M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Bernard Delcros. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai déjà eu l’occasion de le dire, nous partageons pour l’essentiel les grands objectifs de ce budget sous-tendu par la force de la volonté politique et des engagements tenus : maîtrise de la dépense publique, résorption des déficits, désendettement du pays, orientation de l’épargne vers le financement de nos entreprises en vue d’ouvrir une nouvelle voie pour tenter de relever le défi de l’emploi quand tant d’autres solutions ont montré leurs limites, stabilisation des concours financiers aux collectivités territoriales.

En première lecture, le Sénat a conduit un travail de fond, apportant des améliorations qui nous semblaient justes, aux uns et aux autres, en fonction de nos sensibilités et de la connaissance que chacun d’entre nous a des réalités du terrain. Cela a été dit, de nombreux articles ont pu être votés conformes par les deux assemblées.

Toutefois, le débat a aussi mis en évidence des divergences sur des points essentiels qui ont rassemblé une majorité de sénateurs et rendent aujourd’hui un accord global impossible.

Pour ma part, je regrette – je le dis en toute objectivité – qu’un certain nombre de mesures adoptées par le Sénat, parfois simples et pragmatiques, notamment en faveur des territoires les plus fragiles, n’aient pas été retenues par le Gouvernement. Mes collègues en ont déjà cité quelques-unes, mais je voudrais évoquer d’autres dispositifs concernant plus particulièrement la ruralité, qui, vous le savez, me tient à cœur : le prêt à taux zéro, pour lequel nous demandions un traitement équitable de tous les primo-accédants, qu’ils soient ruraux ou urbains ; la prime à l’aménagement du territoire, aide directe versée aux petites et moyennes entreprises dans les territoires les plus fragiles et dont nous demandions simplement le maintien au niveau de 2017 ; le FISAC, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, essentiel au maintien du tissu de services en milieu rural.

Concernant ces dispositifs, nous avons fait des propositions concrètes et réalistes qui n’engageaient pas nécessairement de dépenses supplémentaires pour l’État. Elles méritaient à mon sens d’être mieux prises en compte et pouvaient facilement faire l’objet d’un consensus.

D’une façon plus générale, monsieur le secrétaire d’État, le groupe Union Centriste est attaché à des valeurs sur lesquelles nous ne transigerons pas, mais sur le fondement desquelles nous pourrons aussi vous apporter un soutien sans équivoque.

Parmi ces valeurs figure le juste équilibre entre réalisme économique, prenant en compte le contexte économique mondial que nous connaissons, et solidarité sociale et territoriale, l’État devant pleinement jouer son rôle de régulateur. C’est même une des missions essentielles de l’État que de veiller à ce que les transformations de notre société ne laissent pas au bord du chemin les moins agiles ou les plus fragiles de nos concitoyens. Il faut également un projet résolument tourné vers une nouvelle étape de la construction européenne : c’est seulement à cette échelle que nous pourrons faire face aux grands défis auxquels nos sociétés sont confrontées.

Enfin, une majorité des membres de notre groupe votera en faveur de l’adoption de la motion tendant à opposer la question préalable, considérant qu’une nouvelle lecture n’apporterait rien de plus et relèverait même, dans le délai imparti, d’une mission impossible.

Pour terminer, je veux, en tant que membre de la commission des finances, remercier tout spécialement son président, Vincent Éblé, et son rapporteur général, Albéric de Montgolfier, pour la qualité des travaux qu’ils mènent au sein de cette commission, auxquels nous avons plaisir à participer. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, mon propos portera sur le projet de loi de finances pour 2018 ; Arnaud Bazin traitera du projet de loi de programmation des finances publiques.

Le candidat à l’élection présidentielle Emmanuel Macron nous promettait une rupture, seule capable, selon lui, de sortir le pays d’une crise qui n’a que trop duré.

