Sommaire

Présidence de M. David Assouline

Secrétaires :

MM. Éric Bocquet, Michel Raison.

1. Procès-verbal

2. Candidature à une mission d’information

3. Mise au point au sujet d’un vote

4. Nouveau pacte ferroviaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 1er A (suite)

Amendement n° 68 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 232 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet par scrutin public n° 108.

Amendement n° 69 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 71 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 3 rectifié octies de M. Claude Malhuret (suite). – Adoption.

Amendement n° 70 de Mme Éliane Assassi (suite). – Retrait.

Amendement n° 183 rectifié de M. Ronan Dantec (suite). – Retrait.

Amendement n° 24 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 25 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 215 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 234 de M. Olivier Jacquin (suite). – Retrait.

Amendement n° 256 de la commission (suite). – Adoption.

Amendement n° 235 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 23 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet par scrutin public n° 109.

Amendement n° 35 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet par scrutin public n° 110.

Amendement n° 214 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 233 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 168 du Gouvernement (suite). – Rejet.

Amendement n° 236 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 237 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 129 de M. Jean-François Longeot (suite). – Retrait.

Amendement n° 238 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 239 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 213 de M. Olivier Jacquin (suite). – Rejet.

Amendement n° 36 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 74 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 75 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 257 de la commission (suite). – Adoption.

Amendement n° 149 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann (suite). – Rejet.

Amendement n° 216 rectifié de M. Olivier Jacquin (suite). – Adoption.

Amendement n° 150 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann (suite). – Rejet.

Amendement n° 151 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann (suite). – Rejet.

Amendement n° 77 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet par scrutin public n° 111.

Amendement n° 78 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet par scrutin public n° 112.

Suspension et reprise de la séance

Amendement n° 76 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Amendement n° 29 de Mme Éliane Assassi (suite). – Rejet.

Organisation des travaux

M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable

Article 1er A (suite)

Amendement n° 72 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 184 rectifié de M. Ronan Dantec, repris par M. Pierre Ouzoulias sous le n° 184 rectifié bis. – Rejet.

Amendement n° 73 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 34 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 211 de M. Olivier Jacquin. – Rejet.

Amendement n° 33 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Mme Éliane Assassi

Mme Angèle Préville

M. Frédéric Marchand

M. Olivier Jacquin

M. Guillaume Gontard

M. Fabien Gay

M. Pascal Savoldelli

M. Marc Laménie

M. Pierre Ouzoulias

Mme Fabienne Keller

M. Yves Daudigny

Mme Cécile Cukierman

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

M. Jérôme Bascher

M. Alain Fouché

M. Michel Canevet

Mme Laurence Cohen

Adoption, par scrutin public n° 113, de l’article modifié.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

5. Décès d’un ancien sénateur

6. Nouveau pacte ferroviaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article additionnel après l’article 1er A

Amendement n° 254 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 131 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Devenu sans objet.

Article 1er B (nouveau)

M. Guillaume Gontard

Mme Cécile Cukierman

M. Patrice Joly

M. Ronan Dantec

M. Fabien Gay

M. Olivier Jacquin

Amendements identiques nos 37 de Mme Éliane Assassi et 240 de M. Olivier Jacquin. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 152 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.

Amendement n° 241 rectifié bis de M. Olivier Jacquin. – Rejet.

Amendement n° 242 de M. Olivier Jacquin. – Rejet.

Adoption, par scrutin public n° 114, de l’article.

Article 1er C (nouveau)

Amendements identiques nos 38 de Mme Éliane Assassi et 154 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 155 rectifié quinquies de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.

Amendement n° 258 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 1er C

Amendement n° 65 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Article 1er

M. Pascal Savoldelli

Mme Marie-Noëlle Lienemann

M. Olivier Jacquin

M. Jean-Michel Houllegatte

Amendements identiques nos 49 de Mme Éliane Assassi et 243 de M. Olivier Jacquin. – Rejet, par scrutin public n° 115, des deux amendements.

Amendement n° 79 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 80 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Amendement n° 4 rectifié sexies de M. Claude Malhuret. – Adoption.

Amendement n° 81 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 174 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 259 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 82 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 39 de Mme Éliane Assassi, repris par la commission sous le n° 268. – Adoption.

Amendement n° 83 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 84 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

M. Jean-Michel Houllegatte

M. Olivier Jacquin

Adoption, par scrutin public n° 116, de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 1er

Amendement n° 26 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 21 rectifié quinquies de M. Claude Malhuret. – Retrait.

Amendement n° 87 de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public n° 117.

Amendement n° 90 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 89 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 93 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 230 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.

Article 1er bis

M. Pierre Laurent

Amendement n° 50 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 2 rectifié de Mme Fabienne Keller et sous-amendement n° 130 rectifié septies de M. Max Brisson. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 166 rectifié de M. François Bonhomme. – Devenu sans objet.

Amendement n° 40 de Mme Éliane Assassi. – Devenu sans objet.

Renvoi de la suite de la discussion.

7. Ordre du jour

Nomination d’un membre d’une mission d’information

compte rendu intégral

Présidence de M. David Assouline

vice-président

Secrétaires :

M. Éric Bocquet,

M. Michel Raison.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Candidature à une mission d’information

M. le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la mission d’information sur la réinsertion des mineurs enfermés a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

3

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart.

M. Michel Vaspart. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 105, M. Jean-Marc Boyer souhaitait voter pour, alors qu’il a été comptabilisé contre ayant voté contre.

M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

4

Article 1er A (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er A

Nouveau pacte ferroviaire

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour un nouveau pacte ferroviaire (projet n° 435, texte de la commission n° 495, rapport n° 494).

Dans la discussion du texte de la commission, nous reprenons l’examen de l’article 1er A.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Organisation des travaux (début)

Article 1er A (suite)

I. – Le livre Ier de la deuxième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 2101-1 est remplacé par dix alinéas ainsi rédigés :

« La société nationale à capitaux publics SNCF et ses filiales constituent un groupe public unifié qui remplit des missions de service public dans le domaine du transport ferroviaire et de la mobilité et exerce des activités de logistique et de transport ferroviaire de marchandises, dans un objectif de développement durable, d’aménagement du territoire et d’efficacité économique et sociale. La société nationale SNCF peut également exercer, directement ou à travers ses filiales, d’autres activités prévues par ses statuts.

« Le capital de la société nationale SNCF est intégralement détenu par l’État. Ce capital est incessible.

« La société nationale SNCF est soumise aux dispositions du code de commerce relatives aux sociétés anonymes, aux autres lois générales qui les régissent ainsi qu’aux autres dispositions particulières prévues par la loi.

« La société nationale SNCF détient l’intégralité du capital de la société SNCF Réseau mentionnée à l’article L. 2111-9 du présent code, ainsi que de la société SNCF Mobilités mentionnée à l’article L. 2141-1. Le capital de ces deux sociétés est incessible.

« Sous réserve des dispositions prévues par la loi, la société nationale SNCF définit l’organisation du groupe public qu’elle constitue avec ses filiales afin d’assurer ses missions.

« Au sein du système de transport ferroviaire national mentionné à l’article L. 2100-1, le groupe public est notamment chargé :

« 1° D’exploiter et de développer, de façon transparente et non discriminatoire, le réseau ferré national conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France ;

« 2° D’exploiter et de développer, de façon transparente et non discriminatoire, les gares de voyageurs et d’autres installations de service reliées au réseau ferré national ;

« 3° D’exercer des missions transversales nécessaires au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national au bénéfice de l’ensemble des acteurs de ce système, notamment en matière de préservation de la sûreté des personnes, des biens et du réseau ferroviaire ;

« 4° D’assurer des services de transport ferroviaire de voyageurs et de marchandises, nationaux et internationaux. » ;

1° bis (nouveau) À la première phrase du dernier alinéa du même article L. 2101-1, les mots : « aux trois établissements du groupe public ferroviaire » sont remplacés par les mots : « à la société nationale SNCF et à ses filiales » ;

1° ter (nouveau) L’article L. 2101-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2101-2. – I. – La société nationale SNCF et les sociétés relevant des activités exercées au 31 décembre 2019 par le groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … pour un nouveau pacte ferroviaire emploient des salariés régis par un statut particulier élaboré dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État et des salariés sous le régime des conventions collectives.

« II. – Sans discrimination liée à leur statut d’emploi ou à leur origine professionnelle, les salariés des sociétés relevant du champ mentionné au I peuvent occuper tout emploi ouvert sur ce périmètre, avec continuité de leur contrat de travail. » ;

1° quater (nouveau) Après l’article L. 2101-2, il est inséré un article L. 2101-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2101-2-1. – La création de filiales par la société nationale SNCF ou ses filiales dans le champ du I de l’article L. 2101-2 ne porte pas atteinte à l’application du statut mentionné au même article L. 2101-2 aux salariés précédemment régis par celui-ci.

« Cette création ne porte pas davantage atteinte, pour l’ensemble des salariés compris dans le champ du I dudit article L. 2101-2, au maintien des conventions et accords collectifs qui leur étaient applicables ainsi que des dispositions réglementaires propres au groupe public et des dispositions propres à toute société du groupe public unifié mentionné à l’article L. 2101-1 ayant pour effet d’accorder un avantage à tout ou partie des salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2261-14, L. 2261-14-2 et L. 2261-14-3 du code du travail. » ;

2° L’article L. 2111-9 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« La société SNCF Réseau a pour mission d’assurer, de façon transparente et non discriminatoire, directement ou par l’intermédiaire de filiales, conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France dans un objectif de développement durable, d’aménagement du territoire et d’efficacité économique et sociale : » ;

b) Le 5° est ainsi rédigé :

« 5° La gestion unifiée des gares de voyageurs, à travers une filiale dotée d’une autonomie organisationnelle, décisionnelle et financière ; »

c) Après le 5°, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :

« 6° La gestion et la mise en valeur d’installations de service ;

« 7° Des missions transversales nécessaires au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national, au bénéfice de l’ensemble des acteurs de ce système, notamment en matière de gestion de crise et de coordination des acteurs pour la mise en accessibilité du système de transport ferroviaire national aux personnes handicapées ou à mobilité réduite ;

« 8° (nouveau) Des missions répondant aux besoins de la défense dans le cadre de la stratégie de sécurité nationale ;

« La société SNCF Réseau est soumise aux dispositions du code de commerce relatives aux sociétés anonymes, aux autres lois générales qui les régissent ainsi qu’aux autres dispositions particulières prévues par la loi.

« À l’exception de la couverture de leurs besoins propres, SNCF Réseau et ses filiales ne peuvent assurer d’activités de transport ferroviaire. » ;

2° bis (nouveau) Après l’article L. 2111-9, sont insérés trois articles L. 2111-9-1, L. 2111-9-2 et L. 2111-9-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 2111-9-1. – La filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 a pour mission d’assurer, conformément aux principes du service public, la gestion unifiée des gares de voyageurs. À ce titre, elle est notamment chargée :

« 1° D’assurer aux entreprises de transport ferroviaire un service public de qualité en leur fournissant, de façon transparente et non discriminatoire, les services et prestations en gares mentionnés à l’article L. 2123-1 ;

« 2° De favoriser la complémentarité des modes de transports individuels et collectifs ainsi que leur coopération, conformément à l’article L. 1211-3 ;

« 3° De contribuer au développement équilibré des territoires, notamment en veillant à la cohérence de ses décisions d’investissement avec les politiques locales en matière d’urbanisme et en assurant une péréquation adaptée des ressources et des charges entre les gares qu’elle gère.

« Elle est soumise aux dispositions du code de commerce relatives aux sociétés anonymes, aux autres lois générales qui les régissent, ainsi qu’aux autres dispositions particulières prévues par la loi.

« Art. L. 2111-9-2. – Les redevances perçues pour la fourniture de services en gares aux entreprises de transport ferroviaire incitent le gestionnaire des gares à améliorer ses performances. Elles peuvent être établies sur une période pluriannuelle ne pouvant pas excéder cinq ans.

« Art. L. 2111-9-3. – La gestion des grandes gares ou ensembles pertinents de gares de voyageurs est suivie par un comité de concertation. Ce comité est notamment composé de représentants du gestionnaire des gares, des autorités organisatrices de transport concernées, des autorités organisatrices de la mobilité et des autres collectivités territoriales concernées, des entreprises de transport ferroviaire et des usagers. Il est notamment consulté sur les projets d’investissement dans et autour de la gare, les services en gare, la coordination des offres et la multimodalité, l’information des voyageurs, la qualité de service et, de façon générale, sur toute question relative aux prestations rendues dans la gare.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret. » ;

2° ter (nouveau) Après l’article L. 2111-10, il est inséré un article L. 2111-10-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 2111-10-1 A. – La filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 conclut avec l’État un contrat d’une durée de cinq ans. Ce contrat détermine en particulier les objectifs assignés au gestionnaire de gares en matière de qualité de service, de trajectoire financière, d’accès des entreprises ferroviaires aux gares, de sécurité, de rénovation et de propreté des gares et de développement équilibré des territoires.

« Le projet de contrat et les projets d’actualisation sont soumis pour avis à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.

« Le projet de contrat et les projets d’actualisation ainsi que l’avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sont transmis au Parlement. » ;

3° L’article L. 2141-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-1. – La société SNCF Mobilités exerce, directement ou à travers ses filiales, des services de transport ferroviaire et d’autres activités prévues par ses statuts.

« Elle exploite, dans ce cadre, les services de transport ferroviaire de voyageurs sur le réseau ferré national, sous réserve des dispositions du premier alinéa de l’article L. 2121-12.

« La société SNCF Mobilités est soumise aux dispositions du code de commerce relatives aux sociétés anonymes, aux autres lois générales qui les régissent ainsi qu’aux autres dispositions particulières prévues par la loi. » ;

4° (nouveau) L’article L. 2101-5 est ainsi modifié :

a) Les I et II sont ainsi rédigés :

« I. – Un accord collectif négocié au niveau du comité de groupe mentionné au III peut définir les conditions d’exercice du dialogue social au sein d’un périmètre regroupant tout ou partie des sociétés du groupe public unifié défini à l’article L. 2101-1 qui appliquent la convention collective nationale mentionnée à l’article L. 2162-1.

« II. – L’accord mentionné au I peut définir les attributions d’une instance commune dont la composition et les moyens de fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d’État. Par dérogation aux articles L. 2312-78 à L. 2312-81 et L. 2316-23 du code du travail, la gestion d’une part substantielle des activités sociales et culturelles peut être assurée par cette instance. L’accord précité en définit alors les conditions de contrôle et de mutualisation. » ;

b) Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – À défaut de conclusion de l’accord prévu au I du présent article dans un délai de six mois à compter de la constitution du groupe public unifié défini à l’article L. 2101-1 du présent code, les modalités prévues aux I et II sont fixées par décret en Conseil d’État et s’appliquent sur le champ du I de l’article L. 2101-2 du même code. » ;

5° (nouveau) L’article L. 2101-6 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2101-6. – La condition d’audience prévue à l’article L. 2122-1 du code du travail est déterminée, pour l’instance mentionnée au I de l’article L. 2101-5 du présent code, en additionnant les suffrages exprimés dans le périmètre prévu au même article L. 2101-5.

« Les négociations obligatoires prévues par le code du travail se déroulent soit au niveau du périmètre défini au I dudit article L. 2101-5 du présent code pour l’ensemble des sociétés qui le composent, soit au niveau de chacune d’entre elles.

« La répartition des thèmes de négociations en tout ou partie entre les niveaux prévus à l’alinéa précédent, selon que les mesures envisagées concernent une ou plusieurs des sociétés, est fixée par voie d’accord conclu dans les conditions fixées à l’article L. 2232-33 du code du travail au niveau du périmètre défini au I de l’article L. 2101-5 du présent code. À défaut d’accord, cette répartition est effectuée chaque année, en tenant compte de la portée des mesures envisagées pour la ou les sociétés concernées, par décision unilatérale de la direction de la société nationale SNCF après avis de l’instance prévue au I du même article L. 2101-5.

« Les accords collectifs négociés au niveau de l’ensemble des sociétés sont soumis au régime des accords d’entreprise. »

II. – Les statuts initiaux de la société nationale SNCF, de la société SNCF Réseau, de sa filiale chargée de la gestion unifiée des gares de voyageurs mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 du code des transports et de la société SNCF Mobilités sont fixés par décret en Conseil d’État. Ils sont par la suite modifiés selon les règles prévues par le code de commerce.

III. – (Non modifié) Les I et II du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2020.

Les modifications de l’organisation du groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 du code des transports, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, rendues nécessaires par la mise en œuvre des dispositions prévues au présent article au 1er janvier 2020 ne portent pas atteinte aux dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles régissant les situations des personnels employés à cette date par les établissements publics SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités.

IV. – À compter du 12 décembre 2020, le deuxième alinéa de l’article L. 2141-1 du code des transports, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est ainsi rédigé :

« Elle exploite, dans ce cadre, les services publics de transport ferroviaire de voyageurs sur le réseau ferré national. »

V. – (Non modifié) À compter du 25 décembre 2023, le deuxième alinéa de l’article L. 2141-1 du code des transports, dans sa rédaction résultant du IV du présent article, est supprimé.

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, sur cet article, trente-six amendements faisant l’objet d’une discussion commune ont été présentés hier soir.

La commission et le Gouvernement se sont exprimés.

Je vous indique que la présidence a reçu six demandes de scrutin public, sur les amendements nos 232, 3 rectifié octies, 23, 35, 77 et 78.

Avant de donner la parole aux orateurs qui souhaitent expliquer leur vote, et pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces trente-six amendements.

L’amendement n° 68, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 13

Supprimer ces alinéas.

L’amendement n° 232, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

1° Première phrase

Remplacer les mots :

La société nationale à capitaux publics SNCF et ses filiales

par les mots :

Les établissements publics à caractère industriel SNCF, SNCF Réseau, SNCF Mobilités et leurs filiales

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

société nationale

II. – Alinéas 4 à 6

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les attributions dévolues à la SNCF par le présent code à l’égard de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités sont identiques à celles qu’une société exerce sur ses filiales, au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce.

IV. – Alinéas 13 à 19

Supprimer ces alinéas.

V. – Alinéa 22

Supprimer les mots :

la société

VI. – Alinéa 24

Remplacer le mot :

filiale

par les mots :

direction dédiée

VII. – Alinéas 29 à 64

Supprimer ces alinéas.

L’amendement n° 69, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

1° Première phrase

Remplacer les mots :

La société nationale à capitaux publics

par les mots :

L’établissement public industriel et commercial

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

société nationale

II. – Alinéa 4, première phrase, alinéa 6, première phrase, alinéa 7, alinéa 15, alinéa 18, alinéa 57, seconde phrase, alinéa 59, première phrase

Supprimer les mots :

société nationale

III. – Alinéas 5,13, 29, 36 et 47

Supprimer ces alinéas.

IV. – Alinéas 22 et 45

Remplacer les mots :

La société

par les mots :

L’établissement public industriel et commercial dénommé

V. – Alinéa 59, première phrase

Remplacer la seconde occurrence des mots :

la société

par les mots :

l’établissement public industriel et commercial dénommé

L’amendement n° 71, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

remplit des missions de service public dans le domaine du transport ferroviaire et de la mobilité

par les mots :

concourt au service public ferroviaire et à la solidarité nationale

L’amendement n° 3 rectifié octies, présenté par MM. Malhuret, Fouché et Laménie, Mme Goy-Chavent, MM. Piednoir, Babary, Kern, Longeot et Moga, Mmes C. Fournier et Bruguière, MM. L. Hervé et Gremillet, Mmes Bories et Garriaud-Maylam, MM. Dennemont, Mizzon, Delcros, Savin, Dantec et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Après le mot :

durable

insérer les mots :

, de lutte contre le réchauffement climatique

L’amendement n° 70, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

développement durable,

insérer les mots :

de transition écologique,

L’amendement n° 183 rectifié, présenté par MM. Dantec, Corbisez, Gold, Léonhardt, Fouché, Longeot, Gontard, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Menonville, Requier et Vall et Mme Benbassa, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

développement durable,

insérer les mots :

de réduction des émissions de gaz à effet de serre,

L’amendement n° 24, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, seconde phrase

Rédiger ainsi le début de cette phrase :

À l’exception des activités déjà exercées par elle-même, par SNCF Réseau ou par SNCF Mobilités, la société nationale SNCF…

L’amendement n° 25, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les filiales mentionnées précédemment doivent avoir un objet connexe et complémentaire aux missions de l’ensemble du groupe public ferroviaire.

L’amendement n° 215, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités, ainsi que l’ensemble des filiales que ces entités détiennent directement ou indirectement et qui exercent sur le territoire français une activité de transport ferroviaire de voyageurs ou de marchandises ainsi que toute activité liée aux gares, constituent le « groupe public ferroviaire unifié » au sein du système ferroviaire national. Ce groupe d’entreprises a un caractère indissociable et solidaire.

L’amendement n° 234, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6,

1° Première phrase

Supprimer les mots :

de la société SNCF Réseau mentionnée à l’article L. 2111-9 du présent code, ainsi que

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

ces deux sociétés

par les mots :

cette société

II. – Alinéa 13

Avant les mots :

à la société

insérer les mots :

à l’établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Réseau,

III. – Alinéa 22

Remplacer les mots :

La société

par les mots :

L’établissement public à caractère industriel et commercial

IV. – Alinéa 24

Remplacer le mot :

filiale

par les mots :

direction dédiée

V. – Alinéas 29 et 59

Supprimer ces alinéas.

L’amendement n° 256, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

du présent code, ainsi que

par le mot :

et

L’amendement n° 235, présenté par M. Jacquin, Mme Lienemann, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mme de la Gontrie, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La part publique du capital des filiales de la société nationale SNCF, de la société SNCF Réseau et de la société SNCF Mobilités est également incessible.

L’amendement n° 23, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 15

1° Après les mots :

d’État et

insérer les mots :

, de manière dérogatoire,

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ces dérogations sont soumises à l’avis conforme de la commission nationale mixte instituée par l’arrêté du 12 décembre 2000.

L’amendement n° 35, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 24

Après le mot :

voyageurs

supprimer la fin de cet alinéa.

II. – Alinéas 32 et alinéa 41, première phrase

Remplacer les mots :

La filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9

par les mots :

SNCF Réseau

III. – Alinéa 59, première phrase

Supprimer les mots :

, de sa filiale chargée de la gestion unifiée des gares de voyageurs mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 du code des transports

L’amendement n° 214, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

à travers une filiale dotée d’une autonomie organisationnelle, décisionnelle et financière

par les mots :

; cette activité est exercée directement par SNCF Réseau dans des conditions définies par décret en Conseil d’État propres à garantir l’indépendance des fonctions essentielles du gestionnaire de gares et l’autonomie de son activité

L’amendement n° 233, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 24, 32, 41 et 59

Remplacer le mot :

filiale

par les mots :

direction dédiée

L’amendement n° 168, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Après le mot :

filiale

insérer les mots :

dont elle exerce le contrôle

L’amendement n° 236, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Compléter cet alinéa par les mots :

et dont le capital est intégralement détenu par des capitaux publics

L’amendement n° 237, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Siègent au conseil d’administration de cette filiale des représentants des collectivités territoriales, des organisations syndicales représentatives et des associations agrées d’usagers des transports. Leur nombre et répartition sont fixés par décret.

L’amendement n° 129, présenté par M. Longeot, est ainsi libellé :

Alinéa 36

Compléter cet alinéa par les mots :

, visant en particulier à assurer la prise en compte de ses états comptables dans ceux de SNCF Réseau selon la méthode de la mise en équivalence

L’amendement n° 238, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 38

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 crée une société de gestion pour gérer les espaces commerciaux des grandes gares, des représentants des collectivités territoriales, des organisations syndicales représentatives et des associations agréées d’usagers des transports siègent à son conseil d’administration. Leur nombre et répartition sont fixés par décret.

L’amendement n° 239, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 38

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les gares, des espaces destinés à des activités à but non lucratif sont réservés aux collectivités territoriales.

L’amendement n° 213, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 41

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour tout projet afférent à l’avenir d’une gare, les collectivités territoriales sont associées.

L’amendement n° 36, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 42 et 43

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Le projet de contrat et les projets d’actualisation sont soumis pour avis à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, au Conseil économique, social et environnemental et au Parlement. » ;

L’amendement n° 74, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 45

Supprimer les mots :

, directement ou à travers ses filiales,

L’amendement n° 75, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 46

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elle exploite selon les principes du service public, les services de transport ferroviaire sur le réseau ferré national.

II. – Alinéas 62 à 64

Supprimer ces alinéas.

L’amendement n° 257, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 46

Après le mot :

réserve

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

du second alinéa du II de l’article 1er ter de la loi n° … du … pour un nouveau pacte ferroviaire.

L’amendement n° 149 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot, est ainsi libellé :

Alinéa 50

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« I. – Tout accord collectif négocié au niveau du comité de groupe mentionné au III s’applique dans les mêmes termes au sein des sociétés du groupe public unifié…

L’amendement n° 216 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 50

Compléter cet alinéa par les mots :

en vue d’un socle de droits communs à l’ensemble de ces sociétés

L’amendement n° 150 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mmes Préville, G. Jourda et Monier et MM. M. Bourquin, Duran, Todeschini et Tissot, est ainsi libellé :

Alinéas 52 et 53

Supprimer ces alinéas.

L’amendement n° 151 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot, est ainsi libellé :

Alinéa 53

Remplacer le mot :

six

par le mot :

douze

et les mots :

un décret en Conseil d’État

par les mots :

une loi votée par le Parlement

L’amendement n° 77, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 59, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ces statuts prévoient par une clause spécifique l’inaliénabilité des actions détenues par l’État.

L’amendement n° 78, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 59, après la première phrase

Insérer deux phrases ainsi rédigées :

Ces statuts prévoient un mécanisme d’agrément pour la cession des actions détenues par l’État. Cet agrément est donné par l’Assemblée générale des sociétés anonymes.

L’amendement n° 76, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 61

Supprimer les mots :

à cette date

L’amendement n° 29, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 64

Remplacer l’année :

2023

par l’année :

2033

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’amendement n° 68.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, nous voilà, avec cet amendement tendant à la suppression de la transformation des trois EPIC, ou établissements publics à caractère industriel et commercial, en sociétés anonymes, à l’épisode 3 du débat sur le changement de statut.

Comme je vous le disais hier soir, une question me taraude. Un certain nombre d’entre nous vous ont interrogée sur les raisons réelles de cette modification. Je suis désolé, je n’ai pas compris pourquoi, politiquement, vous souhaitiez ce changement.

Le quatrième paquet ferroviaire adopté par l’Union européenne n’en fait pas une condition de l’ouverture à la concurrence, à laquelle, du reste, nous nous opposerons.

Les usagers ne le demandent pas davantage. Je le répète, ils demandent que les trains arrivent à l’heure et que des investissements soient réalisés en faveur des trains, notamment des trains du quotidien.

Ce n’est pas non plus une revendication des cheminots, très massivement opposés à cette modification.

Je ne connais qu’une personne qui y est favorable : c’est Guillaume Pepy, qui, déjà en 2014, lors de la précédente réforme, défendait la solution de la société anonyme. Il avait échoué, puisque la formule des trois EPIC l’avait emporté.

Madame la ministre, nous vous avons donné de nombreux exemples de transformations en société anonyme qui avaient été assorties d’une privatisation partielle. Nous avons notamment évoqué l’exemple d’Engie.

Vous n’avez pas répondu à notre interrogation.

M. Fabien Gay. Dès lors, permettez-nous de douter, surtout quand on connaît la politique libérale que vous menez depuis un an. Pis, vous libéralisez un certain nombre de secteurs du service public. Nous discuterons bientôt de la formation professionnelle ou de l’apprentissage, que vous allez livrer aux appétits du privé.

J’y insiste, pourquoi voulez-vous transformer les trois EPIC en sociétés anonymes, si ce n’est pour préparer la privatisation ?

Tant que nous n’y aurons pas obtenu de réponse, nous vous reposerons cette question.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 232.

M. Olivier Jacquin. Notre amendement présente une nuance par rapport au précédent.

Nous sommes favorables au rattachement de Gares & Connexions à SNCF Réseau.

Mme la ministre nous a expliqué qu’il fallait, en parfaite continuité avec le travail effectué en 2014, fluidifier le fonctionnement de l’entreprise SNCF. On ne peut pas dissocier totalement le train du rail qui le porte. Le même principe vaut pour les organisations.

En ce sens, nous proposons de revenir au statut d’EPIC. Nous pensons, comme nos amis du groupe CRCE, que la transformation des EPIC en sociétés anonymes n’apportera pas grand-chose de plus, à part, peut-être, juridiquement, un meilleur contrôle par la holding de tête sur les deux sociétés filiales. Mais, sur le fond, en termes de coût global pour nos concitoyens, notamment compte tenu du recours à l’emprunt, la solution proposée n’est pas très favorable.

Madame la ministre, au vu des décisions politiques prises depuis quelques mois et des intentions de vente d’autres entreprises publiques, nous présumons qu’une libéralisation pourrait intervenir après-demain, au travers d’une nouvelle loi.

De ce point de vue, le statut actuel d’EPIC nous semble bien meilleur pour préserver le domaine public et donner un nouvel élan à cette grande et belle entreprise de notre République.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 232.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 92
Contre 250

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’amendement n° 69.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, voici l’épisode 4 !

Je reviens toujours à la question qui me taraude, mais je vais aller plus loin.

Si la transformation en société anonyme a lieu, nous nous doutons bien que la question de la dette va suivre.

Vous nous annoncez que vous reprendrez celle-ci en partie, mais pas totalement. Toutefois, vous savez très bien que le nouveau statut de société anonyme va dégrader la note de la dette ! Nous en avons parlé hier soir. D’ailleurs, vous ne nous avez pas contredits sur ce point. La note passera de AA- à BB- et les taux d’intérêt, jusque-là gagés sur l’EPIC, donc sur l’État, augmenteront. Je laisse mon collègue Pascal Savoldelli, qui est un spécialiste des questions de dette, s’exprimer sur ce sujet.

Tôt ou tard, vous nous direz qu’il n’y a plus d’argent, que l’on ne peut plus investir… Les solutions, on les connaît : accoler la SNCF à une entreprise privée pour permettre l’investissement, comme cela a été fait avec GDF ; demander des gains de productivité aux cheminots et cheminotes et à l’ensemble des salariés de la SNCF ; réduire les coûts, c’est-à-dire licencier, ce qui sera d’autant plus facile que vous allez vous attaquer au statut des cheminots. Nous commençons déjà à voir ce scénario se dessiner, et nous pourrions bien le voir aboutir avant la fin de l’année 2022.

Est-ce bien cela que vous préparez ? Est-ce bien là votre volonté politique ? J’aimerais que vous répondiez à cette question précise. Or, madame la ministre, vous ne répondez à aucun des arguments que nous avons énumérés depuis le début des débats.

Après cet épisode 4, la série peut être encore longue ! Les bons films ont toujours plusieurs épisodes… Cependant, tout a une fin, et il faudra bien que vous répondiez à un moment ou à un autre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, le sujet est sérieux ! Vous ne pouvez pas présenter notre action de manière aussi contraire à la réalité.

Nous sommes en train de reprendre 35 milliards d’euros de dette. C’est historique ! Voilà des années que les gouvernements successifs balayaient ce sujet sous le tapis. (Mme Marie-Noëlle Lienemann sexclame.)

Nous sommes en train d’investir plus que cela n’a jamais été fait dans le transport ferroviaire. Nous avons prévu toutes les garanties dans le projet de loi pour préserver le caractère public de la SNCF.

Par conséquent, je vous pose la question : pourquoi faire circuler des contre-vérités de nature à inquiéter les cheminots au moment où le Gouvernement envoie un message de confiance dans le transport ferroviaire, dans la SNCF et aux cheminots ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 69.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’amendement n° 71.

M. Guillaume Gontard. Je ne sais à quel épisode nous en sommes, mais je constate, madame la ministre, que nous n’avons toujours pas obtenu de réponse, parce que vous avez répondu à côté.

En revanche, dans votre intervention, vous avez indiqué qu’il était historique que l’État reprenne 35 milliards d’euros de dette, et que celle-ci était le sujet numéro un.

Si cette question est si importante, si c’est le cœur de la réforme, pourquoi l’annonce de la reprise de la dette n’a-t-elle été faite que vendredi dernier ? Il y a de quoi étonner ! Les annonces n’ont pas manqué – sur le statut du cheminot, sur le passage au statut de société anonyme…. –, mais, de la reprise de la dette, vous n’avez parlé à aucun moment. Ce sujet n’est arrivé que dernièrement.

S’il s’agissait du sujet numéro un, je suis un peu surpris que le Premier ministre n’en ait fait l’annonce que vendredi dernier.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, vous parlez de contre-vérités, mais vous assénez un certain nombre d’arguments sans avancer aucune preuve.

Les arguments que nous mettons en avant depuis le début de nos débats sont sérieux et dépassent largement le cas de la France. Nous avons évoqué ce qui se passe en Allemagne, en Angleterre, en Italie, en Espagne, où l’on retrouve toujours le même scénario : au bout du bout, on privatise et on dégrade le service public, et la dette n’est qu’un prétexte.

Mme Élisabeth Borne, ministre. On n’a privatisé dans aucun de ces pays !

Mme Laurence Cohen. Vous dites que l’on n’a jamais autant investi. Pour avoir longtemps siégé au STIF, le syndicat des transports d’Île-de-France, je sais que le sous-investissement a été une réalité.

Aujourd’hui, l’État se doit d’investir, non seulement dans le matériel roulant, mais aussi dans l’entretien des voies. Et les passagers connaissent une situation terriblement dégradée du fait du désengagement de l’État.

Madame la ministre, vous ne faites pas une bonne action : vous faites votre devoir ! Il vous appartient de revaloriser un service public, pour le bien commun. Cet effort doit porter non seulement sur les grandes lignes, mais aussi sur les lignes que l’on qualifie de « petites » – à titre personnel, je n’aime pas cette terminologie, et je crois savoir que vous non plus ; au moins, nous sommes d’accord sur un point. Il s’agit de desservir nos territoires.

Quand on porte une réforme, il faut l’assumer et aller jusqu’au bout de sa logique. Votre logique, c’est casser le service public et dégrader l’offre de transport. (M. François Patriat sexclame.)

Mme Élisabeth Borne, ministre. Trente-cinq milliards d’euros !

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. On ne peut que se féliciter que le Gouvernement décide de prendre à son compte une partie de la dette, à hauteur de 35 milliards d’euros, en deux fois.

Comme l’a dit hier mon collègue Olivier Jacquin, la situation était la même quand nous nous sommes emparés du dossier de la SNCF, que vous connaissiez très bien, madame la ministre. Notre déficit budgétaire s’élevait à plus de 5 % du PIB. Il est aujourd’hui ramené, en partie grâce aux efforts du gouvernement précédent, à moins de 3 % de la richesse nationale, ce qui permet de reprendre de la dette sans dégrader les comptes de l’État.

Soyons clairs : nous souscrivons à cette reprise de dette, même s’il faudra que vous nous donniez quelques précisions sur ses conditions.

En effet, sans vouloir verser dans la polémique politicienne, j’ai à l’esprit un certain nombre d’exemples que les syndicats étrangers nous ont rapportés. Ainsi, même en Allemagne, la dette est repartie, alors qu’elle avait été complètement reprise par l’État.

Nous sommes d’accord pour que l’on règle ainsi une partie du problème. Cependant, je tenais, au nom du groupe socialiste et républicain, à rétablir cette vérité.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Madame la ministre, arrêtez de laisser croire que ce sont les sénatrices et les sénateurs de mon groupe et de ma famille politique qui inquiéteraient les cheminots ! Les plus grands experts de la SNCF, ce sont les cheminots eux-mêmes, et personne d’autre !

En outre, les cheminots connaissent votre stratégie, la stratégie des libéraux, dont vous faites partie.

Des expériences consistant à investir pour privatiser ensuite ont déjà été menées dans notre pays. Pensons aux autoroutes, ou encore à ADP.

Ne doutons ni de l’intelligence des cheminots ni de leurs capacités de réflexion. C’est leur connaissance des réalités qui les fait craindre pour l’avenir de leur entreprise.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, voici l’épisode 5… (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Puisque nous ne parvenons pas à nous mettre d’accord, je vais prendre un exemple très concret.

Comme un certain nombre de mes collègues du groupe CRCE, je suis un usager quotidien du RER B, que je prends à la gare du Blanc-Mesnil. Éliane Assassi, la présidente de mon groupe, le prend à Drancy. Pierre Ouzoulias le prend au sud de Paris – il faut dire que c’est un privilégié… (Exclamations sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

Plus sérieusement, le RER B fonctionne très mal,…

Mme Élisabeth Borne, ministre. C’est vous qui le dites !

M. Fabien Gay. … et cela ne date pas d’aujourd’hui. Tous les matins, quand je le prends, je m’interroge : la transformation des trois EPIC en sociétés anonymes va-t-elle, oui ou non, améliorer le quotidien des usagers du RER B ?

Sur les quais, personne n’en parle. En revanche, comme je l’ai constaté encore ce matin, un certain nombre d’usagers estiment qu’il faut investir. En effet, il faut investir 300 millions d’euros dans le matériel roulant, pour éviter notamment les pannes fréquentes de caténaires. Beaucoup évoquent le doublement du tunnel de Châtelet, qui, on le sait, coûte 3 milliards d’euros.

Il faut également investir pour la réalisation de la ceinture entre Mitry-Claye et l’aéroport Charles-de-Gaulle.

Dans la partie sud, il faudrait rehausser les ponts pour permettre la circulation de RER à double étage.

Bref, les besoins d’investissement sont importants.

Je vous repose la question, madame la ministre : la transformation des trois EPIC en sociétés anonymes va-t-elle régler notre problème ? Non ! Il y a donc autre chose derrière.

Vous pouvez toujours affirmer que nous jouons avec le feu. Je vous le répète une nouvelle fois, les cheminots et les cheminotes n’ont pas besoin de nous pour être inquiets. Certainement pas ! Avec un taux de participation de 60 %, 95 % des cheminots et cheminotes ont voté non à votre réforme. Vous voyez bien qu’il y a un problème.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je veux d’abord vous adresser un petit clin d’œil, chers collègues du groupe Les Républicains.

Au début de nos débats, nous avons échangé sur nos interprétations respectives des dispositions du règlement du Sénat relatives à la question préalable.

Ce soir, je constate que vous faites du scrutin public un usage particulier : il s’agit non pas de trancher telle ou telle question, mais de suppléer à un manque quantitatif de participation sur cette grande réforme que vous applaudissez souvent. Vous avez utilisé le scrutin public parce que vous n’étiez pas majoritaires dans cet hémicycle.

Venons-en au sujet, et essayons d’avancer sur la question de la dette, madame la ministre.

Vous qui connaissez très bien ce dossier, vous savez que celle-ci est composée d’emprunts obligataires privés et publics, aux taux d’intérêt fixes, allant de 0 à 4 %, pour 90 % d’entre eux. Par ailleurs, 15 milliards d’euros de cette dette ont été contractés en devises étrangères, 5 milliards d’euros en livres sterling et 2 milliards d’euros en francs suisses. Un tiers des emprunts a été contracté en obligations privées, quand deux tiers l’ont été en obligations publiques, pour un peu plus de 3 milliards d’euros par an

SNCF Réseau a eu recours au programme des NEU CP, emprunts à court terme remboursables entre 1 et 365 jours, souscrits auprès de la Banque de France, mais aussi des banques centrales d’autres nations. Les intérêts de ces prêts sont négatifs : moins 0,66 % pour SNCF Réseau ; moins 0,78 % pour SNCF Mobilités.

SNCF Réseau, en 2017, a emprunté 1,7 milliard d’euros à taux négatif pour son financement, permettant un engagement à hauteur de 9 milliards d’euros, et recourt aux emprunts obligataires que sont les greens bonds, emprunts écologiques publics dont le taux est inférieur aux taux du marché et à durée allongée.

Madame la ministre, nous voulons vous poser une question très simple, mais susceptible d’intéresser l’ensemble des parlementaires, par-delà les différences de sensibilités, car il s’agit tout de même des deniers de l’État.

Personne ici n’a critiqué votre décision de reprendre la dette, au niveau que vous avez annoncé. Au reste, il n’y a pas lieu de le faire. Cependant, comment seront faits les arbitrages ? Allez-vous rembourser la dette ancienne, aux taux d’intérêt élevés, ou privilégier la dette récente, contractée à un faible taux ? Allez-vous reprendre la dette en devises étrangères ?

La réponse est importante, car la somme en jeu est considérable. (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue. Vous avez dépassé votre temps de parole de trente secondes.

M. Pascal Savoldelli. Nous avons le droit d’obtenir une réponse à cette question !

M. le président. Mes chers collègues, il reste encore quelque 250 amendements à examiner ! Par conséquent, j’invite chacun à ne pas dépasser son temps de parole.

La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je ne reviendrai pas sur les propos de mon collègue Claude Bérit-Débat, qui a expliqué en quoi le remboursement de la dette était salutaire et pourquoi il pouvait intervenir maintenant.

Ma réflexion est complémentaire.

Il est essentiel de désendetter l’entreprise ferroviaire.

Aucun système ferroviaire au monde n’est rentable seul, tant le monopole ouvert qu’il constitue nécessite de capitaux et de concours publics.

Il serait extrêmement intéressant de reproduire l’exercice qui figure dans le rapport de Jean-Cyril Spinetta pour déterminer les conditions de la rentabilité dans l’hypothèse où chaque investissement donnerait lieu à un financement public à hauteur des deux tiers. On pourrait ensuite jouer sur le prix du billet des voyageurs pour tenter d’amortir la dette, dans une perspective éventuelle de retour à l’équilibre financier.

Tant qu’on n’aura pas trouvé un mécanisme clair et durable, il est fort possible que l’on ait à faire face à un nouvel endettement. Je l’ai dit hier dans le cadre de la discussion générale, le désendettement est plus que positif, mais il faut un mécanisme complémentaire qui discrimine positivement le ferroviaire au regard des modes de transport qui ne paient pas leur infrastructure. Je vous le rappelle, le prix d’un billet de train comprend le coût des rails. Mais quand on achète un billet de bus ou d’avion, on ne paie pas l’infrastructure.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Il faut bien un aéroport !

M. Olivier Jacquin. Par ailleurs, pourquoi la reprise de la dette intervient-elle maintenant ? Madame la ministre, j’ai eu l’occasion de discuter avec vos prédécesseurs, MM. Cuvillier et Vidalies, qui ont respectivement mené la réforme de 2014 et les discussions sur le quatrième paquet ferroviaire, des raisons pour lesquelles la dette n’avait pas été remboursée plus tôt. Vous connaissez leur explication.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Non !

M. Olivier Jacquin. De nombreuses études ont été conduites sur le coût du financement de la dette, dans le cadre d’un désendettement de SNCF Réseau lié à un changement de statut, à savoir une transformation en société anonyme, afin de ramener l’entreprise à un endettement « soutenable ». Le surcoût de financement lié au changement de statut est évalué à 0,5 % environ.

Madame la ministre, nous avons besoin d’un document écrit répondant aux questions pertinentes qui se posent concernant la dette de la SNCF.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Olivier Jacquin. Il s’agit notamment de déterminer un protocole d’accord et un contrat de performance, et de justifier le report à 2020 et 2022, qui ne fera que creuser encore plus l’endettement actuel de SNCF Réseau.

M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.

M. Michel Dagbert. Madame la ministre, vous le savez, nous ne sommes pas partisans de l’immobilisme. Nous sommes donc favorables aux évolutions et aux réformes d’une structure aussi importante pour la mobilité de nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas sur la question de la dette. En effet, comme l’a dit Ronan Dantec la nuit dernière, j’ai le sentiment que nous devons parler non pas de la dette de la SNCF, mais plutôt de la dette de chacune et chacun de nous. Ainsi, un certain nombre de choix industriels ont été faits, qu’il ne s’agit pas de remettre en cause aujourd’hui, tant les élus étaient nombreux dans l’ensemble des territoires à vouloir que ceux-ci soient desservis par le TGV. Force est de le constater, l’ensemble du réseau a souffert et s’est dégradé durant cette période.

Madame la ministre, je vous écoute avec beaucoup d’intérêt et d’attention. Pour autant, vous n’avez pas réussi, ni la nuit dernière ni ce jour, à me convaincre de la pertinence et de l’intérêt du passage en société anonyme. Je considère que l’ensemble de la réforme que vous portez pourrait aller à son terme, sans changement de statut de l’EPIC en SA, ce sujet constituant aujourd’hui un point de blocage.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote sur l’amendement n° 3 rectifié octies.

M. Ronan Dantec. J’avoue avoir été un peu surpris par la réponse apportée par Mme la ministre hier soir.

Édouard Philippe a déclaré le 4 avril dernier : « Le projet de loi constitutionnelle inscrira l’impératif de lutte contre le changement climatique à l’article 34, qui définit le domaine de la loi. »

À partir du moment où l’on considère que le climat est tellement essentiel qu’il doit figurer dans la Constitution, est-il cohérent de ne pas inscrire une telle notion dans un texte relatif à la SNCF, au vu de l’importance de l’enjeu sur la mobilité et les émissions de gaz à effet de serre ? Très honnêtement, je ne le crois pas.

Je vous ai entendu affirmer, madame la ministre, que cette notion figurait déjà dans le texte. J’ai relu ce dernier, et je n’y ai trouvé aucune référence. Certes, une demande de rapport sur le climat figurait à la fin du projet de loi transmis par l’Assemblée nationale. Toutefois, dans la mesure où le Sénat est allergique aux rapports, l’article en question a été supprimé. À ma connaissance – mais j’ai pu mal lire –, il n’y a strictement aucune référence au climat dans ce texte, bien qu’il s’agisse d’un enjeu absolument essentiel, dont la SNCF est un acteur central.

Les signataires des amendements portant sur cette question siègent sur presque toutes les travées de cet hémicycle, l’amendement n° 3 rectifié octies, dont les premiers signataires sont MM. Malhuret et Fouché, étant sans doute le plus consensuel.

Je le rappelle, la définition du développement durable, qui remonte au rapport Brundtland de 1987, n’est pas celle du climat. Le premier accord sur le climat, le protocole de Kyoto, est intervenu dix ans plus tard. Quant à la première convention relative aux changements climatiques, elle remonte à 1992.

Il s’agit non pas de rendre la loi bavarde, mais de prendre en compte un enjeu majeur. Dans le cadre de cette notion, la SNCF devra énoncer, en tant que grand service public, les modalités de sa participation à la lutte contre le dérèglement climatique.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.

M. Frédéric Marchand. Cet amendement et les deux suivants tombent bien, puisque démarre aujourd’hui la Semaine européenne du développement durable. À l’intérieur du texte, les mots ont leur importance. Nul dans cette enceinte ne niera l’importance des questions de développement durable, de transition écologique et de réchauffement climatique.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons en faveur du présent amendement.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Mon groupe soutient l’argumentation de notre collègue Ronan Dantec. Nous sommes face à trois amendements qui se recoupent en partie. Sans doute serait-il souhaitable d’adopter celui que l’on pourrait qualifier de plus petit dénominateur commun.

Franchement, madame la ministre, le rejet de cet amendement n’irait pas dans le sens de l’accord de Paris sur le climat. Je le rappelle, 88 % des marchandises sont transportées par la route, et seulement 10 % par le train et 2 % par voie fluviale.

J’ai fait un petit calcul sur la pollution. Le train, c’est 12 kilos équivalents CO2 – c’est le potentiel de réchauffement global d’un gaz à effet de serre –, l’autocar, 58, la voiture, 171.

Dans notre hémicycle, les élus sont nombreux à demander que le climat soit pris en compte. Le rôle du rapporteur, me semble-t-il, est de rechercher un consensus, dans la mesure où, sur le sujet des émissions de gaz à effet de serre, nous sommes tous d’accord.

Enfin, mes chers collègues, il y a là également un enjeu de santé publique. Une grande ambition pour un projet ferroviaire ne peut pas aller à l’encontre des enjeux dans ce domaine.

Acceptez donc cet amendement, en faisant preuve de responsabilité et de raison.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. La part modale du ferroviaire dans le transport de marchandises étant passé de 10,6 % à 9,6 %, nous demandons une véritable stratégie de promotion des modes de transport verts.

Il s’agit simplement d’insérer dans le texte les mots « lutte contre le réchauffement climatique ». Je suis d’ailleurs surpris que la commission et le Gouvernement aient émis un avis défavorable sur cet amendement, puisque nous y avons travaillé en liaison avec le cabinet de Mme la ministre.

En outre, il est cosigné par des membres des groupes Les Républicains, du RDSE, Union centriste, La République en marche et Les Indépendants – République et Territoires, soit par une très grande majorité des élus de notre assemblée.

Je maintiens donc cet amendement, pour lequel j’ai demandé un scrutin public.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Si le groupe socialiste et républicain n’a pas consigné cet amendement, il le votera, car il semble aller dans le bon sens.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. La nécessité d’introduire une notion climatique dans ce texte est évidente.

Vous appelez à la discussion et au rassemblement ; or tel est à présent le cas ! La SNCF doit évoluer. Je rappelle que l’Allemagne achète 14 locomotives à hydrogène à l’entreprise Alstom. La question climatique est donc au cœur du développement de l’entreprise.

Je ne vois pas comment nous pourrions rejeter cet amendement.

M. Alain Fouché. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. L’inégalité de traitement que subit le ferroviaire alors qu’il est vertueux au plan environnemental constitue sans aucun doute la faiblesse du projet de loi que vous nous présentez, madame la ministre. En effet, vous ne rétablissez pas une égalité de traitement par rapport aux autres modes de transport, puisque vous ne proposez pas, sur le long terme, un dispositif financier permettant de souligner les externalités positives du ferroviaire.

Dans les écocomparateurs existants, je relève qu’un trajet entre Paris et Bordeaux en avion, c’est 194 kilos équivalents CO2 par passager ; la voiture, 150; et le train, 22. Bien que la loi de transition énergétique pour la croissance verte nous impose des obligations que nous devons à nos enfants, celles-ci ne sont pas prises en compte.

Soutenir cet amendement, c’est plus que la moindre des choses ! Quant à imaginer un dispositif financier vertueux, ce sera une autre étape.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Nous sommes toutes et tous solidaires de la défense, ou de la bataille, du rail, comme en témoigne cet amendement, qu’un certain nombre d’entre nous ont cosigné.

On ne peut que le regretter, les camions et les cars sont de plus en plus nombreux à sillonner les routes. Certes, ils ont également leur utilité, mais l’infrastructure ferroviaire est malheureusement sous-utilisée dans bon nombre de cas.

Le rail est un bon exemple du combat permanent qu’il nous faut mener en faveur du développement durable et de la lutte contre le réchauffement climatique. C’est une bataille qu’il nous faudra gagner, dans le temps.

Cet amendement relève tout à la fois des notions de solidarité et de santé publique.

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour explication de vote.

Mme Martine Berthet. Compte tenu de l’importance des déplacements les moins polluants possible dans nos vallées savoyardes, je voterai également en faveur de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. J’ai bien entendu, émanant de toutes les travées, la volonté d’inscrire la notion de lutte contre le réchauffement climatique dans le texte.

Certains de mes collègues n’étant pas présents hier soir, permettez-moi de redonner l’avis de la commission sur ces amendements, qui tendent à introduire des éléments différents. L’amendement n° 3 rectifié octies de M. Malhuret vise la notion de réchauffement climatique ; l’amendement n° 70 de Mme Assassi, la notion de transition écologique ; l’amendement n° 183 rectifié de M. Dantec, la notion de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

En tant que rapporteur, j’estime que l’adoption de ces trois amendements aurait abouti à une loi extrêmement bavarde, d’autant que, dans le texte, était déjà mentionné un objectif de développement durable, d’aménagement du territoire et d’efficacité économique et sociale, ce qui me semblait assez complet.

Je l’ai bien compris, il y a aujourd’hui plus qu’un ralliement à l’amendement de M. Malhuret. C’est un progrès auquel je suis sensible, puisque la loi sera ainsi un peu moins bavarde.

Dans la mesure où vous estimez essentiel, mes chers collègues, d’introduire la notion de lutte contre le réchauffement climatique, je me rallie à cette position. Finalement, c’est cela le débat. En renonçant aux deux autres amendements, vous adoptez une voie médiane. C’est la raison pour laquelle je reviens sur l’avis que j’ai donné hier soir. Dans un tel contexte, il me semble opportun de renoncer au scrutin public qui a été demandé, un consensus semblant se dessiner dans l’hémicycle.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je souhaite clarifier ma position. Je n’ai aucun doute sur l’importance du transport ferroviaire dans notre politique de lutte contre le changement climatique. Vous le savez, elle est au cœur des objectifs du Gouvernement.

Comme M. le rapporteur, il me semblait que ce point figurait déjà dans le texte. Pour autant, je suis tout à fait prête à rectifier ma position et à émettre un avis favorable sur cet amendement.

Néanmoins, je voudrais que nous en soyons tous conscients, il ne suffit pas d’inscrire ces objectifs, ces proclamations, dans une loi. Il faut ensuite mettre en œuvre les politiques adéquates. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)

C’est notamment ce qui nous conduira à revoir le contrat entre l’État et SNCF Réseau qui avait été signé par le précédent gouvernement et prévoyait une hausse de près de 5 % par an des péages du fret ferroviaire. Cela n’est manifestement pas favorable au développement de ce mode de transport ! J’ajoute – il faut que chacun en soit conscient – que le mouvement actuel, qui a certainement toute sa légitimité, met en grande difficulté le fret ferroviaire et les entreprises qui en dépendent.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il faut écouter les cheminots !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je pense aux producteurs de céréales, à la filière de la construction, à la sidérurgie, dont un certain nombre de sites sont menacés par le chômage technique.

C’est bien d’inscrire dans la loi qu’on favorise la lutte contre le changement climatique en développant le fret ferroviaire. C’est bien, également, de mettre la réalité en conformité avec ses engagements. (Applaudissements sur des travées du groupe Union centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La commission et le Gouvernement ayant finalement émis un avis favorable, monsieur Fouché, la demande de scrutin public sur l’amendement n° 3 rectifié octies est-elle maintenue ?

M. Alain Fouché. J’ai bien compris ce qu’a dit Mme la ministre et je lui fais confiance.

Je retire naturellement la demande de scrutin public sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié octies.

(Lamendement est adopté.) (M. Ronan Dantec applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote sur l’amendement n° 70.

M. Pascal Savoldelli. Ne vous inquiétez pas, mes chers collègues, nous allons retirer cet amendement, dans un esprit de responsabilité.

Je souhaite simplement apporter un éclairage supplémentaire, madame la ministre. Ce sujet relève, selon nous, de l’intérêt de la France. Notre pays a un déficit commercial lié à nos liens avec les produits pétroliers de 39 milliards d’euros, ce qui constitue un véritable handicap. Notre ambition dans le domaine du fret, y compris dans celui du transport fluvial, pourrait permettre à notre balance commerciale d’évoluer. Cet élément non dogmatique me paraît extrêmement constructif.

Nous retirons l’amendement n° 70, en raison de notre ralliement à l’amendement n° 3 rectifié octies.

M. le président. L’amendement n° 70 est retiré.

Monsieur Dantec, l’amendement n° 183 rectifié est-il maintenu ?

M. Ronan Dantec. Comme je l’ai précisé hier soir, nous ne souhaitons pas aboutir à une énumération de différents libellés dans la loi. Notre assemblée ayant décidé de retenir celui de l’amendement n° 3 rectifié octies, je retire donc l’amendement n° 183 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 183 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 24.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 25.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 215.

M. Olivier Jacquin. Je veux poser une nouvelle fois la question que j’ai posée hier lors de la présentation des amendements, et à laquelle je n’ai pas reçu de réponse.

Madame la ministre, vous nous l’avez bien expliqué, vous avez la volonté de mieux unifier le ferroviaire. Effectivement, train et rail doivent être rapprochés en matière de gouvernance. Lorsqu’il y a une trop grande scission entre les deux, comme c’était le cas au temps où RFF était séparé de SNCF, cela peut conduire à des désordres majeurs. Une trop grande séparation des acteurs entraîne de nombreuses interfaces, qui ont un coût énorme et nuisent à la sécurité, en favorisant d’éventuels accidents par un manque de coordination. Nous sommes donc d’accord avec votre volonté d’unification.

Par ailleurs, vous nous avez dit, monsieur le rapporteur, que, selon l’ARAFER, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, qui contrôle l’ouverture à la concurrence, il est nécessaire que les opérateurs puissent utiliser le réseau de la manière la plus neutre possible. On peut le comprendre, pour éviter ce qu’on voit dans certains pays. Ainsi une procédure d’infraction européenne est-elle en cours contre l’organisation trop intégrée de la Deutsche Bahn. Il y a là un paradoxe !

Je comprends mal, monsieur le rapporteur, la logique de filialisation qui se dissimule derrière la création de sociétés anonymes. En effet, en filialisant comme vous le laissez entendre, on créera des interfaces qui complexifieront la bonne gouvernance du rail et le lien entre locomotive et rail.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 215.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Olivier Jacquin. Dans ces conditions, je retire l’amendement n° 234, qui est un amendement de repli, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 234 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 256.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 235.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 23.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 109 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l’adoption 15
Contre 250

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’amendement n° 35.

M. Guillaume Gontard. Il est prévu de transformer Gares & Connexions en filiale. Ce qui m’étonne dans cette pratique de la création de filiales, c’est que Mme la ministre nous a expliqué hier – c’était le seul argument donné à l’appui du passage en société anonyme – que l’objectif était d’unifier. Or on s’aperçoit que, petit à petit – cela commence avec Gares & Connexions –, on crée des filiales.

On connaît le problème inhérent à la filialisation – on l’a vu y compris avec les EPIC : des filiales d’un même groupe vont jusqu’à se faire concurrence !

Je suis donc assez étonné qu’on relance ce système de filiales pour Gares & Connexions, alors que le seul argument en faveur du passage en société anonyme était justement que ce dispositif permettait de conserver un groupe unifié.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Si j’interviens, en complément de mon collègue Guillaume Gontard, c’est pour essayer d’obtenir des éléments de réponse.

La SNCF – pas mon groupe : la direction de la SNCF ! – informe que le passage en société anonyme, même à capitaux 100 % publics incessibles, transformerait la garantie effective de l’État en garantie implicite, provoquant une hausse des taux d’intérêt directeurs de 0,4 %. De plus, certains emprunts obligataires publics ne seraient plus possibles.

Tout à l’heure, nous avons posé des questions sur le positionnement de l’État en matière de reprise de la dette de la SNCF. Nous revenons maintenant au débat sur la filialisation dans le cadre du passage en société anonyme. Et nous alertons !

Vraiment, les choses seraient différentes si une véritable argumentation nous était opposée. Écoutons-nous les uns les autres ; notre point de vue peut bouger ! (Mme la ministre fait la moue.) Mais en ne donnant aucune argumentation, ou en vous contentant de contester nos éléments, vous montrez, madame la ministre, une bien mauvaise image de votre considération pour les parlementaires que nous sommes.

M. Guillaume Gontard. Mais nous restons patients !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Pour rebondir sur ce que vient de dire mon collègue Pascal Savoldelli – je vous ai vue vous exclamer, madame la ministre –, je dis que nous pouvons bouger, à condition qu’il y ait un débat ! Nous essayons d’apporter des arguments ; s’ils sont faux, dites-le-nous !

Or vous ne nous dites même pas qu’ils sont faux : vous ne répondez pas !

S’agissant du passage en société anonyme, pourquoi nous opposons-nous à la filialisation de Gares & Connexions ?

Notre raisonnement est le suivant : lorsque le passage en société anonyme aura été réalisé, il sera possible de vendre un certain nombre de filiales à la découpe – la société anonyme le permettra –, en particulier lorsqu’on arguera de l’aggravation de la dette pour dire qu’il faut bien récupérer de l’argent !

Et, pour récupérer de l’argent, on proposera la filialisation des TER, qui a été évoquée dans la presse, et celle de Gares & Connexions. On sait que Gares & Connexions sera l’une des premières choses que le capital, autrement dit le privé, voudra récupérer, parce que c’est le plus rentable !

À écouter l’avis défavorable émis sur cet amendement, nos craintes s’avèrent fondées. Si l’on veut éviter la vente à la découpe, qui est l’une des conséquences possibles du passage en société anonyme, alors il faut bien encadrer Gares & Connexions, parce que – nous vous le disons – les appétits financiers se jetteront d’abord sur elle.

Nous voulons une réponse sur ce point.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Gay – je m’adresse aussi à M. Jacquin –, on ne peut pas dire qu’il n’y a pas eu de débat. Le débat a eu lieu hier : j’ai fourni toutes les explications qu’appelaient vos amendements. Je ne vais pas donner des explications sur les explications, faire des commentaires de commentaires !

Hier soir, la séance a été levée à zéro heure trente-cinq, à l’issue d’un beau débat, d’une très bonne tenue. Toutes les explications nécessaires ont été données. Nous en sommes désormais aux explications de vote. Je ne vais pas commenter vos explications de vote ! À un moment donné, il faut clore le débat. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. En effet, on ne peut pas effacer le débat que nous avons eu hier : vous avez eu les explications, vingt ou trente fois, mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRCE. Vous ne voulez pas les entendre, et vous imaginez une évolution qui n’a eu lieu nulle part en Europe. Vous allez me ressortir le cas anglais ; nous vous avons déjà dit que tel n’était pas notre modèle !

Le statut que nous proposons est celui de toutes les entreprises ferroviaires de l’Europe continentale qui sont depuis des décennies des sociétés à capitaux publics et qui n’ont pas bougé, qui n’ont pas été vendues à la découpe. Je vous ai également rappelé que le domaine public ferroviaire est incessible et inaliénable. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Plusieurs sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. Pas les gares !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Les explications, vous les avez ! Je pense que vous ne voulez pas les entendre. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission applaudit également.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 110 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l’adoption 15
Contre 250

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 214.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 233.

M. Olivier Jacquin. L’explication de Mme la ministre ne me satisfait pas totalement sur cet aspect particulier de la discussion – et je n’ai pas le sentiment, ainsi, de faire durer le débat.

Nous essayons de faire la nuance entre, d’une part, SNCF Réseau, qui sera responsable du domaine public ferroviaire national, et, d’autre part, l’opérateur public qui sera mis en concurrence avec d’autres opérateurs, le cas échéant. Il nous semble qu’il ne faut pas forcément traiter de manière symétrique SNCF Réseau et SNCF Mobilités, cette dernière étant désormais, aux termes du présent article 1er A, une société anonyme.

Nous tentons d’apporter de la nuance, au nom de l’unification, que vous souhaitez, madame la ministre, au nom de la gestion fine du ferroviaire, au nom d’une gouvernance étroite évitant les coûts d’interface que j’ai essayé préalablement de décrire.

Par ailleurs, s’agissant de la filialisation de Gares & Connexions, dont nous parlons actuellement, nous avons bien conscience que, pour financer les activités nouvelles des gares, il va falloir lever des capitaux, parfois, lorsqu’il s’agit de gares de très grandes métropoles, en quantité très importante. Dans des cas comme celui de la gare de Londres Victoria, où les investissements s’élèvent à 2 milliards d’euros, on crée des sociétés d’économie mixte, et on est alors en situation de lever des capitaux. J’ai en effet le regret de constater que la sphère publique n’est pas en mesure, seule, de se mobiliser pour réaliser des opérations de cette ampleur.

Par cet amendement, mais aussi par le précédent, qui vient d’être rejeté, nous nous opposons à la filialisation. Il s’agit de conserver l’intégrité de la sphère publique en matière de gestion des gares, afin de garantir une bonne interface avec SNCF Réseau, via une direction dédiée et rattachée à cette dernière.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 233.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 168.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 236.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 237.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, sur l’amendement n° 129.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement très technique ; je n’avais pas les compétences nécessaires pour en étudier les dispositions. J’ai donc souhaité hier connaître l’avis du Gouvernement.

En l’occurrence – ce n’est pas toujours le cas –, il me semble normal de suivre l’avis du Gouvernement, qui est défavorable.

Cependant, plutôt que d’émettre d’emblée un avis défavorable, je préfère demander à M. Longeot de bien vouloir retirer son amendement, dont les dispositions sont très complexes.

M. le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 129 est-il maintenu ?

M. Jean-François Longeot. Compte tenu des explications fournies par Mme la ministre la nuit dernière, il me paraît tout à fait logique que la commission, puisqu’elle avait demandé l’avis du Gouvernement, se rallie à cet avis. Il est vrai qu’il s’agit d’un amendement très technique ; comme vous le souhaitez, monsieur le rapporteur, je le retire.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Très bien !

M. le président. L’amendement n° 129 est retiré.

La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 238.

M. Olivier Jacquin. Concernant l’idée de mieux garantir la présence des syndicats, des usagers et surtout des collectivités dans l’administration des gares, qui sont en général au cœur de nos villes, le rapporteur a expliqué hier, à l’appui de l’avis défavorable émis par la commission, que, dans la pratique, les collectivités étaient plutôt bien associées et que le texte contenait suffisamment d’éléments pour qu’il soit permis de penser que cet amendement était satisfait.

Or il me semble qu’il serait intéressant, pour nos collègues élus, de mieux marquer ce point et de leur garantir structurellement une place bien nette dans ladite administration.

Il ne faut pas faire des lois bavardes, j’en suis d’accord. L’idée est simplement de proposer qu’il soit tenu compte, dans le futur décret, d’un tel principe.

Nous avons déposé un certain nombre d’amendements concernant les gares. Les gares évoluent : ce sont de nouveaux espaces urbains. Dans les grandes villes, leurs potentialités de développement sont importantes ; à l’autre extrémité du spectre, il existe des haltes ferroviaires dont on se demande encore quel est leur rôle dans l’industrie ferroviaire, mais qui peuvent, en revanche, accueillir d’autres activités.

Telle est l’idée que nous défendons, en sollicitant votre soutien, mes chers collègues.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 238.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 239.

M. Olivier Jacquin. Mes chers collègues, peut-être n’avons-nous pas été assez clairs, hier, dans nos explications.

Sachez que, actuellement, Gares & Connexions doit suivre un décret spécifique aux gares, dont la vocation est de garantir la bonne fonctionnalité de celles-ci. Il s’agit notamment d’assurer que les autres opérateurs, demain, seront accueillis correctement.

Nous avons discuté de l’opportunité de garantir des espaces, dans les gares, à la sphère publique. Franchement, l’idée d’ouvrir une crèche – je ne parle pas des crèches d’entreprise de la SNCF – dans une gare et de demander, en la matière, un partenariat avec une agglomération ne me semble absolument pas idiote, sachant le rôle que joueront les gares, demain, dans les cœurs de ville.

Je reconnais que c’est compliqué, mais chercher un mécanisme qui permette aux collectivités de développer certaines activités au cœur des gares ne me paraît pas stupide du tout.

Tel est le sens de notre démarche : imaginer ce que nous avons appelé un droit d’option. Je reconnais que ce n’est pas forcément clair et net, mais comment fait-on pour s’affranchir de la loi du marché ? On peut bien vous dire : « Vous pouvez ouvrir une crèche, monsieur le maire ». Mais, si le loyer est élevé au point de rendre la chose impossible, on n’a pas avancé pour autant.

Le décret relatif aux gares, dont j’ai parlé, prévoit que SNCF Réseau puisse « placer » des opérateurs concurrents de SNCF Mobilités en leur donnant accès à un guichet ; de la même manière, il faudrait faire en sorte de donner aux collectivités la possibilité d’être mieux présentes dans les gares, et qu’une telle présence soit diluée dans l’économie globale du projet.

L’idée me paraît tout à fait soutenable ; elle est peut-être à enrichir, mais je pense qu’elle participerait de l’attractivité nouvelle des gares. Certaines activités donnent une plus-value aux gares. Ainsi, à Metz, la semaine dernière, a été ouverte une antenne de la mairie dans la gare ; ce genre d’initiatives nourrit l’attractivité des gares, au même titre que d’autres activités nouvelles.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Dans le prolongement de ce qui vient d’être dit par mon collègue Olivier Jacquin, je précise qu’il ne faut pas s’arrêter à l’exemple de la crèche, dont j’ai constaté qu’il faisait un peu réagir sur les travées de notre hémicycle. Ce qu’il faut retenir, c’est l’idée – elle me semble très intéressante – que des collectivités puissent bénéficier d’un espace public dans une gare.

Ce que nous avons en tête, plus généralement, c’est l’aménagement d’espaces dédiés pour les collectivités. Les gares sont au cœur de la cité, d’un maillage important : essayons de réfléchir à l’idée d’y définir un espace public. C’est l’idée qu’il faut retenir !

Tel est le sens de cet amendement, que je vous invite à adopter, mes chers collègues.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Houllegatte. Je suis un peu surpris du vote sur l’amendement précédent. Si le Sénat est véritablement l’assemblée des collectivités locales, comment refuserions-nous à ces collectivités de siéger dans les instances chargées de la gouvernance des gares ?

On a connu au XIXe siècle une approche très fonctionnelle, dans laquelle à un objet correspondait une fonction, ou l’inverse – il y avait une fonction à remplir, et un objet, en l’occurrence une gare, répondait au problème.

À cette approche s’est substituée ce que j’appellerais une « approche-système », une approche dynamique, en termes de flux. On se rend compte que les gares sont autre chose que de simples espaces permettant d’accueillir des passagers : elles ont un potentiel pour drainer des flux.

On voit très bien, en observant les pôles multimodaux qui sont en train d’être organisés, que, certes, les autorités organisatrices de transport se retrouvent autour de ces nœuds modaux que sont les gares, mais que, en outre, désormais, d’autres fonctions sont attribuées à ces dernières. Les collectivités locales peuvent souhaiter y disposer d’espaces. D’ailleurs, il n’y a plus de honte, aujourd’hui, à implanter des espaces publics y compris dans les supermarchés : si l’on veut toucher tel ou tel public, les jeunes par exemple, il faut aller à leur rencontre là où ils se trouvent.

On se rend compte qu’il y a du public dans les gares, et qu’on peut y faire passer des messages. Il est important pour les collectivités de pouvoir disposer de lieux, d’espaces, grâce auxquels elles peuvent aller directement à la rencontre des gens là où ils sont pour leur proposer des services.

Il me semble fondamental, au titre de l’aménagement du territoire, que nos gares, qui sont souvent, malheureusement, désertées ou un peu vides, puissent vivre et être animées par des fonctions complémentaires de leur fonction principale.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Ce sujet me semble extrêmement intéressant et important. D’ailleurs – je le précise au titre de l’historique du débat –, Guillaume Pepy proposait il y a quelques mois la création d’une société publique des gares.

Le présent amendement n’est peut-être pas tout à fait « calé » – c’est son auteur qui l’a dit lui-même, ce qui n’est pas la meilleure manière de le faire adopter à coup sûr.

Malgré tout, il y va d’un enjeu réel de perception de l’espace public. La SNCF n’est pas un mauvais gestionnaire de ses propriétés : elle cherche toujours à tirer le meilleur rendement de son patrimoine – nous en avons tous l’expérience, en tant qu’élus locaux. (M. Jean-Paul Émorine manifeste son scepticisme.)

La gare a un rôle à jouer en matière d’espace public, de service public et, fondamentalement, de lisibilité des territoires. Certains lieux vont très bien, à l’inverse d’autres ; dans tous les cas, la gare est un enjeu. Et il faut absolument que nous réussissions à inscrire dans la loi une disposition qui traduise cet enjeu-là.

De ce point de vue, je trouve cet amendement extrêmement important sur le fond.

Je ne sais si c’est cet amendement que nous devons retenir dans le texte final – de toute façon, nous nous dirigeons vers une commission mixte paritaire. Mais l’adopter aujourd’hui aurait le mérite de faire entrer ce sujet dans le débat, avant que nous essayions de trouver la solution tous ensemble pour qu’un signal soit envoyé.

D’aucuns diront que, la SNCF restant sous maîtrise publique, l’État veillera forcément à ce qu’elle réponde à cet enjeu ; comme nous n’en sommes pas tout à fait sûrs quand même – c’est l’expérience ! –, il serait vraiment bien de lancer ce signal politique.

Je soutiens donc cet amendement, qui n’est pas secondaire.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. Je suis tout à fait d’accord avec ce qui a été dit, et je voterai en faveur de cet amendement.

Dans un certain nombre de gares, on installe ou on veut installer des commerces, des grandes surfaces – il en faut, certes. Les gens y font leurs courses ; lorsqu’ils arrivent dans leur commune, c’est fait. Les commerces des différentes villes desservies ne bénéficient donc pas de ces flux.

Consacrer un certain nombre d’espaces à la mise en valeur des collectivités me paraît tout à fait intéressant et utile. Il s’agit donc, me semble-t-il, d’un très bon amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les orateurs précédents ont dit beaucoup de choses ; je donnerai des exemples concrets.

J’ai été pendant un temps maire d’une commune, Athis-Mons, où se trouve une gare. Nous voulions y ouvrir une mairie annexe, car le quartier de la gare comptait peu de services publics.

M. Olivier Jacquin. L’enjeu est exactement là !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce fut la croix et la bannière, et nous n’avons jamais pu l’obtenir. Et pourtant, nous proposions simplement d’organiser une présence régulière dans la gare. La sécurité suppose une certaine présence humaine ; à ce titre, nous voulions créer une antenne postale. La Poste était d’accord. Ce ne fut pas possible !

La gare doit être un nœud de services publics, et bien sûr aussi de services privés, complémentaires.

J’ai évoqué le cas d’une gare qui n’était pas forcément bondée toute la journée ; mais dans d’autres gares, très passantes, la présence de services publics serait utile.

Je prends un autre exemple, que vous connaissez bien, madame la ministre : les espaces info énergie. On a un mal fou à expliquer aux gens qu’ils ont droit à des aides pour isoler leur maison, faire des économies d’énergie, etc. On cherche souvent des lieux de passage publics pour pouvoir les informer, les aider à monter les dossiers. Les gares sont des lieux où cette sensibilisation d’intérêt public peut être menée.

Au-delà de la forme de cet amendement, l’intention de ses auteurs est positive, qu’on ait en vue des gares dynamiques et attractives, pour certaines missions, ou des gares un peu plus périphériques où il faut compenser l’absence de services publics. Son adoption serait utile et même indispensable pour faire vivre l’idée que le service public, justement, c’est de la connexion entre les services publics, et pas chacun sur son rail !

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Mme Fabienne Keller. À mon tour de dire mon attachement aux gares, puisque chacun a rappelé combien ces lieux sont importants. La gare, progressivement, au fur et à mesure que les transports se développent, devient la place du village, c’est-à-dire le lieu le plus fréquenté. C’est déjà le cas en Île-de-France ; c’est le cas aussi dans certaines communes où les transports sont bien organisés autour du transport ferroviaire.

La gestion des gares est donc un vrai sujet, à toutes les échelles. Qu’il s’agisse des grandes gares ou des gares de communes de taille moins importante, la gare est un lieu par nature central.

L’idée qui préside à cet amendement, consistant à promouvoir la présence de services publics dans les gares, est intéressante. Je ne suis pas sûre que la loi soit le bon outil pour cela – la rédaction de l’objet tend d’ailleurs à montrer qu’il s’agit d’un amendement d’appel, mon cher collègue.

Nous constatons bien, néanmoins, que les gares ne sont pas spontanément accueillantes, aujourd’hui, pour des activités non rémunératrices, pour de bonnes raisons, qui sont liées aux contraintes qui s’imposent à Gares & Connexions en termes de rentabilité de ces espaces. Il existe un principe de réalité, et des commerces apportent aussi une présence humaine, des décorations de vitrines, etc., qui sont utiles.

On constate bien qu’il y a là un équilibre à construire entre les différentes activités. J’aime beaucoup le modèle suisse, selon lequel des activités culturelles sont régulièrement proposées dans les gares. Les gens, ainsi, ne perdent pas de temps en gare, mais s’ouvrent et voient de belles choses.

M. Jean-Paul Émorine. Encore faut-il savoir de quelles gares on parle !

Mme Fabienne Keller. L’idée que les collectivités aient une activité dans les gares va dans le même sens.

Madame la ministre, peut-être pouvez-vous nous rassurer sur votre vision et sur votre ambition de faire des gares un vrai lieu de vie, un nouveau centre-ville de la ville écolo, bien desservie, bien structurée autour de ses transports en commun.

Une telle vision pourrait permettre, me semble-t-il, de marquer une nouvelle étape dans l’évolution des gares, c’est-à-dire à la fois du bâtiment lui-même, mais aussi des espaces aux alentours qui sont souvent propriétés de gens assez variés et à propos desquels les questions de gouvernance sont importantes.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je veux à mon tour revenir sur l’importance des gares, notamment en milieu rural. La gare est le lien entre la ligne, qui est une colonne vertébrale, et le reste ; elle peut vraiment devenir un point central.

Il existe beaucoup de réflexions en matière d’urbanisme autour des gares, notamment dans les zones rurales. Le projet de loi Mobilités nous sera probablement soumis prochainement ; dans le cadre de son examen, il sera important de réfléchir sur la place de la gare.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. À écouter M. Jacquin défendre son amendement, on se dit que tout le monde peut tomber d’accord, il n’y a pas de problème. Tout le monde peut souscrire à son explication : en effet, entre les collectivités locales et Gares & Connexions, cela se passe souvent très bien, même si Mme Lienemann a donné un exemple négatif.

Les collectivités, notamment les mairies ou les communautés de communes ou d’agglomération, travaillent en synergie avec Gares & Connexions. Et s’il y a un besoin de synergie sur des services publics, cela se passe évidemment très bien !

À la gare de Chartres, les élus ont décidé de mettre en place un guichet unique, pour les billets de train, de bus et de car. Nul besoin d’une loi pour un service global : il suffit d’une coopération entre Gares & Connexions et les élus !

Le contenu de cet amendement prétendument d’appel – de ce point de vue, je partage l’analyse de Fabienne Keller – n’a rien à voir avec les explications qui viennent de nous être apportées. Appelons un chat un chat : avec un tel dispositif, on ne pourrait plus accueillir de passagers dans les gares ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Il nous est proposé d’ajouter la phrase suivante : « Dans les gares, des espaces destinés à des activités à but non lucratif sont réservés aux collectivités territoriales. » Cela concernerait donc toutes les collectivités territoriales, qui pourraient chacune avoir leurs exigences. Au final, je le répète, il ne resterait plus d’espaces d’accueil pour les passagers. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

Franchement, si l’explication de vote de M. Jacquin témoigne d’un certain bon sens, la rédaction de cet amendement ne convient pas.

Faisons confiance au bon sens des élus locaux et laissons-les travailler en synergie avec Gares & Connexions ! Cela se passe très bien ; d’ailleurs, Gares & Connexions y a intérêt.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Lors de l’examen des alinéas 32 et suivants de l’article 1er A, vous pourrez constater que des dispositions ont été introduites en commission. Il est ainsi précisé que la gestion de Gares & Connexions doit « favoriser la complémentarité des modes de transports individuels et collectifs » et « contribuer au développement équilibré des territoires, notamment en veillant à la cohérence de ses décisions d’investissement avec les politiques locales en matière d’urbanisme ».

M. Gérard Cornu, rapporteur. Voilà !

Mme Élisabeth Borne, ministre. On a donc inscrit dans le projet de loi – cela n’y figurait pas – que les gares, non seulement constituent un élément du système ferroviaire, mais ont une fonction essentielle de pôle d’échanges multimodal et sont des lieux de centralité ayant un rôle important dans l’aménagement et le développement urbains. Nous pourrons confirmer ces missions lors de l’examen des alinéas 32 et suivants.

Par ailleurs, des comités de concertation associant les élus chargés de l’urbanisme, les autorités régionales organisatrices chargées de la mobilité, les entreprises ferroviaires et les usagers ont été créés pour discuter de l’aménagement des gares.

Je pense donc que le texte adopté en commission contient toutes les dispositions nécessaires.

Au demeurant, nous voyons là la singularité de Gares & Connexions dans le système ferroviaire. Cela justifie pleinement à mes yeux que ces activités soient exercées au sein d’une filiale disposant d’une autonomie de gestion avec une capacité propre à investir.

Dans mes précédentes fonctions – j’étais présidente-directrice générale d’une grande entreprise ayant également des espaces d’accueil des voyageurs –, j’avais à cœur de développer non seulement des commerces pour les personnes amenées à fréquenter ces espaces, mais aussi des services publics.

Je pense que cela peut parfaitement se faire dans la concertation entre les élus et Gares & Connexions.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, vous ne pourrez pas vous réfugier en permanence derrière des artifices ! Vous répondez systématiquement à côté des questions qui vous sont posées !

Les gares, dites-vous, participent à l’élaboration de l’urbanisme local. Mais c’est une évidence ! Bien sûr qu’elles font partie de l’ensemble urbanistique local et apportent un certain nombre de modifications ! Simplement, ce n’est pas la question qui vous est posée !

Ce sont, soulignez-vous, des lieux de l’expression de la multimodalité. Mais tout le monde le sait ! Chacun sait que c’est là qu’on peut mettre en place des billets uniques pour l’ensemble des transports ! Là encore, ce n’est pas la question !

Ne nous dites pas que tout se passe bien partout ! Dans le département que j’ai dirigé, nous avons participé financièrement à la rénovation de la gare et à la construction de la LGV. Nous avons essayé d’obtenir un certain nombre d’espaces pour mettre de l’information publique et des activités culturelles à la disposition de la population. Mais nous avons agi en quémandeurs, demandant la charité ! Et nous n’avons même pas obtenu satisfaction ! Ne nous dites donc pas qu’il s’agit d’un droit ouvert et toujours facile à obtenir ! D’ailleurs, l’exemple que vous avez mentionné en est l’illustration parfaite.

Il me paraît utile de mentionner la possibilité d’apporter de l’information et de la culture là où la population se déplace. Cela ne doit pas être réservé à une élite ! Chacun doit pouvoir accéder gratuitement à la beauté et à une information citoyenne, dans les meilleures conditions possible.

Je trouve que vos réponses en général sont un moyen d’évacuer le problème. Je ne vous en remercie pas !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 239.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 213.

M. Olivier Jacquin. Je suis très satisfait que nous ayons pu avoir un échange de qualité sur cette problématique à la fois nouvelle et sensible.

Je vous ai bien entendu, monsieur le rapporteur. Peut-être aurions-nous pu envisager un seuil d’habitants, forcément plus important dans les grandes gares que dans les petites, afin d’éviter le phénomène que vous craignez.

Certes – je suis d’accord avec vous sur ce point –, Gares & Connexions est effectivement une entreprise publique très sérieuse qui recherche en général le partenariat. Malheureusement, cela ne se passe pas toujours bien. Les cas où l’on constate une insuffisance de dialogue sont nombreux, notamment s’agissant des petites gares. Quand celles-ci présentent peu d’intérêt en termes de valeur foncière ou de potentiel de développement pour le ferroviaire, Gares & Connexions ne va pas spontanément voir les élus concernés.

À l’inverse, les relations sont évidemment très bonnes avec les élus des grandes villes. J’ai évoqué tout à l’heure la gare de Metz, où une mairie annexe vient d’être ouverte.

Je pense qu’il faut envoyer un signe aux élus locaux, notamment aux maires, sur ce sujet important. L’amendement n° 213 nous en offre une bonne occasion. Le dispositif est simple et beaucoup plus neutre. Nous proposons de préciser les missions de Gares & Connexions en complétant l’alinéa 41 par une phrase ainsi rédigée : « Pour tout projet afférent à l’avenir d’une gare, les collectivités territoriales sont associées. » Nous adresserions ainsi un signe aux élus locaux. La réunion d’une commission mixte paritaire nous donnerait ensuite la possibilité d’approfondir la question.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 213.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 74.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 75.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 257.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l’amendement n° 149 rectifié quinquies.

M. René-Paul Savary. Cet amendement concerne l’alinéa 50 de l’article 1er A qui a trait au transfert de personnels et à la convention collective.

Dans la nouvelle organisation, le problème du transfert de personnels se pose. J’aimerais connaître la position du Gouvernement sur les retraites.

Le régime de retraite spécifique de la SNCF soulève un certain nombre de difficultés, avec seulement 147 000 cotisants pour 264 000 pensionnés. Il ne m’appartient pas de remettre en cause le caractère dérogatoire par rapport au régime de droit commun de ce régime qui tient à des raisons historiques. Au demeurant, des efforts significatifs ont déjà été effectués ; je pense notamment au recul de l’âge de départ à la retraite.

Avez-vous eu des discussions sur ce dossier, madame la ministre ? Je vois mal comment les économies significatives que vous évoquez pourraient être réalisées si ce régime de retraite spécifique devait bénéficier à de nouvelles personnes. Qu’en est-il de ce transfert ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Le Gouvernement a indiqué d’emblée ce que la réforme était et ce qu’elle n’était pas. En l’occurrence, elle n’est ni une réforme des petites lignes ni une réforme des retraites.

Nous avons précisé dès le début que les cheminots au statut conserveraient leur statut et emporteraient, en quelque sorte, un certain nombre de garanties, notamment celle du régime de retraite, en cas de transfert.

Nous avons choisi de ne pas ouvrir le chantier des retraites dans le cadre de la réforme ferroviaire, sachant que, à compter du 1er janvier 2020, les futurs embauchés ne seront plus au statut, et seront donc au régime de droit commun.

Par ailleurs, vous le savez, une réflexion générale sur la pérennité de notre système de retraites a été confiée à Jean-Paul Delevoye. L’objectif est d’avoir un système qui maintienne la solidarité entre les générations et vise à plus de justice et d’équité, un euro cotisé devant donner les mêmes droits. Mais il s’agit de deux dossiers différents.

Le déséquilibre démographique du régime de retraite est une question indépendante de celle de la réforme de la SNCF. Dès aujourd’hui, il y a un déficit démographique, qui, comme dans tous les secteurs, est compensé par la solidarité nationale.

Notre réforme ne traite pas des retraites, ce sujet relevant de la réflexion globale conduite par Jean-Paul Delevoye.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 149 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 216 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 151 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’amendement n° 77.

M. Guillaume Gontard. Je souhaite revenir sur l’inaliénabilité.

Madame la ministre, tout au long de ces discussions, vous ne nous avez pas rassurés. Nous proposons donc d’introduire un élément supplémentaire dans le texte. Certains ont parlé de « ceinture et bretelles » ; là, nous en sommes aux bretelles ! Je crois qu’une telle mention pourrait rassurer tout le monde.

Au demeurant, il me semble que vous avez promis hier d’inscrire à la fois l’incessibilité et l’inaliénabilité dans la loi. (Mme la ministre le conteste.) Je pense que c’est le moment de le faire.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Décidément, nous ne nous comprenons pas ! J’ai effectivement indiqué que l’incessibilité avait été ajoutée en commission, et j’ai par ailleurs rappelé ce qui est un principe général d’ordre constitutionnel : le domaine public est inaliénable.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote. (Marques dagacement sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. Fabien Gay. La SNCF est un patrimoine national. Apparemment, certains collègues s’agacent que l’on puisse prendre la parole sur un tel sujet. Je le dis clairement : la SNCF mérite un large débat et il faut en prendre le temps.

Madame la ministre, hier, vous nous aviez dans un premier temps indiqué que vous étiez plutôt favorable à l’inscription de l’inaliénabilité dans les statuts de l’entreprise ; nous vous avions en effet démontré que l’incessibilité seule ne suffisait pas. Après un débat, vous nous aviez certifié que l’inaliénabilité ne vous posait aucun problème ; c’est d’ailleurs la preuve que vous pouvez évoluer au cours de la discussion. Et puis, deux heures après, vous nous avez dit : « Non ! En fait, les choses sont plus compliquées. » Nous sentons bien que vous êtes embêtée sur le sujet.

Vous dites ne pas souhaiter une future privatisation de la SNCF. Nous vous avons démontré par A plus B que l’incessibilité était une bonne chose, mais qu’elle ne suffisait pas à elle seule, et que l’inscription de l’inaliénabilité dans les statuts de l’entreprise était plus protectrice. Dès lors, je ne comprends pas que vous vous opposiez à un tel amendement, alors que vous nous aviez répondu favorablement dans un premier temps, avant de revenir sur votre position en fin de soirée !

Nous avons encore besoin d’échanger, car il s’agit d’une question très forte.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur, le débat ne gagne vraiment pas, me semble-t-il, à la confusion que vous essayez d’entretenir.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Très bien !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Il est inscrit dans le projet de loi que les titres sont intégralement détenus. Votre commission a accepté de préciser qu’ils étaient par ailleurs incessibles, ce qui revient donc à dire deux fois la même chose. Vous nous avez expliqué que vous trouviez suspect de dire deux fois la même chose, ce qui, selon vous, pouvait signifier que c’était mal formulé la première fois.

M. Fabien Gay. Nous n’avons jamais dit ça !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Et à présent, après nous avoir reproché de le dire deux fois, ce qui a conduit M. le rapporteur à proposer de retirer la deuxième mention, vous nous demandez de le mentionner une troisième fois ! Et pas dans la loi ; dans les statuts de l’entreprise, c’est-à-dire dans un décret !

Je crois utile pour la qualité des débats et la bonne compréhension des cheminots d’indiquer une fois pour toutes que la SNCF est publique et restera publique. C’est inscrit dans le projet de loi, et même deux fois ! L’adoption de votre amendement n’apporterait rien, sinon de la confusion ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Gérard Cornu, rapporteur. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 77.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 111 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 264
Pour l’adoption 15
Contre 249

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 78.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 112 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 265
Pour l’adoption 15
Contre 250

Le Sénat n’a pas adopté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures cinq.)

Article 1er A
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Organisation des travaux (suite)

M. le président. La séance est reprise.

Je mets aux voix l’amendement n° 76.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 29.

(Lamendement nest pas adopté.)

Organisation des travaux

Organisation des travaux (début)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er A (début)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je propose à notre assemblée que nous suspendions la séance à dix-neuf heures trente pour la reprendre à vingt et une heures, et que nous prolongions ensuite nos débats jusqu’à une heure trente.

Le moins que l’on puisse dire est que nous ne sommes pas très rapides dans l’examen des amendements puisque, sur 245 amendements, nous n’en avons voté que 37, soit une moyenne de 7 amendements par heure…

À ce rythme,…

M. Ladislas Poniatowski. Un rythme de micheline !

M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. … il nous faudrait encore une trentaine d’heures pour achever l’examen de ce texte.

Je ne peux que vous inciter à être plus diligents.

M. le président. Mes chers collègues, conformément à la proposition formulée par M. le président de la commission, nous pourrions suspendre nos travaux à dix-neuf heures trente pour les reprendre à vingt et une heures, et lever la séance à une heure trente.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Organisation des travaux (suite)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er A (interruption de la discussion)

Article 1er A (suite)

M. le président. L’amendement n° 72, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Supprimer les mots :

directement ou par l’intermédiaire de filiales,

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Il s’agit d’une question importante que nous avons déjà évoquée et dont nous souhaitons de nouveau débattre, à savoir la place et le problème des filiales.

Nous l’avons dit à plusieurs reprises, et il me semble qu’il existe un consensus sur ce point, y compris de la part du Gouvernement, l’une des raisons des difficultés que traverse aujourd’hui la SNCF est la multiplication des filiales : il en existe plus de mille, entrant en concurrence les unes avec les autres, dans une opacité absolument générale.

Or l’alinéa 22, que cet amendement tend à supprimer, vise à réintroduire les filiales. Dans une formule dont on a du mal à comprendre la cohérence, vous affirmez que SNCF Réseau assure ses missions de service public – jusque-là, ça nous convient – « directement ou par l’intermédiaire de filiales ».

Nous aimerions comprendre : comment peut-on réussir à défendre le service public par l’intermédiaire de filiales, comment peut-on dire qu’il s’agit encore d’un service public ? En l’état, au vu de la forme abrupte que vous donnez à votre texte, une telle assertion est un oxymore puisqu’il existe une contradiction entre les termes !

Nous souhaitons absolument défendre le service public. Voilà pourquoi nous nous opposons à la création de nouvelles filiales, qui ont fait tant de mal à la SNCF.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Nous avons déjà eu des amendements similaires pour le groupe de tête, SNCF. Maintenant, il s’agit de SNCF Réseau. J’imagine que vous en défendrez également s’agissant de SNCF Mobilités. Pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur, je défends également le service public. Nous venons de débattre de l’intérêt de Gares & Connexions, filiale de SNCF Réseau. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 72.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 184 rectifié, présenté par MM. Dantec, Corbisez, Léonhardt, Arnell, A. Bertrand, Castelli et Collin, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Après les mots :

développement durable,

insérer les mots :

de réduction des émissions de gaz à effet de serre,

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement est complémentaire de l’amendement n° 3 rectifié octies que nous avons adopté. Comme Mme la ministre l’a souligné à juste titre, il ne suffit pas d’inscrire la lutte contre le réchauffement climatique parmi les objectifs de la SNCF ; en effet, l’enjeu porte en particulier sur les péages et le fret.

Cet amendement vise donc à inscrire la réduction des émissions de gaz à effet de serre au rang des objectifs de SNCF Réseau. Cela signifie que le maintien des petites lignes doit aussi s’envisager par rapport à l’ensemble du fret et en tenant compte de son impact à moyen terme sur les émissions de gaz à effet de serre. Cette précision ne concerne pas l’ensemble des filiales, mais uniquement SNCF Réseau.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre a été inscrit pour le groupe de tête. À quoi bon l’inscrire de nouveau pour SNCF Réseau ? Cet amendement est satisfait, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Nous nous sommes mal compris, monsieur le sénateur. Je n’ai pas suggéré d’inscrire la lutte contre le changement climatique à tous les alinéas. Certes, cet objectif doit être inscrit dans la loi, mais il faut ensuite agir, par exemple en baissant le tarif des péages ou en relançant le fret ferroviaire. Je présenterai à cet égard prochainement un plan. Quoi qu’il en soit, votre demande est satisfaite par l’amendement adopté tout à l’heure. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Dantec, l’amendement n° 184 rectifié est-il maintenu ?

M. Ronan Dantec. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 184 rectifié est retiré.

M. Pierre Ouzoulias. Je le reprends, monsieur le président !

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 184 rectifié bis, présenté par M. Pierre Ouzoulias et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 184 rectifié.

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Il y a un problème de méthode par rapport à notre débat. Nous avons proposé qu’il n’y ait qu’une seule entité ; le Gouvernement a refusé et en a imposé trois.

Mme Fabienne Keller. C’était déjà le cas avant !

M. Pierre Ouzoulias. Il est donc tout à fait normal que nous ayons trois fois le même débat par rapport aux enjeux énergétiques et climatiques : c’est ce que veut le Gouvernement ! Avec une seule entité, nous aurions évité les redites…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 184 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 73, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Remplacer les mots :

d’aménagement du territoire

par les mots :

de solidarité nationale permettant de garantir le droit à la mobilité pour l’ensemble des territoires

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. L’alinéa 22 de cet article porte sur les missions de SNCF Réseau, c’est-à-dire, pour résumer, sur l’EPIC « rails ».

Celles-ci doivent être exercées, indique le Gouvernement, « dans une logique de développement durable, d’aménagement du territoire et d’efficacité économique et sociale ».

Nous estimons que la notion d’aménagement du territoire n’est pas claire, ou du moins qu’elle est trop vaste au regard du début de l’alinéa en question, qui précise que les missions sont exercées de façon « non discriminatoire ».

En effet, promouvoir le transport ferroviaire en France dans une logique aussi peu précise permettrait de préparer les esprits à la fermeture de lignes qui pourraient être jugées insuffisamment rentables. Cela invite à mettre en balance la solidarité territoriale avec d’autres critères, comme celui de la rentabilité.

C’est pourquoi nous préférons une formulation plus claire, pour que ces missions soient exercées dans une logique de solidarité nationale permettant de garantir le droit à la mobilité pour l’ensemble des territoires. Pour notre part, nous portons une vision tout autre de l’aménagement du territoire, fondée sur la solidarité et l’égalité de traitement pour un développement humain soutenable.

La SNCF ne remplit pas n’importe quelle mission : elle concourt d’une manière fondamentale à l’organisation cohérente de notre système de transports, avec l’objectif de répondre aux besoins en matière de transports et d’efficacité économique, sociale et environnementale, au service d’un aménagement du territoire équilibré, facteur de réduction des inégalités territoriales.

En outre, le rôle du service public est de garantir le droit aux transports pour tous, qu’il s’agisse de nos anciens, des familles ou des jeunes, dans un esprit de solidarité nationale.

L’objet de notre amendement est de promouvoir la solidarité nationale plutôt que l’aménagement du territoire. Assurer une mission de service public, cela signifie assurer un service de qualité égale pour toutes et tous !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. La notion d’aménagement du territoire est beaucoup plus large que ce que vous dites. Imaginez un instant que la commission de l’aménagement du territoire s’appelle la commission « de la solidarité nationale permettant de garantir le droit à la mobilité pour l’ensemble des territoires » : ce serait bien plus réducteur et cela n’aurait pas de sens !

La notion d’aménagement du territoire, bien sûr, inclut celle de solidarité nationale que vous invoquez et à laquelle notre commission est très attentive.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. La notion d’aménagement du territoire est connue de tous et elle recouvre, sur le fond, le même objectif que celui défendu au travers de cet amendement. Le droit à la mobilité pour l’ensemble des territoires sera au cœur de la loi d’orientation sur les mobilités, que j’aurai le plaisir de présenter prochainement et qui recevra, je n’en doute pas, votre soutien…

En tout état de cause, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le rapporteur, vous avez raison en ce qui concerne l’enjeu de l’aménagement territorial du réseau SNCF, qui crée à la fois un équilibre territorial et un équilibre social. Nous sommes tous d’accord sur ce point.

Il y a néanmoins un petit problème : le mot « solidarité » n’est pas vide de sens et renvoie à la question de l’égalité devant le droit au transport.

Madame la ministre, nous n’avons pas obtenu de réponse sur la dette, nous continuons le débat. Mais, tout à l’heure, vous nous avez répondu : « Ça se fait comme ça partout en Europe, ne perdons pas de temps, tout va bien ! »

En Allemagne, puisque tout va bien, il y avait 41 500 kilomètres de lignes de transport ferroviaire : aujourd’hui, près de 12 000 kilomètres ont disparu !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui, et alors ?

M. Pascal Savoldelli. Mesdames, messieurs les sénateurs, après avoir voté ce texte, vous ne pourrez pas simuler l’effroi dans vos départements si des lignes disparaissent : au contraire, vous devrez assumer !

En Allemagne, qui est souvent notre modèle – il y a d’ailleurs de bonnes choses en Allemagne, comme dans d’autres pays –, savez-vous, madame la ministre, combien d’aiguillages ont été déplacés en moins de dix ans pour passer de 41 500 kilomètres à 33 000 kilomètres de desserte et continuer d’assurer un maillage qui relie les gens entre eux ? Près de 50 % !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Et alors ?

M. Pascal Savoldelli. Quand Michelle Gréaume insiste sur la notion de solidarité, nous le savons tous ici, c’est parce que tous les territoires ne présentent pas la même attractivité. Certes, ceux qui ont davantage d’attractivité doivent bénéficier de moyens de desserte pour assurer le développement économique et le rayonnement de nos régions, de nos départements et de nos communes. Mais il faut aussi que les territoires les moins attractifs puissent avoir un égal accès au droit à la mobilité.

Voilà pourquoi il est question ici de solidarité nationale et non uniquement d’aménagement du territoire, notion à laquelle nous sommes, vous le savez, nous aussi très attachés. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 73.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 34, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 30

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

d) le dernier alinéa est supprimé ;

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Par cet amendement, nous souhaitons revenir sur une disposition insérée par la loi de 2014 pour réécrire l’article L. 2111-9 du code des transports.

Cet article permet à SNCF Réseau de confier à d’autres personnes la responsabilité des « petites » lignes. Déjà à l’époque, et sans surprise, nous avions voté contre cette disposition qui ouvrait une brèche dans l’unicité du réseau et la voie à son démantèlement.

Nous sentions poindre, alors, l’idée du Gouvernement de se défausser des petites lignes, notamment sur les régions. Les lignes non rentables demandent, comme nous venons de le voir, un fort investissement pour une remise aux normes et une exploitation dans des conditions satisfaisantes, qu’il s’agisse de la régularité des trains ou de leur vitesse de circulation, permettant de rendre attractive l’utilisation du train au quotidien.

Le rapport Spinetta, en promettant l’abandon de 9 000 kilomètres de ligne, précipite ce scénario, puisque le maintien de ces lignes est renvoyé aux futurs contrats de plan.

Nous pouvons vous croire quand vous parlez d’un effort particulier en faveur de ces contrats de plan, mais nous avons un sérieux doute. Et il ne s’agit pas, croyez-moi, d’un a priori ! Nous doutons parce que, depuis des années, de contrat de plan en contrat de plan, nous voyons bien qu’il n’y a pas de moyens pour l’investissement, voire pour la requalification d’un certain nombre de lignes. Or les enjeux en termes de déplacements ne sont pas les mêmes aujourd’hui qu’hier !

Dois-je rappeler que, à l’heure actuelle, 80 % des déplacements sur les réseaux dits « régionaux », à savoir les TER, se font pour des raisons professionnelles ou de formation ? C’est donc un enjeu de société et, comme je l’ai rappelé hier, d’égalité entre tous, quelle que soit la condition sociale ou territoriale de chacun. Il est essentiel que tous nos concitoyens puissent avoir un accès égal et sécurisé aux lignes SNCF et que les temps de transport soient fiables pour tous.

Par cet amendement, nous proposons donc de revenir sur la possibilité ouverte pour l’État de se défausser des petites lignes ferroviaires.

Au-delà d’une question de principe, il s’agit de réellement redonner du souffle à notre réseau de chemin de fer et d’offrir à notre pays la possibilité d’une véritable irrigation territoriale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Madame la sénatrice, vous n’avez certainement pas mesuré les conséquences de cet amendement.

Il vise en effet à supprimer la possibilité, pour SNCF Réseau, de confier à d’autres entreprises, par convention, certaines missions relatives aux lignes à faible trafic. Cette faculté est pourtant intéressante, puisqu’elle permet, par exemple, à SNCF Réseau de confier à d’autres entreprises le soin d’assurer l’entretien ou la maintenance de petites lignes lorsque ses propres équipes sont mobilisées sur d’autres travaux.

Le code des transports encadre cette faculté, puisqu’il précise que cette délégation ne peut concerner les missions de répartition des capacités et de tarification de l’infrastructure.

En clair, l’adoption de cet amendement limiterait les capacités de SNCF Réseau à organiser les travaux de rénovation, contrairement à l’objectif que vous visez.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je partage l’avis de la commission. Le groupe du RDSE pourra vous réponde sur les intentions du Gouvernement dans la réforme de 2014.

Effectivement, cet alinéa que vous voulez supprimer permet d’accélérer la rénovation du réseau ferré national. C’est un levier utilisé, par exemple, par la région Grand-Est pour redynamiser le fret ferroviaire. On ne peut pas tout à la fois vouloir défendre le fret ferroviaire et priver nos entreprises de la capacité de moderniser les réseaux. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Évitons les faux débats, puisque nous savons tous quelles seront les conséquences de cet article !

Vous avez pris le bon exemple, madame la ministre : c’est très bien de renvoyer cette possibilité aux régions, mais on peut aussi parler du financement des régions, des conséquences de la fusion des régions ou de l’inégalité criante et sans cesse croissante au fil des années entre les différentes régions, c’est-à-dire de leur capacité à investir dans un futur proche !

Et je ne parle même pas des choix politiques ni des majorités en place, car il existe une donne objective qui rend de toute façon ces choix de plus en plus délicats !

Par ailleurs, oui, monsieur le rapporteur, c’est l’État qui doit avoir la responsabilité d’entretenir et de requalifier les lignes pour qu’elles continuent d’exister demain, faute de quoi ce sera la porte ouverte à des choix qui répondront avant tout à des objectifs de rentabilité. Évidemment, une personnalité politique influente pourra toujours, en arguant de la rentabilité, réussir à faire réorienter les crédits nécessaires à l’entretien d’une ligne sur son territoire.

Quoi qu’il en soit, même si le choix se fait réellement au nom de la rentabilité, en tenant compte du nombre de passagers par jour ou d’autres critères, cela remet en cause l’égalité, au niveau de notre territoire, de l’accès des populations à un réseau ferroviaire entretenu, de qualité et avec des trains.

Il y a une vraie urgence, non pas à supprimer ou à se défausser d’un certain nombre de lignes, mais à faire monter en gamme les lignes encore existantes, toutes ces lignes qui ne sont pas devenues des vélo-rails, et qui répondent à des enjeux de désenclavement.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Même si je vote la plupart du temps avec mon groupe, je voterai cet amendement du groupe CRCE, et ce pour deux raisons.

Depuis une trentaine d’années, nous assistons à des suppressions de lignes tant au niveau du trafic de voyageurs qu’au niveau du fret.

Le problème des petites lignes, même si vous l’avez rappelé, madame la ministre, la région Grand Est a pris des initiatives pour sauver le fret capillaire, c’est qu’il n’y a que des trains complets : les wagons isolés, malheureusement, n’existent plus, aussi bien pour le secteur agroalimentaire, pour les céréales par exemple, que pour les carrières. Sur de petites lignes où la vitesse est limitée à 40 kilomètres à l’heure, voire à 20 kilomètres à l’heure pour des raisons de sécurité à cause de l’état du réseau, qui investira ? Les collectivités territoriales ?

Certes, l’État met un peu la main à la poche, avec l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF ; les régions participent également, tout comme les départements quand ils le peuvent et les intercommunalités. Bref, pour un investissement à hauteur de 1 million d’euros, chacun se renvoie la balle, sans parler des chargeurs, qui sont tout de même les clients.

Il faut donc se poser les bonnes questions et savoir qui investira dans le maintien des petites lignes.

Notre collègue a parlé des vélorails. Lorsqu’il n’y a plus de trafic, il est sûr qu’on peut prévoir cette solution… On peut aussi démonter les voies pour faire des pistes cyclables. Est-ce cela, l’avenir du rail ? Je ne le pense pas !

Je voterai donc l’amendement n° 34. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Pascale Bories, pour explication de vote.

Mme Pascale Bories. Bien entendu, et je l’avais dit lors de la discussion générale, nous avons tous la volonté de conserver les petites lignes secondaires. Mais, très sincèrement, je ne pense pas que la suppression de cet alinéa soit le moyen d’y parvenir.

L’alinéa que l’amendement tend à supprimer permet, au contraire, de conserver de la souplesse, et peut-être de favoriser l’investissement.

Ne nous trompons pas d’objectif : on ne se battra pas pour conserver les petites lignes en supprimant cette disposition ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Fabienne Keller. Très juste !

M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.

M. Michel Dagbert. Nous constatons à la faveur de cet amendement, madame la ministre, un problème d’ordonnancement pour ce qui concerne le passage des lois devant le Parlement.

Nous discutons depuis hier, et pour quelques jours encore, de la loi ferroviaire, puis appréhenderons à l’automne, me semble-t-il, la question plus large des mobilités.

Au sujet des petites lignes, je partage l’avis de Mme Bories. Dans un passé pas si lointain, des lignes ont fait l’objet de suppression, d’arrêt d’activité. Il m’importe, pour ma part, que celles-ci demeurent dans la domanialité publique, qu’elles restent à la force publique, serais-je tenté de dire.

À l’automne prochain, donc, nous envisagerons d’autres formes de mobilité. À l’allure où vont les progrès techniques, il peut y avoir, ici ou là, des emprises fort utiles. Je pense notamment aux tests de véhicules autonomes. Dans mon territoire est ainsi à l’œuvre le projet d’un bus à haut niveau de service, ou BHNS, doté d’un moteur à hydrogène, lequel empruntera pour tout ou partie d’anciennes voies ferrées qui ne voient plus passer de trains depuis plus de vingt-cinq ans.

Le problème est là : nous constatons, à l’occasion de cet amendement, que nous aurions pu discuter plus largement des mobilités. Or le fait que la loi ferroviaire nous soit présentée aujourd’hui nous empêche d’appréhender un certain nombre d’autres aspects.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Il est en effet important, madame la ministre, de laisser de la souplesse dans le dispositif.

Marc Laménie a parlé de la région Grand Est, dont fait partie mon département, la Marne. J’ai organisé, lorsque j’étais président de cette collectivité, la réfection d’un certain nombre de lignes capillaires, parce que des chargeurs, entre autres de céréales, en avaient besoin, leurs clients exigeant la livraison par chemin de fer et non par camion.

C’est donc grâce à une volonté locale, à la compréhension des intercommunalités, du département, de la région, de l’opérateur et de l’État que l’on parvient à mettre quelque chose sur pied…

Faut-il que ces lignes demeurent nationales ? Cette question de statut nous a préoccupés et nous avons perdu un an à un an et demi de discussions avec SNCF Réseau afin d’envisager comment nous pourrions sortir les petites lignes capillaires du giron national.

Si une liberté est laissée au niveau des territoires, ceux-ci s’organiseront en fonction des besoins. Et, lorsqu’il y a des besoins, les chargeurs s’engagent à utiliser davantage la ligne. Ils paient 2 euros par tonne. Ils seront d’autant mieux servis qu’ils alimenteront cette ligne et que l’on pourra y faire des travaux importants, tout en conservant, ou non, un statut national.

Ce sont ces lignes capillaires qui alimenteront les lignes plus importantes et qui nous permettront de développer le fret ferroviaire. Je demande à mes collègues d’être attentifs à cela. Le modèle ne doit pas être figé. Donnons la responsabilité aux territoires pour qu’ils puissent se prendre en main dans ce domaine ! (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Cécile Cukierman. Venez dans le Massif central !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Au vu des arguments que vient de donner René-Paul Savary, cela paraît formidable.

Pourtant, mon cher collègue, nous avons eu suffisamment de débats sur cette question dans cet hémicycle : les collectivités n’ont pas tellement les moyens de faire ce que vous dites !

M. Bruno Sido. La Marne, si ! (Sourires.)

Mme Laurence Cohen. On aimerait que tel soit le cas, mais ce n’est pas la politique qui est impulsée par ce gouvernement !

Cette réforme s’attaque à notre système ferroviaire public. Nous avons un désaccord, madame la ministre, c’est le débat et nous l’assumons. Pour ma part, je ne trouve pas que l’on y passe trop de temps. C’est fondamental !

Quel service public voulons-nous et pour quelles populations ? Nous disons : pour toutes les populations.

René-Paul Savary a parlé de l’implication des collectivités. Il est vrai qu’elles essaient de faire beaucoup de choses. C’est le cas des régions, comme l’a dit ma collègue. Or elles aussi sont asphyxiées du fait d’un manque de moyens !

À un moment donné, la responsabilité doit revenir à l’État afin d’éviter la ségrégation au niveau des territoires. C’est vrai pour les voyageurs, comme pour le fret.

Que l’on ne nous dise pas que ce débat n’est pas profond ! Sur la question des voyageurs, le précédent gouvernement nous avait fait tout un laïus sur les autocars. Est-ce vraiment cela qui réglera le problème ?

Arrêtons de schématiser et allons jusqu’au bout du débat !

Le dogmatisme, madame la ministre, c’est ne pas avoir d’esprit critique et ne pas avoir de doutes. Pour notre part, nous avons fait bouger nos positions. Mais nous n’avons pas remarqué que le Gouvernement renonçait à des réformes qui, jusqu’à preuve du contraire, n’amélioreront pas la qualité des transports, qu’il s’agisse de voyageurs ou de marchandises. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je n’avais pas prévu d’intervenir, mais l’explication donnée par René-Paul Savary m’y a décidé.

Le débat, c’est lorsque des arguments sont échangés ! Et je trouve que M. Savary explique bien, même si notre vision est opposée.

Je pense cependant, mon cher collègue, que votre langue a fourché. Vous avez dit que ces lignes répondaient à un besoin humain, celui de se déplacer. Certes, mais uniquement, dans votre vision, là où cela sera rentable et là où les collectivités territoriales auront les moyens d’investir. Un certain nombre d’autres, en revanche, n’auront pas de tels moyens.

Je vais vous donner un exemple très précis. Comme nombre de nos collègues, depuis plusieurs semaines, nous organisons des débats avec la population, les usagers, les syndicats de cheminots, y compris avec des élus.

J’étais ainsi en Nouvelle-Aquitaine, à Mont-de-Marsan, aux côtés du vice-président de la région chargé des transports, Renaud Lagrave,…

M. Fabien Gay. … lequel disait que la région investissait chaque année, pour les petites lignes, 200 millions d’euros. Il ajoutait que si on lui demandait demain de reprendre l’ensemble des lignes TER, elle devrait investir 1,1 milliard d’euros.

Croyez-vous que la région Nouvelle-Aquitaine sera en capacité de le faire ? Cet élu dit que non, elle n’en aura pas les moyens. Il est d’ores et déjà prévu de fermer trois lignes, dont vraisemblablement la ligne Bordeaux-Mont-de-Marsan. Or cette ligne, qui est empruntée, correspond bien à un besoin humain de se déplacer. Elle connaît certes des difficultés du fait d’un sous-investissement et de la nécessité de l’électrifier, mais elle fonctionne.

Demain, il faudra peut-être faire des choix, et donc remettre des bus. Nous avons eu, précédemment, le débat sur la question écologique… Je ne pense pas que ce soit en fermant des lignes, au motif que les régions ou d’autres collectivités n’ont pas les moyens de les entretenir, que nous irons vers un « plus » écologique.

Vous avez raison, madame la ministre, nous aurons ce débat à l’occasion de votre loi sur les mobilités. Mais nous serons très vigilants !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Ce que vous êtes en train de contester, ce n’est pas la réforme que propose aujourd’hui le Gouvernement : ce sont les lois de décentralisation de 1982 (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Élisabeth Borne, ministre. … et le transfert aux régions en 1997, puis via la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, en 2000, de la responsabilité des services publics régionaux. Voilà ce que vous contestez !

Mme Cécile Cukierman. Non, c’est la loi de 2014 !

Mme Éliane Assassi. Nous parlons des moyens !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Le Gouvernement ne partage pas votre point de vue, parce qu’il croit à l’intelligence des territoires.

Mme Laurence Cohen. Avec des moyens, madame la ministre !

Mme Élisabeth Borne, ministre. La disposition que vous proposez de supprimer vise justement à permettre aux territoires de soutenir, par exemple, la remise en état des lignes capillaires pour développer le fret ferroviaire, qui est pour moi un enjeu majeur.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 34.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 211, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 30

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les missions mentionnées aux 1° à 4°, 6° et 7° ne peuvent être exercées en partie ou en totalité par une filiale de SNCF Réseau.

« Les missions mentionnées au 5° peuvent être exercées par une filiale entièrement détenues par SNCF Réseau. » ;

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 211.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 33, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 43

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° L’article L. 2111-11 est abrogé ;

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Nombre d’entre nous sont informés, il y a beaucoup de polémiques et de rapports ; il faut donc faire preuve de rigueur.

Les rapports de l’Inspection générale des affaires sociales, du Sénat, de la Cour des comptes, font le constat, je pense, unanimement partagé, de l’inefficacité, voire de la nocivité, des partenariats public-privé, les PPP. Ceux-ci ont même mis en difficulté des collectivités, de gauche comme de droite.

Nous pensons que la maîtrise d’ouvrage publique doit être privilégiée, avec des crédits financés par les ressources du budget, voire en recourant à la délégation de service public dans certains cas.

Sur cette question des PPP, nous ne nous fondons pas seulement sur le point de vue de notre groupe, mais sur ce qui a été expérimenté par les collectivités, alors même que nos jugements à cet égard pouvaient être différents.

Au travers de cet amendement, nous souhaitons nous assurer, pour ce qui est de l’ensemble des collectivités, mais aussi au regard de la réforme de l’État, que le PPP ne sera pas inscrit parmi les partenariats possibles prévus dans ce projet de loi.

La Cour des comptes avait considéré dès 2008 qu’en fait d’intérêt réel, « les PPP n’offrent d’avantages qu’à court terme et s’avèrent finalement onéreux à moyen et long termes ». Quant à la Cour des comptes européenne – l’Europe ! –, dans un rapport de mars 2018 intitulé Les partenariats public-privé dans lUE : de multiples insuffisances et des avantages limités, elle met en garde les États membres contre le recours à ces partenariats.

Les mauvais résultats de l’utilisation des PPP sont directement liés à la question même du recours à ce type de contrat, dont nous connaissons tous les écueils : l’augmentation considérable des prix et l’allongement important des délais de livraison des ouvrages.

Je conclurai mon propos en évoquant la situation de notre beau pays, la France, où l’on constate une augmentation des prix de 73 %, avec un budget qui est passé de 18 à 31 millions d’euros.

Au regard d’expérimentations faites dans des collectivités de divers niveaux et dirigées par des élus de sensibilités différentes, il s’agit, madame la ministre, d’une mise en vigilance !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. J’ai compris que les auteurs de l’amendement souhaitaient en appeler à notre vigilance et poser le problème – c’est tout l’intérêt d’un tel débat – des PPP.

Cet amendement vise à supprimer la possibilité pour SNCF Réseau de recourir à des contrats de concession ou de partenariat pour l’exercice de certaines missions.

Personnellement, je ne suis pas un « fan » des PPP, mais je pense qu’il faut par moments laisser une certaine souplesse. En effet, comme cela a été indiqué précédemment, il s’agit d’une souplesse utile pour le gestionnaire d’infrastructure dans l’exercice de ses missions.

L’avis est défavorable, car les PPP peuvent parfois être intéressants.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur. Je ne pense pas que tous les PPP réalisés dans le domaine ferroviaire soient des modèles et il faudra que nous soyons vigilants si nous devons recourir à nouveau à ces outils.

Néanmoins, il n’est pas inutile de garder cette possibilité. Ce n’est pas l’outil qui est en cause, mais la façon dont on s’en sert.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Ce sujet est en lien avec la discussion précédente. Madame la ministre, vous ne pouvez pas nous reprocher notre positionnement sur la décentralisation.

La décentralisation vise à rapprocher le plus possible l’administration et la gestion des politiques des besoins des populations qui vivent et travaillent sur un territoire. Pour y parvenir de la façon la plus démocratique et la plus efficace possible, il faut donner des moyens. Or, force est de constater que la décentralisation est aujourd’hui mise à mal, justement à cause d’un manque de moyens.

Alors que la démonstration a été faite de l’inefficacité des PPP, y compris en termes de maîtrise de l’argent public, sur le plan de l’investissement comme du fonctionnement, certains y ont recours parce qu’ils n’ont pas d’autre solution pour réaliser immédiatement un projet.

Nous n’avons pas la même appréhension que vous de la notion de souplesse. Selon moi, cela s’apparente davantage à de la contrainte. On peut toujours dire qu’un tapis de clous est très doux, il n’en demeure pas moins que marcher dessus est très douloureux ! Nous sommes dans cette optique…

Cet amendement tend non pas à revenir sur la problématique du PPP, mais à redonner toute sa force à l’aménagement du territoire. Il convient de ne pas conclure aujourd’hui de tels partenariats, dont on sait qu’ils produiront dans les deux décennies suivantes une catastrophe pour les finances publiques, à quelque niveau que ce soit.

C’est dans une logique d’efficacité, d’aménagement du territoire et de réponse aux besoins des populations, et donc dans un véritable esprit de décentralisation, que nous avons proposé cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Nous demanderons ultérieurement une évaluation des PPP appliqués au ferroviaire.

Je souhaite profiter de cette intervention pour poser une question et vérifier un chiffre que j’ai entendu lors des auditions.

Quel est, madame la ministre, le coût d’équilibre de la ligne à grande vitesse Sud-Europe Atlantique, dite LGV SEA, entre Tours et Bordeaux, dont le contrat de concession a été signé par Vinci et Réseau ferré de France ? On nous a parlé d’un coût de fonctionnement de 140 millions d’euros annuels pour SNCF Mobilités.

Au travers de notre demande d’évaluation et du constat, partagé, que nous faisons d’un coût très élevé de certains PPP, nous nous demandons s’il est nécessaire d’interdire cet outil. Il faut surtout l’utiliser à bon escient !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article.

Mme Éliane Assassi. Vous avez l’air d’être surpris, monsieur le président… De telles explications de vote sont pourtant fréquentes ! En l’occurrence, cet article n’est pas anodin, et il mérite que chacun puisse donner son point de vue.

Avec mes camarades du groupe CRCE, nous sommes les porte-voix, à la fois, des usagers, dont on a très peu parlé à l’occasion de l’examen de cet article 1er A, et des cheminots de France, mais aussi d’autres pays européens, lesquels ont fait l’expérience de la privatisation, alors même que leur gouvernement leur avait juré ses grands dieux que celle-ci n’aurait pas lieu.

J’ai particulièrement noté, lors d’une réunion qui s’est tenue hier, les propos de nos amis allemands, qui nous ont fait part de leur expérience. Ils nous ont demandé, de façon solennelle, de ne pas voter ce texte, car ils craignent que les Français ne se retrouvent dans la même situation qu’eux.

Sans revenir sur les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 1er A, je redis que nous sommes opposés à la transformation du groupe SNCF en société anonyme et à sa filialisation.

Madame la ministre, le fait de répéter à l’envi vos certitudes ne vous rend pas convaincante ! Je vous le dis avec tout le respect que je vous dois, vous ne nous avez pas convaincus…

Mme Élisabeth Borne, ministre. Et réciproquement !

Mme Éliane Assassi. Certes, mais c’est vous qui êtes ministre et qui proposez ce texte, c’est donc à vous d’être convaincante.

Mme Fabienne Keller. On peut vous retourner le compliment !

Mme Éliane Assassi. Cet article prépare la privatisation de la SNCF, par conséquent nous voterons contre.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote sur l’article.

Mme Angèle Préville. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens à dire que je suis contre la transformation de la SNCF en société anonyme.

Je sais deux ou trois choses de cette transformation, et notamment que les futurs dirigeants de la SNCF auront des rémunérations très importantes, bien au-delà de celles en vigueur dans les EPIC. Par ailleurs, quelle que soit la qualité de leur gouvernance et quels que soient les résultats qu’ils auront obtenus, ils pourront quitter cette société anonyme avec ce que l’on appelle communément des « parachutes dorés ». Vous me contredirez si nécessaire… Je citerai aussi, bien sûr, l’accroissement du capital et la filialisation.

Je regrette également le rejet d’un amendement que j’avais soutenu. Il visait à donner aux collectivités territoriales un droit d’option pour l’usage d’espaces dans les gares, ce qui aurait permis d’y installer des maisons de services au public, ou MSAP, des crèches, et de rendre à la population des services réels et concrets. Il s’agissait de réenchanter les gares, afin que celles-ci ne soient plus dévolues entièrement à des activités commerciales, mais puissent accueillir des services publics au cœur des villes.

Les gares sont notre patrimoine, et je trouvais juste que leur usage soit en partie réservé à de telles activités. Il est regrettable d’abandonner l’ensemble de ces espaces à la consommation.

La République française privilégie systématiquement le commun par rapport au particulier. Elle est un projet politique conscient et performatif de résistance à l’empiètement de la sphère privée sur la sphère publique, pour le bien de nos concitoyens. Seul l’État, normalement, a ce souci-là.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote sur l’article.

M. Frédéric Marchand. Pour ma part, madame la ministre, vous m’avez convaincu ! (Mme Éliane Assassi sesclaffe.)

Vous dites, madame Assassi, que nous sommes regardés et écoutés. Prenez donc garde à ne pas tomber dans un excès de caricature, car il finirait par tuer la caricature !

Par ailleurs, vous n’avez pas le monopole du dialogue avec les usagers et les cheminots…

Mme Éliane Assassi. On n’en a pas parlé !

M. Frédéric Marchand. Si, nous leur avons parlé ! Vous n’avez pas le monopole du débat et de la conversation avec les autres, sachez-le. Nous aussi, nous avons échangé avec les organisations syndicales. J’ai ainsi rencontré, à l’étranger, des cheminots qui m’ont dit que la France était attendue et regardée, et qu’ils attendaient beaucoup de cette réforme.

S’il vous plaît, un peu de sérieux, et faisons en sorte de ne pas tomber dans la caricature ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’article.

M. Olivier Jacquin. En 2014 ont été mis en place trois EPIC dans la perspective d’assurer une meilleure gouvernance de la SNCF, notamment du point de vue du lien entre réseau et mobilités, ce qui nous semblait intéressant. Vous proposez de transformer le tout en sociétés anonymes.

Que l’on se place du point de vue de l’ouverture à la concurrence, ou de celui d’un nouveau pacte ferroviaire, cette transformation ne semble pas présenter un avantage décisif et déterminant, tant s’en faut, d’autant qu’une suspicion de privatisation s’est fait jour dans les mois qui ont précédé ce débat… La suspicion porte désormais sur une privatisation ultérieure, puisqu’une prochaine loi pourra y revenir.

Nous voterons donc contre cet article.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’article.

M. Guillaume Gontard. Je ne sais pas s’il est caricatural de vouloir un véritable service public du ferroviaire, mais, pour ma part, je ne le pense pas. Le débat que nous venons d’avoir était important et nécessaire.

Je n’ai pas tellement vu de caricatures, mais j’ai constaté, en revanche, un manque de réponses !

Je le répète, nous n’avons toujours pas obtenu de réponse quant à la raison justifiant la transformation en société anonyme. Le statut d’EPIC suffisait, en effet, pour permettre une ouverture à la concurrence. Je ne vois pas où est la caricature sur ce sujet… Je me permets donc de reposer la question.

Il existe d’autres possibilités. Le véritable problème du ferroviaire réside, à la fois, dans l’investissement et dans la dette. On a parlé précédemment des lignes « de vie », les lignes du territoire.

Je sais que nous n’avons pas le monopole du dialogue avec les usagers, mais je vous donne rendez-vous dans quelques années – pas nombreuses, car cela a déjà commencé – pour faire le constat de la fermeture de ces lignes de vie. On ne trouve aucun exemple, en Europe, de pays qui n’ait pas supprimé des lignes du quotidien !

Actuellement, on renvoie tout aux contrats de plan État-région. Or, si des investissements ne sont pas réalisés cette année, certaines lignes fermeront avant 2021. Les régions nouent des relations pour essayer de trouver des solutions. Qui bloque ? L’État ! Je me demande donc comment cela se passera par la suite.

Les régions parviennent à trouver 80 % des aides. Pour ce qui concerne les 20 % qui manquent, SNCF Réseau dit ne pas être en mesure de les fournir. C’est cela, la réalité actuelle ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Élisabeth Borne, ministre. De quoi parlez-vous ?

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’article.

M. Fabien Gay. Nous voici parvenus au bout de la discussion de l’article 1er A. Elle aura duré un peu de temps, mais je pense que c’était nécessaire.

Je le redis, à la suite de Guillaume Gontard, nous n’avons pas eu de réponse !

Donc, si ce changement de statut des trois EPIC en sociétés anonymes se fait sans vraie raison, c’est parce qu’il est purement idéologique et dogmatique et que, quelque part, vous préparez autre chose : une privatisation partielle, bientôt, (M. le rapporteur sexclame.) ou totale – on verra !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Ah !

M. Fabien Gay. Ce sont les prochaines années qui nous le diront.

Comme la présidente de mon groupe, j’ai été très marqué par ce que nous ont dit les syndicalistes européens – anglais, luxembourgeois, italiens, espagnols…

Mme Éliane Assassi. Un peu de respect pour ces personnes !

M. François Patriat. Un peu d’humour !

M. Fabien Gay. Les cheminots de sept nationalités qui étaient présents ont tous vécu l’ouverture à la concurrence et/ou la privatisation. Mon collègue évoquait précédemment l’Allemagne, en vous donnant des chiffres. On ne vous a pas entendue les démentir, madame la ministre !

Les syndicalistes nous ont donné un autre chiffre, qui montre que l’ouverture à la concurrence n’améliore pas le service rendu aux usagers. Ils nous ont dit que le trajet entre Stuttgart et Munich durait 96 minutes avant l’ouverture à la concurrence, contre 131 minutes aujourd’hui. Pourquoi ? (Protestations sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Fabienne Keller. Parce qu’il y a des travaux à Stuttgart !

M. Fabien Gay. Parce qu’on n’a pas investi et que la situation s’est donc dégradée, les trains sont obligés de rouler moins vite qu’avant.

En vérité, vous ne voulez pas parler de la question essentielle… (Protestations renouvelées sur les mêmes travées.) Mes chers collègues, j’ai fait dix-sept ans de rugby, j’ai joué sur à peu près tous les terrains du Sud-Ouest et j’ai souvent été sifflé. Donc vous pouvez continuer, cela ne me fait pas peur !

Vous ne voulez parler ni de la question qui fâche, celle de la dette, sur laquelle vous n’avez jamais répondu, ni surtout du véritable sujet : les investissements qui sont aujourd’hui nécessaires. Sur ce point, on attend des réponses, et nous continuerons à en parler avec les intervenants suivants.

M. le président. Au rugby aussi, on s’arrête à la fin du match ! (Rires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote sur l’article.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on peut faire preuve d’un peu d’insolence, d’humour et d’interactivité, mais il ne faut tout de même pas tomber dans le piège des provocations dénuées de tout fond politique.

Monsieur Marchand, vous avez répondu à Éliane Assassi. Vous avez tort et raison, mais personne n’a de monopole et n’a à se justifier ici, dans cette assemblée.

Je ne demanderai jamais à une sénatrice ou à un sénateur, quelles que soient ses opinions politiques, de justifier ses analyses et ses propositions, et ce parce qu’il a un mandat républicain. Il faut donc débattre du fond, et pas d’autre chose. Nous ne nous réclamons pas de telle corporation ou de tel métier. Nous avons un mandat, duquel nous tenons notre légitimité.

Si vous voulez parler de monopole, de quoi débattons-nous depuis hier ? De concurrence libre et non faussée ! C’est de cela que l’on parle avec le projet de transformation de la SNCF.

Puisqu’il faut s’entraider, madame la ministre – ce n’est pas de votre responsabilité, mais nous avons eu un débat assez sérieux sur les filiales –, je vous informe que SNCF RE est une société de réassurance basée au Luxembourg, filiale qui permet à la SNCF d’alléger le montant de son impôt en France. Elle a été créée en octobre 2012. Elle est dotée de 11 millions d’euros dans le premier rapport financier qui a suivi sa création. Savez-vous combien elle a de salariés ? Un seul salarié entre dans la composition de cette entreprise, qui n’a d’ailleurs qu’une boîte postale dans un immeuble du duché du Luxembourg. Aujourd’hui, nous ne connaissons pas le montant financier total confié à cette filiale, mais nous connaissons son fonctionnement : il s’agit d’une « captive de réassurance », comme on appelle ces sociétés qui garantissent les risques des grands groupes du CAC 40. Ces dernières s’assurent auprès d’assureurs extérieurs, qui se réassurent ensuite auprès de la captive détenue par l’assuré. Ce qui revient à dire qu’elle est une coquille vide.

Nous avons débattu ici, nous avons été tout de même largement convaincus sur la question de l’évasion fiscale, des « Paradise Papers », etc. !

Derrière la question de la filialisation, il y a trois étapes : d’abord, on ouvre à la concurrence ; ensuite, on filialise ; enfin, pour employer un gros mot, on privatise.

M. le président. Mon cher collègue, vous avez largement dépassé votre temps de parole.

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote sur l’article. (Protestations sur diverses travées.)

M. Marc Laménie. Laissez-moi m’exprimer ! Le rapporteur l’a rappelé hier soir, nous devons parler avec respect aux uns et aux autres. Ici, c’est un lieu d’échanges et de débat, à tous points de vue et à tous niveaux.

Je vais une fois de plus me démarquer modestement de mon groupe, mais mes collègues connaissent ma position sur le sujet. Je l’évoque avec passion, comme chacun d’entre nous peut le faire de différents sujets, dont celui-là. Pour rester cohérent avec mon abstention lors du vote final du texte de 2014 sur le ferroviaire, sur cet article – les autres sont tous importants, mais celui-là porte sur la gouvernance – je m’abstiendrai également.

Même si, madame la ministre, vous avez peut-être rassuré d’une certaine manière, il reste des incertitudes. Les EPIC deviennent des sociétés anonymes, certes avec 100 % de capitaux publics d’État, mais, cela a été rappelé, l’incertitude demeure sur le devenir des petites lignes. Qui investira dans ces lignes ? On connaît les moyens des collectivités territoriales, et l’État reste le premier partenaire de toutes ces collectivités – il faut garder cela à l’esprit. Ce qui sera non rentable tombera en désuétude.

M. Jean-François Husson. C’est déjà le cas !

M. Marc Laménie. C’est sûr !

Je peux citer de nombreuses lignes qui n’existent plus dans beaucoup de départements. Je ne le ferai pas pour ne pas allonger le débat. On peut regarder sur un atlas les vides qui existent maintenant et les bouts de lignes qui restent. Chaque fois, on supprime des tronçons de lignes.

Mme Laurence Cohen. Tout à fait !

M. Marc Laménie. Mes chers collègues, chacun d’entre vous a de nombreux exemples à citer dans son département.

M. Marc Laménie. Il faut avoir cela présent à l’esprit !

Pour rester cohérent, je m’abstiendrai donc sur cet article.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote sur l’article.

M. Pierre Ouzoulias. M. Marchand a porté le débat sur le terrain politique, et j’aimerais lui répondre sur ce même terrain. Mon cher collègue, vous contestez notre légitimité, soit.

M. Frédéric Marchand. Je n’ai jamais dit cela !

M. Pierre Ouzoulias. Qu’importe, ce n’est pas grave. Les salariés de la SNCF se sont exprimés. Vous contestez aussi les modalités de leur consultation. Mais d’autres salariés se sont aussi exprimés sur vos projets, je pense notamment à ceux d’Air France. Que vous ont-ils dit ? La même chose ! Je trouve que c’est une très bonne méthode, quand on touche à une entreprise aussi importante, que de consulter préalablement les salariés. Cela enrichirait notre débat. (M. François Patriat sexclame.) Laissez-moi finir, monsieur Patriat !

Madame la ministre, je vous fais une proposition : puisque vous envisagez de privatiser bientôt Aéroports de Paris, consultez les salariés, demandez leur avis, organisez un référendum à l’intérieur de l’entreprise. Ensuite, nous discuterons ici de la position qu’ils auront prise !

M. Frédéric Marchand. Cela ne sert à rien !

M. Pierre Ouzoulias. Je vous suggère une méthode pour accroître la démocratie dans les entreprises : chaque fois que vous voulez modifier une entreprise, faites un référendum, ce qui permettra d’éclairer les salariés.

Comme vous avez une énorme force de persuasion, aussi bien sur les salariés que sur nous, je ne doute pas que le résultat sera positif.

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote sur l’article.

Mme Fabienne Keller. Je voudrais dire à M. Ouzoulias que, s’il y a les salariés – ils méritent le respect, car ils ont un véritable savoir-faire –, il y a aussi les voyageurs, qui ne sont pas très respectés depuis deux mois, et les Français, qui financent l’ensemble du système ferroviaire. Ce sont ces trois groupes qui doivent avoir la parole.

Je ferai quatre réflexions.

Premièrement, s’agissant du capital de la SNCF, cet article, on l’a dit, apporte une double garantie – ceinture et bretelles – : capitaux publics et incessibilité.

Deuxièmement, je veux approuver les alinéas sur les gares. S’ils ne sont pas parfaits – on en a discuté, certains aspects doivent encore être travaillés –, ils constituent une avancée. La reconnaissance des gares comme un élément du système ferroviaire qui mérite une concertation avec les acteurs figure dans cet article. Je m’en réjouis.

Troisièmement, a été pointée à juste titre la question du financement de l’infrastructure des petites lignes par l’État ou SNCF Réseau. Madame la ministre, nous en avons parlé plusieurs fois, c’est un véritable sujet. Nous avons besoin de vous entendre nous confirmer, même si vous l’avez déjà dit plusieurs fois, que les contrats de plan continueront à porter ces investissements et qu’ils seront honorés et réalisés. En effet, le problème vient de la non-réalisation dans le passé des contrats de plan.

Quatrièmement, sur les rapprochements hâtifs, je vous invite à visiter la gare de Stuttgart – il se trouve que ce n’est pas très loin de chez moi. C’est l’un des très grands chantiers ferroviaires d’Europe. Cette gare a une organisation différente chaque fois que j’y vais – cela change tout le temps ! –, car c’est une gare de tête dans laquelle les trains « rebroussent », ce qui est très inefficace. C’est, pour la ville, un immense chantier qui a fait l’objet de référendums. La gare va être enterrée et une traversée sera réalisée par un tunnelier, comme à Vienne. Un ring va être construit et plusieurs stations seront créées. Ce magnifique projet porte une vision, une ambition pour le chemin de fer en Allemagne.

C’est ce que prévoit globalement ce texte : réformer afin de porter une ambition pour le ferroviaire. (Mme Cécile Cukierman sexclame.) C’est pour cela, mes chers collègues, que je vous propose de soutenir cet article 1er A. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur l’article.

M. Yves Daudigny. Sur le statut de la SNCF, il n’y a pas, d’un côté, les modernes, qui seraient éclairés et progressistes, et, de l’autre, les vilains, certainement conservateurs et partisans de ne rien changer.

Je vous renvoie, madame la ministre, à un article de la version numérique du journal Le Monde du 26 mars 2018, publié à quinze heures sous le titre : « La patronne de la RATP défend le statut public de l’entreprise de transport ». Je cite un extrait : « Lors de la présentation de ses résultats 2017, vendredi 23 mars, la nouvelle [présidente de la RATP] a clamé son attachement au statut public de son entreprise et à celui de ses agents. » La présidente de la RATP l’assure : « Être un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), directement sous la tutelle souvent embrouillée de l’État, ne handicape en rien la RATP. »

Ces affirmations ont été reprises samedi, sur France Inter, où la présidente de la RATP a bien précisé que ce statut pouvait même convenir pour affronter la concurrence.

Voilà quelques éléments qu’il est intéressant de porter à la connaissance de tous. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Élisabeth Borne, ministre. Et alors ?

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote sur l’article.

M. Bruno Sido. Attention !

Mme Cécile Cukierman. Je ferai deux remarques sur cet article.

D’abord, mes collègues l’ont déjà dit, madame la ministre, mais j’y reviens : vous n’avez pas répondu à nos inquiétudes. Ce n’est pas de l’idolâtrie, mais il se trouve que je vous ai encore écoutée ce matin sur Public Sénat, me semble-t-il : vous n’avez pas davantage répondu.

On le sent, vous vous retranchez aujourd’hui derrière l’affirmation de votre volonté de ne pas privatiser. Mais ce que nous disons depuis hier, c’est que l’article 1er A permettra demain des évolutions qui pourraient rendre possible une privatisation.

Au lieu de sécuriser aujourd’hui l’entreprise publique et de prévoir les garde-fous qui permettront d’empêcher demain des regroupements en vue d’une privatisation – on connaît les conséquences que cela aura sur l’ensemble de notre territoire –, on laisse faire et on introduit dans cet article, comme certains l’ont dit, de la « souplesse ».

C’est un véritable enjeu, parce que nous avons réellement besoin d’une infrastructure qui irrigue l’ensemble du territoire et qui réponde aux différents usages du ferroviaire, que ce soit pour les marchandises ou pour les passagers. Quand je parle des différents usages, cela va du trajet court du quotidien au trajet long, plus ou moins régulier ou à dates régulières dans l’année.

Le débat s’est effectivement un peu focalisé, en tout cas cet après-midi, sur l’enjeu des gares. Je suis désolée, madame Keller, je vous ai écoutée parler de Stuttgart, mais mon problème dans le département de la Loire, c’est la gare de Noirétable : comment y faire arriver des trains ? Entre la gare de Noirétable et le grand ring génial de Stuttgart, on ne parle pas de la même réalité !

Nous avons besoin de mailler le territoire, avec de grandes gares de centralité dans les grandes villes, mais nous devons aussi relancer l’investissement et redonner du dynamisme aux gares qui maillent ce qu’on appelle les petites lignes ferroviaires.

Mme Fabienne Keller. Je suis d’accord !

Mme Cécile Cukierman. Il faut savoir raison garder dans les arguments, sinon on tombe dans les excès. La plupart de nos gares dans notre pays ne relèvent pas de projets pharaoniques. Il faut simplement redonner de la vie et de l’utilité à l’ensemble des gares pour que nous puissions encore les fréquenter demain.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, à vous écouter, on a l’impression que cela va tellement bien qu’il faudrait ne rien changer !

Mme Éliane Assassi. On n’a pas dit cela !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je me réjouis de voir que, alors que vous avez voté contre la réforme de 2014, vous pensez maintenant qu’il ne faut rien changer. (Mme Éliane Assassi proteste.) Ce n’est ni ma vision, ni celle du Gouvernement, ni celle des voyageurs, qui attendent un meilleur service public ferroviaire. C’est bien le sens de la réforme que porte le Gouvernement : nous voulons moins de trains en retard, davantage de trains, moins chers, et un service public qui fonctionne mieux.

M. Jean-Marc Todeschini. Ça va être un miracle !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cela passe par un engagement sans précédent en faveur du transport ferroviaire.

Madame Keller, je vous confirme l’importance que le Gouvernement accorde aux lignes qui irriguent nos territoires, que ce soit pour le fret ferroviaire ou les voyageurs, et son engagement aux côtés des régions pour moderniser ces lignes. Je vous confirme que l’État tiendra les engagements pris dans le cadre des contrats de plan. (Mme Fabienne Keller opine.)

Monsieur Daudigny, vous nous parlez de la RATP, peut-être pour sous-entendre que la transformation des EPIC en SA relèverait d’une position dogmatique. Le projet de réforme de la SNCF ne constitue précisément pas une position contre les EPIC ; il découle simplement du constat que trois EPIC ne permettent pas d’assurer un bon fonctionnement du système ferroviaire. C’est bien le sens de la transformation – mais, une fois de plus, nous n’allons pas nous comprendre – des EPIC en société anonyme : il s’agit de réunifier le système ferroviaire dans l’intérêt des voyageurs, de la SNCF et des cheminots.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote sur l’article.

M. Jérôme Bascher. Je vais évidemment voter cet article, même s’il ne suscite pas chez moi un espoir considérable. Comme Mme la ministre vient de le dire, si la SNCF fonctionnait bien, les voyageurs que nous sommes le sauraient.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il ne faut pas exagérer non plus, il y a quand même des choses qui fonctionnent !

M. Jérôme Bascher. En ce moment, on pâtit ! J’étais encore aujourd’hui avec des usagers qui souhaitent que le Sénat permette de mettre un terme à cette grève. C’est ce que nous allons tous essayer de faire.

On voit bien que le statut d’EPIC, après la fusion de différentes structures, n’a rien résolu. La SA n’est pas non plus la panacée, il faut le dire clairement. Ce qui est nécessaire, c’est d’agir sur la chaîne complète de commandement et sur la façon dont se prennent les décisions.

Si l’on a la curiosité de lire de temps en temps les rapports de la Cour des comptes – elle ne dit pas que des bêtises, même si elle peut aussi en dire ; nous sommes tous très libres –, on voit bien que la chaîne de commandement entre le Gouvernement, l’administration, la SNCF et, parfois, les syndicats n’a pas permis de créer une situation saine pour l’entreprise ou meilleure pour les voyageurs et encore moins pour les contribuables.

C’est tout de même ce que nous cherchons à faire, car ce sont bien les citoyens contribuables qui ont finalement leur mot à dire, et ceux-là n’en ont plus pour leur argent, madame la ministre.

La transformation en société anonyme va nous obliger à reprendre la dette, sinon la société coulerait immédiatement, ce qui n’est l’objectif de personne ! À l’époque où nous avions créé RFF, pour ceux qui s’en souviennent, c’était pour éviter que la dette revienne à l’État et soit consolidée dans le solde « maastrichtien ». C’était en 1999-2000.

Mme Élisabeth Borne, ministre. En 1997 !

M. Jérôme Bascher. La consolidation a été faite par Bruxelles en 1999. Je suis désolé, madame la ministre, d’avoir eu à connaître le sujet !

Je termine en disant qu’il va falloir reprendre ces 35 milliards d’euros pour redonner de l’investissement et de la modernité à la SNCF. Je crois à l’aménagement du territoire par le chemin de fer, mais, pour l’instant, pour l’aménagement du territoire, j’ai davantage confiance dans les collectivités locales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, je préside la séance jusqu’à dix-neuf heures trente. C’est avec joie que je vous annonce que je dois également présider nos travaux samedi, si nous devions siéger jusque-là. Le débat est très intéressant, et je vois que nous en prenons le chemin.

Mme Éliane Assassi. Nous serons là !

M. le président. Nous allons donc peut-être nous revoir ! (Sourires.)

Trois interventions sont encore prévues avant le vote sur l’article par scrutin public.

La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote sur l’article.

M. Alain Fouché. Je veux dire très rapidement que le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera naturellement cet article. Le dossier est difficile et il fallait avoir le courage de s’y attaquer, sinon nous allions droit dans le mur.

Ce texte apporte un certain nombre de garanties. Il est clair qu’il répond au souhait de la majorité de la représentation nationale : garanties financières dans le domaine de la dette, dont la SNCF était en grande partie non responsable, garanties en matière de développement durable, garanties sur la desserte des territoires, garanties pour les usagers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote sur l’article.

M. Michel Canevet. Je veux dire très rapidement moi aussi, puisque le temps est compté, que le groupe Union Centriste appuiera cette nécessaire réforme du statut de la SNCF, parce qu’il faut s’adapter, évoluer. Cette réforme est rendue nécessaire, on le voit bien, par le contexte. Cela a déjà été fait dans le passé pour La Poste.

Il est absolument nécessaire de s’adapter, car nous sommes dans un monde qui bouge beaucoup. Le groupe Union Centriste soutient cette réforme et l’article 1er A.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Ici, sur toutes les travées, nous sommes d’accord sur une chose : nous souhaitons toutes et tous avoir des trains qui arrivent à l’heure, qui roulent dans de très bonnes conditions, qui ne soient pas bondés et qui desservent l’ensemble des territoires. Sur ce point, c’est le consensus.

Mais, à ce moment du débat, je veux poser une question : pourquoi la SNCF en est-elle arrivée à la situation actuelle ?

La SNCF est un service public, qui fournit toujours, malgré ses manques et ses défauts, un excellent service par rapport aux autres pays qui ont privatisé le plus souvent le système ferroviaire. C’est ma première remarque.

Ma seconde remarque porte sur le sous-investissement chronique, madame la ministre, notamment de l’État, dans l’entretien des infrastructures et des lignes et sur l’externalisation d’un certain nombre de services. C’est la situation que connaît aujourd’hui la SNCF.

Je me réjouis des engagements pris, notamment quand ils viennent de l’État. Mais la réforme telle qu’elle est proposée, notamment au travers de l’article 1er A, n’offre aucune garantie. Ce ne sont, depuis le début, que des paroles. Quand on les met en doute, on est accusé de caricaturer la politique du Gouvernement.

Je veux le redire ici : quelle meilleure garantie que d’avoir un service public dont le personnel appartient à ce service public ? C’est une garantie de savoir-faire et de partage de ces savoir-faire, et de desserte de l’ensemble du territoire par un service ferroviaire de grande qualité.

Madame la ministre, depuis le début, vous ne répondez à aucun de ces sujets. Vous affirmez simplement qu’à la place des trois EPIC seront créées trois filiales et que tout ira mieux. Je ne pense pas que ces réponses soient dignes du débat que nous pouvons avoir ensemble pour lever nos doutes.

Quant aux cheminots, s’ils font grève, c’est non pas par plaisir, mais pour défendre un service qui est mis à mal. Voilà la réalité ! Si vous retournez négocier avec eux, en reprenant une à une les propositions qu’ils vous font, le mot d’ordre de grève sera peut-être levé.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !

Mme Laurence Cohen. En même temps, ne nous caricaturez pas ! Nous ne sommes pas pour le statu quo, nous avons des propositions, mais, pour l’instant, vous refusez chacun de nos amendements.

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er A, modifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 113 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l’adoption 246
Contre 90

Le Sénat a adopté.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article 1er A (début)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Discussion générale

5

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Adrien Giraud, qui fut sénateur de Mayotte de 2004 à 2011.

6

Article 1er A (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article additionnel après l'article 1er A - Amendement n° 254

Nouveau pacte ferroviaire

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour un nouveau pacte ferroviaire.

Dans la discussion du texte de la commission, nous sommes parvenus aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er A.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article additionnel après l'article 1er A - Amendement n° 131 rectifié

Article additionnel après l’article 1er A

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 254, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 2111-10-1 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 2111-10-1. – I. La situation financière de SNCF Réseau est appréciée au regard du ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle, défini sur le périmètre social de SNCF Réseau. À partir de 2027, ce ratio, ne peut dépasser un niveau plafond fixé dans les statuts de la société SNCF Réseau approuvés avant le 31 décembre 2019.

« À partir de 2027, les règles de financement des investissements de SNCF Réseau sont établies en vue de lui permettre de maîtriser sa dette, dans le respect du niveau plafond, selon les principes suivants :

« 1° Le montant des investissements à la charge de SNCF Réseau ne peut conduire à ce que le ratio prévu au premier alinéa dépasse le niveau plafond applicable. SNCF Réseau s’assure de ce respect lors de l’élaboration du contrat mentionné à l’article L. 2111-10 et de ses budgets annuels. En cas d’écart constaté en cours d’exécution du budget annuel, SNCF Réseau prend toute mesure lui permettant de respecter ce niveau plafond l’année suivante.

« 2° Pour tout projet d’investissements de renouvellement, de modernisation ou de développement du réseau ferré national réalisé sur demande de l’État, des collectivités territoriales ou de tout autre tiers, SNCF Réseau détermine sa part contributive dans le financement de ce projet de manière à ce que le taux de retour sur cet investissement soit au moins égal au coût moyen pondéré du capital de SNCF Réseau pour ce même investissement après prise en compte des risques spécifiques à l’investissement.

« II. – Pour la période du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2026, période dite de convergence, les statuts de l’entreprise approuvés avant le 31 décembre 2019 fixent les modalités de convergence afin que le ratio atteigne le niveau plafond visé au I du présent article le 31 décembre 2026 au plus tard. Tant que le ratio n’a pas atteint le niveau plafond visé au I du présent article, les règles de financement des investissements de SNCF Réseau respectent en outre les principes suivants :

« 1° Pour tout projet d’investissements de renouvellement ou de modernisation du réseau ferré national réalisé sur demande de l’État, des collectivités territoriales ou de tout autre tiers, SNCF Réseau détermine sa part contributive dans le financement de ce projet de manière à ce que le taux de retour sur cet investissement soit au moins égal au coût moyen pondéré du capital de SNCF Réseau pour ce même investissement après prise en compte des risques spécifiques à l’investissement.

« 2° SNCF Réseau ne peut contribuer au financement d’investissements de développement du réseau ferré national.

« III. – La contribution de SNCF Réseau au financement des investissements au sens du présent article s’entend quels que soient le montage retenu et la nature de la contribution de SNCF Réseau, y compris lorsque celle-ci revêt la forme d’une garantie, prises de participations, ou des avances.

« IV. – Pour chaque projet d’investissement dont la valeur excède un seuil fixé par décret, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières émet un avis motivé sur le montant global des concours financiers devant être apportés à SNCF Réseau et sur la part contributive de SNCF Réseau. Cet avis porte notamment sur la pertinence des prévisions de recettes nouvelles, en particulier au regard de leur soutenabilité pour les entreprises ferroviaires, ainsi que sur l’adéquation du niveau de ces recettes avec celui des dépenses d’investissement projetées.

« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret. »

II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 2111-3 du code des transports, les mots : « Le 2° et les quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 2111-10-1 ne sont pas applicables » sont remplacés par les mots : « Le 1° et le 2° du II de l’article L. 2111-10-1 ne sont pas applicables ».

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Il s’agit d’un amendement important. Au moment où le Gouvernement a annoncé la reprise de 35 milliards d’euros de la dette au cours du quinquennat, il convient de s’assurer que cette dette ne puisse pas se reconstituer.

Vous le savez, la dette du secteur ferroviaire a augmenté en continu depuis 1997, date de la création de Réseau ferré de France, RFF, qui, à l’époque, portait une dette de 20 milliards d’euros. À la fin de 2017, la dette de SNCF Réseau avait dépassé 46 milliards d’euros.

Cette augmentation continue s’est accélérée depuis 2010, la construction des lignes à grande vitesse étant à l’origine d’un quart seulement de cet accroissement, ce qui montre bien qu’il convient de s’attaquer, au-delà du financement des lignes à grande vitesse, à un problème structurel.

Le sujet de la dette a été identifié très tôt puisque, dès 1991, un service annexe d’amortissement de la dette ferroviaire était créé.

En 1997, les statuts de RFF comportaient le célèbre article 4 aux termes duquel il était prévu que RFF ne pouvait pas financer des projets de développement au-delà de sa capacité contributive. Cette mesure de protection a été renforcée en 2014 par l’inscription dans la loi d’une « règle d’or ». Elle précise que, tant que la dette de SNCF Réseau dépasse un certain plafond, SNCF Réseau ne peut contribuer au financement des projets de développement, qui doivent donc être financés par l’État et les collectivités.

Tout cela n’a pas suffi. Malgré ces mesures, la dette ferroviaire, celle du gestionnaire d’infrastructures, qu’il s’agisse de RFF, puis de SNCF Réseau, a donc plus que doublé en vingt ans.

Je le disais, les projets de développement ne représentent qu’un quart de l’accroissement de la dette. Un autre quart vient du coût de la dette et une moitié est produite par le déficit structurel de réseau, les ressources étant insuffisantes pour financer l’exploitation et la régénération. En d’autres termes, alors que, depuis dix ans, le montant de la régénération du réseau a triplé, passant de 1 à 3 milliards d’euros par an, ce qui était indispensable, les ressources de SNCF Réseau n’ont pas suivi. C’est à ce décalage qu’il faut remédier.

Nous le faisons, d’une part, en reprenant dans les comptes de l’État 35 milliards d’euros de dette de SNCF Réseau et, d’autre part, en complétant par de nouvelles règles celles qui s’appliquent aux projets de développement et aux projets contractualisés.

La nouveauté de cette règle d’or, c’est qu’il n’est plus possible de demander à SNCF Réseau d’augmenter sa régénération sans la financer. Nous mettons en place pour SNCF Réseau un modèle économique équilibré afin d’assurer son retour à l’équilibre, qui sera maintenu sur la durée.

Cette trajectoire de retour à l’équilibre, qui permet de financer le programme d’investissements de SNCF Réseau, sera, bien sûr, inscrite dans le nouveau contrat de performance entre l’État et cet établissement.

Nous prévoyons aussi que SNCF Réseau et l’État soient tenus de définir ensemble les mesures visant à empêcher l’augmentation de la dette si, une année, la capacité d’autofinancement de SNCF Réseau ne permettait pas de couvrir les investissements prévus à sa charge.

Article additionnel après l'article 1er A - Amendement n° 254
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er B (nouveau)

M. le président. L’amendement n° 131 rectifié, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l’article L. 2111-10-1 est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« 2° Les investissements de développement du réseau ferré national sont déterminés au regard des objectifs fixés au système ferroviaire national, en vertu des articles L. 2100-1 à L. 2100-4.

« Le Parlement est associé à leur définition et procède à l’évaluation des opérations menées, après avis motivé de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et terrestres.

« L’Autorité peut fournir au Parlement toute information nécessaire à cette évaluation.

« Le financement des investissements de développement est conduit par SNCF Réseau. L’entreprise peut bénéficier, notamment du point de vue de l’aménagement du territoire, du développement local, de la mise en cohérence de l’espace ferroviaire européen, de la mise en œuvre de la transition écologique, du concours de l’État, des collectivités, des instances communautaires ou de tout autre concours.

« Elle peut, avec le concours de la Caisse des Dépôts et Consignations et de tout autre établissement de crédit de son choix, définir les conditions d’un refinancement de sa dette.

« L’ensemble de ces mesures tend notamment à assurer l’équilibre des rapports financiers entre gestionnaire d’infrastructure et entreprises ferroviaires, notamment du point de vue des redevances ou péages d’utilisation, aux fins de les réduire en tant que de besoin aux coûts d’entretien et de maintenance. » ;

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Ce qui est évident dans le débat qui nous intéresse, c’est, bien sûr, que le mouvement des cheminots peut toujours s’essouffler, à en croire les informations officielles, mais qu’il aura eu comme résultat, entre autres, d’amener le Gouvernement à se pencher sur la dette du groupe SNCF et, singulièrement, celle de SNCF Réseau !

Le montant de la dette d’infrastructures est connu : 46,6 milliards d’euros, soit l’équivalent de 2 points de PIB aujourd’hui, que SNCF Réseau a incontestablement porté depuis 1982, en lieu et place de l’État. En effet, la dette des entreprises publiques, qu’il s’agisse de celle d’EDF, de la SNCF ou de toute autre du même type, provient, de manière quasi exclusive, de la clause d’autonomie de gestion qui leur a été imposée, dans un contexte de forte inflation et de dérégulation des marchés financiers, ce qui ne retire rien au fait que la gestion de la dette de SNCF Réseau a été globalement menée avec un professionnalisme certain. À tel point, mes chers collègues, et c’est peu connu, qu’elle est en partie constituée d’obligations de très longue durée et que sa durée de vie moyenne s’avère plus importante que celle de la dette de l’État.

Le rapport remis en août 2016, en application de l’article 11 de la réforme ferroviaire d’août 2014, montre que SNCF Réseau n’a pas grand bénéfice à tirer d’une simple reprise de sa dette par l’État, qu’il s’agisse de la durée de vie de la dette, mais aussi du taux d’intérêt qui la grève et des outils de refinancement mobilisés pour sa gestion active.

La signature de SNCF Réseau est de bonne qualité sur les marchés financiers, d’autant que les trois quarts de l’encours de la dette sont libellés en euros, ce qui n’expose donc l’établissement public qu’à un risque de charge quand même limité.

Autant dire que la solution choisie par le Gouvernement a tous les défauts de l’exercice obligé. En effet, nul ne l’ignore désormais, le toilettage des comptes, notamment du bilan de la SNCF Réseau, est étroitement lié au changement de nature juridique. De plus, la fameuse règle d’or risquerait de venir s’appliquer, anéantissant toute possibilité d’emprunt sur le court et moyen terme.

Nous proposons une solution avec cet amendement. J’espère qu’il retiendra votre attention, monsieur le rapporteur, madame la ministre. En tout cas, si vous nous demandiez de le retirer, nous le maintiendrions et nous invitons nos collègues à le voter !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je suis complètement d’accord avec Mme la ministre. Elle nous soumet un amendement qui me paraît proposer un système vertueux dans lequel SNCF Réseau maîtrisera enfin son endettement. C’est important parce que cet endettement, qui affecte le patrimoine de la France, est donc l’affaire de tous nos concitoyens.

D’ailleurs, je voudrais saluer les paroles du Premier ministre et de Mme la ministre, qui s’engagent à éponger la dette à hauteur de 35 milliards d’euros, ce qui n’est quand même pas une petite somme !

À ce propos, on entend souvent une petite musique faisant porter le chapeau aux cheminots. Je profite de cette occasion pour le dire très solennellement, les cheminots ne sont en aucun cas la cause de l’endettement de SNCF Réseau. On le sait très bien, la cause se trouve dans les décisions prises par des gouvernements successifs de tous bords et des élus qui voulaient aménager le territoire. Ce qui a d’ailleurs souvent été bien accompli, illustrant ainsi le rôle du système ferroviaire en ce domaine.

Au bout du compte, l’aménagement du territoire a toutefois été à l’origine d’une dette excessive de SNCF Réseau. Peut-être aurait-on dû essayer, à l’époque, de ne pas charger sa barque en mesurant les conséquences des décisions qui étaient alors prises. Certes, les finances étaient peut-être moins florissantes et on était au-dessus des 3 % fatidiques qui nous sont toujours reprochés.

En tout cas, je salue cet effort parce que cette très lourde charge revient maintenant à ce gouvernement. Je salue aussi cet amendement n° 254, qui s’inscrit dans une démarche très vertueuse, et j’émets, au nom de la commission, un avis favorable.

Quant à l’amendement n° 131 rectifié, il ne répond pas à la nécessité de maîtriser l’endettement de SNCF Réseau et de procéder, à l’avenir, à des investissements de développement et de modernisation.

Je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 131 rectifié ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je dois dire que je ne comprends pas bien l’amendement n° 131 rectifié du groupe CRCE, car il choisit de laisser la dette à SNCF Réseau. J’avoue que cela me surprend : que peut-on trouver de satisfaisant dans le fait que, chaque année, on retire 1,4 milliard d’euros de ressources au service public ferroviaire pour régler des frais financiers ?

Non, je ne comprends vraiment pas la logique consistant à maintenir un niveau d’endettement insoutenable pour SNCF Réseau ! J’émets donc, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

M. Jean-François Longeot. Je soutiendrai l’amendement du Gouvernement, qui traduit une décision importante. Voilà de nombreuses années que cette dette existe et aucun gouvernement ne l’a jamais prise en compte ni assumée.

Je reviendrai sur les propos du rapporteur, qui a raison. Pour ma part, je n’ai entendu personne dans cet hémicycle dire que la responsabilité de la dette incombait aux cheminots. Non, la dette, ce n’est pas la faute des cheminots ! Ce qui est vrai, c’est qu’elle est aujourd’hui élevée et qu’elle trouve son origine dans les investissements réalisés par le passé.

On peut toujours discuter aujourd’hui de leur opportunité et les critiquer. Mais il faut aussi accepter de nous remettre de temps en temps en cause. Si SNCF Réseau a investi pour construire des lignes et assurer des dessertes, c’est aussi parce que nous, les élus, avons souhaité ces réalisations.

Je veux donc me réjouir que le Gouvernement assure une reprise de la dette à hauteur de 35 milliards d’euros. Ce n’est quand même pas anodin !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. J’ai besoin d’un éclairage. L’amendement du Gouvernement est, il est vrai, important. Je suis d’accord pour considérer qu’il ne faut pas creuser à nouveau la dette. On ne va pas la combler et repartir dans un système susceptible de reproduire demain la même situation. Tout cela me paraît fort logique.

Je relève cependant une difficulté quand je lis que le taux de retour sur l’investissement pour SNCF Réseau doit être « au moins égal au coût moyen pondéré du capital de SNCF Réseau pour ce même investissement après prise en compte des risques spécifiques à l’investissement ». Cela signifie que SNCF Réseau, contrainte à un retour sur investissement calculé sur chaque ligne, ne participera pas à la solidarité nationale. SNCF Réseau a pourtant des recettes qui pourraient être redistribuées sur l’ensemble.

C’est une question qui se pose et, à voir la réaction de Mme la ministre, il semble important de la creuser.

Soit on considère que SNCF Réseau est encadrée pour chaque ligne par le taux de retour prévisible sur l’investissement et le montant de l’investissement consacré à chaque ligne est évidemment calculé sur les recettes attendues sur cette ligne ; soit on admet, tout en restant fidèle au principe de ne pas recreuser la dette, qu’il existe, dans certains endroits, des lignes qui marchent bien, et on autorise SNCF Réseau à réinvestir une partie de cet argent sur des lignes moins rentables.

Dans un cas, SNCF Réseau continue de participer à la solidarité nationale territoriale. Dans l’autre, elle se trouve extrêmement encadrée et seuls l’État et les collectivités territoriales pourront assurer la solidarité nationale. Or la discussion autorisait malgré tout – y compris dans le rapport Spinetta sur la modulation des péages – des outils pour assurer une partie de la solidarité nationale dans le cadre des recettes de SNCF Réseau.

Sur cette question extrêmement importante, nous aimerions, madame la ministre, avoir votre éclairage.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je m’associe tout à fait à ce que vient de dire M. le rapporteur : d’abord, la dette de cette entreprise, c’est celle de la SNCF. Pour lui permettre de repartir d’un bon pied – elle ne pourra jamais rembourser les 46 milliards d’euros –, l’État propose de reprendre 35 milliards d’euros, ce qui est important.

Ensuite, il faut avoir un modèle économique pour assurer un retour à l’équilibre et pour éviter une aggravation des dettes. Il me paraît normal que SNCF Réseau et l’État prennent ensemble des mesures afin de redonner à cette entreprise la possibilité d’assumer son développement.

Je voterai l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. C’est vrai que les deux amendements sont liés. Par souci de cohérence, je soutiendrai celui du Gouvernement. Nous sommes en présence de 46,6 milliards d’euros de dette. Cette dette, elle est le fruit de l’histoire, car c’est au fil des années que les difficultés se sont accumulées.

Nous soutenons toutes et tous ici le monde cheminot, nous saluons l’engagement des cheminots, leur passion, leur savoir-faire. Cela étant, il nous faut aussi penser aux usagers, qui ne savent pas forcément qui fait quoi. Ce qu’ils souhaitent, c’est que les trains soient à l’heure et qu’ils ne soient pas remplacés par des bus qui ne circulent pas forcément ! Il nous revient de défendre toute cette cohérence.

Parlons aussi du tout-TGV. À un moment donné, on demandait beaucoup de lignes TGV. Il est certain qu’elles ne portent pas seules la responsabilité de la dette.

Le Gouvernement s’engage à aider le monde cheminot, le Premier ministre ayant promis de reprendre 35 milliards d’euros de dette.

Certes, des investissements ont été réalisés, mais il reste beaucoup à faire et le chemin à accomplir est quand même long. Là, il faut vraiment se poser les bonnes questions pour essayer d’avoir un débat positif et constructif. Cet amendement va dans le bon sens.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Corbisez. Madame la ministre, je me situerai dans la suite logique des questions posées par mon collègue Dantec quant au retour sur investissement et sur certains bénéfices tirés de lignes rentables qui pourraient être mis dans un pot commun. Je ne doute pas que, si l’État demande un investissement, une modernisation ou un renouvellement, la réponse sera très positive.

À l’inverse, si la demande vient d’une collectivité territoriale, pour peu que cette dernière ait les moyens de cofinancer un investissement sur un réseau ferroviaire, quelles seront, en la matière, les marges de négociation entre des régions riches ou des régions pauvres ?

Ne pourrait-on pas imaginer un jour une péréquation quant au retour sur investissement pour des territoires beaucoup plus pauvres que les autres, qui auraient encore plus besoin d’investissements en réseau ferroviaire ?

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Cela a été dit et je le répète, non, les cheminots ne sont pas responsables de la dette ! Voilà ! Si on prend cela comme acquis, on va cesser les sous-entendus ! Entre 2007 et 2017, 25 000 emplois ont été supprimés, le taux d’endettement lié à la stratégie de l’entreprise SNCF et des politiques publiques n’a cessé de croître. L’endettement est donc passé de 32,5 à 52 milliards d’euros. Les chiffres me paraissent parler d’eux-mêmes.

Je ne reviendrai ni sur les volontés politiques qui ont conduit à accroître l’endettement de la SNCF ni sur la stratégie même de la SNCF par rapport aux lignes à grande vitesse. Je m’arrêterai sur la manière de régler le problème. On le dit depuis le début de la discussion, c’est bien que l’État prenne sa part au désendettement de la SNCF.

Je veux examiner le mécanisme vers lequel nous nous dirigeons. Je me suis intéressé aux différentes levées de fonds sur les marchés faites par l’entreprise SNCF à un euro près. Dans la dernière période, la SNCF s’est notamment lancée dans des partenariats public-privé : sur 100 euros levés ou empruntés, 41 euros ont participé directement au financement des investissements de la SNCF, c’est-à-dire à nos lignes, à notre réseau ferré à tous, à tout ce que nous portons. Vous le voyez, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il y a un vrai sujet : ce sont les 59 euros qui ont ruisselé dans toute l’intermédiation financière. Comprenez que cela pose problème dans la stratégie même de la SNCF, y compris au moment où l’État va faire un effort sur le désendettement !

Je voulais vous dire que l’amendement défendu par Éliane Assassi est bien « charpenté » par ces éléments dont il faut débattre.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes attentifs à l’amendement du Gouvernement dont l’adoption fera « tomber » le nôtre. Vous avez annoncé une bonne nouvelle, la reprise de la dette de la SNCF par l’État, qui aura lieu en deux temps.

Ce qui ne va pas là-dedans, ce sont, d’une part, les contreparties et, d’autre part, le caractère incomplet de la reprise.

Vous laissez en effet subsister au bilan d’entrée de SNCF Réseau une dette proche de l’amener à des fonds propres nuls et, surtout, vous ne touchez pas à la dette de SNCF Mobilités, dont on sent confusément qu’elle va être amortie par le dépeçage du réseau secondaire – entre autres – et des équipements roulants y afférents que le présent texte de loi organise.

Nous sommes, pour notre part, partisans d’une association précise entre l’expertise du service financier de SNCF Réseau et l’expérience et les références des cadres, techniciens et agents de la Caisse des dépôts et consignations. Vous le voyez, madame la ministre, nous ne sommes pas seulement dans une attitude d’opposition. Nous vous soumettons des propositions alternatives.

À cette association, donc, de faire en sorte que le financement des opérations d’investissement de SNCF Réseau soit bouclé dans les meilleures conditions et que le refinancement de la dette en découlant puisse notamment être mis en œuvre auprès de la Banque centrale européenne.

Celle-ci, ne l’oublions pas, a mis en œuvre, depuis plusieurs années, un dispositif de création monétaire appelé quantitative easing, qui a pourvu les acteurs bancaires et financiers de rien moins que 2 486 milliards d’euros, soit bien plus, pour ne donner qu’un exemple, que la dette publique de notre pays, tous émetteurs confondus ! Cette opération s’est soldée, entre autres, pour la BCE, par l’acquisition, sur le second marché, de titres de créances publiques et privées.

Il n’est même pas interdit de penser que les opérations de la Banque de Francfort n’aient amené à acquérir des titres de dette publique française, de celle d’EDF ou encore de la SNCF, en la rendant de fait plus « soutenable ». Soyons précis !

La BCE se tient aujourd’hui sur un taux directeur fixé à zéro, prend en charge les disponibilités bancaires avec un taux négatif de trente à quarante points de base, et est en situation de pouvoir travailler avec la Caisse des dépôts et consignations. Elle pourrait d’ailleurs, pour le coup, déployer une action plus large sur l’ensemble des opérateurs du secteur ferroviaire en Europe.

Voici exposées un certain nombre de raisons qui font que nous sommes en désaccord, madame la ministre, avec ce que vous proposez dans votre amendement et, en même temps, nous ne sommes pas seulement contre votre réforme, nous sommes pour une autre construction.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je rejoins mes collègues sur la péréquation dont il a été question. En effet, cette règle d’or est assez perverse. Pour financer les lignes régionales, il va forcément falloir passer par les plans État-région, comme cela vient d’être dit.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Comme aujourd’hui !

M. Guillaume Gontard. Vous m’expliquerez comment on fera après !

En effet, l’État et la région vont intervenir, mais on sait d’ores et déjà que cela ne suffira pas et que l’application de la règle d’or interdira à SNCF Réseau de venir combler le manque. Le résultat, c’est que des régions sont en train de se tourner soit vers les métropoles soit vers les départements, lesquels n’ont plus la compétence « mobilité ». Comment les choses se passeront-elles par la suite ? Comment financera-t-on les lignes qui restent ? C’est vraiment une question que je pose !

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je tiens à le redire, le désendettement est possible. Il est lié à l’amélioration de la situation du déficit public. Il est important, dans ce moment précis du débat, de le rappeler.

Je tiens aussi à saluer les propos de M. le rapporteur sur l’origine de la dette, car je les partage totalement.

J’ai plusieurs questions à poser. Tout d’abord, vous améliorez la règle d’or mise en place en 2014. Elle paraît tellement stricte – et cela s’impose ! – que je me demande si elle permettra les nouveaux développements prévus sans passer par des cofinancements. Et si cofinancements il y a – je rejoins ici tous les précédents intervenants –, qu’en sera-t-il des régions ou des collectivités qui n’ont pas la possibilité de participer ?

J’en viens à une autre question : 35 milliards d’euros, c’est une somme impressionnante, mais je ne me laisse pas impressionner par les chiffres et je réclame des précisions ! Qu’en est-il de la trajectoire financière de SNCF Mobilités, qui n’est pas allégée ?

Les 35 milliards concernent SNCF Réseau. Qu’en est-il de sa future trajectoire financière ? Nous demandons des engagements précis à ce niveau. Puisqu’on parle de soutenabilité de la dette, j’ai besoin de comprendre la démonstration arithmétique au terme de laquelle cette reprise permettra à SNCF Réseau d’effectuer l’ensemble de ses missions.

Qu’en est-il de ce qu’on a appelé la « dette grise » ? Il existe des capitaux propres négatifs à SNCF Réseau. Pour permettre la création de certaines lignes TGV, on a surestimé leur fréquentation. On sait que les recettes ne suivront pas. D’ailleurs, votre proposition d’amélioration de la règle d’or tient compte de ces risques pour des projets futurs.

Et puis, dernière question, pourquoi ces deux dates de 2020 et de 2022 ? D’ici là, en théorie, la dette de SNCF Réseau va encore augmenter !

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Vendredi dernier, le Premier ministre s’est engagé, à l’horizon de 2022, à reprendre 35 milliards d’euros de la dette du système ferroviaire de SNCF Réseau. Or la dette, selon la trajectoire financière établie dans le contrat de performance signée avec l’État, sera à un niveau de près de 10 milliards d’euros supplémentaires. Il restera donc à charge pour l’entreprise non pas 15 milliards d’euros, mais près de 25 milliards d’euros. Cela, si j’ose dire, relève d’un autre débat…

Le pendant de cette annonce, c’est cet amendement qui modifie la fameuse règle d’or décidée en 2014 par un décret paru en mars 2017 qui conditionnait les possibilités d’investissement à un ratio entre l’endettement net de SNCF Réseau et sa marge opérationnelle. Ce nouvel amendement prévoit de limiter davantage les capacités d’investissement en se fondant sur la couverture a minima du coût moyen pondéré du capital – en clair, du taux de profitabilité de l’investissement : un euro investi doit rapporter au moins un euro.

C’est la confirmation de la mise à mort des lignes ferroviaires de proximité de nos territoires : on renvoie leur financement aux seules collectivités territoriales, qui sont déjà, vous le savez, mes chers collègues, financièrement exsangues.

On est donc loin des valeurs de service public, d’aménagement, d’égalité de traitement, et de développement économique ; on est loin aussi de la réponse à apporter aux besoins de transport des citoyens et de la Nation.

Au-delà de ce point essentiel, l’amendement du Gouvernement est particulièrement flou, puisque son dispositif renvoie à des éléments tels que les futurs statuts de SNCF Réseau, statuts qui, madame la ministre, nous sont inconnus aujourd’hui.

Nous proposons, pour notre part, une autre stratégie pour SNCF Réseau. En effet, son désendettement ne créera pas d’appel d’air pour financer la nécessaire rénovation et régénération des lignes. Comme nous ne faisons pas que nous opposer à votre texte, madame la ministre, mais que nous formulons des propositions, nous vous offrons une autre voie, qui est tout simplement la voie du service public !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je veux dire quelques mots sur le sujet de la dette, qui est évidemment majeur. Il a été rapidement abordé tout à l’heure, mais je n’avais pas eu alors l’occasion de m’exprimer.

D’abord, je répondrai à Ronan Dantec et aux autres orateurs qui semblent considérer que c’est à SNCF Réseau de prendre en charge l’aménagement du territoire. Non ! C’est à l’État de le faire. L’existence, pendant des décennies, de ce type de confusion explique en grande partie la dette de SNCF Réseau. Plusieurs d’entre vous, mes chers collègues, ont souligné que les cheminots ne sont pas responsables de la dette de SNCF Réseau : il est vrai que la principale responsabilité pèse sur les gouvernements successifs qui ont laissé à SNCF Réseau ou, auparavant, à Réseau ferré de France le soin de prendre en charge des missions d’aménagement du territoire, ce qui n’était pas leur rôle.

Sur la question de la dette, je voudrais à mon tour saluer l’effort fait par le Gouvernement : 35 milliards d’euros de dette reprise, ce n’est pas rien ! Je regrette d’ailleurs qu’on ne puisse inscrire cette reprise dans le marbre de ce projet de loi pour que la décision soit bien actée. Si nous n’avions pas encouru le risque de nous voir opposer l’irrecevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution, nous aurions déposé des amendements en ce sens. Du moins pouvons-nous adopter cet amendement du Gouvernement visant à renforcer la règle d’or.

Je voudrais, avant de dire un mot sur cet amendement, rappeler à nos collègues socialistes qu’on aurait aimé que le précédent gouvernement l’ait fait.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. M. Bérit-Débat expliquait tout à l’heure que c’était grâce à la présidence de François Hollande que l’actuel gouvernement pouvait aujourd’hui reprendre la dette. Il y a quand même là de quoi sourire ! En effet, s’il y a un sujet sur lequel les gouvernements du précédent quinquennat ont été particulièrement irresponsables et coupables, c’est bien celui de la SNCF ! (MM. Daniel Chasseing, Jean-François Husson et Jean-François Longeot applaudissent.)

Ils ont obligé la SNCF à enterrer la réforme sociale en lui promettant, en guise de compensation, de reprendre la dette. Or, trois mois plus tard, le Premier ministre Manuel Valls a annoncé que, finalement, elle ne serait pas reprise ! Cette attitude a vraiment été très coupable, pour ne pas dire plus, vis-à-vis de la SNCF.

Dès lors, il serait bon, à tout le moins, de ne pas prétendre que c’est grâce à ces gouvernements qu’on peut aujourd’hui reprendre la dette ; c’est quelqu’un qui ne fait pas partie de la majorité présidentielle qui vous le dit !

M. Patrice Joly. C’est parce que le déficit est passé de 5 % à 3 % du PIB qu’on peut le faire aujourd’hui !

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je voudrais à présent revenir à l’objet central de cet amendement.

Il est très bon de renforcer la règle d’or et, encore une fois, j’y souscris pleinement. Simplement, il ne faudrait pas, madame la ministre, qu’on y déroge à peine ce dispositif voté. En effet, je tiens à rappeler certains événements : alors que la règle d’or avait été inscrite dans la loi portant réforme ferroviaire de 2014 et que la loi Macron avait fixé le principe d’un coefficient à respecter, il a néanmoins fallu plus de deux ans pour que le décret d’application soit pris. En outre, avant même qu’il soit pris, on nous faisait déjà voter – Dieu sait que, à ce banc, Louis Nègre et moi en avons été marris – une loi qui, pour financer le Charles-de-Gaulle Express, dérogeait à cette règle avant même qu’elle ne soit appliquée.

C’est pourquoi, oui, il faut une règle d’or, oui, il faut que nous la votions, mais il faut aussi que le Gouvernement mette ensuite tout en œuvre pour qu’elle soit respectée et appliquée pleinement. En effet, c’est très bien de reprendre la dette, mais il faut surtout éviter qu’elle ne se reconstitue, sans quoi, dans dix ans, on en sera au même point. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Personne n’a jamais dit que les cheminots étaient responsables de la dette. Je ne comprends pas d’où vient cette polémique. Personne n’a jamais dit cela !

Mme Éliane Assassi. Personne n’a dit le contraire !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Il ne m’a pas échappé qu’un quart de l’accroissement de la dette est lié aux frais financiers de son service. C’est pourquoi je comprends mal pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, au travers de votre amendement, vous vous opposez à la reprise par l’État de 35 milliards d’euros de cette dette.

Mme Éliane Assassi. Parlez plutôt de votre amendement !

Mme Élisabeth Borne, ministre. J’ai bien entendu vos exposés sur la complexité des produits financiers en Europe. Pour ma part, j’en retiens cela : finalement, vous ne souhaitez pas avoir de débat, et vous êtes incapables d’admettre qu’il y a au moins un point sur lequel nous pouvons être d’accord, à savoir la volonté du Gouvernement de soulager le système ferroviaire d’une partie très substantielle de sa dette pour lui donner la capacité d’investir davantage et de se développer. Même sur ce point-là, vous ne pouvez pas être d’accord avec nous !

M. Fabien Gay. Personne n’a dit cela !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Votre amendement vise à refinancer la dette de SNCF Réseau au sein même de cet établissement et est donc contraire à la volonté du Gouvernement…

Mme Éliane Assassi. Vous ne nous avez pas écoutés !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je lis votre amendement, madame Assassi : vous y proposez des refinancements compliqués de la dette de SNCF Réseau au sein de SNCF Réseau. Vous êtes donc opposée à la reprise de la dette par l’État, reprise qui vise pourtant à donner des capacités financières au secteur ferroviaire. Je m’en étonne. Décidément, même sur ce sujet-là, il vous est impossible d’être d’accord avec le Gouvernement !

S’agissant de la règle d’or et de son application projet par projet, je voudrais répondre à M. Jacquin que le principe qui s’appliquera pour les projets de développement est strictement le même que celui qui a été inscrit dans la réforme de 2014. Vous savez qu’on constate en général que les péages futurs permettent de financer 20 % à 30 % de ces projets. Il n’y a donc pas à redistribuer les recettes ailleurs, et c’est bien à l’État et aux collectivités locales de les financer. Cela peut vous contrarier, vous pouvez toujours continuer d’affirmer que c’est à la dette de financer ces nouveaux projets, et de considérer qu’assurer le service public signifie créer de la dette, mais ce n’est pas la conception que s’en fait le Gouvernement !

Oui, monsieur Jacquin, un nouveau contrat sera conclu entre l’État et SNCF Réseau ; il éclairera une trajectoire financière permettant de confirmer que le système ferroviaire est remis durablement à l’équilibre et qu’il n’aura plus à s’endetter pour financer ses investissements, et ce durablement.

M. Pierre Laurent. Mais qui financera la différence ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Vous voyez que la Nation en prend une part importante. Nous parlons, me semble-t-il, d’un allégement de l’ordre de 1,2 milliard d’euros par an. Cela signifie, comme il n’y a pas de finances magiques, que c’est nous tous qui fournirons chaque année cette somme.

Vous comprendrez donc, mesdames, messieurs les sénateurs, pourquoi nous attendons de la SNCF qu’elle participe elle aussi au redressement de l’équilibre financier du secteur ferroviaire : nous comptons sur une amélioration de la performance et une réduction de l’écart de compétitivité entre la SNCF et ses homologues. Le Premier ministre a mentionné cet écart, qui est aujourd’hui de 30 %, et a fixé comme objectif qu’il soit réduit des deux tiers à l’horizon de 2026.

Selon moi, alors que la Nation tout entière s’engage au bénéfice du secteur ferroviaire, il est normal d’attendre de la SNCF qu’elle participe elle aussi à cet effort de redressement de l’équilibre économique du secteur ferroviaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 254.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er A, et l’amendement n° 131 rectifié n’a plus d’objet.

Article additionnel après l'article 1er A - Amendement n° 131 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er C (nouveau)

Article 1er B (nouveau)

La SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités peuvent procéder jusqu’au 31 décembre 2019 à des recrutements de personnels soumis au statut mentionné à l’article L. 2101-2 du code des transports.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.

M. Guillaume Gontard. Aujourd’hui, le statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel régit les conditions d’embauche, de rémunération et de déroulement des carrières, les sanctions et garanties disciplinaires, la mobilité géographique et fonctionnelle inhérente à l’entreprise nationale, les congés, les conditions de cessation de fonction, l’assurance maladie et le droit syndical.

Le statut donne des droits, mais il confère aussi des devoirs : la période d’essai est d’un an, et même de trois ans pour les cadres ; le travail du dimanche et des jours fériés est rémunéré en dessous du code du travail. Ajoutons le travail de nuit et la mobilité induite. Aujourd’hui, la grille de rémunération place environ 3 000 cheminots à un niveau inférieur au SMIC !

Les partisans de la fin du statut ont maintes fois asséné que les cheminots « coûtent » 30 % de plus que les salariés de la concurrence. Cette affirmation n’est absolument pas démontrée.

Le statut s’inscrit dans la garantie de l’adaptabilité et de la continuité du service public. Les rythmes de travail et les horaires auxquels les cheminots sont soumis sont atypiques ; en outre, ils ont l’obligation de faire fonctionner la SNCF toute l’année.

Si la sécurité ferroviaire et la continuité du service sont les fondements du statut des cheminots de la SNCF, il faut y ajouter un principe de neutralité.

En effet, les cheminots ne travaillent pas, en principe, pour répondre à des exigences patronales ou financières ; ils s’engagent pour placer l’entreprise publique au service de la Nation et des citoyens. Cela suppose que l’agent de la SNCF reste en responsabilité et ne soit pas soumis à des aléas relevant de l’arbitraire technocratique ou financier.

Souhaitez-vous vraiment, madame la ministre, mes chers collègues, mettre un terme à cette logique de fonctionnement et d’investissement professionnel ?

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l’article.

Mme Cécile Cukierman. Cet article, issu d’un amendement déposé en commission par le Gouvernement, constitue une véritable provocation. Il s’agit en effet, comme annoncé par voie de presse, d’en finir avec le statut de cheminot.

Ainsi aura vécu, si l’on peut dire, ce statut, dont l’extinction au fil du temps est attendue comme une contribution de la SNCF à son « effort de redressement » et une contrepartie à la reprise de la dette ferroviaire annoncée par le Premier ministre lui-même.

L’économie réalisable s’établirait entre 10 et 15 millions d’euros par an : sur la durée moyenne de vie de la dette de SNCF Réseau, cela représenterait tout au plus 200 millions d’euros, soit, en treize ans, 0,5 % seulement de l’actuelle dette d’infrastructure, c’est dire !

Le premier statut des cheminots fut mis en place en 1912 sur le réseau de l’État et fut généralisé en 1920 à l’ensemble des compagnies. Il est donc bien antérieur à la création de la SNCF. Il faut le distinguer du régime spécial des retraites des cheminots, dont l’origine remonte à 1909, qui ne lui est pas directement lié, bien qu’il lui soit souvent assimilé.

Le statut s’apparente davantage, dans sa forme, à une convention collective dont la spécificité est de relever d’un acte réglementaire gouvernemental.

Ces règles ont été maintenues lors de la nationalisation de la SNCF. Par la suite, la loi du 30 décembre 1982, dite LOTI, qui a transformé la SNCF en EPIC, a confirmé ces dispositions.

Les cheminots, qui relevaient alors de différentes compagnies privées, se sont mobilisés afin d’établir une solidarité de droits communs exprimée dans de nombreuses luttes de grande ampleur en 1910 et 1920. Cette impulsion a rendu nécessaire un statut national, qui répondait également au besoin d’établir des règles unifiées dans un secteur essentiel à la marche globale de l’économie du pays et à son aménagement territorial. Cela a conduit l’État à légiférer pour créer un statut unique à l’ensemble des travailleurs du ferroviaire.

Il a ainsi imposé aux différentes compagnies d’employer un nombre d’agents suffisant et de les fidéliser pour permettre la transmission des savoirs et savoir-faire professionnels. Chaque cheminot doit ainsi avoir un haut niveau de formation, au regard des spécificités fortes des différents métiers, et l’organisation du travail doit être encadrée afin de garantir la sécurité des circulations, et donc des passagers, pour une durée de travail équivalente à celle des autres salariés.

La réglementation obéit à des règles spécifiques qui permettent d’assurer la continuité du service public 365 jours par an et 24 heures sur 24.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, c’est cela que vous remettez en cause aujourd’hui !

Monsieur le président, il me restait cinq secondes. De toute façon, on peut toujours reprendre la parole ! (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Fouché. On n’est pas sur un marché !

M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, sur l’article.

M. Patrice Joly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je m’exprime en mon nom personnel et au nom de notre collègue Roland Courteau, qui ne peut être présent à cet instant et qui souhaitait lui aussi vous faire part de son opinion sur la proposition qui nous est faite.

Pourquoi le Gouvernement veut-il imposer à la SNCF cette réforme doctrinaire qui met à terre tant le statut de l’entreprise que celui des cheminots ?

Pourquoi diable ce gouvernement veut-il être celui qui aura eu la tête du mythique statut des cheminots et du service public à la française ?

On nous dit que c’est l’Union européenne qui le veut. Une fois encore, elle a bon dos ! Ni la réforme du statut des cheminots ni la transformation de la SNCF en société anonyme ne sont nécessaires. Dès lors, et comme cela a été dit, j’aurais tendance à contester le texte, le contexte et, surtout, le prétexte ! (Sourires.)

Que des évolutions soient nécessaires, cela peut s’entendre, mais elles ne doivent pas être conduites n’importe comment et à n’importe quel prix. Or le prix, à ce jour, est énorme !

On peut, comme l’a dit mon collègue Olivier Jacquin, dynamiser la SNCF sans la dynamiter ! (Exclamations amusées sur des travées du groupe Les Républicains.)

Ce que l’on peut reprocher aux auteurs de ce texte, c’est de vouloir tirer argument de l’ouverture à la concurrence pour modifier le statut, alors qu’il n’y a aucun lien à établir. Vous ne pouvez pas prétendre que le statut des cheminots est à l’origine des difficultés financières de la SNCF. Nous sommes nombreux ici à le contester.

Saluons plutôt les cheminots, qui servent la SNCF et font que les Français aiment le train ! Ces hommes du rail ne sont pas des privilégiés, mais l’avant-garde d’un mouvement de préservation des biens communs et de l’intérêt général.

Dois-je rappeler, par ailleurs, que le gouvernement précédent s’était engagé, en 2014, à construire un cadre social commun et homogène à l’ensemble du secteur ferroviaire, avec maintien du statut des cheminots ?

M. Jean-François Husson. Que ne l’a-t-il fait ?...

M. Patrice Joly. Oui, nous contestons et le texte, et le prétexte ; l’Union européenne ne demande pas la transformation de la SNCF en société anonyme, pas plus qu’elle ne demande la fin du statut des cheminots.

En conclusion, ni les avancées offertes aux cheminots ni la création d’une société anonyme, dont on peut craindre qu’à terme elle ouvre la porte…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Patrice Joly. … à une privatisation, ne nous rassurent quant à la défense d’un service public de qualité et à la renaissance de la SNCF, bien au contraire !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l’article.

M. Ronan Dantec. Tout le monde a compris qu’il y avait une petite contradiction. D’une part, on nous répète depuis le début de la soirée, sur l’air des lampions, que les cheminots ne sont pas responsables de la dette et, d’autre part, on met fin à leur statut ! On a un peu de mal à expliquer le lien entre les deux !

C’est vraiment un débat de fond sur l’avenir de la société française qui se joue. Pour ma part, je considère qu’il est important, dans une société, d’avoir des statuts publics, que le statut de cheminot fait partie de notre imaginaire collectif et que c’est un bien commun de la société française. Cela ne signifie pas qu’il n’aurait pas dû y avoir une négociation, qu’on pourrait qualifier de virile, sur les difficultés qui, de fait, existent dans ce statut : considérer que le statut pourrait continuer tel quel ne serait pas non plus tout à fait lucide.

Mais pourquoi, madame la ministre, ne pas avoir lancé une négociation, même assez forte, dans le cadre du statut, sur la mobilité et les métiers ? On connaît très bien les points difficiles du statut, et ce qui aurait permis, à un niveau de curseur qu’on ignore, que la grève se termine. En tant que fils d’un ancien syndicaliste, je sais qu’il y a toujours, dans une négociation, des gagnants, des perdants et un curseur. Or, en l’absence d’une telle négociation, cela fait défaut dans la situation actuelle.

Je regrette donc, pour ma part, que cela n’ait pas été tenté. Et puis, si cela n’avait pas été possible, le Gouvernement en aurait pris la mesure et tenté une négociation au sein du statut. Vous connaissez ma position, madame la ministre.

Je veux aussi vous avouer que je n’ai pas été totalement satisfait de votre réponse précédente. Prenons le cas de l’évolution de La Poste. Aujourd’hui, ce service public demande à un certain nombre de communes un financement pour y rester présent. Pour le fonctionnement de certains bureaux de poste, La Poste, aujourd’hui, demande aux communes un chèque. Certaines évolutions amènent aussi à faire contribuer les collectivités territoriales de manière inégalitaire ; ce problème se pose effectivement dans le débat, mais c’est aussi notre responsabilité, notamment à la commission de l’aménagement du territoire, de trouver demain les réponses. On voit bien que les grandes évolutions des services publics sont aujourd’hui, généralement, inégalitaires pour les territoires.

À ce stade, madame la ministre, vous ne nous expliquez pas comment se fera la péréquation ;…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Ronan Dantec. … elle aurait pu se faire dans le service public, pour préserver l’égalité.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, on entame notre deuxième débat, et une deuxième question me taraude. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je ne comprends pas pourquoi vous voulez casser le statut des cheminots. Vous avez défendu pendant un moment l’idée que les cheminots étaient des privilégiés, et que leur statut coûtait cher. On a d’abord parlé de 100 à 150 millions d’euros ; finalement, on retombe à 10 ou 15 millions d’euros.

Pour ma part, je voudrais juste rappeler quelques chiffres concernant le statut de ces « privilégiés ». Le salaire d’embauche, pour un cheminot, s’élève à 1 456 euros bruts. Je rappelle que le SMIC est à 1498 euros. En fait, c’est une petite prime, d’une trentaine d’euros, qui fait passer leur salaire juste au-dessus du SMIC. La prime de nuit, de 21 heures à une heure du matin et de six heures à neuf heures du matin, est fixée à 20 centimes par heure ; celle de milieu de nuit, entre une heure et six heures du matin, à 2,70 euros par heure. Quant au travail du dimanche – tenez-vous bien ! –, la prime est de 4,50 euros par heure.

Alors, un problème se posera, madame la ministre, si vous cassez le statut des cheminots, et M. Pepy en a fait mention, il n’y a pas longtemps, à la radio : pour une fois, je suis d’accord avec lui. Il a expliqué que casser le statut des cheminots coûterait plus cher que le maintenir. En effet, personne ne voudra travailler le dimanche pour 4,50 euros par heure : ce ne serait de toute façon pas permis ! Pour assurer les services publics, il faudra payer les nuits, les dimanches et les jours fériés au prix du marché, et les contrats de droit privé vous coûteront plus cher qu’aujourd’hui le statut.

Dès lors, madame la ministre, puisque vous savez que l’argument économique ne tient pas la route, je me dis que c’est autre chose. Vous avez une vision dogmatique des choses, je vous l’ai déjà dit : vous voulez le scalp des cheminots. En réalité, derrière tout ça, vous voulez vous attaquer à leurs retraites. En effet, aujourd’hui, le statut va de pair avec la retraite, puisque c’est une caisse de prévoyance. Or vous voulez demain remettre toutes les retraites de ce pays…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Fabien Gay. J’ai encore quatre secondes, monsieur le président !

Vous voulez remettre, madame la ministre, toutes les retraites de ce pays au plus bas niveau !

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.

M. Olivier Jacquin. Nous avons voté le quatrième paquet ferroviaire et lancé les réformes nécessaires à l’ouverture à la concurrence. Nous sommes favorables à une ouverture maîtrisée à la concurrence et à une maîtrise publique des transports, ce qui ne nécessite pas forcément que la machine soit conduite par un opérateur agent de l’État ou d’une collectivité.

Si le statut était mirifique, SNCF Réseau et SNCF Mobilités n’auraient pas actuellement des difficultés de recrutement. Il faut savoir que, comme cela a été rappelé, les salaires de début de carrière sont tellement faibles que, pour certains métiers de la SNCF, on a aujourd’hui du mal à recruter, ce qui pose de vraies questions sur le statut.

Des évolutions sont certes nécessaires, mais vous imaginez bien que nous ne sommes pas favorables au dumping social ou à la casse d’un secteur complet, comme cela a été le cas pour le transport routier avec les dispositifs de cabotage, doublés par le recours aux travailleurs détachés.

Nous sommes donc favorables à une évolution,…

M. Olivier Jacquin. … mais à la condition qu’elle soit négociée, et ce dans les conditions qui ont présidé à la rédaction de la convention collective ferrée nationale. Ces négociations ont été engagées il y a plusieurs années, et la moitié de la convention est signée.

Nous sommes dans une situation de conflit grave, et il ne faut pas s’en étonner. Imaginez-vous vivre, dans vos professions et métiers respectifs, le climat d’incertitude dans lequel on a placé les cheminots ? Je suis agriculteur. Imaginez que, demain, la coopérative à laquelle je livre des céréales – pas assez cher ! – m’annonce qu’on va modifier le cadre de notre relation, sans me dire comment, et tout en m’ordonnant de continuer à livrer mes céréales sans me préoccuper de savoir comment je serai payé plus tard. Moi, je ne marcherais pas !

M. Jean-François Husson. Mais c’est ainsi que les choses se passent !

M. Olivier Jacquin. Pour un contrat de travail, c’est la même chose ! Si on vous dit qu’on va redéfinir vos conditions de travail, sans vous dire précisément comment, cela ne marche pas !

Mme Élisabeth Borne, ministre. On n’a pas dit cela !

M. Olivier Jacquin. Notre proposition constructive vous sera présentée dans quelques minutes : nous entendons conditionner la fin du recrutement au statut à la signature effective d’une convention collective ferroviaire négociée. Nous proposerons un certain nombre d’amendements de repli. Réfléchissez : c’est pragmatique, j’en ferai la démonstration.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 37 est présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 240 est présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 37.

Mme Laurence Cohen. Comme mes collègues ont déjà exprimé le point de vue de notre groupe – nous demandons la suppression de cet article –, je me contenterai de faire quelques remarques.

Pour ma part, je voudrais revenir, madame la ministre, sur la raison qui vous pousse à casser le statut des cheminots. Mon collègue Fabien Gay l’a bien expliqué : économiquement, cela ne tient pas la route ! L’économie ne serait que de 10 à 15 millions d’euros par an : c’est 14 à 21 fois moins que le budget de communication de la SNCF. Vous voyez donc bien, c’est clair et net !

En outre, il n’y a pas que M. Pepy qui ait dit que la suppression du statut risquait d’être beaucoup plus coûteuse que son maintien. Je vous invite à consulter sur ce point un article – nos lectures, vous le savez, sont plurielles – du magazine Capital. (Exclamations amusées sur des travées du groupe Les Républicains.) Oui, mes chers collègues, je suis pour ma part ouverte à des lectures diverses, et j’espère que vous lisez lHumanité et lHumanité Dimanche, parce que c’est aussi très instructif !

Le statut représente aussi une protection contre la précarisation et la mise en concurrence des salariés. Je dois dire que tous les droits spécifiques qui ont été conquis par les cheminotes et les cheminots sont financés par les cheminots et les cheminotes eux-mêmes. Il n’y a donc pas, là non plus, matière à casser leur statut.

Enfin, je ne sais pas ce qu’on leur reproche : ne seraient-ils pas suffisamment opérationnels dans toutes les activités qu’ils mènent pour l’entretien des voies et la conduite des trains ? Quand même, leurs conditions de travail se sont considérablement aggravées…

M. Gérard Cornu, rapporteur. Par rapport à ceux qui mettaient du charbon dans les locomotives ?

Mme Laurence Cohen. … puisque, en dix ans, leur productivité a augmenté de 40 %.

Voilà beaucoup de raisons qui justifient de ne pas toucher au statut des cheminotes et des cheminots. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 240.

M. Olivier Jacquin. Cet article, issu de l’adoption d’un amendement du Gouvernement par la commission du développement durable, met fin au recrutement sous statut SNCF à partir du 1er janvier 2020.

On a entendu beaucoup de choses sur le statut des agents. L’étude d’impact estime qu’il occasionnerait des coûts élevés que n’auraient pas à supporter des entreprises concurrentes qui recruteraient des agents hors statut. Je l’ai déjà dit, nous souhaitons éviter le dumping social.

Je tiens à signaler l’existence d’une étude extrêmement intéressante, publiée par l’UNSA, qui donne des précisions utiles sur le coût effectif du statut des cheminots. Ce statut est principalement une dérogation au droit du travail. Si l’on payait les agents qui assurent des horaires de nuit ou de week-end sous le régime du droit privé, la facture serait beaucoup plus lourde que sous le régime actuel.

On a entendu beaucoup de chiffres quant au coût additionnel de ce statut, mais ils sont assez contradictoires. On semble s’accorder actuellement sur un surcoût de 10 millions d’euros par an, somme qui est à relativiser.

C’est pourquoi, au vu du contexte dans lequel s’est engagée cette réforme et des propos tenus, notamment, par le Premier ministre au lendemain de la remise du rapport de M. Spinetta, dans lesquels il interrogeait cette profession avec une rudesse qui dépassait les limites, on peut comprendre que cette profession a réagi et est actuellement dans la rue.

Nous nous opposons donc à la fin du recrutement au statut SNCF à la date du 31 décembre 2019. Rien dans les textes européens n’exige cette suppression du statut.

Je conclurai en évoquant les propos qu’a tenus, sur France Inter, ce samedi, Mme Guillouard, PDG de la RATP. Certes, la RATP n’est pas la SNCF, mais c’est quand même une entreprise qui a un statut tout à fait particulier. Or, selon Mme Guillouard, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, il n’est pas nécessaire de réviser le statut particulier du personnel de la RATP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il ne vous étonnera pas, mes chers collègues, que j’émette un avis défavorable sur ces deux amendements.

Je voudrais rétablir quelques vérités. La logique des choses, c’est la suppression du recrutement au statut, mais le statut ne va pas disparaître.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il faut être très clair là-dessus : tous les cheminots qui relèvent actuellement du statut et qui resteront agents de la SNCF continueront d’en bénéficier. Cet article fixe simplement au 1er janvier 2020 la fin du recrutement au statut. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il est important d’apporter ces précisions, parce qu’on a parfois l’impression, à entendre certains propos, que c’est la fin du statut et que plus personne n’aura de statut, même ceux qui travaillent déjà à la SNCF. Ceux qui ont déjà été embauchés par la SNCF resteront bien soumis à ce statut !

On nous demande souvent pour quelles raisons nous voulons la fin du recrutement au statut…

M. Fabien Gay. C’est la vraie question !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Parfois, ce sont les Français qui la demandent. Si j’osais la comparaison, je vous dirais que c’est le même raisonnement que pour les parlementaires…

M. Pierre Laurent. On ne peut pas mettre les parlementaires au niveau des cheminots !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Aujourd’hui, les Français, quel que soit leur statut, ne supportent plus les avantages, réels ou supposés, des uns et des autres. Les cheminots et les parlementaires sont en quelque sorte dans le même sac. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Que vous le vouliez ou non, c’est la perception des Français ! Ils pensent que les parlementaires sont des privilégiés et que les cheminots le sont tout autant.

M. Pierre Laurent. Parce que vous leur mentez sur le statut des cheminots !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Laissez-moi finir ! Vous venez d’arriver dans le débat, mais celui-ci a commencé hier soir et c’est un débat de très bonne qualité. Ce n’est donc pas la peine de nous interrompre à tout bout de champ. Vous interviendrez lorsque le président vous donnera la parole. Essayez d’être correct et de m’écouter, à défaut de m’entendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.) C’est la moindre des choses.

Je reprends. C’est la perception des Français. Que voulez-vous que l’on y fasse ? C’est ainsi.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Ces amendements identiques visent à supprimer l’arrêt du recrutement au statut.

Monsieur Gay, vous n’êtes pas obligé de m’écouter, mais, pour la clarté des débats, je vous remercie de ne pas me prêter des propos que je n’ai pas tenus. Je n’ai jamais dit que les cheminots étaient des privilégiés.

De la même façon, monsieur Jacquin, il faut éviter de créer de la confusion. Or vos propos laissaient entendre que nous étions en train de remettre en cause le statut des cheminots qui travaillent aujourd’hui à la SNCF. Il n’en est pas question : le Gouvernement a affirmé très clairement qu’il respecterait le contrat moral entre la SNCF et les cheminots.

Il s’agit en fait d’un principe d’équité. Jusqu’à présent, la SNCF était en situation de monopole et, dans ce cadre, le statut visait à prendre en compte les spécificités et les contraintes du métier.

Vous pouvez être contre, mais vous allez bientôt voter l’ouverture à la concurrence du secteur. Cela signifie que, dans ce secteur, se trouveront d’autres entreprises qui auront des salariés exerçant les mêmes métiers et ayant par conséquent les mêmes contraintes. Nous avons déjà connu cette situation ailleurs : à La Poste, on a arrêté de recruter des fonctionnaires de façon à mettre en place un cadre équitable, à savoir une convention collective, à l’échelon de la branche.

Le Gouvernement a pour objectif que soit mise en place, avant la fin de l’année 2019, une convention collective de haut niveau qui s’applique de façon équitable à l’ensemble des salariés de la branche. Par conséquent, il émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. Le RDSE est un groupe divers et hétérogène – mais pas hétéroclite ! (Sourires) –, où s’exerce la liberté de vote. Ronan Dantec a donc donné sa position, qui est également celle de quelques autres, mais, dans l’ensemble, le groupe votera contre ces amendements identiques de suppression. La fin du statut interviendra le 1er janvier 2020, ceux qui en bénéficient déjà le conserveront.

Nous avons assisté à l’évolution de La Poste et celle-ci a, je crois, réussi sa mutation. Il est vrai que le statut a changé, mais il me semble que, dans l’ensemble, ceux qui y travaillent sont satisfaits. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, vous avez fait un parallèle avec les fonctionnaires. En effet, c’est le cœur du sujet. En aucun cas, le statut de la fonction publique n’est remis en question, mais nous constatons partout, dans tous les ministères, qu’aujourd’hui les agents qui travaillent dans le service public et qui sont embauchés ne le sont plus sous statut de la fonction publique. On en arrive à un niveau de précarisation que même le privé ne connaît pas !

S’agissant de la SNCF, vous l’avez dit, vous ne voulez pas toucher au statut, mais vous voulez pouvoir embaucher demain des agents avec les mêmes libertés que le secteur privé, c’est-à-dire avec une précarisation maximale. Le voilà, votre projet ! Dites-le, ce serait plus honnête.

Aujourd’hui, la fonction publique de la recherche et de l’enseignement supérieur compte 35 % de précaires. Je puis vous assurer qu’avec un taux de précarisation aussi élevé les missions de service public ne sont pas réalisées dans les mêmes conditions.

Soyez franche, madame la ministre, et dites-nous que, pour la SNCF, vous voulez les mêmes libertés, c’est-à-dire introduire une précarisation maximale. Voilà votre projet !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Plusieurs orateurs ont pris l’exemple de La Poste, notamment vous, madame la ministre.

À l’évidence, on ne vit pas sur la même planète ! Honnêtement, en votre âme et conscience, trouvez-vous vraiment que le service est mieux rendu aujourd’hui…

Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui !

Mme Laurence Cohen. … et que le courrier est mieux distribué ? (Oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Raymond Vall. Il n’y a plus de courrier !

Mme Laurence Cohen. Alors qu’avant, y compris en zone rurale, les factrices et facteurs jouaient un rôle social extrêmement important envers les personnes âgées ou les personnes éloignées, aujourd’hui, ce même service (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mes chers collègues, s’il faut se respecter, il faut le faire sur toutes les travées ! Pour ma part, je ne vous ai pas interrompus. Vous aurez la parole lorsque le président vous la donnera.

M. le président. Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Laurence Cohen. Aujourd’hui, lorsqu’une factrice ou un facteur assure ce rôle social auprès d’une personne âgée ou d’une personne éloignée en milieu rural, c’est facturé !

Si, pour vous, le service public, c’est qu’une lettre mette plus de temps qu’avant, si vous trouvez cette situation très bien au point de vouloir la généraliser à tous les services publics, moi, madame la ministre, ce n’est pas pour cela que je me bats et ce n’est pas de cette société-là que je veux, pour moi, pour mes enfants et pour mes petits-enfants.

À l’évidence, nous n’avons pas le même projet de société, mais, surtout, nous ne vivons pas sur la même planète !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, sur la question du statut, vous parlez d’équité – vous le voyez, je vous écoute et j’entends vos arguments. (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Selon vous, et sans caricaturer vos propos, puisque le secteur va être ouvert à d’autres sociétés privées et que leurs salariés n’auront pas le statut, il y aurait une distorsion, ce qui serait anormal. C’est pourquoi vous voulez l’équité pour tous.

Moi aussi, je veux l’équité, mais je la veux par le haut ! Pourquoi ne pas imaginer un statut pour l’ensemble de ceux qui travaillent dans le transport ferroviaire,…

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cela s’appelle une convention collective !

M. Fabien Gay. … voire pour l’ensemble des salariés de ce pays ?

Toutes vos propositions visent systématiquement à tirer les droits sociaux vers le bas. Sur ce point, je rejoins l’analyse de ma collègue Laurence Cohen : ce sont deux visions de la société qui s’affrontent.

Vous voyez, madame la ministre, on vous écoute, on vous comprend, mais on ne partage pas. Votre vision de la société, c’est de tout précariser, de tout privatiser.

M. Frédéric Marchand. Il faut arrêter !

M. Fabien Gay. Il faut assumer, ce n’est pas grave !

Pour notre part, nous souhaitons des droits nouveaux pour les salariés.

Il aurait été intéressant que nous ayons un débat sur ce sujet : souhaitons-nous casser le statut pour tout le monde ou – et nous le pouvons – créer un statut pour l’ensemble des salariés qui travailleront dans les transports ?

Monsieur le rapporteur, le temps me manque, mais votre comparaison entre les parlementaires et les cheminots me laisse sans voix.

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas joli !

M. Fabien Gay. Je n’ai pas de mots. Ma mère a travaillé toute sa vie à l’usine, mon père aussi. Honnêtement, j’ai une meilleure vie qu’eux, comme j’ai une meilleure vie que les cheminots qui, aujourd’hui, font vivre le service public. Lorsque j’entends de tels propos, j’ai mal. On ne peut pas prendre cet argument et affirmer que les cheminots ont des privilèges réels ou supposés. Lesquels ? Il n’y en a pas ! Franchement, c’est un mauvais exemple.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Fabien Gay. Il me reste quatre secondes, monsieur le président ! C’est la deuxième fois que vous me reprenez sans raison.

Quoi qu’il en soit, j’en ai terminé !

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Avant de revenir sur la question du statut et de l’équité, je parlerai des problèmes de sécurité.

Tout le monde aime la SNCF et connaît ses commandements hiérarchiques. On comprend mieux, dès lors, que le statut est extrêmement important. Nous sommes un certain nombre ici à savoir qu’un jour un train n’est pas parti, parce que des cheminots avaient, à juste titre, pris la décision d’empêcher que celui-ci ne circule, leur expertise technique leur ayant permis de déceler un danger. Si, avec le statut actuel, une telle démarche ne peut pas provoquer un licenciement, ce n’est pas le cas avec un statut privé. Voilà la différence !

M. Pascal Savoldelli. Aujourd’hui, 70 % des Britanniques demandent la renationalisation de leur secteur ferroviaire. Ils ont eu assez d’accidents et de problèmes, sans parler du coût des transports.

Madame la ministre, je rejoins les propos de mon collègue Fabien Gay et vous fais une proposition qui va dans le même sens. Vous parlez d’équité : faites payer aux chauffeurs routiers autant de cotisations sociales qu’aux cheminots.

Dans le secteur du transport, il est très important de tirer l’équité vers le haut. Les camionneurs, qui font aussi face à la pénibilité et à des horaires extrêmement difficiles, doivent avoir un système social qui les protège. Mettez leurs cotisations sociales au même niveau : le suivi médical sera plus régulier, ils seront plus en sécurité et il y aura un peu moins d’accidents.

J’ai regardé les chiffres : les accidents corporels, qui impliquent beaucoup de poids lourds – même si ceux-ci n’en sont pas les seuls responsables – coûtent 37 milliards d’euros chaque année. On le voit bien, l’équité consiste à tirer vers le haut le statut de tous les salariés du transport, et non à les opposer ou à les diviser.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Monsieur le rapporteur, madame la ministre, j’ai bien compris que le statut était maintenu pour ceux qui en bénéficient actuellement. C’est un peu la moindre des choses ! Ils sont entrés dans cette profession avec la perspective que leur offrait ce statut. Changer les règles en cours de route serait terrible.

Madame la ministre, l’incertitude vient du fait que vous avez déclaré qu’à partir de décembre 2019 il n’y aurait plus de recrutement au statut. Or, selon le projet de loi que nous sommes en train de voter, les transferts de SNCF Mobilités à de nouveaux opérateurs pourraient avoir lieu au cours de cette période, alors que la convention collective ferrée nationale n’est pas négociée.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Non !

M. Olivier Jacquin. L’incertitude vient de là. J’aurais l’occasion de souligner, lors de l’examen des amendements suivants, qu’il y a certainement beaucoup de symboles dans cette affaire-là, puisque seules quelques centaines d’agents seront concernées par ces transferts dans les cinq années à venir.

Plus largement, nous sommes favorables à une convention collective des transports élargie. Pour ma part, je ne comprends pas pourquoi, quand je descends du train pour monter dans un tram, dans un FlixBus ou autre, les conditions sont si différentes.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Parce que ce sont des métiers différents !

M. Olivier Jacquin. Et je ne parle pas du statut d’autoentrepreneur de certains chauffeurs Uber.

Je ne voudrais pas qu’il arrive ce qui est arrivé aux camionneurs. Dans mon département, des entreprises vivaient du transport routier international. Malheureusement, comme dans toute la France, la plupart d’entre elles ont disparu en raison d’une concurrence sauvage, mondialisée, liée notamment au travail détaché et au cabotage. Nous sommes dans un secteur non délocalisable par définition et non soumis à la concurrence mondiale. Par conséquent, nous n’avons pas besoin de dumping social dans ce domaine.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je prends le train deux fois par semaine sur une ligne très dégradée – des améliorations sont prévues, Mme la ministre l’a évoqué –, la ligne POLT, Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, qui dessert vingt-cinq départements et irrigue tous les départements du Centre et de l’ancien Limousin, jusqu’au Lot et à Toulouse. Les cheminots que j’ai rencontrés m’ont indiqué que le fret de la SNCF avait beaucoup diminué, mais ce n’est pas de leur fait. Si la ligne va bientôt être obsolète, ce n’est pas de leur fait non plus, c’est parce que l’entreprise n’a pas réalisé les investissements nécessaires au moment voulu. Il est temps de le faire, sinon, ce sera catastrophique pour tous ces territoires et ces régions.

L’État investit 35 milliards d’euros dans le ferroviaire, c’est un engagement très fort de la Nation. On ne peut pas dire que les gouvernements précédents se soient précipités pour sauver la SNCF.

Ce projet de loi prévoit aussi des économies : 12 milliards d’euros devront être remboursés et, si j’ai bien compris, l’équilibre financier du système commencerait à être atteint en 2022, avec une diminution de la charge de la dette, laquelle atteint 1,5 milliard d’euros chaque année. D’autres dispositions sont prévues, comme la polyvalence, le statut, la productivité : il faut bien, après cet effort de l’État, que SNCF Réseau parvienne à l’équilibre.

Il nous faut être raisonnables et tenir compte de l’effort consenti par l’État et les employés. Madame la ministre, les employés qui cesseront d’être dans cette entreprise publique auront-ils un statut précaire ?

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Je formulerai deux remarques.

En premier lieu, maintenir le statut de cheminot pour ceux qui sont aujourd’hui dans l’entreprise, afin de faire en sorte qu’ils acceptent le changement de statut – en vérité, une dégradation – de ceux qui intégreront l’entreprise plus tard, est un argument qui touche à la dignité des cheminots. Les cheminots ne défendent pas individuellement leur seule situation sociale, ils ont une haute idée de leur entreprise : ils tiennent à son unité et à la solidarité du personnel, qui est un facteur de qualité du service. Ils ne veulent pas d’une entreprise où certains auront un statut ancien et d’autres un statut dégradé, car ce sera un facteur de désorganisation de l’entreprise et de désorganisation du secteur.

Lorsque 91 000 cheminots, à l’occasion d’une « vot’action », disent non, c’est bien parce qu’ils refusent cette dégradation. Vous n’attraperez pas les cheminots en utilisant cet argument, qui a d’ailleurs été utilisé dans d’autres entreprises publiques avec les résultats que l’on connaît en matière de précarisation de l’emploi.

En second lieu, dans votre logique, qui n’est pas la nôtre, on est obligé d’ouvrir à la concurrence et de nouvelles entreprises intégreront le secteur. Vous semblez dire que vous ne voulez pas toucher à la condition sociale des salariés du ferroviaire, mais vous pouviez tout à fait procéder autrement, en commençant non par la suppression du statut, mais par la négociation de la convention collective des salariés du ferroviaire.

Mme Fabienne Keller. C’est en cours !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Cela a déjà commencé !

M. Pierre Laurent. Cela aurait levé toute ambiguïté. Vous auriez pu, avant d’ouvrir à la concurrence, proposer d’aller au bout de cette négociation et décider une fois que celle-ci aurait été menée à son terme. Vous auriez pu dire : dans cette négociation, le Gouvernement souhaite que le statut négocié soit au minimum celui des cheminots actuels pour tirer tout le monde vers le haut. Vous auriez pu agir dans ce sens. Pourquoi ne pas l’avoir fait ?

Vous prétendez que personne n’a jamais dit que les cheminots étaient des privilégiés. Qui a ouvert le débat sur la réforme ferroviaire par la question du statut des cheminots, sinon, pendant plusieurs semaines, le Premier ministre et le Président de la République,…

M. Olivier Jacquin. Tout à fait !

M. Pierre Laurent. … provoquant la colère des cheminots et du pays ?

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Pierre Laurent. Vous pouvez régler le problème, mais, en vérité, vous ne le voulez pas !

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je rejoins ce qui vient d’être dit : on ne peut pas prendre comme argument le principe d’équité quand on s’apprête à mettre en place au sein d’une entreprise une situation où l’équité et l’égalité entre les salariés auront disparu, et ce pour de nombreuses années !

Dans les entreprises où cela a été mis en œuvre, gérer des personnels avec des statuts très différents est d’une très grande complexité. Cela a des incidences en termes d’efficacité de gestion, mais aussi en termes d’égalité des salariés, par exemple la manière dont ils se sentent les uns par rapport aux autres, en termes de droits, de salaires, etc.

Non seulement c’est inefficace en termes de gestion des ressources humaines, mais cela suscite de nombreuses difficultés entre les salariés. Ce qu’expriment les cheminots, c’est aussi leur volonté de conserver l’égalité entre eux. Je pense moi aussi qu’une autre méthode aurait été possible, par une négociation qui parte des droits actuels des cheminots.

Les propos du rapporteur me paraissent extrêmement indécents : on ne peut pas comparer le statut des parlementaires et celui des cheminots. Bien plus, on ne peut pas considérer que, sous prétexte que les avantages de certains seraient mal ressentis par les autres, il faudrait les supprimer ! C’est tout à fait démagogique. Surtout, c’est se lancer dans une entreprise sans fin : une fois que certains auront été stigmatisés, ce sera au tour des autres, etc.

Je connais un grand nombre de conventions collectives qui offrent des droits dont ne bénéficient malheureusement pas tous les salariés. Ne commençons pas à stigmatiser les uns ou les autres parce qu’ils ont acquis des droits au prix de luttes ou de négociations. Ce n’est pas une bonne façon de faire la loi.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. D’aucuns ont avancé que les salariés qui ne sont pas au statut ne respecteraient pas les règles de sécurité. Cet argument est un peu curieux, car de nombreuses professions sont soumises à des règles de sécurité importantes – les pilotes d’avion, les conducteurs d’autocar, notamment les autocars de transport scolaire. Ces salariés ne sont pas au statut. Pourtant, leur responsabilité, c’est bien d’appliquer les règles de sécurité.

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas ce que nous avons dit !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet argument ne me semble donc pas recevable.

J’ai entendu ensuite que nous allions tirer les conditions d’emploi dans le secteur ferroviaire vers le bas, alors même que vous nous avez expliqué que la situation des cheminots n’était pas particulièrement satisfaisante. Qui a dit que la convention collective avait cet objectif ? L’UTP, l’Union des transports publics et ferroviaires, c’est-à-dire le syndicat patronal, a présenté un document qu’elle a transmis aux organisations syndicales, qui précise qu’elle souhaite un cadre social de haut niveau qui ne soit pas la copie du statut, afin de parvenir à un cadre adaptable aux différentes situations pour mieux répondre aux besoins de chacun des territoires.

Vous avez évoqué le problème de la cohabitation des différents personnels au sein de la SNCF. Or, dans de nombreuses entreprises, les salariés viennent de différents horizons. C’est notamment le cas de La Poste. J’ai discuté avec son ancien président, Jean-Paul Bailly, qui a eu à mettre en place cette réforme : il n’y a pas des postiers de première et de deuxième catégorie au sein de La Poste, il existe un socle de droits communs pour tous les postiers, avec des modalités spécifiques, selon que ceux-ci ont le statut de fonctionnaire ou relèvent de la convention collective.

Il ne vous a pas échappé que, dans les amendements qui ont été introduits en commission, j’ai souhaité promouvoir ces principes d’unité sociale auxquels les syndicats qui ont bien voulu être dans une position de dialogue sont attentifs. Par conséquent, il y aura bien, au sein de la SNCF, un socle de droits communs et des modalités différentes selon que l’on est au statut ou que l’on dépend de la convention collective, avec des équilibres qui peuvent être différents.

Monsieur Jacquin, vous appelez de vos vœux une grande convention collective du transport. Pourtant, ni les entreprises ni les salariés ne le souhaitent. Il existe une convention du transport urbain et une convention du transport interurbain : on pourrait penser qu’il serait préférable d’avoir une même convention, mais les organisations patronales et syndicales n’en veulent pas ! Il y aura donc une troisième convention collective adaptée aux métiers ferroviaires.

Je le répète, le Gouvernement ne négociera pas à la place des partenaires sociaux, mais s’engagera pour que cette négociation aboutisse d’ici au 31 décembre 2019.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 et 240.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 152 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités peuvent procéder à des recrutements de personnels soumis au statut mentionné à l’article L. 2101-2 du code des transports tant qu’une nouvelle convention collective de branche présentant des conditions équivalentes n’aura pas été conclue.

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à garantir qu’il n’y ait pas de perte de droits et qu’il ne soit pas mis fin au statut des cheminots pour les nouveaux personnels tant qu’une règle commune de branche n’a pas été négociée à droits équivalents. Par conséquent, la référence au 31 décembre 2019 est supprimée.

M. le président. L’amendement n° 241 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités peuvent procéder à des recrutements de personnels soumis au statut mentionné à l’article L. 2101-2 du code des transports tant que la nouvelle convention collective au sein de la branche ferroviaire n’a pas été conclue.

La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. La disposition prévue à cet amendement va dans le sens de ce qui a été discuté à l’instant.

Le Gouvernement a fixé la date du 31 décembre 2019 pour la fin du recrutement de personnel sous statut SNCF. Aussi bien les organisations syndicales que les organisations patronales considèrent qu’il sera difficile d’aboutir dans des délais aussi serrés à la conclusion des accords collectifs au regard des négociations actuelles. La date de 2019 n’étant donc pas réaliste, nous proposons un délai plus raisonnable, permettant de prolonger les négociations jusqu’au 31 décembre 2023.

Qui plus est, la période entre 2019 et 2023 constituant dans une certaine mesure une période expérimentale de l’ouverture à la concurrence en raison de sa progressivité et de ses spécificités géographiques, il n’est pas anormal que les négociations puissent se prolonger durant cette période pour assurer la réussite des accords collectifs qui permettront d’éviter le dumping social, en assurant les garanties sociales pour l’ensemble du personnel de la branche ferroviaire.

Nous souhaitons donc conditionner la date d’extinction du recrutement au statut à la signature de la convention collective. Un certain nombre de mes collègues l’ont souligné avant moi : pourquoi vouloir mettre fin au statut tant que la convention collective n’a pas été arrêtée entre partenaires sociaux, comme l’a d’ailleurs toujours fait le gouvernement précédent ?

Il s’agit donc d’un amendement réaliste et de bon sens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. J’ai bien compris qu’il s’agissait en fait d’amendements de repli qui avaient pour finalité de reculer l’échéance, de façon à laisser plus de temps à la négociation de la convention collective de la branche ferroviaire.

Le délai prévu est, certes, un peu court, mais réalisable, car nous ne partons pas de rien : la négociation de cette convention collective a démarré en 2014 et quatre accords ont d’ores et déjà été conclus et étendus par arrêté ministériel, en particulier des accords relatifs à l’organisation du travail et à la formation professionnelle. Les autres volets sur lesquels la négociation devra aboutir concernent notamment les classifications et rémunérations, les garanties collectives des salariés de la branche et le droit syndical.

Comme le disait très justement M. Jacquin, si les transferts ne concernent qu’une centaine de personnes, il faut bien démarrer. Ce démarrage devra se faire au 1er janvier 2020.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Vous l’aurez compris, la date retenue, soit le 1er janvier 2020, a été fixée en cohérence avec celle de mise en œuvre de l’ensemble de la réforme, qu’il s’agisse de la mise en place de la nouvelle organisation, du début de l’ouverture à la concurrence ou de la reprise de la dette.

Je partage évidemment le souhait de voir la convention collective finalisée avant le 31 décembre 2019. C’est un objectif, certes, ambitieux, mais tout à fait crédible. Tel est le calendrier qui nous a été présenté par l’UTP et qui a été adressé aux organisations syndicales. Il est notamment prévu que le volet de la négociation portant sur les qualifications et les rémunérations soit finalisé d’ici au premier trimestre 2019.

Cette négociation, chacun le sait, est engagée depuis 2015. Visiblement, le fait d’avoir laissé filer les délais a rendu le calendrier flottant, ce qui n’a pas conduit à obtenir une mobilisation suffisante pour la faire déboucher. D’où le choix de procéder autrement, en fixant une date butoir pour nous donner les moyens de faire aboutir la convention collective avant le 31 décembre 2019. Le Gouvernement a ainsi annoncé la mise en place d’un observatoire du dialogue social, qui sera composé de Jean-Paul Bailly et d’une personnalité reconnue pour ses compétences en matière de négociations sociales. L’UTP a de son côté proposé, et le Gouvernement y est évidemment favorable, de donner des moyens d’expertise aux organisations syndicales pour les accompagner dans cette négociation.

À mon sens, il est de bonne méthode de fixer une échéance et de nous donner les moyens de la respecter. Si l’un de ces deux amendements, tels qu’ils sont rédigés, était adopté, les personnes désireuses d’entrer demain à la SNCF ne sauraient pas, en fonction du degré d’aboutissement de la convention collective, dans quelles conditions elles seraient recrutées. Cela ne me paraît pas la bonne pratique à envisager. Le Gouvernement réaffirme sa position, pour que cette convention collective soit finalisée au 31 décembre 2019 : donnons-nous les moyens pour la faire aboutir dans les délais.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. J’ai discuté avec un certain nombre d’interlocuteurs tout à fait crédibles, ayant l’habitude des négociations et représentant tant les syndicats de salariés que le patronat. Pour eux, les délais proposés, c’est du jamais vu ! Ce n’est pas pour cela que nous ne pourrons pas les atteindre ; soyons optimistes, tout peut évoluer. Ces représentants syndicaux ont en tout cas éveillé mon attention, en m’affirmant que de tels délais n’étaient vraiment pas tenables.

Quand j’ai entendu un représentant du syndicat des patrons du ferroviaire, l’UTP, me dire à peu près la même chose et me confier qu’il ne comprenait pas toute cette tension, j’ai essayé d’aller voir un petit peu plus loin. J’ai donc rencontré un concurrent de la SNCF, qui souhaite entrer sur le marché. Il m’a clairement signifié que la situation était tellement tendue qu’elle en devenait catastrophique pour le climat social et que la trajectoire n’allait pas être respectée. Il en était d’ailleurs extrêmement inquiet, d’autant que – et c’est à ce moment-là, monsieur le rapporteur, qu’il me l’a précisé – le dispositif n’allait concerner, dans les cinq années à venir, que quelques centaines de personnes.

Cela m’a paru tellement incompréhensible que j’ai voulu aller encore plus loin. Je me suis alors renseigné pour savoir combien d’agents de la SNCF, sur les 130 000 actuels, seraient susceptibles d’être concernés par un transfert dans les cinq années à venir. Ce chiffre est maintenant vérifié. Il y en a un qui a circulé, issu d’un calcul de l’ARF : seraient concernés, d’ici à dix ans, 3 000 à 5 000 agents, et, d’ici à cinq ans, seulement quelques centaines, dont quelques dizaines qui seraient en mesure de refuser un tel transfert. C’est là-dessus que la discussion bute, achoppe, ce qui crée ce climat d’incertitude extrêmement fort.

C’est pour cette raison que nous proposons ce premier amendement de repli, pour donner une chance à la négociation et, surtout, arrêter le conflit. Madame la ministre, reprenez-le à votre compte ou proposez-en un autre qui soit à peu près similaire, et je suis sûr que la grève cesse immédiatement.

M. Frédéric Marchand. Je demande à voir !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 152 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 241 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 242, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Remplacer l’année :

2019

par l’année :

2023

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. Nous allons au bout de notre idée, mes chers collègues, en présentant un ultime amendement de repli pour proposer une date limite de fin de négociation qui corresponde aux pratiques du secteur ferroviaire en la matière, puisque la fin du recrutement au statut ne devrait avoir lieu que lorsque la convention collective ferroviaire aura été signée. Par cet amendement, nous souhaitions repousser l’échéance de 2019 à 2023, mais je suis prêt, madame la ministre, monsieur le rapporteur, à assouplir notre position et à le rectifier en séance pour prévoir une date différente.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Si j’ai bien compris, monsieur Jacquin, voilà un amendement de repli sur le repli !

M. Olivier Jacquin. Absolument !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Au moins, cela a le mérite d’être clair puisque vous donnez une date. Cela veut dire qu’initialement vous pensiez que le repli sur la négociation de la convention collective irait au-delà de 2024, soit une échéance véritablement très lointaine.

M. Olivier Jacquin. Non, 2023, pas 2024 !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je vous trouve bien naïf de penser que l’adoption d’un amendement de la sorte pourrait mettre fin au conflit. Moi aussi, j’ai reçu tous les syndicats. Certains d’entre eux m’ont très clairement dit qu’ils n’étaient pas favorables à l’ouverture à la concurrence, à la fin du statut, à ce projet de loi et que, même quand ce dernier serait voté, ils continueraient la grève. C’est leur droit le plus strict de poursuivre la grève jusqu’à plus soif, mais cela ne gênera ni le Gouvernement ni les parlementaires. S’ils décident de combattre le texte même une fois qu’il aura été voté, cela se fera au détriment de leurs propres adhérents, auxquels ils feront perdre du pouvoir d’achat.

Voilà pourquoi je vous trouve bien naïf. D’autant que, au sein de la commission, nous avons fait de grandes avancées sociales. Vous-même l’avez d’ailleurs reconnu, tout comme certains syndicats, lesquels attendent du Sénat qu’il ne dénature pas le texte de la commission parce qu’ils veulent avoir des certitudes. Ils reconnaissent donc le grand pas que nous avons pu faire tous ensemble. Disant cela, j’associe tous les membres de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, et son président, ainsi que le président du Sénat, qui nous a soutenus.

Nous avons fait, je crois, du bon travail. Il y a des syndicats réformistes et d’autres qui ne veulent pas de la réforme parce qu’ils ne veulent jamais de rien. Mais ceux qui considèrent ce texte comme une avancée peuvent réfléchir, en fonction de ce que votera le Sénat, à arrêter la grève. Ce serait le plus grand service à rendre à la Nation, à la France, aux Français, notamment aux plus pénalisés, c’est-à-dire les pauvres gens, qui n’ont pas d’autres moyens ni solutions de déplacement, qui veulent pouvoir travailler tous les jours et bénéficier d’un service public au service du public. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 242.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je crois avoir expliqué, monsieur Jacquin, que le choix de cette date du 1er janvier 2020 correspondait à un souci de cohérence globale avec les autres échéances de la réforme. Vous nous dites avoir rencontré des représentants de l’UTP. Moi-même, avec le Premier ministre, je les ai bien évidemment aussi reçus, dont le président de l’UTP. Ils nous ont qu’ils tiendraient ce calendrier, parce qu’ils allaient se donner les moyens pour ce faire. Très franchement, il ne me paraît pas sérieux, alors que la négociation est engagée depuis 2015, que la discussion a déjà eu lieu sur les classifications et les rémunérations, et que des propositions sont d’ores et déjà sur la table, de prévoir trois ou quatre années de plus pour finaliser l’ensemble.

Le Gouvernement s’engagera pour que cette négociation entre partenaires sociaux aboutisse. L’UTP donne des moyens aux organisations syndicales pour avancer. Le Gouvernement a mis en place un observatoire du dialogue social. La convention collective doit en tout état de cause être bouclée avant le 31 décembre 2019.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Entre « naïveté » et « manque de sérieux », que ne faut-il pas entendre !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je n’ai pas dit « manque de sérieux ».

M. Claude Bérit-Débat. Mme la ministre a indiqué que notre amendement n’était pas sérieux, ce qui revient au même. Et vous, vous avez parlé de naïveté. Voilà des termes quelque peu excessifs. Notre démarche, notre souhait, c’est de faire en sorte que le processus aboutisse. Moi-même je me place dans l’optique de l’adoption de la loi, puisque, apparemment, un accord a été conclu entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement. De là à dire que nos propositions ne sont pas sérieuses, voire irréalistes, il y a un pas à ne pas franchir.

Cela a été dit avant moi, nous souhaitons tout simplement que la fin du statut soit liée à la réussite de l’accord sur la convention collective.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Nous aussi !

M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, il était bien sûr dans votre rôle de rencontrer les syndicats professionnels et les syndicats de salariés. C’est tout à fait normal. Il n’empêche que c’était aussi notre rôle de les rencontrer. Je le répète, nous souhaitons que le processus aboutisse, tout comme les syndicats réformistes, dont je me fais le porte-voix, avec Olivier Jacquin.

Ne nous faites donc pas croire que vous seule détenez la vérité. Nous avons bien compris le refus que vous nous opposez. Vous avez le droit, c’est ainsi que s’exerce la démocratie. Vous en restez à 2019, j’ai envie de vous dire : « Chiche ! » Nous verrons bien ce qu’il en sera le moment venu.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Absolument !

M. Claude Bérit-Débat. Vous venez d’indiquer que le Gouvernement mettait tout un œuvre pour que la négociation aboutisse. Mais ce sont les partenaires sociaux qui négocient, pas le Gouvernement, et vous l’avez bien précisé. Je ne suis donc pas du tout rassuré par vos propos. Nous verrons bien si, à la fin de 2019, un accord est effectivement conclu. Si tel est le cas, nous vous dirons : « Bravo ! » Sinon, nous ne manquerons pas de vous rappeler ce que nous avons dit, dans cet hémicycle, ce soir, aux alentours de vingt-deux heures quarante.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Houllegatte. Je voudrais renchérir sur ce que vient de dire mon ami Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, le Sénat a toujours eu la réputation de trouver le point d’équilibre entre ce qui est souhaitable et ce qui est possible. De notre avis, dans le cadre de la discussion actuelle, il faut savoir donner un certain nombre de signes. L’échéance du 31 décembre 2019 est considérée comme irréaliste ; elle est abrupte, elle s’apparente, pour employer des termes volontairement un peu forts, à la vente du statut « à la bougie ». À ce titre, il faut être en capacité de pouvoir laisser du temps au temps, de fixer un horizon réaliste, pour donner des perspectives à la négociation, lui permettre de se dérouler et d’aboutir dans de bonnes conditions, sans que domine ce sentiment d’avoir le pistolet du chronomètre sur la tempe.

La sagesse du Sénat, c’est justement d’envoyer des signes positifs. Notre propos n’est pas de dire que nous refusons les évolutions. Bien au contraire, nous sommes prêts à les accompagner, mais en respectant les uns et les autres.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Les négociations sur la convention collective sont en cours. Des accords importants ont déjà abouti. Il en reste trois à finaliser sur des sujets importants, notamment la retraite et la sécurité sociale. Il faut du temps, et c’est normal. Le statut de cheminot étant très ancien, s’y sont évidemment greffés de nombreux dispositifs très complexes. Ceux qui négocient sont des personnes responsables, engagées, et j’inclus les syndicats des entrepreneurs. Il n’y a pas de raison de ne pas faire confiance aux partenaires sociaux et de ne pas leur donner le temps nécessaire pour aboutir à un accord raisonnable et équilibré.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 242.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er B.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 114 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 248
Contre 92

Le Sénat a adopté.

Article 1er B (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article additionnel après l'article 1er C - Amendement n° 65

Article 1er C (nouveau)

Le titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 2161-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « des établissements publics constituant le groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 » sont remplacés par les mots : « de la société nationale SNCF et des sociétés relevant du champ mentionné au I de l’article L. 2101-2 » ;

b) Les mots : « ou d’une attestation de sécurité délivrés » sont remplacés par le mot : « délivré » ;

c) Après les mots : « transport ferroviaire de marchandises ou de voyageurs, », le mot : « et » est supprimé ;

d) Après les mots : « la maintenance sous exploitation des lignes et installations fixes d’infrastructures ferroviaires », sont insérés les mots : « et aux entreprises dont l’activité principale est la maintenance, hors réparation, des matériels ferroviaires roulants ou l’exercice des tâches et des fonctions de sécurité ferroviaire » ;

2° L’article L. 2162-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « des établissements publics constituant le groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 » sont remplacés par les mots : « de la société nationale SNCF et des sociétés relevant du champ mentionné au I de l’article L. 2101-2 » ;

b) Les mots : « ou d’une attestation de sécurité délivrés », sont remplacés par le mot : « délivré » ;

c) Après les mots : « transport ferroviaire de marchandises ou de voyageurs, », le mot : « et » est supprimé ;

d) Après les mots : « maintenance sous exploitation des lignes et installations fixes d’infrastructures ferroviaires », sont insérés les mots : « et aux entreprises dont l’activité principale est la maintenance, hors réparation, des matériels ferroviaires roulants ou l’exercice des tâches et des fonctions de sécurité ferroviaire ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 38 est présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 154 rectifié quinquies est présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 38.

Mme Michelle Gréaume. J’entends tout ce qui se dit depuis un certain temps, notamment que l’on ne va pas toucher au statut des cheminots, du moins pour les anciens, et que la convention collective est en cours de négociation. J’avoue être un peu perdue et ne pas comprendre du tout le sens de cet article 1er C, introduit en commission au Sénat.

Cet article vise à modifier le champ d’application du décret relatif à la durée du temps de travail dans la branche ferroviaire, alors que, j’y insiste, la convention collective de ladite branche est en cours de négociation, pour tenir compte de la transformation du groupe public ferroviaire prévue à l’article 1er A. Par ailleurs, il étend l’application du décret-socle et de la convention collective aux entreprises dont l’activité principale est la maintenance des matériels roulants, hors réparation, ou l’exercice de fonctions de sécurité ferroviaire.

Quoi qu’il en soit, nous refusons absolument le changement de statut de l’entreprise publique, considérant que ce statut d’EPIC est lié à la nature même de son activité, un service public répondant à l’intérêt général. Plus particulièrement, il s’agit du service public de mobilité, qui est aussi un droit pour nos concitoyens.

Nous proposons donc, en cohérence avec l’ensemble de nos amendements, la suppression de cet article, pour pouvoir attendre l’issue des négociations avec les syndicats.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 154 rectifié quinquies.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. À l’instar de nos collègues du groupe CRCE, nous proposons la suppression de l’article 1er C, puisque nous refusons le passage d’EPIC en SA. Je ne reprendrai pas tous les argumentaires qui ont déjà été donnés. Je vous inviterai simplement à lire Les Échos d’aujourd’hui : vous y trouverez une analyse selon laquelle le degré de risque sur les emprunts de la SNCF va augmenter du fait de la baisse de la notation de la société devenue SA par rapport à celle qu’elle aurait obtenue si elle était restée un EPIC, ce qui aura des implications pour ceux qui détiennent des obligations de la SNCF.

Madame la ministre, vous nous avez donné, comme seul argument, le regroupement des trois structures en une. Vouloir déstabiliser l’ensemble du dispositif n’a aucun sens, sauf à imaginer – on nous rétorque que c’est un procès d’intention, mais l’histoire jugera – que l’objectif est la privatisation. L’article 1er C n’apporte strictement rien. Il doit donc être supprimé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Les auteurs de ces amendements font, me semble-t-il, une confusion, car ce qu’ils écrivent dans l’objet n’a rien à voir avec la suppression de l’article 1er C. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. J’ai bien compris, madame Lienemann, que vous vous opposiez au changement d’organisation.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cela passe par un changement de statut, puisque la réforme précédente a bien démontré l’impossibilité d’avoir une unité au travers de trois EPIC.

Je voudrais attirer votre attention sur l’importance de l’article que vous voulez supprimer, puisqu’il s’agit d’adapter le champ du décret-socle à la nouvelle organisation. L’adoption de ces amendements identiques, outre qu’elle ne permettrait pas de revenir sur cette nouvelle organisation qui ne vous convient pas, priverait les salariés du groupe public unifié de l’application de la convention collective. J’imagine que tel n’est pas l’objectif que vous recherchez.

Je propose le retrait de ces amendements ; à défaut, j’émettrai un avis évidemment défavorable.

M. le président. Madame Gréaume, l’amendement n° 38 est-il maintenu ?

Mme Michelle Gréaume. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Maintenez-vous l’amendement n° 154 rectifié quinquies, madame Lienemann ?

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 et 154 rectifié quinquies.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 155 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. L’amendement est défendu.

M. le président. L’amendement n° 258, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 3

1° Remplacer les deux occurrences du mot :

des

par le mot :

aux

2° Remplacer la première occurrence du mot :

de

par le mot :

à

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 155 rectifié quinquies ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 155 rectifié quinquies et 258 ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Avis défavorable sur le premier et favorable sur le second.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 155 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 258.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er C, modifié.

(Larticle 1er C est adopté.)

Article additionnel après l’article 1er C

Article 1er C (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er

M. le président. L’amendement n° 65, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La France, par l’intermédiaire de la ministre chargée des transports, demande aux instances européennes la réalisation d’un bilan contradictoire sur l’impact en termes d’emplois, d’aménagement du territoire et de la qualité du service rendu de la libéralisation du transport ferroviaire.

La ministre demande également la réalisation d’un bilan carbone des politiques de libéralisation du transport ferroviaire.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Nous connaissons, mes chers collègues, votre désamour pour les rapports. (Sourires.) Toutefois, il nous semble nécessaire, avant même d’aller plus en avant, d’avoir un point général sur les conséquences d’une ouverture à la concurrence du transport de voyageurs.

Cela se justifie, d’une part, du fait des passifs des différentes privatisations et ouvertures à la concurrence dans le secteur de l’énergie, des communications ou même du fret ferroviaire. Comment oublier, par exemple, la récurrence des suicides sur le lieu de travail constatée dans les années suivant le recul de l’État à France Télécom ? Ces drames humains doivent nous rappeler que, lorsque l’État se retire d’un secteur économique, c’est tout un modèle qui change et des vies qui, parfois, tanguent.

Cela est nécessaire, d’autre part, car les expériences étrangères démontrent une détérioration du service et des conditions de travail.

La doxa libérale liant la concurrence à une meilleure sécurité et des prix plus intéressants, si elle se fonde sur des principes économiques hérités d’Adam Smith, oublie un détail important. Le secteur privé vise le profit et uniquement le profit. Cela implique donc la recherche absolue de la rentabilité, comme l’ont montré les exemples britannique et allemand : hausse des tarifs, investissements moindres sur des lignes jugées peu rentables, problèmes de sécurité, dysfonctionnements répétés. On ne peut nier qu’aujourd’hui 60 % des Britanniques souhaitent une renationalisation du réseau.

L’image d’une SNCF toujours en retard, dépassée, honnie et pratiquant des tarifs prohibitifs est à interroger. Oui, au fil des années, le désengagement de l’État et les choix stratégiques faits par ses cadres, dont un certain nombre sont d’ailleurs au Gouvernement aujourd’hui, ont détérioré le service. Malgré toutes ces difficultés, la SNCF reste un bel outil, comme l’a montré dans un rapport le Boston Consulting Group, qu’on ne saurait qualifier de gauchiste. En classant le réseau français troisième réseau le plus performant d’Europe derrière ceux de la Suisse et de la Suède, il a rappelé que la qualité et la sécurité de ce réseau étaient dues à l’investissement public et général, et au monopole d’État. Une qualité de service, certes, chancelante, mais supérieure à celle de ses voisins, des exemples peu rassurants de l’étranger, l’enjeu de l’ouverture à la concurrence est central dans nos débats.

Dans ce cadre, nos positions doivent s’appuyer sur des études complètes, que seuls nos partenaires européens peuvent nous fournir. Pour cette raison, nous demandons la réalisation d’un bilan contradictoire de ces politiques de libéralisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Mes chers collègues, sur le plan juridique, cet amendement comporte une injonction au Gouvernement, ce qui n’est pas conforme au principe de séparation des pouvoirs. Je tenais tout de même à vous l’indiquer.

Sur le fond, plusieurs bilans ont déjà été effectués sur l’ouverture à la concurrence. Ils ont relevé ses effets positifs sur la qualité du service rendu ou la réduction des coûts, au profit des usagers. Je vous renvoie notamment à la très intéressante contribution de l’ARAFER, en date de mars 2018 et publiée sous la forme de quatre cahiers distincts, dont l’un traite plus spécifiquement des enseignements européens de l’ouverture à la concurrence.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Évidemment, les travaux sur le quatrième paquet ferroviaire, comme c’est toujours le cas au Parlement européen ou au Conseil, ont été précédés d’une étude d’impact à l’échelle européenne. Je pourrai vous faire parvenir cette étude si vous ne l’avez pas trouvée sur le site de la Commission européenne.

Par ailleurs, comme l’a rappelé M. le rapporteur, plusieurs organismes français se sont penchés sur ces enjeux : l’ARAFER, mais également le Sénat en 2013 ou le Centre d’analyse stratégique en 2011. Tous ces éléments étaient connus lorsque la décision d’ouvrir à la concurrence le transport de voyageurs a été prise au niveau européen pendant le précédent quinquennat.

Aujourd’hui, l’heure n’est plus aux rapports, l’ouverture à la concurrence a été décidée, et c’est aussi un choix de la France.

Je pense qu’il faut regarder la réalité en face et préparer l’entreprise et les salariés afin que cette ouverture à la concurrence soit une réussite pour les voyageurs, les territoires, la SNCF et les cheminots.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je voterai cet amendement, même si nous ne sommes pas unanimes au sein de mon groupe sur la question de l’ouverture à la concurrence.

J’étais députée européenne lors des discussions sur le premier paquet de libéralisation ferroviaire, et j’ai suivi tous les débats. À chaque nouveau paquet ferroviaire, le groupe socialiste, puissant au Parlement européen, a toujours exigé que la dérégulation s’accompagne d’une directive-cadre sur les services publics comprenant diverses obligations, notamment une péréquation tarifaire et des garanties pour les petites lignes. Nous ne l’avons jamais obtenue, ce qui n’a pas empêché pour autant mes collègues sociaux-démocrates de voter les réformes ferroviaires.

En outre, il existe une différence entre un rapport de bilan et une étude d’impact, madame la ministre. Quand le Parlement européen procède au bilan de la mise en œuvre d’une directive, un rapport contradictoire est effectué et un débat public s’engage sur la pertinence des paramètres retenus. En effet, selon les critères d’analyse choisis, on peut assez facilement démontrer que quelque chose marche, ou l’inverse.

Les organisations syndicales européennes et internationales que nous avons rencontrées signalent toutes les mêmes problèmes, avec plus ou moins d’ampleur. L’ouverture à la concurrence n’a permis d’améliorer la situation que dans les pays où le service public était pitoyable auparavant. Évidemment, quand le système ne marche pas du tout, notamment en raison du poids des traditions bureaucratiques, cela ne peut guère être pire. Mais ce n’est pas le cas du service public dans un certain nombre de pays, notamment en France.

En Grande-Bretagne, madame la ministre, la libéralisation est tellement réussie que le « nouveau monde » consiste à vouloir renationaliser les transports. Il y a des raisons objectives à cela. En réalité, la concurrence ne peut exister sur le rail, car il est impossible de faire passer deux trains en même temps sur la même ligne. Le client n’aura donc jamais le choix entre un train A ou un train B ; il s’agit en réalité d’une délégation consentie au secteur privé.

Les tarifs ont augmenté partout : les Anglais dépensent 14 % de leurs revenus pour se déplacer, contre 3 % en moyenne pour les Français !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Nous ne voulons pas une étude d’impact, madame la ministre, mais un bilan contradictoire sur l’ouverture à la concurrence et la privatisation d’un certain nombre de secteurs publics – je veux bien, malgré tout, que vous me communiquiez les documents que vous avez évoqués.

On a évoqué, hier soir, le fret ferroviaire. Ce serait bien de faire le bilan de son ouverture à la concurrence avant de s’attaquer à la libéralisation du trafic de voyageurs.

En 2003, 18 % des marchandises étaient transportées par le chemin de fer en France, contre seulement 10 % aujourd’hui. Entre-temps, on a ouvert à la concurrence et 22 entreprises privées se sont engouffrées dans le marché.

C’est quand même un échec, avec comme conséquence plus de camions sur les routes !

Puisque vous voulez parler d’étude d’impact, madame la ministre, il faut savoir que dans les vingt prochaines années, le transport des marchandises sera multiplié par trois. Si la part du fret ferroviaire reste constante, il y aura trois fois plus de camions sur les routes. Voilà le vrai débat !

Au-delà, je souhaiterais qu’on ouvre un débat public sur toutes les ouvertures à la concurrence. Quand la directrice de l’Autorité de la concurrence a été auditionnée par la commission des affaires économiques, je lui ai demandé dans quels secteurs cette ouverture avait été véritablement profitable pour les consommateurs – ou les usagers – et les salariés. Elle m’a dit qu’elle n’avait pas vraiment le temps de me répondre, mais a reconnu que, à l’exception des télécommunications, les effets étaient très contradictoires ; en tout cas, la question méritait, selon elle, de faire l’objet d’un débat. Dans les secteurs déjà ouverts à la concurrence, on constate, partout, l’augmentation des tarifs, la dégradation du service pour les usagers et des conditions de travail pour les salariés. Voilà pourquoi nous demandons un débat, tout simplement.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je me suis amusé, très récemment, à me déplacer dans quelques pays voisins en vue de ce débat, notamment en Italie, où l’ouverture récente à la concurrence des lignes à grande vitesse apparaît réussie. Toutefois, en creusant un peu, on s’aperçoit que l’offre de départ était de très mauvaise qualité : choix d’horaires réduit, tarifs très élevés, trains de mauvaise qualité. Rien à voir avec la situation française. Dans ce contexte, les effets de la mise en concurrence sont assez spectaculaires. J’ai pris une ligne privée dans un sens, une ligne publique dans l’autre : la stimulation des agents est visible. Ces effets bénéfiques ont toutefois tendance à se stabiliser avec le temps.

Le système français a bien évidemment des défauts, notamment pour les transports du quotidien, mais l’offre en matière de LGV est plutôt satisfaisante, avec des tarifs parmi les moins élevés d’Europe. Le fameux mammouth SNCF a tout de même réussi à développer Ouigo dans des délais remarquables. On aime ou pas, mais le groupe public a, de cette manière, anticipé l’ouverture à la concurrence. Le marché est quasi saturé ; ceux qui s’attendent à un grand soir du ferroviaire et à des résultats rapides pour les usagers seront sans doute assez étonnés.

Pour le groupe socialiste et républicain, ce qui importe surtout, c’est de préserver ce patrimoine public par une maîtrise publique forte. Les systèmes de transport urbain ont presque tous évolué de la même manière : les autorités organisatrices publiques sont devenues de plus en plus compétentes et elles délèguent avec des résultats satisfaisants.

Mais regardons aussi un peu du côté de notre voisin suisse, mes chers amis : c’est un modèle complètement différent, avec un État stratège qui investit à long terme et donne de la visibilité. Avec celui du Japon, c’est le système qui devrait nous servir d’exemple.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 65.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er C - Amendement n° 65
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 26

Article 1er

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour assurer la transformation du groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 du code des transports, ainsi que des filiales des entités constituant celui-ci, en un groupe public unifié tel qu’issu de l’article L. 2101-1 du même code modifié par la loi n° … du … pour un nouveau pacte ferroviaire à compter du 1er janvier 2020, dans le contexte de l’achèvement de l’ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire et à ce titre :

1° Fixer les conditions de création du groupe public constitué par la société nationale SNCF et ses filiales, en prévoyant notamment :

a) L’attribution aux sociétés SNCF Mobilités, SNCF Réseau et, le cas échéant, à leurs filiales, chacune selon son objet, ou le retour à l’État, de tout ou partie des biens, droits et obligations des établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial constituant le groupe public ferroviaire au sens de l’article L. 2101-1 du code des transports dans sa rédaction antérieure à la présente loi ;

a bis) (nouveau) Des mesures d’application aux sociétés visées au a) de la législation applicable aux établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial, ou d’adaptation de cette législation, notamment en matière de protection de l’environnement, d’urbanisme, de maîtrise d’ouvrage et de commande publique ;

b) Les conditions dans lesquelles certaines missions de la société nationale SNCF sont assurées au sein du groupe public ;

c) Les conditions dans lesquelles les contrats de travail se poursuivent pour assurer la mise en œuvre du groupe public et les effets en résultant sur le droit social applicable ;

d) La réunification de la gestion des gares de voyageurs ;

e) Les modalités transitoires de gestion des sociétés composant le groupe public constitué par la société nationale SNCF et ses filiales jusqu’à l’installation des différents organes prévus par leurs statuts ;

f) (nouveau) Les mesures transitoires ou, le cas échéant, dérogatoires à l’application des dispositions du code de commerce relatives aux sociétés anonymes durant les premiers exercices suivant la date de constitution des sociétés SNCF et de ses filiales ;

1° bis Fixer les conditions de fonctionnement du groupe public constitué par la société nationale SNCF et ses filiales, en prévoyant notamment :

a) Les modalités de sa gouvernance, en veillant à garantir la représentation adaptée des acteurs du système ferroviaire et notamment une représentation des collectivités territoriales concernées, des usagers ainsi que des salariés, dans le respect de l’article 7 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ;

b) Les garanties propres à assurer l’indépendance de SNCF Réseau, dans le respect des exigences de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen, en veillant à l’introduction d’un avis conforme de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sur la nomination, le renouvellement et la révocation de son dirigeant afin de garantir son indépendance à l’égard des entreprises exerçant, directement ou par l’intermédiaire d’une filiale, une activité d’entreprise ferroviaire ;

b bis) (nouveau) Les règles de financement des investissements de SNCF Réseau ;

c) (Supprimé)

d) Les modalités de contractualisation entre l’État et la société nationale SNCF ou ses filiales, en veillant à prendre en compte, en particulier, les objectifs assignés à la gestion de l’infrastructure ;

1° ter (nouveau) Déterminer le régime des biens dont le groupe public ferroviaire mentionné à l’article L. 2101-1 du code des transports dans sa rédaction antérieure à la présente loi est propriétaire ou affectataire, dans le respect du caractère public des biens appartenant au domaine public ;

2° Fixer les conditions de recrutement, d’emploi et de représentation du personnel ainsi que de la négociation collective au sein des sociétés composant le groupe public.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, sur l’article.

M. Pascal Savoldelli. À cette étape du débat, on nous demande d’autoriser le Gouvernement à mettre en œuvre par ordonnances la réforme dont nous débattons depuis hier.

Sur la méthode, tout d’abord, on ne peut oublier que le Gouvernement avait choisi initialement la seule voie des ordonnances.

Quelle a été l’attitude de la commission ? J’ai fait les comptes, monsieur le rapporteur : elle a renforcé le champ des habilitations, en ajoutant pas moins de six items !

Cela pose un problème quant au rôle du Parlement et à la qualité des réponses qui nous sont apportées. On conservera toutefois en mémoire tous les arguments échangés, toutes les questions posées, toutes les réponses apportées – ou l’absence de réponse…

À ce stade du débat, comment peut-on habiliter le Gouvernement, alors qu’il est incapable de nous expliquer quelle a été la consultation des élus des territoires ? Le réseau SNCF constitue pourtant un bel exemple de maillage territorial. A-t-on organisé ensuite un grand débat public avec les usagers ? De quelle nature ?

Réformer, changer, oui, mais à condition d’engager un processus démocratique d’appropriation, qui aurait aussi permis de faire la distinction entre avantages réels et avantages supposés, monsieur le rapporteur.

M. le président. Au regard du nombre d’interventions, merci de bien vouloir respecter vos temps de parole, mes chers collègues.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet article est important, parce qu’il fait basculer dans le domaine des ordonnances des décisions stratégiques pour l’avenir de l’entreprise. S’agissant de l’avenir de la SNCF et, plus largement, du rail dans ce pays, le Parlement ne peut pas faire une confiance aveugle au Gouvernement, sans cadre suffisamment précis sur la gouvernance ou les missions qui seront transférées, des sujets qui ne relèvent pas du pouvoir réglementaire.

Nous débattrons prochainement d’un projet de loi sur les mobilités. Or les missions de la SNCF ne peuvent pas être dissociées de la façon dont on conçoit l’avenir des mobilités. On va vers une hyperindustrialisation des services de mobilité et une intégration entre les grands services de transports collectifs comme la SNCF, la voiture individuelle et les petits systèmes de véhicules électriques autonomes. Comment tout cela va-t-il s’organiser ? Quelles seront les missions de la SNCF dans ce contexte ? Le Parlement souhaite-t-il vraiment renvoyer la décision à l’État sur des sujets aussi essentiels ?

Nous devrions commencer par faire un choix stratégique sur le fonctionnement et le financement du rail dans notre pays. C’est bien beau de promettre la reprise de la dette, mais celle-ci s’est formée à cause d’un taux insuffisant de subventionnement des investissements, sans parler des frais financiers. Si l’on ne met pas en place un système de financement garantissant un haut niveau d’investissements publics, la dette va se reconstituer. À cet égard, les annonces de l’exécutif sont bien loin des besoins.

Ce chèque en blanc donné à l’État pour l’avenir me paraît très aléatoire. Je reparlerai du statut ultérieurement, à l’occasion de la présentation de certains amendements.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.

M. Olivier Jacquin. Je profiterai de cette intervention pour poser à Mme la ministre une question assez technique, type de question qu’elle affectionne particulièrement.

Étant allé voir sur place, je ne ferai pas la description catastrophique qui est généralement faite des trains au Royaume-Uni. Ce pays a choisi un système radicalement différent : la concurrence pour le marché, et non sur le marché, avec un principe de lots territorialisés remis en concurrence tous les sept ans.

J’ai bien compris qu’il y avait au Royaume-Uni une culture de l’argent public et du contrôle des dépenses publiques très différente de la nôtre. On délègue beaucoup, mais on contrôle aussi beaucoup, en se donnant les moyens de suivre les politiques.

Notre pays souffre d’un manque de culture de l’évaluation et du contrôle – la façon dont a été déléguée la gestion des autoroutes pose vraiment question…

Madame la ministre, on vient de décider de mettre fin au monopole très ancien de la SNCF sur le transport ferroviaire de voyageurs. Toute notre ingénierie publique était logiquement confiée à ce monopole, et le ministère des transports n’est à ce jour pas dimensionné pour exercer toutes ses nouvelles fonctions d’autorité organisatrice. L’État jouait déjà ce rôle pour une petite partie du secteur ferroviaire, mais il devra le jouer désormais très différemment, d’une tout autre manière.

Il ne faut pas confondre au demeurant ce rôle avec celui de l’ARAFER, autorité qui semble très appréciée sur ces travées – nous avons assisté à une belle démonstration de ses capacités, ainsi que des qualités de son président et de son équipe –, mais dont le rôle est de jouer les arbitres de l’ouverture à la concurrence.

Madame la ministre, de quels moyens humains comptez-vous doter votre ministère pour exercer les fonctions nouvelles qui seront les vôtres avec la fin du monopole d’État ? Il ne s’agirait pas de donner les clés à la concurrence sans conserver des moyens efficaces de contrôle.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, sur l’article.

M. Jean-Michel Houllegatte. Cet article 1er autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute une série de mesures, selon un processus d’hybridation qui conduit le Parlement à se déposséder d’un certain nombre de ses prérogatives. Cela nous dérange.

Comme je l’ai déjà indiqué hier, la confiance a été quelque peu mise à mal au cours de ces dernières semaines. Le rapport Spinetta est apparu comme une véritable provocation et la méthode employée pose question.

Nous devons donc être nécessairement vigilants sur le périmètre des ordonnances, d’autant que nous avançons à l’aveugle, sans étude d’impact ni avis du Conseil d’État.

Je m’interroge en particulier sur l’attribution aux sociétés commerciales de tout ou partie des biens. Le Gouvernement a introduit une possibilité de retour de ces biens à l’État. On pourrait a priori s’en réjouir, se fondant, à l’image du numérique, sur la notion de réseaux d’initiative publique.

Le réseau ferroviaire ferait ainsi partie d’un patrimoine national inaliénable dont l’exploitation serait confiée à différents opérateurs, publics ou privés.

Il subsiste toutefois, me semble-t-il, une zone d’ombre : SNCF Réseau pourrait-elle un jour être dépossédée de tout ou partie de son réseau, confié en gestion à d’autres investisseurs ou partenaires, au terme d’une deuxième ouverture à la concurrence ?

Quelles sont les raisons qui ont conduit le Gouvernement à introduire cette possibilité de retour de tout ou partie des biens à l’État ? Comment s’assurer que SNCF Réseau sera l’affectataire universel de son réseau ?

Certes, il est possible que ce transfert d’actifs vers l’État soit la contrepartie de la reprise de la dette à hauteur de 35 milliards d’euros, mais, dès lors, comment sécuriser juridiquement la relation entre un État propriétaire et une société anonyme exploitante ?

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 49 est présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 243 est présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 49.

M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à supprimer cet article, qui donne au Gouvernement toute latitude pour modifier les missions, l’organisation, la forme juridique et la gouvernance de la SNCF.

Nous discutons de toute une série de questions très importantes, mais, au final, on nous demande d’emblée, dans l’article 1er du texte, de donner les clés de la rédaction finale au seul Gouvernement. Et la commission en a même rajouté !

Nous avons à présent deux pleines pages de la loi, 17 alinéas au total, qui décident de régler par ordonnance des sujets essentiels dont nous débattons.

Évidemment, nous ne pouvons accepter la méthode, en particulier l’absence totale de garanties et de transparence qui en découle.

Nous regrettons aussi l’attitude de la commission. Le 26 février dernier, Hervé Maurey lui-même avait dénoncé avec beaucoup de virulence le choix du Gouvernement de recourir aux ordonnances, estimant qu’il témoignait « de toute évidence d’un mépris du Parlement qui laissera des traces ». Il affirmait aussi que le Sénat ne ratifierait pas ces ordonnances si elles n’étaient pas « respectueuses des usagers et des territoires ».

Or la commission a encore étendu dans son texte la liste des sujets soumis à habilitation, alors qu’elle aurait dû être la première à résister à la méthode du Gouvernement pour faire respecter les droits du Parlement.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 243.

M. Olivier Jacquin. Le Gouvernement s’était engagé à ne pas recourir aux ordonnances pour mener sa réforme ferroviaire. Il a finalement opté pour une méthode inédite consistant à réintégrer certaines dispositions initialement prévues dans le champ de l’ordonnance.

Le projet de loi, dont le volume a quasiment quadruplé, est devenu un texte hybride, hétérodoxe, entre articles portant habilitation à légiférer par ordonnance et articles classiques, ce qui n’améliore pas la clarté du texte. Le champ des ordonnances continue d’augmenter au fur et à mesure que de nouveaux articles viennent gonfler le projet de loi.

Opposés aux ordonnances, nous considérons que le Parlement doit pouvoir jouer pleinement son rôle sur une réforme ferroviaire aussi importante que celle de la transformation de l’organisation du groupe et du régime juridique des personnels.

C’est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.

Le débat parlementaire, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, a fait considérablement progresser ce texte. Allez au bout de la logique, madame la ministre, renoncez aux ordonnances et poursuivons dans le dialogue démocratique et la concertation !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Ce débat est intéressant. Je ne connais aucun parlementaire, ni au Sénat ni à l’Assemblée nationale, qui se dise satisfait de la volonté du Gouvernement de légiférer par ordonnance.

Mais, vu la première version du texte déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, avouez qu’on partait de loin !

En tant que rapporteur, j’ai fait en sorte de limiter au maximum les ordonnances et d’insérer dans le « dur » de la loi l’ensemble des progrès que le Sénat pouvait apporter, en matière sociale et d’aménagement du territoire. Je me suis attaché à ce que la loi soit très efficace dans ce domaine, de façon à ce que les syndicats et tous ceux qui s’intéressent au sujet sachent que ces dispositions portent la marque du Sénat.

Toutefois, parce que je suis pragmatique, et non dogmatique, j’ai effectivement accepté l’habilitation à légiférer par ordonnances sur certains sujets, le plus souvent techniques, difficiles à inclure dans la loi.

Le texte issu de l’Assemblée nationale renvoyait largement aux ordonnances. J’en ai limité le nombre au maximum, tous les sujets importants figurant dans le corps de la loi.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. On peut raconter l’histoire à l’envers et laisser penser qu’on a ajouté des ordonnances au fur et à mesure du débat parlementaire.

En réalité, c’est tout le contraire. Dès le départ, le Gouvernement avait indiqué que le texte contiendrait une habilitation à légiférer par ordonnance. Tel était le sens du projet de loi que j’ai présenté en conseil des ministres le 14 mars dernier.

Nous avions aussi indiqué que, au fur et à mesure de la concertation, nous souhaitions remplacer les habilitations à prendre des ordonnances par des articles de loi.

C’est ce qui s’est produit tout au long du processus parlementaire, d’abord à l’Assemblée nationale, puis en commission au Sénat.

Ainsi que M. le rapporteur vient de le souligner, les dispositions importantes de la loi sont à présent développées sous forme d’articles.

Les ordonnances ne concernent plus que des dispositions techniques ou d’application des mesures législatives. Ces habilitations sont nécessaires pour assurer le bouclage de la réforme, mais, je le redis, l’essentiel figure maintenant dans le dur du texte.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 49 et 243.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 115 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 92
Contre 248

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 79, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Après les mots :

groupe public ferroviaire

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

dans l’objectif de réunifier le système ferroviaire en garantissant l’unicité économique, sociale et technique du groupe :

II. – Alinéas 2 à 16

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Lors des débats sur la loi ferroviaire du 4 août 2014, pour ne reprendre que la législation la plus récente, la nécessité d’un groupe ferroviaire unifié a enfin été reconnue. Après dix-sept années d’éclatement de notre système ferroviaire, un constat s’est imposé : le démembrement du service public a entraîné une dégradation sans précédent du réseau, des fermetures de ligne et une baisse certaine de la qualité de service. Le cloisonnement des métiers et des personnels ainsi que le recours massif à la sous-traitance d’activités essentielles ont mis à mal la complémentarité des métiers et des savoirs, ce qui a abouti à des inquiétudes, des souffrances et des dysfonctionnements.

Pour notre part, dans une démarche constante et cohérente, nous n’avons jamais cessé de pointer les lacunes de la réforme de 1997 : poids des intérêts divergents de RFF et de la SNCF, perte d’énergie dans la gestion des relations entre deux entreprises publiques, qui devaient logiquement travailler ensemble, et remise en cause de la légitimité des cheminots. La séparation en trois EPIC, qui annonçait l’éclatement de la SNCF et sa privatisation, loin de l’objectif d’amélioration du système ferroviaire, a seulement multiplié les structures de coordination, d’arbitrage ou de consultation.

Comme cela a été largement souligné, la gestion par activité n’est pas pertinente dans un système ferroviaire mixte, où les trains de toute nature empruntent les mêmes voies, où les locomotives et les conducteurs peuvent tracter tout type de matériel roulant et au sein duquel l’exploitation ferroviaire est assurée par les agents de la même filière, quels que soient les trains.

En bref, il ne s’agissait à l’époque que de préparer la vente à la découpe du rail français. En effet, la privatisation des services publics en réseau a été systématiquement accompagnée du démantèlement de l’opérateur historique en plusieurs entités.

Nous pensons que l’intégration étroite et réelle est la seule voie raisonnable et pragmatique, ni idéologique ni régressive, pour assurer l’efficacité indispensable de ce grand service public qu’est le chemin de fer français. C’est pourquoi une nouvelle réforme de l’entreprise historique ne doit avoir pour seul objectif que de mettre fin à une organisation qui a déjà démontré son inefficacité. Le service public que nous défendons englobe non seulement l’offre de services, la gestion et le déploiement des réseaux, mais aussi la gestion des gares et du patrimoine ferroviaire.

M. le président. L’amendement n° 80, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Après les mots :

groupe ferroviaire

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et garantir son développement, afin de favoriser un développement harmonieux des territoires et la réalisation des engagements de la France en matière de lutte contre le réchauffement climatique :

II. – Alinéas 2 à 16

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Le 28 février dernier, le CESE a rendu un avis alarmant sur l’application de la loi relative à la transition énergétique votée en 2015. Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030 et de 75 % à l’horizon de 2050 seront inatteignables en l’absence d’investissements majeurs, notamment dans les alternatives aux transports routiers individuels.

Le présent projet de loi s’inscrit dans un mouvement inverse, alors que nous savons que notre réseau ferroviaire est un atout majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique – nous l’avons dit tout à l’heure – et, plus localement, pour la qualité de l’air dans nos métropoles. C’est également ce qu’expliquent, dans une tribune au Monde, Pascal da Costa et Elwyn Sirieys, respectivement enseignant-chercheur et élève ingénieur à CentraleSupélec – peut-être leur accorderez-vous un crédit légèrement supérieur à celui que vous accordez aux syndicats ou aux parlementaires que nous sommes…

De toutes les critiques adressées au projet de réforme, le respect de l’environnement est celle dont on parle sans doute le moins. Or, comme l’étayent ces deux scientifiques, alors que le réseau ferroviaire représente aujourd’hui près de 10 % du volume de transport sur le territoire métropolitain, il n’est à l’origine que de 0,52 % du CO2 imputable aux transports et de 6 % des émissions de particules fines de type PM10.

Le refus du Gouvernement de reprendre à son compte des objectifs du Grenelle de l’environnement, qui proposait de faire passer la part modale du non-routier et du non-aérien de 14 % à 25 % d’ici à 2022, et la volonté affichée de restreindre le domaine de pertinence du ferroviaire à partir de considérations financières et comptables emportent des conséquences dangereuses sur le plan de la santé publique et de la préservation de l’environnement. C’est pourquoi nous proposons, avec cet amendement, de favoriser une politique ambitieuse et cohérente de développement du système ferroviaire, qui est un levier majeur de progrès pour notre pays, que ce soit en termes économique, industriel, social et – définitivement ! – environnemental.

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié sexies, présenté par MM. Malhuret, Fouché et Laménie, Mme Goy-Chavent, MM. Piednoir, Babary, Kern, Longeot et Moga, Mmes C. Fournier et Bruguière, MM. L. Hervé et Gremillet, Mmes Bories et Garriaud-Maylam, MM. Dennemont, Mizzon, Delcros, Savin et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Après les mots :

transport ferroviaire

insérer les mots :

et dans le respect des engagements de la France dans la lutte contre le réchauffement climatique

La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. À l’article 1er A du projet de loi, l’adoption d’un amendement de notre groupe a permis d’inscrire la lutte contre le réchauffement climatique dans les objectifs de la SNCF.

Le présent amendement est complémentaire : il vise à préciser le contexte de l’habilitation donnée au Gouvernement pour prendre des ordonnances, en inscrivant la lutte contre le réchauffement climatique comme cadre des décisions à prendre concernant l’avenir du rail français.

En France, le secteur des transports est le principal émetteur de CO2 avec 39 % des émissions totales de gaz à effet de serre, en augmentation de 10 % depuis 1990. Face à l’urgence écologique, le développement de modes de transport décarbonatés et verts est essentiel. Le train est dix fois moins émetteur de CO2 que la voiture, cinquante fois moins que l’avion. Il convient donc, dans le cadre des ordonnances qui seront prises, que la redéfinition du rail français aille de pair avec une politique de verdissement des transports.

M. le président. L’amendement n° 81, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 16

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement concerne la méthode utilisée, celle des ordonnances, en particulier au sujet de l’ouverture à la concurrence et de la transformation de la SNCF en société anonyme.

Je profite de cette occasion, madame la ministre, pour évoquer l’Europe : l’ouverture à la concurrence n’est pas une obligation européenne, c’est un choix politique !

Depuis sa modification du 14 décembre 2016, le règlement relatif à l’ouverture du marché des services nationaux de transport de voyageurs par chemin de fer prévoit bien, en ce qui concerne les obligations de service public dans l’Union européenne – ce qu’on appelle les OSP –, que la concurrence doit être la règle, mais avec quelques exceptions notables… Ainsi, le paragraphe 4 bis de l’article 5 de ce règlement prévoit dorénavant que « l’autorité compétente peut décider d’attribuer directement des contrats de service public relatifs à des services publics de transport de voyageurs par chemin de fer lorsqu’elle considère que l’attribution directe est justifiée par les caractéristiques structurelles et géographiques pertinentes du marché et du réseau concernés, […], et lorsqu’un tel contrat aurait pour effet d’améliorer la qualité des services ou le rapport coût-efficacité, ou les deux ».

Vous voyez donc bien que la mise en concurrence, qui vous conduit à utiliser la méthode des ordonnances et à créer des sociétés anonymes, n’est pas imposée par un texte européen ; c’est un choix ! Certes, ce choix est partagé par des majorités politiques dans d’autres pays, mais cela reste une volonté du Gouvernement.

Vous faites le choix de la « concurrence libre et non faussée », alors qu’il existait d’autres possibilités et que nous n’étions pas dans l’obligation d’ouvrir à la concurrence. D’ailleurs, j’espère que l’Angleterre va décider de renationaliser le secteur ferroviaire !

M. le président. L’amendement n° 174, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, le cas échéant, par la voie de la transformation en sociétés de ces établissements

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement vise à apporter une précision dans la rédaction de l’habilitation pour assurer la continuité juridique des personnes morales dans le processus de transformation des EPIC en sociétés anonymes.

M. le président. L’amendement n° 259, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer les mots :

des sociétés

par les mots :

de la société nationale

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. L’amendement n° 82, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Après la seconde occurrence du mot :

représentation

insérer le mot :

significative

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Avec cet amendement, nous vous proposons de réfléchir à la composition des organes sociaux des futures sociétés anonymes du groupe public ferroviaire.

Nous sommes satisfaits – une fois n’est pas coutume – que le Gouvernement ait proposé un amendement précisant ses intentions en la matière, en prévoyant la présence, au sein des organes de gouvernance du groupe public ferroviaire, des collectivités territoriales, des autorités organisatrices, des associations d’usagers, ainsi que des représentants des personnels. Nous proposons simplement de préciser que cette représentation doit être significative. Il s’agit d’un enjeu important en termes de démocratisation, qui nous permettrait aussi d’obtenir une meilleure adéquation entre les besoins de mobilité de nos concitoyens et la politique menée par l’entreprise historique.

Je rappelle, à ce titre, que l’article 13 d’une proposition de loi que notre groupe a déposée le 16 mai 2012 prévoyait même que le conseil d’administration de la SNCF soit composé majoritairement de représentants des salariés, des usagers et des élus. Il s’agissait pour nous de prendre en compte la vision décentralisée du service de transport et de permettre aux salariés, comme aux usagers et aux élus, d’avoir une voix prépondérante pour que la politique de transport soit non pas guidée par des impératifs d’austérité budgétaire – cela a trop longtemps été le cas –, mais par les exigences de service public que porte l’ensemble des acteurs du quotidien du ferroviaire : les usagers, les personnels et les organisateurs de transport.

Nous opposons aux politiques de concurrence des politiques de complémentarité, de meilleures réponses aux besoins de mobilité et de limitation des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi – tel est l’objet de cet amendement – des objectifs de démocratisation des organes de décision des entreprises effectuant des missions de service public et détenues par la puissance publique.

À nos yeux, tout l’intérêt de la maîtrise publique réside bien dans cette exigence d’un meilleur contrôle citoyen d’une entreprise financée par l’impôt et qui est l’outil de la Nation pour répondre aux besoins de nos concitoyens. Aujourd’hui, trop de décisions ayant un impact direct sur le service public sont prises dans l’opacité par un nombre réduit de personnes, dont les intérêts sont identiques : réduire le coût de l’opérateur public. Nous n’acceptons pas la répétition de ce scénario, encore moins son accentuation, prévue par les réformes en cours.

M. le président. L’amendement n° 39, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Nous demandons la suppression de l’alinéa 13 adopté par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui prévoit que le Gouvernement pourra fixer, par voie d’ordonnance, les règles d’investissement de SNCF Réseau dans le cadre de l’ouverture à la concurrence prévue pour 2020. Nous pensons que ce rôle appartient au Parlement. À cet égard, la loi de 2014 était claire : les investissements de développement du réseau ferré national sont évalués au regard de ratios définis par le Parlement, et non fixés par décret ou ordonnance.

Depuis des années, nous dénonçons le sous-investissement dans le réseau ferré. L’ouverture à la concurrence ne changera pas la donne ! Ce qu’il manque, c’est une politique volontariste d’investissements publics massifs. En effet, par nécessité d’améliorer la qualité du réseau, SNCF Réseau peut être amenée à réaliser des investissements, dont la finalité première ne serait pas la rentabilité – c’est bien la limite de la notion de règle d’or –, et à sélectionner des projets d’investissements selon des règles comptables obscures.

La question n’est pas seulement celle de la trajectoire financière de SNCF Réseau, mais aussi celle des ressources nouvelles. Il est nécessaire d’acter de manière pérenne les priorités d’investissements ferroviaires de manière transparente et sur le long terme. C’est bien ce qui manque aujourd’hui en matière de politique industrielle.

De nouvelles ressources sont envisageables, et nous avions fait de nombreuses propositions : par exemple, solliciter l’épargne populaire dans le cadre d’un « livret vert » dédié au financement des infrastructures de réseaux ou mettre à contribution les sociétés d’autoroute, dont les profits sont particulièrement insolents. La liste n’est pas exhaustive !

La priorité doit être donnée à la régénération du réseau ferroviaire et non à enserrer SNCF Réseau dans des contraintes budgétaires décidées loin des besoins des usagers et de nos territoires. Pis, nous ne pensons pas que le système ferroviaire peut s’autofinancer – c’est le propre de ce service public, structurant pour notre territoire.

Madame la ministre, vous pouvez prendre le problème dans tous les sens, mais avoir un réseau de qualité avec un maillage territorial fin qui répond aux nouvelles exigences de mobilité coûte très cher, et le privé ne fera pas de miracle. C’est bien le désengagement de l’État qui est à l’origine de la dette de SNCF Réseau.

Cette disposition va à l’encontre d’un développement équilibré de notre réseau ferroviaire. C’est pourquoi nous vous invitons à supprimer cet alinéa de l’article 1er.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. L’intention des auteurs de l’amendement n° 79 – garantir l’unité économique du groupe SNCF et mettre fin à la séparation entre la gestion de l’infrastructure et l’exploitation des services de transport – est manifestement contraire au droit européen, qui, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, impose la séparation de ces activités. L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 80 est, à mon sens, satisfait. En effet, grâce aux efforts de M. Dantec,…

M. Gérard Cornu, rapporteur. … nous avons ajouté dans le dur de la loi la lutte contre le réchauffement climatique dans les objectifs de la SNCF. Cela rend donc inutile d’inscrire un objectif identique au niveau de l’habilitation.

C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

Il en est de même pour l’amendement n° 4 rectifié sexies, qui vise lui aussi à conforter les engagements pris par la France dans la lutte contre le changement climatique.

L’adoption de l’amendement n° 81 reviendrait à vider de la quasi-totalité de sa substance l’habilitation donnée au Gouvernement de légiférer par voie d’ordonnance pour déterminer les modalités de transformation du groupe public ferroviaire, qui est prévue à l’article 1er A.

L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 174 du Gouvernement – je sais que je suis attendu là-dessus… – vise à rétablir une précision : l’habilitation à légiférer par voie d’ordonnance prévue à l’article 1er permet de déterminer les conditions du transfert des biens, droits et obligations des établissements publics, « le cas échéant, par la voie de la transformation en sociétés de ces établissements ».

Cet ajout me gêne beaucoup, car j’ai du mal à comprendre son utilité. En effet, nous avons inscrit dans le dur, à l’article 1er A, le principe de la transformation des établissements publics du groupe public ferroviaire en sociétés anonymes. Par ailleurs, il est déjà clairement indiqué que l’habilitation doit permettre le transfert des biens, droits et obligations des établissements publics aux nouvelles sociétés anonymes.

Par principe, nous sommes attentifs à ce qu’une habilitation donnée au Gouvernement de légiférer par ordonnance, qui constitue une procédure exceptionnelle, soit limitée au strict nécessaire. D’ailleurs, cette position vaudra pour d’autres habilitations que nous aurons à examiner durant nos débats.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 82 vise à préciser que la représentation des collectivités territoriales au sein de la gouvernance des entités du groupe public unifié devra être « significative ». Franchement, cette formulation, sauf à la définir plus précisément, ne me paraît pas très opérationnelle et peut être interprétée de nombreuses manières. Je suggère d’en rester à la rédaction actuelle.

L’avis de la commission est donc défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 39, Mme Assassi et M. Gontard, qui ont beaucoup travaillé sur le projet de loi, vont peut-être obtenir une certaine satisfaction…

Cet amendement vise à supprimer l’habilitation donnée au Gouvernement pour déterminer par voie d’ordonnance les règles de financement des investissements de SNCF Réseau. Or ces règles ont été précisées dans le texte de loi grâce à l’adoption de l’amendement n° 254 présenté par le Gouvernement. Certes, les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste ne voulaient pas nécessairement que cette règle d’or soit adoptée, mais le fait est qu’il n’y a pas lieu de maintenir l’habilitation à légiférer par voie d’ordonnance sur ce point.

Par conséquent, j’émets un avis favorable sur cet amendement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Éliane Assassi. Vous êtes malin !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. L’avis est défavorable sur les amendements nos 79 et 80, qui visent à revenir sur la nouvelle organisation de la SNCF. Il en est de même pour l’amendement n° 81, qui poursuit le même objectif.

L’amendement n° 4 rectifié sexies vise à inscrire la lutte contre le changement climatique dans le cadre de l’habilitation. Je demande son retrait, car le Sénat a déjà introduit ce point dans le texte de loi.

J’ai compris que je n’avais pas convaincu le rapporteur sur l’amendement n° 174 que j’ai présenté au nom du Gouvernement…

Avis favorable sur l’amendement n° 259 du rapporteur.

L’amendement n° 82, qui tend à compléter les dispositions sur la représentation des usagers et des salariés, contient une précision qui n’apporterait rien de particulier.

M. Gérard Cornu, rapporteur. Elle n’est pas significative…

Mme Élisabeth Borne, ministre. Elle créerait même de la confusion. Je rappelle que le projet de loi prévoit déjà de légiférer par ordonnance pour assurer une représentation adaptée des différentes parties prenantes.

Je m’étonne tout de même, madame Gréaume, que vous estimiez que les décisions sont prises de manière opaque. Je vous rappelle que, depuis la loi relative à la démocratisation du secteur public et l’ordonnance de 2014, les conseils d’administration sont composés d’au moins un tiers de représentants des salariés, et ce sera encore le cas demain. La présence de ces représentants devrait vous donner une certaine visibilité sur les décisions qui se prennent dans les organes de gouvernance de la SNCF…

En ce qui concerne l’amendement n° 39, j’émets, comme le rapporteur, un avis favorable, non pas pour les raisons exposées lors de sa présentation, mais parce que la règle d’or a été introduite dans le texte de loi grâce à l’amendement n° 254.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Gay, l’amendement n° 80 est-il maintenu ?

M. Fabien Gay. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 80 est retiré.

Monsieur Fouché, l’amendement n° 4 rectifié sexies est-il maintenu ?

M. Alain Fouché. Je le maintiens, parce qu’il a été cosigné par de nombreux sénateurs appartenant à plusieurs groupes politiques.

Le rapporteur critiquait la procédure des ordonnances ; cet amendement vise justement à garantir que cette procédure soit correctement encadrée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié sexies.

(Lamendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Ronan Dantec applaudit également.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 81.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 174.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 259.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote sur l’amendement n° 39.

M. Pierre Laurent. Depuis le début de nos travaux, le rapporteur fait une distinction entre le texte de loi, le « dur », et les ordonnances, qui seraient le « moins dur »… En vérité, tous les sujets abordés dans l’habilitation donnée au Gouvernement de légiférer par ordonnance sont très lourds !

Je comprends bien l’habileté de la droite, qui affirme qu’elle a préservé l’essentiel, en particulier en ce qui concerne la place du Parlement, mais, dans les faits, il y a un jeu de rôle entre elle et le Gouvernement, car toutes les dispositions, qu’elles soient dans le « dur », comme vous dites, ou dans les ordonnances, vont dans le même sens : la déréglementation. On le voit bien à l’occasion de cet amendement n° 39.

Monsieur le rapporteur, vous émettez un avis favorable sur cet amendement au motif que le Sénat a déjà inscrit la règle d’or dans le texte de loi. Or vous savez pertinemment que nous combattons cette disposition. C’est pourquoi nous retirons l’amendement n° 39.

M. le président. L’amendement n° 39 est retiré.

M. Gérard Cornu, rapporteur. J’en reprends le texte, monsieur le président, parce qu’il faut supprimer cette habilitation à légiférer par ordonnance sur le sujet.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 268, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 39.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 83, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement concerne la négociation collective et le statut des cheminots.

Tout à l’heure, le Gouvernement et la commission nous ont dit que, le problème, ce n’était pas le statut, mais d’abord la convention collective. Dont acte ! Mais il y a un petit oubli, madame la ministre : avec votre loi Travail II, vous avez changé le code du travail. À partir de là, il peut y avoir des accords d’entreprise qui dérogent aux conventions collectives. On voit donc bien ce qui va arriver, ce qui est rampant – c’est clair ! – avec la filialisation du secteur ferroviaire. C’est pourquoi, nous, nous défendons le statut tel qu’il est, en le tirant vers le haut, et la négociation collective.

M. le président. L’amendement n° 84, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Compléter cet alinéa par les mots :

en vue de promouvoir l’emploi au cadre permanent

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Cet amendement nous permet de revenir sur la question du statut. Comme aucune réponse ne nous a encore été apportée sur ce sujet, je vais avancer un autre argument.

Nous pensons que le statut contribue aussi au nombre particulièrement faible des accidents de circulation constatés à la SNCF, nombre bien éloigné – faut-il le souligner ? – de ce qui est observé dans le transport routier soumis aux contraintes du « juste-à-temps » sur des parcours aléatoires et bien plus accidentogènes.

Plutôt que de se demander s’il ne faudrait pas mettre un terme à l’emploi à vie qui découle du statut, il conviendrait de procéder à un renversement dialectique, en se demandant ce que l’expérience du statut des cheminots peut nous apprendre pour le monde du travail en général, notamment sur l’aspiration de plus en plus forte pour une sécurité sociale professionnelle, comme le dit la CGT, ou une sécurité emploi-formation pour utiliser une autre expression.

On ne construit pas une économie développée digne de ce nom sur les ruines du droit du travail et l’extension permanente de la précarité et de la flexibilité, qui imposent au quotidien leur dure loi à des salariés en guerre les uns contre les autres.

Le progrès économique de notre pays réside dans la qualité des statuts et des positions accordés aux salariés ; il découle de leur capacité à échanger, à coopérer et à partager leurs compétences et leurs qualifications pour le bien de la communauté que constitue l’entreprise et, dans le cas du transport ferroviaire, de la collectivité dans son ensemble.

Mettre à mal le statut des cheminots – faut-il le dire ? – ne va rien régler des conditions de travail des chauffeurs routiers, des employés des compagnies d’autocar, ni, j’en suis sûr, des éventuels employés des compagnies ferroviaires qui viendraient concurrencer la SNCF. Le recul des droits des uns ne s’est jamais traduit, depuis la première réforme des retraites version Balladur, par l’avancée des droits des autres, car cette course au moins-disant social se paie toujours en fin de compte. Regardez, par exemple, ce qui s’est passé dans la téléphonie mobile.

Embauchons donc à la SNCF au statut, garantie et gage de qualité pour le service public, autant que pour les intéressés !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 83.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 84.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote sur l’article.

M. Jean-Michel Houllegatte. Madame la ministre, je suis désolé, mais je vais faire du Fabien Gay, avec qui je partage une même passion pour le rugby : vous n’avez pas répondu à ma question ! Pourquoi le Gouvernement a-t-il prévu au troisième alinéa de cet article le retour à l’État de tout ou partie des biens des EPIC ? N’y a-t-il pas un risque de voir SNCF Réseau dépossédée d’une partie de ses biens et qu’elle ne soit plus affectataire unique des infrastructures ferroviaires ?

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’article.

M. Olivier Jacquin. Je vais moi aussi faire du Jean-Michel Houllegatte, lui qui vient de fêter ses soixante ans (Sourires.), en reposant à Mme la ministre ma question sur les moyens dont disposera l’État pour exercer ses fonctions, élargies dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, d’autorité organisatrice. Je tiens à rappeler que, pour les transports régionaux, l’État n’est pas concerné, mais, s’agissant des trains d’équilibre du territoire et, surtout, de ce qui sera en open access, c’est l’État qui sera autorité organisatrice. Quels moyens aura le ministère des transports ?

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 116 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 249
Contre 92

Le Sénat a adopté.

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 21 rectifié quinquies

Articles additionnels après l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 26, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 2102-5 du code des transports est ainsi rédigée : « Le projet de contrat-cadre et les projets d’actualisation sont soumis pour avis à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, au Conseil économique, social et environnemental et au Parlement. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement a un objectif simple : compléter le code des transports afin de donner au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental un droit de regard et d’intervention sur la mise en œuvre de la politique ferroviaire, d’une part, en veillant particulièrement au contenu des contrats-cadres signés entre l’État et l’entreprise nationale SNCF et, d’autre part, en leur conférant un pouvoir d’avis sur ces projets de contrat et d’actualisation de ces mêmes contrats.

Nous souhaitons ainsi nous assurer que ces contrats intègrent bien les attentes des pouvoirs publics, permettent le développement du service public et apportent des réponses effectives aux besoins en transport des usagers et des territoires. Qui mieux que la représentation nationale peut garantir cette prise en compte ? Actuellement, le projet de contrat-cadre n’est transmis qu’à l’ARAFER, ce qui nous semble extrêmement limité et insuffisant.

Cette exigence semble rendue d’autant plus impérieuse par le changement de statut des entreprises publiques constituant le groupe public ferroviaire. Il importe que les organes démocratiques que sont le Parlement et le CESE soient associés étroitement à la préparation du futur contrat-cadre et de son actualisation, qui aura lieu en 2020. Celle-ci devra nécessairement prendre en considération les changements de mission du groupe ferroviaire. C’est un élément de transparence et de démocratie, sur lequel, je l’espère, nous arriverons à nous mettre d’accord.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Le droit en vigueur prévoit déjà que le projet est transmis au Parlement, avec l’avis de l’ARAFER, ce qui permet à chaque assemblée de répondre comme elle le souhaite à cette transmission, notamment en organisant un débat ou une communication sur le sujet. Il ne me semble donc pas utile de prévoir un avis du Parlement.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Il s’agit non pas seulement de débattre, mais aussi d’avoir un droit d’intervention, ce qui a des conséquences sur la prise de décision.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 26
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Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 87

M. le président. L’amendement n° 21 rectifié quinquies, présenté par MM. Malhuret, Fouché et Laménie, Mme Goy-Chavent, MM. Piednoir, Babary, Kern, Longeot et Moga, Mme Bruguière, MM. L. Hervé et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 4 du chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code des transports est ainsi modifiée :

1° Après l’article L. 2141-13, il est inséré un article L. 2141-13-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-13-… – Les revenus issus de l’activité de gestion domaniale mentionnée à l’article L. 2141-13 doivent être traités de façon transparente dans des comptes distincts de ceux affectés à l’activité de transport. » ;

2° À la première phrase de l’article L. 2141-15-1, les mots : « de SNCF Mobilités » sont remplacés par les mots : « de tout candidat ou entreprise ferroviaire ».

La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. La réforme ferroviaire prévoit d’introduire SNCF Mobilités dans le champ de la concurrence. Dans cette optique, SNCF Mobilités ne devrait plus bénéficier de prérogatives qui pourraient constituer, dans cette nouvelle configuration, un avantage anticoncurrentiel par rapport aux autres compagnies. Il convient donc de supprimer ces prérogatives de gestion domaniale laissées à SNCF Mobilités, en modifiant le code des transports. Ces facilités doivent être réservées à l’EPIC de tête SNCF et à Gares & Connexions.

Conformément à l’article L. 2141-13 du code des transports, SNCF Mobilités est compétente pour assurer la gestion domaniale de certains biens immobiliers appartenant à l’État ou qui lui sont confiés par convention avec l’État ou l’EPIC SNCF. Ces dispositions facilitent l’accès à des terrains ou à des logements qui peuvent être nécessaires au bon développement des services ferroviaires.

Cette activité, qui constitue une activité commerciale, produit des revenus au profit de SNCF Mobilités. Dès lors, afin de garantir une concurrence équitable entre toutes les entreprises ferroviaires, il nous semble nécessaire d’inscrire dans le code des transports les principes résultant des règles de la comptabilité publique, qui imposent à tout opérateur en situation de monopole ou bénéficiant d’une position dominante d’établir des règles strictes de séparation comptable. En d’autres termes, il convient de garantir une stricte séparation entre les flux financiers issus de la gestion domaniale et ceux qui sont affectés à l’exploitation d’un service de transport.

La deuxième partie de l’amendement vise à garantir que les biens immobiliers utilisés par SNCF Mobilités et nécessaires à la poursuite des missions de transport doivent pouvoir être cédés à l’autorité organisatrice et mis à disposition de tout candidat ou entreprise ferroviaire, et ce afin de prévenir tout avantage anticoncurrentiel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement serait difficile à mettre en œuvre s’il était adopté. Il tend à prévoir que les revenus que tire SNCF Mobilités de la gestion de ses biens immobiliers figurent dans des comptes distincts de ceux qui sont affectés à son activité de transport.

La transformation de SNCF Mobilités en société anonyme nécessitera de revoir le régime des biens immobiliers qui lui sont affectés, en particulier des biens relevant du domaine public, qui pourront, le cas échéant, être transférés à l’État. Tel est d’ailleurs l’objet de l’habilitation prévue à l’article 1er.

C’est un point technique qui mérite d’être approfondi. Il est par conséquent préférable, à mon sens, d’en rester à la rédaction actuelle du projet de loi. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Les questions ayant trait à la domanialité nécessitent effectivement un travail approfondi. Elles seront traitées dans le cadre des ordonnances prévues à l’alinéa 16 de l’article 1er. Sachez que l’affectation et le régime des biens au sein des différentes entités du groupe SNCF respecteront bien évidemment les règles en matière de droit de la concurrence. De ce point de vue, il faudra prévoir un traitement différent pour SNCF Réseau et la filiale chargée de la gestion des gares, qui resteront en situation de monopole, et les entités entrant dans le champ concurrentiel.

Monsieur le sénateur, je vous invite à retirer votre amendement pour nous laisser le temps d’approfondir les règles de gestion domaniale. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Fouché, l’amendement n° 21 rectifié quinquies est-il maintenu ?

M. Alain Fouché. Compte tenu des explications de Mme la ministre et de M. le rapporteur, je le retire.

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 21 rectifié quinquies
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Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 90

M. le président. L’amendement n° 21 rectifié quinquies est retiré.

L’amendement n° 87, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la première phrase du sixième alinéa du II de l’article 11 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Afin de répondre à la demande de trafic ferroviaire par wagons isolés, ce système de production est déclaré d’intérêt général. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Nous en revenons, là encore, à l’une de nos propositions pour un pacte ferroviaire au service de la transition énergétique et écologique.

Nous souhaitons que soit déclaré d’intérêt général le fret ferroviaire, notamment l’activité de wagon isolé, afin de permettre non pas la recapitalisation de Fret SNCF, fusil à un coup dont l’objectif est de faire passer la filialisation-privatisation, mais bien le financement pérenne par l’État. Les institutions européennes bougent et évoluent en ce sens, comme en témoigne l’exemple italien. Il ne s’agit donc pas d’un simple amendement déclaratoire, mais bien d’un amendement aux conséquences précisées et directes : la possibilité pour l’État français de subventionner cette activité. Nous ne comprenons pas l’acharnement du Gouvernement et de la majorité sénatoriale à refuser de traiter cette question, reportant les enjeux sur d’autres sujets.

La réalité est simple : la concurrence que vous imposez n’est pas compatible avec les enjeux environnementaux que nous défendons. Nous sommes en train de rater le coche, comme le prouve l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre sur notre territoire. Pourtant, l’enjeu est de taille. Selon plusieurs rapports, le volume de marchandises à transporter devrait être multiplié par trois au cours des quinze prochaines années. On assistera donc, globalement, à une explosion du transport de marchandises. Or, aujourd’hui, le fret ferroviaire ne représente que 10 % de ce trafic, alors que l’on avait fixé un objectif général de 25 %.

Nous avons un boulevard. Il existe des besoins immenses d’investissement dans cette activité pour provoquer son essor : la remise à niveau des triages, des machines, des trains, des efforts concernant les infrastructures, mais également l’offre pour la développer. Permettre son subventionnement par l’État n’est donc pas une solution à rejeter d’un revers de main.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Gontard, il ne s’agit pas d’un acharnement de la majorité sénatoriale. C’est en fait le droit européen qui ne permet pas d’écrire ce que vous proposez.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. La relance du fret ferroviaire a besoin d’une politique d’ensemble et non d’une déclaration de principe inscrite dans un projet de loi. Je mène ce combat au niveau européen pour restaurer les conditions d’une concurrence loyale, tant sur le plan social qu’en matière de financement des infrastructures.

Cela passe aussi par des choix d’investissement que nous aurons à faire, notamment dans la continuité des travaux du Conseil d’orientation des infrastructures. Il s’agit d’avoir des sillons de qualité, une politique de péage adaptée et de promouvoir une politique d’aide au transport combiné.

C’est l’ensemble de ces éléments qui constitue le plan de relance du fret ferroviaire que je présenterai prochainement.

Je voudrais redire que le mouvement social actuel met en grande difficulté notre fret ferroviaire et les entreprises qui en dépendent.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Tout à fait !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je pense que la situation actuelle ne contribue pas à donner confiance dans le fret ferroviaire, et donc dans sa relance. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 87.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 117 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 263
Pour l’adoption 15
Contre 248

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 90, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’État, majoritairement représenté au conseil de surveillance de la SNCF, propose au directoire, et notamment au vice-président représentant SNCF Réseau, l’instauration d’un moratoire sur la fermeture des gares de triage, les points de desserte fret et la suppression des effectifs à Fret SNCF.

La parole est à M. Pierre Laurent.

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 87
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 89

M. Pierre Laurent. Madame la ministre, les cheminots apprécieront sûrement la déclaration que vous venez de faire. Vous les rendez responsables de la situation, alors que c’est l’ouverture à la concurrence qui a divisé par deux la part du fret ferroviaire dans le transport de marchandises.

Depuis quinze ans, 400 gares de triage et points de desserte ont fermé. Ce n’est pas la grève des cheminots qui a conduit à cette situation : c’est la politique d’ouverture à la concurrence ! Puisque vous continuez d’affirmer votre attachement à une relance de la politique du fret, vous serez d’accord avec notre amendement, qui a pour objet d’instaurer un moratoire sur la fermeture de ces gares de triage et points de desserte. Vous savez très bien que, si la fermeture de ces infrastructures continue, cela coûtera extrêmement cher et rendra plus difficile encore la relance du fret ferroviaire dans notre pays.

Nous enverrions un signal fort en décidant un tel moratoire, ce qui nous donnerait des atouts supplémentaires dans la politique de reconstruction nécessaire du fret ferroviaire. De toute façon, elle sera indispensable, mais nous espérons qu’elle sera mise en œuvre avant que la catastrophe climatique et environnementale causée par l’envahissement des camions n’ait causé trop de ravages sur les routes de France et d’Europe.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Laurent, je partage vos préoccupations sur l’avenir du fret, mais je partage également les propos de Mme la ministre.

Cette grève perlée, comme on dit, ne nous aide vraiment pas. Je n’accuse personne, mais je crains que cette grève longue ne provoque de sacrés dégâts dans le fret ferroviaire.

M. Pierre Laurent. Votez cet amendement et vous enverrez un signal positif !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Les déclarations ne suffisent pas.

Vous allez voir les conséquences de cette grève pour le fret. On reparlera dans quelque temps des responsabilités…

Cela étant, cet amendement contient une injonction au Gouvernement, ce qui n’est pas conforme au principe de séparation des pouvoirs. Il ne relève pas du domaine de la loi de régler ces différents sujets. L’avis est donc défavorable.

Je le répète, je suis très préoccupé par l’avenir du fret avec ce qui se passe actuellement.

Mme Éliane Assassi. Vous ne prenez pas le bon chemin pour régler le problème !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je ne peux pas partager l’idée d’un moratoire. L’activité de fret ferroviaire est fortement dépendante des évolutions structurelles des secteurs industriels et agricoles. Il est donc indispensable que les outils de production de transport de marchandises que sont les gares de triage et les points de desserte puissent tenir compte des évolutions de l’économie.

Il n’en demeure pas moins que je suis particulièrement attentive aux changements apportés sur ces sites, qui ont besoin d’être remis en état, tout comme le réseau ferré principal. Dans le cadre du plan de relance du fret ferroviaire que je présenterai prochainement, il y aura un programme d’investissements pour les voies de service, afin de rénover ces sites. En attendant, je ne pense pas que l’on serve le fret ferroviaire en figeant les outils de production. Il faut au contraire savoir les faire évoluer, je le répète, pour tenir compte des évolutions de l’économie.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je m’abstiendrai sur cet amendement.

Depuis des années, on le sait, des voies ont malheureusement été démontées sur des sites de triage dans beaucoup d’endroits. De l’autre côté, même si je respecte le droit de grève, des clients rencontrent des difficultés d’acheminement. L’un de nos collègues avait évoqué le problème lors d’une question d’actualité. C’est le cas dans l’agroalimentaire, avec les silos, par exemple. Le trafic du fret est réellement perturbé. Il risque donc de perdre encore des clients, comme la branche voyageurs, d’ailleurs.

Soyons extrêmement prudents, car il y va de l’avenir de la SNCF et de son personnel. Je me permets d’insister modestement sur ce point.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Mettre en place un moratoire ne veut pas dire geler les outils de production. Vous devriez plutôt prendre notre amendement comme point d’appui pour votre future loi, madame la ministre. Je me réjouis d’ailleurs de vous avoir entendu dire dans l’hémicycle que vous alliez présenter une loi pour relancer le fret ferroviaire, même si nous serons très attentifs à son contenu, car, comme l’a dit Pierre Laurent, nous assistons depuis quinze ans à une casse du fret et nous entendons depuis des années des promesses, dont aucune n’est tenue. Nous allons finir par arriver à un point de non-retour, ce qui sera grave pour la santé publique.

Monsieur le rapporteur, vous nous dites : vous allez voir, les grévistes vont mettre en péril le fret ferroviaire. Mais enfin, à quoi est due la grève, qui est, rappelons-le, l’exercice d’un droit démocratique ? Elle est causée par une réforme qui heurte de plein fouet le statut des cheminots et le service public. Parmi les voyageurs qui sont effectivement gênés parfois par cette grève, j’en vois qui soutiennent le mouvement, car il y va de l’intérêt public d’avoir des trains qui arrivent à l’heure et de meilleures conditions de transport. Sinon, il n’y aurait pas ce degré d’adhésion du public ! (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) Arrêtez d’asséner des contre-vérités !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 90.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 90
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 93

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 89, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement avant le 31 juin 2018 un rapport sur l’opportunité de créer de nouvelles sources de financement au bénéfice du système ferroviaire et notamment de l’Agence de financement des infrastructures de transport en France. À ce titre, le rapport évalue notamment l’intérêt d’une renationalisation des concessions d’autoroutes, de la création d’un livret de financement des infrastructures ainsi que de la mise en œuvre d’une écotaxe sur les poids lourds.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Nous avions déjà proposé cet amendement lors de la discussion de la proposition de loi de M. Maurey voilà deux mois. Son objet est simple : créer de nouvelles ressources afin de pérenniser les financements du système ferroviaire à la fois pour le désendetter et pour renforcer l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.

Créée en 2004, l’AFITF a très vite été vidée de sa substance et des moyens qui lui étaient alloués, notamment avec la privatisation des autoroutes – nous en avons déjà parlé dans cet hémicycle –, à tel point que la Cour des comptes estime aujourd’hui qu’il s’agit d’une coquille vide. Autant dire que cette agence n’a pas les moyens de ses ambitions, lesquelles, d’ailleurs, sont réduites à très peu. En effet, il manquerait dans son budget, pour les cinq ans à venir, quelque 10 milliards d’euros.

La mission d’intérêt général du transport ferroviaire est d’assurer un maillage suffisant du territoire national et de proposer un mode de transport non émetteur de gaz à effet de serre. Je pense que nous sommes toutes et tous d’accord ici. C’est pourquoi il est impératif de dégager des ressources à même de financer des investissements de rénovation, ainsi que de nouveaux projets. Pour ce faire, en vertu du principe « pollueur-payeur », nous proposons que la route finance le rail, d’où la renationalisation des autoroutes. La manne financière que constitue cette rente s’élève à près de 2 milliards d’euros et serait beaucoup plus utile dans les caisses de SNCF Réseau que dans les poches des actionnaires d’Eiffage ou de Vinci.

Dans la même logique, nous proposons la mise en œuvre d’une écotaxe poids lourds, qui sera à même de lever 1 milliard d’euros supplémentaires et qui aura également un effet incitatif pour favoriser le fret ferroviaire, que vous appelez de vos vœux, madame la ministre, si j’ai bien compris.

L’adoption de cet amendement pérenniserait les financements du système ferroviaire tout en renforçant l’effort de transition écologique dans le secteur du transport.

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 89
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article  additionnel après l'article 1er - Amendment n° 230 rectifié

M. le président. L’amendement n° 93, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er novembre 2018, un rapport sur la possibilité et l’opportunité de créer un livret d’épargne sécurisé concourant au financement de projets et d’investissements visant à améliorer les infrastructures de transport.

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. La question du financement des investissements nécessaires à la remise en état du réseau ferré comme à son développement à venir est évidemment directement posée par le présent projet de loi.

On aura observé que le changement de statut de la SNCF prévu par le texte présente, de ce point de vue, un risque. En effet, même si elle donne quelques poussées d’urticaire aux instances européennes, l’actuelle forme juridique de la SNCF, à savoir celle d’un EPIC, lui donne un accès de grande qualité aux marchés financiers, par la combinaison du caractère de long terme de l’investissement ferroviaire et du statut d’EPIC. De fait, l’EPIC SNCF bénéficie d’une « garantie implicite et illimitée de l’État », ce qui lui permet à la fois de négocier des emprunts à taux et à conditions privilégiés et d’être prémuni contre tout défaut de paiement.

Pascal Savoldelli en a déjà parlé, mais je préfère rappeler aux adeptes de la transformation de la SNCF en société anonyme à capitaux d’État que l’abandon du statut d’EPIC risque fort de conduire à la « banalisation » des financements accordés à l’entreprise, donc à une remontée des taux d’intérêt grevant sa dette. C’est d’autant plus vrai que, bien qu’activement gérée, la dette de la SNCF a un aspect « boule de neige », qui se traduit par une forme de fuite en avant, les intérêts de la dette amortie devenant le capital de la dette inscrite au bilan. Ajoutons qu’un ajustement comptable à 12 milliards d’euros a ruiné les fonds propres du groupe…

Il est donc temps de se demander s’il n’y aurait pas lieu de créer, comme nous le proposons, un livret d’épargne défiscalisée, sur le modèle du livret A ou du LDD, pour financer les investissements ferroviaires et, de manière plus générale, les investissements nécessaires à l’atteinte de nos objectifs en matière de lutte contre les changements climatiques.

Nous prenons le Gouvernement au mot, madame la ministre ! Au moment où une révision constitutionnelle entend inscrire dans le domaine de la loi la lutte contre les changements climatiques, pourquoi ne pas donner à celle-ci les moyens de devenir réalité en en appelant au sens civique et à l’épargne des Françaises et des Français ?

Tel est le sens de cet amendement, que je vous propose d’adopter, mes chers collègues.

Article  additionnel après l'article 1er - Amendement n° 93
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er bis (début)

M. le président. L’amendement n° 230 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement présentant le bilan de la situation du fret ferroviaire en France et à l’échelle de l’Union européenne et ce dans la perspective des nouveaux financements qui devraient résulter de l’adoption des dispositions issues de la révision de la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 1999, relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures.

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. La SNCF a annoncé qu’elle procéderait, d’ici à 2020, à la filialisation de sa branche de fret ferroviaire, en vue de sa recapitalisation. De son côté, le Gouvernement a annoncé qu’il présenterait prochainement un plan de relance du fret ferroviaire.

Pour ce qui nous concerne, nous considérons que mener un bilan de l’ouverture du fret à la concurrence engagée en 2006 constitue un préalable. Le soutien au fret ferroviaire est indispensable du fait des externalités positives qu’il représente, en termes de réduction des émissions de dioxyde de carbone. Cette activité doit demeurer sous maîtrise entièrement publique, car elle constitue un levier fondamental de la transition énergétique. Il paraît donc aujourd’hui prématuré de filialiser cette activité, cette filialisation pouvant constituer une étape vers son externalisation et sa privatisation.

Par ailleurs, dans son référé du 3 juillet 2017 sur la situation du transport de marchandises par le groupe SNCF Mobilités, la Cour des comptes a souligné que, à défaut d’un dispositif financier permettant de prendre en compte les externalités négatives de la route, « qui aurait pu durablement inciter les chargeurs à se reporter sur le transport ferroviaire, l’État devrait pouvoir afficher une stratégie de long terme de soutien au fret ferroviaire, qu’il s’agisse de la pérennité des aides financières aux opérateurs de combiné (aide à la pince) ou du maintien de la compensation aux péages fret, permettant de maintenir l’attractivité de ce mode de transport face à l’aptitude très forte de la route à comprimer ses coûts ».

Or l’actualité européenne nous rattrape. Les députés européens viennent de voter le rapport de la députée européenne Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy proposant de rendre de nouvelles redevances obligatoires à partir de 2021, pour tenir compte des externalités négatives de la route selon le principe du pollueur-payeur. Les ressources issues de cette euroredevance seront fléchées vers les transports propres. Le rail devrait donc pouvoir bénéficier à un horizon proche de nouvelles ressources financières, raison pour laquelle le fret ferroviaire en tant que levier de la transition énergétique doit rester public et intégré dans le groupe public SNCF.

Pour toutes ces raisons, nous estimons que le plan de relance du fret ferroviaire doit être conçu dans la perspective de ces nouvelles ressources financières. Nous demandons donc que le Gouvernement remette au Parlement un bilan de la situation du fret ferroviaire en France et à l’échelle de l’Union européenne, dans la perspective des nouveaux financements qui devraient résulter de l’adoption de l’euroredevance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Je m’attendais à ce que l’on nous soumette des demandes de rapport, pratique désormais habituelle, avec une dizaine de rapports demandés pour chaque texte de loi examiné.

Vous connaissez mon allergie à cette multiplication des demandes de rapport, qui, il faut bien le dire, servent souvent à pallier l’absence de mesures véritables et qui mobilisent des effectifs importants dans les ministères, sans être généralement suivis d’effets concrets.

M. Michel Canevet. C’est vrai !

M. Gérard Cornu, rapporteur. D’ailleurs, comme l’a souligné Hervé Maurey, président de notre commission, lors de la présentation du bilan annuel de l’application des lois, à peine la moitié des rapports demandés sont effectivement remis, ce qui doit quand même nous inciter à une certaine retenue en la matière.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 89, le Gouvernement a déjà conduit un certain nombre de réflexions à ce sujet dans le cadre des Assises nationales de la mobilité ainsi qu’au travers du rapport de M. Philippe Duron. Il ne s’agirait pas de faire des rapports sur des rapports ! Il nous faut désormais des avancées concrètes. Nous comptons sur la loi d’orientation sur les mobilités pour apporter des solutions pratiques dans ce domaine.

La commission est donc très défavorable à cet amendement.

Pour les mêmes raisons, elle émet également un avis défavorable sur les deux autres amendements, qui visent eux aussi au dépôt de rapports : l’amendement n° 93, qui porte sur le même sujet, et l’amendement n° 230 rectifié, qui concerne le fret ferroviaire, auquel je répète que je suis très attaché.

J’y insiste, il nous faut des mesures concrètes plus que des rapports.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Il me semble un peu exagéré de dire que l’AFITF est une coquille vide. Certes, il faudra augmenter ses ressources, qui s’élèvent actuellement à 2,4 milliards d’euros par an, mais c’est justement le sens des travaux du Conseil d’orientation des infrastructures que M. le rapporteur a mentionnés.

Comme l’a dit celui-ci, la loi d’orientation sur les mobilités permettra, dans son volet consacré à la programmation, d’éclairer les enjeux du développement des infrastructures et des financements correspondants, l’objectif étant bien de disposer désormais d’une vision pluriannuelle, avec une programmation équilibrée en ressources et en dépenses.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 89.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 93, je rappelle, au moment où nous reprenons 35 milliards d’euros de la dette ferroviaire, que notre objectif n’est pas de recréer de la dette. Or un livret d’épargne, c’est de la dette. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Si vous prêtez votre épargne à la SNCF, celle-ci contracte une dette à votre égard, parce que vous pouvez espérer récupérer votre argent un jour. Sinon, il s’agit de subventions ou de financement participatif. Un livret d’épargne a, lui, vocation à être remboursé.

Le Gouvernement ne souhaite pas réendetter le système ferroviaire, raison pour laquelle il émet un avis défavorable sur cet amendement.

S’agissant de l’amendement n° 230 rectifié, je pense que la situation du fret en Europe est déjà bien connue. L’heure n’est plus aux rapports. Je souhaite, pour ma part, proposer un plan de relance, un plan d’action.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je veux préciser notre proposition de « livret vert », notamment sur la base de la directive 2012/34/UE.

En son article 8, cette directive dispose : « Les États membres développent l’infrastructure ferroviaire nationale en tenant compte, le cas échéant, des besoins généraux de l’Union, y compris celui de coopérer avec les pays tiers voisins. Ils publient, à cette fin, au plus tard le 16 décembre 2014, après consultation des parties intéressées, une stratégie indicative de développement de l’infrastructure ferroviaire visant à répondre aux futurs besoins de mobilité en termes d’entretien, de renouvellement et de développement de l’infrastructure et reposant sur un financement durable du système ferroviaire. Cette stratégie couvre une période d’au moins cinq ans et est reconductible.

« Dans le respect des articles 93, 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les États membres peuvent en outre accorder au gestionnaire de l’infrastructure un financement compatible avec ses fonctions visées à l’article 3, point 2, la dimension de l’infrastructure et les besoins financiers, notamment pour couvrir des investissements nouveaux. Les États membres peuvent décider de financer ces investissements par des moyens autres que le financement direct par l’État. En tout état de cause, les États membres se conforment aux exigences visées au paragraphe 4 du présent article. »

Nous tirons du point 1, entre autres conclusions, que la Banque centrale européenne a un rôle particulier à jouer dans le financement des infrastructures ferroviaires de l’ensemble de l’Union européenne, notamment pour la reprise de la dette.

Quant au point 2, il nous montre que notre proposition de livret d’épargne est cohérente et correspond aux possibilités de financement retenues. L’Allemagne, qui est souvent donnée en exemple, n’a-t-elle d’ailleurs pas fait ainsi après la Seconde Guerre mondiale ?

Ne l’oublions jamais, l’épargne populaire est tout de même ce qui a financé le logement social, le développement local, les infrastructures d’intérêt local, le développement touristique, et j’en passe. Elle peut demain, si on le décide, participer au financement de la transition énergétique et écologique, singulièrement par le renouvellement et le développement de notre réseau ferroviaire.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Sur la forme, je partage tout à fait l’avis de M. le rapporteur et de Mme la ministre sur les demandes de rapport, qui ont un caractère superfétatoire.

Sur le fond, en ce qui concerne les amendements nos 89 et 230 rectifié, il importe que nous rappelions, puisque c’est la commission de l’aménagement du territoire qui a été chargée de produire le rapport sur le projet de loi, que, pour des considérations d’aménagement du territoire, justement, le projet d’écotaxe qui a, un temps, émaillé l’actualité de notre pays risquait justement de conduire au « déménagement du territoire ».

Je veux donc appeler l’attention de notre assemblée sur la nécessité de s’engager vers ce type de taxation de manière précautionneuse, pour ne pas handicaper davantage nos entrepreneurs installés au plus loin de notre territoire. Je rappelle que la taxation sur les carburants est déjà assez pénalisante pour les territoires les plus excentrés. Il ne conviendrait pas de rajouter des taxations supplémentaires.

J’appelle donc à la mesure sur ce sujet, pour éviter qu’on ne ressorte les bonnets rouges.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Je veux, à propos de l’amendement n° 89, évoquer la « remise en selle » de l’écotaxe, que j’aborderai en tant qu’élue de la péninsule bretonne.

Mes chers collègues, nous parlons, dans ce débat, d’aménagement du territoire, de maillage de la desserte et de présence économique.

Je tiens à dire ce soir, sans bonnet rouge, paisiblement et avec beaucoup de sérieux, que, s’il est nécessaire d’évoquer des sources de financement inspirées par des préoccupations écologiques, il faut veiller de manière extrêmement attentive à ne pas pénaliser durement des territoires déjà marginalisés par leur localisation géographique, au fin fond de l’extrême Ouest de la France et de l’Europe.

Si l’on veut conserver des emplois en Bretagne centrale, notamment dans l’agroalimentaire et la production de produits frais, dont bénéficient les villes et alors qu’il n’y a pas d’autre desserte que la route et que le rail ne sera jamais suffisant, il ne faut pas pénaliser de nouveau la région, encore sous le coup de l’abandon regrettable du projet de Notre-Dame-des-Landes.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, je voudrais comprendre.

Vous dites que les livrets d’épargne créent de l’endettement.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui !

Mme Fabienne Keller. C’est évident !

M. Pascal Savoldelli. Par conséquent, tous les Français qui détiennent un livret A rémunéré et exonéré d’impôts provoquent de l’endettement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui !

M. Pascal Savoldelli. Je ne veux pas polémiquer, mais vous savez très bien que, depuis très longtemps, l’épargne populaire a été un élément du financement du logement social – pour ma part, je regrette que ses effets soient de plus en plus limités. Pour produire de l’investissement, et c’est vrai pour le transport ferroviaire comme pour le logement, il faut donc s’endetter.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Non !

M. Pascal Savoldelli. Je ne dis pas qu’il faut s’endetter de manière irresponsable, aveugle. Mais, dites-moi, madame la ministre, vous n’êtes quand même pas pour un endettement zéro pour le secteur ferroviaire ?

Monsieur le rapporteur, je me suis dit que vous aviez peut-être raison à propos des demandes de rapport. Mais pourquoi demande-t-on des rapports ? Parce que ces sujets ne font même pas l’objet de débats. Or, mes chers collègues, c’est l’ouverture à la concurrence, en 2003, du fret international, puis, en 2006, de l’ensemble du fret qui explique le recul de celui-ci. En 2006, 40 % du fret réalisé par la SNCF a été livré à la concurrence. Nos débats sont donc marqués par une histoire.

Par ailleurs, force est de constater, au-delà de l’ambitieux plan ferroviaire, notamment en matière de fret, que, pour le moment, les investissements de la SNCF et l’entretien des infrastructures ferroviaires sont subventionnés à 40 % par l’État, alors que, vous le savez, madame la ministre, le transport routier l’est à 99 %. C’est un choix de société. Ce sont les citoyens, les collectivités qui paient l’entretien et les infrastructures routières.

M. le président. Il faut conclure, cher collègue !

M. Pascal Savoldelli. Par conséquent, quand ma collègue évoque une nationalisation des autoroutes, il faut d’abord regarder s’il existe une recette.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Comme j’ai tenté de l’expliquer, sans un moteur financier particulier pour discriminer positivement le fret ferroviaire, on continuera à produire de beaux discours et à sortir des plans qui n’aboutiront pas – je ne parle même pas des rapports, monsieur le rapporteur.

La situation du fret démontre notre impuissance collective, alors qu’il y a unanimité politique sur cette question. D’ailleurs, dans le texte, on ne trouve pas de dispositif qui permette de résoudre l’inégalité de traitement que subit le transport ferroviaire, pourtant vertueux.

L’usager du transport ferroviaire paie l’infrastructure, contrairement à celui des modes routier ou aérien. Seul le report modal permettra de relever le défi climatique, d’atteindre l’objectif à l’horizon de 2030 fixé dans la loi relative à la transition énergétique et de mieux organiser le flux routier en traitant la question du fret, qui apparaît trop peu ici. Quand il est moins cher de traverser le pays en avion ou en bus qu’en train, il faut s’interroger sur ce besoin d’un dispositif adapté.

Il faut aussi sortir d’une logique malthusienne dans le transport ferroviaire, qui est une industrie de réseau. Plus on fait rouler de trains sur les voies, plus on baisse les coûts unitaires, en travaillant sur le coût marginal. C’est une démonstration qu’a su faire la Suisse en faisant rouler des trains de fret la nuit, en dehors des périodes d’utilisation des voyageurs. Certes, il arrive que fret et transport de voyageurs entrent en concurrence, mais, si l’on veut un fret ferroviaire dynamique et un réseau plus efficace, il faut faire baisser les coûts unitaires.

Je reviens sur la question des rapports.

Monsieur le rapporteur, comme votre nom l’indique, vos fonctions consistent à rédiger des rapports. Pour ma part, j’estime que les rapports sont un véhicule de l’expression démocratique. Comment une démocratie pourrait-elle fonctionner si l’on supprime les rapports ?

Nous sommes tous d’accord pour dire que les rapports inutiles sont désolants. Mais, si chaque rapport était remplacé par une décision, il n’y aurait plus ni de lois ni de beaux débats comme celui-ci, que vous animez parfaitement, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je veux répondre à Mme Gatel sur l’écotaxe.

Le rapport de Mme Revault d’Allonnes-Bonnefoy, qui a été voté au Parlement européen, prévoit une taxe au kilomètre. Je rappelle que, dans le débat, l’eurovignette constituait une autre option.

La taxation au kilomètre présente l’avantage de pénaliser plutôt le grand transit international, qui, je le rappelle, pollue largement la France. Surtout, elle prévoit des adaptations en fonction des territoires.

Pour ma part, je pense qu’il serait préférable que les écotaxes soient définies par les régions. Je me rappelle les débats qui ont eu lieu au moment de l’abandon de l’écotaxe. Des régions comme la Bretagne connaissent de réels problèmes d’enclavement et restent largement à l’écart du grand transit international, tandis que les Hauts-de-France ou l’Alsace subissent un transit international d’autant plus important qu’il existe une taxation, notamment en Suisse, qui joue en sa faveur.

Mme Fabienne Keller. C’est vrai !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le système ne doit pas être tellement uniformisateur qu’il en devienne pénalisant pour des régions déjà en difficulté.

Cela dit, le rééquilibrage entre le fret et les camions est le grand enjeu et la grande question à traiter. Il y va de la lutte contre l’effet de serre, ainsi que de la qualité de l’air, comme on le voit dans les vallées. Comme vous le savez, mes chers collègues, la France risque d’être condamnée pour sa mauvaise qualité de l’air, non seulement dans les villes, mais aussi dans les territoires.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Houllegatte. Je voulais moi aussi répondre à Mme Gatel, mais Mme Lienemann a pratiquement tout dit.

Comme vous l’avez rappelé hier, madame la ministre, un train de fret, c’est cinquante camions de moins sur la route.

Comme l’a parfaitement expliqué notre collègue, il faut distinguer le trafic lié aux camions de transit de celui qui relève de la desserte. Et si l’on doit un jour se prononcer sur une mesure prenant en compte les externalités imputables au trafic routier, il faut avoir l’intelligence de bonifier les circuits courts, les circuits de desserte, au détriment du trafic de transit !

Je rappelle que, lorsque nous avions travaillé sur la problématique des autoroutes de la mer, nous avions recensé à peu près 1 000 camions qui franchissaient chaque jour la frontière belge pour se retrouver, dans la soirée, à la frontière espagnole. Les externalités de ce trafic de transit doivent être prises en compte. Je crois que le rapport européen que nous avons évoqué en fait mention.

Quand on veut rouler vite et dans le brouillard, il vaut mieux être équipé de phares à longue portée. D’une certaine manière, c’est aussi l’objet des rapports : être capable de se projeter et de bien analyser. D’ailleurs, je rappelle à Mme la ministre qu’elle n’a toujours pas répondu à la question de l’incidence éventuelle sur SNCF Réseau du retour à l’État des biens des EPIC.

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Mme Fabienne Keller. Je partage ce qui vient d’être dit sur l’écotaxe. Effectivement, il existe en Europe, notamment en Suisse et en Allemagne, des dispositifs non dénués d’effets de report.

Nous connaissons tous le débat, et je respecte la position de mes collègues, souvent issus de l’ouest de la France, qui sont très sensibles à la question des coûts de transport. Reste que les usagers du fret ferroviaire paient les infrastructures, contrairement à ceux du fret routier. Si l’on veut améliorer la qualité de l’air, il faudra bien évoquer ce sujet un jour, mais dans une vision territoriale et apaisée. En tout état de cause, je ne crois pas que c’est au détour d’un amendement que nous pourrons envisager un dispositif respectueux des territoires.

Par ailleurs, je m’inscris en faux contre un rapprochement hâtif des dates : l’ouverture à la concurrence du fret n’a pas eu les mêmes conséquences partout. En Allemagne, avec les mêmes dates, elle s’est traduite par une augmentation du fret ferroviaire. Il faut donc chercher ailleurs l’explication de l’effondrement du fret ferroviaire français. Là encore, ce n’est pas au travers d’un simple amendement que nous changerons la situation. Mme la ministre nous a proposé un plan d’action. Je vous invite, mes chers collègues, à soutenir cette démarche.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 89.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 93.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 230 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article  additionnel après l'article 1er - Amendment n° 230 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Article 1er bis (interruption de la discussion)

Article 1er bis

L’article L. 2111-25 du code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le calcul des redevances d’infrastructure mentionnées au 1° de l’article L. 2111-24 tient notamment compte du coût de l’infrastructure, de la situation du marché des transports et des caractéristiques de l’offre et de la demande, des impératifs de l’utilisation optimale du réseau ferré national, de la nécessité de permettre le maintien ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ; il tient compte, lorsque le marché s’y prête, et sur le segment de marché considéré, de la soutenabilité des redevances et de la valeur économique, pour l’attributaire de la capacité d’infrastructure, de l’utilisation du réseau ferré national et respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires. Tant que le coût complet du réseau n’est pas couvert par l’ensemble de ses ressources, SNCF Réseau conserve le bénéfice des gains de productivité qu’il réalise. Les principes et montants des redevances peuvent être fixés de façon pluriannuelle, sur une période ne pouvant excéder cinq ans. » ;

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En vue d’assurer les dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire, le niveau des redevances ne saurait exclure l’utilisation de l’infrastructure sur certains segments de marché par des opérateurs qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire sur ces segments, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. »

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l’article.

M. Pierre Laurent. L’article 1er bis, introduit dans le texte par un amendement du Gouvernement, prévoit la modulation des péages ferroviaires pour tenter de résoudre un problème de péréquation, qui, en vérité, découle de la logique dans laquelle la loi nous entraîne et risque de mettre en très grande difficulté les lignes dites « déficitaires », soit, selon le rapport Spinetta, 70 % de toutes les lignes.

Or, à nos yeux, les dispositions prévues dans le projet de loi ne permettront pas de garantir le financement de ces lignes. Il en résultera même un système extrêmement complexe et pervers, avec, d’un côté, l’introduction de la notion de paiement du coût complet, laquelle entraînera une augmentation très importante des péages, donc des tarifs, et, de l’autre côté, la possibilité de revenir sur cette disposition pour permettre de financer et d’équilibrer toutes les lignes.

Cette véritable usine à gaz sera extrêmement difficile à gérer et, au final, ne résoudra pas les problèmes d’équilibre de l’ensemble des lignes. D’ailleurs, l’ARAFER a alerté à plusieurs reprises sur les risques de ce système, susceptible de déboucher à la fois sur l’explosion des péages et sur un équilibre difficile pour un nombre grandissant de lignes.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Non !

M. Pierre Laurent. Il faudrait retravailler différemment l’unicité et l’efficacité de l’entreprise, alors que le projet de loi conduit à l’inverse, et continuer à débattre des questions de financement.

Madame la ministre, les propos que vous venez de tenir sur l’épargne sont particulièrement inquiétants. Il faut nous expliquer comment vous allez procéder pour résoudre, en France comme en Europe, les immenses problèmes de la transition écologique sans avance de financement, sans crédit, sans épargne, singulièrement dans le domaine du ferroviaire. Résoudre ces difficultés par le seul autofinancement selon des logiques de marchés est totalement impossible. Vous le savez pertinemment.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Et les subventions ?

M. Pierre Laurent. Ces questions devraient être posées.

On nous dit…

M. le président. Il faut conclure, cher collègue !

M. Pierre Laurent. … que le transport ferroviaire ne peut pas bénéficier d’un crédit à taux zéro.

M. Pierre Laurent. Or les banques privées peuvent emprunter à taux zéro tous les jours !

M. le président. L’amendement n° 50, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement de suppression vient en grande partie d’être défendu par mon collègue Pierre Laurent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. L’article 1er bis sera utile pour permettre une modulation tarifaire en fonction des enjeux d’aménagement du territoire. Cependant, ce mécanisme ne suffira pas, à lui seul, à assurer le maintien de toutes les dessertes de TGV existantes. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons prévu d’autres mécanismes dans le texte de la commission.

De fait, je pense que nous sommes tous ici fortement préoccupés par l’aménagement du territoire, ce qui est tout à fait normal, puisque nous sommes de grands défenseurs des territoires. Il faut faire en sorte que l’ensemble des TGV irriguent le territoire avec des dessertes directes, sans correspondance.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur, l’ouverture à la concurrence va se faire ! Elle a été décidée sous le quinquennat précédent et elle est prévue, pour les TGV, en décembre 2020.

On pourrait ne rien faire, ne rien changer, garder le système de péage tel qu’il existe aujourd’hui, avec la menace qui pourrait en résulter pour un certain nombre de dessertes, auxquelles le Gouvernement est attaché. C’est bien parce que nous sommes attachés à la desserte de nos territoires par le TGV et que, par ailleurs, nous pensons qu’une ouverture à la concurrence, sous forme de franchises, aurait été beaucoup plus violente pour la SNCF que nous avons proposé ce système, qui conduit à procéder à une péréquation, celle qui existe actuellement pour les comptes de l’activité TGV, au travers des péages.

Dans le même temps, le Gouvernement souhaite soutenir le développement du transport ferroviaire. Alors que le contrat entre l’État et SNCF Réseau signé par le précédent gouvernement prévoyait, outre une augmentation des péages pour le fret de 10 % par an, une hausse de 4 % à 5 % des péages pour les TGV, nous pensons, comme l’a annoncé le Premier ministre vendredi dernier, qu’il faut avoir une approche beaucoup plus raisonnable de ces hausses de péage pour favoriser le développement du transport ferroviaire.

Par conséquent, en accord avec l’ARAFER, qui souscrit tout à fait à l’intérêt de ce dispositif, le Gouvernement souhaite utiliser la péréquation au sein des péages afin d’assurer le maintien de la desserte de nos villes moyennes, au-delà des lignes à grande vitesse et des seules métropoles.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.

M. Michel Dagbert. Nous ne pouvons qu’apprécier la mise en place d’un mécanisme de modulation, qui est gage, pour un certain nombre de territoires, de la pérennité d’une desserte de TGV.

En revanche, s’agissant du financement, puisque M. le rapporteur vient de dire que les lignes ne seront pas toutes garanties par le mécanisme en question, je voudrais souligner une contradiction. En effet, nous voyons très bien comment nous pourrions maintenir ces dessertes, en nous retournant vers les régions et en leur demandant de mettre la main à la poche. Dans le même temps, le Gouvernement impose à l’ensemble des collectivités de respecter un objectif de dépenses incompatible avec ces enjeux.

Je souhaitais vous faire part de mon inquiétude sur cet aspect.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je ne soutiendrai pas non plus cet amendement de suppression de l’article.

Chercher des solutions pour atteindre les objectifs d’aménagement du territoire me semble particulièrement important. Si je suis assez critique, voire très critique, sur certains aspects du texte, on ne peut pas dire qu’il n’engage pas de réflexion ou qu’il ne contient pas de proposition concernant l’aménagement du territoire. Simplement, pour faire écho à ce qui vient d’être dit, on sait que cela ne suffira pas.

Je n’ai pas voulu intervenir concernant le refinancement du fret ferroviaire, mais je souhaite insister sur les enjeux de financement du trafic passager, qui nécessitera une péréquation nationale et, sans doute, une nouvelle recette.

Puisque nous sommes aujourd’hui dans un cadre où nous pouvons inventer de nouvelles recettes, n’oublions pas, dans cette concurrence faussée relative aux émissions de gaz à effet de serre, que le transport aérien ne paye rien.

Mme Fabienne Keller. Absolument !

M. Ronan Dantec. À l’heure actuelle, la Suède met en place une taxe sur le transport aérien domestique, parce que c’est possible. En revanche, pour ce qui concerne le transport aérien international, les conventions internationales de Chicago et de Washington interdisent de telles dispositions.

Si l’on veut que la SNCF redevienne concurrentielle, on ne peut pas continuer à avoir, en France, un transport aérien domestique qui n’est soumis à aucune taxe liée aux émissions de CO2. Ainsi, une famille moyenne ayant les moyens de prendre l’avion ne paye pas ses émissions de CO2, alors qu’une famille qui traverse la France en voiture y est de plus en plus contrainte par le biais de la contribution climat-énergie, que je défends par ailleurs.

Il faudra mener une vraie réflexion sur une recette passagers permettant d’atteindre les objectifs d’aménagement du territoire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 50.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme Keller, MM. Huré, Courtial, Morisset, Grosdidier, D. Laurent, Reichardt, Paccaud et Lefèvre, Mme A.M. Bertrand, MM. Bonhomme et Kennel, Mme L. Darcos, MM. Cuypers, Perrin, Raison, Bouchet, Bonne, Savin et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et M. Pointereau, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

, de la nécessité de permettre le maintien ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ;

par les mots :

et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ; il tient également compte de la nécessité de tenir les engagements de desserte par des trains à grande vitesse pris par l’État dans le cadre de la construction des lignes à grande vitesse et de permettre le maintien ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire ; enfin,

La parole est à Mme Fabienne Keller.

Mme Fabienne Keller. L’article 1er bis tend à définir le calcul des redevances d’infrastructure, soit le prix du sillon.

De nombreuses collectivités territoriales situées en deçà ou au-delà du tracé des lignes à grande vitesse ont participé à leur financement, en échange d’une desserte de leur gare par des trains à grande vitesse permettant aux usagers d’éviter des ruptures de charge. Je fais référence aux deux cent trente gares desservies aujourd’hui.

Le présent amendement a pour objet de sécuriser ces dessertes en indiquant que le calcul des redevances d’infrastructure perçues par SNCF Réseau doit prendre en compte la nécessité pour l’État de respecter les engagements pris lors de la construction des lignes à grande vitesse à l’égard des collectivités territoriales concernées.

En résumé, il s’agit de prévoir une obligation non pas de moyen, mais de résultat en termes de dessertes, pour ce qui concerne les ajustements des redevances d’infrastructure.

M. le président. Le sous-amendement n° 130 rectifié septies, présenté par M. Brisson, Mme Troendlé, M. Mouiller, Mme Bonfanti-Dossat, M. Pellevat, Mme Micouleau, M. Grand, Mme Berthet, MM. Revet, Danesi, Laménie et Savary, Mme Imbert et M. Husson, est ainsi libellé :

Amendement n° 2, alinéa 5

Après les mots :

construction de lignes à grande vitesse

insérer les mots :

, y compris pour les gares devant être desservies par le prolongement des lignes nouvelles dont la réalisation a été reportée et qui dans l’attente le demeurent par des trains à grande vitesse utilisant les voies existantes,

La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Ce sous-amendement à l’amendement défendu par Mme Keller a été rédigé sur l’initiative de notre collègue Max Brisson et de plusieurs d’entre nous. Il se justifie par son texte même.

M. le président. L’amendement n° 166 rectifié, présenté par M. Bonhomme, Mmes Bruguière et Micouleau, MM. Pellevat, Paccaud et Mouiller, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Courtial, Sido et Savary, Mmes Di Folco, de Cidrac, Gruny et Duranton, MM. Daubresse, Duplomb, Revet, Pierre et Bonne, Mme Lamure, MM. Bouchet et Savin, Mme Bories, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Puissat, MM. Gremillet et Grosdidier, Mme Imbert et MM. Lefèvre, H. Leroy et Pointereau, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

, de la nécessité de permettre le maintien ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ;

par les mots :

et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ; il tient également compte de la nécessité de tenir les engagements de desserte par des trains à grande vitesse pris par l’État dans le cadre de la construction des lignes à grande vitesse et de veiller à la fois au maintien et au développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire ; enfin,

La parole est à M. François Bonhomme.

M. François Bonhomme. Nombreuses sont les collectivités territoriales situées en deçà ou au-delà du tracé de lignes à grande vitesse à avoir contribué à leur financement, afin de garantir la desserte de leur gare par des trains à grande vitesse et, par là même, d’éviter les potentielles ruptures de charge dont pourraient souffrir leurs usagers.

Le présent amendement entend sécuriser lesdites dessertes, en précisant que le calcul des redevances d’infrastructure perçues par SNCF Réseau devra prendre en compte la nécessité pour l’État de respecter les engagements pris lors de la construction des lignes à grande vitesse à l’égard des collectivités territoriales concernées.

M. le président. L’amendement n° 40, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale

par les mots :

, des missions de service public retenues par la collectivité et de l’intérêt social et environnemental de son utilisation

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Le présent amendement, déjà présenté par notre groupe lors de la discussion de la loi de 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires, vise à prendre en compte dans le calcul des redevances d’infrastructure les missions de service public retenues par la collectivité, mais aussi l’intérêt social et environnemental de leur utilisation.

Alors que le présent article reprend uniquement l’idée d’une modulation en fonction de l’intérêt des lignes en matière d’aménagement du territoire, nous souhaitons élargir les critères de définition du niveau de péage. Selon nous, le calcul de la redevance devrait varier en fonction non seulement de l’utilité des lignes, mais également du caractère plus ou moins énergivore du train. Ainsi, l’utilisation de matériel de traction diesel par certains opérateurs sur des lignes électrifiées pourrait être pénalisée en augmentant les péages, tandis que celle de rames de TGV à deux étages, moins consommatrices de sillons, pourrait être encouragée par une minoration de ces péages.

Je le rappelle, la modulation des péages avait été proposée dans le cadre d’un rapport d’information sur les infrastructures de la commission des affaires économiques remontant à 2007, rapport qui avait été adopté à l’unanimité.

Aujourd’hui, le présent article s’appuie également sur l’idée d’une modulation, mais simplement pour attirer de nouveaux opérateurs. Nous pensons que la possibilité de modulation pour raisons écologiques s’avère indispensable pour optimiser la gestion des flux et l’utilisation des réseaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cornu, rapporteur. Le rapporteur a par moment une mission difficile… Sa préoccupation est de conserver une formulation générale, pour ne pas introduire dans la loi des discriminations entre les dessertes fragiles du réseau de TGV, quelle que soit leur situation.

Je comprends la volonté de défendre son territoire, et je comprends donc le sens des amendements quasi identiques n° 2 rectifié de Mme Keller et n° 166 rectifié de M. Bonhomme, qui visent à ajouter aux critères pris en compte pour les redevances du réseau « la nécessité de tenir les engagements de desserte par des trains à grande vitesse pris par l’État dans le cadre de la construction des lignes à grande vitesse ».

Dès lors que la problématique des dessertes visées par les auteurs de ces amendements est d’ordre tarifaire, ces amendements sont pleinement satisfaits par le critère du maintien ou du développement de dessertes pertinentes en matière d’aménagement du territoire, déjà prévu par l’article 1er bis. Si le problème pour ces dessertes n’est pas d’ordre tarifaire, un tel ajout n’aura aucune portée. Il ne revient pas à l’outil tarifaire de résoudre des problèmes plus généraux entre des collectivités territoriales et l’État quant au respect d’engagements, dont la forme n’est d’ailleurs pas précisée.

En tout état de cause, cet ajout sera sans doute inapplicable pour le gestionnaire d’infrastructure et l’autorité de régulation, car je ne vois pas comment ils pourront se référer à des éléments objectifs et précis. Cela ne remet pas en cause le bien-fondé de ces amendements, qui témoignent de l’inquiétude des élus locaux dans certains territoires quant à la cohérence dans le temps des décisions de l’État sur les lignes à grande vitesse. Nous comprenons parfaitement le message politique ici exprimé, mais il nous semble inopérant sur le plan technique.

La commission demande donc le retrait de ces deux amendements ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

Quant au sous-amendement n° 130 rectifié septies de M. Brisson, il vise à compléter l’amendement de Mme Keller, en mentionnant les gares devant être desservies par le prolongement de lignes nouvelles dont la réalisation a été reportée et qui, en attendant, sont desservies par des trains à grande vitesse utilisant les voies existantes.

Mme Fabienne Keller. C’est normal !

M. Gérard Cornu, rapporteur. Nous ne pensons pas que le législateur, a fortiori le Sénat, ait à introduire de telles distinctions dans la loi. Que penseront les élus de tous les territoires dont la desserte n’était pas prévue via une LGV ? Ils pourront avoir l’impression légitime d’être oubliés par le législateur.

Si nous visons des situations particulières sans être exhaustifs, nous allons susciter de nouvelles demandes, car certains élus ou concitoyens auront légitimement l’impression d’avoir été oubliés ou lésés. Pourquoi ne pas viser les dessertes situées en zone de montagne ou encore en zone de revitalisation rurale ? Privilégions la concision dans la loi, pour ne pas susciter de malentendus ni créer de discriminations entre territoires.

La commission demande donc le retrait de ce sous-amendement ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je suis un peu gêné d’émettre un tel avis sur des amendements que je comprends fort bien. Toutefois, je ne voudrais pas, en tant que rapporteur, que soient introduites des discriminations entre les territoires.

Concernant l’amendement n° 40, la commission en demande également le retrait ; à défaut elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je comprends parfaitement le sens de votre amendement, madame Keller. Il faudra bien évidemment que les engagements de dessertes pris notamment dans le cadre des conventions de financement d’un certain nombre de lignes à grande vitesse soient respectés. Tel est d’ailleurs le sens de la péréquation qui est proposée.

Selon moi, la précision, a fortiori celle qui figure dans le sous-amendement, va trop loin. La péréquation doit permettre l’équilibre de la plupart des dessertes. Le cas échéant, tel est bien le sens des compléments qui ont été apportés par la commission, il faudra prévoir un conventionnement.

Aller à ce niveau de détail sur les obligations concernant la tarification risque d’être inopérant. En tout cas, je peux prendre l’engagement que le travail que nous mènerons avec l’ARAFER visera bien à combiner une péréquation, dans la limite de ce que nous imposent les règles européennes, c’est-à-dire la tarification au coût marginal, et un éventuel conventionnement. Cela devrait conduire à maintenir les dessertes lorsque des engagements ont été pris dans le cadre des financements des lignes à grande vitesse.

Je demande donc le retrait des amendements nos 2 rectifié et 166 rectifié ; à défaut, l’avis sera défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 40, j’en demande également le retrait ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je soutiens ces deux amendements, et je suis un peu surpris de la position de M. le rapporteur.

Dans un certain nombre de régions, et je veux notamment évoquer la région Grand Est, le TGV n’est apparu que grâce à un financement très important des collectivités. Vous connaissez très bien, madame la ministre, le montant de leur investissement.

J’ai bien compris vos propos, monsieur le rapporteur. Toutefois, je souligne que ces amendements visent non pas à ouvrir de nouvelles possibilités, mais à faire respecter un engagement. Il n’est pas imaginable qu’à court ou moyen terme on demande à ces collectivités de cofinancer le maintien de dessertes, qu’il s’agisse d’arrêts sur la LGV ou de gares situées dans son prolongement, pour lesquelles elles ont déjà contribué.

Je représentais à l’époque la région Lorraine dans les négociations – je me tourne vers Fabienne Keller, avec qui je siégeais –, et je vous assure qu’il serait très lourd de conséquences de renier un engagement ayant permis d’aboutir à une véritable coconstruction de ces lignes à grande vitesse et de ces dessertes.

Vous avez fait un premier pas, madame la ministre, mais il vous faut être plus claire. Nous avons besoin de certitudes s’agissant du respect des engagements compte tenu des financements très importants des collectivités en faveur des lignes à grande vitesse et des dessertes.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. La question soulevée par ces amendements est tout à fait intéressante.

Madame la ministre, lorsque vous dites que l’équilibre financier de la plupart des dessertes devrait être satisfait par la modulation des péages, cela sous-entend que certaines d’entre elles ne seront pas en équilibre financier. Selon le chiffre qui avait été donné lors de votre audition par M. Maurey, une ligne sur six ne trouverait pas son équilibre financier dans le cadre du dispositif de modulation des péages, sachant que vous aviez également annoncé ce jour-là que la moitié des LGV actuelles ne seraient pas en équilibre, d’où l’idée d’un conventionnement.

Qui déterminera les segments bénéficiant d’une modulation des péages ? A priori, ce sera le gestionnaire d’infrastructure. Selon moi, il faut un contrôle démocratique de cette question, ce que nous proposerons par une programmation de la notion de desserte d’intérêt national, et un vrai débat sur cette question.

J’ai bien compris la position de M. le rapporteur et de Mme la ministre, selon lesquels ces questions seraient partiellement satisfaites par certaines dispositions du texte. Néanmoins, il me paraît utile d’approfondir la problématique d’un aménagement du territoire équilibré et du respect des engagements et de la parole donnée. Notre groupe votera donc ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Je voterai également ces amendements, pour les raisons que Daniel Gremillet vient d’exposer.

Madame la ministre, vous nous dites que la question se réglera dans le cadre de la modulation. Si celle-ci constitue peut-être une réponse financière, elle n’apporte aucune garantie concernant le maintien des dessertes. Si les collectivités territoriales ont mis la main à la poche, c’était pour obtenir une garantie.

Élu de Bretagne, je me souviens des discussions – je me tourne vers mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ – sur le maintien de la desserte du Mans. Je me souviens également du débat que nous avons eu au sujet du maintien des dessertes de Laval et de Vitré. Les engagements pris à l’époque par la SNCF doivent être, d’une façon ou d’une autre, totalement garantis. Ils ne sauraient être remis en cause.

Selon moi, ces amendements sont les bienvenus. Il sera toujours temps de faire évoluer le dispositif sur le plan juridique. À un moment donné, il faut affirmer clairement, d’une façon politique, que ce qui a été décidé ne peut pas être remis en cause.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Je serai bref, car mon collègue Olivier Jacquin s’est exprimé au nom du groupe.

Personnellement, je trouve ces amendements intéressants, et je souhaite que les membres encore présents du groupe socialiste les votent.

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Mme Fabienne Keller. J’ai un peu de mal, monsieur le rapporteur – j’espère que vous me le pardonnerez –, avec le terme de « discrimination ». J’ai au contraire le sentiment qu’il s’agit d’une double peine.

Mme Fabienne Keller. Pendant longtemps, des territoires n’ont pas été desservis par les TGV. Pour être desservis, ils ont dû les financer, alors que tel n’était pas le cas pour les premières lignes. Pourquoi ne leur accorde-t-on pas une sécurité sur les engagements qu’ils ont obtenus en contrepartie des financements qu’ils ont apportés ?

Je connais bien le TGV Est, et je sais que les dessertes ont été ainsi inscrites dans la déclaration d’utilité publique, pour les sécuriser. Pour d’autres lignes, ce sont probablement des formes juridiques analogues qui ont été retenues.

Je veux également vous dire, monsieur le rapporteur, qu’il est écrit dans mon amendement : « ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire. » Je n’ai donc rien retiré aux territoires qui bénéficient de dessertes sur d’autres lignes. Je me suis simplement permis d’ajouter la notion de contrepartie à des financements accordés.

J’évoquerai le sous-amendement déposé par Max Brisson et soutenu par Marc Laménie. M. Brisson se préoccupe de la ligne Tours-Bordeaux, financée par des collectivités comme la communauté d’agglomération Pau-Béarn-Pyrénées ou le département des Pyrénées-Atlantiques, à la condition qu’il y ait des TGV qui passent la gare de Bordeaux et aillent jusqu’à son territoire en termes de dessertes, sans rupture de charge. Il évoque également le rapport Duron, qui a reporté aux calendes grecques, concrètement à 2038, le prolongement de la ligne attendue par ces territoires. Or les financements avaient été obtenus dans cet espoir !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre. Même si je ne suis pas certaine de vous convaincre, je veux préciser que, s’agissant du TGV Est, la SNCF a signé un engagement de desserte au moment du montage du dossier. A priori, l’ouverture à la concurrence ne va pas la conduire à déchirer cet engagement. Elle ne pourrait en être déliée que si elle démontrait que l’évolution de la concurrence, par exemple l’arrivée d’un opérateur qui écrémerait le marché sur cette ligne, la met dans l’impossibilité de respecter ses engagements.

Je le redis, la SNCF ne sera pas déliée de ses engagements à partir du mois de décembre 2020, au motif qu’il y a une ouverture à la concurrence.

Vous l’avez compris, nous aurions pu faire un choix plus radical, en proposant des franchises. C’est une méthode très violente d’ouverture à la concurrence, que le Gouvernement a souhaité écarter, aucun de nos voisins n’y ayant eu recours. Cela aurait pu conduire à attribuer toutes les dessertes à un seul opérateur. Par exemple, le TGV Est et ses branches auraient pu aller à la Deutsche Bahn et la ligne Paris-Lyon et ses branches à l’opérateur italien Trenitalia.

Nous avons essayé de trouver une organisation qui ne soit pas trop brutale pour notre opérateur historique et permette de garantir les engagements pris. Nous continuerons à travailler et à rassurer. Quoi qu’il en soit, l’objectif est clair : les engagements pris doivent être tenus.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 130 rectifié septies.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 166 rectifié et 40 n’ont plus d’objet.

Mes chers collègues, nous avons examiné 78 amendements au cours de la journée, soit un rythme de 10 amendements par heure ; il en reste 166.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 1er bis (début)
Dossier législatif : projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire
Discussion générale

7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 31 mai 2018, à dix heures trente, à quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :

Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :

– Projet de loi autorisant l’adhésion de la France à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale pour son application à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, et dans les Terres australes et antarctiques françaises (n° 97, 2016-2017) ;

Rapport de M. Robert Laufoaulu, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 498, 2017-2018) ;

Texte de la commission (n° 499, 2017-2018).

– Projet de loi autorisant la ratification du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions audiovisuelles (n° 211, 2014-2015) ;

Rapport de M. Richard Yung, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 496, 2017 2018) ;

Texte de la commission (n° 497, 2017-2018).

– Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour un nouveau pacte ferroviaire (n° 435, 2017-2018) ;

Rapport de M. Gérard Cornu, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 494, 2017-2018) ;

Texte de la commission (n° 495, 2017-2018).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 31 mai 2018, à une heure vingt-cinq.)

nomination dun membre dune mission dinformation

Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen a présenté une candidature pour la mission dinformation sur la réinsertion des mineurs enfermés.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai prévu par larticle 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Maryse Carrère est membre de la mission dinformation sur la réinsertion des mineurs enfermés, en remplacement de Mme Véronique Guillotin, démissionnaire.

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD