une interdiction automatique des traitements dans les zones qu’ils déterminent. Ils sont contraires à la position de la commission qui, je le rappelle, préconise des adaptations locales en concertation avec toutes les parties. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 475 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 476 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 476 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 649 rectifié

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 182 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l’adoption 30
Contre 307

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 494 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Corbisez et Guérini, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 2° de l’article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas de l’utilisation des produits mentionnés au même article L. 253-1 contenant des substances actives cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques au titre du règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, l’étiquetage et l’emballage des substances et des mélanges, à proximité des lieux mentionnés aux 1° et 2° du présent article ainsi que des bâtiments habités, une signalisation visible est mise en place sur le lieu de l’utilisation, et ce pendant la durée de l’utilisation et jusqu’à la fin du délai de rentrée dans les parcelles tel que défini par l’arrêté du 4 mai 2017. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. La déception que me cause le résultat du scrutin me laisserait presque muet… (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Cet amendement de repli est plus minimaliste encore que le précédent. Il vise à garantir a minima l’information des riverains.

J’ai été interpellé localement par un collectif de riverains qui m’a demandé de voir s’il était possible d’instaurer, en cas de traitement d’une parcelle, l’obligation de hisser un drapeau rouge pour avertir le public. En cas d’utilisation de pesticides dangereux à proximité d’un lieu public accueillant des personnes vulnérables ou d’habitations, les riverains sont en droit de savoir qu’une parcelle est en cours de traitement ou qu’elle vient d’être traitée et qu’il est donc dangereux d’y pénétrer. Les parcelles agricoles relèvent certes de la propriété privée, mais des enfants peuvent malgré tout, à un moment ou à un autre, décider d’y entrer et s’exposer ainsi, dans le cas où il vient d’être procédé à un épandage, à des substances dangereuses.

De même, il est important de signaler aux riverains qu’un traitement par un produit dangereux est en cours. Ils pourront ainsi adapter leur comportement, par exemple en évitant de passer du temps à l’extérieur.

Cet amendement vise donc à mettre en place une signalisation claire pour avertir le public. Puisqu’il y a refus de prendre des mesures réellement contraignantes, ce que je déplore, garantissons au moins la transparence de l’information. Je le redis encore une fois, il s’agit souvent de produits extrêmement dangereux. Monsieur le ministre, on a parlé de lymphomes, de maladie de Parkinson, de malformations génitales, de puberté précoce… Cela fait beaucoup !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’article 31 du règlement de 2009 relatif à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques précise déjà que, pour ces substances dangereuses, les autorisations de mise sur le marché peuvent prévoir l’obligation d’aviser, avant toute utilisation, les voisins susceptibles d’être exposés à la dérive de la pulvérisation et ceux qui ont demandé à l’être. L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. J’entends l’argument de Mme la rapporteur, mais ce règlement n’est pas appliqué ! C’est pourquoi il faut légiférer. Je regrette vivement ces avis défavorables, mais je n’en dirai pas plus… (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Que cet amendement puisse susciter l’ironie de certains de nos collègues me gêne… Je ne vois pas ce qu’il y a d’amusant à demander qu’un drapeau signale un épandage de pesticides à proximité d’habitations. Depuis le début de ce débat, nous sommes tous d’accord pour dire que ces produits sont dangereux. Tout à l’heure, nous avons voté à l’unanimité pour reconnaître cette dangerosité. Je ne vois donc pas comment nous pourrions ne pas répondre aux craintes de nos concitoyens. Cet amendement est vraiment minimaliste : il s’agit simplement d’informer les riverains de l’épandage d’un produit dangereux. Je ne comprends pas ce blocage. L’agriculteur qui épand le produit est protégé, il porte un masque. Ce n’est pas le cas des riverains, qu’il faut au moins informer !

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Notre collègue demande qu’un drapeau signale les parcelles traitées, mais comment fait-on quand le nombre de parcelles est important ? Combien de drapeaux faut-il si la surface de la parcelle est importante ? On ne s’en sort plus ! Je le répète, si des produits sont effectivement dangereux, il faut interdire leur fabrication et leur commercialisation.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Tout à l’heure, quand j’ai défendu mon amendement, il m’a été rétorqué par la rapporteur qu’il revient aux organisateurs d’une sortie scolaire de prévenir de l’endroit où ils projettent de se rendre. Où est la logique ? Cela signifie-t-il que l’on n’a plus le droit de se promener dans la nature ? Les agriculteurs ne devraient-ils pas plutôt avertir de l’épandage de produits qui peuvent être dangereux ?

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Nous nous félicitons de la qualité de ce débat, mais, depuis une demi-heure, les propos de certains d’entre nous sont caricaturés, suscitent des sourires… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Il s’agit à mes yeux d’un amendement d’appel. Demander la transparence sur l’épandage de produits dangereux et l’information des riverains ne devrait pas prêter à sourire. J’entends ce que dit notre collègue Cabanel : ce n’est peut-être pas avec des drapeaux que l’on va régler le problème, mais nous avons en tout cas le devoir d’aborder cette question.

Nous sommes dans une société où on demande la transparence dans tous les domaines, sauf pour le capital, avec le secret des affaires, et pour l’épandage de produits dangereux ! Le débat est là !

Je sais, monsieur le président, qu’il faut achever ce soir l’examen de ce texte, mais, comme je l’ai déjà dit vendredi, ce ne sont pas là de bonnes façons de légiférer. Cette question de la transparence doit être posée. Comment alerte-t-on les riverains de l’épandage de pesticides ?

Je rejoins mon collègue Cabanel quand il dit que les produits extrêmement dangereux ou reconnus comme tels doivent être interdits. Nous aurons ce débat ultérieurement, mais, pour l’heure, il s’agit de la prévention et de la transparence. J’aurais aimé entendre des arguments plutôt que des rires ! Pour l’instant, je n’en ai pas entendu !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. J’entends la force des convictions de notre collègue, mais, la rapporteur l’a dit, il existe aujourd’hui des obligations d’information en matière d’épandage des produits dangereux, comme il en existe pour la chasse. Peut-être la réglementation n’est-elle pas appliquée partout comme il le faudrait, mais la question qui se pose est alors celle du contrôle et, éventuellement, de la sanction. En rajouter dans la loi n’est pas la solution.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Madame la rapporteur, la réglementation dont vous avez fait état ne concerne-t-elle pas que les populations considérées à risques ? Si tel n’est pas le cas, la question qui se pose est en effet celle du contrôle du respect de la réglementation par l’administration. Cela suppose l’existence d’un plan de contrôle à l’échelon départemental.

En revanche, si l’obligation d’information ne concerne que les populations à risque, cette notion ne doit-elle pas, compte tenu des enjeux sanitaires, être élargie à l’ensemble des riverains des parcelles traitées, sachant que l’on ne peut en principe y pénétrer, puisqu’il s’agit du domaine privé ?

Mme Laure Darcos. Exactement !

M. Franck Montaugé. J’aimerais avoir une définition claire de la notion de population à risques au regard de la réglementation que vous avez évoquée, madame la rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’ANSES, dans le cadre des autorisations de mise sur le marché, définit de manière très précise les modalités et les conditions d’épandage en fonction de la dangerosité des produits.

Par ailleurs, l’obligation d’information est réelle dès lors que le riverain a demandé à l’agriculteur d’être averti d’un épandage. La réglementation prévoit « l’obligation d’aviser, avant toute utilisation, les voisins susceptibles d’être exposés à la dérive de la pulvérisation et qui ont demandé à en être informés ».

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.

Mme Laure Darcos. On peut avoir des moments de fou rire, monsieur Gay. Cela vous est arrivé aussi, en d’autres occasions qui pouvaient prêter à beaucoup de gravité.

Comme l’a dit notre collègue Montaugé, on parle ici de parcelles privées. Informer des épandages réalisés aux abords des habitations ou des lieux recevant du public est obligatoire, comme l’ont souligné Mme la rapporteur et Mme la présidente de la commission, mais des enfants n’ont pas à traverser des terrains privés, madame Préville. Il est complètement irréaliste d’envisager que les agriculteurs disposent de petits drapeaux tout au long des limites de parcelles dans lesquelles eux seuls ont le droit de pénétrer.

Tout est canalisé, sauf à ce qu’un fort mistral fasse dévier le drone de sa trajectoire de manière importante…

M. Fabien Gay. Cela arrivera !

Mme Laure Darcos. Mes chers collègues, si les agriculteurs nous entendaient… On est en train de leur imposer une somme de charges et d’obligations absolument dingue, alors qu’ils sont les premiers à tenter de concilier la biodiversité et leur travail. C’est aberrant ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 494 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 494 rectifié
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Article 14 septies (supprimé)

M. le président. L’amendement n° 649 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Duplomb, Mme Bruguière, MM. Pointereau et Reichardt, Mme Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Paul, Mouiller et Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Joyandet, Revet, Huré, Danesi et Savary, Mme Lassarade, M. Priou, Mme Gruny, MM. de Legge, Longuet, Pillet et Babary, Mmes Imbert, de Cidrac, Bories, Lamure et Deromedi, MM. Pierre, Charon, Rapin et Sido, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Laménie et Mandelli, Mme A.M. Bertrand, MM. Bonne, Vaspart et Cornu, Mmes Berthet et Duranton et MM. Poniatowski et Bouchet, est ainsi libellé :

Après l’article 14 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans la perspective de la mise en œuvre de la révision de la réglementation européenne relative à la production biologique, le Gouvernement adresse, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport au Parlement faisant un état des lieux des volumes et de l’origine des produits issus de l’agriculture biologique provenant de pays tiers, hors Union européenne, et les mesures qu’il entend appliquer à partir du 1er janvier 2021 pour soumettre ces produits à un principe de conformité avec les règles applicables à l’agriculture biologique au sens du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91, y compris les produits en conversion au sens de l’article 62 du règlement n° 889/2008 de la Commission du 5 septembre 2008 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques en ce qui concerne la production biologique, l’étiquetage et les contrôles.

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. La réglementation européenne concernant l’agriculture biologique est appelée à évoluer. Cet amendement vise à faire en sorte que la future réglementation européenne en matière d’agriculture biologique s’applique aussi aux produits bio importés de pays extérieurs à l’Union européenne. (M. Laurent Duplomb applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Sagesse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, je m’étonne que vous soyez défavorable à cet amendement. Nous proposons simplement un alignement sur le futur règlement européen. Nous souhaitons pouvoir regarder les consommateurs français dans les yeux. Va-t-on imposer à nos agriculteurs des règles communautaires sans les appliquer aux produits bio importés ? Ce serait absolument incompréhensible !

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Nous sommes a priori favorables à cet amendement. Je souhaiterais que M. le ministre nous expose les motifs de son opposition. C’est un véritable cas d’école : nous avons évoqué cette question à de multiples reprises, voté des résolutions sur la réciprocité en matière de normes dans le cadre des traités de commerce internationaux, et le Gouvernement émet un avis défavorable sur un amendement visant à traiter cette question éminemment importante… Monsieur le ministre, il serait utile que vous nous éclairiez.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Moi, je ne suis pas étonné du tout ! La position du Gouvernement est dans le droit fil de ce que l’on observe depuis le début de notre débat : un coup c’est blanc, un coup c’est noir. On se pose en défenseur des agriculteurs, puis on leur impose un tas de contraintes nouvelles. On déclare que l’on va améliorer le revenu des agriculteurs, mais les dispositions du titre II créent une foule de charges nouvelles. On n’en est plus à une contradiction près !

On impose des contraintes à l’agriculture française pour qu’elle se réduise comme peau de chagrin et que la concurrence de produits étrangers ne respectant aucune règle, même pour le bio, finisse de la faire couler, sous l’égide d’un ministre de l’agriculture qui prétend la soutenir. Vive M. le ministre !

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Un coup c’est blanc, un coup c’est noir, un autre coup cela peut être vert ! Je voterai cet amendement, que je trouve très intéressant. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Ayant eu la responsabilité, au siècle précédent, de négocier et de signer pour la France les accords créant l’Organisation mondiale du commerce, j’ai souvenir que nous avions demandé, sans l’obtenir, l’introduction de clauses sociales et environnementales. Les compétiteurs – en l’occurrence, pour l’essentiel, des pays émergents – nous avaient opposé que leur seul atout était de disposer d’une main-d’œuvre bon marché et que, après tout, le XIXsiècle industriel européen s’étant bâti sur cette ressource, nous ne pouvions pas les empêcher de s’en servir pour réussir.

Cependant, en l’espèce, monsieur le ministre, je partage totalement l’étonnement de mes collègues, car il s’agit non pas d’affaiblir la compétitivité de tel ou tel pays, mais de protéger le consommateur européen, sur des bases européennes. Quelle est la responsabilité du législateur, si ce n’est, justement, de s’éloigner des considérations économiques pour s’attacher à des considérations de sécurité ? Dieu sait si la sécurité alimentaire est au cœur de nos débats ! C’est la raison pour laquelle je pense profondément, monsieur le ministre, que vous ne prendriez aucun risque à approuver cet amendement, qui concerne la protection des consommateurs et n’est en rien motivé par des considérations de compétition ou de compétitivité internationale. C’est le consommateur qui est notre préoccupation, et c’est votre devoir de le défendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Notre groupe votera cet amendement. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Sur ce sujet du dumping social et environnemental, nous nous rejoignons souvent. On doit à la fois protéger les consommateurs français et obtenir la réciprocité dans le cadre des accords de libre-échange.

Monsieur le ministre, depuis maintenant cinq jours que durent nos débats, nous n’avons toujours pas obtenu de réponse claire de votre part à la question suivante : l’agriculture est-elle un bien commun de l’humanité ? Si oui, alors il faut la sortir du libre-échange, à défaut de réciprocité.

Je m’étonne moi aussi que vous refusiez cet amendement, car son adoption renforcerait votre position dans les négociations internationales.

M. Fabien Gay. Si par exemple on interdit à nos agriculteurs, en France et en Europe, de cultiver des OGM, la logique veut que l’on n’en importe pas. Monsieur le ministre, je le répète, l’adoption de cet amendement renforcera votre position dans les négociations à venir. (Mme Laure Darcos applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Si le Sénat vote unanimement cet amendement, il rendra service aux agriculteurs, mais aussi au Gouvernement.

Il ne s’agit pas aujourd’hui de se positionner pour ou contre les produits bio, nous en avons déjà parlé pendant deux ou trois jours. Un objectif de 20 % de produits bio dans la restauration collective a été fixé, très bien,…

M. Didier Guillaume. … mais on sait que les importations posent question. Mon département est le premier de France pour l’agriculture bio, notamment pour les plantes aromatiques et à parfum. Or nous en importons des tonnes et des tonnes, en provenance de Bulgarie et d’ailleurs. Pour protéger les agriculteurs bio français, il faut que l’on puisse savoir comment sont cultivés ces produits importés et qu’ils fassent l’objet d’une certification. C’est très important ! Il faut voter cet amendement, pour défendre le revenu de nos agriculteurs et pour garantir la qualité et la sécurité des produits importés. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Nous voterons nous aussi cet amendement, qui relève de la logique pure et qui va dans le sens de tout ce que nous voulons.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 649 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 sexies.

Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

Article additionnel après l'article 14 sexies - Amendement n° 649 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 565 rectifié

Article 14 septies

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 459 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa. » ;

2° Les deuxième, troisième et dernier alinéas sont supprimés.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à étendre l’interdiction des néonicotinoïdes et, de surcroît, à supprimer les possibilités de dérogation prévues.

En effet, ces dérogations ne se justifient pas. Pour l’essentiel, les points critiques révélés par l’ANSES dans son étude réalisée pour servir de base à l’arrêté fixant ces dérogations relèvent de freins économico-commerciaux, et non de réelles impasses techniques. Ces freins peuvent être levés non par des dérogations à l’interdiction des néonicotinoïdes, mais par des mesures d’accompagnement et de soutien. Rappelons par ailleurs que des études réalisées sur plusieurs grandes cultures ont fait valoir que l’utilisation des néonicotinoïdes n’a pas permis une augmentation significative des rendements.

Enfin, cette interdiction se justifie par l’importance des effets négatifs des néonicotinoïdes. Depuis l’adoption de l’interdiction en 2016, les études sur la toxicité de ces pesticides n’ont cessé de s’accumuler. Par exemple, une étude allemande de 2017 révèle que les populations d’insectes volants ont diminué de 80 % en vingt-cinq ans. De même, une étude conjointe du Muséum national d’histoire naturelle et du CNRS a démontré que les populations d’oiseaux diminuaient « à une vitesse vertigineuse ». Ces deux études ont montré la responsabilité des néonicotinoïdes dans ces phénomènes. L’urgence de la situation justifie de n’accorder aucune dérogation à cette interdiction.

M. le président. L’amendement n° 108 rectifié sexies, présenté par Mme Mélot, MM. Bignon, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Delahaye, Daubresse, Lévrier et Marchand et Mmes Keller et Rauscent, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa. » ;

2° Au deuxième alinéa, la référence : « au premier alinéa » est remplacée par les références : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot « troisième » et les mots : « contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par le mot : « considérés » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par néonicotinoïde, est entendue toute substance à usage agricole ayant une action sur les récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine, autre que la nicotine elle-même. »

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Cet amendement a pour objet de rétablir l’article 14 septies relatif au champ d’interdiction des néonicotinoïdes, avec une légère modification afin de définir précisément ce que recouvre l’acception juridique du terme « néonicotinoïde ». La loi du 8 août 2016 ne pose pas de définition claire, ce qui entraîne des contournements.

Nous précisons donc que « par néonicotinoïde, est entendue toute substance à usage agricole ayant une action sur les récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine, autre que la nicotine elle-même ».

M. le président. L’amendement n° 91 rectifié, présenté par M. Médevielle, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, précise les modalités d’application du présent alinéa. » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot « troisième » et les mots : « contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par les mots : « mentionnés aux premier et deuxième alinéas du présent II et ».

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rétablir l’article 14 septies, supprimé en commission des affaires économiques contre l’avis de Mme la rapporteur.

Cet article permet de consolider l’interdiction de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, en évitant son contournement par le recours à des produits présentant des modes d’action identiques.

De nombreux amendements très proches ont été déposés par des collègues de différents groupes. Je salue ces initiatives convergentes. Toutefois, je tiens à rappeler qu’il faut être prudent avec la notion de produits « à même mode d’action ». Attention au « délit de faciès », si j’ose dire. Je suis contre toute interdiction arbitraire de produit, décidée sans aucun fondement scientifique. Notre commission a prévu une consultation de l’ANSES sur le décret d’application de ce dispositif, afin de garantir que ces mesures réglementaires se fonderont sur des données scientifiques, en particulier pour la définition de la notion de mode d’action. Il y a des produits de même mode d’action dont les métabolites sont très peu toxiques, qui sont peu rémanents dans le milieu environnant et qui peuvent donc être considérés comme de très bons produits et de bonnes solutions alternatives.

Je pense que nous pouvons nous retrouver sur cette rédaction, et j’invite ceux de nos collègues qui ont déposé des amendements à soutenir la proposition de notre commission.

M. le président. L’amendement n° 750, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à ceux de la famille néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième » et les mots : « phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par le mot : « considéré ».

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de rétablir l’article 14 septies, qui concerne l’extension de l’interdiction des néonicotinoïdes aux substances présentant un mode d’action identique. L’Europe a décidé, le 27 avril 2018, d’interdire à compter de la fin de l’année 2018 les traitements des cultures de plein champ utilisant trois substances de néonicotinoïdes. Cette décision, qui concerne plus de 76 % des quantités et intervient six ans après les premières mesures nationales, vient confirmer la position française sur la nécessité de mieux protéger les insectes pollinisateurs. Il convient désormais d’étendre le champ de l’interdiction aux substances chimiques qui, si elles ne sont pas classées spécifiquement comme néonicotinoïdes, ont des modes d’action identiques, car c’est le mode d’action qui est incriminé, notamment en matière d’impact sur les pollinisateurs, dont on connaît la situation préoccupante aujourd’hui. Un décret précisera la liste des modes d’action à prendre en compte pour la mise en œuvre de la disposition.

M. le président. Les amendements nos 109 rectifié septies, 196 rectifié, 458 rectifié et 636 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 109 rectifié septies est présenté par Mme Mélot, MM. Bignon, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Mizzon, Delahaye et Daubresse et Mme Keller.

L’amendement n° 196 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 458 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme Laborde et M. Vall.

L’amendement n° 636 rectifié est présenté par Mme Schillinger, MM. Théophile, Patriat, Amiel, Bargeton et les membres du groupe La République En Marche.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa. » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot « troisième » et les mots : « contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par le mot : « considérés ».

La parole est à M. Jérôme Bignon, pour présenter l’amendement n° 109 rectifié septies.

M. Jérôme Bignon. C’est un amendement ayant le même objet que le précédent, mais simplifié.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 196 rectifié.

M. Fabien Gay. Nous souhaitons, au travers de cet amendement, renforcer l’interdiction de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques, aujourd’hui circonscrite aux substances de la famille des néonicotinoïdes. Nous proposons donc d’étendre cette interdiction à des substances dont les modes d’action sont identiques à ceux-ci. L’objectif est d’éviter tout contournement de la loi pour la reconquête de la biodiversité de 2016.

En effet, de nouvelles substances, telles que le sulfoxaflor et la flupyradifurone, ont été depuis créées. Le débat sur leur appartenance ou non à la famille des néonicotinoïdes n’est pas encore tranché. Or, rappelons-le, les effets des néonicotinoïdes sont désastreux sur les pollinisateurs, notamment sur les abeilles. Ces substances agissent en effet sur leur système nerveux central, leur faisant par exemple perdre le chemin de leur ruche. C’est donc bien leur mode d’action qui présente un danger.

Ces substances mettent en question la préservation des espèces, alors que les populations d’insectes volants connaissent un déclin considérable. Rappelons que l’action des pollinisateurs est essentielle pour les écosystèmes et pour nos cultures, puisque les trois quarts de celles-ci en dépendent. Nous ne pouvons pas continuer à laisser certaines de nos pratiques agricoles décimer ces espèces.

L’interdiction par l’Union européenne de trois néonicotinoïdes est un premier pas, mais, là aussi, nous devons aller plus loin. Que les nouvelles substances qui sont développées appartiennent ou non à cette famille n’est pas ici la question essentielle. Il s’agit avant tout de savoir quels risques présentent ces substances et d’appliquer le principe de précaution : nous devons nous prémunir contre les dangers que peuvent présenter de nouvelles substances, qu’elles soient classées comme néonicotinoïdes ou non, pour les pollinisateurs. Ces substances, dont le mode d’action est similaire à celui des néonicotinoïdes, présentent nécessairement des risques, et la rédaction de la loi doit donc évoluer pour qu’elles soient incluses dans le champ de l’interdiction.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 458 rectifié.

M. Joël Labbé. Il vise également à rétablir l’extension du champ d’application de l’interdiction des néonicotinoïdes aux substances ayant un mode d’action similaire, telle qu’elle a été proposée par l’Assemblée nationale. Ces substances sont des neurotoxiques, qui affectent le système nerveux central des insectes, dont les abeilles. Celui des humains n’est pas foudroyé, mais l’effet cumulatif et l’effet cocktail peuvent entraîner des maladies neurodégénératives.

Cette extension est indispensable au regard de la situation d’urgence dans laquelle se trouvent les apiculteurs et l’ensemble de la biodiversité.

Ces pesticides ayant le même mode d’action que les néonicotinoïdes, il est complètement justifié qu’ils soient eux aussi interdits pour protéger les pollinisateurs, notamment. C’est en effet le mode d’action systémique de ces pesticides qui représente un danger pour les abeilles.

Vous le savez, la situation des pollinisateurs est catastrophique. Cette année, la mortalité dans certaines régions a été particulièrement importante. Les apiculteurs ont interpellé à de multiples reprises les pouvoirs publics sur leur situation, économiquement et humainement intenable.

J’en profite pour rappeler, monsieur le ministre, que les apiculteurs attendent de pouvoir discuter avec le Gouvernement des mesures à mettre en place au regard de cette situation.

M. Stéphane Travert, ministre. On en a déjà parlé trois fois !

M. Joël Labbé. Certes, mais vos réponses ne satisfont pas les professionnels, qui sont aux abois et attendent des mesures d’urgence. Soit on estime que c’est la faute à pas de chance s’ils mettent la clé sous la porte, soit on les soutient pour qu’ils puissent relancer leur activité économique.

M. Laurent Duplomb. Il n’y a jamais eu autant d’apiculteurs !

M. Joël Labbé. Comment ça ? Venez avec moi sur le terrain leur dire cela en face !

Dans ce contexte, reculer par rapport à la position prise par l’Assemblée nationale après un long débat serait un non-sens. Je demanderai un vote par scrutin public sur cet amendement, car la situation est trop grave : chacun doit se prononcer en son âme et conscience !

M. le président. La parole est à Mme Noëlle Rauscent, pour présenter l’amendement n° 636 rectifié.

Mme Noëlle Rauscent. Le 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a ordonné la suspension de l’autorisation de mise sur le marché de deux formulations commerciales à base de sulfoxaflor, un nouvel insecticide apparenté aux néonicotinoïdes. L’autorisation accordée ne respectait pas le principe de précaution. En effet, selon le tribunal, il n’existait pas de certitude quant à l’innocuité de ce produit.

Par cet amendement, nous souhaitons apporter une réponse politique à cette situation. Nous entendons prendre nos responsabilités à l’égard de nos concitoyens, en les protégeant contre ces nouveaux pesticides.

Mes chers collègues, vous avez défendu en commission la filière apicole par l’amélioration de l’étiquetage du miel et nous soutenons cette mesure. Soutenez jusqu’au bout cette filière en interdisant complètement ces nouveaux pesticides tueurs d’abeilles.

M. le président. L’amendement n° 563 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Montaugé, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mmes Lienemann et Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite à compter du 1er septembre 2018. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa. » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot « troisième » et les mots : « contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par le mot : « considérés ».

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement tend lui aussi à rétablir l’article 14 septies, supprimé en commission, qui étendait l’interdiction des néonicotinoïdes en visant également les produits « présentant des modes d’action identiques ».

Il s’agit d’interdire des substances comme le sulfoxaflor et la flupyradifurone, qui ont un mode d’action similaire à celui néonicotinoïdes et agissent sur le système nerveux des insectes.

C’est un amendement de bon sens. Si nous voulons être crédibles en tant que législateurs, nous devons nous donner les moyens de contrecarrer toute tentative de détournement de l’esprit de la loi.