Je crois pouvoir dire que nous partageons cette analyse, mais nous divergeons manifestement non seulement sur l’intensité et la profondeur de la rupture nécessaire, mais aussi sur les moyens à mettre en œuvre.

L’examen de ce premier budget du quinquennat le démontre à l’évidence. Du fait de son manque d’ambition, celui-ci ne peut constituer l’amorce du redressement dont la France a besoin. Trois éléments suffisent à le démontrer : en 2018, les dépenses de l’État continueront de progresser ; le déficit du budget également, de près de 7 milliards d’euros ; quant à la réduction du nombre de fonctionnaires, elle sera limitée à 1 600 dans le périmètre de l’État.

Notre analyse est que la France a un double besoin, urgent, car nous sommes toujours à la traîne en Europe en matière de chômage, de croissance, tandis que nous sommes au sommet, et même souvent champions du monde, en matière de déficit public et de dette…

D’une part, il nous faut relancer l’économie en créant un véritable choc de compétitivité par une baisse massive de charges de nature à redonner des marges à nos entreprises, sans lesquelles toute amélioration durable sur le front de l’emploi est hors de portée.

D’autre part., il nous faut stabiliser, voire diminuer, les impôts et taxes pesant sur les ménages, notamment ceux qui ont été le plus touchés depuis 2012 par des hausses massives de la fiscalité.

Au rebours du sempiternel débat opposant politique de l’offre et politique de la demande, nous affirmons qu’il est urgent de mener les deux conjointement.

C’est la raison pour laquelle nous avions proposé des mesures en faveur de nos entreprises, des PME, de l’innovation, mais aussi du pouvoir d’achat des retraités, des familles et des propriétaires, notamment, grands oubliés de votre politique.

Mais il nous faut aussi, en même temps,…

M. Roger Karoutchi. Oui, en même temps…

M. Philippe Dallier. … et c’est bien là que les choses se compliquent, réduire fortement notre déficit public, afin d’enrayer la spirale infernale d’une dette qui ne cesse d’augmenter et nous menace toujours comme une épée de Damoclès.

Pour baisser les impôts et les charges pesant sur les entreprises et les particuliers tout en diminuant le déficit public, afin de réduire la dette, il n’y a pas d’autre moyen que d’engager des réformes structurelles, seules à même de faire baisser les dépenses de l’État.

Ces réformes, où se trouvent-elles dans ce projet de loi de finances ? Malheureusement, nous n’en voyons pas ! Mais peut-être le Gouvernement espère-t-il que, l’an prochain, une conjoncture meilleure que celle qui est anticipée dans ce PLF permettra de limiter la hausse du déficit ? Ce serait un pari risqué.

Nous ne considérons pas que la dépense publique soit, par nature, toujours trop élevée, mais, à l’évidence, nous ne pouvons plus la financer par l’emprunt ou par l’impôt.

Nous le savons, revenir à l’équilibre des comptes publics demandera des efforts importants. Cependant, l’Allemagne l’a fait : pourquoi en serions-nous incapables ?

Malheureusement, l’effort est reporté en fin de quinquennat et les mesures annoncées sont toujours aussi faiblement documentées.

C’est pourquoi nous avions proposé des mesures importantes d’économies dès l’an prochain. Or rien n’a été retenu par l’Assemblée nationale. Après une commission mixte paritaire écourtée, nous avons assisté à un détricotage en règle, par les députés de La République En Marche, de l’ensemble des mesures adoptées par le Sénat, qui a eu manifestement le grand tort de ne pas s’aligner sur la ligne imposée par l’exécutif.

Où est donc ce « nouveau monde » dont l’émergence a été claironnée, à grand renfort de communication, où est cet esprit « constructif » quand la majorité présidentielle supprime méticuleusement toutes les mesures adoptées par l’autre chambre, y compris celles qui l’ont été à la quasi-unanimité ?

Je pense par exemple aux mesures relatives à l’économie collaborative, qui est ici un sujet consensuel. Même notre article visant à lutter contre la fraude à la TVA sur les plateformes en ligne a été supprimé, alors qu’il avait été adopté à l’unanimité, y compris donc par les sénateurs de La République En Marche, avec un avis de sagesse du Gouvernement ! C’est à n’y rien comprendre !

Nous avons bien compris que les députés de La République En Marche avaient très peu de marge de manœuvre. Le Sénat est-il donc également considéré comme une simple chambre d’enregistrement ?

En fait, les seules économies, dans ce budget pour 2018, viennent de la suppression d’un trait de plume de plusieurs dizaines de milliers de contrats aidés, ainsi que de la réduction des aides personnalisées au logement, les APL, à hauteur de 1,9 milliard d’euros, dont 400 millions d’euros du fait de la baisse de 5 euros pour tous décidée l’été dernier et 1,5 milliard d’euros pris en fait dans la poche des bailleurs sociaux par le biais de la diminution des loyers – quoi de plus facile…

Comment ne pas constater également que la rédaction de l’article 52 adoptée en seconde lecture à l’Assemblée nationale ne tient aucun compte des débats du Sénat, non plus que de l’évolution – certes tardive – des positions du monde HLM, notamment celles des offices ?

Le seul apport du Sénat aura donc été de transcrire le recours à une augmentation de la TVA à hauteur de 700 millions d’euros, ce que l’Assemblée nationale n’avait pas eu le temps de faire, puisque l’idée avait été avancée lors de l’examen en première lecture de la seconde partie du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.

Tout le reste, tout le temps passé ici à débattre par nos collègues siégeant sur toutes les travées, n’aura donc servi à rien.

Quant au seul point sur lequel nous avions cru pouvoir obtenir satisfaction avec une quasi-certitude, parole de ministre à l’appui –Jacques Mézard était au banc du Gouvernement –, à savoir la préservation de l’APL accession, il est passé à la trappe comme le reste de nos propositions. Et comment ne pas pointer le ridicule de la mesure qui a finalement été retenue par l’Assemblée nationale ? L’APL accession est en fait maintenue, pour deux ans seulement, mais en zone III, c’est-à-dire en zone détendue, seulement dans l’ancien et pour les seuls allocataires de l’APL, les allocataires de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale étant exclus de son bénéfice. Avec ces critères, savez-vous, mes chers collègues, combien de ménages bénéficieront désormais de l’APL accession ? L’équivalent de moins de 5 % de ceux qui y étaient précédemment éligibles ! Si ce n’est pas là une simple mesure d’affichage et de communication, alors qu’est-ce ?

Comment ne pas pointer l’incohérence de vos décisions en matière de logement ?

Vous allez ponctionner, par la baisse des loyers, de 1,7 milliard à 1,9 milliard d’euros sur les bailleurs sociaux ; on ne sait d’ailleurs pas très bien quel est le montant exact, faute d’évaluation précise, certains bailleurs parlant même de plus de 2 milliards d’euros, car il y aura un effet d’aubaine pour certains locataires, qui verront leur loyer baisser alors qu’ils ne sont pas allocataires de l’APL. De l’autre côté, vous incitez ces mêmes bailleurs à vendre 40 000 logements par an pour retrouver des fonds propres, puisque vous leur en retirez, et vous supprimez l’APL accession. Voilà une vraie politique de gribouille sur un sujet pourtant essentiel pour notre économie et pour les Français !

Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous ne voyons pas l’intérêt de poursuivre l’examen de ce projet de loi de finances pour 2018. Le groupe Les Républicains soutiendra donc la proposition de notre commission des finances d’opposer la question préalable à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de loi de programmation des finances publiques a été très substantiellement modifié en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, au lendemain de la Conférence nationale des territoires, qui s’est tenue le 14 décembre dernier. La contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales a été précisée.

En première lecture, toutes les demandes de précision étaient renvoyées par le Gouvernement à la Conférence nationale des territoires, au cours de laquelle une concertation avec les élus locaux devait avoir lieu.

En réalité, l’amendement du Gouvernement était déjà rédigé pour la nouvelle lecture prévue le lendemain même à l’Assemblée nationale. Les marges de manœuvre de la Conférence nationale des territoires étaient par conséquent très limitées, et la tenue de cette conférence s’est apparentée de facto à une opération de communication du Premier ministre, laissant à penser que les élus gardaient tout de même la main. Il s’est agi en réalité d’un écran de fumée, ce qui a conduit l’Association des maires de France à refuser d’y participer, aucun « pacte de confiance » n’étant, selon elle, aujourd’hui envisageable.

Dans ces conditions, nous pouvons nous interroger sur une méthode qui consiste à introduire en nouvelle lecture un amendement de six pages, au contenu largement normatif, alors que les lois de programmation sont censées être indicatives…

Une nouvelle fois, avec Emmanuel Macron, nous sommes dans le marketing politique : il s’agit de vendre son produit en deux fois en faisant croire à une concertation, alors que le détail de la contractualisation, qui était déjà dans les cartons du Gouvernement, aurait pu figurer dans le texte initial, être débattu dès la première lecture, puis amendé au cours de la navette. Peut-être un compromis aurait-il même pu alors être trouvé en commission mixte paritaire, dans un esprit constructif.

Les marges de manœuvre en nouvelle lecture, avec un texte profondément remanié par des amendements gouvernementaux, sont désormais plus réduites.

Il apparaît ainsi inédit et incongru, pour ne pas dire abscons, que la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation ait échoué, au motif notamment que le texte serait détaillé et un compromis peut-être trouvé le lendemain, lors d’une réunion extérieure au Parlement.

À l’issue de la Conférence nationale des territoires, la nouvelle mouture du projet de loi de programmation présentée par le Gouvernement reprend certaines propositions du Sénat. Cependant, beaucoup de points essentiels demeurent insatisfaisants.

Les collectivités contractantes devront réduire leurs dépenses de 13 milliards d’euros durant le quinquennat, soit un effort supérieur à celui de 11 milliards d’euros imposé durant la présidence de François Hollande. Certes, cet effort sera réalisé dans le cadre d’une contractualisation proposée par l’État, mais son caractère léonin rétablit de fait une tutelle sur les collectivités territoriales. Si le contrat imposé par l’État n’est pas respecté, une reprise financière sera opérée, et si la collectivité refuse de signer le contrat, la sanction sera plus lourde encore.

L’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales retenu par le Gouvernement afin de réaliser 13 milliards d’euros d’économies sur cinq ans est donc de 1,2 % par an en valeur, comme dans le texte initial. La modification apportée par le Sénat et les observations de sa commission des finances n’ont pas été retenues : le taux de 1,2 % était fixé par rapport à une évolution tendancielle des dépenses des collectivités sous-estimée ; en réalité, la trajectoire prévue par le projet de loi de programmation représente un effort, pour les collectivités territoriales, de l’ordre de 21 milliards d’euros, et non de 13 milliards d’euros.

L’objectif d’une baisse de 13 milliards d’euros des dépenses des collectivités territoriales sur le fondement d’hypothèses d’évolution tendancielle de la dépense locale plus sincères avait conduit la commission des finances du Sénat à fixer l’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales à 1,9 % par an, au lieu de 1,2 %. Nous regrettons que ce taux n’ait pas été retenu.

Le taux de 1,2 % pourra être revu à la baisse ou à la hausse pour chaque collectivité territoriale qui contractualise, en fonction de trois critères.

Si la prise en compte dans ces critères de la démographie et des efforts déjà réalisés avait été proposée par le Sénat, celle des nouvelles normes imposées par l’État n’a pas été retenue, ce qui était pourtant essentiel.

Concernant les départements, le Gouvernement a repris la proposition du Sénat de déduire les allocations individuelles de solidarité, dont l’évolution n’est pas contrôlable par les conseils départementaux, de l’évaluation de l’évolution de leurs dépenses de fonctionnement. Mais les dépenses liées à la prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés, dont le coût est croissant, ne sont pas prises en compte, ce que nous regrettons vivement.

Nous regrettons également que la sanction financière en cas de non-respect du contrat soit particulièrement lourde, avec une reprise financière de 75 %, et même de 100 % pour les collectivités territoriales concernées par la contractualisation qui auront refusé de signer ! Cela s’apparente à une baisse des dotations déguisée.

Nous regrettons également que le dispositif du bonus soit très peu détaillé. Il est juste précisé que, en cas de respect des objectifs contractuels, le préfet pourra accorder aux communes et EPCI signataires « une majoration du taux de subvention pour les opérations bénéficiant de la dotation de soutien à l’investissement local ». Mais il s’agit d’une simple possibilité. Un contrat est pourtant censé engager les deux parties. De surcroît, le flou est total quant au pourcentage de majoration. En outre, monsieur le secrétaire d’État, quid des départements et des régions ?

Nous nous félicitons toutefois de la prise en compte de la suppression par le Sénat de la « règle d’or renforcée », à savoir le contrôle de la capacité de désendettement des collectivités territoriales : cet objectif est désormais incitatif et non plus contraignant. Cette nouvelle règle prudentielle fondée sur la capacité de désendettement faisait en effet peser le risque d’une véritable tutelle de l’État sur le recours à l’emprunt, avec des conséquences réelles sur l’investissement local.

Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, ce texte qui nous revient de l’Assemblée nationale comporte encore trop d’éléments insatisfaisants. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains soutiendra et votera les amendements présentés par notre commission des finances, dont l’adoption permettra d’assurer un meilleur équilibre entre responsabilité et liberté des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera sur le projet de loi de programmation des finances publiques, Bernard Delcros ayant traité du projet de loi de finances.

Cette loi de programmation des finances publiques a au moins le mérite d’exister ! Au sein du groupe Union Centriste, nous estimons qu’il s’agit plutôt d’un exercice de style, assez théorique. Comme lors du quinquennat de François Hollande, on nous promet, en début de mandat, un retour à l’équilibre en cinq ans. Nous n’y croyons pas.

Comme je l’avais fait remarquer en première lecture, le texte est fondé sur des estimations de croissance beaucoup trop optimistes pour la période 2020-2022, en désaccord avec le consensus des économistes.

Surtout, on nous propose au travers de ce projet de loi de programmation de reporter les efforts sur les dépenses en fin de période. Or nous qui avons presque tous dirigé des collectivités, nous savons que c’est en début de mandat que les efforts et les réformes doivent être faits.

Par ailleurs, les économies à faire sur les dépenses ne sont pas documentées. Depuis des années, on nous annonce des économies sur le budget de l’État, mais on ne les voit jamais venir. Cela nous rend sceptiques et dubitatifs sur la sincérité de cette loi de programmation qui prévoit un retour à l’équilibre dans cinq ans.

Le texte établit la répartition des efforts entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités locales. Je le redis ici au nom du groupe Union Centriste, nous n’avons jamais été opposés à ce que l’on demande des efforts aux collectivités locales, mais nous avons toujours souhaité que ces efforts soient équitables au regard de ceux de l’État,…

M. Michel Canevet. C’est vrai.

M. Vincent Delahaye. … ce qui n’a pas été le cas durant la période précédente. Nous aimerions que cela change.

Entre la première et la deuxième lecture, des améliorations ont été apportées par le Gouvernement. Retenir une évolution des dépenses des collectivités locales en tendance, comme pour l’État, constitue déjà un progrès, même si nous ne sommes pas forcément d’accord sur la manière de calculer.

En revanche, le montant de l’effort demandé –13 milliards d’euros sur un total de 60 milliards d’euros – nous paraît excessif. En effet, l’endettement des collectivités locales ne représente que 8 % de l’endettement global de la France (Mme Sophie Joissains applaudit.), et leurs budgets sont en excédent, contrairement à celui de l’État.

Nous nous interrogeons sur la prétendue contractualisation, qui en réalité s’apparente plutôt à un encadrement autoritaire des dépenses des 340 collectivités les plus importantes. Nous aurions aimé avoir davantage de détails, notamment sur la modulation de 0,15 % du critère de l’évolution démographique pour les collectivités ayant déjà fait des efforts ou sur le bonus devant récompenser les collectivités qui auront respecté l’encadrement des dépenses. Tout cela reste assez flou, monsieur le secrétaire d’État.

Pour conclure, si le texte a évolué, les prévisions de croissance nous semblent beaucoup trop optimistes et nous aurions aimé davantage de prudence et de réalisme. Nous soutiendrons les amendements du rapporteur général, pour aboutir à une loi de programmation plus juste à l’égard des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La discussion générale commune est close.

projet de loi de finances pour 2018

 
 
 

M. le président. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi de finances pour 2018.

Question préalable

 
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Question préalable (fin)

M. le président. Je suis saisi par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, d’une motion n° I-5.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat ;

Considérant que dans sa nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018, l’Assemblée nationale n’a pas retenu la proposition du Sénat de relever le plafond du quotient familial, alors même qu’il s’agit d’une mesure de justice fiscale pour les familles après les hausses d’imposition répétées du précédent quinquennat ;

Considérant qu’elle a confirmé la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages à l’horizon 2020, malgré le caractère injuste et précipité de cette mesure, qui réduit le pouvoir fiscal des communes et présente d’importants risques constitutionnels en maintenant l’impôt sur 20 % des contribuables qui acquittent d’ores et déjà 83 % de l’impôt sur le revenu ;

Considérant que l’Assemblée nationale n’a pas remis en cause la création de l’impôt sur la fortune immobilière qui pénalisera l’investissement locatif et concentrera l’imposition sur les ménages relevant du haut de la classe moyenne supérieure, alors même que la suppression totale de l’impôt de solidarité sur la fortune, adoptée par le Sénat, aurait été une mesure simple, lisible et de nature à redonner de l’attractivité à notre territoire ;

Considérant qu’elle a, en nouvelle lecture, rétabli les multiples surtaxes sur l’or, les yachts ou les voitures de sport, qui apparaissent comme autant de contre-feux dérisoires aux critiques légitimes sur l’incohérence de l’assiette du nouvel impôt sur la fortune immobilière ;

Considérant qu’elle n’a pas retenu des dispositions pourtant adoptées à l’unanimité par le Sénat telle la responsabilité solidaire des plateformes de commerce en ligne pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée et la possibilité de collecter la taxe sur la valeur ajoutée à la source par « paiement scindé » ce qui a pour objet la lutte contre la fraude fiscale ;

Considérant que bien qu’ayant entériné le relèvement de taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % à 10 % pour la construction et la rénovation des logements sociaux, l’Assemblée nationale n’a que partiellement suivi le Sénat pour trouver une solution plus soutenable pour l’ensemble des bailleurs sociaux, en entérinant une économie sur les aides personnelles au logement de 1,5 milliard d’euros d’ici 2020, et en supprimant quasi intégralement les aides personnelles au logement « accession » ;

Considérant enfin qu’elle n’a pas modifié les crédits des cinq missions rejetées par le Sénat (« Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ; « Immigration, asile et intégration » ; « Justice » ; « Sécurités » ; « Travail et emploi ») ni donné suite à ses propositions d’économies en dépenses, notamment par l’augmentation du temps de travail dans la fonction publique alors même que la masse salariale de l’État a augmenté de 5,8 % en 2017, un montant inédit sur les quinze dernières années ;

Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 172, 2017-2018).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. le rapporteur général, pour la motion.