Nous proposons également, en cohérence avec l’interdiction actuelle des néonicotinoïdes, de prévoir que cette mesure entre en vigueur le 1er septembre 2018.

M. le président. L’amendement n° 319 rectifié, présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains et MM. Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot, Kern et Canevet, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa » ;

2° Au troisième alinéa, les mots : « phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes » sont remplacés par le mot : « considéré ».

La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a interdit l’utilisation des substances actives de la famille des néonicotinoïdes à compter du 1er septembre 2018, mais aujourd’hui apparaissent sur le marché des molécules ayant les mêmes effets et qui permettent de contourner cette interdiction. Cet amendement vise simplement à interdire ces substances et à supprimer toutes les dérogations à l’interdiction posée par la loi de 2016.

M. le président. L’amendement n° 141 rectifié quinquies, présenté par Mme Mélot, MM. Bignon, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Mizzon, Daubresse et Marchand et Mme Keller, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le II de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives présentant des modes d’action identiques à celles de la famille des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits est interdite, sauf si il a été démontré par une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail que la substance présente un profil toxicologique et écotoxicologique permettant que ses usages soient compatibles avec un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement, en particulier les pollinisateurs. » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et deuxième alinéas » ;

3° Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième ».

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 459 rectifié bis. Je rappelle que l’ANSES vient de rendre un avis listant les dérogations, qui sont au nombre de six. Ces dérogations, très peu nombreuses, sont accordées uniquement jusqu’au 1er juillet 2020 dans la mesure où il n’existe aucun substitut, chimique ou non.

L’amendement n° 91 rectifié, le mieux rédigé, s’appuie notamment sur un avis de l’ANSES. Toutefois, la commission des affaires économiques a donné un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements tendant à rétablir un article qu’elle a supprimé pour cause de surtransposition.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 459 rectifié bis et 108 rectifié sexies. Je ne crois pas pertinent de définir dans la loi le mode d’action des néonicotinoïdes, car cela relève de la science.

Sur les amendements nos 109 rectifié septies, 196 rectifié, 458 rectifié et 636 rectifié, je m’en remets à la sagesse du Sénat. Dès 2012, la France a pris des mesures d’interdiction de traitement par les trois substances visées. En 2016, nous avons inscrit dans la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages l’interdiction des néonicotinoïdes à compter du 1er septembre 2018, avec des dérogations jusqu’en 2020. L’Europe a décidé, le 27 avril 2018, d’interdire le traitement des cultures en plein champ utilisant trois des substances néonicotinoïdes à compter de la fin de 2018. Cette décision, qui concerne plus de 76 % de la population, intervient plus de six ans après les premières mesures nationales et vient confirmer le bien-fondé de la position française sur la nécessité de mieux protéger les insectes pollinisateurs.

J’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 91 rectifié de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 563 rectifié bis. En effet, compte tenu de l’avancement des travaux, la loi ne sera pas promulguée avant le 1er septembre. Il n’est donc pas possible de prévoir une interdiction, qui serait rétroactive. En outre, une telle interdiction doit être notifiée à la Commission européenne.

J’émets également un avis défavorable sur l’amendement n° 319 rectifié. À ce jour, les autorisations de mise sur le marché des produits de base du sulfoxaflore ont été suspendues par le tribunal de Nice en référé. Ne pas autoriser de dérogation pour ces produits ne changerait rien en l’état actuel des choses. En outre, il me semble que cela conduirait à préempter les conclusions du tribunal sur le fond. Je ne vois pas de raison objective de traiter ces deux substances différemment des cinq autres.

Enfin, le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° 141 rectifié quinquies.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote sur l’amendement n° 459 rectifié bis.

M. Pierre Cuypers. Je ne voterai aucun des amendements.

L’interdiction des néonicotinoïdes entrera en vigueur le 1er septembre 2018, ce qui aura des conséquences gravissimes pour la filière betterave et créera un chaos économique sans précédent si les choses restent en l’état.

Cette interdiction met gravement en danger la filière betterave, pourtant essentielle pour la vie de nos territoires et pour notre économie. La France est en effet le premier producteur européen de sucre de betterave, la production de sucre et d’éthanol apportant 1 milliard d’euros à notre balance commerciale. Cette filière représente 44 500 emplois, et 6 700 de plus pendant les campagnes.

L’interdiction d’utiliser les néonicotinoïdes pour l’enrobage des semences de betterave – je rappelle que cette plante est non mellifère – conduirait à une disparition de la culture dans les régions où le niveau de perte dépasserait 20 %, soit une perte moyenne de 10, 5 tonnes de betteraves par hectare à l’échelon national, le taux de perte pouvant atteindre jusqu’à 50 % dans les zones maritimes.

De sérieux doutes pèsent sur l’efficacité de l’alternative présentée par l’ANSES, car il n’existe aujourd’hui aucun traitement de substitution. L’emploi de ceux qui ont été testés jusqu’à présent obligerait à procéder à trois ou quatre pulvérisations et se révèle inefficace.

La réduction de la diversité des assolements provoquera la fermeture d’usines. En outre, 120 millions d’euros de chiffre d’affaires vont s’envoler. Alors que nous avons exporté 3 millions de tonnes de sucre en 2017, nous risquons de devenir demain des importateurs nets.

Ces éléments doivent nous interpeller et nous inciter à ne pas voter ces amendements. J’attends de vous, monsieur le ministre, un engagement ferme sur l’octroi d’une dérogation à l’utilisation de ces produits pour la filière betterave. Il y va de sa survie. Je vous demande, monsieur le ministre, d’être fidèle à vos déclarations de cet après-midi. Vous avez dit que le Président de la République s’était déclaré contre une interdiction sans solution alternative. Vous avez vous-même indiqué qu’il ne devait pas y avoir d’interdiction brutale. Il est maintenant urgent que le Gouvernement ait un comportement responsable. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.

M. Franck Menonville. L’amalgame entre les néonicotinoïdes et leur interdiction, d’un côté, et l’extension de leur définition, de l’autre, me pose problème. Il faut être très clair, les néonicotinoïdes seront interdits d’utilisation à compter du mois de septembre, hormis quelques dérogations validées par l’ANSES. À la suite du débat qui a eu lieu à l’Assemblée nationale, on a peut-être fait des raccourcis en matière d’interprétation, en s’appuyant sur des modes d’action plus ou moins similaires. Je rappellerai que la quasi-totalité des insecticides existants sont des neurotoxiques pour les insectes.

Il y a une très grosse différence entre les néonicotinoïdes et les nouveaux produits : ceux-ci, qui ne constituent d’ailleurs qu’une alternative très partielle, ne présentent que peu ou pas de rémanence.

Au-delà de ces considérations d’ordre technique et scientifique, je voudrais surtout que l’on évite ce genre de raccourcis et que l’on ne politise pas une question qui n’a pas forcément lieu de l’être. Ces produits doivent être jugés à l’aune de critères objectifs et scientifiques, notamment par l’ANSES. Comme j’ai eu l’occasion de le faire à plusieurs reprises, j’appelle au renforcement du rôle et des moyens de cette agence, dont l’indépendance doit être garantie, à charge pour le Parlement de contrôler son fonctionnement.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je ne défendrai pas la filière betteravière, mon collègue Cuypers l’ayant déjà fort bien fait, mais la disparition des quotas betteraviers nous conduira à importer du sucre, notamment du Brésil, qui est le premier exportateur vers l’Europe. Par ailleurs, vous ne voulez pas non plus autoriser la transformation de la mélasse en éthanol, alors que cela permettrait d’équilibrer le marché et d’atteindre une certaine rentabilité.

Il faut essayer d’agir avec bon sens, ce que nous nous efforçons de faire sur ces travées. Or le bon sens veut que l’on n’interdise pas des produits tant qu’il n’existe pas d’alternative crédible. Il nous faut être particulièrement prudents. Le monde agricole travaille à la mise au point de telles alternatives. À cet égard, permettez-moi de citer deux exemples qui concernent mon territoire.

Le projet Symbiose, qui associe des agriculteurs et des apiculteurs sous l’égide de la fédération syndicale et de la chambre d’agriculture, permet de véritablement prendre en compte les préoccupations de la filière apicole au travers de pratiques culturales différentes. Je rappelle à cet égard que la betterave ne fait pas de fleurs et que les abeilles ne sont donc pas les premières concernées.

Enfin, monsieur le ministre, vous avez failli vous rendre aux états généraux du projet Planet A, qui témoigne de la prise en compte des problèmes écologiques dans un département où l’on pratique pourtant l’agriculture intensive. Si ce lieu d’échange s’appelle Planet A, c’est bien parce qu’il n’y a pas de planète B !

Je soutiendrai bien entendu la position de la rapporteur. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Je souhaite répondre au sénateur Cuypers et dire à M. Savary que je suis désolé de ne pas avoir pu être présent pour le discours de clôture des états généraux de Planet A, vendredi matin. J’étais ici, au Sénat, comme il était normal, mais je me suis exprimé par vidéo interposée ! Comme je l’ai indiqué à cette occasion, il n’y a effectivement pas de planète B.

Je sais les travaux menés dans la Marne, département de grandes cultures, sur l’ancienne base aérienne 112. La filière betteravière cherche des solutions à travers les rotations de cultures et différentes expérimentations agronomiques.

Les néonicotinoïdes seront interdits à compter du 1er septembre 2018, des dérogations étant possibles jusqu’en 2020. Il ne s’agit pas de laisser les gens sans solution. L’interdiction a été posée dans la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ; telle est la base légale. En outre, la Commission européenne a prononcé l’interdiction de trois néonicotinoïdes, dont le thiaméthoxane, le 27 avril dernier.

Il faut continuer à rechercher des alternatives pour la filière betteravière. Celles qui ont d’ores et déjà été mises au jour méritent d’être davantage explorées. Tous les usages ont été étudiés par l’ANSES, y compris pour la betterave. Une alternative a été identifiée – combinaison de lambda, cyhalothrine et pirimicarbe – pour lutter contre le puceron vecteur de la jaunisse. Une autre est à l’étude : le flonicamid, qui devrait permettre de traiter les problèmes sans difficulté.

Aucune dérogation à ce stade n’est possible pour un néonicotinoïde interdit depuis le 27 avril dans toute l’Europe ; tel est l’état du droit. On m’a opposé que la Belgique avait bénéficié d’une dérogation : ce pays a en fait utilisé l’article 53 pour contourner l’interdiction européenne, ce qui n’est pas normal. La Commission européenne a d’ailleurs pointé des abus et a demandé à l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, d’évaluer ces dérogations au titre de l’article 53.

L’Union européenne a interdit le thiaméthoxame, sauf pour un usage sous serre, ce qui ne présente pas d’intérêt pour une plante de plein champ comme la betterave. Aujourd’hui, nous devons avancer sur ces sujets. L’ANSES y travaille. Nous avons déjà des pistes, il faut les approfondir.

Nous devons travailler à améliorer la situation pour les pollinisateurs, monsieur Labbé, sans oublier pour autant les difficultés que cela peut engendrer dans certaines filières, notamment celle de la betterave, qui nous importe beaucoup. Nous aurons l’occasion d’en rediscuter ensemble.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 459 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108 rectifié sexies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 91 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 183 :

Nombre de votants 334
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l’adoption 186
Contre 129

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 14 septies est rétabli dans cette rédaction, et les amendements nos 750, 109 rectifié septies, 196 rectifié, 458 rectifié, 636 rectifié, 563 rectifié bis, 319 rectifié et 141 rectifié quinquies n’ont plus d’objet.

Article 14 septies (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 247 rectifié bis et n°  479 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 14 septies

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 565 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mme Lienemann, M. Botrel, Mme Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Est interdit, à compter du 1er décembre 2020, le fait de produire, stocker et vendre des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par les autorités communautaires.

« Est puni de six mois d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende le fait de produire, stocker ou vendre des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par les autorités communautaires. »

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement vise à interdire la production, le stockage et la vente de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées à l’échelon européen. Il avait été adopté par la commission du développement durable à l’Assemblée nationale, avant d’être rejeté en séance par le Gouvernement, au motif qu’il tendrait à pénaliser notre industrie.

Or nous estimons qu’il s’agit ici d’être cohérents avec nos politiques et nos engagements, tant nationaux qu’européens. Il me semble impensable de continuer à autoriser nos entreprises à exporter des substances que nous n’autorisons pas chez nous. La nocivité d’un produit ne s’arrête pas à nos frontières et elle ne diminue pas avec les kilomètres parcourus. Nous devons être exemplaires si nous voulons être crédibles.

Les considérations économiques qui ont conduit à la suppression de cet article à l’Assemblée nationale ne me convainquent pas. Il s’agit ici de santé publique mondiale, ainsi que d’éthique.

Nous proposons cependant, afin de faciliter l’adoption de notre amendement, que cette interdiction prenne effet au 1er janvier 2020, pour laisser le temps aux entreprises concernées de s’organiser en conséquence.

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 565 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 443 rectifié quater  et n° 477 rectifié bis (début)

M. le président. Les amendements nos 247 rectifié bis et 479 rectifié bis sont identiques.

L’amendement n° 247 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains, MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe et Longeot, Mme Billon et MM. Kern, Canevet, Le Nay et Luche.

L’amendement n° 479 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guérini, Mme Laborde et M. Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … - Sont interdits à compter du 1er décembre 2020 la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil. »

La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 247 rectifié bis.

M. Bernard Delcros. Cet amendement, comme le précédent, vise à interdire la production, le stockage et la mise en circulation de produits phytosanitaires dont l’utilisation est interdite dans l’Union européenne.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 479 rectifié bis.

M. Joël Labbé. Comment peut-on admettre, imaginer, envisager que des produits interdits en Europe continuent à être fabriqués dans notre pays ? Je pense notamment à l’atrazine, extrêmement toxique et dangereuse. On les produit pour les commercialiser dans les pays du Sud : une telle pratique est purement scandaleuse !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements. Cela a été dit, l’enjeu est industriel. Adopter ces amendements, c’est fermer des usines et détruire des emplois en France.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements, qui visent à interdire la production, le stockage et la vente de produits destinés à des pays tiers, extérieurs à l’Union européenne, où ils sont autorisés.

Les substances actives concernées peuvent ne pas avoir été approuvées en Europe parce qu’elles n’ont pas fait l’objet de demande. Il peut s’agir de substances intéressant par exemple la protection de plantes tropicales non cultivées en Europe. On peut citer la lutte contre le criquet pèlerin, véritable fléau en Afrique, pour laquelle se développent des solutions de biocontrôle qui ne trouveront pas de marché en Europe. Il y a donc un intérêt pour les industries françaises, mais également pour les productions agricoles des pays extérieurs à l’Union européenne, de conserver ces dispositions.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Comment nos exploitants agricoles pourraient-ils admettre que des produits qu’ils n’ont pas le droit d’utiliser puissent être exportés vers les pays du Sud ? Je ne parle même plus d’éthique, mais d’équité. N’oublions pas que, dans nos outre-mer, la question du chlordécone reste en suspens. Alors que cet insecticide était depuis longtemps interdit aux États-Unis, on a continué à l’utiliser. On ne peut pas dire qu’on ne savait pas ! Les arguments économiques ne tiennent pas.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Je me permets d’intervenir sur le chlordécone, car l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dont je suis membre, a rédigé en 2009 un épais rapport sur cette question.

Je ne peux pas vous laisser dire, cher collègue, ce que vous venez de dire. Dans ce rapport, nous avons démontré que les États-Unis ont bien interdit le chlordécone, mais qu’ils ont continué à en produire au Brésil ! Nous nous sommes rendu compte que les trois quarts de la production de chlordécone étaient épandus sur les champs de pommes de terre de Pologne et d’Allemagne, et que seule une quantité minime était exportée aux Antilles.

Je suis allé en Allemagne rencontrer les Verts. Je leur ai dit que le chlordécone était utilisé sur des surfaces très étendues dans leur pays, mais ils n’ont rien fait. En France, nous faisons tout de même beaucoup de choses concernant la pollution des sols, notamment en matière de recherche.

Je vous renvoie donc à notre rapport sur le chlordécone, il est toujours d’actualité, mais ne dites pas que les États-Unis ont arrêté la production !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 565 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 247 rectifié bis et 479 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 247 rectifié bis et n°  479 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 443 rectifié quater  et n° 477 rectifié bis (interruption de la discussion)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 443 rectifié quater est présenté par M. Jomier, Mme Ghali, M. Daudigny, Mmes Lienemann, Conway-Mouret et Rossignol, M. Antiste, Mmes Jasmin, Guillemot et Espagnac, M. Roger, Mme Préville, MM. Kerrouche, Marie, Manable et Tissot et Mmes Taillé-Polian et Conconne.

L’amendement n° 477 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Corbisez et Guérini, Mme Laborde et M. Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Conformément aux articles 36, 44 et 71 du règlement n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, à compter du 1er janvier 2019, est interdite sur le territoire national l’utilisation des produits phytopharmaceutiques suivants :

« 1° Les produits phytopharmaceutiques contenant une ou plusieurs substances actives soumises à exclusion : chlorotoluron, dimoxystrobin, flumioxazine, epoxiconazole, profoxydim, quizalofop-p-tefuryl ;

« 2° Les produits phytopharmaceutiques contenant une ou plusieurs substances actives soumises à substitution : diflufenican(il), diquat, metam-sodium, mesulfuron méthyle, sulcotrione ;

« 3° Les produits phytopharmaceutiques contenant une ou plusieurs substances actives également préoccupantes : bentazone, mancozèbe, métazachlore, prosulfocarbe, s-metalochlore. »

La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 443 rectifié quater.

M. Jean-Claude Tissot. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 477 rectifié bis.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à interdire des substances préoccupantes, dont la toxicité est avérée.

Dans un rapport de décembre 2017, le Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux, le Conseil général de l’environnement et du développement durable et l’Inspection générale des affaires sociales ont mis en avant le danger sanitaire que peuvent présenter certaines substances actives pesticides pour la santé humaine. Ils demandent à la France de prendre position contre ces pesticides à l’échelon européen lors du réexamen de leur dossier.

Pourquoi attendre pour interdire ces pesticides s’ils sont reconnus comme étant dangereux ? Il faut être cohérent ! Nous disposons des marges de manœuvre nécessaires pour les interdire à l’échelon national. Nous pouvons être des pionniers à l’échelle européenne dans ce domaine, comme nous l’avons été pour les néonicotinoïdes.

Il est donc tout à fait logique, dans l’optique de la gestion des risques, de suivre cette évaluation des pesticides et de retirer les autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires pouvant en contenir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements tendent à une surtransposition massive en interdisant de nombreuses substances actives autorisées au niveau européen. Ils s’appuient, comme cela a été dit, sur un rapport qui a identifié ces substances préoccupantes. Or ce rapport ne préconise nullement l’interdiction de ces substances actives par la loi. Il recommande, à juste titre, d’agir directement à l’échelon européen pour les faire interdire en demandant leur réévaluation.

Je précise également que l’article 253-7 du code rural et de la pêche maritime prévoit déjà que l’autorité administrative peut, dans l’intérêt de la santé publique ou de l’environnement, prendre toutes dispositions d’interdiction concernant la mise sur le marché, la délivrance, l’utilisation ou la détention des produits phytosanitaires.

Compte tenu de ces éléments, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

Conformément aux dispositions réglementaires européennes en vigueur, si cette évaluation fait apparaître des éléments nouveaux susceptibles de remettre en cause l’approbation européenne, ceux-ci seront transmis sans délai à la Commission européenne afin que soit engagée la révision de l’approbation. Si l’étude identifie des risques inacceptables, l’ANSES modifiera ou retirera les autorisations de mise sur le marché des produits correspondants.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 443 rectifié quater et 477 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Mes chers collègues, il reste 66 amendements à examiner.

Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 443 rectifié quater  et n° 477 rectifié bis (début)
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Discussion générale

6

Candidature à une commission

M. le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission des affaires sociales a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévue par notre règlement.

7

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 443 rectifié quater  et n° 477 rectifié bis (interruption de la discussion)
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Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 194 rectifié et n° 373 rectifié bis

Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il nous reste 66 amendements à examiner. Je vous rappelle que nous devrons lever la séance à minuit et demi au plus tard. Si nous voulons achever ce soir la discussion du projet de loi, il nous faudra adopter un braquet d’environ 22 amendements par heure…

J’invite donc chacune et chacun à respecter son temps de parole et à faire preuve de la plus grande concision possible, sans gâcher pour autant, monsieur Gay, le travail des collaborateurs. (Sourires.)

Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons, au sein du chapitre III du titre II, l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 14 septies.

TITRE II (suite)

MESURES EN FAVEUR D’UNE ALIMENTATION SAINE, DE QUALITÉ, DURABLE, ACCESSIBLE À TOUS ET RESPECTUEUSE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL

Chapitre III (suite)

Renforcement des exigences pour une alimentation durable accessible à tous

Discussion générale
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Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 564 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 14 septies (suite)

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 194 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 373 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains et MM. Moga, L. Hervé, Prince, Kern et Canevet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – L’utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active du glyphosate est interdite sur le territoire national à compter du 1er juillet 2021. »

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 194 rectifié.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement, déposé à quelques nuances près par tous les groupes de la gauche et du centre de cet hémicycle, est devenu un emblème, celui des promesses non tenues du Gouvernement. Monsieur le ministre, pourquoi refuser l’inscription dans la loi de la promesse présidentielle d’interdire le glyphosate ?

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Ce n’était pas une promesse !

M. Guillaume Gontard. Vous me rétorquerez qu’il n’est pas besoin de surcharger la législation. Pourtant, dans le même temps, le Gouvernement a fait adopter une loi très médiatisée pour interdire le téléphone portable à l’école, une interdiction déjà inscrite dans le règlement intérieur de 90 % des établissements scolaires.

Monsieur le ministre, nous voulons sincèrement vous aider à tenir cette promesse, en proposant d’interdire le glyphosate à compter du 1er juillet 2021. Pour notre part, nous ne prévoyons aucune possibilité d’exception. Nous voulons vous aider à porter le message de la France à Bruxelles, en inscrivant la position française dans le marbre de la loi. Montrons le chemin !

Rappelons rapidement ce qui a déjà été dit : l’Organisation mondiale de la santé, compilant 350 études indépendantes, a reconnu en 2015 ce pesticide massivement utilisé comme un « cancérigène probable ». Le principe de précaution aurait déjà dû amener à l’interdire.

Contrairement à ce que n’a pas manqué de nous opposer la majorité sénatoriale, c’est à nos agriculteurs, à leur santé que nous pensons en premier lieu, afin justement qu’ils puissent prendre leur retraite. Porter un masque à gaz pour pulvériser n’est pas anodin ; sortir de sa journée de travail avec des rougeurs et des maux de tête non plus.

Mais ce n’est pas tout : l’impact du glyphosate est une catastrophe écologique. L’air, les sols et l’eau subissent une contamination généralisée. L’impact sur la biodiversité est certain. Les insectes, les oiseaux, les vers de terre, déjà menacés, sont un peu plus décimés par l’usage quotidien de ce produit.

Cela entraîne un cercle vicieux. Les sols sont moins bien nourris ; cela nous force à utiliser de plus en plus de produits de synthèse pour faire pousser nos fruits et nos légumes, ce qui en retour abîme un peu plus nos sols.

Qui pis est, à utiliser sans arrêt le glyphosate, nous favorisons la sélection des herbes et des insectes les plus résistants, plus dangereux pour nos cultures et plus difficiles à combattre, à l’aide de produits toujours plus nocifs.

On ne s’en sortira certainement pas avec le recours à d’autres solutions chimiques, sans cesse invoqué comme un mantra. Une seule alternative existe : amorcer rapidement une transformation globale de notre modèle agricole.

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 373 rectifié bis.

M. Bernard Delcros. Sur le sujet controversé du glyphosate, y compris sur les effets de celui-ci, les avis sont très divergents. Cependant, au travers de cet amendement, je souhaite tracer une ligne rouge, comme cela est nécessaire sur tous les sujets de santé publique.

Au fil du temps et des progrès de la science ont été introduits peu à peu de nombreux produits chimiques dans nos activités économiques, mais aussi dans nos modes de vie, notre alimentation. On sait que, globalement, ces substances portent atteinte à l’environnement, à la biodiversité, à la santé publique.

Dès lors, deux attitudes sont possibles : soit nous essayons de colmater les brèches en posant des rustines à chaque alerte ; soit nous dépassons les bonnes raisons de ne pas agir et nous essayons de préserver l’avenir de nos enfants. C’est la seconde attitude, me semble-t-il, que nous devons adopter en responsabilité. Dans cette perspective, il nous faut changer d’orientation et prendre le contrepied exact de ce qui s’est fait au cours des dernières décennies, en donnant la priorité aux enjeux de santé publique. En tout cas, personnellement, c’est la ligne que j’ai choisie.

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendements n° 194 rectifié et n° 373 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 478 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 564 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mmes Grelet-Certenais, Lienemann et Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Blondin, Ghali et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – L’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant la substance active de la famille du glyphosate est interdite sur le territoire national à compter du 1er janvier 2021.

« Des dérogations à l’interdiction mentionnée au premier alinéa du présent III peuvent être accordées jusqu’au 1er janvier 2022 par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé.

« L’arrêté mentionné au deuxième alinéa du présent III est pris sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui compare les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active de la famille du glyphosate autorisée en France avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles.

« Ce bilan porte sur les impacts sur l’environnement, sur la santé publique et sur l’activité agricole. Il est rendu public dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 1313-3 du code de la santé publique.

« L’interdiction mentionnée au premier alinéa du présent III s’accompagne de la mise en place d’un étiquetage de l’ensemble des produits bruts ou transformés, mis en vente en France, ayant été traités par un produit contenant la substance active de la famille du glyphosate, dans des conditions déterminées par décret. »

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Nos concitoyens attendent de pied ferme que nous prenions des mesures concrètes pour préserver leur santé et assurer une transition réussie et durable vers l’agroécologie, en interdisant le recours aux produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille du glyphosate.

Cet amendement vise donc à interdire l’utilisation de ce produit à compter du 1er janvier 2021, avec de très rares dérogations jusqu’au 1er janvier 2022 pour les usages et les pratiques agricoles qui, sans ce produit, pourraient être en situation d’impasse au regard des leviers d’action et des connaissances actuels.

Le glyphosate a été classé comme cancérogène probable pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer, le CIRC, organe dépendant de l’OMS, en 2015. Depuis cette date, cette classification a fait l’objet de nombreuses controverses, voire de revirements, mais le doute sur sa toxicité demeure plus que jamais.

Un récent rapport de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, démontre que de nombreuses alternatives au glyphosate sont d’ores et déjà disponibles, notamment pour les grandes cultures, la viticulture et l’arboriculture, qui sont les filières les plus consommatrices de ces produits.

En 2017, la France a voté contre le renouvellement pour cinq ans de l’autorisation de mise sur le marché du glyphosate, en optant pour un délai plus court de trois ans. Nous n’avons malheureusement pas été entendus.

Afin de sensibiliser les consommateurs à l’arrêt progressif de l’utilisation du glyphosate, cet amendement prévoit par ailleurs un étiquetage de l’ensemble des produits commercialisés en France, qu’ils soient bruts ou transformés, qui ont été traités par un produit contenant cette substance.

Il s’agit non pas d’une utopie ou d’une lubie, mes chers collègues, mais bien de la concrétisation d’une promesse de campagne du Président de la République. Il s’agit désormais de passer de la parole aux actes.

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 564 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 346 rectifié

M. le président. L’amendement n° 375 rectifié, présenté par M. Jacquin, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 478 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano et Corbisez, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – À compter du 1er juillet 2021, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active du glyphosate est interdite sur le territoire national.

« Des dérogations à l’interdiction mentionnée au premier alinéa du présent III peuvent être accordées jusqu’au 1er juillet 2023 par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé.

« L’arrêté mentionné au deuxième alinéa du présent III est pris sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et de l’Institut national de la recherche agronomique, qui compare les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active du glyphosate autorisés en France avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles.

« Ce bilan porte sur les impacts sur l’environnement, sur la santé publique et sur l’activité agricole. Il est rendu public dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 1313-3 du code de la santé publique. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. À l’issue des débats de cet après-midi, j’ai préféré dîner seul pour réfléchir. J’ai pris conscience d’avoir été un peu « braque » jusqu’à présent, je vais essayer de ne plus l’être, mais ce ne sera pas facile… (Sourires.)

Cet amendement prévoit d’inscrire l’interdiction du glyphosate dans la loi, conformément à un engagement du Président de la République pris au mois de novembre dernier, à la suite de la décision européenne de renouvellement pour cinq ans de l’autorisation de mise sur le marché de cette substance, et réitéré lors du dernier salon de l’agriculture.

L’Union européenne souhaitait un renouvellement pour dix ans de l’AMM, et c’est la position de la France qui a finalement permis d’en ramener la durée à cinq ans. Le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, préconisait de s’en tenir à trois ans. Le Président de la République l’avait suivi, hors dérogations. Les députés, très majoritairement ceux d’En Marche, ont souhaité inscrire dans la loi l’interdiction du glyphosate d’ici à trois ans, hors dérogations, pour émettre un signal fort.

Depuis, le sujet a été médiatisé, et c’est tant mieux ! Cet après-midi, j’évoquais l’influence des groupes de pression. Désormais, il existe également des groupes de contre-pression,…

M. Daniel Gremillet. De tous les côtés !

M. Joël Labbé. … des collectifs regroupant citoyens et élus locaux qui nous demandent quelle est notre position sur ce sujet et aussi quelles sont nos propositions alternatives. Quoi qu’il arrive, cette évolution est définitive. Je m’en réjouis, parce que nous allons devoir prendre nos responsabilités en notre âme et conscience. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 478 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 232 rectifié

M. le président. Les amendements nos 346 rectifié et 640 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 346 rectifié est présenté par M. Amiel, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Gattolin, Bargeton, Mohamed Soilihi, de Belenet, Chasseing, Théophile, Haut, Yung, Karam, Richard, Hassani et Dennemont, Mme Mélot, MM. Decool et Guérini et Mme Jouve.

L’amendement n° 640 rectifié est présenté par Mme Keller, M. Grosdidier, Mme Garriaud-Maylam et M. Saury.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – L’utilisation des produits phytosanitaires contenant la substance active du glyphosate est limitée.

« Un décret en conseil d’État fixe les modalités d’interdiction des produits phytosanitaires contenant la substance active du glyphosate à compter du 1er avril 2021 ainsi que les mesures transitoires pour la période allant du 1er avril 2021 au 1er mai 2023 au plus tard, en tenant compte de l’absence éventuelle d’alternatives pour certains usages ou conditions particulières.

« Le décret mentionné au deuxième alinéa du présent III est pris sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui compare les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytosanitaires contenant la substance active du glyphosate autorisés en France avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles.

« Ce bilan est rendu public dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 1313-3 du code de la santé publique. »

La parole est à M. André Gattolin, pour défendre l’amendement n° 346 rectifié.

M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, braque ou pas braque, je vous salue tous ! (Sourires.)

Nous souhaitons voir inscrire l’interdiction du glyphosate dans la loi. Ce n’est pas là, de notre part, un acte de défiance à l’égard du Gouvernement, ni bien sûr du monde agricole.

Nous trouvons que la formulation de cet amendement permet d’atteindre une position d’équilibre.

Équilibre dans la temporalité, tout d’abord : elle est en accord avec la parole présidentielle et la prise de position de la France sur l’arrêt de l’utilisation du glyphosate en 2021, tout en prévoyant des mesures transitoires jusqu’en 2023. Cela va dans le sens de l’engagement gouvernemental de mettre fin aux principaux usages du glyphosate d’ici à trois ans au plus tard, et à l’ensemble des usages d’ici à cinq ans.

Équilibre dans la mesure, ensuite : le dispositif de l’amendement prend en compte les réalités économiques du secteur agricole et des filières en jeu, et il évite les effets néfastes d’une distorsion de concurrence.

Équilibre, également, dans la vision à long terme : si nous sommes parfaitement conscients de la nécessité de ne pas surtransposer les directives européennes – je crois suffisamment connaître le droit européen pour dire que tel n’est pas le cas ici -, nous concevons aussi la difficulté de trouver des solutions de remplacement, que ce soit par la recherche de nouvelles molécules ou par de nouvelles techniques d’exploitation des terres. C’est l’occasion pour notre pays d’être à la pointe de l’innovation dans ce secteur.

Équilibre, enfin, dans une perspective de santé publique : s’il faudra sûrement remettre à plat la méthodologie des études toxicologiques menées en France, y compris dans ce domaine, notre pays s’honore à prendre une position ferme sur le glyphosate, alors que l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des maladies professionnelles et des accidents de travail, l’INRS, rappelle que 30 % des maladies professionnelles reconnues en Europe seraient d’origine chimique.

Telles sont les raisons pour lesquelles je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 640 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Le glyphosate a bénéficié, à la fin de l’année 2017, d’une autorisation européenne réduite à cinq ans, au lieu des dix années habituelles. Le Président de la République a pris l’engagement de réussir cette sortie du glyphosate en trois ans au lieu de cinq, sans laisser les agriculteurs sans solution. Un groupe de suivi de cette sortie a été mis en place, le Gouvernement s’étant emparé de cette question.

Le glyphosate a été classé comme cancérigène probable par le Centre international de recherche sur le cancer, qui dépend de l’OMS. L’Agence européenne de sécurité des aliments tout comme l’Agence européenne des produits chimiques ont pour leur part estimé qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre l’exposition au glyphosate et le développement de cancers chez les humains.

L’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, déclare ne pas disposer de preuves suffisantes pour classer le glyphosate comme substance cancérigène. Néanmoins, dès qu’elle dispose d’éléments probants, elle agit, comme ce fut le cas lorsque l’effet cocktail entre le glyphosate et l’un de ses adjuvants, la tallowamine, s’est déclaré. Elle a alors retiré l’autorisation de mise sur le marché de tous les produits associant ces deux substances.

Pour ces motifs, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur ces amendements de surtransposition, dont l’adoption pénaliserait lourdement nos agriculteurs, et elle a réaffirmé la nécessité de faire évoluer les dispositions sur le glyphosate à l’échelle européenne.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre de lagriculture et de lalimentation. Je veux d’abord rassurer le sénateur Labbé en lui disant qu’à aucun moment je ne me suis senti « braqué » par ses interventions. Il est normal de se dire les choses dans la discussion parlementaire et, depuis bientôt huit jours que nous débattons ensemble, je ressens un respect mutuel, quelles que soient les opinions que nous défendons.

Le sujet que nous abordons a fait l’objet de nombreux commentaires, parfois erronés. Tout d’abord, il n’y a jamais eu de promesse présidentielle d’inscrire dans la loi l’interdiction de l’utilisation du glyphosate. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Cécile Cukierman. Il y a eu des engagements !

M. Stéphane Travert, ministre. Le Président de la République a annoncé, après que l’Union européenne eut voté le renouvellement pour cinq ans de l’autorisation du glyphosate, que tous les moyens seraient mis en œuvre en matière de recherche et d’innovation, avec les agriculteurs, afin que nous puissions cesser d’utiliser ce produit dans les trois ans. Voilà où nous en sommes.

Pourquoi inscrire l’interdiction du glyphosate dans la loi, dès lors que nous prenons un engagement fort et que nous mobilisons des moyens pour pouvoir cesser de recourir au glyphosate dans les trois ans ?

La loi française a déjà connu des inscriptions de cet ordre sur d’autres sujets. Souvenons-nous du Grenelle de l’environnement et de l’objectif de 20 % de produits bio dans les menus des cantines. Aujourd’hui, nous en sommes à 2,9 %… L’engagement était inscrit dans la loi, mais il n’a pas été tenu. C’est nous qui allons l’atteindre.

De même, il avait été prévu que 20 % des surfaces agricoles seraient consacrées à l’agriculture biologique en 2020. Aujourd’hui, nous en sommes à 6,5 %. Nous avons fixé un objectif ambitieux de 15 % à l’horizon de 2022, et il faudra le tenir.

Le Gouvernement s’est donc engagé à sortir du glyphosate dans les trois ans, sans laisser les agriculteurs sans solution. L’INRA a indiqué qu’il existait des alternatives. Il convient maintenant d’analyser les conséquences de leur mise en œuvre. Sur le plan économique, comment valoriser les produits sans glyphosate ? Sur le plan sanitaire, comment gérer les plantes toxiques ? Sur le plan environnemental, comment éviter la pollution, notamment de l’air ? Sur le plan social, quelles seront les conséquences en termes de main-d’œuvre pour les agriculteurs ?

Cette ambition a été plusieurs fois affirmée, tout en soulignant que, pour certains usages - les cultures en pente, l’agriculture de conservation et la culture des légumes pour l’industrie -, il n’existe pas d’alternative aujourd’hui. Mais personne ne sera laissé sans solution.

Nicolas Hulot et moi-même avons reçu vendredi dernier, en présence de nombreux parlementaires, l’ensemble des représentants de la filière, d’amont et d’aval. En effet, la stratégie du Gouvernement repose sur un engagement de tous : les agriculteurs, bien sûr, mais aussi l’aval des filières. Nous ne souhaitons pas faire peser tout le poids de cette responsabilité sur les agriculteurs. Nous voulons au contraire permettre une transition durable et mature, en impliquant à la fois les industriels et la distribution, que nous avons réunis, avec Nicolas Hulot, il y a huit jours. Nous avons demandé à chacun des acteurs de nous faire part, sous trois semaines, de leurs engagements en matière de réduction des usages du glyphosate et de valorisation des produits sans glyphosate.

De son côté, l’État prend aussi des engagements. Nous mettons à la disposition des agriculteurs un centre de ressources, une banque de solutions. Les lycées agricoles, les fermes défis, les unités de l’INRA et le réseau des CIVAM, les centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural, seront mis à contribution pour diffuser les bonnes pratiques.

Le centre de ressources s’appuiera sur une task force pilotée par les deux ministères, avec l’appui de la Cellule de coordination nationale recherche innovation transfert mise en place autour de l’INRA, de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, l’APCA, et des instituts techniques agricoles fédérés au sein de l’ACTA.

Le Gouvernement a fait le choix d’en appeler à la responsabilité de tous les acteurs, qui ont exprimé leur totale adhésion à cette démarche. Pour cette raison, je suis défavorable aux amendements qui ont été présentés. L’inscription dans la loi ferait peser sur les seuls agriculteurs les surcoûts liés à la diminution de l’utilisation du glyphosate. Or chaque maillon de la chaîne - producteur, distributeur, transformateur - doit contribuer à cet effort. Elle affaiblirait en outre la dynamique recherchée par le Gouvernement, qui est fondée sur la mobilisation, la responsabilisation de tous les acteurs, la confiance, le pragmatisme, la ténacité, une volonté sans faille.

Vous serez bien évidemment tenus informés des travaux réalisés par les deux ministères. Nous reviendrons tous les trois mois devant la commission des affaires économiques ou devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, selon votre souhait, pour vous dire comment nous avançons avec les agriculteurs et comment, dans les trois ans, nous trouverons les solutions nécessaires !

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Notre amendement porte sur un enjeu environnemental et de santé publique important. Il a pour objet de protéger notre pays, nos concitoyens contre un produit dont il est raisonnable de penser qu’il est dangereux à bien des égards.

Étude après étude, ces dangers se révèlent plus évidents. En 2002, des chercheurs de la station biologique de Roscoff établissent le caractère cancérigène probable du glyphosate sur l’embryon d’oursin. En 2012, un bond du nombre de tumeurs et de la mortalité chez les rats exposés au Roundup est observé par le Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique. En 2015, enfin, c’est au tour du Centre international de recherche sur le cancer, rattaché à l’OMS, de définir le glyphosate comme un cancérogène probable pour l’homme.

Dans les pays où le glyphosate a été utilisé le plus intensivement, sa toxicité fait peu de doute. En Argentine, où l’agriculture intensive est tout particulièrement pratiquée, son introduction s’est accompagnée d’une explosion du nombre de cancers et de malformations. Le Sri Lanka, il y a quelques années, a interdit le glyphosate, car il causait des maladies rénales chroniques pouvant être fatales, surtout avec un effet cocktail avec les métaux lourds.

Nous reconnaissons les difficultés d’une interdiction du glyphosate pour les agriculteurs dont le mode d’exploitation est lié à l’emploi de ce pesticide, y compris en termes de matériels agricoles utilisés, mais les enjeux de santé sont tels qu’il faut changer. Cette dépendance a, de toute façon, de graves inconvénients. Elle a des effets délétères, notamment sur le sol : ravinée par les pluies, la couche fertile s’en va, ce qui provoque des coulées de boue, et la terre s’appauvrit.

Il faut donc affirmer une volonté politique forte, assortie de mesures d’accompagnement, et veiller à prévenir la concurrence déloyale liée à des importations de produits traités par le glyphosate.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. On parle du glyphosate parce que c’est un produit dangereux, mais nous aurions aussi bien pu évoquer les nitrites présents dans la charcuterie.

Comme je le disais lors de la discussion générale, monsieur le ministre, trois enjeux, qui doivent être traités conjointement, sous-tendent ce texte : la santé, l’environnement et l’économie.

En vertu du principe de précaution, nous demandons l’arrêt de l’utilisation du glyphosate d’ici à 2021, voire d’ici à 2022, s’il le faut, le temps que vous trouviez, avec votre collègue Nicolas Hulot, des solutions de remplacement. Concomitamment, dans une optique de transparence et de protection de la santé du consommateur, nous réclamons un étiquetage précis des produits alimentaires, bruts ou transformés, ayant été traités par le glyphosate, que ce soit les farines, les biscuits, les pâtes… Cela vaut aussi, naturellement, pour les produits importés.

M. le président. Veuillez conclure !

M. Henri Cabanel. Lorsqu’un citoyen va acheter sa baguette de pain, il doit savoir d’où vient la farine !

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je vais m’attacher, encore une fois, à montrer les incohérences du discours et, pire, les incohérences des actes !

Dans son discours à la Sorbonne, Emmanuel Macron disait : « L’exigence des Européens, c’est d’avoir aussi confiance dans les experts qui nous éclairent. Nos récents débats sur le glyphosate, les perturbateurs endocriniens montrent la nécessité d’évaluation scientifique européenne plus transparente, plus indépendante, d’une recherche mieux financée qui permet d’identifier les risques et de proposer des alternatives. C’est indispensable. Nous avons aujourd’hui des débats politiques qui, parfois, cherchent à se substituer au débat scientifique. C’est la science qui doit éclairer la dangerosité, mais qui doit ensuite, de manière indépendante, transparente, indiquer les alternatives possibles scientifiquement démontrées. En aucun cas cette science ne doit s’effacer au profit d’engagements politiques qui deviennent à ce moment des paroles de sachants ou des paroles d’autorité ni a fortiori ne doivent accepter de laisser la place à une parole publique qui est celle de lobbies, d’intérêts industriels et qui construisent l’opacité sur des décisions collectives qu’attendent nos concitoyens. »

Nous devrions, d’après ce discours, faire confiance aux scientifiques. Or, dans un entretien publié par un quotidien renommé, le directeur de l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, Bernhard Url, affirme clairement, au sujet du glyphosate : « On mélange science et politique. » Cette même personnalité défend le sérieux de l’évaluation concluant que l’herbicide n’est pas cancérigène.

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas une vraie étude !

M. Laurent Duplomb. Alors, que fait-on ? Ce ne sont pas de vraies études ? Ce ne sont pas de vrais scientifiques ? Nous en restons à des discussions de comptoir, et l’on s’apprête à faire tout et n’importe quoi !

Monsieur le ministre, je suis tout de même d’accord avec vous sur un point : vous avez raison de vous opposer à ces amendements. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. J’entends dire qu’il faut écouter les scientifiques, mais il y a scientifiques et scientifiques… (M. Laurent Duplomb sexclame.) Il y a ceux qui, à la suite d’études scientifiques répétées, dénoncent le caractère cancérogène du glyphosate.

On nous reproche de ne pas être des scientifiques, mais on peut se faire expliquer la science ! Le glyphosate est un désherbant total, ce qui veut dire qu’il détruit tous les végétaux (Mais non ! sur des travées du groupe Les Républicains.), à l’exception de ceux qui sont résistants au glyphosate, évidemment. (Exclamations ironiques sur les mêmes travées.)

Des études américaines ont démontré que la nature est si bien faite que, au fil du temps, des plantes adventices finissent par réapparaître en milieu hostile. Il faut alors, pour les éliminer, rajouter du glyphosate ou faire appel à d’autres molécules. Là, nous jouons contre la nature, et pas avec elle.

Je compte organiser à l’automne au Sénat une projection du film de Marie-Monique Robin, Le Roundup face à ses juges, en présence de l’auteur, afin que vous preniez conscience de l’importance du sujet.

Certains diront que, sans glyphosate, on ne peut rien faire. Pourtant, il y a eu un avant-glyphosate : l’agriculture arrivait à produire sans cette substance. Le glyphosate et le soja transgénique sont apparus en même temps. Il faut le savoir, une partie importante des paysans sud-américains ont été écartés de leurs terres pour laisser la place à la culture intensive de soja transgénique et contraints d’aller vivre dans des bidonvilles. On a aussi déforesté. En important du soja transgénique, nous contribuons à créer cette situation terrible, inadmissible !

Le moment est important.

M. le président. Il faut conclure !

M. Joël Labbé. Voter ces amendements, c’est garantir que, dans trois ans, avec, certes, des dérogations, le glyphosate sera interdit sur notre territoire.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. À vous entendre, monsieur le ministre, plus aucune date n’est prévue, pour l’heure, pour que la France cesse la production et l’utilisation de ce produit hautement toxique qu’est le glyphosate. Il s’agit là d’un recul regrettable, sur un sujet qui mériterait que l’exécutif n’ait pas la main qui tremble.

Il y a de cela quelques mois, le débat, dans notre pays, tournait autour de la date et du délai jugés les plus judicieux pour l’interdiction du glyphosate. Aujourd’hui, nous en sommes finalement à déterminer si, oui ou non, il est scientifiquement prouvé que ce produit est néfaste pour la santé et s’il faut réellement songer à l’interdire…

J’entends déjà les commentaires, mes chers collègues : nous sommes des législateurs, ne nous enfermons pas dans un débat technico-scientifique. Nous pouvons tous invoquer des études scientifiques sur le sujet, mais allons jusqu’au bout, en indiquant qui les finance. Quel est le degré d’indépendance de certaines d’entre elles ? Évitons les discussions de comptoir. Si les études scientifiques doivent nous éclairer, nous devons aussi entendre cette envie qui s’exprime fortement dans la société de sortir d’une agriculture productiviste qui détruit aujourd’hui l’environnement et qui détruira, dans les années à venir, la planète.

Monsieur le ministre, vous nous dites que si nous votons ces amendements, ce sont les agriculteurs qui paieront demain, mais soit on admet que l’enjeu est tel en termes de santé publique qu’il faut interdire le glyphosate, en accompagnant nos agricultrices et nos agriculteurs dans cette voie, y compris financièrement, s’il le faut, par de la formation, pour qu’ils puissent sortir de ces pratiques agricoles dévastatrices pour eux-mêmes, pour les autres et pour la planète, soit, parce que l’on refuse de payer, on décide que la situation n’est pas si grave et on continue de s’empoisonner les uns les autres : à la vôtre, on se reverra dans quelques années !

En tout cas, nous devons avoir ce débat. Nous avons déposé une demande de vote par scrutin public sur notre amendement, parce qu’il est de notre responsabilité à toutes et à tous de nous positionner publiquement sur cette question devant les Françaises et les Français.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je souhaite revenir sur deux ou trois arguments qui me surprennent. Assurément, le glyphosate élimine les plantes, mais il y a des plantes résistantes. C’est comme les antibiotiques : ils combattent les microbes, mais, quand ils sont mal utilisés, des résistances au traitement apparaissent. Faut-il pour autant supprimer les antibiotiques ?

M. Joël Labbé. Leur usage systématique, oui !

Mme Cécile Cukierman. Leur emploi n’est pas automatique !

M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues, seul M. Savary a la parole !

M. René-Paul Savary. Le tout est qu’ils soient bien utilisés, précisément. Il faut être modéré dans l’argumentation.

Par ailleurs, c’est vrai, on mélange science et politique. Dans les Hautes-Alpes, un tract indiquant que « manger de la viande tue » a été distribué dans les collèges et les lycées. (« Eh oui ! » sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Joël Labbé. On n’a jamais défendu cette position !

M. René-Paul Savary. On y mélange les problèmes : délocalisation des populations, appauvrissement, chômage, bidonvilles… On retrouve d’ailleurs les arguments avancés par M. Labbé. Parler de bidonvilles dans une discussion sur le glyphosate…

M. Joël Labbé. J’ai parlé des bidonvilles d’Amérique du Sud, et c’est une réalité !

M. René-Paul Savary. On voit bien qu’une pression médiatique s’exerce au sujet de certains produits ou de certaines substances, et l’on en vient presque à se sentir coupable si l’on veut réfléchir à ces questions.

Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vous : un groupe de suivi doit être mis en place. Les agriculteurs ont déjà fait des propositions tout à fait intéressantes. Ils n’ont pas attendu que nous ayons ce débat ! (M. le ministre acquiesce.) Ils travaillent sur ce sujet depuis un certain nombre d’années, et ils vous ont proposé de cosigner des contrats de solutions, qui présentent un certain nombre d’innovations en termes de pratiques culturales, pouvant constituer la réponse à notre préoccupation unanime de faire en sorte que, dans le cadre d’une stratégie agricole bien définie, l’on parvienne, à terme, à cesser d’utiliser certaines molécules.

Je soutiendrai, là encore, la position de Mme le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, pour explication de vote.

M. Pierre Louault. Ce débat quelque peu déraisonnable est emblématique de la volonté de certains d’en finir avec une agriculture moderne, en oubliant les progrès permis, par exemple, par l’agriculture sans labour en termes de stockage de carbone dans le sol ou d’enrichissement du sol. Madame Cukierman, il est permis de raconter des bêtises, mais sachez que le Roundup permet de maintenir tout le carbone en surface du sol et d’enrichir celui-ci. (Mme Cécile Cukierman sexclame.) Allez voir des experts comme Lucien Séguy, allez voir les agriculteurs qui font la démonstration de tout cela depuis trente ans !

Je n’essaierai pas de convaincre…

M. Pierre Louault. … ceux qui s’attachent à des symboles et qui n’ont pas envie d’entendre.

Mme Cécile Cukierman. Tous les sachants ne sont pas de votre côté !

M. Pierre Louault. Le Président de la République et le Gouvernement ont pris l’engagement de réduire puis de supprimer l’utilisation du glyphosate. Cela se fera peut-être un peu plus en douceur que ne le voudraient ceux qui s’opposent mordicus au glyphosate, mais cela se fera dans la raison, en permettant, je l’espère, aux agriculteurs de trouver des techniques alternatives, et non des produits chimiques de remplacement. Je vous le garantis : si l’on interdit aujourd’hui le glyphosate, demain c’est toute une chimie alternative qui émergera, sans doute beaucoup plus polluante et nocive que le glyphosate.

Dans tout ce débat, l’agriculture est aussi un peu un symbole. On ne s’inquiète pas des dégâts causés par le tabac, le téléphone portable, la malbouffe, les gaz d’échappement des automobiles. Il a été question cet après-midi d’interdire le traitement des terres agricoles à une certaine distance des habitations. Pour ma part, j’aimerais qu’il en aille de même pour la circulation des voitures, qui provoque des dégâts encore plus importants.

Soyons raisonnables, dépassionnons un peu le débat, et nous verrons que, demain, les choses iront progressivement en s’améliorant. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je suis d’accord pour dépassionner le débat, car il faut sortir des caricatures. Monsieur le ministre, je vous crois sincère, de même que Nicolas Hulot. J’ai même envie de croire le Président de la République sincère…

Monsieur le ministre, parce que je vous crois sincère, je ne vous comprends pas. Vous dites qu’il faut mettre fin à l’utilisation du glyphosate d’ici à trois ans : eh bien, inscrivons-le dans la loi, mettons en œuvre la sortie du glyphosate sur ces trois années et passons à autre chose ! J’espère vraiment que c’est à cela que nous allons aboutir.

De temps en temps, il faut aussi écouter les sages. Nous en avons quelques-uns dans notre pays. Hubert Reeves nous dit que les décisions que nous prenons aujourd’hui vont influer sur l’avenir de l’humanité. Cela fera rire certains, mais, en l’occurrence, il parle non pas des abeilles, mais des vers de terre. Mes chers collègues, je ne sais pas si vous avez déjà mis un coup de bêche dans un champ traité au glyphosate.

M. Pierre Louault. Oui, et je vous y emmène quand vous voulez ! (Mme Cécile Cukierman sexclame.)

M. Guillaume Gontard. Dans un tel champ, il n’y a plus de vers de terre !

M. Pierre Louault. C’est faux !

M. le président. Mon cher collègue, je vous en prie, seul M. Gontard a la parole !

M. Guillaume Gontard. Des études le montrent, il n’y a plus un seul ver de terre, plus un seul insecte. Cette disparition des vers de terre, des insectes, de la biodiversité est aussi grave que le réchauffement climatique. À un moment, il faut savoir passer à autre chose.

Je suis le premier à dire qu’il ne faut pas opposer un type d’agriculture à un autre. Ce n’est absolument pas le but. Il faut accompagner les agriculteurs dans cette transition, en y mettant les moyens nécessaires. Ce délai de trois ans permettait à cet égard de fixer un véritable objectif. On a parlé de la formation, on sait vers quel type d’agriculture il convient d’aller. Maintenant, il y faut de la volonté politique ! J’en appelle à votre sincérité, monsieur le ministre, et j’espère que vous irez dans cette direction.

S’agissant des ravages du glyphosate, je voudrais vous parler, au-delà des études, du cas de la famille Grataloup, dans mon département, l’Isère.

M. le président. Il faut conclure, cher collègue !

M. Guillaume Gontard. Elle vient de porter plainte contre Monsanto, qu’elle rend responsable de la malformation d’un enfant qui a déjà subi de nombreuses opérations. Les méfaits du glyphosate, on les connaît !

M. le président. Mes chers collègues, j’appelle chacun d’entre vous à bien respecter son temps de parole. Vous êtes nombreux à vouloir vous exprimer. Si nous voulons terminer la discussion de ce texte ce soir, il faut faire cet effort. (Mme la présidente de la commission des affaires économiques et M. le rapporteur pour avis applaudissent.)

La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Il n’y a pas, d’un côté, les pollueurs, et, de l’autre, les naturels.

Si, aujourd’hui, on supprime le glyphosate, une autre molécule sera, dès demain matin, mise sur le marché et vendue à un prix plus élevé.

Monsieur le ministre, je voudrais vous livrer un chiffre : en 2016, cinquante publications de l’INRA, soit 1 % du total, portaient sur l’agriculture bio. Voilà un chiffre assez révélateur !

Monsieur le ministre, il faut une volonté politique. C’est vous qui pouvez donner l’orientation nécessaire à l’INRA, en lui enjoignant d’accompagner les agriculteurs et de promouvoir une autre agriculture. Si les recherches n’aboutissent pas rapidement, on laissera les agriculteurs au milieu du gué, en leur imposant une sortie du glyphosate sans leur proposer des alternatives validées scientifiquement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Ce débat sur le glyphosate est passionné ; le contraire eût été étonnant. Personnellement, cela fait plus d’un an que je travaille sur le dossier. J’ai rédigé un premier rapport au nom de la commission des affaires européennes, à la suite de la « crise » du glyphosate, dont nous avons pu apprécier les dégâts. Il y a eu une véritable crise de confiance de l’opinion publique à l’égard d’agences telles que l’ANSES, l’EFSA ou l’ECHA.

Je le disais en préambule, il y a un temps pour tout : un temps pour les inquiétudes, pour la peur, un temps pour retrouver sérénité et lucidité. Je travaille avec notre collègue Pierre Ouzoulias dans le cadre de l’OPECST, qui a été saisi par les commissions des affaires économiques et des affaires européennes de l’Assemblée nationale. Nous allons produire un rapport en octobre. Je le redis, plus la littérature s’accumule sur le sujet, moins je suis convaincu du caractère cancérigène du glyphosate…

Faisons un peu l’historique de ce dossier. Les gros problèmes que nous avons connus étaient dus non pas spécifiquement au glyphosate, mais à des spécialités contenant du glyphosate et un coformulant, la tallowamine, qui est un tensioactif à pouvoir mouillant, dont la fonction est d’augmenter l’absorption du produit par les feuilles. Cette substance s’est révélée être un redoutable toxique en milieu aquatique, pour toutes les espèces. Elle a fait d’énormes dégâts dans le golfe du Mexique, au Laos, au Cambodge, en Thaïlande, où les gens puisent l’eau dans les rizières. L’ANSES et d’autres agences dans le monde ont interdit toutes les spécialités contenant de la tallowamine.

S’agissant du glyphosate proprement dit, je reçois quantité d’études réalisées dans le monde entier : aucune, à part celle du CIRC, ne démontre une quelconque dangerosité ou cancérogénicité du glyphosate, dans n’importe quelles conditions d’utilisation. Si l’on me pose la question de savoir si le glyphosate est cancérigène, je réponds donc clairement « non ». Telle est la conclusion à laquelle aboutissent les études menées par l’ANSES, l’INSERM, le CNRS et nombre d’agences étrangères.

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, il faut conclure.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Tout le monde se demande comment sortir du glyphosate. Pour ma part, je pose la question suivante : pourquoi en sortir ? Écoutons cette agence extraordinairement performante qu’est l’ANSES. Personne n’a été en mesure de produire une étude montrant la cancérogénicité du glyphosate. Je pense donc que nous ne nous posons pas la bonne question.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je vais ramener un peu de bonne humeur, parce qu’il en faut, en me référant à la discussion que j’ai eue avec Daniel Gremillet la semaine dernière. Notre collègue avait raison sur un point : nous ne sommes pas des scientifiques. Tout le week-end, j’ai donc relu les avis émis par les agences, qui ne sont pas tous convergents, monsieur Duplomb.

Ainsi, la seule agence à déclarer le glyphosate comme probablement cancérigène est le CIRC. D’autres agences, telles que l’OMS, l’ECHA ou l’EFSA, ont pris la position inverse. Toutes se sont fondées sur des compilations d’études. Les ONG, quant à elles, continuent de nous alerter. Dans ces conditions, comment y voir clair ? J’ai identifié quelques problématiques.

Concernant les études sur lesquelles sont fondés ces avis, quatre-vingt-seize scientifiques indépendants reprochent à l’EFSA de prendre en compte des études financées par des industriels, dont seuls les résultats sont accessibles. Or, si l’on ne connaît pas la méthodologie d’une étude, il est impossible de savoir si elle est solide, si elle comporte des biais, quels seuils de significativité ont été retenus. C’est pourtant nécessaire, d’autant plus si elle a été financée par un industriel intéressé aux résultats.

Se pose également la question des risques et des niveaux d’exposition pour les agriculteurs et ceux qui vivent à proximité de leurs champs, lesquels ne sont pris en compte ni par l’OMS ni par l’ECHA.

Enfin, nous ne pouvons pas écarter, me semble-t-il, les révélations du Monde d’octobre 2007 sur les pratiques de ghostwriting de Monsanto, consistant à écrire en interne des études ou des articles affirmant que le glyphosate n’est pas toxique et à les faire signer, contre rémunération, par des scientifiques reconnus.

Voilà où j’en suis ! Pour conclure, je citerai l’avis de l’OMS sur le glyphosate, car il me semble éclairant pour nos débats. L’OMS souligne qu’il est « peu probable qu’il pose un risque cancérigène pour les humains via l’alimentation ». Or l’alimentation n’est pas le seul facteur d’exposition, le cancer n’est pas la seule pathologie humaine et l’humain n’est même pas seul concerné, puisque la toxicité du glyphosate pour les animaux a été montrée par diverses études.

Surtout, « peu probable » ne veut pas dire « certain ». « Peu probable », cela sous-entend qu’il y a un fort risque. Dès lors, en vertu du principe de précaution, nous ne pouvons pas laisser sur le marché de tels produits, à propos desquels de sérieux doutes persistent.

M. le président. Merci de conclure, cher collègue.

M. Fabien Gay. Aucun consensus scientifique ne s’étant fait jour, respectons le principe de précaution.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Chacun y va de ses études. Ces six dernières années, sept agences internationales en ont réalisées. En termes de risque cancérigène, nous sommes effectivement passés de « probable » à « peu probable », et le directeur général de l’ANSES a dernièrement fait la déclaration suivante : « En l’état actuel des connaissances, nous ne disposons d’aucun élément qui pourrait permettre un retrait immédiat des AMM des formulations à base de glyphosate. »

Je tenais à citer ces propos, puisque chacun se réfère volontiers à l’ANSES quand ses conclusions confortent ses convictions. Je crois savoir que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a organisé une table ronde au Sénat voilà à peu près un mois, au cours de laquelle le directeur général de l’ANSES a même exclu que l’on parle encore, à propos du glyphosate, de substance « peut-être » ou « probablement cancérigène ».

Par conséquent, je rejoins la position de notre rapporteur. Partons des informations que nous apportent des scientifiques neutres, tels que les experts de l’ANSES. Si l’ANSES avait affirmé que le glyphosate posait un problème, personne ici n’aurait hésité, je le crois, à demander l’interdiction immédiate du cette substance, sans attendre 2021. Soyons clairs : on ne joue pas avec la santé, avec la sécurité.

Aujourd’hui, tels ne sont pas les éléments dont nous disposons. En l’état actuel du débat, ce serait une erreur terrible de prendre une décision d’interdiction, qui incombe d’ailleurs à l’Union européenne et à elle seule. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Pierre Louault et Franck Menonville applaudissent également.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 194 rectifié et 373 rectifié bis.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 184 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 301
Pour l’adoption 115
Contre 186

Le Sénat n’a pas adopté. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Je mets aux voix l’amendement n° 564 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 478 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 346 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 346 rectifié
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Article 14 octies (Texte non modifié par la commission)

M. le président. L’amendement n° 232 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 14 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Afin de préserver la biodiversité et les insectes pollinisateurs, les dernières lignes directrices produites par l’autorité européenne compétente et les protocoles internationaux pour mesurer l’impact des produits phytopharmaceutiques sur les abeilles doivent être appliqués dans le cadre des procédures d’homologation des substances actives, adjuvants et phytoprotecteurs, ainsi que des produits finis, comme établi par les règlements européens. »

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Avant d’être autorisé, un produit phytosanitaire doit passer un certain nombre de tests réglementaires attestant de sa sûreté pour la santé et l’environnement. Dès lors, c’est l’intégrité des procédures d’évaluation du risque présenté certains pesticides pour les abeilles que nous souhaitons renforcer par cet amendement. En effet, ces protocoles ont été conçus par des groupes d’experts noyautés par l’industrie agrochimique. Deux ONG ont passé en revue douze méthodes ou pratiques standards utilisées par les agences d’expertise publiques pour évaluer les risques sanitaires ou environnementaux présentés par les produits phytosanitaires : dans 92 % des cas examinés, les techniques en question ont été codéveloppées par les industriels concernés, directement ou indirectement.

C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en 2013 l’EFSA a produit, à la demande de la Commission européenne, des lignes directrices afin d’évaluer l’impact des pesticides sur les abeilles selon un protocole plus indépendant. Dans le même temps, l’OCDE a produit une série de nouveaux protocoles, validés internationalement, pour évaluer plus en détail l’impact des produits phytopharmaceutiques sur les insectes pollinisateurs. Toutefois, la France utilise encore des protocoles antérieurs, qui ne permettent pas d’évaluer l’impact effectif des pesticides.

L’importance de la pollinisation, au cœur de la nature et de ses processus de reproduction, et le rôle joué par les abeilles et autres pollinisateurs pour l’équilibre des écosystèmes ne sont plus à démontrer. C’est pourquoi il est important de suivre toute recommandation européenne ou internationale en la matière, en mettant notre législation en phase avec celle-ci.

Nous souhaitons ainsi compléter l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, qui interdit l’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives de la famille des néonicotinoïdes et de semences traitées avec ces produits, en spécifiant que les dernières lignes directrices produites en matière de préservation de la biodiversité et des insectes pollinisateurs, au niveau européen et international, doivent être prises en compte et appliquées dans le cadre des procédures d’homologation des substances actives, adjuvants et phytoprotecteurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Le document d’orientation de l’Autorité européenne de sécurité des aliments a été publié en 2013. Il propose une évolution importante des méthodes d’évaluation, en vue de pouvoir disposer d’une vision plus exhaustive des risques pour les abeilles et autres insectes pollinisateurs. Depuis sa publication, il a fait l’objet de nombreux échanges entre les experts des États membres. Ces discussions n’ont pas encore abouti et le document n’a toujours pas été validé par l’ensemble des États membres au niveau européen. Le protocole n’est donc pas encore valide et ne peut être appliqué en droit français. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Pour les mêmes raisons, avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 232 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 295 rectifié, présenté par MM. Vanlerenberghe, Henno, Détraigne, Canevet, Delcros et Bonnecarrère et Mme Goy-Chavent, n’est pas soutenu.

Article additionnel après l'article 14 septies - Amendement n° 232 rectifié
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Article 14 nonies

Article 14 octies

(Non modifié)

L’article L. 254-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – À compter du 1er janvier 2019, la formation prévue pour la délivrance ou le renouvellement des certificats mentionnés aux I et II contient des modules spécifiques relatifs à l’exigence de sobriété dans l’usage des produits phytopharmaceutiques et aux alternatives disponibles, notamment en matière de biocontrôle. »

M. le président. L’amendement n° 500 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, et des préparations naturelles peu préoccupantes

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Avec cet amendement, je reviens, une fois encore, sur la question des préparations naturelles peu préoccupantes, les PNPP.

L’objet de cet amendement est de formaliser l’obligation de prévoir l’inclusion, dans les formations nécessaires à l’obtention du certificat permettant l’utilisation, la vente ou le conseil en matière de produits phytopharmaceutiques – communément appelé le certiphyto –, de présentations spécifiques sur l’utilisation de préparations naturelles peu préoccupantes.

Lors de l’examen de l’article 14 ter, le ministre et la rapporteur ont expliqué ne pas vouloir entraver le développement de ces PNPP. Voici une occasion de manifester notre soutien à ces produits, en prévoyant qu’il soit obligatoire de les mentionner comme solutions alternatives dans le programme de formation conduisant à l’obtention du certiphyto.

Je rappelle que tous ces produits sont biodégradables, qu’ils sont utilisés à des concentrations particulièrement faibles et qu’ils ne sont pas préoccupants sur le plan de la toxicité. Ils peuvent souvent être préparés par des agriculteurs ou par de petites entreprises et appartiennent au domaine public. Ils permettent aussi, ce qui est important, l’autonomie des agriculteurs.

Ces produits sont efficaces et largement utilisés sur le terrain. Dans ces conditions, pourquoi ne pas prévoir de former à grande échelle les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques à l’emploi des PNPP ? Vous avez refusé tout à l’heure d’autoriser la simple mise sur le marché de ces produits, alors qu’ils ont déjà été évalués et qu’ils sont constitués d’éléments consommables en alimentation humaine et animale. Par cet amendement, je vous demande de donner un signal fort, montrant que vous souhaitez réellement encourager ces alternatives, qui ont toute leur place pour diminuer l’usage des pesticides.

Ne nous voilons pas la face : il va bien falloir que le monde agricole et le monde en général se passent de tout un tas de molécules, dans l’intérêt de la santé publique et de la biodiversité. C’est pourquoi il est important de préparer dès maintenant la transition, en organisant la formation à l’utilisation des préparations naturelles peu préoccupantes. Des recherches sont à mener dans ce domaine.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement est satisfait, puisque l’article mentionne spécifiquement les alternatives disponibles aux produits phytopharmaceutiques, ce qui inclut, bien sûr, les préparations naturelles peu préoccupantes ou PNPP. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis favorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 500 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 octies.

(Larticle 14 octies est adopté.)

Article 14 octies (Texte non modifié par la commission)
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Article 14 decies

Article 14 nonies

Le titre Ier du livre V du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au cinquième alinéa de l’article L. 510-1, après le mot : « naturelles », sont insérés les mots : « , à la réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et au recours à des solutions alternatives » ;

2° L’article L. 513-2 est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° Elle rend compte des actions menées par les chambres d’agriculture pour promouvoir la réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et le recours à des solutions alternatives en application de l’article L. 510-1, dans le cadre d’un rapport remis chaque année aux ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement. »

M. le président. L’amendement n° 313 rectifié, présenté par MM. Bérit-Débat, Courteau, Dagbert, J. Bigot, Daudigny, Tissot, Roux et Lalande, Mmes Féret et Monier, MM. Duran, Vaugrenard et Lozach, Mme Conway-Mouret, M. Manable et Mmes G. Jourda, Ghali et Grelet-Certenais, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

a) Après le mot :

la

insérer les mots :

promotion de solutions contribuant à la

b) Supprimer les mots :

de l’utilisation

et les mots :

et au recours à des solutions alternatives

II. – Alinéa 4

a) Après le mot :

promouvoir

insérer les mots :

des solutions contribuant

b) Supprimer les mots :

et le recours à des solutions alternatives

c) Après le mot :

année

insérer les mots :

au Parlement et

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Le sous-amendement n° 780, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 313 rectifié

I. – Alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 14

Compléter cet alinéa par le mot :

à

La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 313 rectifié.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Le sous-amendement prévoit deux modifications rédactionnelles. Sous réserve de son adoption, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 313 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 780.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 313 rectifié, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 nonies, modifié.

(Larticle 14 nonies est adopté.)

Article 14 nonies
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Article 14 undecies (supprimé)

Article 14 decies

(Non modifié)

À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 811-1 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « durable », sont insérés les mots : « , à la préservation de la biodiversité et des sols ». – (Adopté.)

Article 14 decies
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Article additionnel après l'article 14 undecies - Amendement n° 444 rectifié ter

Article 14 undecies

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 182, présenté par M. Grand, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 751, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le 9° de l’article L. 5141-16 du code de la santé publique est complété par les mots : « et celles auxquelles est autorisée la publicité pour les vaccins vétérinaires à destination des éleveurs professionnels dans les publications qui leur sont destinées ».

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’article 14 undecies dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, afin d’autoriser la publicité pour les vaccins vétérinaires à destination des éleveurs professionnels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission a supprimé l’article 14 undecies, non pas pour des raisons de fond, puisqu’elle partage les préoccupations du Gouvernement et est également convaincue qu’une publicité auprès des éleveurs permettra un recours plus important aux vaccins dans le but de diminuer le recours aux antibiotiques vétérinaires.

Toutefois, la directive européenne de 2001 précise que la publicité auprès du public, y compris les éleveurs, pour les médicaments vétérinaires délivrés sur prescription, ce qui est le cas des vaccins, est interdite.

Les négociations en cours au niveau européen ont prospéré ; le projet de texte sur le médicament vétérinaire comporte bien une autorisation de la publicité pour ces vaccins auprès des éleveurs. Il faut s’en réjouir, mais le texte n’est pas encore formellement adopté et il ne pourra en outre entrer en application qu’après un certain délai.

Adopter une telle mesure créerait donc une insécurité juridique. La commission se réjouit que la publicité puisse être autorisée à l’avenir au niveau européen, mais elle émet des réserves compte tenu de ce motif de forme.

La commission émet un avis de sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 751.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 14 undecies est rétabli dans cette rédaction.

Article 14 undecies (supprimé)
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Article 15

Article additionnel après l’article 14 undecies

M. le président. L’amendement n° 444 rectifié ter, présenté par M. Jomier, Mme Ghali, M. Daudigny, Mmes Lienemann, Conway-Mouret, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mme Jasmin, M. Féraud, Mmes Guillemot et Espagnac, MM. Roger et Roux, Mme Préville, M. Kerrouche, Mme Féret, MM. Marie et Manable, Mme G. Jourda, M. Tissot et Mmes Taillé-Polian et Conconne, est ainsi libellé :

Après l’article 14 undecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 253-8-… ainsi rédigé :

« Art. L. 253-8-… – Les données relatives à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques mentionnés à l’article L. 253-1 par les exploitants mentionnés à l’article L. 257-1 et enregistrées dans le registre prévu à l’article L. 257-3 sont mises à la disposition du public dans un format ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, sous une forme garantissant leur caractère anonyme. »

La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. L’article 7 de la Charte de l’environnement prévoit que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques ».

De plus, une décision de la Cour européenne de justice du 23 novembre 2016 relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement a précisé que la notion d’« émissions dans l’environnement », au sens de l’article 4 de la directive 2003/4/CE du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement, inclut notamment le rejet dans l’environnement de produits phytopharmaceutiques. Ainsi, cette directive précisant que les États membres ne peuvent prévoir qu’une demande d’accès à des informations relatives à des émissions dans l’environnement soit rejetée s’applique bien aux informations relatives à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques.

Les données de ventes de pesticides par département sont actuellement les seules disponibles. De ce fait, les scientifiques et les citoyens n’ont pas accès aux données relatives à l’utilisation effective de ces produits qui sont détenues par l’administration.

Le présent amendement prévoit d’appliquer à ces données la même transparence que celle qui a été instituée par la loi pour la République numérique pour de très nombreuses données publiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. En application de l’article L. 257–3 du code rural et de la pêche maritime, les exploitants doivent tenir un registre d’utilisation des produits phytosanitaires. Pour autant, ils ne sont pas contraints de le faire au format électronique. Par ailleurs, les autorités publiques ne centralisent pas ces données. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 444 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 14 undecies - Amendement n° 444 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° 455 rectifié

Article 15

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi tendant à modifier le code rural et de la pêche maritime et le code de la consommation afin :

1° De rendre l’exercice des activités mentionnées aux 1° et 2° du II de l’article L. 254-1 du code rural et de la pêche maritime incompatible avec celui de l’activité de conseil à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques autre que celle portant sur les informations relatives à l’utilisation, aux risques et à la sécurité d’emploi des produits cédés ou celle portant sur le conseil spécifique à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, mentionnées à l’article L. 254-7 du code rural et de la pêche maritime, notamment :

a) En imposant une séparation des structures exerçant ces activités ;

b) En assurant l’indépendance des personnes physiques exerçant ces activités ;

c) En permettant l’exercice d’un conseil stratégique, pluriannuel et indépendant ;

d) En permettant la mise en œuvre effective des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques.

L’activité de conseil, séparée de l’activité de vente, doit s’inscrire dans un objectif de réduction de l’usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques ;

2° De réformer le régime d’expérimentation des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques :

a) En fixant des objectifs à atteindre à une date antérieure à 2021 ;

b) En le transformant en régime permanent à périodes successives, avec les adaptations nécessaires à son bon fonctionnement ;

c) En prévoyant son application dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ;

3° De confier aux agents mentionnés à l’article L. 205-1 du code rural et de la pêche maritime et aux agents mentionnés à l’article L. 511-3 du code de la consommation les pouvoirs dont disposent, en application de l’article L. 172-8 du code de l’environnement, les fonctionnaires et agents mentionnés à l’article L. 172-4 du même code ;

4° De confier aux agents mentionnés à l’article L. 205-1 du code rural et de la pêche maritime les pouvoirs d’enquête dont disposent les agents habilités par le code de la consommation, prévus aux articles L. 512-7, L. 512-10 et L. 512-16 du même code.

II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin :

1° (Supprimé)

2° De prévoir les conditions dans lesquelles les obligations fixées aux articles L. 541-15-5 et L. 541-15-6 du même code sont étendues à certains opérateurs de l’industrie agro-alimentaire et de la restauration collective après une expérimentation, d’une durée de six mois, à compter d’une date fixée par l’ordonnance prise en application du présent 2°, dans des associations volontaires ;

3° D’imposer à certains opérateurs de l’industrie agro-alimentaire et de la restauration collective de rendre publics leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire, notamment les procédures de contrôle interne qu’ils mettent en œuvre en la matière ;

4° D’apporter au livre II du code rural et de la pêche maritime les adaptations rendues nécessaires par l’entrée en application des règlements (UE) 2016/2031 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2016 et (UE) 2017/625 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2017 et des actes délégués et d’exécution qu’ils prévoient, y compris en définissant les mesures de protection contre les organismes nuisibles aux végétaux dans les outre-mer, et d’apporter au titre préliminaire et au titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime ainsi qu’au titre IV du livre V du code de l’environnement les modifications éventuellement nécessaires pour assurer la cohérence des dispositions législatives, corriger les erreurs rédactionnelles et abroger les dispositions devenues sans objet.

III. – (Non modifié) Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance prévue par le présent article.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. La question de fond de la séparation capitalistique entre les activités de conseil et celles de vente de produits phytopharmaceutiques est très importante et recouvre des enjeux essentiels.

L’idée est de préserver l’indépendance de l’activité de conseil, en particulier à l’égard des intérêts commerciaux d’une entreprise qui assurerait les deux activités de conseil et de vente. Comment en effet imaginer qu’une entreprise vendant des produits phytopharmaceutiques puisse délivrer des conseils indépendants lorsque ses propres intérêts commerciaux sont en jeu ?

Le conseil est aujourd’hui majoritairement dispensé par les agents commerciaux des coopératives, qui sont intéressées à la fois à vendre davantage d’intrants – semences, engrais, pesticides – et à collecter un volume de récolte maximal.

Nous sommes donc favorables à la séparation capitalistique des activités, même si elle pourrait ne pas suffire à garantir l’indépendance de l’activité de conseil, puisqu’un même groupe peut créer différentes filiales indépendantes sur le plan capitalistique.

Or le conseil est un facteur majeur pour l’évolution de notre agriculture, car il permet de diffuser des connaissances et de modifier les comportements. Plus que la séparation du conseil et de la vente, c’est la qualité du conseil et des conseillers qui doit être l’objet de toutes les attentions. Différents modèles d’organisation existent en Europe et dans le monde. Celui du Canada et du Québec, qui repose sur l’existence d’un ordre des agronomes, devrait nous inciter à approfondir la réflexion.

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, sur l’article.

M. Didier Rambaud. Comme l’a très bien exprimé le Président de la République lors de son discours devant les États généraux de l’alimentation, il ne s’agit plus de passer notre temps à contester le fait que l’utilisation des produits phytosanitaires menace la santé des consommateurs et des agriculteurs, ainsi que la biodiversité, il s’agit de savoir comment nous nous mettons collectivement en situation de traiter ce problème.

Nous soutenons pleinement la trajectoire ambitieuse du Gouvernement pour parvenir à une réduction efficiente de l’utilisation des produits phytosanitaires et nous voulons reprendre l’engagement du Président de la République sur la séparation capitalistique des activités de conseil et de vente.

Certes, il apparaît aujourd’hui que les activités de vente et de conseil sont liées par nature. Cependant, cette situation crée nécessairement un conflit d’intérêts. Nous devons donc prendre nos responsabilités pour faire évoluer le paysage socioéconomique agricole. Cette séparation capitalistique permettra de mettre en place un conseil indépendant, moteur d’une stratégie efficiente permettant réellement l’amélioration des rendements, la protection des exploitations, voire la transition de l’agriculture.

Cette séparation capitalistique va, sans aucun doute, poser des problèmes économiques, en particulier aux structures coopératives. Cependant, il est indispensable de mettre en œuvre cette transformation pour atteindre nos objectifs environnementaux et sanitaires, et tout ce qui peut permettre la diminution de l’utilisation des produits phytosanitaires doit être privilégié.

Il est aujourd’hui nécessaire que les agriculteurs comprennent que le conseil n’est pas gratuit. C’est une réponse au défi sociétal d’une agriculture moins dépendante des produits phytosanitaires. Une nouvelle France agricole a été promue lors des États généraux de l’alimentation, puis au travers de ce projet de loi, que nous ne souhaitons pas voir vider de son sens.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 689 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. A. Bertrand, Mme Costes, MM. Gold et Guillaume, Mme Jouve et M. Vall, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 13

Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :

1° De rendre l’exercice des activités mentionnées aux 1° et 2° du II de l’article L. 254-1 du code rural et de la pêche maritime incompatible avec celui de l’activité de conseil annuel à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques autre que celle portant sur les informations relatives à l’utilisation, aux risques et à la sécurité d’emploi des produits cédés et de modifier le régime applicable aux activités de conseil défini à l’article L. 254-7 du même code et de vente de ces produits, notamment

a) En imposant une séparation capitalistique des structures exerçant ces activités ;

b) En assurant l’indépendance des personnes physiques exerçant ces activités ;

c) En permettant l’exercice d’un conseil stratégique et indépendant ;

d) En permettant la mise en œuvre effective des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques.

L’activité de conseil, séparée de l’activité de vente, doit s’inscrire dans un objectif de réduction de l’usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques ;

La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. J’irai dans le même sens que les deux orateurs qui viennent de s’exprimer.

Cet amendement vise à préciser que la séparation capitalistique en question concerne le conseil annuel individualisé. Il s’agit d’imposer une séparation capitalistique des structures exerçant ces activités, d’assurer l’indépendance des personnes physiques concernées, de permettre l’exercice d’un conseil stratégique et indépendant et de mettre effectivement en œuvre les certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques, les CEPP.

L’activité de conseil, séparée de l’activité de vente, doit s’inscrire dans un objectif de réduction de l’usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques. Nos débats des derniers jours ont montré que nous sommes tous d’accord sur ce point.

Concernant tous les autres conseils spécifiques à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, cet amendement tend à autoriser le Gouvernement à définir, dans l’ordonnance, les conditions d’une séparation entre vente et conseil au sein d’une même structure. L’activité de conseil nécessaire aux CEPP sera alors possible, tout en garantissant l’indépendance à l’égard de l’activité de vente.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 710 rectifié est présenté par MM. Labbé et Dantec.

L’amendement n° 754 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

des produits cédés

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et de modifier le régime applicable aux activités de conseil et de vente de ces produits, notamment :

II. – Alinéa 3

Après le mot :

séparation

insérer le mot :

capitalistique

III. – Alinéa 5

Supprimer le mot :

, pluriannuel

La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 710 rectifié.

M. Joël Labbé. Mes chers collègues, au sein du groupe du RDSE, lorsque nous sommes convaincus, nous mettons le paquet ! (Sourires.) Cet amendement concerne également la séparation capitalistique entre activités de vente et activités de conseil.

Aux termes de la rédaction issue des travaux de la commission, les coopératives et le négoce agricoles vont continuer à assurer tout à la fois les activités de vente et celles de conseil spécifique. Celui qui détermine l’acte d’achat de pesticides par les agriculteurs continuera donc d’être le vendeur. Une simple séparation de facturation n’aura aucun effet en termes d’indépendance du conseil. La situation actuelle est pénalisante pour les agriculteurs, qui ne bénéficient pas d’un conseil indépendant, et au regard de l’objectif de réduire l’utilisation de pesticides.

À propos des coopératives, je viens d’apprendre que le groupe Invivo, dont le siège se trouve dans la commune dont j’ai été maire, vient de vendre sa filiale Neovia, fleuron de la nutrition animale, à un groupe américain, ADM. Voilà ce que donne la stricte logique capitalistique ! Une telle opération nous rend dépendants des États-Unis et présente des risques graves pour notre agriculture et notre alimentation.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 754.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à rétablir les alinéas de l’article 15 qui concernent la séparation entre la vente et le conseil dans leur version issue des travaux de l’Assemblée nationale.

M. le président. L’amendement n° 567 rectifié, présenté par Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mmes M. Filleul, Préville et Tocqueville, M. Fichet et Mme Blondin, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

séparation

insérer le mot :

capitalistique

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement vise à rétablir une disposition supprimée en commission à l’initiative de la rapporteur, à savoir la séparation capitalistique des activités de conseil et de vente pour les produits phytopharmaceutiques. Je considère que c’est une étape nécessaire pour changer de modèle agricole. La personne qui vend, et qui a donc vocation à vendre toujours plus, ne peut pas être la même que celle qui apporte un conseil sur les produits, surtout à l’heure de l’agroécologie et de la nécessité de réduire l’usage des produits phytosanitaires. Je rappelle que cette mesure faisait partie des recommandations de la mission d’information du Sénat de 2012.

J’ai bien entendu les arguments avancés par les défenseurs de la suppression de cette disposition, en particulier celui du risque de surcoût pour les agriculteurs, notamment dans les premiers temps de la réforme. C’est en effet un risque, mais je considère que la difficulté ne doit pas nous amener à renoncer. On nous oppose en outre que cette mesure serait facile à contourner via la création de filiales distinctes au sein d’une même entité. Pour moi, ce n’est pas un argument : cela peut évidemment arriver, mais si le législateur devait être sûr et certain que la loi qu’il écrit n’a strictement aucune chance d’être contournée, notre activité s’en trouverait fortement limitée…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission n’a pas remis en cause le principe de la séparation entre le conseil et la vente ; elle a circonscrit le champ de cette séparation au conseil stratégique individualisé pour lui donner une réelle portée. En effet, c’est bien pour ce conseil que tout conflit d’intérêts serait intolérable.

La commission est pleinement consciente de l’importance du conseil. Or, avec une séparation stricte qui inclurait le conseil spécifique, le risque serait qu’il n’y ait plus de conseil du tout. C’est un risque d’autant plus préoccupant que des plates-formes de vente en ligne proposent des produits phytopharmaceutiques.

Quand une maladie végétale se déclare, l’agriculteur doit, dans l’urgence, savoir vers qui se tourner, et c’est le plus souvent à son fournisseur de solutions, à savoir sa coopérative ou le négoce, qu’il s’adresse.

Il faut aussi noter que la séparation capitalistique signifierait l’impossibilité pour les acteurs d’appliquer le dispositif des CEPP, les certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques, que l’article prévoit de pérenniser.

Enfin, la commission a précisé que, dans la perspective d’un conseil individuel réellement stratégique, celui-ci doit être pluriannuel, car l’agriculteur a besoin d’un appui sur plusieurs années pour favoriser la mise en œuvre d’une stratégie de long terme et de lutte intégrée. A contrario, un conseil indépendant annuel entraînerait une charge excessive pour nos agriculteurs.

La commission estime donc que la rédaction actuelle du texte est équilibrée et pragmatique, car elle assure un compromis entre la nécessaire évolution des activités de vente et de conseil de produits phytopharmaceutiques et les besoins réels des agriculteurs. Par conséquent, la commission donne un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. L’amendement n° 689 rectifié pose problème, parce qu’il porte uniquement sur le conseil. S’il était adopté, il ne serait plus possible de travailler sur la réforme des CEPP. C’est pourquoi j’en demande le retrait au profit de l’amendement n° 754 du Gouvernement.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 567 rectifié, parce que la rédaction de l’article 15 qui résulterait de son adoption resterait insuffisante pour garantir l’absence de conflits d’intérêts pour les vendeurs et les conseillers.

M. le président. Monsieur Guillaume, l’amendement n° 689 rectifié est-il maintenu ?

M. Didier Guillaume. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 689 rectifié est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques. Dans cet hémicycle, nous sommes très nombreux à être favorables à une utilisation la plus précise possible des produits de traitement en agriculture. À mon avis, ces produits seront nécessaires encore longtemps pour pratiquer une agriculture raisonnée à même de répondre aux besoins de la population, tant en quantité qu’en qualité sanitaire. Traiter les plantes contre certaines maladies, c’est d’abord nécessaire pour la santé humaine – je pense principalement aux fongicides.

L’agriculteur, même s’il est de mieux en mieux formé, a besoin de conseils. Je suis tout à fait d’accord pour dire que le conseil doit être séparé des activités de vente. La situation actuelle constitue à cet égard une anomalie. Pour autant, en allant trop loin, on risquerait de créer des charges supplémentaires pour les agriculteurs tout en dégradant la qualité du conseil…

Aujourd’hui, des agriculteurs frontaliers achètent déjà leurs produits en Belgique ou en Allemagne,…

M. Didier Guillaume. En Espagne aussi !

M. Michel Raison, rapporteur. … sans forcément bénéficier de conseils.

Nous souhaitons évidemment que le conseil, qui sera payant, soit surtout dispensé par les chambres d’agriculture. Mais, dès lors que le conseil sera devenu payant, ce sont les agriculteurs qui ont le plus de moyens qui pourront y accéder. Les coopératives offrent une mutualisation, qui permet aux petits agriculteurs de bénéficier de la même qualité de conseil que les autres.

Soyons donc attentifs à ne pas aboutir à une démarche contre-productive en voulant en faire trop. Imposer une séparation capitalistique, aussi bien pour les entreprises privées que pour les coopératives, ne règlera pas le problème : la facture sera plus élevée pour l’agriculteur ou le conseil sera de moins bonne qualité.

M. Gérard Longuet. Et il n’y aura plus d’esprit mutualiste !

M. Michel Raison, rapporteur. C’est pour ces raisons que je soutiens résolument la position de ma collègue rapporteur. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. C’en est presque risible… Il est évident que les activités de conseil et de vente doivent être séparées si l’on veut éviter les conflits d’intérêts ! C’est l’absence d’une telle séparation qui a poussé le monde agricole à surconsommer, comme nous l’avons vu pour les antibiotiques.

Je suis heureux que, pour une fois, ma position rejoigne celle du groupe La République En Marche et du Gouvernement. Je souhaite vivement que le Sénat rétablisse le texte voté par l’Assemblée nationale !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 710 rectifié et 754.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 185 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l’adoption 130
Contre 209

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 567 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 753, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 15

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

1° De modifier la portée de l’obligation fixée à l’article L. 541-15-3 du code de l’environnement pour, d’une part, l’étendre à l’ensemble des opérateurs de la restauration collective et, d’autre part, leur imposer la réalisation d’un diagnostic préalable à la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire incluant l’approvisionnement durable ;

II. - Alinéa 16

Après les mots :

de la restauration collective

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

, en tenant compte notamment des expérimentations menées par les associations volontaires ;

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de rétablir la fixation par ordonnance de l’obligation, pour les opérateurs de la restauration collective, d’un diagnostic préalable à la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire incluant l’approvisionnement durable.

C’est un amendement de cohérence avec celui qui prévoit la suppression de l’article 12 bis AA, afin de rétablir la rédaction de l’alinéa 15 de l’article 15 adoptée par l’Assemblée nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui est déjà satisfait.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je ne comprends pas du tout la cohérence de la démarche du Gouvernement. L’autre jour, il a opposé un avis défavorable à nos amendements visant à ce que la décision prise localement, au niveau des conseils d’école ou des conseils d’administration. Je ne comprends donc pas que, ce soir, le Gouvernement nous présente un tel amendement !

Mme Cécile Cukierman. Je suis d’accord !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 753.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15.

(Larticle 15 est adopté.)

Article 15
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Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° 787

Articles additionnels après l’article 15

M. le président. L’amendement n° 455 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec et Gontard, Mme Benbassa et M. Jomier, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La mise en culture de semences de plantes tolérantes aux herbicides issues de mutagenèse est suspendue sur l’ensemble du territoire national.

II. – Le respect du moratoire sur la mise en culture prévue au I est contrôlé par les agents mentionnés à l’article L. 250-2 du code rural et de la pêche maritime. Ces agents disposent des pouvoirs prévus aux articles L. 250-5 et L. 250-6 du même code.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à demander un moratoire sur la culture des variétés rendues tolérantes aux herbicides, les fameux VrTH.

Aujourd’hui, ces variétés, issues de mutagénèse, et non de transgénèse, ne sont pas reconnues comme des organismes génétiquement modifiés et sont donc exclues du champ d’application de l’interdiction des OGM.

Ainsi, il est impossible de savoir combien d’hectares sont plantés en colzas et en tournesols génétiquement mutés pour tolérer des herbicides.

Cependant, il semble bien que les surfaces progressent : le ministère de l’agriculture considère que 37 000 hectares de colza muté tolérant un herbicide ont été semés en 2016. Par ailleurs, la culture du tournesol tolérant un herbicide occupait 160 000 hectares en 2016, selon Agrodistribution.

Or ces variétés posent de nombreux problèmes, sans pour autant présenter d’avantages agronomiques. Ainsi, un rapport de 2011 de l’INRA et du CNRS alertait sur « l’apparition d’adventices résistantes » à une classe d’herbicides employés sur les variétés tolérantes aux herbicides, favorisée par l’emploi de celles-ci. Cette situation conduit mécaniquement, selon ce rapport, « à des teneurs plus élevées » de ces molécules dans les eaux et augmente « le risque d’atteindre les taux limites réglementaires pour la potabilité ». En outre, les auteurs du rapport constatent peu de différences de rendement entre variétés tolérantes et non tolérantes.

Décider un moratoire semble ainsi pleinement justifié, à la fois pour les agriculteurs, qui ne tirent pas de rendement supplémentaire de ces récoltes, et pour la santé publique, puisque le risque est accru pour la qualité de l’eau.

Par ailleurs, cet amendement vise à répondre à une demande massive des consommateurs français, qui refusent les OGM, même ceux qui sont cachés.

Je profite de cette prise de parole pour regretter qu’un autre amendement, dont l’objet était de faire la transparence sur les OGM cachés, ait été jugé irrecevable. L’absence de transparence en la matière pour les agriculteurs et pour les consommateurs n’est pas normale !

Derrière les variétés tolérantes ou résistantes aux herbicides, c’est l’utilisation des herbicides du genre Roundup que l’on cherche à protéger.

M. le président. Votre temps de parole est épuisé, mon cher collègue.

M. Joël Labbé. Je le suis aussi ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La Cour de justice de l’Union européenne rendra un arrêt sur la mutagénèse à la fin du mois de juillet prochain. Dans l’attente de cet arrêt, il n’y a pas lieu de mettre en place un moratoire. L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 455 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° 455 rectifié
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Article 15 bis

M. le président. L’amendement n° 787, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les deuxième et troisième phrases de l’article L. 131-15 du code de l’environnement sont supprimées.

II. – La dernière phrase du dernier alinéa de l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Cette instance est composée de représentants des parties prenantes intéressées, sa composition est fixée par décret. Elle est présidée par les ministres en charge de l’agriculture, de l’environnement et associe en tant que de besoin les ministres en charge de la santé et de la recherche. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer l’avis final du comité d’orientation du plan Écophyto. Le système actuel prévoit que deux instances émettent un avis sur le programme national Écophyto. Cet amendement vise à clarifier et à simplifier le fonctionnement de l’une de ces deux instances, en supprimant l’exigence d’un avis formel pour fluidifier la mise en œuvre du programme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement de simplification.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 787.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15.

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° 787
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Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendements n° 18 rectifié ter et  n° 706 rectifié bis

Article 15 bis

(Non modifié)

L’article L. 312-17-3 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le mot : « écoles » est remplacé par les mots : « établissements d’enseignement scolaire » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Cette information et cette éducation s’accompagnent d’un état des lieux du gaspillage alimentaire constaté par le gestionnaire des services de restauration collective scolaire de l’établissement. » – (Adopté.)

Article 15 bis
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Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendement n° 568 rectifié

Articles additionnels après l’article 15 bis

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 18 rectifié ter et 706 rectifié bis sont identiques.

L’amendement n° 18 rectifié ter est présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Lienemann, M. Tissot, Mme Conway-Mouret, M. Dagbert, Mmes Ghali, Grelet-Certenais et Guillemot, M. Iacovelli, Mmes Jasmin et G. Jourda, MM. Kerrouche et Tourenne, Mme Meunier et M. Lurel.

L’amendement n° 706 rectifié bis est présenté par Mme Laborde, MM. Artano, A. Bertrand et Corbisez, Mme Jouve et MM. Labbé, Requier et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le 2° de l’article L. 5143-2 est abrogé ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 5143-4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Est interdite la prescription des antibiotiques d’importance critique mentionnés à l’article L. 5144-1-1. »

La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié ter.

M. Jean-Claude Tissot. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 706 rectifié bis.

M. Joël Labbé. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 424 rectifié, présenté par Mme Schillinger et MM. Bargeton, Cazeau, Dennemont, Gattolin, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi et Théophile, n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 18 rectifié ter et 706 rectifié bis ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’usage d’antibiotiques d’importance critique a été strictement encadré. Un décret de 2016 interdit aux vétérinaires de les utiliser en traitement préventif individuel ou collectif chez des animaux sains, même exposés à une maladie infectieuse.

Les antibiotiques critiques listés peuvent, en revanche, être prescrits pour des traitements curatifs, c’est-à-dire chez des animaux malades, ou métaphylactiques, à savoir chez des animaux du même lot qui présentent une forte probabilité d’infection.

Leur prescription par le vétérinaire est soumise à plusieurs exigences, notamment un taux élevé de morbidité, l’absence d’autres médicaments efficaces et une durée limitée de traitement. Ils sont donc utilisés en dernier recours, lorsqu’il n’existe pas d’autre solution, et ne contribuent plus à l’antibiorésistance.

Interdire ces traitements, c’est mettre en péril des exploitations dont l’élevage est confronté à une maladie qui ne peut être soignée par d’autres moyens.

De plus, séparer la prescription de la vente d’antibiotiques pour les vétérinaires reviendrait à mettre en difficulté un certain nombre de vétérinaires ruraux qui, nous le savons, comptent sur cette activité pour améliorer leur chiffre d’affaires. Sans ces revenus, le risque de désertification vétérinaire de nos campagnes est bien réel.

Pour tous ces motifs, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 18 rectifié ter et 706 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendements n° 18 rectifié ter et  n° 706 rectifié bis
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Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendement n° 756

M. le président. L’amendement n° 568 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mmes Lienemann et Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un décret détermine les conditions dans lesquelles les missions des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté intègrent obligatoirement une mission liée à l’éducation à l’alimentation et la lutte contre le gaspillage alimentaire.

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement vise à traduire l’une des recommandations de l’atelier 9 des États généraux de l’alimentation.

Son dispositif prévoit que les missions des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté comportent obligatoirement un volet consacré à l’éducation alimentaire et à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Ces comités réunissent, sous la présidence du chef d’établissement, les personnels d’éducation, sociaux et de santé de l’établissement et des représentants des personnels enseignants, des parents et des élèves.

Actuellement, ils se voient confier quatre missions, en matière d’éducation à la citoyenneté, de prévention de la violence, d’aide aux personnes en difficulté et de programme d’éducation à la santé, à la sexualité et à la prévention des comportements à risques.

Notre amendement tend à élargir le champ de ces missions en ajoutant un volet consacré à l’alimentation et le gaspillage alimentaire. Nous considérons en effet que les habitudes et comportements alimentaires s’ancrent dès le plus jeune âge.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement avait déjà été présenté en commission.

Les comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté ont été créés par la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Ces comités sont institués au niveau académique, au niveau départemental et au niveau de l’établissement. Ils associent variablement des acteurs de la communauté éducative, aux fins de permettre la définition de parcours d’éducation à la santé et à la citoyenneté et de lutter contre les exclusions.

Je partage la préoccupation de mes collègues : il ne serait pas inutile, dans le cadre d’un parcours de construction de la citoyenneté des élèves, que ces comités comprennent un volet relatif au gaspillage alimentaire.

Néanmoins, cette formulation me gêne à plusieurs titres. Premièrement, il n’appartient pas au législateur d’adresser une injonction au Gouvernement. Deuxièmement, il n’y a que le comité institué au niveau de l’établissement qui figure dans la loi, à l’article L. 421-8 du code de l’éducation.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement converge avec la feuille de route qui prévoit l’organisation d’un vade-mecum sur l’éducation à l’alimentation. Il anticipe sur les travaux en cours dans ce cadre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 568 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendement n° 568 rectifié
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Article 15 ter

M. le président. L’amendement n° 756, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 15 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l’article L. 511-16 du code de la consommation, les mots : « d’origine non animale » sont remplacés par les mots : « à l’exclusion des produits d’origine animale ».

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de modifier l’article L. 511-16 du code de la consommation pour élargir l’habilitation des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, lors des contrôles à l’importation, notamment en cas d’incorporation de produits d’origine non animale dans des denrées alimentaires contenant des ingrédients d’origine animale. Par exemple, des fruits secs peuvent être incorporés dans des gâteaux contenant des œufs ou du lait. Il s’agit d’habiliter les agents au contrôle des produits alimentaires, à l’exclusion des produits d’origine animale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 756.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15 bis.

Article additionnel  après l'article 15 bis - Amendement n° 756
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Article 15 quater

Article 15 ter

(Non modifié)

La sous-section 7 de la section 2 du chapitre II du titre Ier du livre V du code de la consommation est ainsi modifiée :

1° L’article L. 512-27 est complété par les mots : « ou, à défaut, déposés dans un local désigné par les agents habilités » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 512-28 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Une copie de ce procès-verbal est remise au détenteur des produits, objets ou appareils. » – (Adopté.)

Article 15 ter
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement s n° 39 rectifié et 144 rectifié septies

Article 15 quater

L’article L. 331-21 du code forestier est complété par un 10° ainsi rédigé :

« 10° Au profit d’un exploitant agricole d’une parcelle contiguë, dans les communes dont le taux de boisement est supérieur à 60 %, ainsi que pour l’ensemble des parcelles classées “sous périmètre à reconquérir pour l’agriculture”, dans les communes soumises à une réglementation des boisements conformément aux articles L. 126-1 et L. 126-2 du code rural et de la pêche maritime. »

M. le président. L’amendement n° 755, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à supprimer l’article 15 quater.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Malgré mon attachement à la forêt, je suis défavorable à cet amendement. Le dispositif de cet article ne s’appliquera que dans les communes forestières dont le taux de boisement est supérieur à 60 %. Il n’y en a pas énormément ! Au reste, si cette disposition permet de résoudre les problèmes de certains agriculteurs qui recherchent des parcelles, ce sera plutôt positif.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 755.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15 quater.

(Larticle 15 quater est adopté.)

Article 15 quater
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendements n° 119 rectifié septies, 216 rectifié et  616 rectifié

Articles additionnels après l’article 15 quater

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 39 rectifié est présenté par Mmes Malet et Dindar et M. Magras.

L’amendement n° 144 rectifié septies est présenté par MM. Lagourgue, Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 6° de l’article L. 3 du code rural et de la pêche maritime est complété par les mots : « ainsi que d’acclimater, en conformité avec l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les normes impactant l’activité agricole aux contraintes propres des régions ultrapériphériques françaises, notamment en tenant compte des spécificités des productions en milieu tropical ».

La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 39 rectifié.

Mme Viviane Malet. En juillet 2016, un rapport de la délégation sénatoriale aux outre-mer insistait sur l’inadaptation des normes agricoles européennes aux régions ultrapériphériques, les RUP, et déplorait que les caractéristiques de l’agriculture en contexte tropical ne soient pas prises en compte.

Par la suite, en novembre 2016, une résolution adoptée par le Sénat a conclu à la nécessité impérieuse d’acclimater les normes agricoles européennes au milieu tropical. En effet, ces normes trouvent leur origine, pour l’essentiel, dans des règlements européens, qui, à la différence des directives, ne nécessitent pas de transposition.

Il s’agit donc, avec cet amendement, de parvenir à lister et à adapter les normes européennes qui auraient pu être acclimatées et qui ne l’ont pas été. Cela répond d’ailleurs au vœu du Président de la République, qui déclarait à Cayenne, le 27 octobre dernier, que « nous devons collectivement engager un travail sur l’adaptation des normes communautaires à ces territoires dont les contraintes et l’environnement sont spécifiques ».

C’est d’ailleurs le même travail que nous allons mener concernant les normes nationales, qu’elles soient constitutionnelles ou législatives, dans le cadre des assises des outre-mer.

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour présenter l’amendement n° 144 rectifié septies.

M. Joël Guerriau. Cet amendement vise à donner des marges de manœuvre à l’agriculture dans les régions ultrapériphériques.

En juillet 2016, MM. Doligé et Gillot et Mme Procaccia ont déposé un rapport d’information sur l’inadaptation des normes agricoles aux RUP, dont l’une des conclusions était que « les normes et les procédures applicables à l’agriculture des RUP françaises en matière sanitaire et phytosanitaire trouvent leur origine pour l’essentiel dans des règlements européens, malgré le maintien de compétences nationales importantes dévolues à l’ANSES et au ministre de l`agriculture ».

Par la suite, en novembre 2016, une résolution du Sénat de M. Magras, président de la délégation aux outre-mer du Sénat, a conclu elle aussi à l’impérieuse nécessité d’acclimater les normes agricoles européennes au milieu tropical. Les normes applicables à l’agriculture des régions ultrapériphériques françaises en matière sanitaire et phytosanitaire trouvent leurs origines, pour l’essentiel, dans des règlements européens, qui ne sont vraiment pas adaptés aux situations vécues sur ces territoires.

Comme vient de l’indiquer Mme Malet, le Président de la République s’est exprimé dans ce sens le 27 octobre 2017, lors de son déplacement à Cayenne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les normes applicables aux territoires d’outre-mer proviennent de règlements européens qui ne prennent pas spécifiquement en compte les productions de ces territoires.

La commission est favorable à ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Les règles en matière de protection sanitaire découlent du règlement européen et s’appliquent partout, y compris en outre-mer. Il n’y a donc pas lieu de prévoir de dispositions particulières. L’avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 39 rectifié et 144 rectifié septies.

(Les amendements sont adoptés.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement s n° 39 rectifié et 144 rectifié septies
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 120 rectifié octies

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15 quater.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 119 rectifié septies, 216 rectifié et 616 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 119 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Dennemont, Hassani et Marchand.

L’amendement n° 216 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 616 rectifié est présenté par MM. Antiste, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, un décret en Conseil d’État établit un cahier des charges précis et ambitieux définissant les critères de l’agro-écologie, en prenant en compte la sauvegarde de la biodiversité, l’amélioration de la qualité des sols, l’économie d’eau pour l’irrigation, la reconstitution de paysages ruraux de qualité, la réduction des intrants et la qualité sanitaire des produits.

La parole est à M. Joël Guerriau, pour présenter l’amendement n° 119 rectifié septies.

M. Joël Guerriau. Cet amendement vise à préciser la définition légale de l’agroécologie, dans le cadre de la parution d’un décret du Conseil d’État.

Selon la définition retenue par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, l’agroécologie est une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. Elle les amplifie, tout en visant à diminuer les pressions sur l’environnement et à préserver les ressources naturelles. Il s’agit d’utiliser au maximum la nature comme facteur de production, en maintenant ses capacités de renouvellement.

L’agroécologie implique le recours à un ensemble de techniques qui considèrent l’exploitation agricole dans son ensemble. C’est grâce à cette approche systémique que les résultats techniques et économiques peuvent être maintenus ou progresser, tout en améliorant les performances environnementales.

L’agroécologie réintroduit de la diversité dans les systèmes de production agricole et restaure une mosaïque paysagère diversifiée. Le rôle de la biodiversité comme facteur de production en sort renforcé, voire restauré.

L’agronomie est au centre des systèmes de production agroécologique. De solides connaissances dans ce domaine sont indispensables, tant pour les agriculteurs que pour leurs conseillers.

La dynamique des eaux, les cycles biogéochimiques, les épidémies ou les pullulations de ravageurs sont liés à des échelles plus vastes que celles des parcelles cultivées. Aussi le passage à l’agroécologie doit-il également être pensé à l’échelle des territoires.

La bonne gestion des fonctionnalités écologiques nécessite l’existence d’infrastructures agroécologiques.

Cet amendement tend à confier au Conseil d’État l’établissement d’un cahier des charges précis et ambitieux définissant les critères de l’agroécologie.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 216 rectifié.

M. Guillaume Gontard. Si l’agroécologie fournit un nouveau cadre de développement pour l’agriculture française, qui ambitionne de passer d’une logique d’exploitation du sol et des autres ressources naturelles à une logique de gestion d’écosystèmes cultivés, elle reste aussi un concept sans définition unique et sans reconnaissance officielle, en particulier au niveau européen.

Il existe ainsi un risque important qu’une dénomination sans aucune valeur juridique permette à l’agriculture conventionnelle de valoriser une modification minimaliste de ses pratiques, tout en entretenant le flou quant à sa proximité avec l’agriculture biologique, qui correspond, elle, à des exigences élevées, définies par un règlement.

Dans ces conditions, afin que l’agroécologie recouvre un réel changement des pratiques agricoles, cet amendement vise à ce que soit élaboré un cahier des charges précis et ambitieux en termes de croissance de la biodiversité, d’amélioration de la qualité des sols, d’économie d’eau pour l’irrigation, de reconstitution de paysages ruraux de qualité, de réduction des intrants et de qualité sanitaire des produits.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 616 rectifié.

M. Franck Montaugé. Actuellement, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation définit l’agroécologie comme une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes.

Elle s’appuie sur la diversité de nos systèmes de production en vue de préserver notre environnement et nos ressources naturelles. Il s’agit d’utiliser au maximum la nature comme facteur de production, en maintenant ses capacités de renouvellement.

Le présent amendement tend à ce qu’une réflexion soit menée afin de ne pas laisser cette notion majeure sans valeur juridique ou reconnaissance officielle.

C’est pourquoi il nous semblerait qu’un décret pourrait utilement élaborer des critères précis à respecter, en termes de croissance de la biodiversité, d’amélioration de la qualité des sols, d’économie d’eau pour l’irrigation, de reconstitution de paysages ruraux de qualité, de réduction des intrants et de qualité sanitaire des produits.

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendements n° 119 rectifié septies, 216 rectifié et  616 rectifié
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 320 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 120 rectifié octies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Dennemont, Hassani et Marchand, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement nomme un groupe d’experts indépendants qui établit, dans un délai d’un an, un cahier des charges précis et ambitieux définissant les critères de l’agro-écologie, en prenant en compte la sauvegarde de la biodiversité, l’amélioration de la qualité des sols, l’économie d’eau pour l’irrigation, la reconstitution de paysages ruraux de qualité, la réduction des intrants et la qualité sanitaire des produits. Les membres de ce groupe d’experts ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à son fonctionnement ne peut être pris en charge par une personne physique.

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. Cet amendement est défendu.

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 120 rectifié octies
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 3 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 320 rectifié bis, présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains et MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Vanlerenberghe, Longeot, Mizzon, Kern et Canevet, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement nomme un groupe d’experts indépendants, qui établit dans un délai d’un an, un cahier des charges précis et ambitieux définissant les critères de l’agro-écologie, en prenant en compte la sauvegarde de la biodiversité, l’amélioration de la qualité des sols, l’économie d’eau pour l’irrigation, la reconstitution de paysages ruraux de qualité, la réduction des intrants et la qualité sanitaire des produits. Les membres de ce groupe d’experts ne sont pas rémunérés et aucun frais lié à son fonctionnement ne peut être pris en charge par une personne publique.

La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Cet amendement s’inscrit dans la continuité des précédents.

Vendredi dernier, nous avons longuement débattu de l’agroécologie. Or aucun article du présent projet de loi ne fait mention de cette notion.

Actuellement, l’agroécologie ne fait l’objet que d’une simple inscription dans le code rural et de la pêche maritime. Cet amendement tend à ce que soient élaborés un cahier des charges précis de l’agroécologie et une définition qui pourraient permettre d’aboutir à une certification.

Aujourd’hui, de nombreux agriculteurs sont engagés dans ces modes de production. Les fédérer, les encourager, leur donner de la lisibilité au travers d’un cahier des charges constituerait une reconnaissance des démarches qu’ils entreprennent.

L’adoption de cet amendement permettrait également aux consommateurs d’être informés sur les pratiques agricoles qui ont conduit à l’élaboration des produits qu’ils consomment.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Nous avons effectivement longuement discuté de l’agroécologie vendredi.

Mes chers collègues, je vous renvoie à l’argumentaire que j’ai développé ce jour-là et je vous invite à vous replonger dans l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, qui développe, sur une demi-page, les critères de l’agroécologie.

Pour ces motifs, mais aussi parce qu’il s’agit d’une injonction au Gouvernement, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je ne voterai pas ces amendements, parce qu’ils sont globalement satisfaits.

Je me permets de répéter ce que j’ai déjà dit en fin de semaine dernière : il manque, dans ce texte, une mention de l’agroécologie.

Mme Cécile Cukierman. C’est justement l’objet de nos amendements !

M. Didier Guillaume. L’agroécologie est une avancée sans précédent, irréversible. Vous auriez pu, monsieur le ministre, indiquer dans le projet de loi que vous vous engagez dans cette direction, ce dont je ne doute pas. Cela dit, les présents amendements n’apportent rien de plus au texte.

Monsieur le ministre, l’agroécologie, grand acquis de ces dernières années, ne doit pas être laissée de côté !

Mme Cécile Cukierman. En ce cas, il faut voter les amendements !

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. L’agroécologie recouvre des enjeux très importants, comme la gestion des sols ou de l’eau. Cependant, il ne faudrait pas alourdir les contraintes pour le monde agricole, que nous défendons à tous les niveaux. Je me rallierai, bien entendu, à l’avis de Mme la rapporteur. (M. Laurent Duplomb applaudit.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 119 rectifié septies, 216 rectifié et 616 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 120 rectifié octies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 320 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 320 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 4 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Cabanel et Bérit-Débat, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le I de l’article L. 515-3 du code de l’environnement, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … – La réalisation d’affouillements du sol rendus nécessaires pour la création de réserves d’eau à usage agricole est soumise, avant l’octroi de l’autorisation d’exploiter, à l’avis de la ou des chambres départementales d’agriculture concernées par le lieu d’implantation du projet.

« Par dérogation au présent article, et ce, dans le cadre d’une autorisation unique qui vaut autorisation au titre des articles L. 214-3 et L. 515-1, la réalisation d’affouillements du sol rendus nécessaires pour la création de réserves d’eau à usage agricole n’est pas soumise au respect des prescriptions des schémas régionaux des carrières. »

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Il est désormais incontestable que l’agriculture française aura à souffrir prochainement d’un déficit chronique d’alimentation en eau pour l’irrigation, surtout dans les régions méridionales.

À ce titre, il faut rappeler que l’alimentation en eau agricole pour satisfaire les besoins en irrigation ne peut se faire que de deux manières : par pompage dans les eaux de surface ou par pompage dans les masses d’eau souterraines.

Dès lors, une solution privilégiée est de stocker l’eau en période de hautes eaux afin de la restituer en période d’irrigation. Un nouveau procédé, qui constitue une adaptation de la méthode des retenues collinaires, est envisageable : il s’agit de réaliser des stockages d’eau entièrement enterrés, financés par la valorisation des matériaux extraits pour réaliser le stockage, sans faire appel aux finances publiques.

L’obligation de recours à une personne physique ou morale ayant les capacités techniques pour exploiter une carrière semble imposer de faire appel aux carriers. Pour éviter de rendre le monde agricole tributaire de la politique commerciale des carriers, une solution a été trouvée : une société coopérative d’intérêt collectif – ou SCIC – disposant des capacités techniques nécessaires et totalement indépendante du monde des carriers pourrait être créée. Cette SCIC se chargerait d’obtenir les autorisations d’exploitation. Les travaux de creusement de la réserve et la valorisation des matériaux seraient sous-traités à des entreprises du monde des carriers ou des travaux publics.

Il serait également nécessaire d’intégrer ce dispositif dans le schéma régional des carrières. Il semble opportun de remédier à ce problème, en permettant de déroger à l’obligation de respect des dispositions du schéma régional des carrières, et ce de manière permanente.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à soustraire les projets d’affouillements du sol nécessaires à la création de réserves d’eau à usage agricole aux prescriptions du schéma régional des carrières.

Notre commission avait déjà examiné une telle proposition lors de l’examen du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

Les affouillements du sol préalables à la création d’une retenue d’eau sont qualifiés d’installations classés pour la protection de l’environnement, ou ICPE, dès lors que la superficie d’affouillements est supérieure à 1 000 mètres carrés ou lorsque la quantité de matériaux extraits est supérieure à 2 000 tonnes. De tels affouillements constituent alors techniquement des carrières soumises au régime d’autorisation des ICPE et aux prescriptions du schéma régional des carrières.

Malgré la finalité agricole de ces opérations et la soumission de la création de réserves d’eau à autorisation au titre de la loi sur l’eau, qui définit le régime des installations, ouvrages, travaux et aménagements, ou IOTA, en la matière, il est justifié que des affouillements d’une telle ampleur soient soumis à un régime spécifique.

A contrario, les soustraire à la nomenclature des ICPE conduirait à rendre inapplicables certaines prescriptions techniques en matière de bruit, d’émissions de poussières ou de gestion des déchets.

Il en résulterait également une rupture de concurrence avec les carrières, dès lors que les matériaux extraits de ces affouillements pourraient être utilisés à des fins commerciales sans être soumis aux mêmes obligations que les matériaux des carrières.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Ces dispositions d’articulation entre la loi sur l’eau et la réglementation relative aux carrières dépassant le champ du présent projet de loi, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. M. le ministre a raison : l’objet de l’amendement sort du cadre du texte soumis à notre examen. Cela dit, je soutiens cet amendement, car il est de bon sens.

Le nombre de projets en question se comptera sur les doigts d’une ou deux mains dans chaque département. Les matériaux extraits des carrières ne s’en trouveront pas concurrencés.

Une chose est sûre, la pluviométrie ne peut que stagner ou diminuer. Se donner les moyens de stocker de l’eau quand elle est en excès permettra de limiter le pompage dans les cours d’eau. Mais, pour cela, il faut une législation plus simple, plus souple, plus réactive.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Je ne suis pas sûr que cet amendement permettra de régler le problème de l’approvisionnement en eau pour l’irrigation, mais celui-ci est aujourd’hui bien réel, monsieur le ministre. Avec le réchauffement climatique, l’agriculture n’est plus possible sans irrigation. Il faudra bien que l’on parvienne à faire en sorte de recueillir et de conserver l’eau de pluie pour irriguer les cultures. Le débat dure depuis des années ! De ce point de vue, cet amendement d’appel a le mérite de rappeler au ministère que, sans nouvelles retenues d’eau, sans nouveaux procédés de stockage, le sud de la France connaîtra de grandes difficultés.

M. Bruno Retailleau. Pas seulement le sud de la France !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission de la commission des affaires économiques. Compte tenu de l’heure tardive et du nombre d’amendements restant à examiner, je vous invite, mes chers collègues, à vous concentrer sur l’objet du texte, à savoir le revenu des agriculteurs et la qualité de notre alimentation.

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Bravo !

M. Laurent Duplomb. Cet amendement n’est pas hors sujet !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Cet amendement est évidemment très important. Le sujet mériterait que nous y revenions dans le cadre de la discussion d’un texte sur l’eau ou l’irrigation.

M. Henri Cabanel. Je retire l’amendement, monsieur le président !

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 3 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 445 rectifié quater

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Cabanel et Bérit-Débat, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 214-3 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 214-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 214-3- – Quand un projet de retenue d’eau à usage agricole prévoit des travaux d’affouillement du sol, cette demande est soumise aux articles L. 214-2 à L. 214-6. »

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Cet amendement est également retiré.

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 4 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 480 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 445 rectifié quater, présenté par M. Jomier, Mme Ghali, M. Daudigny, Mmes Lienemann, Conway-Mouret et Meunier, M. Antiste, Mme Jasmin, M. Féraud, Mmes Guillemot et Espagnac, MM. Roger et Roux, Mme Préville, MM. Kerrouche, Marie, Manable et Tissot et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a du 5° du II de l’article L. 211-3 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase, les mots : « peut prévoir » sont remplacés par le mot : « prévoit » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Au plus tard le 1er janvier 2022, les surfaces agricoles situées dans le périmètre de ces zones sont exploitées selon le mode de production biologique, au sens de l’article L. 641-13 du code rural et de la pêche maritime, ou de conversion vers ce mode de production, ou selon les principes des systèmes de production agroécologiques, au sens de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, répondant aux critères de certification ouvrant droit à la mention d’exploitation de haute qualité environnementale, conformément à l’article L. 611-6 du code rural et de la pêche maritime. »

La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. La ressource en eau constitue un bien commun dont la qualité est particulièrement vulnérable dans certains territoires.

Le présent amendement vise à ce que les surfaces agricoles, dans les aires de protection de captage prioritaires, soient cultivées en agriculture biologique ou selon des modes d’exploitation agroécologiques.

Le Grenelle de l’environnement avait identifié, sur le fondement de l’article 7, 536 captages prioritaires particulièrement menacés par des pollutions diffuses, notamment par les nitrates et les pesticides, pour lesquels des plans d’action devaient être mis en place.

Dans le cadre des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux adoptés en décembre 2015, 1 115 captages prioritaires ont été identifiés. La feuille de route de la conférence environnementale de 2016 engageait le Gouvernement à renforcer l’effectivité des actions en faveur de leur protection.

À ce jour, seulement 43 % de ces captages font l’objet de plans d’action. Le déploiement de l’agroécologie dans ces aires de protection de captage est un objectif prioritaire. Il peut être un levier d’accélération pour le développement des nouvelles pratiques agronomiques.

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 445 rectifié quater
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 149 rectifié nonies

M. le président. L’amendement n° 480 rectifié ter, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Corbisez, Léonhardt, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 5° du II de l’article L. 211-3 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du a, les mots : « peut prévoir » sont remplacés par le mot : « prévoit » ;

2° Après le a, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au plus tard le 1er janvier 2022, au moins 50 % des surfaces agricoles situées dans le périmètre de ces zones sont exploitées selon le mode de production biologique, au sens de l’article L. 641-13 du code rural et de la pêche maritime, ou de conversion vers ce mode de production. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Permettez-moi de revenir un instant sur les deux amendements précédents : je ne crois pas que les classements SRC ou ICPE soient ce qui pose le plus de problèmes pour réaliser des retenues d’eau.

Les amendements nos 445 rectifié quater et 480 rectifié ter visent à imposer que, à l’échéance du 1er janvier 2022, les surfaces agricoles situées dans les aires d’alimentation des captages prioritaires d’eau potable soient exploitées selon les pratiques de l’agriculture biologique ou soient en conversion vers ce mode d’agriculture, à concurrence respectivement de 100 %, en incluant la certification haute valeur environnementale, et de 50 %.

La protection des zones autour des captages d’eau privilégie une logique partenariale par la mise en place de programmes d’actions élaborés en concertation avec les différentes parties prenantes.

Si certains programmes prennent effectivement du temps à mettre en place, c’est souvent parce que la conciliation des différents usages est complexe, comme toujours en matière d’eau. Les études publiées sur ce dispositif soulignent bien qu’il faut privilégier la concertation et la contractualisation.

Par ailleurs, je rappelle que la définition d’une zone soumise à contrainte environnementale reste une option disponible sur décision du préfet pour imposer certaines pratiques agricoles – travail du sol, gestion des intrants, rotation des cultures… – lorsque l’approche négociée ne permet pas d’atteindre les objectifs fixés en temps utile.

Ces prescriptions sont toutefois définies en tenant compte des circonstances locales. Imposer dans la loi un pourcentage donné de surfaces consacrées à l’agriculture biologique dans ces zones remettrait en cause cette approche territoriale et négociée.

Pour ces raisons, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Si nous voulons avoir achevé l’examen de ce texte à minuit et demi, chacun doit faire preuve de concision, y compris les rapporteurs.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux amendements ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable ! (Sourires.)

M. le président. Merci de votre concision, monsieur le ministre !

Je mets aux voix l’amendement n° 445 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 480 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 480 rectifié ter
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendements n° 127 rectifié octies et n° 168 rectifié quater

M. le président. L’amendement n° 149 rectifié nonies, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Capus, Decool, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot, M. Vogel, Mmes Vullien et Goy-Chavent, MM. Longeot, Lefèvre, de Legge et Mandelli, Mme Joissains, MM. Henno, Paul, Moga et Mizzon, Mme Billon, MM. Daubresse, L. Hervé, Nougein, Bonnecarrère et Canevet et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article L. 211-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « civile et » sont remplacés par le mot : « civile, » et sont ajoutés les mots : « et de la production agricole » ;

2° Au 3°, les mots : « De l’agriculture, » sont supprimés.

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Cet amendement vise à rendre la production agricole prioritaire, parmi d’autres finalités, en termes d’usage de la ressource en eau. En effet, pour garantir la production agricole et, ainsi, la sécurité alimentaire française, il faut assurer l’accès de l’agriculture à l’eau.

Ces ressources doivent pouvoir être mobilisées. Le stockage de l’eau représente une solution durable et pragmatique d’adaptation au changement climatique. Pourtant, malgré de nombreux rapports parlementaires alertant sur la nécessité de développer le stockage de l’eau, les freins existent toujours.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Les principes qui encadrent la politique de l’eau, inscrits à l’article L. 211-1 du code de l’environnement, offrent un équilibre. Seule l’alimentation en eau potable de la population bénéficie d’une priorité par rapport aux autres enjeux, ce qui est pleinement justifié par des motifs de santé publique. L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement : nous aurons la possibilité de discuter de ces sujets lors des assises de l’eau, dont le volet agricole sera mis en place au second semestre de 2018.

M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.

M. Alain Marc. Mon ami Pierre Médevielle n’a pas tout à fait compris le sens de cet amendement : il ne s’agit en aucun cas d’opposer l’alimentation en eau de la population et l’irrigation. Il est tout à fait possible de s’entendre sur les usages de l’eau. Il s’agit simplement de souligner que, demain, l’usage de l’eau pour la production agricole devra être prioritaire, parmi d’autres usages.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 149 rectifié nonies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 149 rectifié nonies
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 150 rectifié nonies

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 127 rectifié octies et 168 rectifié quater sont identiques.

L’amendement n° 127 rectifié octies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Adnot, Daubresse et Moga.

L’amendement n° 168 rectifié quater est présenté par Mmes Micouleau et Deroche, M. Milon, Mmes L. Darcos et Lamure, M. Lefèvre, Mme Bruguière, MM. Bonhomme, Cuypers et Dallier, Mmes Delmont-Koropoulis et Deromedi, M. Dufaut, Mme Garriaud-Maylam, MM. Sido, Savin et Pellevat et Mmes Morhet-Richaud et Lopez.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 211-1 du code de l’environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … - L’agriculture doit disposer des moyens nécessaires pour sécuriser l’accès et la mobilisation de la ressource en eau pour garantir une adéquation entre la disponibilité de la ressource et les besoins actuels et futurs en eau pour l’agriculture dans un contexte d’adaptation au changement climatique, notamment en matière de stockage de l’eau, conformément au 5° bis du I du présent article.

« Les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux et les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, quand ils existent, priorisent les mesures visant à prendre en compte les besoins actuels et futurs en eau de l’agriculture et sa capacité d’adaptation face au changement climatique, notamment par la mobilisation de la ressource en eau. »

La parole est à M. Guerriau pour présenter l’amendement n° 127 rectifié octies.

M. Joël Guerriau. Cet amendement vise à permettre une déclinaison concrète de l’objectif de gestion équilibrée de la ressource en eau, en ajoutant une mention spécifique de l’agriculture. Coécrite avec les Jeunes Agriculteurs, cette proposition fait écho à la loi sur l’eau de 2006.

M. le président. La parole est à Mme Morhet-Richaud, pour présenter l’amendement n° 168 rectifié quater.

Mme Patricia Morhet-Richaud. La gestion de l’eau, l’irrigation et le stockage de l’eau sont autant de défis que doit relever l’agriculture dans un contexte de changement climatique important qui affecte fortement les exploitations agricoles.

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendements n° 127 rectifié octies et n° 168 rectifié quater
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 151 rectifié octies

M. le président. L’amendement n° 150 rectifié nonies, présenté par MM. Chasseing, Decool, Malhuret, Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot, M. Vogel, Mmes Vullien et Goy-Chavent, MM. Longeot, Lefèvre, de Legge et Mandelli, Mme Joissains, MM. Henno, Paul, Louault et Mizzon, Mme Billon, MM. Daubresse, L. Hervé, Nougein, Bonnecarrère et Canevet et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le II de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« … - L’agriculture dispose des moyens nécessaires pour mobiliser et sécuriser l’accès en eau afin de garantir un véritable équilibre entre les besoins et les ressources actuels et à venir en application du 5° bis du I et du II du présent article. »

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Cet amendement est en parfaite cohérence avec celui que je viens de présenter : si l’on veut que le stockage de l’eau soit une priorité en vue de l’irrigation, il faut en assurer le financement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Les amendements identiques nos 127 rectifié octies et 168 rectifié quater visent à accroître la place de l’agriculture au regard des principes de la politique de l’eau.

La première partie de ces amendements n’ajoute rien au code de l’environnement, qui prévoit déjà, depuis l’adoption de la loi Montagne du 28 décembre 2016, la mise en place d’une politique active de stockage de l’eau.

La seconde partie prévoit que les SDAGE et les SAGE, les schémas d’aménagement et de gestion de l’eau, priorisent les besoins en eau de l’agriculture, ce qui est fondamentalement incompatible avec les principes que je viens d’évoquer.

La commission est donc défavorable à ces deux amendements identiques.

Enfin, l’amendement n° 150 rectifié nonies reprend la première partie des deux amendements précédents, qui, comme je l’ai déjà souligné, n’ajoute rien au droit existant : l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements : je renvoie là encore au volet agricole des assises de l’eau, qui sera mis en place au second semestre de 2018.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 127 rectifié octies et 168 rectifié quater.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150 rectifié nonies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 150 rectifié nonies
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Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 179 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 151 rectifié octies, présenté par MM. Chasseing, Capus, Decool, Guerriau, Malhuret, Vogel et Louault, Mmes Vullien et Goy-Chavent, MM. Longeot, Lefèvre, de Legge et Mandelli, Mme Joissains, MM. Henno, Paul et Mizzon, Mme Billon, MM. Daubresse, L. Hervé, Nougein, Bonnecarrère et Canevet et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le IV de l’article L. 212-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Aux enjeux particuliers de la production agricole notamment en matière de stockage de l’eau, comme mentionné au 5° bis du I de l’article L. 211-1. »

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 151 rectifié octies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 151 rectifié octies
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Article 16 A (Texte non modifié par la commission)

M. le président. L’amendement n° 179 rectifié ter, présenté par MM. Decool, Wattebled, Chasseing, Guerriau, Capus, Vogel, Henno, L. Hervé et Paul, est ainsi libellé :

Après l’article 15 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la gestion active de l’eau dans l’agriculture. Une attention particulière est portée aux évolutions techniques, notamment inspirées de l’étranger, qui permettraient de remplacer progressivement l’usage d’eau potable à des fins d’irrigation par l’utilisation d’eaux recyclées, dessalinisées, ou saumâtres. Une évaluation de l’utilisation de la micro-irrigation dans les exploitations agricoles est également proposée.

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur la performance des processus d’irrigation en agriculture.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?

M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Nous ne souhaitons pas multiplier les rapports demandés au Gouvernement, qui servent souvent à pallier l’absence de mesures véritables et qui mobilisent des effectifs importants dans les ministères, sans être généralement suivis d’effets concrets.

Par ailleurs, comme en témoigne chaque année le bilan de l’application des lois, une partie seulement des rapports demandés sont effectivement remis, ce qui doit nous inciter à une certaine retenue en la matière.

Pour ces raisons, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable également, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 179 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

TITRE II bis

MESURES DE SIMPLIFICATION DANS LE DOMAINE AGRICOLE

Article additionnel après l'article 15 quater - Amendement n° 179 rectifié ter
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Article 16 B

Article 16 A

(Non modifié)

Après le 5° de l’article L. 314-20 du code de l’énergie, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Du caractère collectif des installations sur sites agricoles qui utilisent des énergies renouvelables ou des énergies de récupération. »

M. le président. L’amendement n° 760, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Le développement des énergies renouvelables fait partie des leviers qui permettront de maintenir une agriculture performante en France et d’assurer aux agriculteurs un revenu complémentaire.

Cela passe par l’installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures des bâtiments d’élevage ou le développement de la méthanisation agricole.

Les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables ne sont possibles qu’à la condition d’être non discriminatoires, transparents et ouverts et de ne pas exclure les entreprises susceptibles de concurrencer des projets en poursuivant le même objectif en matière d’environnement ou d’énergie.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Nous sommes tous favorables au développement des énergies renouvelables en milieu agricole, mais cet article pose des difficultés juridiques telles, notamment au regard du droit communautaire, qu’il ne pourrait être appliqué s’il était maintenu. La commission est donc favorable à sa suppression.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 760.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 16 A est supprimé, et l’amendement n° 381 rectifié bis n’a plus d’objet.

L’amendement n° 381 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb et Adnot, Mme A.M. Bertrand, M. Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chevrollier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes Deroche, Deromedi et Di Folco, MM. Genest et Gilles, Mme Gruny, MM. Guené, Huré, Kennel et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Lefèvre, Mme Lopez, MM. Meurant, Morisset, Paccaud, Paul, Pierre, Pointereau, Poniatowski et Priou, Mme Puissat, MM. Revet et Sido et Mme Thomas, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce caractère collectif comprend les formes sociétaires regroupant plusieurs exploitations agricoles.

Article 16 A (Texte non modifié par la commission)
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Article 16 CA (nouveau)

Article 16 B

(Non modifié)

L’article L. 541-4-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« – les sous-produits animaux ou les produits dérivés, y compris les produits transformés couverts par le règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) n° 1774/2002 (règlement relatif aux sous-produits animaux), à l’exception de ceux qui sont destinés à l’incinération, à la mise en décharge ou à l’utilisation dans une usine de biogaz ou de compostage. » – (Adopté.)

Article 16 B
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Article 16 C

Article 16 CA (nouveau)

Après l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 311-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-1-1 (nouveau). – Les résidus de transformation agricole peuvent être valorisés dans les usages non alimentaires, dans l’intérêt des filières agricoles alimentaires et du développement de la filière bioéconomie et biogaz. »

M. le président. L’amendement n° 764, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Il n’est pas utile de préciser dans le code rural et de la pêche maritime que les résidus peuvent être valorisés dans les usages non alimentaires, car de telles valorisations ne sont pas interdites.

L’un des objectifs de cet ajout était de favoriser la valorisation de l’éthanol de mélasse en biocarburant. D’autres dispositifs, par exemple fiscaux, sont plus à même de contribuer à cet objectif.

Enfin, cet article pourrait remettre en cause la hiérarchie des usages des résidus, en priorisant le débouché énergétique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui y est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 764.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16 CA.

(Larticle 16 CA est adopté.)

Article 16 CA (nouveau)
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Article 16 D (nouveau)

Article 16 C

I AA (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 111-97 du code de l’énergie, après le mot : « clients », sont insérés les mots : « , aux producteurs de biogaz, ».

I A (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 431-6 du code de l’énergie, après le mot : « existantes », sont insérés les mots : « , sur les prévisions d’injection sur le territoire national de gaz renouvelables définis à l’article L. 211-2, ».

I. – Le titre V du livre IV du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article L. 452-1 est complété par les mots : « ainsi que la partie du coût des adaptations des réseaux mentionnées à l’article L. 453-9 restant à la charge des gestionnaires de réseaux de transport » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 452-1-1, après le mot : « soutiré », sont insérés les mots : « , la partie du coût des adaptations des réseaux mentionnées à l’article L. 453-9 restant à la charge des gestionnaires de réseaux de distribution » ;

3° Le chapitre III est complété par un article L. 453-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 453-9. – Lorsqu’une installation de production de biogaz est située à proximité d’un réseau de gaz naturel, y compris hors de toute zone de desserte d’un gestionnaire de réseau, les gestionnaires des réseaux de gaz naturel effectuent les adaptations nécessaires pour permettre l’injection dans le réseau du biogaz produit, dans les conditions et limites définies par décret pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie. »

II. – (Non modifié) L’article L. 554-6 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les canalisations reliant une unité de production de biométhane au réseau de transport sont soumises aux dispositions du présent code applicables aux canalisations de distribution, dès lors qu’elles respectent les caractéristiques et conditions mentionnées à l’article L. 554-5 fixées pour de telles canalisations, ainsi qu’aux dispositions de la section 4 du chapitre V du présent titre. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 761 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4, 5 et 7

Remplacer le mot :

adaptations

par le mot :

renforcements

II. – Alinéa 7

Supprimer les mots :

, y compris hors de toute zone de desserte d’un gestionnaire de réseau

III. – Après l’alinéa 7

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 453-10. – Un réseau public de distribution de gaz naturel peut comprendre une canalisation de distribution de gaz située hors de la zone de desserte du gestionnaire de ce réseau public sous réserve de l’accord de l’autorité organisatrice de ce réseau et des communes sur le territoire desquelles la canalisation est implantée.

« Ces dispositions sont applicables à une canalisation nécessaire pour permettre le raccordement à un réseau public de distribution de gaz naturel d’une installation de production de biogaz implantée en dehors de la zone de desserte du gestionnaire de ce réseau. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de préciser les modalités du droit à l’injection hors zone de desserte d’un gestionnaire de réseau.

Nous souhaitons prévoir dans quelles conditions le raccordement à un réseau de distribution de gaz naturel des installations de production de biogaz situées sur le territoire d’une commune qui ne dispose pas d’un réseau public de distribution de gaz naturel est possible.

M. le président. L’amendement n° 569 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé et Cabanel, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin, M. Kerrouche et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer les mots :

y compris hors de toute zone de desserte d’un gestionnaire de réseau,

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Cet amendement d’appel traduit une inquiétude quant à l’extension opérée en commission des affaires économiques permettant aux installations situées en dehors de toute zone de desserte d’un gestionnaire de réseau de bénéficier du droit à l’injection.

Si nous partageons la volonté de développer la filière et de faciliter les possibilités de raccordement des installations de biométhane aux réseaux de gaz, nous avons été interpellés sur les conséquences de cette modification apportée par la commission, qui pourrait permettre à un gestionnaire de réseau de distribution de construire des gazoducs pour le raccordement de ces unités de biogaz en dehors de sa zone de concession.

Selon ses détracteurs, cette mesure ne prendrait pas en compte le régime des concessions, ne serait pas conforme au droit de la commande publique, pourrait avoir un effet contre-productif en freinant les raccordements en raison d’un risque accru de dépôts de recours par les communes concernées par ces nouvelles infrastructures et serait susceptible d’entraîner des coûts supplémentaires en termes de raccordements non justifiés et non optimaux sur le plan économique.

Nous avons souhaité relayer ces inquiétudes au travers de cet amendement. Si des éléments de nature à les apaiser pouvaient nous être apportés, nous serions prêts à le retirer.

M. le président. L’amendement n° 782, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l’article L. 432-4, une canalisation ou partie de canalisation située sur le territoire d’une commune non desservie en gaz naturel et construite pour le raccordement d’une installation de production de biogaz à un réseau de distribution publique de gaz naturel appartient au gestionnaire du réseau public de distribution qui a réalisé ce raccordement. À la demande d’une autorité organisatrice d’un réseau public de distribution de gaz naturel qui met en œuvre les dispositions prévues à l’article L. 432-1 postérieurement à la construction de cette canalisation ou partie de canalisation, le gestionnaire du réseau lui transfère la propriété de cet ouvrage. Les modalités financières de ce transfert sont définies par décret pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie, en tenant compte de la participation mentionnée à l’article L. 453-2 et des subventions versées pour financer la construction de l’ouvrage. »

La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les deux amendements précédents.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les amendements nos 761 rectifié et 569 rectifié bis sont essentiellement sémantiques.

Ils tendent toutefois à revenir sur la rédaction de la commission. Il n’est bien évidemment pas question de créer un nouveau droit à l’injection absolu. Les limites sont déjà bien définies dans le texte, puisqu’il n’est question que d’installations situées à proximité d’un réseau existant. Elles seront encore explicitées par le biais de deux amendements identiques.

En revanche, si le droit ainsi créé devait se limiter aux méthaniseurs déjà présents dans le périmètre d’une concession, ce qui serait le cas si l’apport de la commission était supprimé, chacun comprend bien qu’on manquerait très largement la cible puisque très peu de méthaniseurs seraient en pratique concernés.

Je ne méconnais pas les quelques difficultés juridiques liées au statut des canalisations ainsi créées ; elles sont toutefois très loin d’être insurmontables. Nous avons d’ailleurs travaillé à une rédaction qui a recueilli l’accord du principal gestionnaire de réseaux de distribution, ainsi que celui de la fédération nationale des collectivités concédantes, la FNCCR, dont chacun connaît la grande vigilance pour défendre les compétences des collectivités en la matière.

Cet amendement tend à prévoir que, par dérogation, la canalisation est la propriété du gestionnaire de réseaux, sauf à ce que la commune traversée veuille un jour créer son propre réseau, auquel cas un transfert de propriété serait prévu à sa demande, sur la base d’une compensation encadrée par un décret pris après avis du régulateur.

La commission est défavorable aux amendements nos 761 rectifié et 569 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le développement des énergies renouvelables fait partie des leviers qui permettront de maintenir une agriculture performante en assurant aux agriculteurs un revenu complémentaire. La création du droit à l’injection tend à lever ce frein. Le Gouvernement a déposé un amendement visant à modifier l’article 16 C qui est plus large que le vôtre, monsieur Montaugé, mais qui reprend votre proposition. Je vous suggère donc de retirer l’amendement n° 569 rectifié bis au profit de celui du Gouvernement.

L’adoption de l’amendement n° 782 de la commission conduirait à remettre en cause le principe de propriété publique des réseaux de distribution de gaz naturel par les collectivités territoriales. Pour cette raison, le Gouvernement privilégie la solution qu’il a présentée au travers de son amendement n° 761 rectifié, qui permet le raccordement à un réseau public de distribution des installations de production de biométhane situées en dehors d’une zone de desserte, tout en préservant la propriété des réseaux publics de distribution de gaz par les collectivités territoriales. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 782.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 761 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Montaugé, l’amendement n° 569 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Franck Montaugé. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 569 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 782.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 263 rectifié quinquies est présenté par M. Husson, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Mandelli et Bazin, Mmes Lavarde, Lassarade et Gruny et MM. Paccaud, Danesi et Rapin.

L’amendement n° 781 est présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques.

Les deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 7

1° Après le mot :

limites

insérer les mots :

permettant de s’assurer de la pertinence technico-économique des investissements

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce décret précise la partie du coût des adaptations des réseaux à la charge du ou des gestionnaires des réseaux et celle restant à la charge du ou des producteurs, ainsi que la répartition de cette dernière entre les différents producteurs concernés.

La parole est à Mme Christine Lavarde, pour présenter l’amendement n° 263 rectifié quinquies.

Mme Christine Lavarde. Cet amendement tend à préciser que les conditions et limites qui seront définies par décret visent la pertinence technico-économique des investissements qu’il faudra réaliser pour permettre l’adaptation des réseaux.

Il est également nécessaire de prévoir dans les textes la répartition des coûts des adaptations des réseaux entre les gestionnaires de réseaux et les producteurs, ainsi que le principe d’une mutualisation de la part restant à la charge des producteurs entre les différents producteurs qui injecteront dans les réseaux concernés. Il ne faut pas que le premier raccordé supporte l’intégralité de la charge.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter l’amendement n° 781.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les deux amendements étant identiques, je considère qu’il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 263 rectifié quinquies et 781.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 783, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer le mot :

biométhane

par le mot :

biogaz

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Seul le terme « biométhane » est actuellement utilisé dans le code de l’environnement. Par souci de cohérence rédactionnelle, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 783.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16 C, modifié.

(Larticle 16 C est adopté.)

Article 16 C
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Article 16 E (nouveau)

Article 16 D (nouveau)

Le second alinéa de l’article L. 255-12 du code rural et de la pêche maritime est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Il en va de même d’une matière fertilisante ou d’un support de culture, à l’exception de ceux issus de la transformation de boues de station d’épuration, du fait de sa conformité à :

« – une norme mentionnée au 1° de l’article L. 255-5 du présent code pour laquelle une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail montre qu’elle garantit que l’ensemble des conditions prévues à l’article L. 541-4-3 du code de l’environnement sont remplies ;

« – un règlement de l’Union européenne mentionné au 2° de l’article L. 255-5 du présent code dès lors qu’il garantit que l’ensemble des conditions prévues à l’article L. 541-4-3 du code de l’environnement sont remplies ;

« – un cahier des charges pris en application du 3° de l’article L. 255-5 du présent code dès lors qu’il garantit que l’ensemble des conditions prévues à l’article L. 541-4-3 du code de l’environnement sont remplies. »

M. le président. L’amendement n° 609 rectifié, présenté par MM. Bérit-Débat, Montaugé, Botrel et Cabanel, Mmes Bonnefoy et Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. L’article 16 D, introduit par la commission des affaires économiques, vise à faciliter la sortie du statut de déchets des matières fertilisantes et supports de culture, les MFSC, notamment les digestats, fabriqués à partir de déchets, hors boues d’épuration.

Cela conduit à transformer les méthaniseurs en « machines à laver », notamment des biodéchets, tout en affranchissant les matières produites des obligations auxquelles sont normalement soumises les substances issues de la méthanisation agricole.

Cette sortie du statut de déchets qui renvoie toute la responsabilité sur l’utilisateur du digestat, à savoir l’agriculteur, alors que ce dernier rend un service à la société en participant à la gestion des déchets, n’est pas acceptable.

Il importe, au contraire, de renforcer l’acceptabilité sociale des méthaniseurs, de préserver l’environnement et les sols au moment de l’épandage des digestats et de participer à la montée en gamme de l’agriculture française.

Aussi, pour sécuriser la filière méthanisation, est-il essentiel de revenir sur cet ajout en supprimant l’article 16 D.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’introduction de l’article 16 D par la commission vise à encadrer la sortie du statut de déchets des matières fertilisantes et supports de culture fabriqués à partir de déchets, à commencer par les digestats des méthaniseurs.

Cet article ne fait que mettre en œuvre l’une des conclusions des États généraux de l’alimentation et l’une des recommandations du groupe de travail sur la méthanisation.

La rédaction retenue organise cette sortie tout en l’encadrant : les matières concernées devront être conformes à une norme rendue d’application obligatoire par un arrêté, un règlement européen ou un cahier des charges approuvé par voie réglementaire et remplir l’ensemble des conditions prévues à l’article L. 541-4-3 du code de l’environnement, dont l’absence d’effets globaux nocifs pour l’environnement ou la santé humaine.

Concrètement, et même s’il était déjà possible d’épandre des digestats sur les sols agricoles, cette sortie du statut de déchets vise à améliorer l’image de l’épandage des digestats et, indirectement, à réduire les coûts liés à ce statut administratif pour les agriculteurs, notamment en termes de transport ou d’entreposage.

En revanche, il n’est pas question de transformer les méthaniseurs en « machines à laver » de déchets, cet article ne changeant absolument rien à la réglementation sur les intrants en vigueur.

Comme cela a été rappelé en commission, il est déjà possible d’alimenter les méthaniseurs par toute une série de matières, qu’elles proviennent de traitements des eaux usées, de stations d’épuration, d’activités agricoles ou d’industries agroalimentaires, selon des règles qui varient et qu’il n’est pas prévu de modifier ici.

La responsabilité de l’agriculteur ne sera pas modifiée par la disposition proposée. Bien évidemment, je me tiens à la disposition de la profession pour entendre ses craintes éventuelles.

La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. L’article 16 D, issu des travaux de la commission, représente un compromis très acceptable entre l’économie circulaire et la nécessité de sécuriser les matériaux issus des processus de réutilisation des déchets.

La sortie du statut de déchets est un élément facilitateur, dès lors que l’on peut assurer le respect des dispositions communes prévues à l’article L. 541-4-3 du code de l’environnement.

Dans la mesure où cet article apporte ces garanties, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 609 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 609 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 610 rectifié, présenté par MM. Bérit-Débat, Montaugé, Botrel et Cabanel, Mmes Bonnefoy et Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Après les mots :

d’épuration

insérer les mots :

ou de mélanges de boues de ces stations avec des biodéchets

II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« La fraction du volume de digestat concernée par ce dispositif ne peut excéder 20 % du volume total et est soumis au respect des critères compris dans le cahier des charges s’appliquant aux exploitants de méthaniseurs, tel que défini à l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime.

« La valorisation au sol des matières concernées reste soumise au respect d’un plan d’épandage transmis à l’autorité administrative compétente selon les critères relatifs au type d’installation.

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Cet amendement de repli tend, d’une part, à exclure les mélanges de boues et de biodéchets du dispositif de sortie du statut de déchets, tel que prévu par l’article 16 D, et, d’autre part, à s’assurer que la valorisation au sol de matières fertilisantes ou supports de culture reste soumise au respect d’un plan d’épandage visé par l’autorité administrative compétente.

Les mélanges de déchets organiques, en particulier ceux de boues de stations d’épuration avec des biodéchets, posent question au regard de la cohérence des effluents.

En outre, l’épandage de tels mélanges est porteur d’incertitudes sur son acceptabilité et sur le potentiel de pollution et la traçabilité des matières concernées. Il apparaît donc nécessaire de compléter la rédaction de cet article pour y faire référence et sécuriser davantage encore le dispositif de sortie du statut de déchets.

Enfin, si ce dispositif soumet les matières en question au respect des cahiers des charges existants, il nous semble nécessaire de réaffirmer que leur épandage doit se conformer au respect d’un plan transmis à l’autorité administrative et visé par cette dernière, afin d’assurer une valorisation satisfaisante et sans préjudice pour l’environnement et les populations environnantes.

Ce dispositif est conforme aux solutions mises en œuvre ces dernières années sous l’égide du ministre Stéphane Le Foll, notamment la publication d’un cahier des charges pour la mise sur le marché et l’utilisation de digestats de méthanisation agricoles en tant que matières fertilisantes. La poursuite des discussions avec le ministre de l’agriculture doit donner lieu à la publication de deux nouveaux cahiers des charges, conformément aux engagements pris.

M. le président. Le sous-amendement n° 784, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 610 rectifié, alinéas 6 à 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ce sous-amendement vise à conserver uniquement l’exclusion des mélanges de boues de stations d’épuration avec des biodéchets telle qu’elle est prévue par l’amendement. Cette précision n’est sans doute pas inutile pour lever toute ambigüité sur la nature des matières épandues.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 610 rectifié et au sous-amendement n° 784.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. En France, la construction d’un méthaniseur prend trois, quatre ou cinq ans,…

M. Stéphane Travert, ministre. Sept ans !

M. Didier Guillaume. … contre six mois seulement en Allemagne ! Ce n’est plus possible !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 784.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 610 rectifié, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 758, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Un arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement, pris après avis conforme de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, établit la liste des normes mentionnées au troisième alinéa du présent article pour laquelle la sortie du statut de déchets est effective. »

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à assurer une validation par les pouvoirs publics des normes dûment évaluées au titre du troisième alinéa de l’article 16 D. Cet alinéa prévoit une évaluation par l’ANSES visant à garantir le respect du code de l’environnement avant de valider la sortie du statut de déchets.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement qui conforte le dispositif qu’elle a introduit.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 758.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16 D, modifié.

(Larticle 16 D est adopté.)

Article 16 D (nouveau)
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Article 16 F (nouveau)

Article 16 E (nouveau)

Le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime est complété par un article L. 4 ainsi rédigé :

« Art. L. 4 (nouveau). – I. – Dans le cadre des objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche maritime tels que fixés aux articles L.1 et suivants du présent code, le comité de rénovation des normes en agriculture est chargé de s’assurer de l’applicabilité des projets de textes réglementaires créant ou modifiant des normes impactant l’activité agricole, de limiter les distorsions de concurrence entre les producteurs agricoles français et ceux des autres États membres de l’Union européenne et les insécurités juridiques, de simplifier et de rechercher la cohérence des réglementations existantes applicables à l’activité agricole. Afin d’atteindre ces objectifs, le comité de rénovation des normes en agriculture évalue et identifie les simplifications possibles, l’applicabilité, la sécurité juridique pour l’exploitant agricole, la cohérence des réglementations, le respect de l’équivalence des charges et l’absence de sur-transposition de la norme étudiée. Il peut proposer des expérimentations et la réalisation d’études d’impacts complémentaires.

« II. – Le comité de rénovation des normes en agriculture est à caractère interministériel. Il est composé d’un représentant de chaque ministère produisant des réglementations impactant l’activité agricole, d’un représentant de l’Association des régions de France, d’un représentant de chaque organisation syndicale représentative, d’un représentant de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, d’un représentant des coopératives agricoles et, selon le secteur agricole concerné, d’un représentant de l’institut ou du centre technique agricole compétent. Ce comité est présidé par un préfet, désigné par le Premier ministre par décret.

« III. – Le comité de rénovation des normes en agriculture identifie les sujets et projets de textes qu’il estime prioritaires. Le président du comité peut mettre en place, après concertation des autres membres, des groupes de travail co-pilotés entre les services de l’État et les représentants des organisations professionnelles agricoles sur des sujets et textes ainsi identifiés. L’avis consultatif rendu par le comité sur des dispositions réglementaires en vigueur ou à venir peut proposer des modalités de simplification de ces dispositions et l’abrogation de normes devenues obsolètes.

« IV. – Un décret détermine l’organisation, les moyens et les modalités de fonctionnement du comité. »

M. le président. L’amendement n° 762, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Le Comité de rénovation des normes en agriculture, le CORENA, n’étant pas une instance officielle, la définition de ses attributions, de sa composition ou encore de ses modalités de fonctionnement ne relève pas de la loi.

Pour autant, l’utilité du CORENA est reconnue. Cette instance permet d’assurer le partage en amont de l’information et des impacts technico-économiques des réglementations, d’éviter les incohérences ou les redondances entre les réglementations et d’en faciliter la mise en œuvre ultérieure par les agriculteurs et les services de l’État. La prochaine réunion du CORENA se tiendra le 13 juillet prochain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’article 16 E adopté par la commission tend à donner une existence juridique au Comité de rénovation des normes en agriculture. Sa mission est essentielle aujourd’hui pour simplifier les normes pesant sur nos exploitations et éviter toute surtransposition.

L’article précise ses missions, sa composition et ses modalités de fonctionnement. C’est une consécration législative pour ce comité reconnu par la profession et que le Parlement pourra dès lors contrôler.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 762.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 785, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, première phrase

Supprimer les mots :

Dans le cadre des objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche maritime tels que fixés aux articles L. 1 et suivants du présent code,

II. – Alinéa 3, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Le président du comité de rénovation des normes en agriculture est désigné par le Premier ministre par décret.

III. – Alinéa 4, deuxième phrase

Remplacer les mots :

des autres membres

par les mots :

avec les autres membres

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 785.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 378 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, Gremillet, Adnot et Babary, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Bouchet, J.M. Boyer, Brisson et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chevrollier et Danesi, Mmes L. Darcos, Deroche, Deromedi et Di Folco, M. Genest, Mme Gruny, M. Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Kennel et Laménie, Mmes Lamure et Lanfranchi Dorgal, MM. Lefèvre, Meurant, Morisset, Paccaud, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau, Poniatowski et Priou, Mme Puissat, MM. Rapin, Retailleau, Revet, Savary, Savin et Sido et Mme Thomas, est ainsi libellé :

Alinéa 2, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

En particulier, les dispositions législatives et réglementaires transposant le droit communautaire en droit français ne doivent pas excéder les objectifs poursuivis par l’Union européenne.

La parole est à M. Laurent Duplomb.

M. Laurent Duplomb. L’amendement de Mme Lamure relatif à la transposition du droit communautaire ayant été adopté, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 378 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’article 16 E, modifié.

(Larticle 16 E est adopté.)

Article 16 E (nouveau)
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Article 16

Article 16 F (nouveau)

Le Gouvernement remet un rapport au Parlement avant le 1er janvier 2020, sur la base des travaux du comité de rénovation des normes en agriculture, sur la surtransposition des normes européennes en matière agricole.

M. le président. L’amendement n° 763, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Le Comité de rénovation des normes en agriculture, le CORENA, n’étant pas une instance officielle, la remise d’un rapport au Parlement par cette structure ne peut être prévue par le projet de loi. C’est pourquoi nous proposons cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Dans la mesure où nous venons de rendre cette instance officielle, la commission ne peut qu’être défavorable à cet amendement !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 763.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 16 F.

(Larticle 16 F est adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Article 16 F (nouveau)
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Rappel au règlement

Article 16

I. – (Non modifié) Les articles 1er et 2 entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi.

Dans les secteurs où la conclusion de contrats écrits est obligatoire :

1° Les accords-cadres conclus avant la date d’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi sont mis en conformité avec l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, au plus tard le 1er septembre 2018 ou, si cette date est postérieure, au plus tard un mois après la date d’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi ; les organisations de producteurs ou associations d’organisations de producteurs concernées proposent aux acheteurs un avenant à cet effet ;

2° Les contrats conclus avant la date d’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi et se poursuivant au-delà du 1er octobre 2018 sont mis en conformité avec l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, au plus tard le 1er octobre 2018 ou, si cette date est postérieure, au plus tard deux mois après la date d’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi ; les producteurs concernés proposent aux acheteurs un avenant à cet effet, ou leur demandent par écrit de leur proposer cet avenant.

Dans les autres secteurs, les contrats en cours à la date d’entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi doivent être mis en conformité avec l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, lors de leur prochain renouvellement et au plus tard dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi.

II. – (Non modifié) L’article 3 entre en vigueur à la date prévue au premier alinéa du Y du présent article ou, si cette date est postérieure, à la date de publication du décret codifiant dans la partie réglementaire du code rural et de la pêche maritime la liste des agents habilités à constater les manquements aux dispositions de la section II du chapitre Ier du titre III du livre VI du code rural et de la pêche maritime.

III. – (Non modifié) L’article 4 n’est pas applicable aux procédures de médiation en cours à la date de publication de la présente loi.

IV. – Les renégociations de prix, ainsi que les procédures de médiation et instances juridictionnelles qui sont en cours à la date de publication de la présente loi restent soumises à l’article L. 441-8 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la présente loi.

IV bis. – L’article 11 decies entre en vigueur le 1er septembre 2020. Les denrées alimentaires préemballées, légalement fabriquées ou commercialisées avant l’entrée en vigueur de la présente loi, dont l’étiquetage n’est pas conforme à ses dispositions, peuvent être mises en vente, vendues ou distribuées à titre gratuit jusqu’à épuisement des stocks.

V. – (Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 133 rectifié sexies est présenté par Mme Mélot, MM. Bignon, Malhuret, Chasseing, Capus, Fouché, Decool, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, M. Mizzon, Mme Lopez, MM. Bonnecarrère, Daubresse, L. Hervé et Lévrier, Mme Rauscent et les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires.

L’amendement n° 251 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains, MM. Moga, Capo-Canellas, Prince, Vanlerenberghe et Longeot, Mme Billon, M. Kern, Mme Sollogoub et MM. Canevet et Le Nay.

L’amendement n° 612 rectifié est présenté par M. J. Bigot, Mme Grelet-Certenais, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, M. Bérit-Débat, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9, première phrase

Remplacer l’année :

2020

par l’année :

2019

La parole est à M. Gérard Dériot, pour présenter l’amendement n° 133 rectifié sexies.

M. Gérard Dériot. Cet amendement vise à rétablir la date d’entrée en vigueur de l’obligation d’indication de l’origine du miel en 2019. Lors de l’examen en commission du projet de loi, cette date d’entrée en vigueur a été reportée à 2020. Il ne semble pas utile d’attendre une telle échéance.

Sur une question d’une telle importance, la date du 1er septembre 2019 doit être symboliquement retenue.

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 251 rectifié bis.

M. Bernard Delcros. Quel intérêt d’attendre 2020, alors que le droit actuel ne permet pas d’informer correctement les consommateurs ?

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 612 rectifié.

M. Henri Cabanel. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je le rappelle, nous avons reporté d’un an une telle obligation, mais en contrepartie de son renforcement par la mention des pays dans leur ordre d’importance. C’est un élément stratégique.

La commission est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.

M. Alain Marc. Je suis désolé, j’ai du mal à comprendre l’argumentation de la commission. On reporte d’un an l’obligation, parce qu’on renforce les mentions apposées ? On peut renforcer tout de suite ! Qu’attendons-nous ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Le débat sur l’article 11 decies a été assez long !

Nous avons renforcé les contraintes en demandant l’affichage des pays d’origine par ordre décroissant d’importance. C’est une mention stratégique, car, si le miel comporte très peu de miel d’origine française, cela apparaîtra très clairement. En contrepartie, on donne un an de plus aux acteurs pour s’adapter en termes d’étiquetage.

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.

M. Bernard Delcros. L’affichage de l’ordre d’importance des pays est véritablement essentiel. Cette proposition était essentielle. Dans le cadre du droit actuel, on peut lire : « Miel en provenance de pays de l’Union européenne et d’autres pays ». Plus tôt on réglera ce problème, mieux ce sera !

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Nous avons eu un très long débat sur ce sujet ! Nous avons justement tenté de régler le problème en imposant l’affichage des pays d’origine par ordre décroissant, ce qui répondra au problème que vous soulevez. En contrepartie, je le répète, nous avons souhaité donner aux acteurs économiques un peu plus de temps pour adapter leur étiquetage. (M. le rapporteur applaudit.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 133 rectifié sexies, 251 rectifié bis et 612 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.) – (M. Joël Guerriau applaudit.)

M. le président. L’amendement n° 759, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Rétablir Le V dans la rédaction suivante :

V – Les articles 14 et 14 bis entrent en vigueur le 1er janvier 2019 et s’appliquent aux contrats conclus ou renouvelés à compter de cette même date.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 759 est retiré.

Rappel au règlement

Article 16
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Article 16

M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour un rappel au règlement.

M. François Patriat. Mon intervention se fonde sur l’article 36 de notre règlement.

La commission a déclaré irrecevable un amendement n° 296 que j’avais déposé et qui visait la protection des filières de race française, garantie de qualité et de traçabilité des produits offerts à la consommation, en lien direct avec le titre II de ce projet de loi. En effet, cette traçabilité, inhérente au savoir-faire et à la tradition de nos filières de viandes, est synonyme d’une alimentation saine et de qualité pour les consommateurs.

Le premier alinéa de l’article 45 de la Constitution précise que tout amendement est recevable dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis. Pour ce qui concerne mon amendement, le lien direct existait.

Les services de la commission ont bien tenté d’augmenter l’irrecevabilité à partir d’une partie de l’amendement qui se contentait de reprendre mot pour mot le code rural et de la pêche maritime tel qu’il est écrit. Les modifications concernaient les articles situés avant et après le passage évoqué. L’erreur serait minime si elle n’entamait pas notre liberté constitutionnelle d’amendement, à laquelle une partie de notre assemblée est, je crois, très attachée. N’est-ce pas, monsieur Retailleau ?

Voilà donc que, face à notre insistance, les services de la commission ont fini par nous conseiller de détourner la procédure parlementaire, en prenant la parole sur n’importe quel article pour obtenir une réponse du ministre.

On se retrouve dans une situation où, pour remédier à leur propre désinvolture, nos services, madame la présidente de la commission, nous conseillent de détourner la procédure parlementaire et d’aller à l’encontre des usages admis dans cette assemblée !

Ce cas de figure s’est déjà produit un peu plus tôt pour un autre amendement déposé par les sénateurs de la République En Marche, l’amendement n° 635 visant à introduire un article additionnel après l’article 14 decies.

Cela fait deux entraves de trop, madame la présidente de la commission ! Nous tenions à dire notre mécontentement et notre souhait de pouvoir, à l’avenir, déposer nos amendements dans de bonnes conditions.

M. Bruno Retailleau. Je suis heureux de vous entendre défendre le droit d’amendement ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Patriat. Cher collègue, je suis pour le droit d’amendement, même si, parfois, nous en déposons un peu trop et les discutons un peu trop longuement. Au cours des séances, j’ai constaté quel était le temps des palabres et quel était le temps de l’action.

Toutefois, sur le sujet qui nous occupe aujourd’hui, deux amendements, qui étaient tout à fait en rapport avec le texte, ont été refusés par la commission, ce dont je souhaitais vous faire part, monsieur le président.

M. le président. Mon cher collègue, acte vous est donné de votre rappel au règlement.

Rappel au règlement
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Article 17

Article 16 (suite)

M. le président. Nous en revenons à l’article 16, que je mets aux voix, modifié.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
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Article 17 bis

Article 17

La dix-septième ligne du tableau du second alinéa du 4° du Y de l’article L. 950-1 du code de commerce est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 441-8

la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous

Article L. 441-9

l’ordonnance n° 2014-487 du 15 mai 2014

».

 – (Adopté.)

Article 17
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 17 bis

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 271-5, il est inséré un article L. 271-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 271-5-1 (nouveau). – Les seuils prévus au Y de l’article L. 230-5-1 peuvent être adaptés par décret en Conseil d’État en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à la Réunion ou à Mayotte. » ;

2° Après l’article L. 272-9, il est inséré un article L. 272-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 272-9-1 (nouveau). – Les seuils prévus au Y de l’article L. 230-5-1 peuvent être adaptés par décret en Conseil d’État à Saint-Barthélemy. » ;

3° Après l’article L. 273-6, il est inséré un article L. 273-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 273-6-1 (nouveau). – Les seuils prévus au Y de l’article L. 230-5-1 peuvent être adaptés par décret en Conseil d’État à Saint-Martin. » ;

4° Après l’article L. 274-8, il est inséré un article L. 274-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 274-8-1 (nouveau). – Les seuils prévus au Y de l’article L. 230-5-1 peuvent être adaptés par décret en Conseil d’État à Saint-Pierre-et-Miquelon. » – (Adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 17 bis
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’idée des États généraux de l’alimentation était bonne. Le discours prononcé à Rungis par le Président de la République était ambitieux. Et le monde agricole voulait bien faire crédit, quelque temps, au regard des bonnes intentions affichées et des objectifs que chacun ne pouvait que partager : redonner du revenu aux producteurs et améliorer la qualité alimentaire, sans jamais préciser qui allait devoir payer.

Après des dizaines d’heures de travail dans des conditions regrettables faute de pouvoir y consacrer le temps voulu, notamment en commission, deux sentiments se sont installés : le scepticisme et la déception.

Scepticisme quant à ce que produira effectivement la nouvelle économie mixte que vous avez inventée, ce mélange d’économie administrée à coup d’indicateurs, dont nous sommes bien curieux de voir à quoi ils aboutiront pour les producteurs en manque de poids économique, et de libre marché, qui permettra toujours aux grands acheteurs d’aller voir ailleurs si les prix ne leur conviennent pas ou si leurs marges se dégradent.

À moins que les consommateurs français ne paient le regain de valeur ! Nous serions alors dans un non-dit de grande portée politique, que nous ne saurions approuver. En définitive, avec ce titre Ier, il s’agit d’aménagements de lois votées précédemment ; rien de plus, rien de moins !

À cela s’ajoute notre profonde inquiétude que les hypothétiques bénéfices de cette loi soient annihilés par la baisse annoncée du budget de la PAC. Sur ce sujet, nos inquiétudes restent vives.

Pour ce qui est du titre II, les déceptions sont grandes par rapport à la nécessité de la prise en compte des fortes attentes de la société. Pour un peu, les 20 % de bio dans la restauration collective disparaissaient…

Que dire de la suppression des dispositifs visant à interdire l’utilisation du terme de gratuité comme outil promotionnel, à introduire des exigences environnementales dans les cahiers des charges des SIQO, alors même que le délai envisagé est de 2030, et à encadrer davantage l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ?

Que dire du refus du Gouvernement et de la majorité sénatoriale de reconnaître dans la loi l’importance de l’agriculture de groupe ? Que dire de leur opposition systématique aux amendements ayant pour objet l’agroécologie, ou encore de leur refus d’interdire la déforestation importée ?

Finalement, que penser du rejet de la quasi-totalité de nos amendements visant à renforcer la qualité alimentaire des repas servis dans la restauration scolaire ou collective, à interdire la publicité pour les aliments transformés à destination du jeune public, à mettre en place des objectifs clairs en matière de réduction du sucre, du sel et du taux de matière grasse dans les aliments et à renforcer l’étiquetage des denrées alimentaires ?

Ainsi, seulement 10 amendements de notre groupe sur les 140 que nous avions déposés ont été adoptés. La coconstruction n’a pas eu lieu ! Une satisfaction, néanmoins : l’adoption du Fonds d’indemnisation des victimes des produits phytosanitaires.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Tout de même !

M. Franck Montaugé. Pour conclure, le bilan de ce texte est pour notre groupe très décevant, très en deçà du minimum que les agriculteurs et les Français, en tant que consommateurs, étaient en droit d’attendre de nous.

C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ce texte.

M. le président. La parole est à Mme Noëlle Rauscent, pour explication de vote.

Mme Noëlle Rauscent. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la volonté première des auteurs de ce projet de loi était d’assurer une rémunération plus juste à nos agriculteurs.

Les États généraux de l’alimentation avaient abouti à une rédaction permettant à tous les maillons de la chaîne alimentaire de prendre leurs responsabilités. Or, après son examen par notre chambre, le texte est dénaturé. Sa première partie ne correspond plus à la philosophie initiale des États généraux de l’alimentation.

Tandis que nous souhaitions que les interprofessions se coordonnent, s’organisent et se responsabilisent pour un partage de la valeur plus juste, le Sénat a choisi de déresponsabiliser les filières, au travers d’un OFPM, l’Observatoire de la formation des prix et des marges, palliatif de leur manque de responsabilisation.

Tandis que nous souhaitions refonder, après concertation, le statut des coopératives pour plus de transparence entre les associés coopérateurs et leur structure, la majorité sénatoriale a fait le choix du statu quo.

Tandis que nous proposions une refonte environnementale de notre modèle agricole, l’une des mesures clés du projet présidentiel, à savoir la séparation capitalistique du conseil et de la vente des produits phytosanitaires, a été supprimée par le Sénat.

La seconde volonté des auteurs de ce projet de loi était de répondre aux attentes sociétales, au travers d’une alimentation saine et durable.

Mes chers collègues, au cours de nos débats, nous avons su trouver des positions de compromis, afin d’améliorer le texte. Je pense, par exemple, à la mise en place du formalisme lors des négociations commerciales entre distributeurs et industriels, à la faculté des parlementaires de saisir l’ANSES, ou encore à l’élargissement de l’expérimentation de la pulvérisation par drones.

Nous nous félicitons également de la sagesse du Sénat, qui, en séance publique, a finalement adopté deux mesures clés du projet de loi : le rétablissement de l’objectif de 20 % de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective et l’élargissement du champ d’application de l’interdiction des néonicotinoïdes.

Ce sont des avancées non négligeables, permettant de conserver l’esprit des États généraux de l’alimentation et répondant à une attente sociétale forte.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Noëlle Rauscent. Enfin, mes chers collègues, j’aimerais me féliciter des débats et des échanges que nous avons eus.

Les sujets que nous avons abordés ces derniers jours étaient importants pour l’avenir de nos filières, pour le quotidien de nos agriculteurs et pour l’alimentation des Français. Je souhaite remercier tout particulièrement M. le ministre de son écoute.

M. Bruno Retailleau. C’est fini !

Mme Noëlle Rauscent. Nous espérons à présent que le texte, en partie dénaturé, sera amélioré en commission mixte paritaire, notamment pour ce qui concerne son titre Ier et son volet phytosanitaire.

M. le président. Il faut vraiment conclure, ma chère collègue !

Mme Noëlle Rauscent. Ainsi, le groupe La République En Marche s’abstiendra.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Gremillet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer, au nom de notre groupe, l’ensemble des rapporteurs, qui ont passé énormément de temps à procéder à des auditions. Je le souligne, parce que c’est un travail que l’on ne voit pas forcément. Nos travaux dans l’hémicycle sont le fruit de cet enrichissement.

Monsieur le ministre, je l’ai répété tout au long de ce débat, notre groupe considère que ce texte manque d’enthousiasme. Il n’est porteur d’aucune vision significative pour l’agriculture. C’est là un premier décalage avec les annonces du Président de la République et l’énorme mobilisation – les différents acteurs y ont consacré des heures et des heures – qu’ont permise les États généraux de l’alimentation.

Il faudrait faire le calcul des dépenses prévues par ce projet de loi, qu’il s’agisse du titre Ier ou du titre II. Notre travail a été d’alléger les charges, qui, au départ, pesaient sur l’agriculture et l’économie agricole de notre pays.

C’est la raison pour laquelle une grande majorité des sénatrices et sénateurs de notre groupe voteront ce texte. Surtout, ils souhaitent envoyer, dans le cadre de la commission mixte paritaire, un signal fort aux députés s’agissant de l’approche et de la responsabilité des agriculteurs.

Ainsi, dans le cadre de l’article Ier, nous avons su protéger le modèle coopératif, qui est un élément stratégique de répartition sur le territoire. Dans le titre II, la quasi-unanimité concernant la restauration collective a montré que les agriculteurs pouvaient se réapproprier la valeur ajoutée, sur les territoires, grâce aux préalables que nous avons définis.

Je remercie encore nos rapporteurs et l’ensemble des sénatrices et sénateurs du travail réalisé ici durant les cinq jours qui viennent de s’écouler. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Je me félicite de la qualité de nos débats et des échanges que nous avons eus avec vous, monsieur le ministre ; ce n’est pas toujours le cas sur tous les textes…

Cependant, comme nous n’avons cessé de le répéter, il ne me paraît pas acceptable de discuter d’un projet de loi aussi important dans de telles conditions, à marche forcée.

Nous partageons les objectifs des auteurs du projet de loi. Comment, en effet, ne pas souscrire à l’impérieuse nécessité de rééquilibrer les relations commerciales agricoles ? À cet égard, les améliorations apportées par la Haute Assemblée méritent d’être soulignées ; je pense notamment à l’encadrement du choix des indicateurs, au renforcement du médiateur des relations commerciales agricoles ou encore à la précision de la revente à perte et aux limitations des offres promotionnelles.

Toutefois, comme nous l’avons souligné, cela ne sera pas suffisant pour moraliser les négociations commerciales.

Mes chers collègues, comment ne pas défendre une exigence minimum de qualité et de sécurité des produits dans la restauration collective publique ? Même si nous pouvons nous satisfaire de la réintroduction de l’objectif de 20 % de produits bio dans la restauration, nous ne pouvons que regretter la faiblesse des sanctions en matière de rappel et de retrait de produits, alors que nous sortons à peine du scandale Lactalis !

Enfin, comment ne pas défendre l’idée qu’il faut réduire drastiquement l’utilisation de pesticides sur notre territoire ? Si nous nous réjouissons de la reconnaissance d’un fonds d’indemnisation des victimes professionnelles des produits phytopharmaceutiques, nous ne comprenons pas la frilosité de la majorité du Sénat sur la remise en cause des rabais et ristournes en matière de PPP ou sur l’interdiction du glyphosate.

Ainsi, au-delà des convergences sur certains objectifs, ce texte ne permettra pas de réorienter notre modèle agricole. A contrario, il maintient notre agriculture dans une logique profondément libérale, laquelle a pourtant démontré ses limites et sa contre-productivité.

Vous attendez des agriculteurs qu’il fasse des efforts, monsieur le ministre ? Pour notre part, nous attendons que l’État reprenne son rôle et protège les plus faibles !

Si nous voulons sauver l’agriculture française, l’amener vers plus de qualitatif, il faut des prix minimaux garantis. Il est insupportable de se cacher derrière le droit à la concurrence européen tout en le dénonçant ! Or cela fait trente ans que l’agriculture est la variable d’ajustement de la guerre des prix, au nom de la concurrence libre et non faussée.

Vous l’aurez compris, notre groupe ne votera pas ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Raison, rapporteur. Je remercie chacune et chacun de ses apports. Je me félicite de la qualité de nos débats. Entre nous, le respect a été permanent. Je vous remercie également, monsieur le ministre, d’avoir été constant dans votre humeur, malgré quelques attaques. Vous êtes resté paisible et constructif, ce qui a favorisé la qualité de nos débats.

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, je regrette le manque d’ambition du titre Ier. Ce n’est certainement pas avec ces dispositions que nous allons révolutionner le revenu des agriculteurs.

Le titre II aborde un certain nombre de sujets liés à l’alimentation. Les dépenses en la matière représentent 232 milliards d’euros dans notre pays ; les 50 % de bio dans les cantines, ce sont 3,5 milliards d’euros…

Permettez-moi de vous rappeler dans quel esprit ma collègue rapporteur et moi-même avons travaillé. Nous n’avons pas dénaturé le texte. Nous sommes revenus à l’essentiel sur un certain nombre de sujets. Nous avons essayé de faire la loi, et non de la communication ou du bavardage. Et pour faire la loi, nous nous sommes fondés de manière pragmatique sur les réalités du terrain. Tous, dans nos territoires, nous connaissons le fonctionnement des exploitations agricoles ou des cantines scolaires.

Au rang des apports, j’aimerais mentionner le fonds d’indemnisation des maladies professionnelles, qui a été voté à l’unanimité, ainsi qu’un certain nombre d’autres dossiers. Ma collègue rapporteur, Anne-Catherine Loisier, a beaucoup travaillé sur la méthanisation, par exemple.

Sur la première partie du titre Ier, nous avons respecté le travail de l’Assemblée nationale. Cela nous semble constituer un atout pour que la commission mixte paritaire puisse aboutir.

M. le président. Il va falloir conclure, monsieur le rapporteur.

M. Michel Raison, rapporteur. Je conclus, monsieur le président. Encore une fois, merci à toutes et tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.

M. Franck Menonville. Au nom de mon groupe, je me réjouis du travail effectué et de la qualité de nos débats.

Monsieur le ministre, vous vous êtes montré disponible et à l’écoute. Et lorsque vous avez été bousculé, vous avez su garder votre flegme normand !

Au terme de ces cinq jours de débats, le titre Ier comporte, malgré tout, de réelles avancées à nos yeux. Je pense au renforcement de la contractualisation ou au rôle des organisations professionnelles et des interprofessions. À défaut de révolutionner le revenu des agriculteurs, cela favorisera des relations commerciales plus équilibrées, en donnant des outils de négociations et de rééquilibrage.

Cette loi doit donc permettre des relations plus équilibrées au profit des agriculteurs. Je pense à l’inversion de la construction des prix, à la contractualisation, à l’aide d’indicateurs de coûts de production, sans oublier le rôle des médiateurs et de l’Observatoire des prix, qui doit veiller aux équilibres.

Le débat sur le titre II a été riche, quelquefois passionné. Parmi les points majeurs figure effectivement la relocalisation de l’approvisionnement de la restauration collective. Notre groupe se satisfait de la réintégration des 20 % de produits d’origine bio. Les débats autour des néonicotinoïdes et du glyphosate ont été animés. La séparation du conseil et de la vente est un autre dossier sensible.

Notre groupe est partagé. Ceux, comme moi, qui estiment que le titre Ier prime voteront en faveur du texte ; ceux pour qui le titre II est rédhibitoire en matière environnementale et sociétale s’y opposeront ; d’autres encore s’abstiendront.

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.

M. Bernard Delcros. Mes premiers mots seront pour remercier à mon tour les rapporteurs, qui ont effectué un travail considérable. Je vous remercie évidemment aussi de tous les échanges que nous avons pu avoir avec vous, monsieur le ministre.

Il s’agit d’un texte à fort enjeu.

Enjeu d’abord pour l’avenir du secteur agricole, dans sa diversité. Les modalités adoptées sur la construction du prix pour redonner aux producteurs leur place dans l’élaboration des prix sont extrêmement importantes ; cela me semble de nature à changer les choses.

Enjeu aussi d’aménagement du territoire. Dans nombre de territoires, il n’y a plus de vie possible sans agriculteur ! Pour ma part, je viens d’un territoire très rural de moyenne montagne, où les agriculteurs font vivre les communes rurales au quotidien.

Enjeu encore de santé publique. Nous avons longuement abordé la qualité de l’alimentation, le développement des filières de proximité et la restauration collective, ce formidable levier pour favoriser les circuits courts et les filières locales.

Enjeu enfin de respect et d’information des consommateurs sur l’environnement et la biodiversité. Je pense qu’un cap est franchi. Certes, dans un certain nombre de domaines, nous ne sommes pas allés aussi loin que certains d’entre nous l’auraient souhaité. Mais un cap est franchi, avec de réelles avancées, et le Sénat a apporté des améliorations par rapport à l’Assemblée nationale.

Je souhaite que la commission mixte paritaire puisse aboutir ; cela me paraît important pour donner de la force au texte. Mais il faudra être vigilant quant à son application concrète sur le terrain.

Le groupe Union Centriste votera le projet de loi à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. En tant que présidente de la commission, je n’exprimerai pas de position sur le fond. Je souhaite simplement remercier les rapporteurs, qui ont effectué un travail très important et répondu à tous les membres de la Haute Assemblée.

Je voudrais remercier M. le ministre de la qualité de nos échanges, ainsi que son cabinet, qui a été très présent tout au long de ces débats. Je remercie évidemment les fonctionnaires du Sénat.

J’adresse un salut tout particulier aux membres de la commission des affaires économiques et des autres commissions, qui ont été là pendant toutes ces heures et ces nuits de débat. Si nos discussions ont été d’une telle qualité, c’est aussi grâce à votre présence et à votre implication, mes chers collègues. Ce beau travail honore le Sénat ! (Applaudissements.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 186 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 309
Pour l’adoption 215
Contre 94

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre de lagriculture et de lalimentation. Je remercie à mon tour nos collaborateurs, ainsi que les fonctionnaires du Sénat, du travail qu’ils ont effectué.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis de la qualité de nos échanges. Certes, ceux-ci ont parfois pu être perçus comme un peu vifs. J’ai essayé d’apporter des réponses à toutes les questions que vous avez bien voulu me poser et d’être le plus clair possible, même si nous n’avons pas toujours réussi à converger.

Chacun a pu exprimer ses souhaits et ses positions sur le texte. Tant mieux ! Le débat y a gagné en technicité et en profondeur. Je salue l’engagement de ceux qui sont restés du début à la fin. C’est un honneur pour les professionnels de l’agriculture que nous défendons ici.

La question du revenu des agriculteurs est un point absolument essentiel du projet de loi. Je pense à la problématique de l’inversion de la contractualisation et de la construction du prix. De nouveaux outils doivent permettre de rééquilibrer le rapport de force. Je pense aussi au volet bio, à la qualité alimentaire, à la restauration collective, au gaspillage alimentaire…

Demain, chacun devra s’emparer de ces outils, pour rendre notre agriculture plus compétitive et plus simple et pour lui permettre de retrouver la place qu’elle doit occuper.

En parallèle, nous avons évidemment besoin de solutions européennes. Oui, nous devons défendre une politique agricole commune ambitieuse ! Oui, nous devons avoir une politique commerciale cohérente avec la politique agricole commune ! Oui, nous devons avoir une politique de concurrence permettant que nos produits ne subissent pas de concurrence déloyale au sein de nos frontières européennes ! C’est un travail de longue haleine, mais nous le menons avec toute la volonté et toute la détermination que vous pouvez nous connaître.

Il reste à construire des trajectoires pour tirer notre agriculture vers le haut, vers l’innovation, vers plus d’audace, vers la simplification et vers cette montée en gamme que nous appelons de nos vœux.

Le texte essaye de répondre à cette problématique. Ce n’est pas une loi d’orientation agricole. Cela fait partie de la politique de l’alimentation que nous souhaitons mettre en place entre 2018 et 2019. C’est une brique, et nous contribuons ainsi à construire le mur de cette agriculture, avec des fondations solides. Nous voulons que notre agriculture soit, demain, plus compétitive, plus durable et plus résiliente. Nos agriculteurs doivent pouvoir tirer le meilleur revenu de leur travail et en retirer toute la dignité qu’ils méritent.

Même si nos options divergent parfois, je ne vois personne ici qui ne soutienne pas notre agriculture et nos agriculteurs. Nous avons des raisons d’être fiers d’eux et de leur travail. L’agriculture et l’alimentation sont des pans essentiels de notre économie. Elles touchent à la cohésion sociale, voire à la lutte contre la précarité, sujets qui me sont chers.

Nous continuerons à défendre cette agriculture – elle le mérite ! –, en commission mixte paritaire, et au-delà s’il le faut ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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8

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 3 juillet 2018 :

À neuf heures trente-cinq : vingt-cinq questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Projet de loi relatif à la lutte contre la fraude (procédure accélérée – n° 385, 2017-2018) ;

Rapport de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n° 602, 2017-2018) ;

Avis de Mme Nathalie Delattre, fait au nom de la commission des lois (n° 600, 2017-2018) ;

Texte de la commission (n° 603, 2017-2018).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 3 juillet 2018, à zéro heure trente-cinq.)

nomination dun membre dune commission

Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a présenté une candidature pour la commission des affaires sociales.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai par larticle 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Cathy Apourceau-Poly est membre de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Dominique Watrin.

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD