Sommaire

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet

Secrétaires :

M. Claude Haut, Mme Colette Mélot.

1. Procès-verbal

2. Rétablissement de la confiance dans l'action publique – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Demande de réserve

Demande de réserve des articles 7 à 7 ter après l’article 12. – Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice, M. Philippe Bas ; président de la commission des lois, rapporteur. – La réserve est ordonnée.

Article 5

Amendement n° 242 rectifié de M. Jean-Claude Requier. – Retrait.

Amendement n° 27 rectifié de M. Hervé Maurey. – Rejet.

Amendement n° 28 rectifié de M. Hervé Maurey. – Rejet.

Amendement n° 29 rectifié de M. Hervé Maurey. – Rejet.

Amendement n° 283 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 243 rectifié de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l'article 5

Amendement n° 30 rectifié de M. Hervé Maurey. – Retrait.

Amendement n° 154 de M. Olivier Cadic. – Retrait.

Article 6

Amendements identiques nos 176 rectifié de M. Yves Détraigne et 273 de Mme Françoise Laborde. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 176, l’amendement n° 273 n'étant pas soutenu.

Amendement n° 32 rectifié de M. Hervé Maurey. – Retrait.

Amendement n° 31 rectifié de M. Hervé Maurey. – Retrait.

Amendement n° 113 de M. Didier Marie. – Retrait.

Amendement n° 112 de M. Jean-Pierre Sueur. – Retrait.

Amendements identiques nos 178 rectifié de M. Yves Détraigne et 270 de Mme Françoise Laborde. – Retrait de l’amendement n° 178 rectifié, l’amendement n° 270 n'étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 177 rectifié de M. Yves Détraigne, 225 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin et 268 de Mme Françoise Laborde. – Retrait des amendements nos 177 rectifié et 225, l’amendement n° 268 n'étant pas soutenu.

Amendement n° 284 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 152 de M. Vincent Delahaye. – Rejet.

Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.

3. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

4. Rétablissement de la confiance dans l'action publique – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Article additionnel après l'article 6

Amendement n° 183 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Article 6 bis (nouveau)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin

Mme Corinne Bouchoux

M. Jean-Yves Leconte

Mme Éliane Assassi

Mme Françoise Cartron

Amendement n° 84 rectifié de Mme Françoise Cartron. – Adoption.

Amendement n° 85 de Mme Françoise Cartron. – Adoption.

Amendement n° 86 de Mme Françoise Cartron. – Adoption.

Mme Laurence Cohen

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l'article 6 bis

Amendement n° 116 de M. Jean-Pierre Sueur. – Retrait.

Articles 7, 7 bis et 7 ter (réservés)

Articles additionnels avant l'article 8

Amendements identiques nos 34 rectifié ter de M. Hervé Maurey et 118 rectifié de M. Jean-Pierre Sueur. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 54 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Retrait.

Amendement n° 17 de M. Henri Cabanel. – Retrait.

Amendement n° 40 de M. Philippe Kaltenbach. – Non soutenu.

Article 8

Amendement n° 97 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Amendement n° 56 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Amendement n° 117 de M. Jean-Pierre Sueur. – Rejet.

Amendement n° 38 de M. Philippe Kaltenbach. – Retrait.

Amendement n° 189 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 119 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Adoption.

Amendement n° 37 de M. Philippe Kaltenbach. – Rejet.

Amendement n° 50 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Retrait.

Amendement n° 120 rectifié de M. Didier Marie. – Rejet.

Amendement n° 5 rectifié bis de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Non soutenu.

Amendement n° 98 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 99 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 79 de M. Jean-Pierre Grand. – Retrait.

Amendement n° 140 de M. Hervé Maurey. – Non soutenu.

Amendement n° 201 rectifié de M. Joël Labbé. – Retrait.

Amendement n° 80 de M. Jean-Pierre Grand. – Retrait.

Amendement n° 216 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 55 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Adoption.

Amendement n° 39 de M. Philippe Kaltenbach. – Rejet.

Amendement n° 14 de M. Jean-Pierre Grand. – Retrait.

Amendement n° 202 rectifié de M. Joël Labbé. – Retrait.

Amendement n° 217 du Gouvernement. – Retrait.

Amendement n° 287 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l'article 8

Amendement n° 1 rectifié quater de M. Philippe Dominati. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 9

Amendement n° 123 rectifié bis de M. Jean-Yves Leconte. – Adoption.

Amendement n° 122 de M. Jean-Pierre Sueur. – Retrait.

Amendement n° 101 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Amendement n° 81 de M. Jean-Pierre Grand. – Retrait.

Amendement n° 51 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – Retrait.

Amendement n° 121 rectifié de M. Didier Marie. – Retrait.

Amendement n° 6 rectifié bis de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Non soutenu.

Amendement n° 100 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Amendement n° 15 de M. Jean-Pierre Grand. – Retrait.

Amendement n° 288 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 9 bis (nouveau)

Amendement n° 10 rectifié quinquies de M. Philippe Dominati. – Rejet.

Amendement n° 265 de M. Philippe Dominati. – Rejet.

Amendement n° 218 du Gouvernement et sous-amendement n° 292 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l'article 9 bis

Amendement n° 153 de M. Vincent Delahaye. – Rejet.

Amendement n° 144 de M. Vincent Delahaye. – Non soutenu.

Article 9 ter (nouveau)

Amendement n° 289 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 10

M. Christian Favier

Amendement n° 219 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 103 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 11

Amendement n° 104 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 220 du Gouvernement. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 12 (supprimé)

Amendement n° 221 du Gouvernement

Suspension et reprise de la séance

Amendement n° 221 du Gouvernement. – Rejet par scrutin public.

L’article demeure supprimé.

Article 7 (précédemment réservé)

Demande de priorité

Demande de priorité de l’amendement n° 294 et du sous-amendement n° 295. – M. Philippe Bas ; président de la commission des lois, Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. – La priorité est ordonnée.

Mme Éliane Assassi

Amendement n° 294 de la commission et sous-amendement n° 295 de M. Jean-Léonce Dupont. – Rejet, par scrutin public du sous-amendement et adoption, par scrutin public de l’amendement rédigeant l’article.

Amendement n° 33 rectifié bis de M. Hervé Maurey. – Devenu sans objet.

Amendement n° 159 de M. Jean-Léonce Dupont. – Devenu sans objet.

Amendement n° 20 rectifié de M. Henri Cabanel. – Devenu sans objet.

Suspension et reprise de la séance

Amendement n° 214 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 213 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Article 7 bis (nouveau) (précédemment réservé) – Adoption.

Articles additionnels après l’article 7 bis (précédemment réservés)

Amendement n° 96 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 204 rectifié de M. Joël Labbé. – Retrait.

Amendement n° 285 de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 223 rectifié du Gouvernement. – Retrait.

Article additionnel avant l’article 7 ter (précédemment réservé)

Amendement n° 286 de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé) – Adoption.

5. Candidature à un office parlementaire

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron

6. Nomination d’un membre d’un office parlementaire

7. Rétablissement de la confiance dans l'action publique – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission et adoption du projet de loi dans le texte de la commission modifié

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Article 13

Amendement n° 198 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.

Amendement n° 222 du Gouvernement et sous-amendement n° 293 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Adoption de l’article modifié.

Article 14 – Adoption.

Articles additionnels après l'article 14

Amendement n° 67 rectifié de Mme Nathalie Goulet. – Non soutenu.

Amendement n° 277 rectifié de M. Bruno Retailleau. – Adoption, par scrutin public de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 11 rectifié quater de M. Rémy Pointereau. – Devenu sans objet.

Amendement n° 181 rectifié de M. Éric Doligé. – Devenu sans objet.

Intitulé du projet de loi

Amendement n° 224 du Gouvernement. – Rejet par scrutin public.

Amendement n° 180 de M. Éric Doligé. – Retrait.

Amendement n° 16 de M. Henri Cabanel. – Rejet par scrutin public.

Seconde délibération

Demande de seconde délibération sur l’article 4. –M. Philippe Bas ; président de la commission des lois ; Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. – Adoption par scrutin public : la seconde délibération est ordonnée.

Suspension et reprise de la séance

Article 4 (supprimé)

Amendement n° A-1 de de la commission. – Adoption, par scrutin public, de l'amendement rétablissant l'article.

Vote sur l'ensemble

M. Joël Labbé

M. Jean-Pierre Sueur

Mme Éliane Assassi

Adoption, par scrutin public, du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

8. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet

vice-président

Secrétaires :

M. Claude Haut,

Mme Colette Mélot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Articles additionnels après l’article 4 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Demande de réserve

Rétablissement de la confiance dans l'action publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, rétablissant la confiance dans l’action publique (projet n° 581, texte de la commission n° 609, rapport n° 607, avis n° 602) et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l’action publique (projet n° 580, texte de la commission n° 608, rapport n° 607, avis n° 602).

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, dans le texte de la commission.

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Demande de réserve

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 5

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne pourrai malheureusement pas suivre l’intégralité de nos débats cet après-midi, car je dois participer à l’installation du Comité interministériel de l’aide aux victimes, une instance très importante aux yeux du Gouvernement. Je vous prie de bien vouloir m’en excuser.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’intérieur, représentera le Gouvernement en mon absence.

Je souhaite néanmoins assister aux débats sur l’indemnité représentative de frais de mandat, l’IRFM, et les différents points y afférents.

C’est pourquoi, en application de l’article 44 du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve des articles 7 à 7 ter après l’article 12.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?…

La réserve est ordonnée.

TITRE III (SUITE)

DISPOSITIONS RELATIVES À L’INTERDICTION DE L’EMPLOI DE MEMBRES DE LA FAMILLE DES ÉLUS ET DES MEMBRES DU GOUVERNEMENT

M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre III, à l’article 5.

Demande de réserve
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Articles additionnels après l'article 5

Article 5

I. – L’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Après le même premier alinéa, sont insérés huit alinéas ainsi rédigés :

« Toutefois, il est interdit à l’autorité territoriale de compter parmi les membres de son cabinet :

« 1° Son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« 2° Ses parents, enfants, frères et sœurs ainsi que leur conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« 3° Ses grands-parents, ses petits-enfants et les enfants de ses frères et sœurs ;

« 4° Les parents, enfants et frères et sœurs de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« La violation de cette interdiction emporte de plein droit la cessation du contrat.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités selon lesquelles l’autorité territoriale rembourse les sommes versées à un collaborateur employé en violation de l’interdiction prévue au présent I.

« II. – Le fait, pour l’autorité territoriale, d’employer un collaborateur en violation de l’interdiction prévue au I est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. » ;

3° Au début du deuxième alinéa, est ajoutée la mention : « III. – ».

II. – Les I et II de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans leur rédaction résultant de la présente loi, sont applicables à la commune et au département de Paris et, à compter du 1er janvier 2019, à la Ville de Paris.

M. le président. L'amendement n° 242 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Collombat, Mme Costes, M. Guérini et Mme Malherbe, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

les membres

insérer le mot :

contractuels

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. L’annonce de ce projet de loi sur la transparence de la vie politique, qui est devenu projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique, a suscité un certain émoi chez les maires de petites communes. Ils ont en effet lu dans la presse qu’il était question de supprimer les emplois familiaux dans les mairies. En réalité, il s’agit seulement de supprimer les emplois familiaux parmi les collaborateurs contractuels des autorités territoriales.

Cet amendement de précision vise à les rassurer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, pour une raison très simple.

Pour un fonctionnaire venant d’une autre administration détaché auprès du cabinet du président de l’exécutif local comme pour un contractuel, la situation est la même : il est interdit d’employer un membre de sa famille.

Nous avons décidé cette interdiction. Nous devons rester cohérents, en évitant de faire passer les ciseaux sur une ligne de partage forcément discutable.

Aussi, et pour éviter une injustice entre fonctionnaire et contractuel, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra avec fermeté un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Une telle précision ne nous semble pas utile. La définition du cabinet est suffisamment claire.

M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 242 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Non, je le retire, monsieur le président. Je rappelle simplement que, dans les petites communes, il n’y a pas de cabinet ; juste une secrétaire !

M. le président. L'amendement n° 242 rectifié est retiré.

L'amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mmes Deseyne et Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

ou toute personne avec qui il a une relation amoureuse

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Dès lors que le principe de l’interdiction des emplois « familiaux » est retenu, il convient de l’appliquer sans se limiter aux catégories proposées par le Gouvernement.

Cet amendement vise à embrasser les relations intimes qui peuvent exister entre deux individus et à éviter que la relation d’une autorité territoriale ne puisse travailler avec celle-ci au sein de son cabinet.

Il serait paradoxal de n’être plus autorisé à travailler avec son conjoint dans son cabinet, mais de pouvoir le faire avec son amant ou sa maîtresse.

M. le président. L'amendement n° 28 rectifié, présenté par M. Maurey, Mmes Deseyne et Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer l’alinéa ainsi rédigé :

« …° Ses anciens conjoints, anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité, anciens concubins, les pères ou mères de ses enfants ou toute personne avec qui il a eu une relation amoureuse ;

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à étendre l’interdiction aux anciens conjoints, anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité, anciens concubins, les pères ou mères de ses enfants ou toute personne avec qui il a eu une relation amoureuse.

M. le président. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mmes Deseyne et Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer l’alinéa ainsi rédigé :

« …° Les grands-parents, les petits-enfants et les enfants des frères et sœurs de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin.

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement tend à interdire à une autorité territoriale d’employer les grands-parents, les petits-enfants et les enfants des frères et sœurs de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est ridicule !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Les relations privées sont privées !

Je ne vois pas comment le président de la collectivité pourrait être informé, et encore moins comment il pourrait vérifier la réalité d’une relation privée entre deux personnes.

Ces amendements, vraisemblablement rédigés avec un peu d’ironie, sont inacceptables d’un point de vue constitutionnel. Je vous demande donc de les rejeter, mes chers collègues. (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Sauf à relire Roland Barthes et ses Fragments d’un discours amoureux, je ne suis pas sûre que nous devions aller dans le sens proposé par les auteurs de ces amendements, sur lesquels j’émets un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Hier soir, nous avons débattu de l’interdiction des emplois familiaux prévue par ce texte, dispositif que je jugeais, je l’ai indiqué, très excessif.

Le Sénat a accepté de revenir sur l’interdiction des emplois familiaux. En revanche, il a refusé de mettre en place un dispositif de contrôle de la réalité de ces emplois, comme je le proposais.

En effet, ce qui a choqué dans les affaires ayant justifié une telle disposition, c’est le doute sur la réalité des emplois et leur niveau de rémunération.

La rémunération est déjà encadrée au Sénat. Il suffirait donc d’instituer un dispositif pour veiller à la réalité de ces emplois.

Mme la garde des sceaux a avancé qu’une question morale se posait également. (Mme la garde des sceaux le conteste.) J’ignorais que notre rôle était d’ériger des règles morales. Quoi qu’il en soit, je trouve paradoxal que l’on ne puisse plus embaucher sa femme, sa fille ou sa sœur, mais que l’on puisse encore embaucher sa maîtresse, la mère de ses enfants ou ses ex-compagnes…

On ne peut pas arguer de la morale publique et, dans le même temps, autoriser l’embauche de personnes avec lesquelles les élus ont des relations presque aussi étroites qu’avec les personnes à qui ils sont unis par des liens juridiques.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. M. Maurey ouvre une discussion intéressante. La réalité du travail de nos collaborateurs doit, bien entendu, être établie. À titre personnel, je n’imagine pas un seul instant les employer à ne rien faire. Certaines choses vont s’en dire, mais elles vont encore mieux en le disant.

Toutefois, nous avons plusieurs fois eu l’occasion de l’exprimer dans cette enceinte : certaines compétences relèvent non pas du législateur, mais du bureau de chacune des assemblées parlementaires, dans le respect du principe d’autonomie. N’allons pas ajouter et empiler des dispositions législatives qui feraient intrusion dans l’organisation de notre travail, alors que nous sommes si jaloux de notre indépendance. Nous le sommes d’ailleurs à juste titre, me semble-t-il, car cette dernière n’est pas faite dans notre intérêt, mais dans celui des Français et des collectivités que nous représentons.

Pour cette raison, je m’oppose systématiquement à toute mesure ayant pour effet d’attraire vers la loi des réglementations qui ne relèvent que du bureau des assemblées.

M. Yvon Collin. Exactement !

M. Philippe Bas, rapporteur. En la matière, il appartiendra donc au bureau de prendre les décisions qu’il jugera opportunes. (Mme Bariza Khiari applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. M. Philippe Bas, président de la commission des lois et rapporteur de ce texte, a estimé qu’il y avait eu, hier soir, un vote accidentel. Cela peut arriver ; j’ai un peu d’expérience parlementaire, et j’ai vu beaucoup de choses !

C’est d’ailleurs pourquoi, madame la garde des sceaux, j’insiste tant sur la nécessité de ne pas rendre banale la procédure accélérée. Il faut du temps pour faire des lois ; on a le droit de se tromper, de revenir sur des votes, de poursuivre la réflexion et de peaufiner le texte.

Il se trouve qu’un certain nombre de groupes formant une large majorité de cette Haute Assemblée ont pris position pour mettre fin aux emplois familiaux. Il se trouve aussi que les membres de la commission des lois ont voté à l’unanimité dans le même sens. Personne ne peut le contester. Nous avons assisté hier à un incident de procédure, mais il y aura un nouveau vote, au cours duquel chacun pourra s’exprimer.

J’irai même plus loin. Je considère que certaines décisions relèvent parfois de l’inconscient et des lapsus collectifs. Il y a aussi des collègues qui ont exprimé rationnellement leur position, laquelle était contraire à celle de la majorité, de la commission ou de la Haute Assemblée. Ils ont bien entendu le droit d’exprimer une telle opinion, et nous nous battrons toujours pour qu’ils l’aient.

J’en viens à l’amendement de M. Maurey. Il est évident que la vie privée se compose de toute une série d’éléments dans lesquels le législateur n’a ni les moyens ni le désir de s’immiscer.

Les emplois familiaux sont définis par rapport aux liens familiaux reconnus et attestés. Nous avons sur ce point une position claire, que j’ai toujours soutenue, car on ne doit pas pouvoir penser que l’on privilégie par favoritisme les personnes de sa famille par rapport à d’autres.

Il sera donc sage de prendre position clairement pour mettre fin aux emplois familiaux. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.

M. Gaëtan Gorce. Le point abordé à l’instant par Jean-Pierre Sueur, et qui a aussi été débattu hier soir, ne saurait être considéré comme anecdotique. Il faut prendre en compte l’exaspération de toutes celles et de tous ceux qui exercent des responsabilités politiques ou qui aspirent à en exercer, face à une mise en question permanente, dans tous les domaines et sur tous les sujets.

La réserve parlementaire serait un élément de « corruption », les emplois que nous pouvons mobiliser pour exercer notre activité seraient naturellement « fictifs », et les moyens mis à la disposition des parlementaires pour leur permettre d’agir seraient forcément utilisés à des fins qui ne sont pas celles pour lesquelles ils ont été établis…

Tout cela donne une image de la représentation nationale et de la politique absolument catastrophique, qui encourage les contestations dont elle fait l’objet. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu d’abus ; on en a suffisamment parlé. Mais, par définition, les abus ne constituent pas la règle. Accepter, à travers des textes présentés de cette manière, l’idée que le Parlement et les parlementaires, loin de vouloir servir l’intérêt général, n’auraient d’autres objectifs que de servir leurs intérêts personnels, particuliers ou pécuniaires, n’est pas acceptable. Les parlementaires font aujourd’hui l’objet d’enquêtes menées par leurs propres banques au motif qu’ils sont susceptibles d’être soumis à la corruption ! Nous assistons à une remise en question de la démocratie parlementaire elle-même.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Gaëtan Gorce. Je le dis d’autant plus fortement que je suis favorable à des mesures de transparence sur tous les sujets que l’on vient d’indiquer. Mais il faut arrêter d’instruire ce procès, qui sert seulement deux types d’intérêts : une technocratie qui prétend diriger l’État à la place du politique, et des démagogues ou autres populistes qui prétendent diriger l’État à la place de la démocratie, c’est-à-dire à la place des citoyens.

Les amendements dont nous sommes saisis montrent bien le ridicule dans lequel nous sommes en train de sombrer. Qui va définir la relation amoureuse ? D’un simple point de vue affectif, qui est capable de définir d’une quelconque façon la relation qui le lie à ses enfants, sa femme ou sa maîtresse ? Tout cela n’a aucun sens ! Faudra-t-il financer des détectives privés sur l’IRFM pour opérer certaines vérifications ? (Sourires.)

Il serait temps que nous nous ressaisissions et que le Gouvernement nous aide à le faire, afin de pouvoir aborder les grands sujets du moment d’une manière plus digne et plus noble. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Comme je l’ai déjà souligné, je regrette que le premier texte d’importance examiné par le Sénat lors de cette session extraordinaire soit celui-là.

Par définition, dans un pays qui connaît une crise financière et sociale, le chômage, des ruptures de vie, il est un peu surprenant que l’on en vienne à parler de nous des jours et des nuits durant, si possible en mal, un peu en bien aussi…

Pour l’opinion publique, il est certain que ce texte ne va pas améliorer le sentiment de décalage, que l’on essaie de réduire, entre l’opinion publique et les parlementaires. Je serais donc d’avis, sur ce projet de loi, d'aller à l’essentiel, sans trop traîner, pour revenir très vite à des sujets ayant plus de sens pour nos concitoyens.

Je n’ai rien à dire sur la demande émise par M. le rapporteur. Du temps glorieux où j’étais chargé des relations avec le Parlement, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, j’ai demandé un certain nombre de fois des secondes délibérations. C’est la règle, c’est la Constitution ; il faut la respecter. Le Gouvernement et le président de la commission ont parfaitement le droit de demander une seconde délibération, et le Sénat s’exprimera.

Sur les amendements de M. Maurey et de ses collègues, on peut tout imaginer dans la vie. On peut se demander si les personnes avec qui vous êtes en relation ne sont pas raëliens, ce qui voudrait dire que vous êtes unis devant Dieu par un lien plus puissant que le lien familial. On peut aussi se demander si vous n’appartenez pas à la même loge… (Sourires.)

Nous connaissons votre humour so british, qui transparaît au travers de vos amendements, monsieur Maurey. Mais il y a un moment où la raison doit prévaloir. Je préférerais donc, à l’instar de M. le rapporteur, que ces amendements soient retirés, car je ne suis pas sûr – vous m’en excuserez, mon cher collègue – qu’ils grandissent le débat parlementaire. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains, du groupe La République en marche et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 283, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

3° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « III. - » ;

b) Les mots : « à ces emplois » sont remplacés par les mots : « aux emplois mentionnés au premier alinéa du I ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 283.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 243 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les I et II de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans leur rédaction issue de la présente loi, ne s’appliquent pas aux collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. L’objet de cet amendement, relatif aux collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants, est suffisamment explicite.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je demande à notre collègue Pierre-Yves Collombat de bien vouloir retirer cet amendement.

En effet, même si ce n’est pas interdit, il n’y a pas, à ma connaissance, de cabinet dans les communes de moins de 3 500 habitants.

Exclure les petites communes du dispositif d’interdiction d’emploi des collaborateurs familiaux créerait, de mon point de vue, des suspicions infondées, alors qu’il s’agit d’un problème essentiellement théorique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je partage l’avis de M. le rapporteur. En pratique, cet amendement n’aurait guère d’intérêt et, en théorie, je ne vois pas en quoi il serait opportun de distinguer entre les petites communes et les communes plus importantes s’agissant de l’objectif d’interdiction des emplois familiaux.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Les explications de Mme la ministre et de M. le rapporteur m’inciteraient plutôt à maintenir mon amendement. Comme notre collègue Alain Richard l’a fait observer, il peut y avoir des cabinets, y compris dans des communes qui n’ont pas d’habitants ! Il n’y a aucune interdiction, contrairement à ce que l’on affirme.

En revanche, ceux qui ont exercé un certain temps – j’ai été maire durant vingt-deux ans – savent qu’il n’est pas toujours simple de trouver du personnel compétent et formé.

Ensuite, sur la question du maintien des emplois familiaux, vous savez que je suis plus que nuancé.

Enfin, je fais observer à notre collègue Roger Karoutchi que ce n’est pas nous qui avons dressé le couvert permettant de présenter aujourd’hui ce menu ! À titre personnel, je m’en serais bien passé !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 243 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 5
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Article 6 (début)

Articles additionnels après l'article 5

M. le président. L'amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Deseyne, M. Delahaye, Mme Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un membre de la famille de l’autorité territoriale tel que défini à l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, résultant de l’article 5 de la présente loi, ne peut être employé dans les établissements et les organismes rattachés à la collectivité territoriale, ainsi que les organismes au sein desquels la collectivité locale ou ses établissements publics détiennent plus de la moitié des voix ou exercent un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion.

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Je vais retirer cet amendement, mais je profite de l’occasion qui m’est offerte pour répondre à M. le rapporteur.

Comme lui, je pense que c’est une erreur que la loi fixe des règles relevant du seul bureau du Sénat. Malheureusement, c’est ce que nous faisons depuis un certain nombre d’heures déjà. Interdire les emplois familiaux, réformer l’IRFM, cela relève a priori de la seule décision des instances du Sénat. Je regrette pour ma part que l’on ait suivi le Gouvernement dans cette voie. Nous aurions dû rejeter tous ces articles au motif qu’ils relèvent de la seule compétence des assemblées.

Enfin, pour répondre à M. Sueur, je ne crois pas que le vote d’hier soir soit le résultat d’une erreur de procédure. Les groupes se sont sans doute clairement positionnés contre les emplois familiaux ; le scrutin public l’a montré. Mais, entre la position des groupes et le sentiment de chacune et chacun d’entre nous dans cet hémicycle, il y a une vraie différence. Nous avons pu la sonder hier soir au moment du vote, lorsque la majorité des collègues présents dans l’hémicycle ont eu le sentiment que la suppression des emplois familiaux était purement et simplement excessive et ridicule. Il suffisait de mettre en place un contrôle efficace. Mais l’on a cédé une fois de plus à la pression des médias et de l’opinion. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. - M. Yvon Collin applaudit également.)

Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 30 rectifié est retiré.

L'amendement n° 154, présenté par M. Cadic et Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Il est interdit à un fonctionnaire du ministère des affaires étrangères ayant eu une fonction de direction au sein de l’administration centrale ou en poste à l’étranger d’intervenir et de faciliter l’avancement de carrière, la nomination ou le recrutement, par voie statutaire ou contractuelle de :

1° Son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

2° Ses parents, enfants, frères et sœurs ainsi que leur conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

3° Ses grands-parents, ses petits-enfants et les enfants de ses frères et sœurs ;

4° Les parents, enfants et frères et sœurs de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin.

La violation de cette interdiction emporte la cessation de plein droit du contrat.

Un décret en Conseil d’État détermine les modalités selon lesquelles les sommes versées en violation de cette interdiction sont remboursées à l’État.

II. – Le fait pour le fonctionnaire du ministère des affaires étrangères d’intervenir en violation de l’interdiction prévue au I est puni d’une peine de 45 000 € d’amende.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. J’ai signé cet amendement par inadvertance, et je le retire par conviction ! (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 154 est retiré.

Articles additionnels après l'article 5
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Article 6 (interruption de la discussion)

Article 6

I. – Lorsque le contrat de travail en cours au jour de la promulgation de la présente loi méconnaît l’article 8 bis de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dans sa rédaction résultant de l’article 4 de la présente loi, il prend fin de plein droit dans les conditions prévues au présent I, sous réserve du respect des dispositions spécifiques à la protection de la grossesse et de la maternité prévues à l’article L. 1225-4 du code du travail.

La rupture du contrat constitue un licenciement fondé sur la présente loi. Ce motif spécifique constitue une cause réelle et sérieuse.

Le parlementaire notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi. Il lui remet dans le même délai les documents prévus aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du code du travail ainsi qu’une attestation d’assurance chômage.

Le collaborateur peut exercer le délai de préavis prévu par son contrat ou par la réglementation applicable à l’assemblée concernée.

Le collaborateur bénéficie des indemnités mentionnées aux articles L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-28 du code du travail lorsqu’il remplit les conditions prévues. Les indemnités sont supportées par l’assemblée parlementaire.

Le parlementaire n’est pas pénalement responsable de l’infraction prévue à l’article 8 bis de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 précitée lorsque cette infraction est commise pendant le délai de notification et le délai de préavis prévus au présent I.

II. – Lorsqu’un collaborateur est employé, au jour de la promulgation de la présente loi, en violation du I de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction résultant de l’article 5 de la présente loi, le contrat prend fin de plein droit dans les conditions prévues au présent II, sous réserve du respect des dispositions spécifiques à la protection de la grossesse et de la maternité prévues à l’article L. 1225-4 du code du travail.

L’autorité territoriale notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi. Le collaborateur peut exercer le délai de préavis prévu la réglementation applicable.

L’autorité territoriale n’est pas pénalement responsable de l’infraction prévue au II de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée lorsque cette infraction est commise pendant le délai de notification et le délai de préavis prévus au présent II.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 176 rectifié est présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

L'amendement n° 273 est présenté par Mme Laborde.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement n° 176 rectifié.

Mme Françoise Férat. Cet amendement vise à tirer les conséquences des modifications proposées à l’article 4. En effet, la question des emplois familiaux ne saurait résumer à elle seule celle des emplois dits « fictifs », pour lesquels la justice a ouvert un certain nombre de procédures. Au Sénat, les dispositions de l’article 6 concerneront près de 76 collaborateurs et collaboratrices, qui seront licenciés du fait de leur qualité d’emplois « familiaux ».

Or le projet de loi est muet sur les emplois présumés fictifs non familiaux, alors même qu’il s’agit de rétablir la confiance dans l’action publique. Pourtant, les dispositions du présent article créeront une rupture d’égalité manifeste, contraire à l’objectif initial proposé, sauf à considérer que tous les emplois familiaux sont des emplois fictifs et relèvent des dispositions du code pénal qui les répriment.

Les auteurs de cet amendement rappellent à cet égard que les différentes enquêtes en cours, qu’elles en soient au stade de l’instruction ou de l’enquête préliminaire, et dont certaines sont à l’origine du titre III du présent projet de loi, portent notamment sur des faits de « détournements de fonds publics » en ce qu’elles interrogent la réalité des emplois concernés, et non sur des faits de « discrimination », qualification dont relève le « népotisme ».

M. le président. L’amendement n° 273 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 176 rectifié ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Notre collègue Nathalie Goulet vient de nous dire que des amendements pouvaient être signés par inadvertance. Eh bien, le résultat de certains votes peut aussi survenir à la suite d’une forme d’inadvertance – comme Jean-Pierre Sueur et Roger Karoutchi, j’en ai fait l’expérience, à maintes reprises, depuis plusieurs décennies.

Je voudrais dire à M. Maurey que la commission et moi-même avons veillé à ce que ne figure dans la loi aucune disposition relevant du bureau des assemblées. Ainsi, l’interdiction des emplois familiaux doit relever de la loi pour la bonne et simple raison qu’elle est assortie d’une sanction pénale.

Quant à l’indemnité représentative de frais de mandat, elle est inscrite dans le code de la sécurité sociale ; pour la supprimer, il faut donc aussi passer par la loi.

Nous ne nous sommes donc pas trompés d’instrument dans ces deux cas. Pour autant, nous ne passons par la loi que lorsque c’est strictement nécessaire, car nous veillons bien à préserver l’autonomie de chacune des assemblées.

Dans cet esprit, j’aurai l’honneur de vous demander une seconde délibération sur la suppression de l’article 4 relatif aux emplois familiaux des députés et sénateurs et, ayant confiance dans votre futur vote, je souhaite, à cet instant, que vous n’adoptiez pas l’amendement n° 176 rectifié.

En effet, l’article 6 apporte des garanties, que le Gouvernement n’avait pas prévues, aux collaborateurs qui viendraient à devoir quitter leur emploi si l’amendement que je proposerai en seconde délibération était adopté : un minimum de temps pour se retourner, avec un délai de licenciement de deux mois qui puisse être suivi d’un préavis courant sur trois mois, et l’accès, comme les salariés des entreprises qui perdent leur emploi, au dispositif du contrat de sécurisation professionnelle.

Je vous supplie, mes chers collègues, de bien vouloir entendre ces arguments inspirés par le souci de l’avenir des collaborateurs familiaux : la commission a été unanime pour vous demander de leur accorder des garanties, et elle est donc défavorable à cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’émettrai un avis défavorable.

Nous partageons la philosophie que vient d’expliquer M. le président de la commission des lois. Nous devons passer par la loi, puisqu’une sanction pénale est jointe à l’interdiction, mais nous le faisons, comme j’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises devant vous, dans le respect de l’autonomie des assemblées. D’ailleurs, le projet de loi renvoie régulièrement à des décisions des bureaux des assemblées et à leur règlement.

Je le répète, le Gouvernement ne souhaite en aucun cas s’immiscer dans ce qui relève de l’autonomie des assemblées.

L’intérêt de l’article 6 est de permettre la mise en œuvre de l’interdiction de l’emploi d’un membre de la famille proche, mise en œuvre qui va être entourée d’un certain nombre de garanties, notamment en termes de préavis, de délai ou de qualification du licenciement, dont le motif constituera une cause réelle et sérieuse.

C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement n° 176 rectifié.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.

Mme Françoise Férat. J’avoue que je ne comprends ni le cheminement de la pensée de la commission et de son rapporteur ni l’objectif à atteindre. Je maintiens donc mon amendement.

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Yonnet, pour explication de vote.

Mme Évelyne Yonnet. Je reste perplexe face à ces débats ! Comme cela a déjà été dit, notamment par Gaëtan Gorce, je ne vois pas à quoi correspond la catégorie des « emplois familiaux ». Il me semblait qu’hier soir nous étions d’accord pour parler d’attachés parlementaires et pour supprimer cette notion, qui – je le répète – n’existe pas en droit. Ce sont des emplois tout court, et ceux qui les occupent ont pour leur défense le code du travail.

Il est vrai que le texte qui nous avait été d’abord proposé était assez surprenant puisqu’il entraînait des licenciements secs. Or, comme nous, sénateurs, sommes les employeurs, nos employés peuvent très bien se retourner contre nous et nous amener au pénal.

Sommes-nous un conseil de prud’hommes pour décider qu’il y aura une sanction pénale, alors que, je le rappelle, le Sénat autorisait jusqu’à présent de manière transparente l’embauche d’un membre de la famille ? C’était clair et net ! Sinon, personne ne l’aurait fait.

Je veux bien que l’on argumente pendant des heures et que l’on revienne sur des votes, mais, comme Mme Férat, je ne comprends pas cette discussion.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Le texte proposé par notre président-rapporteur me semble aller dans le sens de l’intérêt des collaborateurs familiaux.

Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Absolument !

Mme Catherine Procaccia. Mme la ministre nous a dit qu’elle serait attentive au fait que les collaborateurs concernés soient traités comme des salariés relevant du code du travail.

Pour ma part, je fais confiance au texte de la commission ; tout ce qui peut aller à son encontre irait aussi à l’encontre de l’intérêt des personnels concernés.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 176 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 107 :

Nombre de votants 307
Nombre de suffrages exprimés 307
Pour l’adoption 26
Contre 281

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, ce ne serait pas un luxe superfétatoire que chacun de nous puisse disposer de la liasse d’amendements !

M. le président. Le retirage est en cours, monsieur de Raincourt ; il demande quelques minutes.

L’amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Deseyne, MM. de Raincourt, Vaspart et Fouché, Mme Férat, MM. Commeinhes et Capo-Canellas, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Les contrats de travail en cours au jour de la promulgation de la présente loi méconnaissant les dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dans leur rédaction résultant de l’article 4 de la présente loi prennent fin de plein droit lors de la fin du mandat parlementaire en cours au moment de la promulgation de la présente loi, sous réserve du respect des dispositions spécifiques à la protection de la grossesse et de la maternité prévues à l’article L. 1225-4 du code du travail.

La rupture du contrat constitue un licenciement fondé sur la présente loi. Ce motif constitue une cause réelle et sérieuse.

Le parlementaire notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, deux mois avant la fin de son mandat actuel. Il lui remet dans le même délai les documents prévus aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du code du travail ainsi qu’une attestation d’assurance chômage.

La période qui s’étend entre la notification du licenciement et la rupture de plein droit mentionnée au premier alinéa constitue le délai de préavis quelles que soient l’ancienneté du collaborateur et la durée de préavis prévue au contrat.

Le collaborateur bénéficie des indemnités mentionnées aux articles L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-28 du code du travail lorsqu’il remplit les conditions prévues. Les indemnités sont supportées par l’assemblée parlementaire dans les conditions fixées par son règlement.

Le parlementaire n’est pas pénalement responsable de l’infraction prévue à l’article 8 bis de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 lorsque cette infraction est commise pendant son mandat en cours au moment de la promulgation de la présente loi.

II. – Le contrat d’un collaborateur, employé au jour de la promulgation de la présente loi, en violation des dispositions du I de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans leur rédaction résultant de l’article 5 de la présente loi, prend fin de plein droit lors de la fin du mandat de l’autorité territoriale en cours au moment de la promulgation de la présente loi.

L’autorité territoriale notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, deux mois avant la fin de son mandat en cours au moment de la promulgation de la présente loi. La période qui s’étend entre la notification du licenciement et la rupture de plein droit mentionnée à l’alinéa ci-dessus constitue le délai de préavis quelle que soit la durée de préavis applicable.

L’autorité territoriale n’est pas pénalement responsable de l’infraction prévue au II de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 lorsque cette infraction est commise pendant son mandat en cours au moment de la promulgation de la présente loi.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Cet amendement vise à reporter la fin du contrat en cours d’un membre de la famille du parlementaire ou de l’autorité territoriale à l’issue du mandat de ce dernier.

L’application de l’interdiction des emplois familiaux aux contrats en cours est particulièrement brutale pour les salariés concernés, même si le texte issu de la commission des lois améliore le dispositif envisagé par le Gouvernement.

M. le président. L’amendement n° 31 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Deseyne, MM. de Raincourt et Fouché, Mme Férat, MM. Commeinhes et Capo-Canellas, Mme Imbert, MM. Laurey et Médevielle et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’interdiction prévue par l’article 8 bis de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dans leur rédaction résultant de l’article 4 de la présente loi ne s’applique pas aux contrats en cours.

II. – L’interdiction prévue par le I de l’article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans leur rédaction de l’article 5 de la présente loi ne s’applique pas aux contrats en cours.

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement supprime l’article obligeant un parlementaire à mettre fin aux contrats en cours des membres de sa famille. Comme vient de l’indiquer Mme Férat, l’application de l’interdiction des emplois familiaux aux contrats en cours est particulièrement brutale pour les salariés concernés, même si le texte issu de la commission des lois améliore le dispositif envisagé par le Gouvernement. Il nous semble plus juste d’appliquer cette interdiction aux contrats futurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Tout en comprenant la motivation de ces deux amendements, la commission y est défavorable puisqu’elle s’est exprimée en faveur de l’interdiction dès l’entrée en vigueur de la loi des emplois dits familiaux – je reconnais que cette expression peut paraître abusive. (M. Yvon Collin approuve.) Dans le même temps, nous avons ajouté des garanties sociales au texte présenté par le Gouvernement.

Par cohérence, et tout en étant sensible au souci de retarder le moment de la reconversion des collaborateurs familiaux qui anime les auteurs de ces amendements, la commission ne peut donc qu’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces deux amendements. Nous avons en effet un objectif très clair : l’application de la loi dès sa publication, donc aux contrats en cours.

Nous sommes cependant sensibles aux préoccupations portées par la commission des lois pour renforcer les garanties offertes aux collaborateurs concernés et, comme nous y incitait d’ailleurs le Conseil d’État dans son avis, nous avons tout à fait accepté les dispositions ayant pour objet d’accroître les délais de notification et de préavis.

Nous estimons que ces amendements, qui iraient beaucoup plus loin, ne peuvent pas recevoir de notre part un avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Nous avons bien compris que le système des emplois familiaux devait cesser : le retour de la confiance passe par là. Je veux simplement souligner qu’il me semble important que tout le monde, y compris ceux qui font la guerre, notamment sur les réseaux sociaux, à ces emplois en raison des affaires récentes, comprenne que des gens vont être licenciés sans faute. Leur seul tort étant d’avoir un lien familial avec un parlementaire, ce serait extrêmement difficile à faire dans le privé !

Dans la grande majorité des situations, ce sont des emplois non fictifs : les collaborateurs parlementaires travaillent et vont pourtant se retrouver sans contrat de travail, dans une situation de plus grande précarité, uniquement à cause de ce lien familial.

Je comprends évidemment la nécessité impérieuse de prendre une telle mesure, mais n’oublions pas qu’elle est exorbitante du droit commun !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n°32 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public par la commission…

M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, Mme Férat et moi-même allons retirer nos amendements !

Nous n’allons pas faire scrutin public sur scrutin public, mais je tiens à dire que je partage tout à fait ce que vient de dire Nathalie Goulet.

Je n’ai jamais employé un membre de ma famille, et cela ne me pose donc aucun souci, mais je trouve tout de même fort de café de licencier quelqu’un, qui a peut-être d’ailleurs quitté un précédent poste pour devenir collaborateur parlementaire, faisant bien son travail. Que pour tout remerciement il reçoive une lettre de licenciement me paraît franchement extraordinaire socialement ! (Applaudissements sur différentes travées.)

M. Roland Courteau. Absolument !

M. le président. Les amendements nos 32 rectifié et 31 rectifié sont retirés.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 113, présenté par M. Marie, Mme Bonnefoy, MM. Mazuir et Leconte, Mmes Yonnet, Lepage, Conway-Mouret et Tasca, M. Madrelle, Mme D. Gillot et MM. Labazée, Lalande et Carcenac, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Après les mots :

de plein droit

par les mots :

à la fin du mandat en cours du parlementaire au moment de la publication de la présente loi

II. – Alinéa 3

Remplacer les mots :

dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi

par les mots :

au moins trois mois avant l'expiration de son mandat

III. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

IV. – Alinéa 7

Après les mots :

de plein droit

insérer les mots :

à la fin du mandat en cours de l'autorité territoriale au moment de la publication de la présente loi

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Depuis hier, nous avons un difficile débat sur les emplois dits familiaux. Je souscris aux propos qui viennent d’être tenus, car nos collègues concernés vont devoir se résoudre à licencier des personnes dont tous reconnaissent pourtant les qualités professionnelles ! Ces ruptures de contrat ne pourront donc se faire que dans la douleur, et celle-ci sera d’autant plus forte que le licenciement sera brutal.

C’est la raison pour laquelle bon nombre de mes collègues du groupe socialiste et républicain ont déposé cet amendement qui va dans le même sens que ceux que nous venons d’examiner. Nous proposons de lier le contrat du collaborateur au mandat de l’élu et de le proroger jusqu’au terme de ce dernier.

Cet amendement présente plusieurs avantages. D’une part, il ne remet pas en cause, contrairement à d’autres, les dispositions du code du travail et ne crée pas de licenciement ad hoc. D’autre part, il reste conforme à l’esprit du texte du Gouvernement.

Pour les sénateurs dont le mandat se termine en 2017, les licenciements s’effectueraient dans les mêmes termes que pour un collaborateur dont le parlementaire employeur n’est pas réélu ; il en serait de même pour les mandats se terminant en 2020.

En ce qui concerne l’Assemblée nationale, on peut penser que tous les nouveaux députés, en particulier les quelque 311 membres du groupe La République en marche, au regard des déclarations de leur chef de file – le Président de la République –, ont anticipé la mesure ; pour ceux dont le député employeur a été reconduit – très peu nombreux… –, il est proposé la poursuite des contrats jusqu’à la fin du mandat.

L’adoption de cet amendement permettrait de sortir par le haut de la situation, car il assure une forme de reconnaissance – partielle, certes – envers celles et ceux qui ont si bien travaillé pour leur employeur. (Applaudissements sur différentes travées.)

M. Yvon Collin. Très bien !

M. le président. L’amendement n° 112, présenté par MM. Sueur, Leconte et Botrel, Mme Cartron, MM. Daudigny et Duran, Mmes Féret, Meunier, D. Michel et S. Robert et MM. Roger, Roux et Vandierendonck, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Après les mots :

de plein droit

insérer les mots :

le 31 décembre 2017

II. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

III. – Alinéa 7

Après les mots :

de plein droit

insérer les mots :

le 31 décembre 2017

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il nous est apparu raisonnable de proroger les contrats jusqu’au 31 décembre 2017, afin d’éviter toute rupture brutale. Cette rédaction nous semble meilleure que celle qui est proposée dans le texte actuel.

M. le président. Les amendements nos 178 rectifié et 270 sont identiques.

L’amendement n° 178 rectifié est présenté par MM. Détraigne, Delahaye et Longeot, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

L’amendement n° 270 est présenté par Mme Laborde.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Les collaborateurs concernés par le présent I sont exonérés, à leur demande, de l’exécution de tout ou partie du préavis. En cas de non-exécution du préavis, le salarié perçoit l'indemnité compensatrice de préavis comme prévu à l’article L. 1234-5 du code du travail.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Cet amendement précise les règles du préavis, conformément aux dispositions du code du travail, qui me semblent quelque peu oubliées dans cette affaire…

M. le président. L’amendement n° 270 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 113, 112 et 178 rectifié ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Les deux premiers de ces amendements visent à aller encore plus loin – objectif que j’admets parfaitement – que le texte de la commission en ce qui concerne le temps laissé aux assistants parlementaires qui viendraient à perdre leur emploi du fait de la loi pour se retourner.

Je rappelle toutefois que le Gouvernement voulait que ces assistants parlementaires quittent leur employeur au plus tard deux mois après la promulgation de la loi. Nous avons nous prévu un délai de cinq mois, et ce chiffre ne doit rien au hasard : nous n’avons pas voulu que les collaborateurs qui perdent leur emploi parce que leur sénateur n’est pas candidat ou n’est pas réélu aient un sort moins favorable que ceux qui le perdraient du fait de loi.

Mme Éliane Assassi. Tout à fait !

M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons donc retenu le délai de cinq mois dans un souci d’égalité entre les assistants parlementaires.

En outre, pour mieux assurer l’accompagnement vers un autre emploi, nous avons prévu, et c’est la première fois pour des assistants parlementaires qui perdent leur emploi, la possibilité de bénéficier du CSP, le contrat de sécurisation professionnelle, donc d’un suivi d’un an, avec des formations et des aides à la reconversion.

Si nous voulons maintenir la balance égale entre tous nos collaborateurs qui viendraient à quitter leur emploi pour une raison ou pour une autre, nous devons faire attention à leur appliquer à tous la même règle.

Au bénéfice de ces observations, je demande à MM. Marie et Sueur de bien vouloir retirer leurs amendements.

En ce qui concerne l’amendement n° 178 rectifié, qui précise les règles du préavis en conformité avec les dispositions du code du travail, je voudrais rassurer ses auteurs, comme l’auteur de l’amendement n°270 : le collaborateur concerné, comme d’ailleurs, en l’occurrence, les collaborateurs des autorités territoriales, aura bien le choix entre exercer son préavis et percevoir son indemnité compensatrice de préavis. La règle de droit commun s’appliquera.

Du coup, l’amendement est déjà satisfait par les dispositions existantes du code du travail. C’est pour ces motifs purement juridiques et non de fond que j’en demande le retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Dans le cas où les amendements ne seraient pas retirés, l’avis serait également défavorable.

Je comprends très bien le souci que les parlementaires ont du sort réservé à leurs collaborateurs, qui, je le dis à nouveau, travaillent avec efficacité et sans compter leur temps.

Le Gouvernement souhaite cependant que la loi s’applique dès sa promulgation. Cette volonté se conjugue avec les préoccupations portées par la commission des lois de renforcer les garanties procédurales données aux collaborateurs parlementaires qui sont dans cette situation : notification, préavis, droits à la formation.

Pour ces raisons, je souhaite que le texte reste en l’état.

M. le président. Monsieur Marie, l’amendement n° 113 est-il maintenu ?

M. Didier Marie. Il s’agit d’un véritable dilemme, monsieur le rapporteur, car nous sommes nombreux à être convaincus que cet amendement va dans le bon sens et répond aux besoins d’humanité qui est indispensable dans nos relations avec nos collaboratrices et collaborateurs.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Didier Marie. Néanmoins, je ne suis pas dupe : je sais qu’il y aurait, si je le maintenais, un scrutin public pour éviter ce qui s’est passé hier sur l’article 4. De ce fait, notre amendement a peu de chances d’être adopté. C’est pourquoi je le retire au bénéfice de celui de Jean-Pierre Sueur, qui verra quelles dispositions prendre à l’égard du sien…

M. le président. L’amendement n° 113 est retiré.

Je me tourne vers vous, monsieur Sueur : l’amendement n° 112 est-il maintenu ? (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. Je remercie mon ami Didier Marie de sa sollicitude ! (Nouveaux sourires.)

Toutefois, j’ai pu constater qu’entre les cinq mois proposés par la commission et la disposition tendant à prévoir la fin de l’année, il n’y a que peu de différences. En effet, le temps que cette loi soit adoptée, promulguée – imaginons même que le Conseil constitutionnel soit saisi –, le délai de cinq mois nous amènera peut-être au-delà du 31 décembre.

Mme Éliane Assassi. Exactement !

M. Jean-Pierre Sueur. Il serait donc incompréhensible que je ne retire pas cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 112 est retiré.

Madame Férat, l’amendement n° 178 rectifié est-il maintenu ?

Mme Françoise Férat. Mon souhait était que nous soyons en parfaite cohérence avec le code du travail. Disons que j’ai été « rassurée » par les explications de M. le rapporteur… Je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 178 rectifié est retiré.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 177 rectifié est présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

L'amendement n° 225 est présenté par Mme Gonthier-Maurin.

L'amendement n° 268 est présenté par Mme Laborde.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 1 et 7

Compléter ces alinéas par les mots :

et des dispositions de l’article L. 1226-1-1 du code du travail concernant les salariés atteints d’une maladie ou victimes d’un accident non professionnel

La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 177 rectifié.

M. Yves Détraigne. Cet amendement de repli vient compléter l’amendement de Mme Procaccia, adopté en commission des lois. Il ajoute à la référence aux dispositions du code du travail relatives à la protection des femmes enceintes en matière de licenciement une référence à celles qui concernent les salariés atteints d'une maladie ou victimes d'un accident non professionnel.

M. le président. La parole à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 225.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise en effet à compléter, dans un souci de parallélisme des droits, l’amendement de Mme Procaccia adopté par la commission des lois, lequel a introduit la référence aux dispositions du code du travail relatives à la protection des femmes enceintes en matière de licenciement dans le dispositif prévu à l’article 6. Plus précisément, il s’agit de mentionner les salariés atteints d’une maladie ou victimes d’un accident non professionnel.

M. le président. L’amendement n° 268, présenté par Mme Laborde, n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 177 rectifié et 225 ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Notre collègue Catherine Procaccia avait appelé par un amendement l’attention de la commission des lois sur la nécessité de prendre en compte la grossesse. Nous avons adopté sa proposition, car il nous est apparu parfaitement légitime de ne pas mettre dans une situation de précarité une salariée enceinte.

Nos collègues qui viennent de présenter leurs amendements veulent aller plus loin en prenant en compte les maladies non professionnelles ou les accidents pouvant survenir.

Personnellement, je trouve que c’est une bonne idée, mais il semble que le droit positif en vigueur permette déjà de répondre à cette demande. Ces amendements seraient ainsi satisfaits. Je me tourne donc vers Mme la garde des sceaux pour qu’elle nous le confirme.

Si tel est bien le cas, je vous demanderai, mes chers collègues, de retirer ces amendements, car vous aurez eu satisfaction avec le rappel de la législation. Sinon, j’émettrai un avis favorable à l’adoption de ces amendements.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je vous confirme que ces dispositions protectrices que vous souhaitez ajouter sont déjà prévues par le droit commun. Il nous semble donc un peu superfétatoire de les rappeler. Par ailleurs, ce sujet pourrait faire l’objet d’une discussion entre vous lorsque vous évoquerez les règles statutaires applicables aux collaborateurs.

Je sollicite également le retrait de ces amendements.

M. le président. Monsieur Détraigne, l’amendement n° 177 rectifié est-il maintenu ?

M. Yves Détraigne. Au bénéfice de ces explications, nous le retirons.

M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l’amendement n°225 est-il maintenu ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je le retire également.

M. le président. Les amendements nos 177 rectifié et 225 sont retirés.

L'amendement n° 284, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 8, seconde phrase

Après le mot :

prévu

insérer le mot :

par

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 284.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 152, présenté par MM. Delahaye et Bonnecarrère, Mme Férat, M. Gabouty et Mme Billon, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Sont visés par l’intitulé : « autorité territoriale », lorsqu'il y est fait référence au sein du présent projet de loi, les chefs des exécutifs locaux ainsi que les présidents de leurs groupements et de leurs établissements.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Il s’agit d’une précision rédactionnelle.

Le texte du projet de loi vise l’autorité territoriale, mais je souhaiterais que nous précisions qui est concerné, c’est-à-dire les chefs des exécutifs locaux, ainsi que les présidents de leurs groupements et de leurs établissements. Il me paraît important que nous soyons un peu plus précis sur ce que l’on entend par autorité territoriale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je comprends bien la logique de cet amendement, qui fait écho à une discussion que nous avons eue, sur l’initiative de M. Dallier, lors de l’audition de Mme la garde des sceaux.

Qu’est-ce qu’une autorité territoriale ? La réponse n’est pas si simple. On considère généralement qu’il s’agit des présidents des assemblées délibérantes des collectivités et des intercommunalités. On y ajoute parfois les membres de l’assemblée délibérante quand ils sont titulaires d’une délégation de leur président. En ce qui me concerne, j’ai quelques doutes sur cet amendement, qui ne couvre pas ce dernier cas.

C’est pourquoi je demande l’avis du Gouvernement, qui permettra, je l’espère, d’éclairer notre débat et de nous prononcer utilement sur cet amendement.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il me semble que cette précision rédactionnelle n’est pas nécessaire. En effet, la définition de la notion d’autorité territoriale figure clairement dans la loi de 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Il n’y a donc pas besoin ici de précision. Au contraire, l’adoption de cet amendement pourrait entraîner quelques difficultés d’interprétation.

J’y suis donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l’article 6, modifié, sur lequel j’ai été saisi d’une demande de scrutin public.

M. Pierre-Yves Collombat. J’espérais prendre la parole depuis un moment !

Puisque nous sommes dans une phase de moralisation, nous pourrions peut-être nous intéresser à l’usage qui est fait du scrutin public…

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 152.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'article.

M. Jean-Pierre Sueur. Je ne puis laisser sans réponse le commentaire quelque peu laconique de notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui nous demande de nous interroger sur l’usage du scrutin public.

Je tiens à rappeler ici que cet usage a une source historique très claire, à savoir la Révolution française, au cours de laquelle il a été demandé aux représentants envoyés par les Français dans les différentes assemblées parlementaires de rendre compte des votes qu’ils avaient exprimés.

Je rappelle que, lorsqu’il y a un scrutin public, le vote de chacune et de chacun d’entre nous…

M. Pierre-Yves Collombat. Même celui des absents !

M. Jean-Pierre Sueur. … peut être consulté et donc connu par l’ensemble des citoyennes et des citoyens. Voilà !

Il me paraît tout à fait sage et judicieux que cet usage existe. Votre groupe, monsieur Collombat, comme tous les groupes, a la faculté de demander à tous les parlementaires de s’exprimer sur tout sujet. C’est une garantie et une chance.

Pour ce qui est de l’absentéisme, je partage tout à fait votre position, mais, en l’espèce, il me semble que vous vous adressez aux présents et non pas aux absents.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est bien le problème !

M. Jean-Pierre Sueur. Vous enverrez une lettre à ces derniers… (Sourires.)

Toujours est-il que je tiens à défendre ici ce droit à demander un scrutin public, pour que chacun d’entre nous doive et puisse rendre compte des votes qu’il a émis en vertu du mandat dont il est le titulaire. (M. Bruno Retailleau applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Je tiens simplement à remercier notre collègue Jean-Pierre Sueur de cette explication.

M. Jean-Pierre Sueur. Il y a une bonne entente dans le Loiret ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Il y a un débat qui s’amorce sur la question du vote par scrutin public. Il se trouve que j’avais prévu de déposer un amendement sur ce sujet, mais, comme il s’agit de l’organisation interne de notre assemblée, je me suis abstenu. En tout état de cause, je déposerai une proposition de résolution.

Je ne partage pas du tout l’avis de M. Sueur. Depuis que je siège ici, j’ai eu le temps de me persuader que le scrutin public était profondément antidémocratique. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Monsieur Sueur, il serait bien plus simple d’organiser un vote nominatif électronique, avec un seul pouvoir, comme c’est le cas à l’Assemblée nationale.

M. Alain Fouché. Vous avez tort !

M. Joël Labbé. Cela obligerait les parlementaires à être plus présents. Je le répète, afin d’améliorer la transparence et notre fonctionnement démocratique, j’insisterai sur ce point en déposant une proposition de résolution.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Mon collègue Joël Labbé ne dit absolument pas que le scrutin public est antidémocratique.

Il est normal que les citoyennes et les citoyens puissent savoir dans quel sens nous avons voté.

En revanche, les modalités retenues par le Sénat pour les votes par scrutin public sont discutables, car anticonstitutionnelles. En effet, il est dit dans la Constitution que chaque parlementaire ne peut porter qu’un seul mandat en plus du sien.

Nous le savons, il y a eu des tarabistouilles dues à la jurisprudence qui permet à certains présidents de groupe de porter 130 ou 140 cartes. Vous avez le droit d’être en accord avec ce dispositif, mais il est anticonstitutionnel, puisque, je le répète, en vertu de la Constitution, un parlementaire ne peut porter qu’un seul mandat en plus du sien.

M. Bruno Retailleau. C’est faux !

M. Jean Desessard. Relisez l’article de la Constitution, monsieur Retailleau !

Je ne l’ai moi-même pas relu en détail, parce que j’ai été pris au dépourvu, ne pensant pas que ce débat reprendrait (M. Bruno Retailleau s’exclame.), mais je vais le retrouver, monsieur Retailleau, et je vous le relirai à plusieurs reprises tout au long de l’après-midi !

Chaque parlementaire ne peut être porteur que d’un mandat en plus du sien ! Il est anormal que les présidents de groupe puissent utiliser à leur guise plusieurs dizaines de mandats, selon l’importance du groupe, car cette pratique tue le débat démocratique. Cela revient à dire que les parlementaires ne peuvent pas changer d’avis au vu des arguments exposés ! Le poids des absents qui n’ont pas débattu, et qui n’ont donc pu être influencés, est tel que toute discussion est vaine. Une personne porteuse de 140 mandats fera de toute façon la décision, sans tenir compte de la dynamique du débat. C’est antidémocratique et c’est surtout anticonstitutionnel !

Monsieur Retailleau, je vous donne rendez-vous dans quelques instants pour vous rappeler quel est l’article de la Constitution concerné. Je vous en ferai la lecture en guise de petit cadeau…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, je suis très heureux de votre proposition. Je vous encourage à reprendre la parole dès que vous aurez trouvé cet article de la Constitution.

En ce qui me concerne, je confesse mes lacunes, je ne le connais pas. Votre intervention sera donc très utile à nos travaux. Vous en profiterez certainement pour produire les deux décisions du Conseil constitutionnel qui ont validé notre procédure, laquelle est parfaitement démocratique, puisqu’elle permet à chacun d’entre nous de s’exprimer nominativement.

Mme Éliane Assassi. Parfaitement !

M. Philippe Bas, rapporteur. Nous y sommes d’ailleurs généralement très attachés, parce que c’est aussi une manière de faire respecter les équilibres démocratiques de notre assemblée et d’éviter précisément des votes surprises ou des votes de circonstance, qui eux ne sont pas démocratiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. Jean Desessard. C’est l’article 27 !

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. J’ajoute à la suite du président Philippe Bas que, comme l’a d’ailleurs rappelé M. Sueur, le scrutin public fait partie de notre règlement intérieur, lequel est soumis à chaque modification au contrôle du Conseil constitutionnel. Or ce dernier n’a jamais censuré la disposition relative au scrutin public. C’est bien la preuve que vos propos ne sont pas conformes à la réalité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 326
Pour l’adoption 313
Contre 13

Le Sénat a adopté.

Article 6 (début)
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Discussion générale

3

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Mes chers collègues, madame la garde des sceaux, j’ai le très grand plaisir, au nom du Sénat tout entier, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d’une délégation de parlementaires iraniens, accompagnée par notre collègue Joël Guerriau. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, se lèvent et applaudissent.)

Nous sommes particulièrement sensibles à l’intérêt et à la sympathie que vous portez à notre institution.

Au nom du Sénat de la République, je vous souhaite la bienvenue et je forme des vœux pour que votre séjour en France contribue à renforcer les liens d’amitié entre nos deux pays. (Applaudissements.)

4

Article 6 (interruption de la discussion)
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Article additionnel après l'article 6

Rétablissement de la confiance dans l'action publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi dans le texte de la commission.

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Discussion générale
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Article 6 bis (nouveau)

Article additionnel après l'article 6

M. le président. L'amendement n° 183 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Archimbaud et Bouchoux, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 4 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque groupe parlementaire déclare à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique les noms des collaborateurs qu’il emploie, ainsi que les autres activités professionnelles exercées le cas échéant par ces collaborateurs. Ces données sont rendues publiques. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à instaurer de la transparence dans le statut des collaborateurs des groupes parlementaires. En effet, les collaborateurs des parlementaires sont mentionnés, ainsi que leurs activités annexes, dans les déclarations d’intérêts de leur parlementaire. Il serait logique que les collaborateurs des groupes politiques de chaque assemblée soient déclarés selon un régime analogue.

J’en profite pour exprimer toute ma gratitude envers nos collaborateurs, que ce soit nos assistants personnels ou ceux qui travaillent pour le groupe. Ils font un travail de grande qualité et je regrette le manque de reconnaissance dont ils ont fait l’objet jusqu’à présent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement, le contrôle des groupes parlementaires relevant du bureau de chaque assemblée. Il ne peut donc pas incomber à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui a déjà bien assez de travail comme cela.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Même avis.

Nous considérons qu’il faut respecter le principe de libre administration des groupes. Le Gouvernement n’a pas souhaité s’immiscer dans la relation entre les groupes et leurs collaborateurs.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Mon explication va être simple : je trouve que l’amendement défendu par M. Labbé est excellent.

Comme il me reste un peu de temps de parole (Sourires.), je me permettrai de citer l’article 27 de la Constitution du 4 octobre 1958,…

M. Philippe Dallier. C’est une bonne référence !

M. Jean Desessard. … qui s’impose à tous. Voici donc cet article 27 – je répète au cas où M. le président de la commission, qui n’avait pas entendu parler de cet article, n’ait pas entendu non plus le numéro – : « Tout mandat impératif est nul. Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. »

Je répète : « Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. » Pour ceux qui, comme moi, ont gardé le recueil du règlement intérieur, dans lequel figure la Constitution, je précise que c’est page 200.

C’est clair, et c’est la Constitution ! C’est d’ailleurs pour cette raison que M. Séguin avait fait en sorte que les députés ne puissent pas voter pour plus d’un autre de leurs collègues. C’est pourquoi il y a parfois des surprises à l’Assemblée nationale à cause des absences. Chez nous, il n’y en a pas, ou, du moins, si surprise il y a lors du débat, comme quelqu’un est en mesure de placer 140 bulletins, elle disparaît. Pour que le débat parlementaire soit enrichissant et efficace, seuls ceux qui ont participé au débat doivent voter, avec la possibilité de porter le mandat d’un collègue, mais pas plus.

Voilà, mes chers amis, je n’ai fait que lire la Constitution et, ma foi, je suis en accord avec elle ! (Mme Sophie Joissains et M. Joël Labbé applaudissent.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 6
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Article additionnel après l'article 6 bis

Article 6 bis (nouveau)

I. – Les collaborateurs parlementaires qui l’acceptent peuvent, lorsqu’ils font l’objet d’une procédure de licenciement pour un motif autre que personnel, bénéficier d’un parcours d’accompagnement personnalisé, qui débute par une phase de pré-bilan, d’évaluation des compétences et d’orientation professionnelle en vue de l’élaboration d’un projet professionnel.

Ce parcours, dont les modalités sont précisées par décret, comprend notamment des mesures d’accompagnement et d’appui au projet professionnel, ainsi que des périodes de formation et de travail.

L’accompagnement personnalisé est assuré par Pôle emploi, dans des conditions prévues par décret.

II. – Le bénéficiaire du dispositif d’accompagnement mentionné au I est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle et perçoit, pendant une durée maximale de douze mois, une allocation supérieure à celle à laquelle le collaborateur aurait pu prétendre au titre de l’allocation d’assurance mentionnée à l’article L. 5422-1 du code du travail pendant la même période.

Le salaire de référence servant au calcul de cette allocation est le salaire de référence retenu pour le calcul de l’allocation d’assurance du régime d’assurance chômage mentionnée au même article L. 5422-1.

Pour bénéficier de cette allocation, le bénéficiaire doit justifier d’une ancienneté d’au moins douze mois à la date du licenciement.

Le montant de cette allocation ainsi que les conditions dans lesquelles les règles de l’assurance chômage s’appliquent aux bénéficiaires du dispositif, en particulier les conditions d’imputation de la durée d’exécution de l’accompagnement personnalisé sur la durée de versement de l’allocation d’assurance mentionnée audit article L. 5422-1, sont définis par décret.

III. – Chaque assemblée parlementaire contribue au financement du dispositif d’accompagnement mentionné au I par un versement représentatif de l’indemnité compensatrice de préavis, dans la limite de trois mois de salaire majoré de l’ensemble des cotisations et contributions obligatoires afférentes. Ce versement est fait auprès de Pôle emploi, qui recouvre cette contribution pour le compte de l’État.

La détermination du montant de ce versement et son recouvrement, effectué selon les règles et sous les garanties et sanctions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-16 du code du travail, sont assurés par Pôle emploi. Les conditions d’exigibilité de ce versement sont précisées par décret.

IV. – Lorsque l’assemblée parlementaire concernée n’a pas proposé le dispositif d’accompagnement prévu en application du I, Pôle emploi le propose à l’ancien collaborateur parlementaire. Dans ce cas, chaque assemblée parlementaire verse à Pôle emploi, qui la recouvre pour le compte de l’État, une contribution égale à deux mois de salaire brut, portée à trois mois lorsque l’ancien collaborateur parlementaire adhère au dispositif d’accompagnement mentionné au même I sur proposition de Pôle emploi.

La détermination du montant de cette contribution et son recouvrement, effectué selon les règles et sous les garanties et sanctions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-16 du code du travail, sont assurés par Pôle emploi. Les conditions d’exigibilité de cette contribution sont précisées par décret.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je voudrais en cet instant, pour faire écho au débat entamé hier, saluer le travail des collaborateurs parlementaires et la pugnacité de leurs organisations syndicales, qui n’ont eu de cesse de nous alerter pour demander que le droit commun en matière de licenciement leur soit appliqué.

Cet article 6 bis, adopté sous l’impulsion de notre président rapporteur, constitue un pas important. Je crois pouvoir dire qu’il va dans le sens des revendications qui nous ont été présentées.

Toutefois, nous aurions souhaité que le licenciement de nos collaborateurs soit codifié. C’était le sens des nombreux amendements qui avaient été déposés et malheureusement retoqués.

L’article 6 bis ouvre la possibilité, pour nous employeurs, de licencier en fin de mandat nos collaborateurs « pour un motif autre que personnel ».

Cela signifie que des parlementaires employeurs pourront continuer, comme le conseille l’AGAS, l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs, de licencier pour motif personnel. Certains collaborateurs ne se verront donc pas proposer la possibilité de choisir ou non un contrat de sécurisation professionnelle.

Nous considérons, pour notre part, qu’il s’agit d’une rupture d’égalité, ce qui ne nous satisfait pas. Certes, le parlementaire employeur est libre de recruter ses collaborateurs, mais le mode de licenciement ne devrait pas être pour lui à la carte.

Faut-il le rappeler, nous agissons en qualité d’employeur pour des salariés de droit privé. Et, si un tabou n’est pas levé sur notre qualité juridique, dont nombre d’éléments – attestation d’employeur destinée à Pôle emploi, plan d’épargne entreprise, mutuelle collective, numéro de SIREN – témoignent, nous sommes des « établissements secondaires ».

De plus, il y a quelques points que nous aurions souhaité éclaircir. Les dispositions de cet article 6 bis sont renvoyées au décret. Il en va ainsi de l’accompagnement personnalisé, qui sera assuré par Pôle emploi dans des conditions définies a posteriori par décret.

De même, le montant de l’allocation chômage sera défini par décret. Ce montant sera-t-il le minimum légal, qui est fixé à 57 % du salaire brut ? Ou bien atteindra-t-il le maximum, soit 75 % du salaire brut, comme il est prévu pour un contrat de sécurisation professionnelle ?

Enfin, toutes les conditions d’exigibilité sont, elles aussi, renvoyées au décret.

Nous souhaitons donc que ces points d’incertitude soient levés pour pouvoir, en toute sérénité, soutenir cet article 6 bis.

Il serait à notre honneur, nous qui faisons la loi, de faire entrer dans les cases du code du travail la procédure de licenciement de nos collaborateurs en fin de mandat.

Monsieur le rapporteur, vous avez entendu une bonne partie de nos demandes, mais nous restons convaincus que la question du licenciement économique demeure posée. L’un de nos collègues a d'ailleurs utilisé cette procédure en parfait accord avec la DIRRECTE, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, dont il dépend.

Je forme donc le vœu que nous mettions à profit le travail que nous allons faire maintenant, le travail qui sera accompli par l’Assemblée nationale et le travail qui le sera en cours de navette pour progresser encore dans la voie de la sécurisation de nos collaborateurs face au licenciement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, sur l’article.

Mme Corinne Bouchoux. Nous souhaitions initialement – cela a été dit précédemment, mais je vais l’exprimer autrement – ouvrir la possibilité du licenciement pour motif économique aux collaboratrices et collaborateurs parlementaires.

En effet, il nous semblait que les contrats des collaboratrices et des collaborateurs étaient étroitement liés aux mandats des parlementaires qui les embauchent, autrement dit, aux aléas de notre vie politique, voire à notre décès.

La conséquence directe de ce constat, c’est que les collaboratrices et les collaborateurs parlementaires peuvent, à tout moment, perdre leur emploi en raison d’un décès, d’une non-réélection ou d’une démission du parlementaire employeur. Nous considérons que cette fin de contrat est liée à un motif non inhérent à leur personne. C’est la raison pour laquelle nous estimons que les collaboratrices et les collaborateurs parlementaires devraient, tout comme les salariés de droit privé placés dans une telle situation, qu’ils travaillent dans une boulangerie ou dans un garage, pouvoir bénéficier, dans cette hypothèse, d’un licenciement pour motif économique.

Cependant, force est de constater que cette proposition a été balayée par divers moyens, notamment au nom de l’article 40 de la Constitution. Nous l’avons évoqué hier soir très tard. J’avoue ne pas parvenir à complètement comprendre en quoi ce type de licenciement serait plus coûteux pour nos finances publiques que le licenciement proposé par M. le rapporteur ou que le dispositif actuel.

Nos collaboratrices et collaborateurs nous appuient tous et nous aident au quotidien. Si je regrette personnellement, avec d’autres, que le licenciement pour motif économique ait été déclaré irrecevable et soit interdit dans l’usage par l’AGAS, il me semble qu’une solution digne doit être trouvée pour encadrer au mieux la fin de contrat.

En ce sens, la possibilité d’un contrat de sécurisation professionnelle doit leur être ouverte. En effet, ce dispositif leur permettra de valoriser les compétences qu’ils ont acquises durant le mandat et de suivre une formation professionnelle pour retrouver rapidement un emploi ou changer de secteur d’activité.

C’est pour toutes ces raisons que je soutiendrai la rédaction de l’article 6 bis proposée, dans toute sa sagesse, par M. le rapporteur et les aménagements suggérés par la présidente de l’AGAS, notre collègue Françoise Cartron, aménagements qui me semblent positifs, même si je n’en ai pas compris toute la subtilité. Elle saura nous les préciser en temps utile !

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, sur l’article.

M. Jean-Yves Leconte. Il me semble que nous devons tous saluer le travail accompli sur l’article 6 bis par le président de la commission des lois, rapporteur de ce texte. Il a apporté un certain nombre d’améliorations aux conditions jusqu’à présent en vigueur.

Certes, plusieurs d’entre nous auraient souhaité que d’autres interviennent encore, notamment pour faire en sorte que le contrat de sécurisation professionnelle, offert aux personnes qui font l’objet d’un licenciement économique, soit obligatoirement proposé aux collaborateurs parlementaires. Dans le cadre qui est le nôtre, celui de la collaboration avec les parlementaires, il n’y pas de normes, si bien que tout dépend des circonstances et de la volonté de l’employeur.

Toutefois, nous voulons saluer les améliorations obtenues et le travail de concertation conduit par le président Philippe Bas. Et nous tenons à nous féliciter des propos tenus hier soir. Espérons que ces améliorations passeront le cap de l’Assemblée nationale !

Nous vous confions maintenant, madame la garde des sceaux, la charge de suivre les événements et comptons sur votre vigilance pour que les améliorations obtenues ici, au Sénat, au profit de nos collaborateurs parlementaires – vous l’aurez constaté, nous leur sommes attachés sur toutes les travées de cette assemblée – soient maintenues après le passage du texte devant les députés.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.

Mme Éliane Assassi. Cet article 6 bis a pour particularité que la plus grande partie des amendements que nous lui avions apportés ont été déclarés irrecevables en application de l’article 40. Seuls sont restés trois amendements déposés par notre collègue Françoise Cartron.

Comment cette irrecevabilité a-t-elle été justifiée par la commission des finances ? Je vais reprendre ses termes : « En ce qu’il qualifie la rupture du contrat de travail des collaborateurs parlementaires en cas de fin de mandat de licenciement pour motif économique, entraînant l’application de règles d’indemnisation du chômage plus favorables que celles qui prévalent en cas de licenciement pour motif personnel, cet amendement crée une charge au sens de l’article 40 de la Constitution. »

Or cet article 6 bis, proposé par le rapporteur et voté en commission, concerne les collaborateurs parlementaires qui font l’objet d’un licenciement « pour un motif autre que personnel ».

Il se trouve que, pour le moment, le code du travail reconnaît deux types de licenciement, celui pour motif personnel et celui pour motif économique. Je crois que, là, nous nous jouons de mots et je tenais à le dire !

L’article 6 bis, à son alinéa 4, prévoit bien que le collaborateur bénéficiaire du dispositif d’accompagnement mentionné au I – un contrat de sécurisation professionnelle qui ne dit pas son nom – perçoit, pendant douze mois, une allocation supérieure à celle à laquelle ce même collaborateur aurait pu prétendre au titre de l’allocation chômage mentionnée à l’article L. 5422-1 du code du travail, à savoir la partie du code du travail qui traite de l’indemnisation des travailleurs involontairement privés d’emploi.

Cette allocation d’assurance chômage prend aujourd’hui le nom d’ARE, l’aide au retour à l’emploi. Son montant ne peut pas être inférieur à 57 %, ni supérieur à 75 % du salaire journalier de référence : le taux de 57 % correspond à un licenciement pour motif personnel et économique ; celui de 75 % recouvre la situation, dans le cadre d’un licenciement pour motif économique, d’un travailleur involontairement privé d’emploi et qui a signé un contrat de sécurisation professionnelle.

Aussi, en proposant, dans nos différents amendements, de codifier le dispositif créé à l’article 6 bis, qui a tous les attraits d’un licenciement pour motif économique, nous agissions dans un souci d’intelligibilité de la loi. Je regrette donc qu’ils aient été jugés irrecevables.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, sur l’article.

Mme Françoise Cartron. Depuis quelques heures, nous examinons des amendements qui portent sur les assistants parlementaires et sur la manière dont ils seraient traités. Je ne voudrais pas que s’installent certaines idées que j’ai pu entendre s’exprimer, notamment de la part de Mme Férat.

Je rappelle que ce sont les sénateurs et les sénatrices qui procèdent aux licenciements, et je ne peux laisser accroire que tout se faisait jusqu’alors hors droit du travail ! Le droit du travail s’appliquait bien évidemment aux licenciements des collaborateurs, notamment pour prendre en considération la spécificité des situations et des personnes, celles des jeunes femmes enceintes par exemple.

Jamais l’AGAS n’a conseillé de ne pas appliquer le droit du travail et je ne pense pas que l’on puisse trouver sur ces travées des sénatrices et des sénateurs qui aient agi en dehors de ses règles !

J’ai entendu dire que nous aurions abandonné dans la nature les collaborateurs que nous avions licenciés. À cela je rétorque que, au-delà du droit du travail, des mécanismes d’accompagnement étaient mis en place lors de chaque licenciement.

Il me paraît utile de rappeler ces mécanismes d’accompagnement.

D’abord, les bilans de compétences ont été généralisés pour tous les collaborateurs éligibles au compte personnel de formation.

Ensuite, un bilan d’étape professionnelle est proposé à tous les collaborateurs en CDI, à la seule condition d’avoir une année d’ancienneté.

De plus, l’AGAS a signé un partenariat avec l’APEC, l’Association pour l’emploi des cadres, pour une offre de services à la carte répondant aux besoins et au projet professionnel du collaborateur pour sa reconversion.

Enfin, il existe un partenariat avec la Sorbonne pour tout collaborateur ayant trois années d’expérience lui permettant de valider ses acquis grâce à l’obtention d’un diplôme de niveau V. C’est bien là une reconnaissance du travail de collaborateur.

Je ne voudrais pas qu’on laisse à penser qu’il y avait jusqu’à présent un vide total et une absence de respect ! Je suis moi-même trop attachée au travail des collaborateurs pour ne pas avoir eu toujours présente à l’esprit la nécessité de prendre en considération les personnes et leur situation.

Il y avait néanmoins un vide juridique qui nous empêchait de procéder à des licenciements économiques. C’est sur ce point que portent les changements. Dorénavant, grâce à l’amendement de M. Bas, nous disposerons d’un support légal pour procéder au licenciement tel que nous le faisions jusqu’alors, mais assorti des avantages liés au licenciement économique, sans en reprendre toutes les contraintes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)

M. le président. L'amendement n° 84 rectifié, présenté par Mme Cartron, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

bis. – Le parlementaire employeur est tenu de proposer le bénéfice du dispositif d’accompagnement mentionné au I à chaque collaborateur qu’il envisage de licencier pour un motif autre que personnel et de l’informer par écrit du motif sur lequel repose la rupture en cas d’acceptation par celui-ci du dispositif d’accompagnement.

L’adhésion du salarié au parcours d’accompagnement mentionné au I emporte rupture du contrat de travail.

Cette rupture du contrat de travail, qui ne comporte ni préavis ni indemnité compensatrice de préavis, ouvre droit à l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9 du code du travail et à toute indemnité conventionnelle ou prévue par la réglementation propre à chaque assemblée parlementaire qui aurait été due au terme du préavis ainsi que, le cas échéant, au solde de ce qui aurait été l’indemnité compensatrice de préavis en cas de licenciement et après défalcation du versement du parlementaire employeur mentionné au III du présent article.

Les régimes social et fiscal applicables à ce solde sont ceux applicables aux indemnités compensatrices de préavis.

Un décret définit les délais de réponse du salarié à la proposition de l’employeur mentionnée au premier alinéa du présent I bis ainsi que les conditions dans lesquelles le salarié adhère au parcours d’accompagnement personnalisé.

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Par l’introduction de l’article 6 bis, la commission des lois a entendu mettre en place, au profit des collaborateurs licenciés pour fin de mandat ou en application de l’interdiction des collaborateurs familiaux, un dispositif d’accompagnement renforcé et d’indemnisation améliorée au titre de l’assurance chômage inspiré du contrat de sécurisation professionnelle qui est proposé aux salariés licenciés pour motif économique.

Je souscris à cette initiative qui, tout en confirmant le bien-fondé de la position constante des deux assemblées quant à la qualification juridique du licenciement des collaborateurs, permet néanmoins de donner à ceux-ci un accès au CSP dont ils étaient jusqu’à présent privés, faute d’entrer dans les bonnes cases.

Néanmoins, pour que le parallélisme des formes soit total avec le CSP, il convient de préciser le dispositif prévu par la commission des lois sur deux points.

Il s’agit, d’abord, de préciser la façon dont le dispositif est proposé au collaborateur licencié. Le présent amendement prévoit, comme pour le CSP, que ce soit le parlementaire employeur qui le propose à son collaborateur.

Il s’agit, ensuite, de préciser les conséquences de l’acceptation par le collaborateur du dispositif. Comme dans le cadre du CSP, le présent amendement prévoit que l’acceptation du dispositif emporte la rupture immédiate du contrat de travail et le versement par l’employeur de l’équivalent de l’indemnité de préavis à Pôle emploi pour le financement de l’accompagnement du salarié et de la majoration de son indemnisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. J’ai été particulièrement sensible à ce que nous ont dit beaucoup des orateurs qui m’ont précédé, en particulier Mme Cartron, qui préside l’association chargée de gérer la rémunération et le statut des assistants parlementaires.

Je suis très heureux de constater, une fois de plus, que Mme Cartron souhaite, au nom de cette association qui nous représente, améliorer la situation de nos collaborateurs les plus directs.

La commission a donc émis un avis favorable sur l’amendement no 84 rectifié, ainsi que sur les amendements nos 85 et 86, qui seront présentés dans un instant.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Madame Cartron, je sais tout le travail que vous accomplissez au Sénat pour accompagner les collaborateurs parlementaires.

Je vais rappeler la position présentée hier soir par Mme la garde des sceaux : le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat sur tous les amendements relatifs aux collaborateurs parlementaires.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Plus que d’une explication de vote, il s’agira d’une question. L’acceptation du dispositif d’accompagnement par le collaborateur remet-elle en cause les délais, notamment les trois mois donnant droit à des indemnités, proposés par le rapporteur et que nous avons adoptés tout à l’heure ? Les conséquences de cette acceptation, qui emporte rupture immédiate du contrat de travail, méritent d’être précisées.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Le fonctionnement du contrat de sécurisation professionnelle s’articule autour de deux axes. D’une part, le salarié fait apport de la rémunération qu’il aurait perçue pendant son préavis. D’autre part, Pôle emploi fait apport des financements nécessaires pour assurer la sécurisation de son parcours professionnel. Pendant cette période, la question de l’indemnisation qui se met en place est tout naturellement réglée par Pôle emploi.

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. Au-delà des explications que M. le rapporteur vient de donner sur le dispositif, je voudrais remercier Mme Cartron à la fois de ses amendements, que nous voterons bien évidemment, et du travail qu’elle accomplit à la tête de l’AGAS. (Applaudissements.)

M. le président. À titre personnel, je joins mes remerciements à ceux qui viennent de vous être exprimés, madame Cartron. (Applaudissements.)

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous soutiendrons nous aussi cette initiative bienvenue.

M. le président. La parole est à M. Jackie Pierre, pour explication de vote.

M. Jackie Pierre. Je suis partisan de voter l’amendement n° 84 rectifié, mais je m’interroge.

Il est prévu que l’acceptation du dispositif emporte la rupture immédiate du contrat de travail et le versement par l’employeur de l’équivalent de l’indemnité de préavis à Pôle emploi. J’ai bien noté « par l’employeur », ce qui veut dire que toute fin de contrat serait à la charge de chaque parlementaire. Avec quels moyens ?

Les employeurs, ce sont bien les sénatrices et les sénateurs. Ce n’est pas l’AGAS. Alors, et je pose la question à Mme la présidente de l’AGAS, que fait l’association dans ce domaine ?

M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Ce n’est pas l’AGAS qui peut procéder au licenciement ! Ce qu’il faut comprendre, c’est que nous sommes là dans un cadre juridique où l’AGAS intervient en qualité de conseil. Je ne manque jamais de préciser qu’il revient à l’employeur de prendre la décision, tout comme l’employeur doit proposer le choix au collaborateur. Rien ne sera imposé. Le collaborateur choisira telle ou telle indemnisation. Bien sûr, après, comme pour tout, c’est l’AGAS qui apporte la contribution financière nécessaire pour couvrir les indemnités dues au collaborateur.

Mais, soyons clairs, c’est bien sûr le sénateur qui prend la responsabilité et propose le choix à son collaborateur.

M. le président. Toutes les précisions sont utiles dans ce débat particulièrement compliqué !

Je mets aux voix l'amendement n° 84 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

L'amendement n° 85, présenté par Mme Cartron, est ainsi libellé :

Alinéa 8, première phrase

Après le mot :

contribue

insérer les mots :

, pour le compte du parlementaire employeur,

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Il s’agit d’un amendement de précision : comme je viens de le dire, si les assemblées contribuent au financement du contrat de sécurisation professionnelle, c’est pour le compte du parlementaire, qui reste le seul employeur de ses collaborateurs.

M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Je mets aux voix l'amendement n° 85.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

L'amendement n° 86, présenté par Mme Cartron, est ainsi libellé :

Alinéa 10

1° Première phrase

Remplacer les mots :

l’assemblée parlementaire concernée

par les mots :

le parlementaire employeur concerné

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

chaque assemblée parlementaire

par les mots :

le parlementaire employeur

La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Il s’agit aussi d’un amendement de précision.

C’est le parlementaire qui est l’employeur direct de ses collaborateurs. C’est donc bien à lui de proposer à son collaborateur le dispositif d’accompagnement et d’indemnisation majorée, et c’est également à lui d’assumer les conséquences financières d’un manquement à cette obligation.

M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Je mets aux voix l'amendement n° 86.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article 6 bis.

Mme Laurence Cohen. Je me réjouis de la tonalité et du fond des débats qui ont eu lieu. Nous avons réussi, avec tous les groupes politiques, à créer un statut qui n’existait pas. On l’a bien vu, en écoutant les réponses de la présidente de l’AGAS à nos demandes de précisions, il y avait plus qu’un flou. Nous avons ainsi franchi un pas grâce au travail parlementaire, et je m’en réjouis !

J’en profite pour apporter à mon tour quelques précisions.

Mme Cartron a énuméré hier, et c’était très intéressant, les différents dispositifs d’accompagnement et de formation auxquels nos collaborateurs pouvaient accéder.

Cependant, parmi ceux qu’elle a cités, notre collègue a évoqué un partenariat privilégié avec la Sorbonne pour, a-t-elle dit – peut-être était-ce dû à l’heure tardive – préparer le « concours de l’ENA ». Cela m’a un peu étonnée, et je suis donc allée consulter le site de l’AGAS.

J’ai bien vu qu’il existait un cycle de perfectionnement organisé par l’ENA, mais à destination des collaborateurs débutants, afin de leur donner les « fondamentaux juridiques » et de leur permettre, s’ils n’étaient pas cadres, d’acquérir la qualité de cadre à condition de suivre l’intégralité des quatre modules.

Un master 2 en administration du politique est organisé à l’université Panthéon-Sorbonne. Chaque année, cinq places – et non pas six – sont disponibles, ce qui est peu…

Cette formation répond à des critères d’admission : être en CDI, avoir soit un bac+4, soit un bac+2 ou un bac+3 assorti de la VAE, la validation des acquis de l’expérience, et avoir une année d’ancienneté dans le contrat avec le parlementaire.

Les collaborateurs ont aussi un accès aux formations organisées par le CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, dont la préparation aux concours de la fonction publique territoriale – territoriale, j’y insiste –, mais point de trace de formation pour préparer le « concours de l’ENA »…

J’aimerais donc, au cours du débat, avoir quelques éclaircissements sur ce point.

Quoi qu’il en soit, et à la lumière des précisions que je viens d’apporter, il apparaît clairement que l’amendement de notre groupe, adopté hier soir, qui vise à garantir que, grâce à la validation des acquis de l’expérience, l’ancienneté des collaborateurs parlementaires sera prise en considération dans les conditions d’accès aux concours internes des trois fonctions publiques constitue une importante avancée pour nos collaborateurs.

M. le président. Je mets aux voix l'article 6 bis, modifié.

(L'article 6 bis est adopté.)

M. le président. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.

Article 6 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Articles 7, 7 bis et 7 ter (réservés)

Article additionnel après l'article 6 bis

M. le président. L'amendement n° 116, présenté par MM. Sueur et Leconte, Mmes Lienemann et Monier et M. Vandierendonck, est ainsi libellé :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8… ainsi rédigé :

« Art. 8… – Le bureau de chaque assemblée détermine les conditions dans lesquelles est mis en place, dans chaque assemblée, un troisième concours à destination des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires régi par les mêmes conditions d’accès des concours internes prévues pour les fonctionnaires des assemblées. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Par cet amendement, nous proposons la création d'un troisième concours pour les collaborateurs parlementaires et collaborateurs de groupes parlementaires, concours dont les modalités seraient arrêtées par le bureau de chaque assemblée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je remercie M. Sueur de cette initiative. Toutefois, le Sénat ayant adopté la possibilité pour les collaborateurs parlementaires de se présenter au concours interne, cette disposition devient sans objet.

Je crois qu’il faut choisir : ou bien on fait un troisième concours – ce qui est très bien –, ou bien on ouvre le concours interne, ce que M. Zocchetto et Mme Assassi nous ont proposé et que nous avons admis hier, mais on ne peut tout de même pas retenir les deux !

Peut-être ce débat va-t-il cependant se poursuivre. Je sais d’ailleurs que les représentants des fonctionnaires de cette maison sont en alerte et signalent que l’ouverture du concours interne, qui leur était jusque-là réservé, à nos collaborateurs entraînera, par voie de conséquence, une limitation des possibilités de promotion pour les fonctionnaires de nos deux assemblées en ouvrant une concurrence qui, de leur point de vue, n’est pas naturellement légitime.

Je ne méconnais pas l’intérêt de votre proposition, mon cher collègue. Je me demande cependant s’il ne faut pas mettre à profit la navette pour réexaminer dans sa globalité le choix qui a été fait cette nuit par notre assemblée sur ce point. Dans cette attente, par cohérence donc, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je m’en remets à la position de M. Bas.

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° 116 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la ministre, mon cher collègue, je ne méconnais pas la disposition qui a été adoptée, hier, par le Sénat, à savoir l’ouverture du second concours.

Je pense qu’il n’aurait pas été si illogique que cela de préférer l’ouverture d’un troisième concours à l’accès au second, pour des raisons que certains comprendront ici.

C’est pourquoi je vais, bien sûr, retirer cet amendement, mais en souscrivant aux propos de notre président-rapporteur, qui nous invite à tirer parti de la navette pour bien réfléchir.

Il est vrai que l’on ne peut pas – ce serait illogique, voire excessif – ouvrir à la fois le second concours et la troisième voie, mais, pour choisir entre les deux, peut-être serait-il utile qu’il y ait un surcroît de réflexion.

Pour ce faire, vous avez mentionné la navette, mon cher collègue. Encore faudrait-il qu’il y en ait une ! Si la navette se réduit à une commission mixte paritaire – ce serait la meilleure hypothèse, et une hypothèse à laquelle je souscris, dans le cas de ce texte –, ce n’est pas la même chose que deux lectures. Je ne cesserai de le dire en dépit des appels du Gouvernement à multiplier les procédures accélérées, appels, madame la ministre, que votre expérience parlementaire vous a d’ailleurs conduite à modérer.

Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 116 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je veux préciser à notre collègue, mais il le sait, que le choix fait par le Gouvernement de la procédure accélérée ne lui impose nullement de ne prévoir qu’une lecture par assemblée. Je ne vois pas pourquoi nous préjugerions de sa décision, qui peut fort bien consister à permettre au débat de se poursuivre dans l’intérêt de la loi.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

Article additionnel après l'article 6 bis
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Articles additionnels avant l'article 8

Articles 7, 7 bis et 7 ter (réservés)

M. le président. Je rappelle que les articles 7, 7 bis et ter sont réservés jusqu’après l’article 12.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES AU FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE

Chapitre Ier

Dispositions applicables aux partis et groupements politiques

Articles 7, 7 bis et 7 ter (réservés)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 8

Articles additionnels avant l'article 8

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 34 rectifié ter et 118 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 34 rectifié ter est présenté par MM. Maurey, Longeot et de Raincourt, Mme Férat, MM. Raison, Commeinhes, Laurey, Détraigne et Médevielle, Mme Joissains et M. Perrin.

L’amendement n° 118 rectifié est présenté par MM. Sueur, Leconte, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, le pourcentage : « 1 % » est remplacé par le pourcentage : « 2 % » ;

2° Après les mots : « politiques qui », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « ont présenté lors du plus récent renouvellement de l’Assemblée nationale des candidats ayant obtenu au moins 2 % des suffrages exprimés dans l’ensemble des circonscriptions d’une collectivité territoriale relevant des articles 73 et 74 de la Constitution ou de Nouvelle-Calédonie. »

La parole est à M. Jean-François Longeot, pour défendre l’amendement n° 34 rectifié ter.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à relever les seuils à atteindre pour qu’un parti bénéficie des financements publics reposant sur les résultats aux élections législatives.

Ces élections voient une prolifération de candidats dont le seul objectif est d’assurer le financement de leur parti. Ce constat est directement lié aux seuils fixés par le cadre actuel. Ces seuils me paraissent trop bas, car ils incitent des petits partis, parfois des pseudo-partis, à présenter un maximum de candidats.

Par cet amendement, nous proposons que ces aides soient attribuées à un parti lorsque cinquante de ses candidats, comme c’est déjà le cas, ont obtenu au moins 2 % des suffrages exprimés, contre 1 % actuellement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 118 rectifié.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement vise à encadrer plus rigoureusement l’octroi de financements publics aux partis et groupements politiques en augmentant de 1 % à 2 % le seuil leur permettant d’obtenir une aide publique au financement.

En effet, ces seuils sont trop bas : ils peuvent permettre à certains partis ou groupements politiques, voire à des partis globalement fictifs, de capter des subventions publiques sans remplir effectivement les fonctions attendues d’eux.

Ainsi, à travers cette mesure, notre objectif est de subordonner le financement public à trois conditions : avoir un réel objet politique, rassembler des militants et soutenir des candidats aux élections locales et nationales.

M. le président. L’amendement n° 54 rectifié, présenté par M. Leconte et Mme Lepage, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux deuxième et troisième alinéas de l’article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, après les mots : « 1 % des suffrages exprimés », sont insérés les mots : « et des bulletins blancs ».

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement, moins ambitieux que les précédents, vise à prendre en compte le vote blanc dans le seuil d’accès au financement public. Ce seuil resterait à 1 %. Il s’agit donc d’un amendement de repli.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Ces amendements suscitent de très importantes questions. À partir de quelle audience un parti politique est-il éligible au financement public ? Si nous plaçons la barre trop haut, nous écartons de tout financement public des courants de pensée qui ont une audience réelle dans l’opinion, même si ce sont des partis minoritaires.

Qui plus est, la Constitution exige que nous soyons attentifs à ce problème. En effet, selon son article 4, il faut garantir « les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation ».

Il nous faut aussi respecter les décisions du Conseil constitutionnel qui ont interprété cet article. Le Conseil permet de poser une condition d’audience pour l’accès au financement public, mais exige qu’on respecte le pluralisme des courants d’idées et d’opinions qui constitue le fondement de la démocratie. Tout cela me paraît être de pur bon sens.

Nous avons débattu en commission pour déterminer à partir de quel seuil on commencerait à écarter des courants de pensée qui seraient réellement représentatifs même s’ils sont actuellement minoritaires. La loi permet aujourd’hui à treize partis politiques d’être éligibles à l’aide publique en métropole, mais elle le permet aussi à vingt-huit partis politiques outre-mer.

Ces partis ne sont pas forcément originaires de l’outre-mer : certains se sont glissés dans un interstice de la loi afin de bénéficier du financement public. Par conséquent, la demande qui nous est faite à travers ces amendements est tout à fait légitime.

Néanmoins, je ne voudrais pas que le Sénat se prononçât à l’aveugle, en ignorant tout des conséquences des ajustements de seuil proposés.

Je sais en outre que le ministère de l’intérieur a procédé à un certain nombre d’évaluations. C’est la raison pour laquelle je me tourne vers Mme Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, pour lui demander si nous pouvons trouver un terrain d’entente à partir de ces projections afin de déterminer exactement où placer le seuil.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le projet de loi a pour objectif d’améliorer la transparence du financement de la vie politique, et non pas de diminuer le financement public. Il est essentiel de le rappeler.

Par ailleurs, comme M. Bas vient de le rappeler, nous sommes évidemment attentifs à ne pas porter atteinte au pluralisme politique.

Nous n’avons pas examiné tous les cas, mais je prendrais quelques exemples concrets. L’adoption des amendements identiques aurait pour conséquence de supprimer l’aide publique à Debout la France, à l’Alliance écologiste indépendante ou même au Parti radical de gauche.

Le Gouvernement est donc défavorable à toute modification du seuil d’éligibilité à l’aide publique et estime qu’il n’est pas souhaitable d’adopter ces amendements.

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur le président, peut-être nos collègues voudront-ils abaisser les seuils qu’ils ont déterminés dans leurs amendements, auquel cas la commission pourrait reconsidérer l’avis que j’ai donné, qui reposait sur celui du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Personne ici ne souhaite la disparition du financement public des partis qui viennent d’être évoqués. Quoi que l’on pense de leurs projets politiques, ils méritent l’expression publique.

L’idée derrière nos amendements est d’essayer d’éviter les abus de partis comme ceux qu’on a pu voir fleurir à certains moments et qui profitaient du système. Nous pensons aussi à ces partis qui présentent de manière un peu fictive des candidats dans les collectivités d’outre-mer, lesquelles bénéficient de dispositions spécifiques en la matière, pour capter illégitimement du financement public. À cet égard, une part du chemin a déjà été parcourue en 2013.

Notre but n’étant pas ici de « couper » des financements publics, je pense qu’il faut en effet retirer ces amendements afin de laisser le plus de pluralisme possible aux différents partis politiques.

Je retire donc l’amendement n° 54 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 54 rectifié est retiré.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l’amendement n° 118 rectifié.

M. Jean-Pierre Sueur. Je voudrais préciser à Mme la ministre que, dans la première version de notre amendement, qui a été soumise au ministère de l’intérieur pour bénéficier des projections que vous avez citées, il était question, d’une part, d’un seuil de 2,5 %, et non de 2 %, d’autre part, de cent départements, et non de cinquante pour les départements métropolitains.

Le ministère de l’intérieur nous a fait savoir en retour que de telles dispositions risquaient en effet de toucher les partis que Mme la ministre a cités. C’est pourquoi nous avons abaissé le seuil à 2 % et sommes restés sur la base de cinquante départements dans la version rectifiée.

Je serais tenté de baisser à nouveau le seuil pour l’amener à 1,5 %, comme nous invite à le faire M. Bas, mais je ne pense pas que l’on puisse improviser sur un tel sujet.

Toutefois, madame la ministre, vous savez que la question se pose : seulement treize partis politiques sont éligibles au financement public au titre de la première et de la seconde parts, mais, comme je l’ai rappelé dans la discussion générale, il existe 451 partis politiques en France… Vous savez que l’immense majorité de ces partis sont des pseudo-partis : il s’agit d’organisations de commodité qui parviennent ainsi à récupérer, pour vingt-trois d’entre elles, un peu d’argent public au titre de la première part et, pour les autres, à bénéficier de dons qui eux-mêmes donnent lieu à un bénéfice fiscal.

Le système en vigueur est donc aberrant, madame la ministre. Je vous invite à ce sujet à lire le dernier livre de René Dosière, qui explique cela avec une grande clarté. Je pourrais vous parler de ce parti mosellan qui a quelques filiales en Guadeloupe, ce qui lui permet une certaine activité politique…

Ce système aberrant l’est en effet encore plus dans sa partie relative à l’outre-mer, puisqu’il suffit d’avoir quelques électeurs dans un département d’outre-mer pour en bénéficier. Il y a là quelque chose qui ne va pas.

Comme, j’en conviens, on ne peut pas « bricoler », je vous demande, madame la ministre, si vous seriez d’accord pour que le ministère de l’intérieur travaille sur ce sujet avec ceux de mes collègues qui voudraient le faire – moi, je suis candidat !

On ne peut continuer à avoir 451 partis dont beaucoup sont, de fait, non pas des partis politiques, mais des organismes qui permettent de trouver un peu d’argent…

M. le président. Monsieur Sueur, l’amendement n° 118 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Mais non, monsieur le président !

On pourrait, M. Bas a raison, le rectifier et fixer le seuil à 1,5 %, mais, tout le monde en est d’accord, ce serait de l’improvisation. Simplement, j’espère vous avoir convaincu, monsieur le rapporteur, madame la ministre, qu’il n’est pas correct de continuer avec cette organisation fallacieuse.

Voilà pourquoi je demande, si vous en êtes d’accord, madame la ministre, que soit organisé un groupe de travail avec vous et le ministère de l’intérieur. On ne peut pas laisser perdurer ce système tout en proclamant que l’on est pour la transparence et la confiance !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Sueur, je suis d’accord avec vous. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Je connais les faits que vous avez exposés, et je suis d’accord, sur le principe, pour revenir ici et discuter de ce sujet avec vous.

M. Jean-Pierre Sueur. Merci !

Je confirme que je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 118 rectifié est retiré.

Monsieur Longeot, qu’en est-il de l’amendement n°34 rectifié ter ?

M. Jean-François Longeot. Compte tenu des explications de Mme la ministre, je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 34 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 17, présenté par MM. Cabanel et Labbé, Mme Benbassa, MM. Manable, Tourenne et Duran, Mme Yonnet, MM. Labazée, Carcenac et Courteau et Mme Jourda, est ainsi libellé :

Avant l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - soit aux partis et groupements politiques qui ont présenté lors du plus récent renouvellement de l’Assemblée nationale des candidats ayant obtenu chacun au moins 3 % des suffrages exprimés dans au moins vingt circonscriptions ; ».

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Cet amendement vise lui aussi à changer les seuils en vigueur. Après l’excellente argumentation que vient de développer M. Sueur et les déclarations de Mme la ministre, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 17 est retiré.

L’amendement n° 40, présenté par M. Kaltenbach, n’est pas soutenu.

Articles additionnels avant l'article 8
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Article additionnel après l'article 8

Article 8

I. – La loi n° 88–227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

1° A (nouveau) Le titre II est abrogé ;

1° B (nouveau) À l’article 11, après le mot : « partis », sont insérés les mots : « et groupements » ;

1° C (nouveau) À la première phrase du premier alinéa, deux fois, au deuxième alinéa, au 2° de l’article 11–1, à la première phrase du premier alinéa, au second alinéa de l’article 11–2 et aux première, deuxième et troisième phrases de l’article 11–3, après le mot : « parti », sont insérés les mots : « ou groupement » ;

1° D (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l’article 11-1, les mots : « mentionnée à l’article L. 52-14 du code électoral » sont supprimés ;

1° E (nouveau) Au premier alinéa de l’article 11-4, après le mot : « partis », sont insérés, deux fois, les mots : « ou groupements » ;

1° À l’article 11, les mots : « des fonds » sont remplacés par les mots : « l’ensemble de leurs ressources, y compris les aides prévues à l’article 8, » ;

2° Au 2° de l’article 11–1, les mots : « tous les dons reçus » sont remplacés par les mots : « l’ensemble des ressources reçues » ;

3° Au second alinéa de l’article 11–2, les mots : « tous les dons reçus » sont remplacés par les mots : « l’ensemble des ressources reçues » ;

4° Après l’article 11–3, il est inséré un article 11–3–1 ainsi rédigé :

« Art. 11–3–1. – Les personnes physiques peuvent consentir des prêts aux partis ou groupements politiques dès lors que ces prêts ne sont pas effectués à titre habituel.

« Ces prêts ne peuvent excéder une durée de cinq ans. Un décret en Conseil d’État fixe le plafond et les conditions d’encadrement du prêt consenti pour garantir qu’il ne constitue pas un don déguisé.

« Le parti ou groupement politique fournit au prêteur les informations concernant les caractéristiques du prêt s’agissant du taux d’intérêt applicable, du montant total du prêt, de sa durée, de ses modalités et conditions de remboursement.

« Le parti ou groupement politique informe le prêteur des conséquences liées à la défaillance de l’emprunteur.

« Il communique à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, dans les annexes de ses comptes, un état du remboursement du prêt consenti. Il lui adresse, l’année de sa conclusion, une copie du contrat du prêt. » ;

5° L’article 11–4 est ainsi modifié :

a) Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les personnes morales, à l’exception des partis et groupements politiques ainsi que des établissements de crédit et sociétés de financement ayant leur siège social dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ne peuvent consentir des prêts aux partis et groupements politiques. » ;

b) Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« L’association de financement ou le mandataire financier délivre au donateur un reçu pour chaque don ou cotisation. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’établissement, d’utilisation et de transmission du reçu à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, le parti ou groupement bénéficiaire communique chaque année à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques la liste des personnes ayant consenti à lui verser un ou plusieurs dons ou cotisations, ainsi que le montant de ceux-ci. » ;

c) L’avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ils ne peuvent recevoir des prêts d’un État étranger ou d’une personne morale de droit étranger, à l’exception des établissements de crédit ou sociétés de financement mentionnés au troisième alinéa. » ;

6° L’article 11–5 est ainsi rédigé :

« Art. 11–5. – Les personnes qui ont versé un don ou consenti un prêt à un ou plusieurs partis ou groupements politiques en violation des articles 11–3–1 et 11–4 sont punies de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 €.

« Les même peines sont applicables au bénéficiaire du don ou du prêt consenti :

« 1° Par une personne physique en violation de l’article 11–3–1 et du cinquième alinéa de l’article 11–4 ;

« 2° Par une même personne physique à un seul parti ou groupement politique en violation du premier alinéa du même article 11–4 ;

« 3° Par une personne morale, y compris de droit étranger, en violation dudit article 11-4. » ;

7° L’article 11–7 est ainsi rédigé :

» Art. 11–7. – I. – Les partis ou groupements politiques ont l’obligation de tenir une comptabilité selon un règlement établi par l’Autorité des normes comptables.

« Cette comptabilité doit retracer tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux de tous les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement détient la moitié du capital social ou des sièges de l’organe d’administration ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion. Elle inclut les comptes de toutes les organisations territoriales du parti ou groupement politique.

« Les comptes de ces partis ou groupements sont arrêtés chaque année.

« II. – Les comptes sont certifiés par deux commissaires aux comptes, si les ressources annuelles du parti ou du groupement dépassent 230 000 €, ou par un commissaire aux comptes.

« Les comptes sont déposés dans le premier semestre de l’année suivant celle de l’exercice à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques qui les rend publics. Les partis ou groupements transmettent également, dans les annexes de ces comptes, les montants et les conditions d’octroi des emprunts souscrits ou consentis par eux, l’identité des prêteurs ainsi que les flux financiers avec les candidats tenus d’établir un compte de campagne en application de l’article L. 52–12 du code électoral.

« Lors de la publication des comptes, la commission indique les montants consolidés des emprunts souscrits répartis par catégories de prêteurs, types de prêts ainsi que l’identité des prêteurs et les flux financiers nets avec les candidats.

« Si la commission constate un manquement aux obligations prévues au présent article, elle peut priver, pour une durée maximale de trois ans, un parti ou groupement politique du bénéfice des dispositions des articles 8 à 10 de la présente loi et de la réduction d’impôt prévue au 3 de l’article 200 du code général des impôts pour les dons et cotisations consentis à son profit, à compter de l’année suivante.

« La commission demande, le cas échéant, communication de toutes les pièces comptables et de tous les justificatifs nécessaires au bon accomplissement de sa mission de contrôle. » ;

8° L’article 11–8 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « recevoir des dons de personnes identifiées » sont remplacés par les mots : « percevoir des ressources » ;

b) À la seconde phrase, la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « dernier alinéa du II » ;

9° L’article 11–9 est ainsi rédigé :

« Art. 11–9. – I. – Le fait de ne pas communiquer, de sa propre initiative ou à la demande de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, les informations qu’un parti ou groupement politique est tenu de communiquer à cette dernière en application de l’article 11–3–1, du quatrième alinéa de l’article 11–4 et du II de l’article 11–7 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

« II. – (Supprimé)

» III. – Le fait pour un dirigeant de droit ou de fait d’un parti ou groupement politique de ne pas déposer les comptes du parti ou groupement qu’il dirige dans les conditions fixées à l’article 11–7 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. » ;

10° Après l’article 11–9, il est inséré un article 11–10 ainsi rédigé :

« Art. 11–10. – Les informations mises à disposition en application de la présente loi le sont dans les conditions prévues au livre III du code des relations entre le public et l’administration. » ;

11° Au premier alinéa de l’article 19, les mots : « n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » sont remplacés par les mots : « n° …du …pour la régulation de la vie publique ».

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2018. Les 1° à 3° et 7° du même I s’appliquent à compter du premier exercice des partis ou groupements politiques ouvert postérieurement au 31 décembre 2017.

Les dispositions de l’article 11–3–1, de la dernière phrase du troisième alinéa et de la dernière phrase du sixième alinéa de l’article 11–4 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, dans leur rédaction résultant de la présente loi, ne sont pas applicables aux contrats conclus antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi.

III (nouveau). – Le second alinéa du I de l’article 10 de la loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats est supprimé.

M. le président. L’amendement n° 97, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 8 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, le mot : « égales » est supprimé ;

b) Au 1°, après le mot : « fraction », sont insérés les mots : « , correspondant aux trois quarts du montant considéré, est » ;

c) Au 2°, après le mot : « fraction » sont insérés les mots : « , correspondant au quart du montant considéré, est ».

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Par le biais de cet amendement, nous proposons de redéfinir les règles de répartition du financement des partis politiques.

Pour financer leurs dépenses, les partis politiques reçoivent une aide de l’État. Pour certains d’entre eux, cette aide constitue la principale source de financement. En contrepartie, les dons des personnes morales sont frappés d’interdiction.

Les crédits destinés à être versés aux partis et groupements politiques sont inscrits, chaque année, en loi de finances.

Ils sont répartis entre les partis politiques pour moitié à raison de leurs résultats au premier tour des élections législatives. Cette première part bénéficie aux partis ayant présenté, dans au moins cinquante circonscriptions ou dans au moins un département ou une collectivité d’outre-mer, des candidats ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés. Elle est réduite en cas de méconnaissance des règles favorisant la parité entre les femmes et les hommes. L’autre moitié est répartie aux partis représentés au Parlement, en proportion du nombre de députés et sénateurs. Seuls les partis bénéficiant de la première fraction sont éligibles à la seconde.

Si les règles instituées par la loi du 11 mars 1988 constituent une avancée, le mode de répartition n’est pas satisfaisant. Il contribue à renforcer le bipartisme et reproduit à l’échelle du financement des organisations politiques les distorsions introduites par les modes actuels de scrutin.

Au cours de la dernière législature, les deux principales formations politiques ont ainsi touché près de 70 % de l’ensemble de l’aide publique, alors qu’elles avaient obtenu aux élections législatives de 2012 57 % des suffrages exprimés au premier tour. En l’absence de scrutin proportionnel, le fait d’attribuer la moitié de l’aide en fonction du nombre de députés et de sénateurs représente donc une anomalie.

Afin de renforcer l’équité du dispositif, les auteurs de cet amendement proposent, conformément à la proposition de loi déposée par nos collègues à l’Assemblée nationale, d’établir de nouvelles règles de répartition de l’aide publique donnant plus de poids à la fraction assise sur les suffrages exprimés en faveur de chaque parti.

Nous préconisons que le montant de l’aide publique soit désormais divisé en deux fractions inégales : l’une, correspondant aux trois quarts du montant total, destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats au premier tour des élections législatives ; l’autre, correspondant au quart du montant total, spécifiquement destinée au financement des partis et groupements représentés au Parlement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Il est défavorable.

Je crains que l’adoption de cet amendement n’ait en réalité pour effet de renforcer les effets du scrutin majoritaire sur le financement des partis politiques, alors que l’enjeu est précisément de permettre à des partis faiblement représentés, voire pas représentés du tout, de participer quand même au débat démocratique grâce à des financements publics.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il est lui aussi défavorable.

Madame la sénatrice, votre amendement tend à bouleverser la répartition actuelle du financement public des partis sans que l’on puisse mesurer complètement les conséquences, qui mériteraient donc une étude plus approfondie. Je vous invite donc à le retirer.

M. le président. Madame Prunaud, l’amendement n° 97 est-il maintenu ?

Mme Christine Prunaud. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 97 est retiré.

L’amendement n° 56 rectifié, présenté par M. Leconte et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé :

Alinéas 7 à 9

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. La loi du 11 mars 1988 exige que chaque parti politique recueille les dons dont il est bénéficiaire par l’intermédiaire d’un mandataire, qui peut être une personne physique ou une association de financement. Le présent projet de loi prévoit de donner à ce mandataire une fonction différente : il serait chargé de recueillir, non plus simplement les dons, mais bien l’ensemble des ressources du parti, c’est-à-dire également les produits de son activité, de son patrimoine ou de ses placements.

Il me semble que faire du mandataire l’unique responsable de l’ensemble des ressources du parti politique ne va pas dans la bonne direction, la vérification des dons étant essentielle au regard de l’exigence de transparence qui nous anime. Cela risque de compliquer les choses plutôt que de les rendre simples et lisibles.

Si nous voulons que les dons soient contrôlés par un mandataire clairement responsable, il faut qu’il se consacre exclusivement à ce contrôle. Or, ce que signifient en réalité les dispositions des alinéas 7 à 9 de l’article 8, c’est qu’il n’y aura plus de différence entre le trésorier d’un parti politique et son mandataire.

Tant pour des questions de lisibilité que de responsabilité spécifique, je crois préférable, en termes de transparence, d’en rester à la législation actuelle pour la vérification correcte des dons, raison pour laquelle je propose la suppression de ces alinéas.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission n’a pas de conviction fermement arrêtée dans ce domaine : elle s’en est tenue au projet de loi du Gouvernement.

J’ai bien entendu l’exposé des intentions de l’auteur de cet amendement. Je me souviens aussi de ce que le président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques n’était pas enthousiaste à l’égard de la disposition qui figure dans le projet de loi et que cet amendement tend à corriger.

Je m’en remets donc à la sagesse de notre assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement soutient son texte et émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 56 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 117, présenté par MM. Sueur, Leconte, Marie, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 11 à 15

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 11–3–1. – Les personnes physiques ne peuvent contribuer au financement des partis ou groupements politiques en consentant des prêts, sous quelque forme que ce soit, à leurs associations de financement ou à leurs mandataires financiers. » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Par cet amendement, nous proposons, dans un souci de clarification et d’efficacité, d’interdire aux partis et groupements politiques de recevoir des prêts de personnes physiques.

Il paraît en effet difficile d’effectuer un contrôle a posteriori des prêts sur le long terme et de s’assurer qu’ils ne constituent pas, en cas de non-remboursement, des dons supérieurs à 7 500 euros, ces derniers étant interdits.

Il nous semble qu’il serait plus clair de disposer que les personnes physiques ne peuvent pas faire de prêts aux partis politiques.

M. le président. L’amendement n° 38, présenté par M. Kaltenbach, est ainsi libellé :

Alinéas 11 à 15

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 11-3-1. – Les prêts consentis par des personnes physiques à des partis politiques sont interdits. » ;

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement est similaire à l’excellent amendement que vient de défendre M. Jean-Pierre Sueur.

L’objectif est d’éviter toute ambiguïté en interdisant complètement les prêts consentis par des personnes physiques à des partis politiques. On peut toujours trouver des moyens pour mieux les contrôler, mais on sait bien que la seule solution pour en finir avec ce système de prêts qui se transforment en dons est d’interdire complètement les prêts.

Par conséquent, je me rallie à l’amendement n° 117 et je retire le mien.

M. le président. L’amendement n° 38 est retiré.

L’amendement n° 189 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le prêt consenti par un parti ou groupement politique à un autre parti ou groupement politique ne peut donner lieu au versement d’intérêts.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Certains micropartis politiques servent de réserve financière à des candidats ou à d’autres partis politiques. Si l’on ne peut interdire les prêts entre ces différentes entités juridiques, on peut interdire à ces formes de mini-banques privées de la vie politique de faire des bénéfices en se rémunérant sur les prêts qu’elles accordent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a émis des avis défavorables sur ces deux amendements.

S’agissant de l’amendement n° 117, le Gouvernement, dans son projet de loi, a déjà posé des mesures d’encadrement. Cet amendement est plus radical puisqu’il tend à interdire purement et simplement les contributions consenties, sous forme de prêts, par des personnes physiques au financement des partis politiques. Il ne faudrait pourtant pas que des formations politiques en viennent à être asphyxiées tant les contraintes pesant sur leur financement seraient alourdies. La commission des lois a accepté les restrictions apportées par le Gouvernement ; nous proposons, mes chers collègues, que l’on s’en tienne là.

Quant à l’amendement n° 189 rectifié, dont je comprends les intentions, qui sont positives, il tend en réalité à apporter une restriction qui ne me paraît pas utile. En effet, la loi relative au financement des partis politiques prévoit la possibilité de dons entre partis. Il ne serait donc pas cohérent que l’on ait, d’une part, cette possibilité, mais que, d’autre part, les prêts ne puissent être qu’à intérêt. C’est la raison pour laquelle cet amendement a lui aussi reçu un avis défavorable de notre part.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Nous avons en effet encadré les prêts octroyés par des personnes physiques de manière assez stricte : ces prêts auront une durée maximale de cinq ans et seront plafonnés. En outre, ils seront communiqués à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pour vérifier qu’il ne s’agit pas de dons déguisés.

L’avis du Gouvernement est également défavorable sur l’amendement n° 189 rectifié.

Naturellement, les financements entre partis, notamment sous forme de dons ou de prêts, sont soumis aux obligations prévues par la loi du 11 mars 1988.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 117.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 189 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par MM. Leconte, Sueur, Marie, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au début du premier alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Une personne physique peut verser un don à un parti ou groupement politique si elle est de nationalité française ou si elle réside en France. » ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement a pour objet d’exclure du champ de financement de la vie politique française les personnes qui ne sont pas citoyennes françaises et celles pour lesquelles l’administration française n’a pas la capacité de s’assurer de l’origine des revenus qui leur permettent de financer un ou plusieurs partis politiques.

Cet amendement procède de la même logique que l’interdiction des dons faits par des personnes morales aux partis et groupements politiques, interdiction qui ne porte pas atteinte à la libre activité de ces derniers.

Il s’agit, en réalité, d’assurer une meilleure transparence des fonds qui peuvent parvenir aux partis. En effet, quand ils proviennent d’une personne physique qui n’est pas française ou ne réside pas en France, on ne sait pas du tout d’où vient l’argent : il y a donc là, pour ainsi dire, un trou dans la raquette  !

Afin d’assurer un parallélisme, les auteurs du présent amendement ont déposé un amendement similaire, concernant le financement des campagnes électorales, à l’article 9 du présent projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, et ce pour deux raisons.

En premier lieu, l’article 4 de la Constitution prévoit que les partis politiques doivent respecter la souveraineté nationale. Les financements reçus de l’étranger peuvent faciliter l’influence d’États étrangers sur la vie politique française.

En second lieu, les autorités nationales françaises n’ont pas de réel pouvoir pour s’assurer qu’un prêteur étranger respecte nos lois en matière de financement politique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet le même avis que la commission, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Nous soutiendrons évidemment cet excellent amendement.

Il ne faut pas oublier par ailleurs le travail effectué par la cellule TRACFIN sur les financements étrangers qui font l’objet de signalements obligatoires : cet amendement est absolument nécessaire, mais ces financements étrangers sont assez bien tracés grâce à la législation en vigueur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 119 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 37, présenté par M. Kaltenbach, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 16

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les associations de financement et les mandataires financiers ainsi que les micropartis doivent chaque année rendre publique la liste des personnes ayant consenti annuellement un ou plusieurs dons d’une valeur totale supérieure à 500 euros. » ;

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. L’objectif est d’atteindre une transparence un peu à l’anglo-saxonne : tout mettre sur la table permet d’éviter les abus.

Reste à fixer à partir de quelle valeur totale les dons doivent être rendus publics. Mon amendement prévoit de fixer le seuil à 500 euros.

Le groupe socialiste et républicain a déposé un amendement similaire avec un seuil de 2 000 euros. Si mon amendement n’était pas adopté, je me rallierais bien sûr à cette proposition.

M. le président. L'amendement n° 50 rectifié, présenté par MM. Leconte, Courteau et Mazuir, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La liste des donateurs et le montant des dons de plus de 500 euros consentis à une association de financement ou à un mandataire financier d’un parti politique sont rendus publics par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans les conditions fixées par le même décret en Conseil d’État.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 120 rectifié, présenté par MM. Marie, Sueur et Leconte, Mmes Lienemann et Yonnet, MM. Vandierendonck, Durain, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette dernière publie, pour chaque parti, le nom des personnes physiques dont le montant total des dons excède annuellement 2 000 euros.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Défendu, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié bis, présenté par Mme Lienemann, n'est pas soutenu.

L'amendement n° 98, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La liste des donateurs pour les dons ou les prêts supérieurs à plus de 2 500 euros est rendue publique par la Commission nationale des compagnes et des financements politiques.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. L’objet de cet amendement est simple. Il s’agit de prévoir, en sus des obligations des partis politiques et candidats auprès de la Commission nationale des comptes des campagnes et des financements politiques, une obligation de publicité par cette instance des donateurs de plus de 2 500 euros.

L’exigence de transparence conduit ainsi à rendre accessibles à tous, et non pas seulement à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, ces informations importantes pour la compréhension des liens d’intérêts et de finances entre un candidat ou un parti politique et des personnalités influentes.

Peut-être se souvient-on ici des déclarations de François Bayrou avant qu’il ne devienne garde des sceaux – un garde des sceaux éphémère, certes, mais il reste l’initiateur de ce projet de loi – dans lesquelles il faisait référence à la levée de fonds du président Macron à la City, à New York, parmi des banquiers et autres puissants de ce monde et s’interrogeait sur cette problématique. Nous partageons sa volonté de limiter la porosité entre la finance et la politique, même si la politique a besoin de financements.

C’est l’une des raisons qui nous poussent non pas à interdire ces dons, mais simplement à en assurer une publicité pleine et entière pour nos concitoyens.

Nous avons déposé un amendement identique, que nous ne défendrons pas, à l’article 9.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La République française impose à chaque citoyen de passer, à l’occasion de chaque scrutin, par l’isoloir pour exprimer ses choix politiques, et ce depuis maintenant 128 ans.

Cette règle a été inventée pour permettre à nos concitoyens d’échapper à toute pression. Nul ne peut en France se voir imposer la révélation, à son insu ou malgré lui, de ses choix politiques. Quand il verse une aide à un parti politique et qu’il n’entend pas le faire savoir à son employeur, aux membres de sa famille, à son cercle d’amis, à son club de tennis, un Français n’a pas à être exposé à la divulgation d’une information qui relève strictement de sa vie privée et des choix qu’il accomplit en conscience comme citoyen s’il ne l’a pas décidé de lui-même.

Par conséquent, en raison de ces principes constitutionnels fondamentaux, auxquels nous sommes tous profondément attachés, la commission émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune. (Très bien ! sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement est évidemment attaché aux deux principes constitutionnels que sont le droit au respect de la vie privée et la liberté de conscience. C’est pourquoi, comme la commission des lois, il émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50 rectifié.

M. Jean-Yves Leconte. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 50 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 120 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 98.

Mme Laurence Cohen. J’entends les arguments du rapporteur sur la nécessité de préserver les choix individuels et, comme l’ensemble de mon groupe, j’y suis sensible.

Toutefois, on confond, me semble-t-il, les choix individuels d’une personnalité et ce que vise cet amendement, à savoir la porosité entre pouvoir politique et pouvoir économique. Il s’agit là d’un autre monde, permettez-moi de le signaler, dans lequel des pressions peuvent s’exercer, ce qui constitue un réel danger. J’ai évoqué de manière feutrée l’intervention des grandes banques, qui exercent une influence extrêmement forte du point de vue économique.

Pour notre part, nous considérons que c’est toujours le politique qui prime sur l’économique. Reste que c’est une lutte acharnée, et il y a aussi une question de classe. Il faut réfléchir aux incidences que pourrait avoir cet amendement sur les décisions qui sont prises dans un pays comme le nôtre, en Europe et dans le monde.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Pour avoir déposé un amendement du même type, je comprends tout à fait la position de nos collègues. Malgré tout, s’agissant du financement de la vie politique, même si elle n’est pas exemplaire et s’il nous faut l’améliorer, notre législation est assez précise et je crois que nous pouvons en être fiers, surtout quand on la compare à ce qui se passe ailleurs, en Europe et dans le monde.

La disposition relative aux donateurs étrangers est une assurance de plus en termes de transparence et de non-dépendance.

Même s’il nous faut avancer par petits pas, en tenant compte du fait que pour certains les opinions politiques relèvent de l’intime même s’ils veulent aider un parti, et même si ces amendements ne sont pas adoptés, il me semble que nous aurons progressé à l’occasion de cette discussion.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 98.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 99, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 18

Remplacer les mots :

dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen

par les mots :

sur le territoire de la République française

II. – Alinéa 22

Après les mots :

droit étranger

supprimer la fin de cet alinéa.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 79, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 18

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre d’une participation au financement d’un autre parti ou groupement politique ou d’une campagne électorale d’un candidat, les partis ou groupements politiques ne peuvent fournir des biens ou des services à des prix supérieurs à leurs prix d’achat effectif. »

II. – Alinéa 26

Remplacer le mot :

cinquième

par le mot :

sixième

III. – Après l’alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les mêmes peines sont applicables à un groupement ou parti politique qui a, pour le compte d’un autre parti ou groupement ou d’un candidat, fourni des biens ou des services en violation du quatrième alinéa de l’article 11-4. » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Avec les établissements de crédit et sociétés de financement, les partis et groupements politiques sont les seules personnes morales à pouvoir financer une autre formation politique et des candidats aux élections.

Afin d’éviter un contournement de la loi par certaines formations politiques, il est proposé d’interdire la fourniture de prestations surfacturées d’un parti ou groupement politique à un candidat lors d’une campagne électorale et des partis et groupements politiques entre eux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est un amendement intéressant, mais, dès lors que les dons entre partis politiques ne sont pas limités, on ne saurait encadrer les achats entre partis politiques, qu’ils soient surévalués ou sous-évalués, au motif d’empêcher un don déguisé. Si un parti politique voulait consentir un don à un autre parti politique, il pourrait l’effectuer directement.

Cet amendement revient de façon sous-jacente à remettre en cause les dons entre partis politiques : sous-évaluer ou surévaluer un prix, c’est précisément faire un don, et les dons sont permis. À la limite, il faudrait tous les interdire. Si c’était ce que vous souhaitiez, nous en débattrions, mais ce n’est pas l’objet de votre amendement.

Pourriez-vous le retirer, cher collègue ?

M. Jean-Pierre Grand. Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 79 est retiré.

L'amendement n° 140, présenté par M. Maurey, n'est pas soutenu.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 201 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa et Archimbaud, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 28

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 11-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de manquement aux obligations prévues par la loi n° … du … rétablissant la confiance dans l'action publique, la commission peut également interdire à un parti politique de consentir des prêts ou des avances remboursables, à un parti, un groupement politique ou un candidat pour une durée maximale de cinq ans. » ;

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. La principale sanction d’un parti en cas de manquement à ses obligations comptables, à savoir la perte de la possibilité de financer la campagne électorale d’un candidat ou d’un autre parti politique, n'est toujours pas inscrite dans la loi. Comme le soulignait la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans son rapport d’activité de 2016, cette sanction reste d’origine jurisprudentielle. Il est proposé de mettre fin à cette lacune et de fixer à cinq ans la durée de l’interdiction.

M. le président. L'amendement n° 80, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :

Alinéa 36

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pendant la durée des sanctions, les partis ou groupements politiques ne peuvent contribuer au financement d’un parti ou groupement politique pour lequel la commission a constaté un manquement aux obligations prévues au présent article.

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. L’article 9 de la loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats a permis à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques de moduler les sanctions et leur durée en cas de manquement aux obligations comptables pour une meilleure proportionnalité entre les motifs du constat et ses conséquences juridiques. Cette disposition est conservée dans la nouvelle rédaction de l’article 11-7 proposée à l’article 8 du présent projet de loi.

Cependant, les actuelles dispositions relatives à la sanction du non-respect des obligations comptables semblent ne pas atteindre complètement l’objectif. En effet, certaines formations politiques défaillantes peuvent, peu après la décision les concernant, créer un parti politique « frère » dont la dénomination est très proche et qui est uniquement destiné à se substituer l’année suivante à la formation en cause pour l’encaissement des dons et cotisations. Les fonds ainsi perçus ouvrant droit à la réduction d’impôt au bénéfice des sympathisants et adhérents, la formation nouvellement créée peut ensuite en toute légalité les reverser au profit du parti pour lequel un manquement avait été constaté.

Ce constat illustre la difficulté pour le législateur de définir une sanction adéquate et efficace à l’encontre des partis politiques qui ne respecteraient pas les obligations prévues par la loi sur la transparence financière.

Sans remettre en cause la liberté constitutionnelle de création et d’organisation des partis politiques, il est proposé d’interdire à un parti ou groupement politique sanctionné de recevoir des contributions financières d’autres partis ou groupement politiques.

Il s’agit là de répondre à une recommandation de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, notamment dans son seizième rapport d’activité, publié en 2014.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 201 rectifié, car le texte de la commission atteint à peu près le même résultat par un autre biais.

À M. Grand, je veux dire que nous partageons la préoccupation qu’il exprime à l’amendement n° 80. En commission, notre collègue Hugues Portelli a déposé un amendement visant à sanctionner pénalement le non-dépôt des comptes des partis politiques, amendement qui a été adopté. Ces sanctions sont assez lourdes, puisqu’elles comportent des peines de prison et des peines d’amendes allant jusqu’à 45 000 euros.

Dans la mesure où cette disposition a été intégrée au texte de la commission, mettre en concurrence une sanction administrative et une sanction pénale risque de vider cette dernière, qui est beaucoup plus sévère, de sa portée.

C’est la raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable sur cet amendement, à moins que vous ne décidiez de le retirer, mon cher collègue, à la lumière de cette explication et dans la mesure où votre intention était de prévoir une sanction.

M. le président. Monsieur Grand, l’amendement n° 80 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Grand. Si j’ai bien compris, pour un parti défaillant, la sanction est lourde. Cependant, si un autre parti peut récupérer des fonds et les transférer au parti sanctionné, il remboursera en quelque sorte la sanction. Ce n’est pas le but.

M. Philippe Bas, rapporteur. Dans ce cas, cet autre parti sera sanctionné pour non-présentation de ses comptes annuels !

M. Jean-Pierre Grand. Je retire mon amendement, mais je suggère que l’on y réfléchisse.

M. le président. L'amendement n° 80 est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 201 rectifié ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’interdiction de financer un parti qui a méconnu ses obligations comptables résulte de la loi du 11 mars 1988. Elle découle des sanctions prononcées par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à savoir la perte du bénéfice des dispositions des articles 8 à 10 de la loi de 1988 et du bénéfice de la réduction d’impôt prévu à l’article 200 du code général des impôts.

La durée de ces sanctions initialement fixées à un an a été portée à trois ans par la loi du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats.

Compte tenu de tous ces éléments, il ne paraît pas opportun de changer la loi.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Mme la ministre m’a convaincu. Aussi je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 201 rectifié est retiré.

L'amendement n° 216, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 30

Après le mot :

politiques

insérer les mots :

bénéficiaires de tout ou partie des dispositions des articles 8 à 11-4

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. L'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 prévoit que les partis et groupements politiques ont l'obligation de tenir une comptabilité et de déposer des comptes certifiés, lesquels sont contrôlés par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

La loi du 11 mars 1988 ne donne aucune définition des partis et groupements politiques. Son champ d’application résulte de l’économie générale du dispositif de transparence du financement de la vie publique politique telle qu’elle a été interprétée par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État.

En l'état du droit, les obligations comptables s'imposent, d'une part, aux partis et groupements politiques qui bénéficient d'un financement public, d'autre part, à ceux qui se soumettent au dispositif prévu par les articles 11 à 11-4 de la loi du 11 mars 1988. Ce dispositif repose sur le recours à un mandataire et sur la mise en œuvre d'un cadre strict de financement. En contrepartie, les partis et groupements politiques peuvent notamment recevoir des dons ouvrant droit à une réduction d'impôt et contribuer au financement des campagnes électorales ou d’autres partis.

Les obligations comptables prévues par la loi du 11 mars 1988 et le contrôle de la Commission des comptes de campagne et des financements politiques n'ont de sens que pour ces seuls partis et groupements politiques. Étendre les obligations comptables à l'ensemble des partis et groupements politiques serait de nature à remettre en cause l'équilibre du dispositif de transparence du financement de la vie politique issu de la loi de 1988 et validé par le Conseil constitutionnel au regard de l'article 4 de la Constitution.

Compte tenu des sanctions administratives et pénales dont est assorti le non-respect des obligations comptables prévues par l’article 11–7, il est indispensable d'éviter toute ambiguïté ou difficulté sur leur champ d'application. C’est pourquoi cet amendement vise à revenir à la rédaction actuelle de la loi, qui est maîtrisée par l'ensemble des parties prenantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement. Comme à son habitude, Mme la ministre a su se montrer extrêmement convaincante ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 216.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 55 rectifié, présenté par MM. Leconte et Cabanel, est ainsi libellé :

Alinéa 31, dernière phrase

1° Remplacer les mots :

de toutes les

par le mot :

des

2° Compléter cette phrase par les mots :

dans des conditions définies par décret

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement a pour objet de définir plus précisément le type d'organisations territoriales d'un parti ou groupement politique concernées par les dispositions prévues par l’article 8, en fonction notamment de leur taille, de leur patrimoine et de leurs revenus.

En effet, le projet de loi prévoit une consolidation globale, ce qui n’est actuellement pas le cas pour l’ensemble des partis, de leurs sièges, des organisations régionales, non plus que pour l’ensemble des organisations, formelles ou informelles, qui sont installées à l’échelon local.

Il s'agit d'exclure les toutes petites structures, par exemple les sections comportant un faible nombre d'adhérents et n'étant pas propriétaires de leur local. Ainsi, l’amendement prévoit qu'un décret fixera les conditions détaillées d'application de cette disposition, qui ne concernera que les organisations territoriales du parti ou groupement politique ayant des revenus ou des actifs significatifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. MM. Leconte et Cabanel confirment, une fois de plus, leur expertise dans le domaine du financement des partis politiques. Ils ont convaincu la commission des lois, qui a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement vise à exclure de la présentation des comptes consolidés des partis les comptes des petites structures territoriales.

L’inclusion dans la comptabilité des partis et groupements politiques des comptes de toutes les organisations territoriales du parti politique est un facteur fondamental d’amélioration de la transparence et de la traçabilité de leurs ressources.

Si le Gouvernement est conscient que cette nouvelle mesure fera peser de nouvelles obligations sur les partis, il souhaite toutefois la conserver afin de renforcer la traçabilité des ressources et emplois des fonds des partis politiques dans leur ensemble.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Je suis absolument d’accord avec vous, madame la ministre. Cet amendement n’a absolument pas pour objet de s’opposer à la démarche engagée par le Gouvernement. Au contraire !

La seule chose sur quoi nous souhaitons attirer votre attention avec cet amendement est qu’il impossible de procéder à l’inclusion de manière automatique sans avoir plus précisément pensé au périmètre. C’est une observation que nous avons pu entendre de nombreuses fois.

Loin de moi l’idée de refuser ce qui est prévu dans le projet de loi. Il s’agit plutôt d’inviter le Gouvernement à penser aux implications du caractère systématique de cette mesure et lui renvoyer la balle pour que le périmètre raisonnable et exact soit, par sécurité pour l’ensemble des acteurs, défini par le Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 39, présenté par M. Kaltenbach, est ainsi libellé :

Alinéa 33

Remplacer les mots :

deux commissaires aux comptes

par les mots :

la Cour des comptes

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Il s’agit d’assurer le contrôle des comptes de campagne par la Cour des comptes. Aujourd’hui, ce sont les commissaires aux comptes qui assurent la vérification, mais, à l’occasion des dernières campagnes, nous avons constaté que ce système était loin d’être parfait et avait donné lieu à d’importantes contestations.

La disposition que je propose dans cet amendement est demandée par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

J’ai cru comprendre que le Gouvernement avait eu la même idée, mais que le Conseil d’État l’avait dissuadé d’aller dans ce sens pour ne pas faire de concurrence « déloyale » aux experts-comptables.

Les partis politiques bénéficient d’aides publiques très importantes : à la subvention versée chaque année, qui constitue une part considérable de leurs revenus, s’ajoute l’avantage fiscal de 66 % sur les dons.

En définitive, leurs recettes sont majoritairement issues de l’argent public. Par conséquent, il me semble préférable que ce soit la Cour des comptes qui assure le contrôle de cet argent public.

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :

Alinéa 33

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le commissaire aux comptes, personne physique, et, dans les sociétés de commissaires aux comptes, les personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 822-9 du code de commerce, ne peuvent réaliser cette mission de certification durant plus de six exercices consécutifs. Ils peuvent à nouveau participer à une mission de contrôle légal des comptes de ces partis ou groupements politiques à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la date de clôture du sixième exercice qu’ils ont certifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Actuellement, les commissaires aux comptes sont nommés pour six ans et les partis ou groupements politiques peuvent les conserver d’un mandat à l’autre.

Certains partis ou groupements ont donc les mêmes commissaires aux comptes pendant de très nombreuses années, ce qui peut engendrer des situations susceptibles de remettre en cause l’impartialité ou l’indépendance des commissaires aux comptes désignés.

Cet amendement vise à introduire une obligation de rotation des commissaires aux comptes sur le modèle des dispositions prévues dans le code de commerce pour les commissaires aux comptes des associations faisant appel public à la générosité.

Les commissaires aux comptes ne pourraient certifier les comptes durant plus de six exercices consécutifs et seraient remplacés tous les six ans.

Il s’agit là de répondre à une recommandation de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. L’objet de l’amendement n° 39 est tout de même assez singulier : la Cour des comptes, qui est une juridiction souveraine, certifierait des comptes qu’une autorité administrative indépendante, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, vérifierait ensuite. C’est un peu le monde à l’envers !

La commission émet donc un avis défavorable.

La disposition prévue à l’amendement n° 14 – la rotation obligatoire des commissaires aux comptes des partis politiques – semble comporter de réelles difficultés d’application. Actuellement, les commissaires aux comptes doivent certifier les comptes des partis politiques tous les six ans. Cette rotation pose des difficultés à propos desquelles le président de la CNCCFP, M. François Logerot, nous a mis en garde.

J’ai donc aussi le devoir d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur l’amendement n° 39.

La section de l’intérieur du Conseil d’État, saisie pour avis, a d’ailleurs rendu un avis négatif sur la disposition proposée.

S’agissant de l’amendement présenté par Jean-Pierre Grand, je me rappelle qu’Alain Anziani avait déposé un amendement à l’objet similaire qui avait été retiré à la demande de la commission des lois du Sénat, demande que le Gouvernement avait soutenue…

L’avis sur l’amendement n° 14 est donc également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Grand, l'amendement n° 14 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 14 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 202 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux, est ainsi libellé :

Alinéas 34 et 35

Remplacer ces alinéas par onze alinéas ainsi rédigés :

« Ces comptes sont déposés dans le premier semestre de l’année suivant celle de l’exercice à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques instituée à l’article L. 52-14 du code électoral, qui les rend publics.

« Les partis ou groupements transmettent également, dans les annexes de ces comptes dans un format ouvert et aisément réutilisable :

« 1° L’adresse de leur siège social ;

« 2° Les noms et fonctions des personnes chargées de leur administration ;

« 3° Le nom de la personne physique, dénommée mandataire financier ;

« 4° Le nombre de personnes ayant cotisé au parti ou au groupement ;

« 5° Les flux financiers avec d’autres partis ou groupement ;

« 6° Les montants et les conditions d’octroi des emprunts souscrits ou consentis par eux ;

« 7° L’identité des prêteurs ;

« 8° Les flux financiers avec les candidats tenus d’établir un compte de campagne en application de l’article L. 52-12 du même code.

« Lors de la publication des comptes, la commission indique les éléments mentionnés au 1° à 5°, les montants consolidés des emprunts souscrits répartis par catégories de prêteurs, types de prêts et par pays d’établissement ou de résidence des prêteurs, ainsi que l’identité des prêteurs personnes morales et les flux financiers nets avec les candidats.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Chaque année, dans son rapport, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques publie les comptes des partis, mais les informations publiées restent lacunaires. Il manque des informations importantes, notamment le nom des principaux dirigeants, nécessaire pour identifier le parti, les flux financiers avec d’autres partis – information nécessaire pour déceler d’éventuels circuits financiers ou détournement de la loi, par exemple par des partis qui ne se regrouperaient que pour bénéficier de financements publics –, ou encore le nombre d’adhérents et de cotisants pour juger du poids réel du parti.

Il est également proposé que la transmission et la publication de ces données se fassent au format ouvert pour être plus facilement utilisées, comme l’a déjà proposé la commission des lois. Le mode de publication de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques n’est plus adapté aux réalités actuelles. Dès lors, la transmission des annexes se ferait également en open data.

M. le président. L'amendement n° 217, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 34, première phrase

Compléter cet alinéa par les mots :

et assure leur publication au Journal officiel de la République française

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement vise à rétablir la publication des comptes annuels des partis et groupements politiques au Journal officiel de la République française.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 202 rectifié.

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a pour rôle de s’assurer de la transparence financière et de la régularité des comptes, non de contrôler l’activité d’un parti politique. Nous ne pouvons prendre le risque constitutionnel d’adopter une disposition qui permettrait une sorte d’ingérence dans le fonctionnement d’un parti politique.

Madame la ministre, je comprends votre attachement au Journal officiel de la République française et je le partage. Mais, depuis sa création et dans les années récentes, les moyens d’information se sont décuplés.

Le Sénat souhaite donc rendre les comptes publics en open data, selon les règles de droit commun. Je ne comprends pas que le Gouvernement puisse vouloir restreindre le champ de l’information des Français sur les comptes des partis politiques.

Pour ces raisons, la commission souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, elle en demandera le rejet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 202 rectifié ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Si vous me le permettez, monsieur le président, je répondrai tout d’abord à M. le rapporteur.

Le Gouvernement ne restreint pas le droit à l’information puisque le texte prévoit bien l’open data. Nous souhaitons juste en plus une publication au Journal officiel, cette publication constituant une garantie juridique très importante. Je suis sûre que vous serez sensible à cet argument, monsieur le rapporteur.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 202 rectifié.

En effet, la loi du 11 mars 1988 prévoit déjà la publication d’un certain nombre de documents et d’informations relatifs aux comptes des partis et à leurs sources de financement. Des remontées d’informations très précises sont prévues, notamment pour les dons, les cotisations et les emprunts. Cette disposition permet de garantir de manière suffisante la transparence vis-à-vis des citoyens, ainsi que l’effectivité du contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

De plus, la commission des lois a adopté un amendement tendant à prévoir la mise à disposition des comptes des partis en open data.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je répondrai respectueusement à Mme la ministre que les déclarations qui sont faites à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique sont publiées, quand elles doivent l’être, en open data et non au Journal officiel. N’encombrons pas le Journal officiel avec des informations superfétatoires.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 202 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 217.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 287, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les II et III sont applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement vise à assurer l'application outre-mer de dispositions relatives aux partis et groupements politiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 287.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 9

Article additionnel après l'article 8

M. le président. L'amendement n° 1 rectifié quater, présenté par MM. Dominati, de Raincourt, Pointereau, Danesi, Laménie et Mandelli et Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le septième alinéa de l’article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il peut également n’indiquer aucun parti ou groupement politique, l’aide correspondante venant alors en déduction du total de la seconde fraction. »

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. À l’issue de la discussion de ces amendements, j’avoue être gêné : j’ai le sentiment que, désormais, en politique, on ne peut presque plus rien faire. Il n’y a plus que restrictions, contraintes et interdictions, toutes décidées pour restaurer la confiance de nos concitoyens. Je dois dire que j’éprouve un certain malaise.

Comme l’a indiqué M. Sueur, notre pays compte une grosse dizaine de partis politiques, plus les partis d’outre-mer. En réalité, l’aide publique est partagée entre les grandes formations politiques.

Or nous ne sommes pas tout à fait dans l’air du temps puisque le Président de la République est issu d’un mouvement qui ne recevait pas de financement public. De même, les élections législatives ont été gagnées par un parti politique qui ne percevait pas de financement public. Comme l’a très bien souligné M. Sueur, le système actuel est déficient. Nous sommes contraints d’apporter une aide publique à une palette d’une dizaine de partis qui se partagent le gâteau.

S’il est tout à fait naturel qu’un parlementaire puisse financer telle ou telle formation politique, il devrait aussi être possible pour lui, c’est une question de liberté individuelle, d’affecter sa dotation à la réduction du déficit budgétaire de l’État, ou un jour peut-être à son excédent. Il est anormal que la dotation d’un parlementaire n’ayant pas choisi de formation politique soit partagée au prorata entre toutes les formations de la liste officielle.

J’ai déjà déposé cet amendement à deux reprises par le passé, sous deux gouvernements différents.

Les grandes « machines » ne veulent évidemment pas entendre parler d’une éventuelle diminution de la dotation globale, mais, pour ma part, je le répète, j’estime que, si les parlementaires ne trouvent pas dans la liste qui leur est soumise chaque année au mois de novembre par le président de leur assemblée de formation qui leur convienne, il est naturel que leurs dotations soient déduites de l’enveloppe globale et qu’elles ne soient pas réparties entre la dizaine de partis politiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Lorsqu’elle s’est réunie, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Toutefois, je dois dire que, après avoir écouté notre collègue Philippe Dominati, j’ai compris tout l’intérêt de sa proposition. Je ne m’engagerai pas au nom de la commission, mais je me sens libre de voter cet amendement, même si, cher collègue, le droit en vigueur, et c’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable, permet déjà à un parlementaire – beaucoup l’ignorent – de ne pas être rattaché à un parti politique. En 2016, seuls quatre sénateurs et deux députés n’ont pas indiqué de rattachement.

Lorsqu’un parlementaire n’indique pas de rattachement, aucune disposition ne traite le problème des sommes auxquelles un parti politique aurait eu droit s’il en avait choisi un. C’est précisément, si je l’ai bien compris, tout l’intérêt de votre amendement que de traiter cette question : son apport est réel, et je m’y rallie.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. S’appuyant sur les trois quarts de l’argumentation du président Philippe Bas, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

C’était aussi initialement la position de la commission.

M. Robert del Picchia. C’était avant !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même si la commission a depuis changé d’avis, il ne m’appartient pas de modifier l’avis du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Je tiens tout d’abord à remercier le président de la commission des lois de son écoute sur ce problème technique.

Pour être bien clair, madame la ministre, je demande simplement qu’il soit possible que la dotation ne soit pas répartie à la proportionnelle entre tous les partis de la liste. Ainsi, des parlementaires pourront éventuellement contribuer à la réduction du déficit de l’État s’il ne trouve pas d’offre politique leur convenant.

Je constate avec étonnement que le Gouvernement ne fait pas cas du souhait des parlementaires de faire un effort budgétaire à une période où le Premier ministre annonce pourtant qu’il a plein d’idées pour en faire !

Je reposerai cette question lors du débat budgétaire. Cela laissera au Gouvernement le temps d’affiner sa position.

Et je maintiens cet amendement !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Lors de son discours devant le Congrès à Versailles, le Président de la République a annoncé qu’il souhaitait, à l’issue d’une réforme constitutionnelle, qu’un certain nombre de lois puissent être votées en commission. La preuve est faite de l’intérêt de pouvoir débattre des propositions en séance publique et de les y défendre. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Union Centriste et du groupe CRC.)

Philippe Dominati ne siège pas au sein de la commission des lois, comme la plupart d’entre nous, cette commission comptant moins d’une cinquantaine de membres. Si nous ne disposions plus de lieu où débattre, si nous ne pouvions plus présenter nos idées ailleurs que dans les quelques lignes de l’objet de nos amendements, nous perdrions notre force de conviction et la possibilité de faire évoluer la loi dans le bon sens. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié quater.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.

Chapitre II

Dispositions applicables aux campagnes électorales

Article additionnel après l'article 8
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Article 9 bis (nouveau)

Article 9

I. – Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 52-7, il est inséré un article L. 52-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 52-7-1. – Les personnes physiques peuvent consentir des prêts à un candidat dès lors que ces prêts ne sont pas effectués à titre habituel.

« Ces prêts ne peuvent excéder une durée de cinq ans. Un décret en Conseil d’État fixe le plafond et les conditions d’encadrement du prêt consenti pour garantir qu’il ne constitue pas un don déguisé.

« Le candidat bénéficiaire du prêt fournit au prêteur les informations concernant les caractéristiques du prêt s’agissant du taux d’intérêt applicable, du montant total du prêt, de sa durée, de ses modalités et de ses conditions de remboursement.

« Le candidat bénéficiaire du prêt informe le prêteur des conséquences liées à la défaillance de l’emprunteur.

« Il adresse chaque année à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques un état du remboursement du prêt. » ;

2° L’article L. 52-8 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les personnes morales, à l’exception des partis et groupements politiques ainsi que des établissements de crédit ou sociétés de financement ayant leur siège social dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ne peuvent consentir des prêts à un candidat. » ;

b) Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il ne peut recevoir des prêts d’un État étranger ou d’une personne morale de droit étranger, à l’exception des établissements de crédit ou sociétés de financement mentionnés au deuxième alinéa du présent article. » ;

bis (nouveau) À la fin du second alinéa de l’article L. 52-9, les références : « articles L. 52-8 et L. 113-1 » sont remplacées par les références : « trois premiers alinéas de l’article L. 52-8 et du III de l’article L. 113-1 » ;

3° L’article L. 52-10 est ainsi rédigé :

« Art. L. 52-10. – L’association de financement électorale ou le mandataire financier délivre au donateur un reçu pour chaque don. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’établissement, d’utilisation et de transmission du reçu à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, le candidat communique à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques la liste des donateurs, ainsi que le montant des dons. » ;

4° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 52-12, après les mots : « de ses recettes », sont insérés les mots : «, notamment d’une copie des contrats de prêts conclus en application de l’article L. 52-7-1 du présent code, » ;

5° L’article L. 113-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 113-1. – I. – Sera puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende tout candidat en cas de scrutin uninominal ou binominal, ou tout candidat tête de liste en cas de scrutin de liste, qui :

« 1° Aura, en vue de financer une campagne électorale, recueilli des fonds en violation des prescriptions de l’article L. 52-4 ;

« 2° Aura accepté des fonds en violation des articles L. 52-7-1, L. 52-8 ou L. 308-1 ;

« 3° Aura dépassé le plafond des dépenses électorales fixé en application de l’article L. 52-11 ;

« 4° N’aura pas respecté les formalités d’établissement du compte de campagne prévues aux articles L. 52-12 et L. 52-13 ;

« 5° Aura fait état, dans le compte de campagne ou dans ses annexes, d’éléments comptables sciemment minorés.

« II. – Sera puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende tout candidat en cas de scrutin uninominal ou binominal, ou tout candidat tête de liste en cas de scrutin de liste, qui :

« 1° Aura bénéficié, sur sa demande ou avec son accord exprès, d’affichages ou de publicité commerciale ne respectant pas les articles L. 51 et L. 52-1 ;

« 2° Aura bénéficié, sur sa demande ou avec son accord exprès, de la diffusion auprès du public d’un numéro d’appel téléphonique ou télématique gratuit.

« III. – Sera puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende quiconque aura, en vue d’une campagne électorale, accordé un don ou un prêt en violation des articles L. 52-7-1 et L. 52-8.

« Lorsque le donateur ou le prêteur sera une personne morale, le premier alinéa du présent III sera applicable à ses dirigeants de droit ou de fait.

« IV. – Sera puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende quiconque aura, pour le compte d’un candidat, d’un binôme de candidats ou d’un candidat tête de liste, sans agir sur sa demande, ou sans avoir recueilli son accord exprès, effectué une dépense de la nature de celles prévues à l’article L. 52-12.

« V. – Sera puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le fait, pour un candidat bénéficiaire d’un prêt conclu dans les conditions prévues à l’article L. 52-7-1, de ne pas transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques le document mentionné au dernier alinéa du même article L. 52-7-1. » ;

6° L’article L. 558-37 est ainsi modifié :

a) Après le troisième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les personnes physiques peuvent consentir des prêts pour le financement d’actions tendant à favoriser ou défavoriser le recueil des soutiens dès lors que ces prêts ne sont pas effectués à titre habituel.

« Ces prêts ne peuvent excéder une durée de cinq ans. Un décret en Conseil d’État fixe le plafond et les conditions d’encadrement du prêt consenti pour garantir qu’il ne constitue pas un don déguisé.

« Le parti ou groupement politique bénéficiaire du prêt en vue du financement d’actions tendant à favoriser ou défavoriser le recueil des soutiens fournit au prêteur les informations concernant les caractéristiques du prêt s’agissant du taux d’intérêt applicable, du montant total du prêt, de sa durée, de ses modalités et conditions de remboursement.

« Le candidat bénéficiaire du prêt informe le prêteur des conséquences liées à la défaillance de l’emprunteur. » ;

b) Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les personnes morales, à l’exception des partis et groupements politiques ainsi que des établissements de crédit ou sociétés de financement ayant leur siège social dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ne peuvent consentir des prêts en vue du financement de telles actions. » ;

c) Au dernier alinéa, la mention : « II » est remplacée par la mention : « III » ;

7° Après la référence : « L. 95 », la fin du 1° de l’article L. 558-46 est ainsi rédigée : « et des I, III et V de l’article L. 113-1 ; »

8° Après la référence : « L. 95 », la fin du 1° de l’article L. 562 est ainsi rédigée : « et des I, III et V de l’article L. 113-1 ; »

9° Au premier alinéa de l’article L. 388, la référence : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » est remplacée par la référence : « loi n° …du …pour la régulation de la vie publique » ;

10° (nouveau) Les 1° et 2° de l’article L. 392 sont abrogés ;

11° (nouveau) L’article L. 393 est ainsi rédigé :

« Art. L. 393. – En Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, les sanctions pécuniaires encourues en vertu du présent code sont prononcées en monnaie locale, compte tenu de la contre-valeur dans cette monnaie de l’euro. »

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2018.

III (nouveau). – Le troisième alinéa du a du 3° du I de l’article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« - après les mots : “rédaction résultant de la”, la fin est ainsi rédigée : “loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales, à l’exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, sont applicables à l’élection : ” ».

M. le président. L'amendement n° 123 rectifié bis, présenté par MM. Leconte, Sueur, Marie, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au début du premier alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Une personne physique peut verser un don à un candidat si elle est de nationalité française ou si elle réside en France. » ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement, qui est le parallèle, par cohérence, de celui que nous avons adopté sur le financement des partis politiques, porte sur le financement des campagnes électorales.

Par cohérence également avec les dispositions votées sur les partis politiques, j’annonce d’ores et déjà que je retirerai l’amendement n° 51 rectifié sur la publication des dons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Favorable, par cohérence

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable, par cohérence également.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. Tous ces amendements sont utiles et en phase avec notre esprit français. Toutefois, l’Européen convaincu que je suis, qui rêve de députés européens de vingt-huit nationalités et de campagnes européennes avec des financements en provenance des vingt-huit pays, s’interroge.

À l’occasion de textes comme ceux qui nous sont aujourd'hui soumis, j’aimerais que notre réflexion soit un peu plus ouverte, un peu moins franchouillarde. Alors que nous vivons dans un monde européen, nos textes sont restrictifs. Nous protégeons le droit français, c’est normal, mais n’oublions pas la nécessité d’une large ouverture sur l’Europe.

Cette remarque étant faite, je voterai cet amendement auquel la commission et le Gouvernement sont favorables.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Je partage les propos d’Yves Pozzo di Borgo, mais il ne faut voir aucun esprit franco-français dans mon amendement. Venant de ma part, c’est impossible ! J’ai bien en tête toutes les contraintes. C’est pour cela que l’amendement tend à prévoir que sont concernées toutes les personnes dont la résidence est fixée en France, soit toutes les personnes qui peuvent s’y présenter.

Lors de la discussion générale, j’ai indiqué qu’il me semblait important, en particulier au moment des élections européennes, de réfléchir à la manière de rendre les législations nationales sur le financement de la vie politique cohérentes entre elles et avec le fonctionnement des partis politiques européens.

Je vous rejoins, monsieur Pozzo di Borgo, et je peux vous assurer que ma proposition ne vise pas à la « bunkerisation » de nos frontières, bien au contraire. C’est pour éviter un certain nombre de dérives que nous essayons d’encadrer les choses.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 122, présenté par MM. Sueur, Leconte, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les personnes morales, à l’exception des établissements de crédit ou sociétés de financement ayant leur siège social dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d’un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Notre législation, depuis la loi du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique, proscrit tout lien financier entre personnes morales et partis politiques.

Par analogie, le présent projet de loi interdit également les prêts des personnes physiques à destination d’une campagne électorale.

Il prévoit cependant des exceptions à cette interdiction. Ainsi, les établissements de crédit et les partis politiques pourraient consentir des prêts à un candidat.

Notre amendement a pour objet d’étendre l’interdiction faite aux personnes morales de financer les campagnes électorales aux partis politiques eux-mêmes.

Cette mesure tend à éviter le détournement de la loi en matière de financement en interdisant aux partis politiques de consentir aux candidats des prêts et des prestations de services à des conditions inférieures au marché.

Nous souhaitons ainsi inciter les partis, qui ne pourraient désormais plus consentir de prêts aux candidats, à créer une structure indépendante qui pourrait, elle, contrairement aux partis en vertu de l’article 4 de la Constitution, être contrôlée.

Cet amendement est donc non pas un non ferme et définitif aux prêts des partis politiques aux candidats, mais une incitation à bâtir un dispositif apportant toutes les garanties de contrôle.

M. le président. L'amendement n° 101, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Remplacer les mots :

dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen

par les mots :

sur le territoire de la république française

II. – Alinéa 12

Après les mots :

droit étranger

supprimer la fin de cet alinéa.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 81, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Aucun candidat ne peut recevoir de financement d’un parti ou groupement politique, pour lesquels un manquement comptable a été constaté conformément aux dispositions de l’article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique.

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. La jurisprudence du Conseil d’État a établi un lien entre le respect des obligations comptables et le financement des campagnes électorales en privant le parti défaillant de cette possibilité.

En effet, en perdant le bénéfice de certaines dispositions de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, un parti ou groupement politique redevient une personne morale non autorisée à participer au financement d’une campagne électorale.

Il est donc proposé de codifier cette interdiction de financement, qui sera sanctionnée par l’article L. 113-1, dont cet article 9 propose une nouvelle rédaction.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois. L’amendement n° 122 de M. Sueur vise à interdire à un parti ou à un groupement politique de financer la campagne d’un candidat sous forme de don ou de prêt.

Si l’encadrement de l’activité de prêt peut être discuté, l’interdiction pour un parti politique de soutenir financièrement un candidat se heurterait, mes chers collègues, à l’article 4 de la Constitution, qui prévoit que « les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage ». Or le financement d’une campagne électorale résulte de cette mission constitutionnelle.

Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 101 de Mme Assassi vise à restreindre l’exception formulée dans l’article 9 aux seuls organismes ayant leur siège social en France.

S’il était adopté, cet amendement risquerait de heurter les engagements internationaux et européens de la France, notamment ceux qui assurent une liberté de prestation de services au sein de l’Union européenne.

Pour cette raison, la commission y est défavorable.

L’amendement n° 81 de M. Grand est le pendant de son amendement n° 80, car il tend à interdire à un candidat de recevoir un financement d’un parti politique lorsque ce dernier a été sanctionné pour un manquement à ses obligations comptables.

Mon cher collègue, vous avez retiré l’amendement n° 80 ; pour les mêmes motifs, la commission sollicite le retrait de l’amendement n°81.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements présentés par M. Sueur et Mme Assassi.

Nous considérons en effet que, s’ils étaient adoptés, ces amendements visant à priver les partis politiques de la possibilité de consentir des prêts aux candidats aux élections risqueraient de réduire assez drastiquement les possibilités d’accès au financement dont ces derniers disposent. Or tel n’est pas l’objet du présent projet de loi.

Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur l’amendement n° 81.

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° 122 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Non, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 122 est retiré.

Madame Assassi, l'amendement n° 101 est-il maintenu ?

M. le président. L'amendement n° 101 est retiré.

Monsieur Grand, l'amendement n° 81 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Grand. Je le retire également.

M. le président. L'amendement n° 81 est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 51 rectifié, présenté par MM. Leconte et Courteau, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La liste des donateurs et le montant des dons de plus de 500 euros consentis à un candidat en vue de sa campagne électorale sont rendus publics par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans les conditions fixées par le même décret en Conseil d'État.

Monsieur Leconte, souhaitez-vous toujours retirer cet amendement ?

M. Jean-Yves Leconte. Oui, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 51 rectifié est retiré.

L'amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Marie, Sueur et Leconte, Mmes Lienemann et Yonnet, MM. Vandierendonck, Durain, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette dernière publie, pour chaque parti, le nom des personnes physiques dont le montant total des dons excède annuellement 2 000 euros.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Je retire également cet amendement, monsieur le président, car il est difficile d’établir des règles complètement différentes pour le financement des campagnes électorales et celui des partis politiques.

M. le président. L'amendement n° 121 rectifié est retiré.

L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Lienemann, n'est pas soutenu.

L'amendement n° 100, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La liste des donateurs pour les dons ou les prêts supérieurs à 2 500 euros est rendue publique par la Commission nationale des campagnes et des financements politiques.

Vous aviez annoncé le retrait de cet amendement, madame Assassi. Est-il effectivement retiré ?

Mme Éliane Assassi. Il l’est, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 100 est retiré.

L'amendement n° 15, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 15

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

… °À la première phrase du premier alinéa de l’article L.52-11-1, le taux : « 47,5 % » est remplacé par le taux : « 45 % » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. La confiance dans l’action publique repose également sur la bonne utilisation de l’argent public, notamment dans le cadre des élections.

Il convient de rappeler que l’État participe au financement des campagnes électorales à la fois par le remboursement d’une partie des dépenses de campagne – c’est l’apport personnel du candidat – et par la délivrance d’un avantage fiscal aux donateurs, à hauteur de 66 % du montant du don déductible des impôts, ce qui n’est pas rien.

L’article 112 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 a réduit de 5 % les taux de remboursement du plafond des dépenses de campagne. Il est ainsi passé de 50 % à 47,5 %.

Cinq ans après cette première baisse, et afin d’inciter les candidats à modérer leurs dépenses électorales, il est proposé de diminuer à nouveau ce taux de remboursement et de le fixer à 45 %. Ce serait vertueux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, car, de fait, le taux de remboursement a déjà été abaissé de 50 % à 47,5 % en 2012, comme l’a d’ailleurs rappelé l’auteur de l’amendement.

Chaque fois que l’on abaisse la part des dépenses susceptibles d’être prises en charge par l’État, on rend en réalité le candidat plus dépendant du financement de son parti, si lui-même n’a pas de fortune personnelle, n’est pas en situation de s’endetter ou craint de ne pas être élu.

Du coup, cette mesure a pour effet de faciliter le financement des campagnes des candidats qui relèvent d’un grand parti politique venant de gagner des élections nationales et dont les caisses sont renflouées du fait de cette victoire, et de rendre plus vulnérables les candidats qui se réclament d’autres partis politiques.

Finalement, en ne cherchant à atteindre l’objectif louable de limiter le montant global des dépenses qu’à travers le taux de remboursement des dépenses exposées par les candidats, ne risque-t-on pas d’affaiblir le pluralisme sans pour autant limiter réellement les dépenses de ceux qui ont d’autres moyens de les financer ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur Grand, je sais combien vous souhaitez la diminution des plafonds de remboursement des frais de campagne par l’État.

Pour autant, l’objet de ce texte n’est pas de diminuer les dépenses de campagne, et il n’est pas non plus d’assécher les sources de financement des candidats aux élections. L’objet est de mieux encadrer le financement des campagnes électorales et d’en assurer la transparence.

C’est parce que tel est notre objectif que le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire qui vous sont soumis visent notamment à faciliter l’accès au crédit des candidats aux élections et des partis et groupements politiques. La perspective d’un remboursement d’une partie des dépenses électorales est de nature à favoriser l’octroi d’un crédit.

Par ailleurs, le plafond des dépenses de campagne n’est plus réactualisé à la hausse depuis un décret de 2009 portant majoration du plafond des dépenses électorales pour tenir compte de l’inflation. Ajouter à ce gel une diminution du plafond des dépenses et des remboursements porterait selon nous une atteinte démesurée au financement de la vie démocratique dans notre pays.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Grand. Avant de retirer mon amendement, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, je voudrais dire que je n’ai pas observé un débordement des dépenses de campagne lors des dernières élections législatives : une affiche avec la photo du Président Macron et le nom du candidat, et ça a fait 60 % des suffrages !

M. Bruno Retailleau. Très bon rendement !

M. Jean-Pierre Grand. Aucun programme n’a été distribué. (Valait mieux ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Dans mon département de l’Hérault,…

M. Philippe Bas, rapporteur. Très beau département !

M. Jean-Pierre Grand. … pour le second tour des élections législatives, dans la circonscription où je vote nous n’avons d’ailleurs reçu aucune – je dis bien aucune ! – propagande électorale distribuée par les services de l’État. Et, pour le premier tour, nous avions reçu des enveloppes dont certaines contenaient trois professions de foi et un bulletin de vote, d’autres quatre professions de foi et deux bulletins…

Il y a là un véritable problème, madame la garde des sceaux, et je profite de l’occasion pour vous saisir de ce sujet. Cette situation mériterait tout de même une enquête de l’État sur le fonctionnement de la distribution de la propagande officielle !

Je profite encore de l’occasion pour ajouter que ce dysfonctionnement ne justifie pas pour autant une dématérialisation, pour des raisons d’égalité entre les territoires. La dématérialisation est peut-être une bonne chose dans les grandes villes, mais, dans les zones sans couverture, la démocratie en souffrirait !

Cela étant dit, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 15 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je remercie M. Grand d’avoir retiré son amendement et, surtout, je m’associe à son propos, madame la garde des sceaux, même si le problème qu’il a soulevé est du ressort du ministère de l’intérieur.

Dans de nombreux départements, par exemple dans la Manche, les professions de foi ne sont pas arrivées à temps chez bon nombre d’électeurs, l’organisation de l’État n’ayant pas été aussi efficace que dans le passé. C’est très grave, car beaucoup de nos concitoyens lisent soigneusement toutes les professions de foi et préparent leur bulletin de vote à la maison avant d’aller voter. Ils se sont trouvés dans une situation réellement très difficile du fait de l’inefficacité des services de l’État dans l’acheminement de la propagande électorale officielle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. L'amendement n° 288, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les II et III sont applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement vise à appliquer outre-mer les mesures que nous prenons.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 288.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Article 9
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article additionnel après l'article 9 bis

Article 9 bis (nouveau)

Le chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :

1° Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 52-6 sont supprimés ;

2° Après le même article L. 52-6, il est inséré un article L. 52-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 52-6-1. – Tout mandataire déclaré conformément aux articles L. 52-5 et L. 52-6 a droit à l’ouverture d’un compte bancaire ou postal, ainsi qu’à la mise à disposition des moyens de paiement nécessaires à son fonctionnement, dans l’établissement de crédit de son choix. L’ouverture de ce compte intervient sur présentation d’une attestation sur l’honneur du mandataire qu’il ne dispose pas déjà d’un compte en tant que mandataire du candidat.

« L’établissement de crédit qui a refusé l’ouverture d’un compte remet systématiquement, gratuitement et sans délai, au demandeur une attestation de refus d’ouverture de compte et l’informe qu’il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte. À défaut de réponse de l’établissement de crédit dans un délai de quinze jours à compter de la demande d’ouverture de ce compte, la demande est réputée refusée.

» En cas de refus de la part de l’établissement choisi, le mandataire peut saisir la Banque de France afin qu’elle lui désigne un établissement de crédit situé dans la circonscription dans laquelle se déroule l’élection ou à proximité d’un autre lieu de son choix, dans un délai d’un jour ouvré à compter de la réception de la demande du mandataire et des pièces requises.

» Toute décision de clôture de compte à l’initiative de l’établissement de crédit désigné par la Banque de France doit faire l’objet d’une notification écrite et motivée adressée au mandataire et à la Banque de France pour information. Un délai minimal de deux mois doit être obligatoirement consenti au mandataire. En cas de clôture, le mandataire peut à nouveau exercer son droit au compte dans les conditions prévues au présent article. Dans ce cas, l’existence de comptes successifs ne constitue pas une violation de l’obligation de disposer d’un compte bancaire ou postal unique prévue au deuxième alinéa des articles L. 52-5 et L. 52-6.

« Le contrôle du respect de ce droit est assuré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l’article L. 612-31 du code monétaire et financier.

» Un décret précise les prestations de base liées à l’ouverture d’un compte par l’établissement de crédit choisi par le mandataire ou désigné par la Banque de France ainsi que les modalités d’application du présent article. »

M. le président. L'amendement n° 10 rectifié quinquies, présenté par MM. Dominati et Danesi, Mme Procaccia, MM. Pointereau et B. Fournier, Mme Duchêne, MM. Pierre, de Raincourt, Joyandet, Laménie et Gremillet et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ouverture du compte ne peut lui être refusé lorsque le candidat à l’élection détient dans l’établissement de crédit choisi par le mandataire un compte bancaire individuel. » ;

…° Le quatrième alinéa est supprimé ;

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Cet amendement vise à faciliter le parcours du combattant d’un candidat à une élection législative ou sénatoriale, parcours dont j’ai déjà évoqué les contraintes et les difficultés.

Lorsque vous êtes candidat, vous devez déclarer à la préfecture un mandataire financier, lequel entre ensuite en contact avec votre banque. Une dizaine ou une quinzaine de jours plus tard, vous vous heurtez à un refus de la banque, bien que vous y soyez client depuis des années, parce que, dès que vous faites de la politique, vous êtes une personnalité politiquement exposée, et vous n’avez plus le bon profil.

Vous faites alors valoir le droit au compte. Si vous résidez à Paris, vous vous rendez à la Banque de France, place de la Bastille. Ailleurs, c’est plus difficile, et vous perdez encore trois ou quatre jours.

La Banque de France va finalement obliger votre banque initiale à vous ouvrir un compte. Vous pourrez alors enfin commencer votre campagne électorale, mais vous aurez perdu trois semaines.

Au bout de ces trois semaines, lorsque vous aurez enfin un compte, on vous expliquera que vous n’avez pas le droit d’avoir un chéquier. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques souhaite pourtant des justificatifs, notamment des chèques.

Je propose donc une disposition simple : lorsque vous êtes client dans une agence bancaire depuis un certain temps et que vous décidez de vous engager en politique, votre banque n’a pas le droit de refuser votre mandataire financier.

Environ 10 000 candidats se sont présentés aux élections législatives… Le parcours du combattant que je viens de décrire n’est pas celui d’un membre d’un parti marginal, ni celui d’un candidat qui se présente pour la première fois devant les électeurs, ni celui d’un candidat qui atteindra à peine 5 % de suffrages ; c’est celui d’un parlementaire en exercice, ayant accompli deux mandats. J’en parle en connaissance de cause, puisque c’est moi qui l’ai subi !

Je trouve tout cela ridicule, mes chers collègues ! On ne peut pas appeler les Français à redonner leur confiance au monde politique, les inciter à se présenter aux élections et créer autant d’obstacles, par exemple en imposant de passer par la Banque de France pour pouvoir se porter candidat.

C’est donc dans un esprit de simplification que je présente cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je suis très sensible aux arguments exposés par M. Dominati, notamment au sort réservé aux personnes dites politiquement exposées et à leurs familles, au titre de directives européennes s’appliquant aux unes comme aux autres.

Ces directives, auxquelles les banques hébergeant nos comptes et ceux de nos parents sont soumises, imposent à nos propres familles des contraintes dont nous n’avons pas toujours conscience.

Cette surveillance est tellement tentaculaire qu’elle s’exerce aussi sur les candidats malheureux à des élections nationales. Ainsi, si vous avez été candidat aux élections législatives en 2012, vous entrez une bonne fois pour toutes, pour les établissements bancaires, dans la catégorie des personnes politiquement exposées.

Nous avons pensé, à la commission des lois, que le risque était grand de voir les organismes bancaires mettre en cause l’existence même du compte d’une personnalité politiquement exposée, du fait des contraintes de gestion supplémentaires imposées par les directives.

Il nous semble, par conséquent, que nous ne pouvons pas nous appuyer sur l’existence du compte personnel du candidat pour imposer à la banque de lui ouvrir un compte en tant que candidat.

À cette solution, nous avons préféré une formule qui nous paraît opérationnelle ; elle consiste à enclencher la procédure de désignation obligatoire par la Banque de France d’une institution financière pour gérer le compte de campagne en l’absence de réponse de la banque dans un délai de quinze jours après l’envoi d’une demande d’ouverture de compte par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le problème que de nombreux candidats rencontrent actuellement est que la banque s’abstient de toute réponse à réception de la demande d’ouverture du compte. Dès lors, les dispositions qui permettent déjà de contraindre la banque à ouvrir le compte de campagne ne trouvent pas à s’appliquer, car la Banque de France ne peut pas être saisie.

Nous avons donc tenté de rendre le système actuel efficace, voie que nous préférons emprunter plutôt que de nous engager dans une procédure risquant d’inciter des institutions bancaires à fermer purement et simplement le compte de candidat, pas simplement celui du mandataire.

Je ne pense pas, mes chers collègues, qu’on osera fermer votre ou vos comptes de parlementaire – ce serait tout de même d’une très grande brutalité –, mais on peut plus insidieusement fermer le compte de candidats malheureux à des élections législatives antérieures. Même si ceux-ci n’exercent strictement aucun mandat politique, ils figurent déjà dans la catégorie des personnes dites politiquement exposées au titre des règles européennes.

Au bénéfice de ces explications, monsieur Dominati, et eu égard à ce risque, que je surévalue peut-être, mais qui me paraît réel, je préférerais que vous acceptiez de retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. À défaut d’un retrait, il sera défavorable.

Pour le Gouvernement, l’adoption de cet amendement risque d’être contre-productive et de rendre difficile l’ouverture d’un compte personnel pour les mandataires. Nous jugeons préférable de nous en tenir aux modalités de droit au compte prévues par le code électoral, que nous souhaitons, à l’instar de M. le rapporteur, voir renforcées.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. J’ai bien écouté les propos de notre président-rapporteur. Je les trouve tout à fait pertinents s’agissant de la promiscuité des comptes et des risques susceptibles de peser sur les comptes personnels d’un candidat qui insisterait pour ouvrir un compte de campagne.

Il m’est arrivé exactement la même mésaventure qu’à Philippe Dominati, dans une banque dont je suis cliente depuis plus de vingt ans et alors que, moi aussi, j’en suis à mon deuxième mandat. La direction avait diffusé des instructions générales considérant malvenu d’ouvrir des comptes de campagne pour des candidats qui, comme dans l’exemple précédent, ne se présentaient pas pour la première fois et exerçaient déjà un mandat électif. Il a donc fallu chercher une autre banque.

Cela crée tout de même une difficulté, notamment au regard de la confiance que porte votre propre établissement bancaire sur votre activité de parlementaire, qui vous nourrit et qui le nourrit par la même occasion ! Nous y reviendrons ultérieurement, puisque la suppression de l’IRFM entraînera, de fait, la suppression d’un de nos comptes en banque.

Il y a donc un problème, et ce d’autant que, en cas de difficultés ou de crise économique grave, les banques savent parfaitement retrouver les politiques pour leur demander de les renflouer !

C’est pourquoi l’amendement de Philippe Dominati me paraît parfaitement justifié. Il faudrait à tout le moins un code de bonne conduite des banques, y compris dans le cas des personnes politiquement exposées. Certaines situations exigeraient tout de même que les établissements dans lesquels nous sommes par ailleurs des clients classiques examinent certaines demandes d’un peu plus près, et sans défiance.

Le problème se pose. J’y ai été confrontée dans les mêmes conditions que Philippe Dominati, dont je voterai l’amendement, si ce dernier est maintenu.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Sur le plan pratique et dans l’immédiat, la solution de notre rapporteur serait tout de même plus efficace. Mais cette discussion montre bien dans quelle situation nous nous trouvons : ce sont les banques qui décident, ou pas, de permettre une campagne électorale !

M. Philippe Bas, rapporteur. La finance, c’est l’ennemi ! (Sourires.)

M. Pierre-Yves Collombat. Tout à fait !

De plus, nos comptes ne les intéressent absolument pas. Plus de 80 % de leurs activités, il faut le savoir, ont un caractère purement spéculatif.

Quand les banques nous expliquent financer l’économie, ce n’est pas vrai ! Dans un bilan bancaire, 10 % à 14 % seulement sont consacrés à des prêts à l’économie ; tout le reste, c’est de la spéculation !

Nous n’allons pas en discuter maintenant, mais l’idée qui était portée dans l’article 12 du projet de loi – la création d’une banque dédiée au financement de l’activité politique – me paraîtrait très bonne. Il faudrait que cette banque soit adossée à un établissement du type de la Caisse des dépôts et consignations pour pouvoir assurer une véritable fonction de financeur, sans dépendre du bon vouloir de ces messieurs les banquiers, qui, effectivement, savent nous trouver lorsqu’ils sont sur le trottoir. Voilà ce qu’il faudrait faire !

Si le Gouvernement essaie de trouver une solution au problème posé à travers cet article 12 qu’il va nous proposer de rétablir, c’est la direction dans laquelle il faudra chercher.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. C’est tout de même fort de café – pardonnez-moi cette expression un peu vulgaire – que les banques que nous renflouons par nos votes puissent vivre et que nous rencontrions autant de difficultés pour ouvrir un simple compte.

J’ai écouté avec attention, et M. Dominati, et M. le président-rapporteur. J’ai plutôt tendance à soutenir la position de ce dernier, mais il y a un problème de délai : au délai de quinze jours, il faut ajouter celui de la procédure de la Banque de France, et on en arrive à un mois.

Je pense aux nouveaux candidats qui se sont présentés aux dernières élections législatives, notamment à ceux d'En Marche qui ont été investis au dernier moment et ont dû ouvrir des comptes. Peut-être avaient-ils des facilités, mais, de fait, les difficultés qu’un jeune candidat peut rencontrer à cet égard sont énormes.

La procédure proposée par M. le rapporteur me semble intelligente, mais trop longue. A contrario, la solution de Philippe Dominati, qui oblige la banque à ouvrir le compte, est simple.

Au-delà, il est inadmissible que nous, parlementaires, ou que toute personne qui s’engage en politique puissions être traités de cette manière. Nous devons faire preuve d’autorité ! Nous sommes la loi, le pouvoir ! On nous traite comme des moins que rien, et nous devrions nous écraser ?… Non !

Pour cette question de délai, et non à cause des explications que vous avez fournies, monsieur le rapporteur, l’amendement de M. Dominati m’apparaît plus intelligent et plus efficace.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. C’est toujours bien de taper sur les banques, mes chers collègues, mais je voudrais signaler que nous ne sommes pas les seules victimes de ces exigences découlant, en définitive, d’exigences de conformité que nous avons parfois votées et que d’autres instances – l’Union européenne, en particulier, avec ses directives – imposent aussi.

En tant que représentant des Français de l’étranger, je suis destinataire d’un nombre considérable de lettres émanant de compatriotes se voyant fermer leur compte en France au motif qu’ils habitent dans un pays n’ayant pas signé tous les accords d’échange d’information automatique ou qu’il est difficile de les suivre…

Il s’agit d’une préoccupation générale à laquelle nous devons répondre, car trop de régulation tue la régulation !

Du fait de certaines exigences de conformité, les banques elles-mêmes rencontrent des difficultés. Il faut le savoir et ne pas considérer qu’elles s’en prennent à nous tout particulièrement parce qu’elles ne nous aiment pas.

Je voudrais saluer les efforts du président de la commission des lois pour améliorer, face aux difficultés spécifiques rencontrées par les candidats, les dispositions actuelles du code monétaire et financier, notamment celles qui établissent le droit au compte, pour les rendre plus opérationnelles.

Ainsi, si la banque sollicitée pour l’ouverture du compte ne répond pas, il y aura bien une interpellation auprès de la Banque de France pour faire valoir ce droit, même si, effectivement, cela suppose un certain délai.

La question mérite réflexion et il faudra même, madame la ministre, pousser la réflexion plus loin sur le droit au compte, pour les citoyens comme pour les candidats. En effet, les exigences de conformité sont telles qu’un nombre croissant de citoyens, en particulier ceux que je représente, les Français vivant hors de France, sont privés de ces droits.

Le sujet dépasse donc de loin ce que nous évoquons aujourd'hui. Mais l’avancée proposée par notre président de la commission des lois, rapporteur sur ce texte, va dans la bonne direction et tend à répondre, de la manière la plus pragmatique, à la difficulté rencontrée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Grand. C’est la vraie vie politique que nous évoquons ici, madame la ministre !

Je formulerai trois remarques.

Premièrement, il est problématique qu’un candidat puisse rencontrer de telles difficultés, car je me permets de rappeler ce que prévoient les textes : le mandataire financier peut être désigné jusqu’au jour du dépôt. Les délais sont donc très courts. Or, si au jour de la déclaration en préfecture, le mandataire n’a pas de compte en banque, le candidat se trouve en difficulté.

M. Jean-Pierre Grand. Deuxièmement, il n’a échappé à personne que les candidats sont de plus en plus jeunes. Or les jeunes n’ont pas toujours les meilleures relations avec les banquiers. S’ils ont ne serait-ce qu’un petit découvert à la banque, il y a peu de chance qu’ils puissent obtenir un compte pour mener une campagne électorale. En fait, ils ne l’obtiendront jamais !

À nouveau, je parle de la vraie vie : ce sont des enseignements que l’on tire du terrain !

Troisièmement – j’anticipe ici l’examen de l’article 10, mais je ne reprendrai pas la parole lorsque nous parviendrons à cet article –, je voudrais aussi signaler un problème majeur : ceux qui ont les moyens de louer une permanence et, donc, ont signé un bail ne trouvent pas d’assureur.

Tous ces tracas influent directement sur fonctionnement de la démocratie. À cet égard, mes chers collègues, permettez-moi d’avoir une pensée toute particulière pour ces jeunes candidates et candidats qui peinent à pousser la porte de la banque, parfois parce qu’ils ont un léger découvert et savent qu’ils n’obtiendront jamais l’ouverture du compte.

Ces trois sujets sont préoccupants.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je vous prie de m’excuser, mes chers collègues, si je n’ai pas été suffisamment clair. Mon souci, il est pour vous.

Imaginez que vous soyez en mauvais termes avec votre banque et que vous vouliez en changer. Si nous votons l’amendement de notre collègue Philippe Dominati, le nouveau banquier, qui vous verra arriver de loin, risque de se faire la réflexion suivante : en vous acceptant comme nouveau client, il sera obligé de vous ouvrir un compte de campagne ; or il ne souhaite pas le faire, ayant reçu de sa direction générale des instructions pour ne pas s’exposer dans la vie publique, dans le cadre d’une interprétation élargie de la directive sur les personnes politiquement exposées, dont le champ d’application est déjà très large.

Nous disposons d’un système qui, une fois modifié, a toutes les chances d’être réellement efficace.

Ne nous faisons pas une montagne du délai de quinze jours ! Actuellement, le problème réside surtout dans le fait que de nombreux candidats ne parviennent pas à ouvrir leur compte de campagne et, pour cette raison, sont éliminés de la course.

Honnêtement, je pense que ceux d’entre vous qui sont candidats aux élections sénatoriales ont pris toutes leurs dispositions bien à temps et, justement parce que vous avez veillé à ouvrir votre compte bien en amont de la période électorale, si vous aviez rencontré une difficulté en la matière, vous auriez eu largement le temps de vous retourner. Tout le monde ne s’y prend pas à la dernière minute pour accomplir ces formalités !

Je n’ai pas d’intérêt à défendre ma position, mais, en toute sincérité, la mesure proposée par M. Dominati fera courir un risque d’éviction bancaire à de nombreuses personnes politiquement exposées, et je ne voudrais pas que ce risque se réalise.

Comme je propose un système alternatif qui me paraît pouvoir fonctionner, je préférerais que nous lui laissions sa chance.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Le dispositif que M. le rapporteur propose ne fonctionnerait pas en cas de dissolution de l’Assemblée nationale. Le mien présente l’avantage de prévoir des délais extrêmement courts.

En outre, M. Collombat l’a parfaitement souligné, le secteur bancaire n’est pas intéressé par l’ouverture de comptes dont la durée de vie n’excède pas six mois et sur lesquels il n’y a pas vraiment de mouvements. Il voudrait donc se défausser de cette responsabilité, y compris vis-à-vis de ses plus fidèles clients.

Par ailleurs, pourquoi encombrer les services de la Banque de France et créer un va-et-vient obligatoire, puisque ceux-ci vous renverront à la banque qui vous a refusé l’ouverture de compte quinze jours auparavant ? C’est la raison pour laquelle je propose un raccourci.

Je pense à tous ces candidats qui se sont présentés aux élections législatives sans être soutenus par des formations politiques, avec parfois, comme M. Grand l’a souligné, l’espoir et les convictions de la jeunesse. Le mécanisme actuel, dans lequel il faut attendre quinze jours pour, peut-être, obtenir en bout de course un refus ou une obligation, ne peut que briser leur élan et, j’y insiste, il ne fonctionnera pas en cas de dissolution.

Il est anormal que vous ayez la confiance de votre banque quand vous êtes client et militant, et que toutes les portes se ferment une fois que vous vous portez candidat à une élection. Non ! Certaines banques se disent proches de leur territoire et des collectivités : qu’elles le démontrent !

C’est pourquoi je souhaite maintenir cet amendement qui nourrit la réflexion.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo–Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Je voudrais donner acte à notre rapporteur du travail qu’il a fourni pour tenter d’encadrer le dispositif actuel en termes de délai.

Je l’inviterai peut-être à envisager une réduction du délai de quinze jours – quinze jours, dans une campagne, c’est très long ! Le ramener à sept jours serait déjà appréciable.

Par ailleurs, nous aurons sans doute l’occasion de nous pencher ultérieurement sur la question de la banque dite de la démocratie. Il faudra alors s’interroger pour savoir si celle-ci ne peut pas suppléer aux banques.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié quinquies.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 265, présenté par M. Dominati, est ainsi libellé :

Alinéas 4 à 9

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Art. 52-6-1. – Tout mandataire déclaré conformément aux articles L. 52-5 et L. 52-6 a droit à l’ouverture d’un compte de dépôt dans l’établissement de crédit de son choix.

« Si l’établissement refuse l’ouverture du compte de dépôt, il remet systématiquement, gratuitement et sans délais au demandeur une attestation de refus d’ouverture de compte et l’informe qu’il peut demander à la Banque de France de lui désigner, pour lui ouvrir un compte, un établissement de crédit situé dans la circonscription dans laquelle se déroule l’élection ou à proximité d’un autre lieu de son choix, dans un délai d’un jour ouvré à compter de la réception de la demande du mandataire et des pièces requises.

« À la demande du mandataire et en son nom et pour son compte, le médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques, peut transmettre à la Banque de France en son nom et pour son compte, la demande de désignation ainsi que les pièces requises.

« Les établissements de crédit ainsi désignés par la Banque de France sont tenus d’offrir au titulaire du compte des services bancaires de base mentionnés au III de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

« Toute décision de résiliation à l’initiative de l’établissement de crédit fait l’objet d’une notification écrite motivée et adressée gratuitement au client. La décision ne fait pas l’objet d’une motivation lorsque la notification est de nature à contrevenir aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l’ordre public. La décision de résiliation à l’initiative de l’établissement est adressée, pour information, à la Banque de France.

« Un délai minimum de deux mois de prévis est octroyé au titulaire du compte sauf lorsque le client a délibérément utilisé son compte de dépôt pour des opérations que l’établissement de crédit a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ou que le client a fourni des informations inexactes.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 218, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4, première phrase

Supprimer les mots :

, ainsi qu’à la mise à disposition des moyens de paiement nécessaires à son fonctionnement,

II. – Alinéa 5, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

III. – Alinéa 7

1° Première phrase

Après le mot :

adressée

insérer le mot :

gratuitement

2° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

La décision ne fait pas l’objet d’une motivation lorsque la notification est de nature à contrevenir aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l’ordre public.

3° Deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

sauf lorsque celui-ci a délibérément utilisé son compte pour des opérations que l’établissement de crédit a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ou que le client a fourni des informations inexactes

IV. – Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

L’établissement de crédit choisi par le mandataire ou désigné par la Banque de France est tenu d’offrir gratuitement au titulaire du compte des services bancaires de base mentionnés au III de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je rejoins les propos de M. le rapporteur, qui, à plusieurs reprises dans ce débat, a insisté sur la nécessité d’améliorer les conditions d’accès des mandataires des candidats et partis à un compte bancaire et aux prestations bancaires de base.

Le Gouvernement propose donc deux modifications au texte adopté par la commission.

D’une part, pour les prestations de base que l’établissement de crédit est tenu de proposer, le renvoi à un décret ne paraît pas utile dès lors que le code monétaire et financier définit déjà ce que sont ces prestations de base. Le renvoi au droit commun est suffisant.

Les partis et candidats auront notamment droit, sans limitation et gratuitement, aux prestations de dépôt d’espèces et d’encaissement de chèques, prestations particulièrement importantes, en particulier pour les dons.

D’autre part, et cela apparaît tout à fait essentiel, il est nécessaire d’harmoniser les conditions de clôture des comptes à l’initiative de l’établissement, en les mettant en conformité avec les dispositions du code monétaire et financier issues du droit européen.

Tel est le sens de l’amendement déposé par le Gouvernement.

J’indique d’ores et déjà que l’avis sera favorable sur le sous-amendement n° 292.

M. le président. Le sous-amendement n° 292, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Amendement n° 218, alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 292 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 265.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je me réjouis des propos de Mme la ministre. Ils préfigurent à nouveau notre bonne entente, que le Sénat, je l’espère, conservera.

L’amendement du Gouvernement tend à améliorer le texte que j’avais moi-même proposé, mais il m’était impossible de l’approuver en l’état dès lors que son adoption aurait entraîné la suppression de la disposition visant à faire naître une décision implicite de refus d’ouverture du compte au bout de quinze jours.

Le présent sous-amendement a précisément pour objet de rétablir ce délai. Sans ce délai, j’aurais même préféré l’adoption de l’amendement de notre collègue Philippe Dominati à celle de l’amendement du Gouvernement !

Je suis donc favorable à l’amendement n° 218 du Gouvernement, s’il est modifié par mon sous-amendement.

Par voie de conséquence, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 265.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il est défavorable sur l’amendement n° 265 et, comme je l’indiquais précédemment, favorable sur le sous-amendement n° 292.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 265.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 292.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 218, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié.

(L'article 9 bis est adopté.)

Article 9 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 9 ter (nouveau)

Article additionnel après l'article 9 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 153, présenté par MM. Delahaye et Bonnecarrère, Mme Férat, MM. Luche, Longeot et Gabouty, Mme Billon et M. Détraigne, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après les mots : « à l’exception », la fin de la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 52-4 est ainsi rédigée : « d’une part des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique et, d’autre part, des dépenses payées directement par le candidat dans la limite de trois pour cent du plafond de dépenses électoral prévu à l’article L. 52-11 » ;

2° Après l’article L. 52-4, il est inséré un article L. 52-4-… ainsi rédigé :

« Art. L. 52-4- – Les dépenses payées directement par le candidat au-delà du seuil prévu au troisième alinéa de l’article L. 52-4 ne peuvent donner lieu au remboursement forfaitaire de la part de l’État et ne peuvent servir de fondement à une peine d'inéligibilité. »

La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Cet amendement a pour objet d’introduire un peu de souplesse dans les règles de financement des campagnes électorales.

Afin que les comptes de campagne soient tenus de façon rigoureuse, légitime et juste, le législateur exige depuis quelques années une stricte séparation entre l'ordonnateur – le candidat – et le payeur – le mandataire de la campagne.

Or, à l'usage, il apparaît qu'un assouplissement, d’ailleurs limité, serait utile.

Des élus ont en effet été déclarés inéligibles pour avoir directement payé certaines dépenses, dont le montant ne dépassait pas quelques centaines d’euros, voire – mais je ne sais pas si c’est vrai – moins. La sanction apparaît évidemment totalement disproportionnée : ces agissements relevaient d’une nécessité, et non d’une volonté de frauder ou contourner la loi.

Cet amendement tend donc à introduire un peu de souplesse en permettant qu’une somme équivalant à 3 % du plafond de campagne de chaque candidat puisse être payée par lui-même, puis remboursée sur le compte de campagne sur présentation des justificatifs adéquats. Cette somme serait évidemment intégrée dans le compte de campagne.

M. le président. L'amendement n° 144, présenté par M. Delahaye, n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 153 ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons débattu de la question et la décision est très difficile à prendre.

Actuellement, les juridictions qui garantissent la bonne tenue des élections et le respect des comptes de campagne appliquent une tolérance. Celle-ci est fixée, non pas en pourcentage du plafond de dépenses, mais en fonction du montant des dépenses effectivement réalisées par le candidat.

En cas de dépenses limitées, la juridiction admettra une plus grande souplesse dans la prise en charge de menues dépenses. A contrario, si le montant des dépenses est élevé et que l’on peut soupçonner que la non-déclaration dans le compte de campagne des menues dépenses a pour objet de ne pas dépasser le plafond, elle sera plus sévère.

En fixant un seuil de 3 % du plafond de campagne, on risque de se trouver dans des situations où le couperet va tomber dès ce seuil dépassé, alors que ce n’est pas le cas aujourd'hui.

La commission m’a donc mandaté pour émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Je veux bien revoir ma position et m’en remettre à la sagesse du Sénat – j’en discute avec vous de bonne foi, mes chers collègues –, mais je ne suis pas certain que nos candidats, eux-mêmes de bonne foi, fassent nécessairement une bonne affaire si nous adoptons cette disposition.

Je livre ces observations à votre réflexion, monsieur Détraigne.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je connais bien ce sujet pour avoir siégé au Conseil constitutionnel. Dans le cadre de cette institution, nous avons effectivement dû apprécier des situations humaines extrêmement difficiles, avec des candidats qui, pour une non-conformité liée à l’achat de timbres, si je me souviens bien, ont été déclarés inéligibles.

M. Jean-Claude Lenoir. François Aubey !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je ne souhaite nommer personne. Je fais allusion, non à une situation singulière, mais à un cas générique.

Pour autant, je ne pense pas qu’il faille prendre la direction proposée dans cet amendement.

Fixer une limite soulèverait aussitôt la question des effets de seuil et l’on se retrouverait dans la même situation.

Par ailleurs, sur un plan plus principiel, une telle mesure irait à l’encontre de notre volonté de renforcer, à travers le projet de loi, le rôle du mandataire.

Pour autant, j’ai conscience des difficultés qui peuvent se poser concrètement, mais l’avis reste défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 153.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Chapitre II bis

Dispositions relatives à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

(Division et intitulés nouveaux)

Article additionnel après l'article 9 bis
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Article 10

Article 9 ter (nouveau)

Après le neuvième alinéa de l’article L. 52-14 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

» La commission est assistée de rapporteurs désignés, après avis de son président, par le premier président de la Cour des comptes parmi les magistrats, en activité ou honoraires, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes. »

M. le président. L'amendement n° 289, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La commission peut recourir à des magistrats, en activité ou honoraires, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes, désignés par le Premier président de la Cour des comptes, après avis du président de la commission, pour l’assister dans l’exercice de sa mission de contrôle mentionnée à l’article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement vise à faciliter le travail de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en lui permettant de recourir aux services de magistrats financiers. Il s’agit donc de dispositions très pratiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 289.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9 ter, modifié.

(L'article 9 ter est adopté.)

Chapitre III

Accès au financement et pluralisme

Article 9 ter (nouveau)
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Article 11

Article 10

Après le titre III de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, il est inséré un titre III bis ainsi rédigé :

« TITRE III BIS

« DISPOSITIONS RELATIVES À LA MÉDIATION EN VUE DU FINANCEMENT DES CANDIDATS ET DES PARTIS ET GROUPEMENTS POLITIQUES

« Art. 16-1. – I. – Un médiateur du financement des candidats et des partis politiques est chargé de concourir, en facilitant le dialogue entre les candidats à un mandat électif et les partis et groupements politiques d’une part, les établissements de crédit et les sociétés de financement d’autre part, au financement légal et transparent de la vie politique, en vue de favoriser, conformément aux articles 2 et 4 de la Constitution, l’égalité de tous devant le suffrage, les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation.

« II. – Tout candidat, parti ou groupement politique peut saisir le médiateur afin qu’il exerce une mission de conciliation auprès des établissements de crédit et des sociétés de financement ayant rejeté ses demandes de prêt.

« Le médiateur favorise ou suscite toute solution de conciliation propre à assurer le financement de la campagne des candidats, partis ou groupements politiques présentant des garanties de solvabilité suffisantes.

« II bis (nouveau). – Tout mandataire financier d’un candidat, tout mandataire financier ou toute association de financement d’un parti ou groupement politique peut saisir le médiateur afin qu’il exerce une mission de conciliation auprès des établissements de crédit ayant refusé sa demande d’ouverture d’un compte bancaire ou postal ou des prestations liées à ce compte.

« Le médiateur favorise ou suscite toute solution de conciliation propre à remédier aux difficultés rencontrées dans l’ouverture et le fonctionnement de ce compte bancaire ou postal.

« II ter (nouveau). – Les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance juridictionnelle civile sans l’accord des parties.

« III. – Le médiateur du financement des candidats et des partis politiques est nommé par décret du Président de la République pour une durée de six ans non renouvelable, sur une liste de trois noms établie par le gouverneur de la Banque de France.

« IV. – Le secret professionnel protégé par l’article L. 511-33 du code monétaire et financier n’est pas opposable au médiateur du financement des candidats et des partis politiques.

« V. – Le médiateur du financement des candidats et des partis politiques présente au Parlement un rapport annuel dans lequel il fait un bilan de son activité et peut présenter des recommandations relatives au financement des candidats et partis ou groupements politiques.

« VI. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.

« VII. – (Supprimé)

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, sur l'article.

M. Christian Favier. Le présent article crée un médiateur de la République à l’image du médiateur créé en 2008 pour les entreprises. C’est une bonne chose. Chacun sait que l’accès au financement et notamment au crédit peut être une démarche semée d’embûches pour les partis politiques et pour les candidats aux élections. Il s’agit là d’une entrave au bon déroulement de la vie démocratique de notre pays et d’un facteur d’inégalités entre les candidats.

Sur l’initiative de M. le rapporteur, la commission a modifié la dénomination de « médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques » en « médiateur du financement des candidats et des partis politiques ».

Nous approuvons l’élargissement des missions de ce médiateur. Notre seule interrogation réside dans son mode de désignation, à savoir la nomination par décret du Président de la République : cette procédure renforce encore la présidentialisation du régime. Nous en parlerons d’ailleurs en présentant un prochain amendement.

Sur le fond, l’accès au crédit et aux financements reste, pour la vitalité de notre démocratie, une véritable question qui ne peut être laissée à la seule appréciation du secteur bancaire privé de notre pays.

Pour cette raison, nous regrettons la suppression, à l’article 12, de la banque de la démocratie. Certes, le Conseil d’État a émis des réserves quant au fonctionnement de cette instance, et de nombreuses incertitudes planaient sur ce dispositif. Pour autant, il est aujourd’hui nécessaire de réguler l’accès au financement des organisations politiques comme des associations.

Nous ne souscrivons pas à l’argument selon lequel « seule une insuffisance avérée du marché de l’accès au crédit pour les candidats et les partis politiques, après intervention éventuelle du médiateur, pourrait justifier sous quelque forme que ce soit une intervention sous la forme d’une structure dédiée ».

Au contraire, nous pensons qu’il est de la responsabilité des pouvoirs publics de garantir l’accès de tous au financement. C’est une question éminemment démocratique.

Nous regrettons donc largement cette suppression, même si, je le répète, cette création passait par l’habilitation du Parlement au Gouvernement à agir par voie d’ordonnance. Nous espérons évidemment que cette discussion reprendra.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 219, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 1, 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 4

Supprimer la référence :

Art. 16-1. -

III. – Alinéas 4, 10, 11 et 12

Remplacer les mots :

financement des candidats et des

par les mots :

crédit aux candidats et aux

IV. - Alinéa 10

Remplacer les mots :

, sur une liste de trois noms établie par le gouverneur de la Banque de France

par les mots :

après avis des commissions compétentes en matière de lois électorales, conformément à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, et après avis du gouverneur de la Banque de France

V. – Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

VII. – Le présent article est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Plusieurs des modifications que la commission des lois a apportées à l’article 10 nous semblent bienvenues. Le Gouvernement soutient en particulier l’extension des missions du médiateur aux litiges relatifs à l’ouverture d’un compte bancaire et à l’accès aux prestations bancaires de base.

Pour autant, je ne peux soutenir ni le changement de nom du médiateur ni l’insertion du dispositif dans la loi du 11 mars 1988.

En effet, il nous semble que la mission centrale du médiateur demeure l’accès au crédit. En conséquence, il nous paraît indispensable que les parties prenantes puissent identifier aisément leur interlocuteur privilégié dans ce domaine : voilà pourquoi le nom de « médiateur du crédit » nous semble plus clair.

De plus, le nom de « médiateur du financement » et l’insertion du dispositif dans la loi de 1988 seraient, à nos yeux, sources d’ambiguïtés : le médiateur n'a pas vocation à intervenir sur les autres modes de financement des partis et des candidats, modes de financement que l’on sait très variés.

Enfin, le mode de nomination du médiateur doit être clair. La procédure prévue par l’article 13, alinéa 5, de la Constitution offre toutes les garanties nécessaires pour assurer la désignation d’un médiateur qualifié et indépendant. Le gouverneur de la Banque de France émettra un avis simple, alors que, comme vous le savez, les assemblées parlementaires pourront s’opposer à la désignation du médiateur. L’établissement d’une liste limitative de candidats par le gouverneur de la Banque de France, que prévoit le texte adopté par la commission des lois, ne paraît pas compatible avec cette procédure.

C’est pourquoi, de notre point de vue, il conviendrait de revenir sur ce point à la rédaction initiale du présent projet de loi.

M. le président. L'amendement n° 103, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Rédiger ainsi cet alinéa :

« III. – Le médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques est nommé par décret pris en Conseil d’État sur proposition conjointe des deux présidents des assemblées après consultation des commissions compétentes, pour une durée de six ans non renouvelable, après avis de la Haute autorité de la transparence de la vie politique et du gouverneur de la Banque de France.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Sur cet article, nous défendons la position de la commission, mais nous souhaiterions également revoir le dispositif de nomination du médiateur du financement.

Dans le projet de loi initial, le médiateur était nommé pour un mandat de six ans, par décret du Président de la République, après avis des commissions compétentes en matière de lois électorales, conformément à la loi organique du 23 juillet 2010, et après avis du gouverneur de la Banque de France.

La commission a revu ce mode de nomination pour donner un réel pouvoir propositionnel au gouverneur de la Banque de France. C’est effectivement un pas positif, à ceci près que le gouverneur de la Banque de France est lui-même nommé par le Président de la République…

Pour notre part, nous contestons le fait que cette nomination soit liée à un décret du Président de la République. Nous estimons que ce dispositif contribue à l’hyperprésidentialisation du régime, que nous contestons très régulièrement.

Nous préconisons donc que le médiateur soit nommé, non par un simple décret du Président de la République, mais par un décret en Conseil d’État. Ce décret ferait suite à une consultation des assemblées par le biais des commissions compétentes et après avis non seulement du gouverneur de la banque de France, mais aussi de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

En effet, il semble important de s’adjoindre l’avis de la Haute Autorité au regard de l’exigence d’impartialité et de probité de ce futur médiateur placé au cœur du pouvoir politique et financier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission préfère s’en tenir à son texte : je m’en excuse auprès de Mme la garde des sceaux comme auprès de nos collègues du groupe CRC.

Si nous avons appelé ce médiateur « médiateur du financement », et non « médiateur du crédit », c’est parce qu’il ne s’occupera pas seulement de crédit : il se chargera également de l’ouverture des comptes bancaires des candidats. Il est bon que le titre de cette autorité soit ajusté à l’extension de son périmètre d’intervention.

Quant aux modalités de désignation que nous avons fixées, je conçois qu’elles ne satisfassent pas nos collègues du groupe CRC, et je comprends parfaitement les raisons pour lesquelles ils ne pourront pas les approuver, mais nous sommes tout de même allés plus loin que le Gouvernement.

Celui-ci avait prévu un avis du gouverneur de la Banque de France. Pour notre part, nous nous sommes un peu inspirés des modalités de nomination des magistrats du siège. Nous avons estimé que, si le gouverneur de la Banque de France fait une proposition, la procédure lie davantage le Président de la République. Mais il ne faut pas trop le lier non plus.

Nous avons donc prévu que le gouverneur de la Banque de France fasse la proposition de trois noms. Parmi ces derniers, le Président de la République choisira de désigner un médiateur pressenti, lequel se présentera devant les commissions des lois de chacune des deux assemblées. Si, par un vote à la majorité qualifiée, celles-ci repoussent ce choix, il faudra recommencer la procédure.

Ce sont là des garanties d’indépendance auxquelles s’ajoute, comme dans toute haute autorité indépendante, l’indépendance statutaire. À mon sens, on peut difficilement aller plus loin dans notre système républicain. En conséquence, je souhaite que le Sénat s’en tienne à la position de la commission des lois.

J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 103 ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le médiateur du crédit doit être nommé d’une manière indépendante et transparente : je comprends parfaitement cette préoccupation. Mais il me semble que l’article 13 de la Constitution répond parfaitement à cette exigence.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 219.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 103.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10.

(L'article 10 est adopté.)

Article 10
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Article 12 (supprimé)

Article 11

Après la 43e ligne du tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, est insérée une ligne ainsi rédigée :

« 

Médiateur du financement des candidats et des partis politiques

Commission compétente en matière de lois électorales

» .

M. le président. L'amendement n° 104, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 220, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

financement des candidats et des

par les mots :

crédit aux candidats et aux

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Bien sûr, je maintiens la position que j’ai précédemment exposée. Néanmoins, le Sénat vient de voter le changement de nom du médiateur du crédit. Par cohérence, je retire donc cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 220 est retiré.

M. Philippe Bas, rapporteur. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11
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Article 7 (précédemment réservé)

Article 12

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 221, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour que les candidats, partis et groupements politiques soumis à la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique puissent, en cas de défaillance avérée du marché, le cas échéant après intervention du médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques, assurer le financement de campagnes électorales pour les élections présidentielles, législatives, sénatoriales et européennes par l’obtention de prêts, avances ou garanties.

Ce dispositif peut prendre la forme d’une structure dédiée, le cas échéant adossée à un opérateur existant, ou d’un mécanisme spécifique de financement. L’ordonnance en précise les règles de fonctionnement, dans des conditions garantissant à la fois l’impartialité des décisions prises, en vue d’assurer le pluralisme de la vie politique, et la viabilité financière du dispositif mis en place.

II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. M. Grand a suggéré que les membres du Gouvernement ne connaissaient pas la réalité, et je le regrette : il se trouve que j’ai été très jeune élue locale…

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. … et dû conduire une liste alors que j’avais à peine trente ans. En tant que tête de liste, j’ai parfaitement pu mesurer les difficultés financières qui se présentaient pour accéder et aux comptes et aux crédits.

Quoi qu’il en soit, l’ensemble des propos qui ont été tenus ici militent pour le rétablissement de la banque de la démocratie. Sans m’attarder davantage sur le constat, dressé par tous, des difficultés rencontrées par les candidats aux fonctions électives, je souhaite dire quelques mots à ce propos.

Dans le cadre des campagnes électorales, le recours à l’emprunt bancaire est en recul. Il représentait 35 % du financement des candidats à l’élection présidentielle et 25 % du financement des candidats aux élections législatives en 2012. Il représentait en outre près de 10 % du financement des candidats lors des dernières élections sénatoriales.

Face à ce constat, le Gouvernement a proposé deux mesures : d’une part, la création d’un médiateur du crédit – je maintiens le nom ! – aux candidats et aux partis politiques, et, d’autre part, la création d’une structure pérenne de financement.

Ces deux mesures nous semblent complémentaires.

Si, dans un certain nombre de cas, l’intervention du médiateur est de nature à remédier aux difficultés que rencontrent les candidats et les partis dans l'obtention des crédits, elle ne permettra pas de surmonter tous les obstacles auxquels se heurteront les candidats aux élections confrontés à un besoin immédiat de financement en vue d'une élection déterminée.

Une structure de financement des candidats apparaît donc comme une réponse indispensable pour pallier les carences du financement bancaire privé.

Pour ce qui concerne la structure de financement envisagée, nous souhaitons demander au Parlement l’habilitation de légiférer par ordonnance.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’habilitation que nous vous proposons de nous donner est bien entendu assez large, parce qu’elle prévoit plusieurs options. Elle comporte cependant les dispositions nécessaires pour assurer le respect de l’article 38 de la Constitution, comme l’a d’ailleurs précisé le Conseil d’État dans son avis.

L’habilitation prévoit que la structure de financement interviendra en cas de défaillance avérée du marché et, le cas échéant, après intervention du médiateur. La banque de la démocratie pourra accorder des prêts, des avances ou des garanties.

De plus, l’amendement présenté par le Gouvernement tend à resserrer le champ de l’habilitation au financement des campagnes électorales présidentielles, législatives, sénatoriales et européennes.

La banque de la démocratie pourra être un établissement doté de la personnalité morale, adossé à un établissement de crédit existant, ou bien prendre la forme d'un mécanisme de financement spécifique.

J’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous : une mission va être confiée en ce sens à l’inspection générale des finances et à l’inspection générale de l’administration. Ainsi pourra-t-on déterminer la forme la plus adéquate de cette structure pour qu’elle puisse atteindre au mieux les buts qui lui sont fixés. Par la même occasion, les conditions de sa mise en place pourront être établies.

Enfin, l’habilitation précise que les règles de fonctionnement de la structure devront garantir l’impartialité des décisions qui seront prises, de manière à préserver le pluralisme de la vie politique et la viabilité financière du dispositif mis en place.

Comme le précise l’étude d’impact, les décisions pourront être prises par une autorité collégiale ne recevant aucune instruction du Gouvernement non plus que d’une autre autorité, afin de préserver l’indépendance de la banque de la démocratie.

Les décisions de la banque pourront se fonder sur les perspectives raisonnables de remboursement, reposant elles-mêmes sur des critères objectifs tels que, par exemple, le patrimoine du demandeur ou l’existence de garanties et de sûretés.

Concrètement, le critère d’appréciation appliqué par la banque de la démocratie devra être la solvabilité. Ce critère permettra également d’objectiver le cadre d’intervention de la banque.

Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, cette demande d’habilitation n’est pas la conséquence d’une quelconque impréparation du Gouvernement, comme j’ai parfois pu l’entendre et le comprendre. Au contraire, elle témoigne de la prudence dont fait preuve le Gouvernement dans la définition d’une structure qui soit la plus appropriée pour permettre le financement des campagnes électorales et pour garantir ainsi le pluralisme politique visé par l’article 4 de notre Constitution.

Au demeurant, cette habilitation n’est pas plus imprécise que bien des habilitations votées, par le passé, par le Parlement.

Mme Nicole Bricq. C’est sûr !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement souhaite disposer des moyens d’instituer une banque de la démocratie. Cette instance nous semble totalement indissociable des autres mesures réformant le financement de la vie politique, que vous examinez aujourd’hui.

Voilà pourquoi je vous propose de rétablir l’article 12 du présent projet de loi.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Madame la garde des sceaux, sur ce point, nous avons un désaccord irréductible.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il en faut ! (Sourires.)

M. Philippe Bas, rapporteur. Nous ne sommes pas, par principe, hostiles à toute habilitation, mais une jurisprudence très fournie du Conseil constitutionnel établit clairement que, pour qu’une habilitation soit constitutionnelle, elle doit être suffisamment précise. Or, en l’occurrence, nous considérons qu’elle ne l’est pas.

Bien sûr, vous l’avez rappelé, les finalités sont définies, mais la nature de la structure qui serait mise en place reste tout à fait vague. Elle est d’ailleurs si vague que – vous l’avez dit vous-même – le Gouvernement entend choisir entre trois options. Pour trancher, il attendra le résultat de l’étude qu’il a confiée conjointement à l’inspection générale des finances et à l’inspection générale de l’administration.

Nous vous faisons réellement crédit des intentions qui sont les vôtres pour améliorer le financement des campagnes électorales et nous sommes tout à fait prêts à débattre avec vous. Cependant, dans ce domaine hautement dérogatoire aux droits du Parlement, nous ne pouvons pas vous accorder une habilitation qui, selon nous, ressemblerait trop à une sorte de chèque en blanc.

Je sais bien que tel n’est pas votre point de vue, et je le respecte. Mais, par exemple, outre la nature de la structure, une question fondamentale est complètement absente de l’habilitation : les prêts seront-ils accordés en fonction de critères de solvabilité de l’emprunteur, de critères politiques ou d’éléments combinés ? Il ne nous est pas indifférent de le savoir.

Au fond, si vous ne parvenez pas à obtenir cette habilitation, qui pose problème au Parlement, rien ne vous empêche, puisque vous avez engagé ce travail, de revenir le moment venu devant les deux assemblées, soit avec un nouveau projet de loi d’habilitation, soit avec un projet de loi créant cette banque de la démocratie.

Le sujet est tellement nouveau, l’idée est si créative que, je le comprends bien, vous n’avez pas matériellement eu le temps d’aller plus loin. Vous avez sans doute besoin d’être davantage éclairée avant de pouvoir nous éclairer vous-même, mais, dès lors que nous ne sommes pas suffisamment éclairés, nous ne pouvons vous déléguer le pouvoir législatif que la Constitution nous confère.

C’est la raison pour laquelle je confirme l’avis défavorable de la commission sur votre amendement, ce qui ne vous étonnera pas.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Qu’en termes délicats ces choses-là sont dites… (Sourires.)

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est la marque du Sénat, madame la garde des sceaux ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. La création d’une banque de ce type est non seulement une bonne idée, mais une nécessité. Peut-être le titre de « banque de la démocratie » est-il, sinon pompeux, du moins un peu ambitieux. Toutefois, monsieur le rapporteur, nous vivons une période fondamentalement nouvelle.

M. Philippe Bas, rapporteur. Cela n’interdit pas de respecter la Constitution !

Mme Nicole Bricq. Il ne faut donc pas s’étonner que des nouveautés soient soumises au vote des parlementaires,…

Mme Catherine Di Folco. Ne mélangeons pas tout !

Mme Nicole Bricq. … car cela fait partie de l’exercice. La période actuelle est tout de même assez exceptionnelle, et je pense que cela va continuer.

Cette précision étant faite, il me semble important, en la matière, de distinguer la forme et le fond.

Sur le fond, on ne peut à mon sens qu’être favorable à cette institution, dans la mesure où elle est une garantie de pluralisme – j’insiste sur cet enjeu – et d’indépendance. J’ajoute que la banque de la démocratie permettra de savoir d’où vient l’argent : je n’en dis pas plus, mais je relève que le financement de certaines campagnes électorales a suscité beaucoup de débats. À mes yeux, il s’agit là de missions utiles, et même essentielles.

Ensuite, vient la question de la forme et de la méthode.

Vous contestez le recours aux ordonnances. Nous allons débattre une semaine entière en séance publique de la réforme du droit du travail, qui fait l’objet d’une telle demande d’habilitation. Or j’ai cru comprendre qu’en la matière vous n’étiez pas défavorable à la méthode des ordonnances. Quand la nécessité ou l’urgence l’imposent, il faut vraiment donner cette habilitation à l’exécutif.

M. Bruno Sido. Nous l’avons tous fait…

Mme Nicole Bricq. À mon sens, nous avons intérêt à résoudre ce problème aujourd’hui. Sinon, quand le ferons-nous ? Dans une nouvelle loi bancaire ? Je ne le crois pas. Par un cavalier introduit dans un véhicule législatif ? Je ne le crois pas. Dans une loi de finances ? Je ne le crois pas.

Ce sujet est consubstantiel du présent projet de loi. Cela étant, je peux comprendre que vous ayez des interrogations quant aux critères d’attribution des financements accordés par cette institution.

Madame la garde des sceaux, sur ce sujet, vous vous apprêtez à lancer une mission conjointe de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale de l’administration. Au terme de leur travail, ces deux instances vous remettront un rapport. Peut-être serait-il intéressant que vous en rendiez compte au Parlement, afin que nous puissions avancer.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Tout à fait !

Mme Nicole Bricq. C’est peut-être un engagement que vous pouvez prendre devant nous. J’ai observé que cette habilitation serait valable douze mois. Nous avons donc le temps ! Vous recevrez le rapport que vous avez demandé avant cette échéance. Dès lors, il faudra associer les parlementaires à la réflexion, et singulièrement les membres des deux commissions des lois.

M. Bruno Sido. Sans oublier les commissions des finances !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Qu’une banque dédiée au financement de la vie politique soit indispensable, j’en suis absolument persuadé. Mais que ce que l’on nous propose soit une banque, j’en doute un peu : cela ressemble plutôt à un SAMU. (Sourires et exclamations.)

Mme Nicole Bricq. C’est très utile, le SAMU !

M. Pierre-Yves Collombat. Certes, chère collègue, mais, si l’on s’évitait le SAMU, ce serait encore mieux !

Cette banque de la démocratie interviendrait quand il est avéré que le marché ne peut pas y suffire et quand le médiateur n’aboutit à rien. Je préférerais qu’il en aille différemment et que l’on dispose d’une véritable banque servant effectivement à financer la vie politique.

Madame la garde des sceaux, vous avez évoqué différents critères : la solvabilité, le fait de disposer de biens en garantie… Là, on reconnaît bien la mentalité de banquier !

Ce n’est pas véritablement ce qu’il faudrait. Parmi les candidats sérieux, il existe de pauvres gens, qui n’ont pas de patrimoine.

Bien sûr, il faut faire la part des farfelus, de ceux qui n’ont aucune chance d’avoir le moindre remboursement de la part de l’État : on ne peut pas aider n’importe qui. Mais avouez que le Gouvernement pose le problème d’une manière un peu étroite.

Je regrette que le dispositif soit présenté de cette façon : même s’il fallait en passer par une ordonnance, j’aurais volontiers adhéré à votre proposition, mais, si c’est pour faire ça, j’hésite…

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Nous toutes et nous tous dans cet hémicycle connaissons des candidates et des candidats qui ont du mal à obtenir les prêts nécessaires pour financer leur campagne électorale. Nous en faisons encore l’expérience à quelques semaines des élections sénatoriales : nous savons d’ores et déjà que certains candidats, notamment certains chefs de file, ont des difficultés à ouvrir leurs comptes de campagne. C’est une réalité.

Aussi, je me félicite que le Gouvernement cherche à réintroduire dans le présent texte la création de la banque de la démocratie.

Bien sûr, madame la garde des sceaux, vous connaissez notre point de vue sur les ordonnances : nous en avons suffisamment parlé à propos du code du travail, dont l’Assemblée nationale débat en ce moment même,…

Mme Nicole Bricq. Le Sénat en discutera bientôt !

Mme Éliane Assassi. … et nous en reparlerons.

Nous ne pensons pas de bien des ordonnances, mais nous estimons qu’il y a urgence à aller vers la création d’une telle structure.

Toutefois, les critères énoncés par le Gouvernement me semblent un peu rigides, si vous me permettez l’expression.

En tout état de cause, nous voterons cet amendement qui crée la banque de la démocratie.

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. Madame la garde des sceaux, sur le fond, nous ne contestons pas qu’il existe un problème, mais, sans reprendre l’argumentation de Philippe Bas, je tiens à vous dire pourquoi cet amendement, même retravaillé depuis sa première rédaction, ne peut pas nous convenir.

Selon nous, ces dispositions posent un problème de principe, un problème quant aux modalités et, au-delà, un problème de méthode, depuis que l’on a vu apparaître l’idée même de banque de la démocratie, c’est-à-dire il y a tout juste quelques semaines.

Tout d’abord, il y a un problème de principe : il s’agit de déléguer au Gouvernement un pouvoir qui n’appartient qu’au législateur sur un sujet aussi important que le financement de la démocratie, sujet qui concerne les partis au titre des quatre élections nationales, en incluant les élections européennes.

Sur une telle question, nous sommes par principe hostiles à une habilitation à légiférer par ordonnance.

Mme Éliane Assassi. Et pour le code du travail, alors ?

M. Bruno Retailleau. En effet, nous estimons qu’il est possible d’obtenir le même résultat par d’autres moyens.

Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas un bon argument…

M. Bruno Retailleau. Je vais y venir.

Ensuite se pose le problème des modalités. On le voit bien, il faut s’en remettre à des corps d’inspection et leur demander de travailler sur la base d’un certain nombre d’options pour défricher une solution qui, en réalité, est née voilà seulement quelques semaines. Or plusieurs mois encore seront nécessaires pour essayer de trouver un terrain d’atterrissage satisfaisant.

Enfin, et surtout, il y a un problème de forme. Les prochaines élections nationales que la France connaîtra se tiendront en 2019 : il s’agira des élections européennes. Pourquoi dès lors cette précipitation ?

Selon nous, le Gouvernement aurait intérêt à réunir les différents partis politiques. Ensuite, il pourrait tout à fait présenter un texte de loi aux deux assemblées. Ce serait là une meilleure méthode.

Je le répète, rien ne presse ! Votre prédécesseur, François Bayrou, a souhaité se saisir très vite de cette question. On sait bien qu’il n’a pas eu le temps de mener le travail à son terme.

Vous nous demandez une habilitation à légiférer par ordonnance parce que vous n’êtes pas prêts. Renversons la méthodologie et organisez une table ronde avec l’ensemble des forces politiques pour conduire une véritable réflexion, en conclusion de laquelle vous pourrez nous soumettre un texte qui ne soit pas d’habilitation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Ce débat a montré combien ce sujet est essentiel et combien il nous touche. Il serait tout de même étonnant de voter ce projet de loi sans avoir élaboré un dispositif répondant au problème que nous avons constaté. À la suite de Nicole Bricq, j’estime que nous réglerons la difficulté en habilitant le Gouvernement à préparer une ordonnance. Rien n’empêchera ensuite le Gouvernement de mener des consultations. Nous disposerons d’une année pour cela, puis de trois mois pour procéder à la ratification. Il me semble préférable de traiter le problème maintenant, alors que nous venons de clore une séquence électorale, plutôt que de reporter son examen. L’agenda législatif est toujours encombré et ce sujet ne sera pas prioritaire. Nous aborderions la séquence électorale de 2020 sans avoir réglé le problème : cela ne me semble pas très sérieux.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Il s’agit d’un problème majeur, chacun en convient. C’est pourquoi il faut le traiter au fond et s’assurer que la solution retenue soit la bonne. Cela suppose la tenue d’un débat au Parlement, s’agissant du financement de la démocratie. Je souhaite que, dans un délai qui peut être bref, on nous soumette un projet de loi, afin que nous puissions débattre de la question sans attendre les élections européennes. Le recours aux ordonnances n’est pas, à mon avis, la bonne solution, dès lors qu’existent certaines incertitudes. Cela étant, veillons à conserver un calendrier resserré.

M. Claude Kern. Tout à fait d’accord !

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je respecte évidemment la position de la commission des lois. Toute habilitation suppose une loi de ratification. Le Parlement pourra donc débattre pleinement et librement de cette question.

Pour que cette démarche soit efficace, je m’engage, comme vous me l’avez demandé, madame Bricq, à venir présenter au Sénat, selon les modalités que vous pourrez me proposer, les rapports des inspections que j’ai évoqués.

Certes, monsieur Retailleau, les prochaines élections nationales auront lieu en 2019… sauf si le calendrier électoral est bouleversé par un événement imprévu ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. Jean Desessard. Vous pensez à une dissolution ? (Sourires.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Dans cette perspective, il vaut mieux partir à temps !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, nous demandons une suspension de séance de quelques minutes.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Je mets aux voix l’amendement n° 221.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 109 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 247
Pour l’adoption 63
Contre 184

Le Sénat n’a pas adopté.

En conséquence, l’article 12 demeure supprimé.

Mes chers collègues, nous abordons maintenant l’examen du titre IV, précédemment réservé à la demande du Gouvernement. Il me semblerait de bonne méthode que nous puissions l’achever sans qu’il soit interrompu par la suspension de séance du dîner. Nous pouvons donc soit suspendre la séance maintenant, pour la reprendre à vingt et une heures, soit la poursuivre jusqu’au terme de la discussion des titres IV et IV bis, ce qui pourrait nous mener jusqu’à vingt heures trente ou vingt et une heures.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je préférerais que nous poursuivions.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis.

M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

TITRE IV (précédemment réservé)

DISPOSITIONS RELATIVES À L’INDEMNITÉ DES MEMBRES DU PARLEMENT

Article 12 (supprimé)
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Demande de priorité

Article 7 (précédemment réservé)

Après l’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 sexies ainsi rédigé :

» Art. 4 sexies. – Le bureau de chaque assemblée, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, définit les conditions de prise en charge, par l’assemblée dont ils sont membres, des frais de mandat réellement exposés par les députés et sénateurs, dans la limite de plafonds qu’il détermine et sur présentation de justificatifs de ces frais. »

Demande de priorité

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

Article 7 (précédemment réservé)
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Article 7 bis (nouveau) (précédemment réservé)

M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur le président, en application de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, je demande l’examen en priorité de l’amendement n° 294 de la commission et du sous-amendement n° 295 dont il fait l’objet.

M. le président. Je suis donc saisi d’une demande de priorité de la commission portant sur l’amendement n° 294 et le sous-amendement n° 295.

Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis favorable.

M. le président. La priorité est ordonnée.

La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article 7.

Mme Éliane Assassi. Nous partageons la volonté, affichée au travers de ce projet loi, de rendre plus transparent l’usage de l’argent public, notamment celui de l’indemnité représentative de frais de mandat, l’IRFM. Cette démarche est légitime et nécessaire, et nous la soutenons pleinement. Nous approuvons le dispositif tel qu’issu des travaux de la commission, qui reprend largement le code de bons usages que nous avons défini au Sénat.

Pour autant, je voudrais exprimer ici ma lassitude de voir les élus sans cesse vilipendés, alors qu’il n’est jamais question de l’utilisation de l’argent public par d’autres acteurs de la société. On ne parle ainsi jamais de moraliser la vie économique. Pourtant, tous les jours, des gens perdent leur travail pour le profit de quelques-uns, la finance s’exile pour ne pas devoir contribuer au bien public, les écarts de richesse se creusent : où est donc la morale ?

À quelle entreprise demande-t-on de justifier l’emploi des subsides publics dont elle a bénéficié à la suite d’un chantage insupportable à l’emploi ? Quelle est la traçabilité du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, qui coûte pourtant très cher et dont l’inefficacité a été soulignée l’année passée dans un rapport du Sénat préparé sous la houlette de notre collègue Marie-France Beaufils ? Les sommes en cause sont pourtant colossales : à la fin de 2015, elles atteignaient déjà au total 48 milliards d’euros. Quelle est la traçabilité du crédit d’impôt recherche, le CIR ? Quelles sont nos exigences envers le MEDEF, qui avait promis la création d’un million d’emplois supplémentaires ?

Quel laxisme, mes chers collègues ! Quelle différence de traitement entre élus de la République et grands patrons du CAC 40 ! Il n’est plus acceptable que l’on jette les élus en pâture aux médias et à l’opinion publique alors que la transparence et le bon usage des deniers publics sont des exigences essentielles pour l’ensemble de l’action publique.

Il ne s’agit pas ici de nous dédouaner : nous sommes très clairs sur cette question. Pour autant, il faut aussi dire les choses : ces indemnités sont nécessaires au bon fonctionnement des institutions, les parlementaires en ont besoin pour garantir leur indépendance et pour pouvoir exercer leur mandat correctement.

Nous demandons solennellement au Gouvernement d’imposer les mêmes exigences, en matière de transparence et de bon usage des deniers publics, aux autres acteurs de la société. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain. – Mmes Corinne Bouchoux et Patricia Schillinger applaudissent également.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 294, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’indemnité représentative de frais de mandat des députés et des sénateurs est supprimée.

II. – Au a du 3° du II de l’article L. 136–2 du code de la sécurité sociale, les mots : « l’indemnité représentative de frais de mandat, au plus égale au montant brut cumulé des deux premières et versée à titre d’allocation spéciale pour frais par les assemblées à tous leurs membres, » sont supprimés.

III. - Après l’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 sexies ainsi rédigé :

« Art. 4 sexies. - Le bureau de chaque assemblée, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, définit les conditions dans lesquelles les frais de mandat réellement exposés par les députés et les sénateurs sont directement pris en charge par l’assemblée dont ils sont membres ou leur sont remboursés dans la limite de plafonds qu’il détermine et sur présentation de justificatifs de ces frais. Cette prise en charge peut donner lieu au versement d’une avance. »

IV. - Le second alinéa du 1° de l’article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même des frais de mandat remboursés dans les conditions prévues à l’article 4 sexies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. »

V. – Le I et le II entrent en vigueur le 1er janvier 2018.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je vais essayer d’être concis, mais ce sujet est d’une importance cruciale.

Le Sénat a défini de manière très rigoureuse, depuis plusieurs années, les dépenses éligibles à un financement par l’indemnité représentative de frais de mandat : il s’agit des frais liés à la permanence et à l’hébergement du sénateur, des frais de déplacement du sénateur et de ses collaborateurs, des frais de documentation et de communication, des frais de représentation et de réception, des frais de formation du sénateur et de ses collaborateurs et de la participation aux dépenses de fonctionnement d’un groupe parlementaire. Aucune dépense n’entrant pas dans une de ces catégories ne peut être prise en charge par le biais de l’indemnité représentative de frais de mandat. Celle-ci doit en outre être gérée sur un compte spécifique, qui n’est alimenté par aucune autre ressource, et s’il existe, à la fin du mandat du sénateur, un reliquat des sommes déposées sur ce compte, ce reliquat doit être remboursé au Sénat dans un délai de trois mois.

Nous avons donc abordé ce débat sur la prise en charge des frais de mandat de la manière la plus sereine, compte tenu de la réglementation très précise qui existe dans notre assemblée. Je sais d’ailleurs que, dans ses travaux préparatoires, le Gouvernement s’est largement inspiré – il pourra le confirmer – des règles posées par le Sénat en la matière.

Madame la ministre, vous avez souhaité, au nom du Gouvernement, aller plus loin, et nous vous avons fait bon accueil. Vous nous avez demandé d’accepter que toutes les dépenses éligibles au financement par le Sénat des frais de mandat fassent l’objet de justificatifs. Vous avez également demandé que les frais de mandat soient remboursés aux sénateurs. Je reviendrai dans un instant sur cette notion de remboursement. Vous avez enfin reconnu – c’est une conséquence du principe d’autonomie des assemblées parlementaires – que les modalités de ce remboursement et l’ensemble des modalités de fonctionnement de la prise en charge des frais de mandat devaient être déterminées par le bureau de chacune des deux assemblées. Toute autre position serait d’ailleurs inconstitutionnelle : il y a une limite à l’intrusion possible du législateur dans le fonctionnement de nos assemblées.

Madame la ministre, la commission des lois fut d’emblée très largement d’accord avec vos propositions. Toutefois, elle a souhaité remplacer le mot « remboursement » des frais de mandat par l’expression « prise en charge » des frais de mandat, parce que ces derniers sont gérés aujourd’hui selon plusieurs modalités et qu’il paraît raisonnable de maintenir, à côté de la procédure envisagée par le Gouvernement, à savoir le remboursement, la possibilité d’attribuer des avances ou la prise en charge directe par le Sénat de certains frais. Il en est d’ailleurs ainsi en Grande-Bretagne, où le régime est extrêmement sévère. Nous avons considéré que faire du remboursement la modalité unique de prise en charge des frais de mandat était beaucoup trop restrictif et risquait d’entraîner des contraintes bien trop fortes pour l’exercice de notre fonction.

Madame la ministre, vous n’avez pas accepté la proposition de la commission des lois de remplacer « remboursement » par « prise en charge ». Nous nous trouvions donc dans une impasse. J’ai souhaité en sortir pour des raisons politiques et institutionnelles que j’assume pleinement. En effet, dans le processus législatif qui est engagé, si nous ne trouvons pas d’accord avec le Gouvernement sur ce point essentiel – comme l’est l’interdiction des emplois familiaux, sur laquelle nous allons revenir pour la rétablir –, celui-ci ne défendra pas la position du Sénat devant l’Assemblée nationale, laquelle dès lors ne se sentira nullement liée par le vote que nous aurons émis.

Je souhaite, mes chers collègues, que le Gouvernement défende la position qui aura été débattue au Sénat sur ces points essentiels, car sinon nous risquons fort, au terme du processus, de nous trouver devant une difficulté politique majeure (M. Jean-Léonce Dupont le conteste.) : si l’Assemblée nationale est en désaccord avec le Sénat, le Gouvernement sera conduit à lui donner le dernier mot, et tout le travail patient que nous avons accompli n’aura servi à rien. Ces raisons politiques me paraissent suffire à justifier que j’aie recherché un accord avec le Gouvernement.

Le désaccord du Gouvernement avec le texte de la commission tenait dans une large mesure à la crainte que nous ne voulions rétablir de manière déguisée l'indemnité représentative de frais de mandat, dont j'ai rappelé à quel point elle était déjà encadrée. Telle n’était pas la volonté de la commission des lois. En revanche, nous avons insisté très fermement sur la nécessité de prévoir trois modalités de prise en charge des frais de mandat : l'avance, la prise en charge directe et le remboursement. Ce point me paraît absolument essentiel.

Le Gouvernement, à la suite de nos discussions, a accepté que le texte prenne en compte ces trois modalités, tout en réaffirmant clairement la suppression de l’indemnité représentative de frais de mandat. J’ai donné mon accord à cette solution, que j’ai présentée ce matin à la commission des lois, qui l’a approuvée. Pour nous, l’expression « prise en charge » recouvrait exactement la même chose que la formulation retenue par le Gouvernement, mais celui-ci a estimé que ce qui, de notre point de vue, allait sans dire, irait mieux en le disant. La commission des lois a donc élaboré une rédaction beaucoup plus explicite, mais qui ne change en rien sa position. Cette rédaction rassure le Gouvernement. S’il s'engage à la défendre devant l'Assemblée nationale, je vous demanderai, mes chers collègues, de l’adopter. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe Union Centriste, du groupe La République en marche et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Le sous-amendement n° 295, présenté par M. J.L. Dupont, est ainsi libellé :

Amendement n° 294, alinéa 5

1° Supprimer le mot :

directement

2° Supprimer les mots :

ou leur sont remboursés

La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. J’ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'ensemble des arguments et considéré avec attention l’utilisation très fine des moyens offerts par la procédure.

Le débat va se trouver écourté dans la mesure où l’adoption probable de l’amendement de la commission rendra les autres sans objet. À mes yeux, tel qu’il est rédigé, cet amendement aura des conséquences en matière de gestion pour notre institution,…

M. Philippe Bas, rapporteur. Bien sûr !

M. Jean-Léonce Dupont. … qui devra en effet rembourser quelque 200 000 factures par an…

Certes, aux termes de l’étude d’impact du projet de loi, avec le remboursement des frais réels, « la dépense mensuelle par parlementaire devrait être légèrement inférieure au montant actuel de l’indemnité représentative des frais de mandat du fait d'une probable déperdition (absence de demande de remboursement ou perte de justificatif) ». Je ne sais si c’est cette finalité qui est recherchée, mes chers collègues, mais sachez en tout cas que cela figure dans l’étude d’impact…

Selon une estimation assez raisonnable, traiter 200 000 factures par an, cela implique la création de quelque quarante emplois de fonctionnaire, une dépense nouvelle de l'ordre de 4 millions d'euros, l’acquisition ou la location d’une quarantaine de bureaux – soit une dépense d’environ 6 millions d'euros dans le premier cas – nous avons une référence assez récente – ou une charge annuelle d’un montant de 500 000 euros dans le second cas.

En résumé, la mise en œuvre de l'ensemble des dispositions que nous nous apprêtons à voter entraînera, pour le seul Sénat, une dépense complémentaire de 4,5 millions d'euros par an au minimum. J'avais cru comprendre que la volonté du Gouvernement, rappelée hier encore par le chef du Gouvernement, était de limiter la dépense publique. Si nous ne votons pas le sous-amendement, je ne crois pas que les mesures qui nous sont proposées ici iront dans ce sens.

Nous n’attendons pas une rallonge de la dotation versée au Parlement, laquelle est bloquée depuis maintenant pratiquement huit ans. Mes chers collègues, je vous demande donc, en connaissance de cause, d’adopter ce sous-amendement pour limiter les effets induits que j'ai essayé de décrire rapidement. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Union Centriste et sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. L'amendement n° 33 rectifié bis, présenté par MM. Maurey, Longeot et de Raincourt, Mme Férat, MM. Commeinhes, Laurey et Médevielle, Mme Joissains et M. L. Hervé, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Le présent amendement vise tout simplement à maintenir en l'état les règles relatives à l’IRFM en vigueur, pour toutes les raisons que l’on vient d’entendre.

Premièrement, comme l’a dit le président Bas tout au long de l'après-midi, il n'est pas souhaitable d’inscrire dans la loi des dispositifs qui relèvent de l’appréciation souveraine des assemblées. Il faut laisser aux assemblées le soin de fixer les règles relatives à l'IRFM.

Deuxièmement, ainsi que l’ont rappelé Philippe Bas et Jean-Léonce Dupont, l'utilisation de l’IRFM est déjà extrêmement encadrée. La réforme intervenue en 2015 a permis d’établir de manière très précise quelles dépenses peuvent être prises en charge et de prévoir le remboursement des crédits non utilisés à la fin du mandat. L’IRFM n’est donc pas utilisée de manière discrétionnaire par les parlementaires, comme on pourrait parfois le croire à la lecture de la presse.

Troisièmement, enfin, à l’instar de notre collègue Jean-Léonce Dupont, je ne vois vraiment pas l’intérêt de mettre en place un dispositif qui coûterait des millions d'euros uniquement pour faire plaisir à l'opinion publique, pour céder au populisme ambiant.

Pour toutes ces raisons, il me paraît beaucoup plus simple, plus sage et plus raisonnable d’adopter l'amendement que je propose et de supprimer le dispositif prévu dans le projet de loi.

M. le président. L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Labbé, Mme Benbassa, MM. Manable et Tourenne, Mme Yonnet, M. Labazée, Mme Perol-Dumont, MM. Carcenac, Courteau et Desessard, Mmes Archimbaud et Bouchoux et M. Dantec, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après l’article 4 quinquies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 sexies ainsi rédigé :

« Art. 4 sexies – Chaque assemblée parlementaire définit la nature des dépenses constituant des frais de mandat. Chaque député ou sénateur perçoit mensuellement une avance sur ces dépenses, dans la limite d’un plafond fixé par l’assemblée dont il relève. Il tient une comptabilité des dépenses réellement exposées et en détient les justificatifs. L’excédent des avances sur les dépenses est reversé chaque année au budget de l’assemblée concernée.

« Les comptabilités font l’objet d’un contrôle aléatoire. Chaque assemblée définit les sanctions applicables en cas de manquement aux obligations résultant du présent article. »

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Prévoir une comptabilité obligatoire pour chaque parlementaire en rendant également obligatoire la production de justificatifs, comme c'est le cas dans les administrations et les collectivités, semble un minimum dans le cadre de la gestion de deniers publics. Que l’on ne vienne pas nous dire que ce serait trop compliqué ou impossible ! Depuis le début de mon mandat – et je ne suis pas le seul dans cet hémicycle à le faire –, je conserve toutes les factures et les notes de frais ; il suffit ensuite de les intégrer dans un tableau Excel : c’est très simple.

En revanche, la proposition d’instaurer une avance sur frais est en décalage avec la réalité, car nous ne pouvons assumer le paiement des frais de communication, de location de permanence, les remboursements de frais kilométriques de nos collaborateurs, etc. Cet amendement tend donc à remplacer le système proposé de remboursement des frais, qui imposerait aux parlementaires de faire des avances importantes et exigerait la mise en place d’une nouvelle organisation administrative lourde et coûteuse, par un mécanisme d’avances mensuelles, assorti de l'obligation de tenir une comptabilité faisant l'objet de contrôles aléatoires, à l’instar des contrôles fiscaux pour les citoyens. La transparence souhaitée serait ainsi obtenue par des moyens mieux adaptés.

M. le président. L'amendement n° 159, présenté par MM. J.L. Dupont, Saugey et D. Bailly, Mme Morin-Desailly, MM. Maurey, Gabouty et Commeinhes, Mme Férat, MM. Reichardt, Vasselle et Pierre, Mme Duchêne, M. Longeot, Mme Bouchoux, MM. Bérit-Débat, Médevielle, Laménie, Marseille, Pozzo di Borgo et Kern et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 80 undecies est abrogé ;

2° Le A du VI de la première sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi rédigé :

« A. Définition des bénéfices et indemnités imposables » ;

3° Après l’article 92 A, il est inséré un article 92 … ainsi rédigé :

« Art. 92 … – 1° Pour l’établissement de l’impôt, l’indemnité parlementaire et l’indemnité de fonction prévues aux articles 1er et 2 de l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement, l’indemnité de résidence, l’indemnité représentative de frais de mandat, ainsi que les indemnités versées par les assemblées à certains de leurs membres, en vertu d’une décision du bureau desdites assemblées, en raison de l’exercice de fonctions particulières, sont considérées comme des revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux.

« 2° Le revenu à retenir dans les bases de l’impôt est constitué par l’excédent des indemnités mentionnées au 1° sur les dépenses nécessitées par l’exercice de la fonction parlementaire. Le Bureau de chaque assemblée définit les limites dans lesquelles les dépenses exposées par les membres du Parlement au titre de leur fonction sont déductibles. » ;

4° Le a du 1° du 7 de l’article 158 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’adhésion à une association de gestion mentionnée à l’article 1649 quater HA est obligatoire pour les membres du Parlement au titre des revenus mentionnés à l’article 92 B. » ;

5° Après le II du chapitre I ter du titre premier de la troisième partie du livre premier, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis : Associations agréées des membres du Parlement

« Art. 1649 quater HA. – Les membres du Parlement peuvent créer des associations de gestion chargées de s’assurer de la régularité des déclarations que leur soumettent leurs adhérents. À cet effet, elles leur demandent tous renseignements et documents utiles de nature à établir, chaque année, la concordance, la cohérence et la vraisemblance desdites déclarations. Ces associations peuvent être agréées dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. Cet amendement est le fruit d'un travail mené depuis pratiquement deux ans à la demande du président du Sénat, qui m’a demandé de réaliser des analyses comparatives à l’échelle européenne, d’étudier la problématique globale des indemnités et, naturellement, de prendre en compte les évolutions récentes qui ont bouleversé un certain nombre de perceptions.

Deux objectifs sont en réalité visés.

Le premier, dont on n'ose pas souvent parler, est de maintenir un minimum d'attractivité et d'indépendance à la fonction parlementaire, car, ne nous y trompons pas, nous risquons de nous retrouver demain avec des élus territoriaux qui, titulaires de plusieurs mandats, percevront des indemnités supérieures à celle que touchera un parlementaire. Je le sais, ces sujets sont toujours difficiles à aborder, mais leur portée est réelle, y compris au regard de la pérennité de nos institutions.

Le second objectif est d’en finir une bonne fois pour toutes avec le reproche de manquer de transparence qui nous est régulièrement adressé au travers de la sempiternelle dénonciation d’un supposé « entre soi » parlementaire, pour ne pas dire un environnement opaque.

Cet amendement prévoit la fongibilité de l'indemnité parlementaire et de l’IRFM, la déduction d’un certain nombre de charges en fonction des décisions des deux bureaux des assemblées, pour respecter l'autonomie du Parlement, et un contrôle par l'administration fiscale. Relevant dès lors du droit commun, étant absolument sûrs de la qualité de ce contrôle, nous mettrions un terme définitif à des critiques qui, je vous l’affirme, ressortiront si une autre solution, quelle qu’elle soit, devait être arrêtée.

Il s’agit également, il faut le dire, de faire en sorte que pas un seul euro touché par un parlementaire ne soit pas fiscalisé. De deux choses l’une : ou le montant des charges est supérieur à celui de l’IRFM, et alors le parlementaire n'a pas à payer d’impôts ; ou il est inférieur, et alors aucun euro ne doit échapper à l'impôt. C’est exactement ce que nous proposons. Cela répond en réalité, j’ose le dire pour conclure, à la volonté qu’avait affirmée par le Président de la République pendant sa campagne électorale en évoquant la fiscalisation des indemnités parlementaires. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur le président de la commission des lois, comme vous l'avez dit, nous abordons ici un point important et sensible, qui a trait à l’exercice au quotidien de la fonction de parlementaire.

Il s'agit de déterminer les conditions dans lesquelles les frais de mandat des parlementaires sont pris en charge par les assemblées. Le Gouvernement avait retenu un mécanisme simple et lisible pour nos concitoyens, considérant que, dans ce domaine, la clarté est essentielle. Il a donc été décidé de supprimer l’IRFM, pour toutes les raisons qui ont pu être explicitées.

Le dispositif figurant dans le projet de loi initial reposait sur les trois principes suivants.

Le premier principe, essentiel à nos yeux, concerne les modalités. Il appartient aux assemblées, et à elles seules, de définir les conditions de remboursement de ces frais. Il s'agit là de respecter la séparation des pouvoirs et l'autonomie des assemblées, ce qui conduit également, selon nous, à écarter l'intervention d'un organisme extérieur comme au Royaume-Uni. Vous avez proposé, monsieur le président Bas, qu’il revienne aux bureaux des assemblées de définir ces conditions, après avoir consulté l'organe de déontologie. Naturellement, le Gouvernement n'est absolument pas en désaccord avec cet aspect de l'évolution du texte proposée par la commission.

Le deuxième principe posé par le Gouvernement dans la rédaction initiale du texte et que nous maintenons est celui de la vérification sur présentation de justificatifs de la réalité de l’exposition des frais.

Le troisième principe, évidemment lié à celui de la présentation de justificatifs, repose sur la notion de remboursement.

Sur ce point, le président Bas l’a rappelé, nous avons eu, entre l'adoption par la commission des lois de la nouvelle rédaction de l'article 7 et hier soir, des échanges extrêmement riches. À cet égard, je tiens à remercier très sincèrement le président de la commission des lois pour la qualité du dialogue que nous avons pu nouer dans un esprit de confiance partagée, me semble-t-il, sur un sujet complexe et délicat. Ce dialogue a abouti à la rédaction de l'amendement n° 294 de la commission des lois. Je m'engage, monsieur le président Bas, à la défendre devant l'Assemblée nationale.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je souhaite dire ici qu’il nous semble avoir trouvé un point d'équilibre entre la volonté de supprimer l’IRFM pour passer à un mécanisme de remboursement des frais réels sur justificatifs et celle, tout à fait compréhensible, d'apporter des réponses concrètes à de réels problèmes qui ont été soulevés par la commission des lois.

Ainsi, l’IRFM sera supprimée à compter du 1er janvier 2018, pour être remplacée par un système de remboursement sur justificatifs.

M. Philippe Bas, rapporteur. Non, il y a trois modalités !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’y viens, monsieur le président Bas.

Les assemblées pourront aussi prendre en charge directement certaines dépenses, comme c'est déjà le cas aujourd'hui hors IRFM. Par ailleurs, une solution sera apportée pour que les parlementaires n’aient pas à avancer certaines dépenses dans un certain nombre de cas. Je ne méconnais pas les modifications que cette mesure entraînera pour la Haute Assemblée, mais je suis certaine qu’elles sont surmontables. Il appartiendra aux bureaux des assemblées d'organiser concrètement ces dispositifs, en toute transparence et après avis de l'organe de déontologie.

Dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 294. S’il est adopté, les amendements nos 214 et 213, que le Gouvernement avait déposés avant nos échanges fructueux, deviendront sans objet. Dans cette logique, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 295 visant à supprimer la notion de remboursement, ainsi qu’aux amendements nos 33 rectifié bis, 159 et 20 rectifié. Toutefois, je retiens l’idée avancée par le sénateur Jean-Léonce Dupont d’engager une réflexion globale sur les indemnités versées aux parlementaires. Je ne méconnais pas l'intérêt de mener une réflexion partagée sur ce sujet, mais elle ne peut pas selon moi s'inscrire dans le processus que nous mettons ici en place.

M. Jean Desessard. On vote d’abord, on aura une réflexion après !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 295 et sur les amendements en discussion commune autres que celui qu’elle a elle-même déposé ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Je remercie Mme la garde des sceaux de son intervention, qui permet de nouer publiquement l'accord passé entre la commission des lois et le Gouvernement.

Si nous adoptons le texte proposé par la commission, le bureau de chacune des deux assemblées décidera des modalités de la prise en charge des frais de mandat. Il aura le choix entre trois formules : le remboursement, la prise en charge directe ou l'avance. Dans les trois cas, des justificatifs devront être produits. Ce n’est que lorsque le bureau de chacune des deux assemblées aura décidé des modalités de la répartition des prises en charge entre les trois formules que nous serons en mesure d'évaluer réellement les coûts de gestion pour nos assemblées. Actuellement, comme nul ne sait quelles décisions les bureaux des assemblées prendront, il n'est pas possible de dire de façon sûre et objective quels seront ces coûts.

Toutefois, il est évident que passer, comme cela pourrait être le cas dans une entreprise, d'un système de forfait à un système de prise en charge sur justificatifs a un coût. Aujourd'hui, les coûts de gestion sont assumés, en réalité, par le biais du temps de travail du parlementaire ou de l'un de ses collaborateurs ; demain, c’est l'administration du Sénat ou de l'Assemblée nationale qui les prendra en charge. C’est bien entendu un point négatif, mais le simple fait de changer de régime postule une dépense que nous ne pouvons pas actuellement évaluer.

Le sous-amendement très ingénieux de notre collègue questeur Jean-Léonce Dupont, qui vise en réalité peu ou prou à rétablir la rédaction initialement proposée par la commission des lois, ne soulève pas, sur son principe, d'objections de fond. Cependant, en n’explicitant pas ce que recouvre la notion de prise en charge, comme nous avons précisément voulu le faire pour rassurer le Gouvernement, il ne nous garantit pas un accord avec celui-ci. De toute façon, que nous adoptions ou non le sous-amendement n° 295, la question des coûts de gestion, excellemment exposée par notre collègue, se posera dans les conditions que j'ai indiquées, c'est-à-dire ultérieurement à la décision du bureau de chacune des assemblées qui mettra en place le nouveau système, dans un délai d’ailleurs très court.

Par conséquent, la commission des lois ne peut pas accepter ce sous-amendement. Certes, son dispositif est proche de la rédaction que nous avions initialement proposée, mais notre position a précisément évolué pour garantir un accord entre notre assemblée et le Gouvernement, sans que nous ayons eu à modifier le moins du monde ce que nous entendions par les termes « prise en charge ».

Concernant l’amendement n° 159, je voudrais remercier nos collègues questeurs Jean-Léonce Dupont, Bernard Saugey et Dominique Bailly de mener depuis très longtemps une réflexion approfondie sur la question des indemnités des parlementaires. Je partage entièrement les observations formulées par Mme la garde des sceaux : il faut du courage pour poser ainsi devant les Français le problème de la rémunération de leurs élus nationaux, de leurs représentants qui expriment la souveraineté du peuple français ; leur initiative ne doit pas rester sans suite.

Pour ma part, je souhaite vivement que cette question puisse être abordée selon des modalités de nature à faire participer nos concitoyens à la réflexion. Rien ne serait pire que de décider nous-mêmes du montant de nos rémunérations, car il appartient aux Français de dire quelle valeur ils attachent au travail de leurs représentants, comment ils les situent dans la hiérarchie professionnelle de notre pays et par rapport aux parlementaires des autres grands pays européens. J’ai moi-même fait un certain nombre d'investigations dans ce domaine, et je dois dire que nos concitoyens ne sont pas conscients du fait que l'indemnité parlementaire n'est nullement exorbitante au regard des revenus des parlementaires d’autres pays ou des cadres de la nation française. Je tenais à le dire, comme l’a fait à très juste titre notre collègue Jean-Léonce Dupont. Il faut trouver les modalités adéquates pour engager cette réflexion qui, je le répète, doit être partagée par nos concitoyens. Cette question ne doit plus être un tabou dans la société française.

Néanmoins, puisque je propose, en accord avec le Gouvernement, un autre système de prise en charge des frais de mandat que l'incorporation de l'indemnité représentative de frais de mandat aux revenus du parlementaire, je ne puis approuver cet amendement, d'autant que, comme je l'ai dit à l'instant, si des évolutions doivent intervenir, elles doivent être préparées en associant les Français à une réflexion en profondeur.

Enfin, je ne puis non plus, bien entendu, émettre un avis favorable sur les autres amendements.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.

M. Michel Mercier. Nous demandons une suspension de séance de quelques minutes, monsieur le président.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 295.

M. Jean-Léonce Dupont. Avant tout, je veux souligner que, objectivement, compte tenu de la nécessité de recruter quarante fonctionnaires par concours et de trouver des locaux, rendre le dispositif effectif au 1er janvier 2018 sera extrêmement difficile. Madame la garde des sceaux, on parle souvent d’études d’impact et d’évaluation des conséquences des mesures adoptées. Votons donc des dispositions réalistes ! En l’occurrence, mettre en œuvre le dispositif tel qu’il est conçu au 1er janvier prochain, comme cela est prévu, sera, à mon avis, formidablement compliqué.

Par ailleurs, si le Gouvernement ne soutenait pas l’amendement de la commission, j’aurais invoqué l’article 40, car, en réalité, nous sommes en train d’organiser une dépense publique supplémentaire de l’ordre, pour le seul Sénat, de 4,5 millions d’euros, et sans doute de plus de 10 millions d’euros pour les deux assemblées.

Enfin, il n’y a pas trois modes de prise en charge, comme il a été dit, mais deux : la prise en charge directe et le remboursement sur justificatifs. Une avance n’est pas une prise en charge : il faudra produire une facture pour la renouveler.

Nous sommes tous vigilants sur les dépenses publiques. En particulier, le bureau du Sénat – je le dis avec fierté en tant que questeur – a mis en place des économies de fonctionnement et géré la masse salariale avec une attention toute particulière. Or voici que nous sommes en train d’aller à rebours de la politique que nous menons, avec difficulté, depuis plusieurs années ! C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter le sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. Au-delà du sous-amendement, cette explication de vote portera sur l’économie générale de la réforme de l’IRFM. Je commencerai par poser deux préalables.

D’abord, nous savons bien qu’il y a dans ce projet de loi deux symboles : les emplois familiaux et l’IRFM. S’agissant des premiers, on a vu les dégâts qu’un vote un peu hâtif a provoqués dans l’opinion publique…

Ensuite, madame la garde des sceaux, il faut mesurer dans quel état d’esprit se trouvent les parlementaires, souvent excédés par le fait que, quelques efforts que nous fassions, nous encourons toujours les mêmes critiques. En effet, ceux qui prétendent vouloir laver plus blanc plus blanc sont souvent animés par une forme d’antiparlementarisme, qui, en fait, va jusqu’au populisme. (M. Rémy Pointereau opine.)

J’ai un profond respect pour Jean-Léonce Dupont et le travail qu’il mène avec les autres questeurs, mais je ne voterai pas son sous-amendement, parce que l’amendement de la commission me paraît atteindre un point d’équilibre, dans la mesure où il concilie deux objectifs importants : la modernisation de l’IRFM et le respect de l’autonomie des assemblées.

Que cela plaise ou non, la modernisation de l’IRFM passe par le remplacement d’un système forfaitaire par un système, assurément beaucoup plus lourd – Jean-Léonce Dupont a raison sur ce point –, de prise en charge sur justificatifs. Jamais je n’aurais accepté cette modernisation si, en contrepartie, elle n’avait ouvert la voie à une simplification pour les parlementaires, par exemple par la prise en charge directe par le Sénat de dépenses récurrentes. Jamais non plus je ne l’aurais acceptée si elle avait impliqué que nous consentions une avance massive, sur nos deniers, de nos frais de mandat.

Quant à l’autonomie des assemblées, elle est préservée par le système proposé par le président de la commission des lois, puisque la décision finale appartiendra – j’y insiste – aux bureaux des deux chambres. D’ailleurs, le refus d’accorder un droit de regard à l’administration fiscale signifie bien qu’il ne s’agit aucun cas de revenir sur le principe de l’autonomie des assemblées, traduction de la séparation des pouvoirs.

Mes chers collègues, l’élaboration de la loi est un exercice à trois acteurs : les deux assemblées et le Gouvernement. Nous pouvons certes voter ce que nous estimons juste et bon, mais, en l’absence d’accord avec l’Assemblée nationale et le Gouvernement, nous n’obtiendrons pas ce que nous voulons et nous devrons endosser le mauvais rôle.

Je redis mon immense respect pour Jean-Léonce Dupont, qui a eu le grand courage d’affirmer qu’il faut, en matière de rémunérations, faire des comparaisons…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Bruno Retailleau. … avec la fonction publique et les parlementaires d’autres pays. Les Français sauront ainsi que leurs députés et sénateurs, qui supportent des charges souvent extrêmement lourdes, ne sont pas les mieux payés au monde. Nous serions tout à fait favorables à un alignement sur bien des régimes de la fonction publique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées du groupe Union Centriste. – Mmes Delphine Bataille, Patricia Schillinger et Françoise Laborde applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Les élus, de droite comme de gauche, en ont ras le bol du populisme et de l’antiparlementarisme qui les frappent depuis des mois. La situation est encore moins acceptable quand les attaques viennent d’autres élus. En même temps, nous savons très bien que, aujourd’hui, les citoyens exigent une transparence accrue.

Je veux réaffirmer très solennellement que les élus sont des femmes et des hommes honnêtes, qui font leur travail et qu’ils n’ont pas à subir un climat de suspicion généralisée. Nous devons le dire, sur toutes les travées, non parce que nous nous serrerions les coudes quand nous sommes attaqués, mais parce que c’est la réalité !

M. Claude Kern. Absolument !

M. Didier Guillaume. Chaque fois que certains prennent des chemins de traverse, tout le monde est montré du doigt. Nous n’avons de cesse de répéter, depuis des années, qu’il ne faut pas faire des lois de circonstance, en fonction de l’actualité.

Ce projet de loi avait été annoncé lors de la campagne présidentielle par le candidat élu. Nous savions donc que l’on irait dans cette direction. Nous y sommes favorables, sous réserve de ce que je viens de dire et sous réserve que l’on affirme clairement que cet effort de transparence, indispensable, ne vise pas à revenir sur des pratiques passées négatives. En effet, au Sénat, nous dépensons l’IRFM selon les règles que le président Bas a évoquées, ainsi que nous l’expliquons dans nos départements chaque fois que nous sommes interrogés sur le sujet.

Notre groupe est donc favorable à la suppression de l’IRFM telle qu’elle existe aujourd’hui, parce qu’il faut plus de transparence, mais, au bout du compte, ce que nous faisons ne suffira jamais : on nous en demandera toujours plus.

Jean-Léonce Dupont et les deux autres questeurs ont proposé de fiscaliser tout euro perçu par les parlementaires après déduction des frais. Pourquoi pas ? La solution de consensus qui se dessine recueille l’accord du Gouvernement. Cet accord était indispensable, car je pense que, sans lui, nous sénateurs aurions emprunté des chemins différents.

Toujours est-il, madame la garde des sceaux, que le dispositif initial du Gouvernement était tout simplement inapplicable, parce qu’il a été conçu par des gens qui ne connaissent pas la réalité de la vie parlementaire !

En effet, on ne peut pas comparer un parlementaire avec un commercial ou un chef d’entreprise : eux n’ont pas de frais fixes, se font rembourser des repas et des nuits d’hôtel ; pour notre part, nous payons des permanences et des contrats d’entretien, nous supportons des frais fixes à hauteur de 2 000, 3 000, parfois 3 500 euros par mois ! Quel cadre d’entreprise accepterait que les avances sur frais professionnels représentent jusqu’à 75 % ou 80 % de son salaire ?

Dans ces conditions, l’amendement n° 294, qui a reçu, je crois, l’accord de tous les membres de la commission des lois, nous convient : l’IRFM sera supprimée, le remboursement des frais se fera sur présentation de justificatifs. Il faudra que le règlement de notre assemblée prévoie la possibilité de prises en charge directes, pour permettre aux sénateurs d’exercer leur mandat dans la sérénité.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Didier Guillaume. Je conclus, monsieur le président, mais le sujet est d’importance !

Si nous parvenons à cet équilibre, je pense que nous aurons fait œuvre utile pour nos concitoyens, qui verront que nous sommes favorables à la transparence. Il faudra ensuite que, députés et sénateurs, nous parlions d’une seule voix et clairement face à ceux qui nous montrent toujours du doigt, parce qu’il y a des choses qui ne sont pas acceptables ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Delphine Bataille, pour explication de vote.

Mme Delphine Bataille. Nous tenons à saluer le travail de concertation et de dialogue mené par la commission des lois, en particulier par son rapporteur, avec Mme la garde des sceaux.

Monsieur le rapporteur, vous avez rappelé fort utilement les raisons pour lesquelles il était indispensable de trouver un point d’équilibre ici au Sénat. Je crois que nous sommes parvenus à une rédaction qui satisfait, sinon l’ensemble, du moins la majorité d’entre nous. C’est un très bel exemple des compromis efficaces que le Sénat est capable d’élaborer pour améliorer utilement un texte.

Conformément à vos vœux, madame la garde des sceaux, l’IRFM sera effectivement supprimée, mais le nouveau dispositif comportera la souplesse nécessaire, puisqu’une possibilité de prise en charge directe pourra être prévue par le bureau de chacune des assemblées, dans la limite des plafonds déterminés.

Au total, l’objectif de transparence que nous nous étions fixé sera atteint, et les attentes exprimées par nombre de nos concitoyens seront satisfaites. C’est pourquoi les membres du groupe La République en marche voteront l’amendement de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 295.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 110 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 321
Pour l’adoption 10
Contre 311

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur l’amendement n° 294.

M. Michel Mercier. Je n’ai pas souhaité prendre la parole pour explication de vote sur le sous-amendement, mais, maintenant que nous arrivons au cœur du sujet, je tiens à expliquer la position de la majorité des membres de mon groupe.

Cette affaire de l’IRFM est empoisonnée, et l’on ne sait comment la prendre.

Si l’IRFM existe, c’est aussi, d’une certaine façon, le fruit de notre faiblesse : nous n’avons pas su ou voulu, à un moment où il aurait fallu le faire, décider quelle devrait être la rémunération d’un parlementaire. Madame la garde des sceaux, vous nous avez annoncé que vous étiez prête à faire cette étude. C’est une bonne chose, et nous souhaitons que vous persévériez ! Si l’IRFM existe, c’est parce que l’on ne voulait pas toucher à ce sujet. Puis l’IRFM est devenue trop importante, et il faut maintenant trouver une solution. Celle qu’a proposée Jean-Léonce Dupont tient la route ; elle a d’ailleurs été avancée pendant la campagne électorale, de sorte qu’il n’y a pas de honte à l’avoir de nouveau présentée, d’autant qu’elle est le fruit d’un gros travail.

Reste que cette affaire est uniquement politique, et n’a rien à voir avec des considérations d’efficacité, de coût, etc. Je m’en tiendrai donc à ce niveau pour expliquer pourquoi nous voterons majoritairement l’amendement présenté par Philippe Bas au nom de la commission des lois.

Notre position tient simplement au fait que cet amendement correspond, comme il a déjà été dit, à un accord politique passé avec le Gouvernement et que Mme la garde des sceaux s’est engagée à défendre devant l’Assemblée nationale le texte que le Sénat s’apprête à voter. Cela clôt le débat sur ce sujet. (M. Vincent Capo-Canellas applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, pour explication de vote.

M. Jean-Léonce Dupont. Je n’insisterai pas sur le fait que nous allons voter une dépense supplémentaire de 10 millions d’euros pour les deux chambres…

Vous pensez avoir réglé le problème ; je fais, moi, le pari que ce n’est pas le cas et que, d’ici à trois ou cinq ans, vous serez interrogés sur les règles de déductibilité mises en place par le bureau et sur leur applicabilité.

Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois. C’est certain !

M. Jean-Léonce Dupont. Le système que nous proposions avait, lui, le mérite de régler la question définitivement.

En ce qui concerne l’accord politique et la compréhension de cet accord par le grand public, j’ai écouté avec une grande attention Bruno Retailleau, pour lequel j’ai moi aussi un profond respect. Nous devons nous garder d’endosser le mauvais rôle, a-t-il dit. C’est évidemment un aspect à prendre en compte, mais ma démarche est un peu différente : je voudrais que, dans notre assemblée comme dans le pays, nous nous efforcions plutôt de trouver les bonnes, les vraies solutions, pas les solutions de l’instant, celles qui émergent d’un contexte d’émotion et ne paraissent satisfaisantes que sur le moment.

Mes chers collègues, j’aimerais que nous ayons la capacité, le courage de nous attacher à résoudre vraiment et durablement les problèmes, quitte à accepter d’être confrontés, dans un premier temps, à l’incompréhension publique. (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Union Centriste et sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 111 :

Nombre de votants 334
Nombre de suffrages exprimés 323
Pour l’adoption 313
Contre 10

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements nos 33 rectifié bis, 159, 20 rectifié, 214 et 213 n’ont plus d'objet.

Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces deux derniers amendements.

L'amendement n° 214, présenté par le Gouvernement, était ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

prise en charge

par le mot :

remboursement

L'amendement n° 213, présenté par le Gouvernement, était ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa et deux paragraphes ainsi rédigés :

« Les limites et conditions de déduction prévues au troisième alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale sont applicables aux sommes mentionnées au premier alinéa du présent article. »

… - Le second alinéa du 1° de l’article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même des frais de mandat remboursés dans les conditions prévues à l’article 4 sexies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. »

… – Au a du 3° du II de l’article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « l’indemnité représentative de frais de mandat, au plus égale au montant brut cumulé des deux premières et versée à titre d’allocation spéciale pour frais par les assemblées à tous leurs membres, » sont supprimés.

Mes chers collègues, si nous faisons preuve d’un peu de concision, nous devrions pouvoir achever l’examen des titres IV et IV bis au plus tard à vingt et une heures, ce qui serait raisonnable.

Demande de priorité
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Articles additionnels après l’article 7 bis (précédemment réservés)

Article 7 bis (nouveau) (précédemment réservé)

I. – Au premier alinéa de l’article 80 undecies du code général des impôts, après le mot : « précitée », sont insérés les mots : «, les indemnités de fonction complémentaires versées en vertu d'une décision prise par le bureau de chaque assemblée ».

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2018. – (Adopté.)

Article 7 bis (nouveau) (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article additionnel avant l’article 7 ter (précédemment réservé)

Articles additionnels après l’article 7 bis (précédemment réservés)

M. le président. L'amendement n° 96, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Après l’article 7 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant 31 décembre 2017, un rapport sur l’opportunité et les modalités de création d’un statut de l’élu.

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre …

Dispositions relatives à la démocratisation de la vie publique

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Alors que nous tentons aujourd'hui de redonner confiance dans l’action publique, il est nécessaire de rappeler que l’immense majorité de nos concitoyens n’a pas accès aux responsabilités qui permettent de participer à l’exercice de cette action publique : c’est certainement l’une des causes de leur défiance.

Notre amendement a pour objet de mettre en œuvre un statut de l’élu qui garantisse le pluralisme et la diversité sociale, professionnelle, culturelle des assemblées locales et nationales, qui animent la vie démocratique de notre pays.

Il suffit de jeter un coup d’œil rapide sur les profils socioprofessionnels des maires des grandes villes, des présidents des collectivités territoriales, des sénateurs et députés pour s’apercevoir que nous sommes aujourd'hui bien éloignés d’une telle diversité.

En ce qui concerne l’Assemblée nationale nouvellement élue, 80 % de ses membres sont diplômés de l’enseignement supérieur, contre 28 % des Français, si bien que les 22 % de travailleurs non qualifiés que compte notre pays ne sont aucunement représentés. De même, il y a aujourd'hui moins de 3 % d’employés et d’ouvriers dans les deux assemblées, alors que ceux-ci constituent la majorité des actifs.

Dans le même temps, environ 200 députés sont actionnaires, chefs d’entreprise ou gérants de sociétés. S’ils sont aussi nombreux, c’est notamment parce qu’ils maîtrisent davantage leur emploi du temps et qu’il leur est plus facile de cesser, complètement ou partiellement, leur activité professionnelle durant leur mandat. Pour les salariés, cela est bien plus difficile : il y a là une véritable inégalité de droits !

Nous voulons conférer les mêmes droits à tous au travers de l’inscription dans la loi d’un statut de l’élu, qui comporterait des dispositifs comme le droit d’absence, les crédits d’heures et les congés formation, de nature à permettre à l’élu d’exercer son mandat sans être obligé de démissionner et sans craindre de compromettre son avenir professionnel ou sa carrière.

Le vrai renouveau de la politique serait de permettre l’émergence d’une République populaire en assurant une représentation fidèle de la société telle qu’elle est aujourd'hui. Nous proposons de faire un geste en ce sens en prévoyant la remise d’un rapport sur la création de ce statut de l’élu dont nous avons réellement besoin !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 204 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Archimbaud et Bouchoux, est ainsi libellé :

Après l’article 7 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié

1° Le III. de l’article L. 2123-20-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ce tableau contient également l’ensemble des rémunérations et indemnités de fonctions des membres du conseil municipal qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société. » ;

2° L’article L. 3123-18 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations et indemnités de fonctions des conseillers départementaux qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société sont publiées sur le site internet du conseil départemental, dans un format ouvert et aisément réutilisable. » ;

3° L’article L. 3632-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations et indemnités de fonctions des conseillers de la métropole qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société sont publiées sur le site internet la métropole de Lyon, dans un format ouvert et aisément réutilisable. » ;

4° L’article L. 4135-18 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations et indemnités de fonctions des conseillers régionaux qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société sont publiées sur le site internet du conseil régional, dans un format ouvert et aisément réutilisable. » ;

5° L’article L. 7125-21 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations et indemnités de fonctions des conseillers à l’assemblée de Guyane qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société sont publiées sur le site internet de la collectivité territoriale de Guyane, dans un format ouvert et aisément réutilisable. » ;

6° L’article L. 7227-22 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les rémunérations et indemnités de fonctions des conseillers à l’assemblée de Martinique qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société sont publiées sur le site internet de la collectivité territoriale de Martinique, dans un format ouvert et aisément réutilisable. »

II. – Le dernier alinéa de l’article L. 123-4-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toute délibération du conseil municipal concernant les indemnités de fonction d’un ou de plusieurs de ses membres est accompagnée d’un tableau annexe récapitulant l’ensemble des indemnités allouées aux autres membres du conseil municipal.

« Ce tableau contient également l’ensemble des rémunérations et indemnités de fonctions des membres du conseil municipal qui siègent au titre de leur mandat au conseil d’administration d’un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ou qui président une telle société. »

III. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2018.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à enrichir le code des collectivités territoriales en prévoyant la publicité de l’ensemble des rémunérations des élus locaux siégeant au conseil d’administration d’un établissement public local ou du Centre national de la fonction publique territoriale, ou encore au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale. Ainsi, on ferait la transparence sur les rémunérations de l’ensemble des élus, qu’ils soient municipaux, communautaires, métropolitains, départementaux ou régionaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable également.

M. Joël Labbé. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 204 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 285, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Après l’article 7 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 8 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 8-1 ainsi rédigé :

« Art. 8-1. – I. – Avant la nomination de tout membre du Gouvernement, le président de la République peut solliciter, à propos de la personne dont la nomination est envisagée, la transmission :

« 1° Par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, d’une attestation indiquant, à cette date et en l’état des informations dont dispose la Haute Autorité, si cette personne a, le cas échéant, satisfait ou non aux obligations de transmission d’une déclaration d’intérêts et d’activités, d’une déclaration d’intérêts ou d’une déclaration de situation patrimoniale et à la justification des mesures prises pour gérer ses instruments financiers dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part ainsi que si cette personne se trouve dans une situation pouvant constituer un conflit d’intérêts et les mesures nécessaires pour prévenir ou faire cesser immédiatement ce conflit d’intérêts ;

« 2° Par l’administration fiscale, d’une attestation constatant si, à cette date et en l’état des informations dont dispose l’administration fiscale, elle satisfait ou non, aux obligations de déclaration et de paiement des impôts dont elle est redevable.

« Est réputée satisfaire aux obligations de paiement mentionnées au 2° la personne qui a, en l’absence de toute mesure d’exécution du comptable, acquitté ses impôts ou constitué des garanties jugées suffisantes par le comptable, ou, à défaut, conclu un accord contraignant avec le comptable en vue de payer ses impôts, ainsi que les éventuels intérêts échus, pénalités ou amendes, à condition qu’elle respecte cet accord.

« L’attestation mentionnée au 2° ne constitue pas une prise de position formelle de l’administration fiscale sur la situation fiscale de la personne.

« II. – Lorsqu’il s’agit d’un autre membre du Gouvernement, le Premier ministre est également destinataire des informations transmises en application du I. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

TITRE …

DISPOSITIONS RELATIVES À LA NOMINATION DES MEMBRES DU GOUVERNEMENT

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. L’usage semble s’être récemment établi que le Président de la République demande des informations à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et à l’administration fiscale sur la situation de personnalités pressenties pour entrer au Gouvernement, au regard de la loi fiscale, d’une part, et d’une éventuelle prise d’intérêt dans certains domaines d’activité, d’autre part.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ne dispose que des compétences que lui attribue le législateur. Après examen attentif des textes, j’ai constaté qu’il n’existait aucune disposition permettant au Président de la République de demander et d’obtenir des informations de cette nature, ni aucune disposition autorisant le président de cette autorité à répondre à une telle demande – informelle, bien entendu – du Président de la République. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui se doit d’être indépendante de tous les autres pouvoirs, ne peut évidemment délivrer des informations que si la loi le prévoit.

Quant à l’administration fiscale, elle peut opposer le secret fiscal à toute personne, fût-elle le Président de la République. On ne voit pas comment elle pourrait fournir à ce dernier des informations sur le dossier fiscal d’une personnalité pressentie pour entrer au Gouvernement.

Ces informations que la presse a rapportées n’ont évidemment pas été confirmées par le chef de l’État ni par le Premier ministre, mais il suffit qu’elles aient été rendues publiques pour que je me préoccupe du respect des règles de notre État de droit. Je ne considère pas illégitime que le chef de l’État prenne des renseignements sur des personnalités qu’il pressent pour entrer au Gouvernement, encore convient-il qu’il le fasse dans le respect scrupuleux de l’État de droit, sans avoir à demander en toute opacité une faveur à l’administration fiscale ou à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

C'est la raison pour laquelle j’ai songé à donner une base légale à cette demande d’information du Président de la République ou du Premier ministre. De son côté, le Gouvernement a certainement vu de l’intérêt à ma proposition, puisqu’il présente un amendement proche : la différence tient à ce que ce dernier tend à écarter les dispositions concernant l’administration fiscale. Pour ma part, je considère que le secret fiscal est opposable au Président de la République et qu’il convient donc d’instaurer une base légale permettant de déroger à ce principe.

M. le président. L'amendement n° 223 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 7 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 10 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 10 ter ainsi rédigé :

« Art. 10 ter  Le Président de la République et le Premier ministre peuvent demander à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique si les informations dont elle dispose font apparaître un risque de conflit entre les intérêts d’une personne et certaines des responsabilités susceptibles de lui être confiées, si elle était nommée membre du Gouvernement. Cette demande s’exerce sans préjudice de la procédure de vérification prévue à l’article 9. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Après avoir écouté le président Bas, je me rallie à sa proposition de créer une telle base légale, y compris en ce qui concerne l’administration fiscale.

Le Gouvernement retire donc son amendement au profit de celui de la commission.

M. Philippe Bas, rapporteur. Merci, madame la ministre !

M. le président. L’amendement n° 223 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 285.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 bis.

TITRE IV bis (précédemment réservé)

DISPOSITIONS RELATIVES À LA SITUATION FISCALE DES MEMBRES DU GOUVERNEMENT (Division et intitulé nouveaux)

Articles additionnels après l’article 7 bis (précédemment réservés)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé) (début)

Article additionnel avant l’article 7 ter (précédemment réservé)

M. le président. L'amendement n° 286, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Avant l'article 7 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un décret en Conseil d’État définit les conditions de prise en charge des frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement, dans la limite de plafonds qu’il détermine et sur présentation de justificatifs de ces frais.

II. – En conséquence, rédiger ainsi l'intitulé du titre IV bis :

Dispositions relatives aux frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement ainsi qu'à leur situation fiscale

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. On s’est beaucoup intéressé ce soir aux frais de mandat des parlementaires. Il n’est donc pas inconvenant de s’intéresser aussi un peu aux frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement ! (M. Jean-Pierre Sueur rit.)

Cet amendement tend à prévoir qu’un décret en Conseil d’État – soucieux de l’autonomie du pouvoir exécutif, je n’entends pas définir ce dispositif dans la loi – établira les conditions de prise en charge des frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement, dans la limite de plafonds qu’il déterminera et sur présentation de justificatifs de ces frais, ce qui paraît aller de soi !

Je ne vois pas pourquoi les exigences qui s’imposent aux parlementaires ou qui s’imposeront à eux du fait de l’adoption du texte que nous examinons ne devraient pas également s’imposer aux membres du Gouvernement. En effet, si les parlementaires sont susceptibles de commettre des abus, les membres du Gouvernement sont bien davantage exposés à des dérives, compte tenu de l’importance – et je parle d’expérience ! – des frais de représentation accordés à chaque ministère.

L’adoption de l’amendement entraînerait l’introduction d’un nouveau titre dans le projet de loi, intitulé : « Dispositions relatives aux frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement ainsi qu'à leur situation fiscale ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Pour que nos relations restent saines et vivifiantes, il faut que nous ayons parfois des désaccords, monsieur le président Bas ! (Sourires.)

Nous en avons un en l’occurrence. Il me semble d’abord qu’une disposition législative qui viserait à réglementer les frais de réception et de représentation des membres du Gouvernement serait contraire au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs. Par ailleurs, je ne vois pas très bien ce que sont les frais de représentation ministérielle…

M. Philippe Bas, rapporteur. Moi, je le sais !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Dans ce cas, vous me l’expliquerez. Étant très jeune ministre, je ne vois pas de quoi il s’agit.

Les dépenses qui sont strictement liées à l’exercice des fonctions ministérielles, notamment les frais de réception, de représentation ou de déplacement, sont prises en charge par l’État, à l’exclusion de toutes les dépenses à caractère personnel des ministres. Elles font l’objet d’un contrôle de gestion approfondi pour répondre aux exigences de transparence et de rigueur budgétaire.

En outre, il faut rappeler que les membres du Gouvernement qui sont logés par l’État doivent déclarer, conformément aux règles du code général des impôts, l’avantage en nature qui correspond à la valeur locative du logement qu’ils occupent.

Les garanties de transparence et de contrôle budgétaire me semblent donc assez fortes en la matière. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 286.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 7 ter.

Article additionnel avant l’article 7 ter (précédemment réservé)
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Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé) (interruption de la discussion)

Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé)

À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article 9 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, les mots : « de l’impôt sur le revenu et, le cas échéant, de l’impôt de solidarité sur la fortune » sont remplacés par les mots : « des impositions de toute nature dont ils sont redevables ». – (Adopté.)

Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé) (début)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 13

5

Candidature à un office parlementaire

M. le président. J’informe le Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques en remplacement de M. Patrick Abate, dont le mandat a cessé.

Cette candidature va être publiée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.)

PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

6

Nomination d’un membre d’un office parlementaire

Mme la présidente. Je rappelle au Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a présenté une candidature pour l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame Mme Christine Prunaud membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, en remplacement de M. Patrick Abate dont le mandat a cessé.

7

Rétablissement de la confiance dans l'action publique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission et adoption du projet de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, dans le texte de la commission.

projet de loi pour la régulation de la vie publique (suite)

Mme la présidente. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 13.

TITRE VI

DISPOSITIONS RELATIVES AUX REPRÉSENTANTS AU PARLEMENT EUROPÉEN

Article 7 ter (nouveau) (précédemment réservé) (interruption de la discussion)
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Article 14

Article 13

I. – Le 1° du I de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est complété par les mots : « , dont la déclaration d’intérêts indique, outre les éléments mentionnés au III du même article 4, les participations directes ou indirectes détenues à la date de leur entrée en fonctions qui leur confèrent le contrôle d’une société dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil ».

II. – La loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen est ainsi modifiée :

1° Après l’article 5-2, il est inséré un article 5-3 ainsi rédigé :

« Art. 5-3. – L’administration fiscale transmet au représentant au Parlement européen, dans le mois suivant la date de son entrée en fonctions, une attestation constatant s’il a satisfait ou non, à cette date et en l’état des informations dont dispose l’administration fiscale, aux obligations de déclaration et de paiement des impôts dont il est redevable. Est réputé satisfaire à ces obligations de paiement le représentant qui a, en l’absence de toute mesure d’exécution du comptable, acquitté ses impôts ou constitué des garanties jugées suffisantes par le comptable, ou, à défaut, conclu un accord contraignant avec le comptable en vue de payer ses impôts, ainsi que les éventuels intérêts échus, pénalités ou amendes, à condition qu’il respecte cet accord.

« L’attestation mentionnée au premier alinéa ne constitue pas une prise de position formelle de l’administration fiscale sur la situation fiscale du représentant au Parlement européen.

« Le représentant au Parlement européen est invité, le cas échéant, par l’administration fiscale à présenter ses observations et à se mettre en conformité avec les obligations fiscales mentionnées au premier alinéa dans un délai d’un mois à compter de la réception de cette invitation.

« Si le représentant au Parlement européen ne satisfait pas aux obligations mentionnées au premier alinéa au terme de ce délai et que cette situation ne résulte d’aucune contestation dont est saisi le juge, l’administration fiscale informe le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

« Si le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique constate que le représentant au Parlement européen n’est pas en conformité avec les obligations mentionnées au premier alinéa, il saisit le Conseil d’État qui peut prononcer la déchéance du mandat de représentant au Parlement européen en cas de manquement d’une particulière gravité aux obligations mentionnées au premier alinéa. » ;

2° L’article 6 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, après les mots : « à l’alinéa précédent », sont insérés les mots : « , hormis ceux mentionnés aux 1° et 2° de l’article LO 146-2 du même code, » ;

b) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au plus tard trois mois après son entrée en fonctions ou, en cas de contestation de son élection, de la date de la décision du Conseil d’État statuant au contentieux, le représentant au Parlement européen qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés aux 1° et 2° de l’article LO 146-2 du code électoral se met en conformité avec ce même article, soit en cédant tout ou partie de la participation, soit en prenant les dispositions nécessaires pour que tout ou partie de celle-ci soit gérée, pendant la durée de son mandat, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. » ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « l’un et l’autre » sont remplacés par les mots : « tous ces » ;

3° Le premier alinéa de l’article 26 est ainsi rédigé :

« La présente loi, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … pour la régulation de la vie publique, est applicable : ».

III. – Le 1° du II est applicable aux mandats en cours à la date de promulgation de la présente loi.

L’administration fiscale dispose d’un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi pour transmettre l’attestation prévue par ces dispositions. Cette attestation constate la situation fiscale à la date de promulgation de la présente loi.

IV. – Le présent article est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

Mme la présidente. L’amendement n° 198 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’article 12 de la loi n° 2013-907 précitée est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« … – Les déclarations de situation patrimoniale déposées par les représentants français au Parlement européen sont, dans les limites définies au III de l’article 5, rendues publiques par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

« Ces déclarations de situation patrimoniale sont, aux seules fins de consultation, tenues à la disposition des électeurs inscrits sur les listes électorales à la préfecture de Paris.

« Ces électeurs peuvent adresser à la Haute Autorité toute observation écrite relative aux déclarations qu’ils ont consultées. »

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Cet amendement vise à organiser la publication des déclarations de situation patrimoniale des représentants français au Parlement européen. Actuellement, ces déclarations sont envoyées à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, mais ne font l’objet d’aucune publication.

Si le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2013-676-DC, avait censuré la publication des déclarations d’élus locaux, il ne s’est pas prononcé sur la publication de celles des représentants au Parlement européen. La publicité se ferait auprès de la préfecture de Paris, dans les mêmes conditions que pour les sénateurs et députés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, rapporteur. Sagesse.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Avis défavorable. Il nous semble que la publicité des déclarations d’intérêts est suffisante.

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Avec un avis de sagesse du rapporteur, je me disais que la soirée commençait bien… (Sourires.)

Il n’y a aucune raison que les déclarations de situation patrimoniale des députés et des sénateurs soient publiées et pas celles des députés européens. Je maintiens l’amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 198 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 222, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« En l'absence de mise en conformité, le Conseil d’État statuant au contentieux, saisi par le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique informé par l'administration fiscale, peut constater l'inéligibilité du représentant au Parlement européen concerné pour une durée maximale de trois ans et mettre fin à son mandat par la même décision : » ;

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Compte tenu de la possibilité offerte aux parlementaires européens en retard de déclaration et de paiement de se mettre en conformité avec leurs obligations fiscales sur invitation expresse de l’administration fiscale, il n’est pas justifié, en cas de manquement persistant, de réduire le champ d’application de la démission d’office aux seuls manquements caractérisés par une particulière gravité. Il n’y a pas lieu non plus de donner au bureau de chaque assemblée un pouvoir d’appréciation du manquement. Au demeurant, la suppression du critère de particulière gravité n’empêchera pas le Conseil d’État d’exercer un contrôle de proportionnalité de la sanction.

C’est la raison pour laquelle nous souhaitons rétablir le dispositif de contrôle juridictionnel et de sanction proposé par le Gouvernement, en l’assortissant d’une sanction d’inéligibilité de trois ans.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 293, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Amendement n° 222, alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

Après le mot :

peut

rédiger ainsi la fin de l'alinéa :

constater, en fonction de la gravité du manquement aux obligations mentionnées au premier alinéa, l'inéligibilité du représentant au Parlement européen concerné pour une durée maximale de trois ans et mettre fin à son mandat par la même décision. » ;

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 222.

M. Philippe Bas, rapporteur. Puisque nous cherchons à établir pour les députés au Parlement européen un système qui serait l’exacte réplique de celui que nous mettons en place pour les parlementaires français, il importe que le Conseil d’État, tout comme le Conseil constitutionnel, ait la possibilité de porter une appréciation avant de prononcer l’inéligibilité d’un représentant au Parlement européen.

Je souhaite donc conditionner l’avis favorable que j’émets sur l’amendement du Gouvernement à la prise en compte de la gravité du manquement par le Conseil d’État. Alors que nous avions, dans un premier temps, retenu le caractère de particulière gravité, nous abaissons ici le niveau de conditionnalité de l’inéligibilité en ne mentionnant que l’appréciation de la gravité du manquement.

J’espère que le Gouvernement acceptera ce sous-amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable au sous-amendement présenté par la commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 293.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 222, modifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Articles additionnels après l'article 14

Article 14

I. – Dans un délai de trois mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, tout représentant français au Parlement européen complète la déclaration d’intérêts mentionnée au III de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique qu’il a adressée au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, afin d’y faire figurer les éléments prévus au 1° du I de l’article 11 de cette même loi, dans sa rédaction résultant de l’article 13 de la présente loi.

II. – (Supprimé)

III. – Les interdictions mentionnées au 8° de l’article LO 146 du code électoral, dans sa rédaction résultant de l’article 4 de la loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique, aux 1° et 3° de l’article LO 146-1 du même code, dans sa rédaction résultant de l’article 5 de la même loi organique, ainsi que celles mentionnées au premier alinéa et au 2° de l’article LO 146-2 dudit code dans sa rédaction résultant de l’article 6 de ladite loi organique, s’appliquent à tout représentant français au Parlement européen à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.

Tout représentant français au Parlement européen qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité prévus au 8° de l’article LO 146 du code électoral, dans sa rédaction résultant de l’article 4 de la loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique, au 3° de l’article LO 146-1 du même code, dans sa rédaction résultant de l’article 5 de la même loi organique, et au 2° de l’article LO 146-2 dudit code, dans sa rédaction résultant de l’article 6 de ladite loi organique, se met en conformité avec ces dispositions dans un délai de trois mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.

Les représentants français au Parlement européen auxquels l’interdiction prévue à l’article LO 146-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique, n’était pas applicable en application du second alinéa du même article LO 146-1, ne peuvent commencer à exercer une fonction de conseil qui n’était pas la leur avant l’entrée en vigueur de la présente loi.

IV. – Les interdictions mentionnées au 2° de l’article LO 146-1 du code électoral, dans sa rédaction résultant de l’article 5 de la loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique, et au 1° de l’article LO 146-2 du même code, dans sa rédaction résultant de l’article 6 de la même loi organique s’appliquent au représentant français au Parlement européen à compter du prochain renouvellement de celui-ci.

V. – Le présent article est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie. – (Adopté.)

Article 14
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Intitulé du projet de loi

Articles additionnels après l'article 14

Mme la présidente. L’amendement n° 67 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, n’est pas soutenu.

Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 277 rectifié, présenté par MM. Retailleau, Grand, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes et Cuypers, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Fouché, B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa, Frogier et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Gremillet et Grosdidier, Mmes Gruny et Hummel, M. Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, Nougein, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin et Revet, Mme de Rose et MM. Savary, Savin, Vaspart, Vasselle, Vogel et Perrin, est ainsi libellé :

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le 3° est ainsi rédigé :

«  De l’ensemble des députés et sénateurs élus dans le département. » ;

2° L'avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « la commission » sont insérés les mots : « et en accord avec la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés des membres composant la commission » ;

b) Les deuxième et dernière phrases sont supprimées.

La parole est à M. Bruno Retailleau.

M. Bruno Retailleau. Nous abordons ici un point important.

Nous souhaitons aller au-delà de ce que la loi de finances pour 2017 a déjà prévu, à savoir que quatre parlementaires par département puissent participer à la commission, présidée par le préfet, chargée de répartir la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, et de donner un simple avis consultatif sur les projets susceptibles de bénéficier d’une subvention supérieure à 150 000 euros.

Nous sommes un certain nombre ici à bien connaître cette commission locale, qui fixe chaque année les priorités en matière d’opérations, ainsi que les taux plafonds et planchers de subvention. La DETR représente des sommes importantes : son montant annuel s’élève actuellement à 1 milliard d’euros, ce qui n’est pas rien pour nos territoires.

Compte tenu de l’entrée en vigueur de la fameuse loi sur le non-cumul des mandats, nous proposons d’associer plus étroitement et de façon systématique l’ensemble des parlementaires, députés et sénateurs, à cette commission, en leur donnant une voix déterminante. En outre, la commission rendrait un avis décisionnel, et non plus simplement consultatif, à la majorité des trois cinquièmes, et le seuil minimal de 150 000 euros serait supprimé. Ainsi, la commission serait consultée dès le premier euro dépensé pour un projet d’investissement communal.

Cet amendement tire les conséquences de la loi sur le non-cumul des mandats, ainsi que du choix de supprimer ce que l’on appelle la réserve parlementaire. Dans les mois à venir, les parlementaires, notamment les sénateurs, devront étudier tous les moyens propres à les enraciner dans leur territoire en leur donnant la capacité de décider, au côté du préfet en particulier, de l’utilisation de l’argent du contribuable sur le terrain. C’est nous qui votons le budget, il n’y a pas de raison que nous ne soyons pas associés à la prise de ces décisions.

Mme la présidente. L'amendement n° 11 rectifié quater, présenté par MM. Pointereau, de Legge, Commeinhes, Mouiller, Vaspart, Bizet, Pellevat, Chasseing, Lefèvre, Chaize, Vasselle, Rapin, Pierre, Bonhomme, Longuet, Revet, Nougein, Laménie, Gremillet, Raison et Perrin, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le 3° est ainsi rédigé :

«  De l’ensemble des députés et sénateurs élus dans le département. » ;

2° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « par la commission », sont insérés les mots : « et en accord avec les membres composant la commission » ;

b) La dernière phrase est ainsi rédigée :

« La commission est saisie pour avis décisionnel sur tous les projets faisant l’objet d’une subvention. »

La parole est à M. Dominique de Legge.

M. Dominique de Legge. Cet amendement relève du même esprit que le précédent. Je considère qu’il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 181 rectifié, présenté par MM. Doligé et Cardoux et Mme Lopez, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le sixième alinéa de l’article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les parlementaires du département sont membres de droit de la commission, ils ont voix délibérative. En cas de désaccord sur une proposition du représentant de l’État dans le département, les votes ont lieu à la majorité absolue des présents ou représentés. »

La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. Cet amendement complète celui de M. Retailleau, et je le retirerai si ce dernier est adopté.

Les parlementaires sont élus pour cinq ou six ans au minimum, tandis que les préfets ou leurs directeurs de cabinet restent rarement plus de deux ou trois ans dans le département. Dans le mien, j’ai connu cinq préfets en deux ans !

Les préfets président les commissions, mais pour notre part nous connaissons bien nos territoires et nos communes. Il est donc important que les parlementaires puissent être membres de droit de ces commissions et avoir voix délibérative. Je souhaiterais de surcroît que, en cas de désaccord avec une proposition du représentant de l’État, la décision soit prise à la majorité absolue des présents ou représentés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Si nous traitons ici de la dotation d’équipement des territoires ruraux, cela ne signifie certes pas, madame la ministre, que nous serions résignés à ce qu’elle se substitue purement et simplement à la réserve parlementaire.

Nous avons introduit dans le projet de loi organique la création d’une dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements ; nous y tenons tout particulièrement, car en aucun cas la DETR ne peut rendre les mêmes services que cette dotation que nous voulons créer.

Le montant moyen des subventions accordées au titre de la DETR est de 42 477 euros. Celui des subventions aujourd’hui versées par le ministère de l’intérieur au titre de la réserve parlementaire est bien entendu très nettement inférieur – six fois inférieur pour être précis, puisqu’il est très souvent compris entre 6 000 et 8 000 euros, s’agissant de petits projets qui n’entrent pas dans le champ de vision des préfets, fussent-ils assistés d’une commission locale pour distribuer les subventions au titre de la DETR.

Par conséquent, nous voulons à la fois améliorer le fonctionnement de la DETR et établir une nouvelle dotation qui, par souci de transparence, ne permettra pas de financer des associations, dont certaines ressemblent parfois fort à des officines politiques, mais à laquelle seront éligibles les tout petits projets d’équipement ou de travaux ruraux qui étaient jusqu’à présent financés par le biais de la réserve parlementaire.

Je précise cela, mes chers collègues, afin que vous ne vous imaginiez pas que l’avis favorable que je m’apprête à donner à l’amendement présenté par Bruno Retailleau et un grand nombre d’entre nous vaudrait, d’une manière ou d’une autre, renonciation à la création dans la loi organique de la dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements, qui remplira un rôle que la DETR ne pourra jamais remplir.

Cette précision étant apportée, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 277 rectifié et demande le retrait des amendements nos 11 rectifié quater et 181 rectifié. Ces trois amendements se caractérisent par une remarquable convergence. Si j’ai choisi celui de M. Retailleau, c’est parce qu’il m’a paru plus complet et qu’il a reçu le soutien d’un grand nombre de collègues.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur Retailleau, ce sujet constitue pour le Gouvernement une réelle préoccupation, comme j’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises dans cette enceinte et devant différentes commissions.

Nous aurons l’occasion de discuter de nouveau de la solution que vous proposez lors de l’examen du projet de loi organique. En effet, comme l’a souligné M. le président Bas, cette question est tout de même en partie liée à celle de la suppression de la réserve parlementaire, que le Gouvernement demandera.

Sur ce sujet, j’ai pris un certain nombre d’engagements. Ainsi, les sommes aujourd’hui affectés à la réserve parlementaire seront fléchées vers la DETR ou d’autres dispositifs, telle la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement public local.

Pour autant, la proposition que vous faites est extrêmement intéressante, monsieur Retailleau. J’ai moi-même déclaré que, dans le prolongement de la loi adoptée en 2017, il était important que l’ensemble des parlementaires puissent participer à ces commissions. Le dispositif que vous proposez, avec notamment la nécessité de recueillir l’accord d’une majorité des trois cinquièmes, me semble toutefois un peu compliqué et potentiellement source de blocages. C’est la raison pour laquelle il me paraît très difficile de nous engager à ce stade sur un dispositif de cette nature. Je souscris à l’idée directrice qui le sous-tend, mais sa mise en œuvre suppose à mon avis d’approfondir la réflexion. Ce n’est ni le lieu ni le moment : un tel débat relève davantage à mon sens de l’examen du projet de loi organique et de celui du projet de loi de finances.

Encore une fois, je partage votre philosophie sur ce point, monsieur Retailleau, mais, à ce stade, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. Cette question m’inspire plusieurs réflexions.

Tout d’abord, je ne vois pas clairement quel lien existe entre la volonté de moraliser la vie publique et le sujet de la dotation d’action parlementaire, singulièrement dans cette assemblée, où des règles extrêmement précises ont été posées depuis quelques années déjà. Au sein de mon groupe politique, par exemple, nous ne finançons déjà plus les associations. Le site internet du Sénat permet à quiconque de s’informer sur la façon dont les sénateurs ont utilisé une dotation qui, je le rappelle, provient du ministère de l’intérieur. Ces règles me semblent propres à répondre à un certain nombre d’interrogations de nos concitoyens.

Je rejoins complètement l’analyse du rapporteur quand il opère une distinction entre la DETR et la dotation d’action parlementaire. La DETR – on peut parfois s’interroger sur certains montants et certains taux – concerne en général de gros projets. Or nous sommes, dans la plupart des cas, sollicités par de petites communes, qui portent de petits projets. La dotation accordée par l’État a donc du sens : elle contribue au financement de ces petits projets communaux.

Cela étant, j’ai pris bonne note de la détermination du Gouvernement, madame la ministre, et de son intention d’aller jusqu’au bout de son projet en supprimant cette enveloppe.

Je rappellerai au passage que mon collègue René Vandierendonck et moi-même avons déposé voilà un an et demi une proposition de loi prévoyant notamment que les parlementaires siègent au sein de la commission locale, mais que nos collègues ne nous avaient pas suivis sur ce point. Il en va différemment aujourd’hui. Je me rallierai, à défaut de mieux, à l’amendement de notre collègue Bruno Retailleau, le risque étant que les sénateurs ne finissent par devenir totalement transparents dans les territoires ruraux.

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. C’est terrible de se retrouver non inscrit ! (Sourires.) Je le ressens depuis trois jours ! On a l’impression de ne plus être nulle part… Avec ma collègue Corinne Bouchoux, nous essayons d’occuper le terrain et d’être des sénateurs non inscrits-écologistes ! J’ai d’ailleurs eu une fausse joie : mon amendement n° 198 rectifié a été rejeté à une voix près…

L’amendement de Bruno Retailleau me semble intéressant, et je le voterai en mon nom propre, ne pouvant plus m’exprimer au nom d’un groupe. (Nouveaux sourires.)

Les parlementaires, en particulier les sénateurs, doivent exister dans les structures représentatives de nos territoires, surtout avec le non-cumul des mandats. Heureusement que le non-cumul des mandats a été voté ! J’estime même, à titre personnel, que l’on peut difficilement être à la fois conseiller régional ou conseiller départemental et parlementaire, si l’on veut bien faire son travail.

La réserve parlementaire fait débat, et c’est normal. Nous appliquions depuis longtemps, au groupe écologiste, la transparence la plus totale. Les petites communes rurales ont besoin de ces subventions, nous sommes bien placés pour le savoir. On reproche à certaines associations d’être politiques, mais, dès lors que l’on s’intéresse aux affaires de la cité, on fait de la politique. Les associations d’éducation populaire souffrent d’un cruel manque de moyens. La réserve parlementaire nous permettait de les financer. Pour ma part, j’essayais de répartir à peu près équitablement l’enveloppe entre les associations et les communes.

Nous devons mener un véritable débat sur la réserve parlementaire, mais nous avons besoin à la fois de celle-ci et de la DETR.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je suis cosignataire de l’amendement présenté par M. Retailleau. Que l’ensemble des sénateurs et des députés du département, et non pas seulement quatre, puissent siéger à la commission chargée de répartir la DETR serait une bonne chose. Avant la DETR existait la dotation globale d’équipement, la DGE, qui fonctionnait en gros selon le même principe, avec l’intervention d’une commission d’élus.

Qui décide réellement en matière d’attribution des subventions au titre de la DETR ? En tant que sénateurs, nous pouvons soutenir tel ou tel dossier, mais ensuite la décision est laissée à l’appréciation du préfet et des sous-préfets. Les choses ne sont pas simples. Comme l’a rappelé le président Bas, il faut aussi tenir compte du nouveau dispositif de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements. Ce point est important.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Je voudrais profiter de ce débat sur la DETR pour évoquer la réserve parlementaire. La DETR est une enveloppe attribuée à chaque département, régie par le préfet et répartie par arrondissement. Ce sont les sous-préfets qui ont toute latitude pour attribuer les dotations aux communes comme ils l’entendent, sur la base de critères prédéfinis. Le préfet n’a obligation que de communiquer les projets bénéficiant d’une subvention supérieure à 150 000 euros.

La DETR ne prend pas en compte certains investissements pourtant nécessaires aux petites communes. J’ai par exemple dû financer grâce à la réserve parlementaire, dans mon département, l’installation de distributeurs de billets dans de petites communes, les banques avançant toutes sortes de raisons, notamment de sécurité, pour ne pas s’en charger, alors que la présence de ces équipements permet, on le sait, de sauver des commerces.

C’est pourquoi nous devrons être très attentifs à la question de la réserve parlementaire, dont les règles d’attribution doivent évoluer, mais qui ne devra en aucun cas être fondue avec la DETR. Il conviendra notamment de sacraliser les fonds destinés aux communes.

M. Philippe Bas, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. En tant que sénateur représentant les Français de l’étranger, c’est avec beaucoup d’humilité que j’interviens sur ce sujet. Je souhaite cependant vous faire part de la gêne que j’éprouve à l’écoute de ce débat : un mandat de parlementaire est un mandat national.

Lorsque nous avons réformé la représentation des Français de l’étranger, nous avons coupé le lien entre l’Assemblée des Français de l’étranger et les parlementaires représentant ces derniers. On souhaite naturellement toujours continuer à suivre ce qui se passe sur le terrain et y jouer un rôle actif, cependant la vocation d’un parlementaire est de voter la loi et de contrôler l’action du Gouvernement : quand on exerce cette fonction de représentant de la nation, il est tout de même difficile de prétendre avoir une influence directe sur ce qui se passe dans le territoire dont on est issu. C’est une question de lisibilité de l’action publique et du rôle de chacun pour nos concitoyens.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Je rappelle que les parlementaires votent le budget de l’État, dont la dotation d’action parlementaire est une modeste part. De ce fait, il n’est pas inintéressant, pour nous, de pouvoir vérifier sur le terrain comment sont répartis par le préfet les crédits que nous avons votés.

Par ailleurs, Mme la ministre estime que prévoir une majorité des trois cinquièmes risque d’entraîner des blocages. Je ne le crois pas. Sur le terrain, les parlementaires sont capables de trouver ensemble des solutions pour régler les problèmes locaux, notamment en secteur rural. En pratique, les choses se passent très bien : nous trouvons toujours une voie pour répartir les financements de manière équitable. Je ne crains donc nullement des blocages. Même avec une majorité des neuf dixièmes, je suis persuadé que nous continuerions de trouver des solutions intelligentes.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Le président Bas m’a suggéré de retirer l’amendement que j’ai présenté : je laisse à Rémy Pointereau le soin d’en décider. Personnellement, je me rallierais volontiers à l’amendement de M. Retailleau.

Madame la ministre, votre position m’étonne quelque peu. Vous affirmez rechercher la transparence, mais j’ai le sentiment que dans votre esprit elle doit valoir davantage pour les parlementaires – nous avons montré notre bonne volonté à cet égard – que pour le Gouvernement.

Ainsi, vous ne souhaitez pas que la réserve ministérielle soit traitée comme la dotation d’action parlementaire. En ce qui concerne les frais de représentation des ministres, nous avons compris que vous ne souhaitiez pas non plus qu’ils soient traités comme l’IRFM des parlementaires. Dans le même ordre d’idées, la solution que nous proposons pour la dotation de l’État qu’est la DETR ne vous agrée pas.

Le Gouvernement gagnerait à appliquer la même exigence de transparence à son action qu’à celle des parlementaires. (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je ne peux rester insensible au fait que de tels propos suscitent des applaudissements…

Je précise que je ne me suis pas encore prononcée sur la réserve ministérielle, ce sujet relevant du projet de loi organique, que nous examinerons ultérieurement. Je ne vois pas très bien, monsieur le sénateur, par quel procédé divinatoire vous pouvez savoir à l’avance quelle sera ma position… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. En ce qui concerne la proposition de M. Retailleau, il me semble avoir expressément dit que je n’y étais pas hostile. J’ai même indiqué que je souscrivais à son principe. Simplement, je ne crois pas que ce soit le lieu ni le moment d’évoquer cette question. Nous aurons d’autres occasions de le faire.

À ce stade de nos débats, il me semblait utile de préciser ma pensée, que je n’avais certainement pas exprimée suffisamment clairement tout à l’heure…

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.

M. Michel Raison. Madame la ministre, je salue ces précisions, mais nous devrons être très attentifs à la question de la réserve ministérielle. Celle-ci, je le rappelle, concerne aussi de hauts fonctionnaires. Ainsi, dans mon département, un ambassadeur, qui possède une résidence secondaire dans une petite commune de 150 habitants, a fait appel à la réserve ministérielle pour financer un projet ; le député du lieu n’était pas du tout au courant et n’a pas compris pourquoi la subvention qu’il avait demandée au bénéfice du même projet a été annulée : la réserve parlementaire et la réserve ministérielle s’étaient entrechoquées ! Il faut remettre un peu d’ordre dans tout cela.

En ce qui concerne les associations, je voudrais dire à notre collègue Joël Labbé, qui lutte en permanence et avec une belle ferveur contre les conflits d’intérêts et le lobbying, qu’il défend ici une forme de clientélisme. J’en suis choqué !

M. Joël Labbé. Vous ne m’avez pas bien entendu !

M. Michel Raison. La réserve parlementaire va être supprimée, mais il faut sauvegarder les moyens destinés aux communes. Si les communes disposent d’un budget suffisant, il leur revient de décider, en toute objectivité, si elles doivent aider telle ou telle association. Cela n’incombe pas au parlementaire, qui pourra être motivé par des considérations électoralistes.

M. François Patriat. Quelle hypocrisie !

M. Michel Raison. Monsieur Labbé, je ne vous comprends plus !

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Le sujet qui nous occupe à cet instant, c’est la DETR, et pas la réserve parlementaire ou la réserve ministérielle.

Je constate que François Baroin, président de l’Association des maires de France, n’est pas cosignataire de l’amendement présenté par M. Retailleau. Cela se comprend : notre rôle n’est pas de nous substituer aux communes. Il revient à celles-ci, via la commission des maires désignée par l’association départementale des maires, d’établir, en concertation avec le préfet, les critères de répartition de la DETR. C’est ensuite le préfet, dans son impartialité – quoi qu’on en pense –, qui attribue les subventions. Il en est ainsi dans tous les départements.

Nous sommes donc défavorables à ces amendements. Une telle mesure a d’ailleurs déjà été adoptée, mais le président Larcher nous a indiqué qu’il était impossible de la mettre en œuvre. Dans un département comme le Nord, va-t-on faire siéger, au côté de sept maires, une trentaine de parlementaires ?

Comme le disait justement Jean-Yves Leconte, nous ne devons pas nous substituer aux maires. Le Sénat, en particulier, qui représente les collectivités territoriales, ne doit pas prendre le pouvoir sur les communes. L’Association des maires de France et les associations départementales de maires doivent continuer de jouer un rôle central dans le dispositif de la DETR, attribuée in fine par le préfet. Que des délégués des parlementaires puissent être membres des commissions, pourquoi pas ? Mais je m’oppose à ce que les sénateurs prennent le pas sur les maires, qui sont les représentants légitimes de leur territoire. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.

M. René Vandierendonck. À partir de mon expérience personnelle, je trouve tout de même problématique que les parlementaires ne soient aucunement informés, ni a fortiori consultés, sur la manière dont la DETR est attribuée.

Lors des débats sur la loi NOTRe, nous avions tenté de formuler des propositions. Personnellement, j’ai voté en faveur du non-cumul des mandats, mais il me paraît évident que les sénateurs, aux termes de la Constitution représentants des collectivités territoriales, doivent être consultés s’agissant par exemple des dépenses destinées à la revitalisation rurale. Cela ne semble pas exorbitant ! Que nous ne soyons pas associés à la manière dont la DETR est répartie me paraît constituer une lacune.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.

M. Rémy Pointereau. Du fait du non-cumul des mandats, les parlementaires vont à l’évidence devenir des élus « hors-sol », déconnectés des réalités de terrain. Être conseiller municipal d’une petite commune ne peut suffire pour appréhender l’ensemble des problèmes du territoire. C’est pourquoi il me semble tout à fait indispensable que les parlementaires puissent siéger dans un certain nombre de commissions départementales, telles que la commission départementale de la coopération intercommunale, les commissions d’accessibilité ou, plus encore, la commission chargée de répartir la DETR, puisque ce sont bien eux qui votent les crédits alimentant la DETR. Cela justifie amplement qu’ils aient un droit de regard sur l’utilisation de cette dotation, d’autant qu’elle progresse tandis que la dotation globale de fonctionnement diminue. Dans mon département, la DETR constitue désormais l’enveloppe la plus importante.

On invoque la transparence à propos de la réserve parlementaire : on pourrait faire de même pour la DETR. Je fais partie, en tant que maire, de la commission d’élus de mon département, mais seuls les dossiers de plus de 150 000 euros sont étudiés par celle-ci. Dans mon département, nous avons réussi à obtenir que ce seuil soit abaissé à 100 000 euros, mais en deçà on s’en remet au bon vouloir du préfet, qui décide sans aucune transparence ! Il serait tout à fait logique que les parlementaires siègent dans cette commission.

Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

M. François Patriat. J’ai un peu l’impression d’être au café du commerce… Peut-être pourrions-nous prendre un peu de hauteur ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Vous allez nous y aider…

M. François Patriat. J’ai entendu beaucoup d’interventions qui ne concernent pas vraiment l’objet du projet de loi que nous examinons aujourd’hui et qui portent sur des questions d’argent à distribuer, de reconnaissance, voire de clientélisme.

Si, au motif que nous votons le budget de l’État, nous devons siéger dans toutes les commissions qui prennent des décisions en matière d’attribution d’argent public, nous y passerons toutes nos journées ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Patriat. Vous voulez être partout, alors que votre rôle de parlementaire se joue ici ! Il n’est pas d’intervenir pour l’attribution d’une subvention destinée au lavoir, au terrain de boules ou de tennis de telle ou telle commune… Vous êtes dans le vieux monde ! (Nouvelles protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous n’avez pas compris ! Votre attitude dénote un état d’esprit que je déplore. Pour ma part, je suis pleinement d’accord avec Didier Guillaume.

Un sénateur du groupe Les Républicains. Retournez au PS, alors !

M. François Patriat. Il a eu raison de dire que la DETR doit être attribuée selon des critères établis en concertation avec les associations départementales de maires. Un parlementaire a autre chose à faire que siéger dans des commissions les lundis, mardis et vendredis après-midi pour que tel ou tel maire sache que c’est grâce à lui que sa commune recevra une subvention ! Tout cela me paraît bien dérisoire et n’honore pas le Parlement ! Je ne m’y associe pas !

M. Rémy Pointereau. C’est méprisant !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. L’intervention de M. Patriat me conduit à m’exprimer de nouveau. Mon cher collègue, je reconnais que, par cette brillante déclaration, vous avez réussi à faire prendre de la hauteur à nos débats… (Rires sur plusieurs travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme Catherine Deroche. C’est la pensée complexe !

M. Philippe Bas, rapporteur. Pour ma part, je voudrais souligner que le Sénat, qui représente les collectivités territoriales de la République, a toute légitimité à vouloir que les commissions qui attribuent les subventions au titre de la DETR travaillent sous le regard de tous les parlementaires, qu’ils siègent à gauche, à droite ou au centre, ou même nulle part… (Sourires.)

Il me paraît très important d’admettre ce principe, afin que nous puissions demeurer enracinés dans nos territoires. Notre légitimité tient aussi à notre expérience de terrain, et il est essentiel de la cultiver.

En matière de transparence, au cours de ma déjà longue expérience des affaires publiques, j’ai pu constater que les différents ministères disposent de très nombreux crédits d’intervention. Ainsi, les subventions de l’État aux associations représentent plus de 2 milliards d’euros chaque année. Or je me suis aperçu, au fil des ans, que l’attribution de ces crédits qui irriguent le territoire national, dans les domaines de la culture, du sport ou de la santé par exemple, s’effectue dans des conditions souvent opaques, tandis que tout ce qui concerne l’utilisation de la réserve parlementaire fait l’objet d’une totale transparence et publicité. De surcroît, les parlementaires de tout bord ont accès à celle-ci exactement dans les mêmes conditions. Ce système constitue le seul moyen à notre disposition aujourd’hui pour assurer le financement par l’État de petits travaux qui n’entrent pas dans son champ de vision habituel. En effet, l’État est naturellement porté à regarder toujours plus haut, conformément à ce que vous semblez souhaiter, monsieur Patriat.

De mon côté, je souhaite que l’on regarde suffisamment bas (Rires.) pour percevoir les besoins des petites collectivités en matière de financements ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)

M. François Patriat. La démagogie n’a pas de limites !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 277 rectifié.

J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public, émanant l’une de la commission des lois, l’autre du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 112 :

Nombre de votants 333
Nombre de suffrages exprimés 317
Pour l’adoption 185
Contre 132

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14, et les amendements nos 11 rectifié quater et 181 rectifié n’ont plus d’objet.

Articles additionnels après l'article 14
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Demande de seconde délibération

Intitulé du projet de loi

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 224, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet intitulé :

Projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à revenir à l’intitulé initial du projet de loi. Rétablir la confiance des citoyens dans l’action publique, conduite tant par les parlementaires que par le Gouvernement : tel est exactement notre objectif.

Mme la présidente. L’amendement n° 180, présenté par MM. Doligé et Cardoux, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet intitulé :

Projet de loi portant diverses dispositions relatives à la transparence démocratique

La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. Avant que la commission ne change l’intitulé du projet de loi, je m’étais moi-même penché sur la question. À la lecture du texte, je l’ai trouvé stigmatisant, uniquement négatif, visant à mettre en avant des turpitudes potentielles, en premier lieu de la part des parlementaires. Je n’ai pas du tout apprécié cette approche, qui m’a fait penser à une chanson d’Henri Salvador, Zorro est arrivé

L’exposé des motifs du projet de loi précise, à juste titre, que « beaucoup a été fait ces dernières années » et que plusieurs lois concernant « la transparence, la fraude, la grande délinquance économique et financière » ont déjà été votées. Comme l’a indiqué le Conseil d’État, l’intitulé choisi est donc susceptible de donner lieu à des interprétations inappropriées. En effet, le terme « rétablir » est subjectif. Qui peut dire quel est le seuil du rétablissement ? Si la confiance n’existe plus, ce qu’exprime l’intitulé, peut-on affirmer que les mesures proposées restitueront la confiance ? Où se situe le seuil entre confiance et défiance ?

Depuis quelques années, les lois fondées sur une telle motivation se succèdent, et le dépôt de ce nouveau projet de loi tend à prouver que l’objectif n’a toujours pas été atteint.

Selon ses auteurs, le texte doit permettre de « rétablir la confiance dans l’action publique ». Mais l’exercice de l’action publique est-il limité aux parlementaires, aux membres du Gouvernement et aux maires, qui sont concernés par ce texte, ou relève-t-il d’acteurs beaucoup plus nombreux ? En effet, tous les agents publics – ils sont plusieurs millions en France – participent à l’action publique. De très nombreux agents publics ont des responsabilités importantes.

Or, dans le texte du Gouvernement, il est de fait sous-entendu que l’action publique est limitée aux quelques élus visés et que les mesures proposées vont permettre de redonner confiance dans celle-ci.

Je propose de modifier l’intitulé du projet de loi pour le rendre plus conforme à la réalité de son contenu. Nous ne sommes pas là pour faire de la démagogie, mais pour régler des problèmes.

Mme la présidente. L'amendement n° 16, présenté par MM. Cabanel, Manable, Tourenne et Duran, Mmes Yonnet et Monier, MM. Labazée, Carcenac et Courteau et Mme Jourda, est ainsi libellé :

Compléter cet intitulé par les mots :

en renforçant sa moralisation

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Le présent amendement a pour objet de préciser l’intitulé du projet de loi, en rappelant l’objectif de moralisation, conformément à l’intitulé initial du texte.

Je ne me lancerai pas dans une analyse sémantique du terme, n’étant pas un expert en linguistique, mais je puis vous assurer qu’il n’y a là aucune référence à une morale religieuse ou à un quelconque dogme. Il s’agit seulement de se référer à un mot qui est aujourd’hui employé par les médias et les citoyens pour évoquer le contexte actuel et ce projet de loi. Pour moi, il s’agit avant tout d’affirmer une éthique et une exemplarité.

Ce mot revêt un sens simple pour tous : « faire la différence entre ce qui est bien et ce qui est mal, et les lois sont faites pour ça », comme le précise Catherine, une citoyenne qui a apporté une contribution sur la plateforme « Parlement & citoyens » où, avec mon collègue Joël Labbé, nous avons mis en consultation publique ce projet de loi et nos amendements.

En effet, il nous a semblé évident que ce projet de loi était par excellence un texte à mettre en débat avec les citoyens. Le Gouvernement s’y était d’ailleurs engagé, mais cela n’a pas été fait. Nous y avons remédié, car on ne peut éluder le débat citoyen sous couvert de contraintes de calendrier.

Dans cette démarche purement législative, l’intitulé « projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique » nous a paru quelque peu présomptueux, car en présentant un texte inspiré par les seuls élus, sans débat initial avec les citoyens, nous reproduisons les schémas d’hier, tant critiqués.

Ce sont les méthodes employées qui vont changer la donne et restaurer la confiance ; les seules intentions ne suffisent pas. N’ayons pas peur des mots, car les Français savent comprendre quelles sont nos intentions au travers des formules choisies. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Madame la ministre, pardonnez-moi, j’ai du mal à trouver mes mots. Je trouve quelque peu prétentieux l’intitulé « projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique ». Disant cela, je ne vous vise pas personnellement, car il s’agit d’un arbitrage gouvernemental.

Cette loi, vous le savez, ne rétablira pas la confiance, car la confiance dépend de beaucoup d’autres facteurs. Elle n’est pas atteinte uniquement parce qu’il y a des doutes sur les modalités de régulation de la vie publique. On le sait bien, le chômage endémique, la difficulté pour les jeunes d’accéder à l’emploi, la stagnation du pouvoir d’achat jouent aussi. Dans le même temps, les Français voient ce qui se passe depuis des années au Royaume-Uni et en Allemagne, deux pays qui ont atteint le plein emploi.

Je ne doute pas que le Gouvernement va s’atteler à la tâche et inscrire au premier rang de ses priorités le redressement économique et social. Je serais heureux qu’il réussisse dans cette entreprise, mais, de grâce, ne donnons pas à croire aux Français que nous-mêmes pourrions imaginer qu’une loi, la trente-et-unième de cet ordre depuis 1985 et la première loi réglementant le cumul des mandats, permettra de « rétablir la confiance dans l’action publique », même si ce texte peut constituer une pierre apportée à l’édifice.

C’est tout simplement par souci d’honnêteté intellectuelle et d’exactitude que la commission a cherché un autre intitulé. Je reconnais que celui que nous avons trouvé est d’une très grande platitude, mais il me semble mieux refléter la réalité de ce texte.

Monsieur Doligé, je crois que vous êtes inspiré par les mêmes motifs que la commission des lois en proposant l’intitulé « projet de loi portant diverses dispositions relatives à la transparence démocratique ». C’est encore trop, à mon avis, et je préférerais que vous acceptiez de vous rallier à notre suggestion. Je vous propose donc de retirer votre amendement au bénéfice de celui de la commission.

Monsieur Cabanel, votre amendement rehausse le niveau d’ambition, mais, pour les mêmes motifs qui m’ont poussé à ne pas retenir l’amendement du Gouvernement, je ne peux pas y donner un avis favorable. Faire référence à la moralisation au sens propre du terme – pardon de faire un peu de sémantique – signifierait que la loi peut créer de la morale. Or, au contraire, c’est la morale qui crée de la loi. La loi, quant à elle, instaure des régulations qui imposent des comportements à ceux qui n’auraient pas suffisamment de morale pour se les imposer eux-mêmes spontanément. À mon sens, il n’est donc pas approprié de parler de loi de moralisation. C’est du reste ce qu’ont décidé dans un même ensemble le Président de la République, le Premier ministre et le Gouvernement, bien que les exposés des motifs des textes qui nous sont soumis parlent de moralisation.

Voilà les raisons pour lesquelles je demande également le retrait de l’amendement n° 16.

Enfin, je prie Mme la garde des sceaux de bien vouloir excuser les termes que j’ai employés pour exprimer mon avis défavorable à l’amendement du Gouvernement ; j’espère qu’elle ne les a pas trouvés trop rudes ! (Mme la garde des sceaux sourit.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Afin de prolonger un instant le plaisir de la joute verbale qui nous oppose, j’indiquerai que je partage complètement votre opinion, monsieur Bas, sur la référence à une moralisation. Je ne vais pas reprendre tout ce que j’ai eu l’occasion de dire ici à plusieurs reprises, mais je reste convaincue que nous ne sommes pas dans un cadre moralisateur. Nous sommes dans l’appréciation et l’application d’un certain nombre de règles de droit qui vont conditionner nos comportements respectifs. Je donne donc un avis défavorable à l’amendement n° 16.

Je suis également défavorable au titre proposé par la commission des lois, qui comporte le terme « régulation ». Monsieur le président Bas, vous avez dit que le Gouvernement était sans doute un peu trop présomptueux et ambitieux ; je vous laisse la responsabilité de vos propos, mais je trouve, pour ma part, que le terme « régulation » affadit quelque peu l’ambition du texte que le Sénat va adopter.

Il me semble que, sur le fond, nous partageons une ambition. Je ne sais pas si la loi rencontrera le succès que nous souhaitons tous, mais, en tout cas, je ne voudrais pas que, ab initio, nous l’affadissions en adoptant un intitulé que je trouve un peu plat, le terme « régulation » s’appliquant généralement à l’organisation des pouvoirs publics ou à des domaines un peu plus triviaux que celui qui nous occupe ici.

Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. Cette discussion sur l’intitulé du projet de loi n’est pas entièrement anecdotique.

Raymond Aron disait que la politique était irréductible à la morale. Le terme « morale » est noble, monsieur Cabanel, mais il appartient plutôt au vocabulaire des hommes d’église, ce que nous ne sommes pas. À mon sens, il serait donc dommageable de le brandir comme un étendard.

D’ailleurs, l’histoire de notre pays fourmille d’exemples où le bien public, la morale ont été invoqués, avant que ne surviennent des retournements parfois très douloureux.

Je trouve le terme de « régulation » plus sobre. Il renvoie à une forme d’humilité, laquelle peut être aussi un gage d’efficacité.

Madame la ministre, le titre que vous proposez relève de l’énoncé performatif. Il faut veiller à ne pas susciter du désespoir, ou en tout cas de la déception, chez des électeurs qui s’attendraient, si nous retenions cet intitulé, à un texte à la hauteur de l’idée qu’ils se font eux-mêmes de la morale. Je pense qu’il vaut mieux être un peu en deçà de nos ambitions, s’agissant de l’intitulé, pour ne pas risquer de décevoir.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy-Dominique Kennel, pour explication de vote.

M. Guy-Dominique Kennel. Je trouve ce débat complètement inutile. En effet, quel que soit le titre qui sera finalement retenu, le mal est fait : dans l’opinion publique, il n’est plus question que de moralisation, ce qui sous-entend que tous les élus seraient amoraux ou immoraux, en tout cas corrompus.

Je trouve assez déplorable que le premier texte du Gouvernement contribue à jeter l’opprobre sur l’ensemble des élus. Je le regrette profondément. Ce n’est pas en changeant l’intitulé du projet de loi que l’on en changera le fond et que l’on remédiera au mal qu’il a déjà causé. (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Qu’on le veuille ou non, si ce débat a lieu, c’est parce que certains événements sont survenus dans notre pays. Il faut être en phase avec le terrain, en refusant la démagogie et le populisme. À cet égard, je suis d’accord avec M. Kennel lorsqu’il dit qu’il faut veiller à ne pas jeter l’opprobre sur les élus.

Il n’empêche qu’aujourd’hui la population demande des mesures. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) On peut ne pas l’écouter, mes chers collègues, mais on voit où cela a conduit les principaux partis dits de gouvernement… Je ferme la parenthèse.

Je vous invite à lire l’excellent rapport que la mission d’information présidée par Henri Cabanel a commis sur le thème des démocraties participative, représentative et paritaire. Dans son intervention, notre collègue a bien précisé qu’il ne s’agissait pas de moralisation au sens religieux du terme. Quoi qu’il en soit, nombre de citoyens attendent une amélioration des mécanismes de la démocratie représentative et davantage de démocratie participative. Prenons en compte les rapports faits sur ce sujet par des sénateurs, qu’ils soient de droite ou de gauche.

Au-delà de cette discussion sur l’intitulé, c’est tout de même le fond qui prime. Nous ne voterons pas la proposition du président Bas. Je ne sais pas, pour ma part, si c’est la morale qui crée la loi ou l’inverse, mais je sais que nous devons faire des lois qui soient comprises par le peuple français. Lors des dernières élections, nos compatriotes ont choisi une certaine alternative ; la prochaine fois, ils pourraient opter pour une autre, celle que nous voulons tous ici éviter.

Ce serait davantage à M. Patriat qu’à nous de le dire, car il s’agit ici d’un engagement pris par le Président de la République lors de la campagne électorale, mais le titre proposé par le Gouvernement me paraît être le plus clair et le plus parlant pour la population. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.

Mme Corinne Bouchoux. Finalement, je ne suis pas sûre que le titre ait tant d’importance que cela. L’important, c’est ce que nos concitoyens pensent aujourd’hui de leurs élus. La moitié d’entre eux n’a pas voté lors des récentes élections législatives.

En tout cas, d’ici à quelques années, je ne suis pas persuadée que l’on trouve beaucoup d’hommes et de femmes ayant envie de sacrifier leur vie personnelle et leur santé pour le bien commun si l’on continue à traiter les élus comme des mafieux. (Mme Françoise Laborde applaudit.)

Pour ma part, j’aimerais bien que, dans cinquante ans, mes petits-enfants, lorsqu’ils se plongeront dans les archives, ne se disent pas que leur mamie a collaboré avec des voyous. Or, malheureusement, le débat, tel qu’il a été monté en épingle et tel que nous l’avons parfois mené, avec nos passions et nos bonnes intentions, n’aura pas atteint totalement son objectif, c’est-à-dire faire savoir que nous œuvrons tous pour le bien commun, que nous avons une obligation de probité, que nous sommes tenus de lutter contre les conflits d’intérêts, de ne pas donner d’argent à nos grands électeurs.

Enfin, madame la ministre, j’espère que vous retiendrez aussi de ces débats qu’il y a eu consensus, dans cet hémicycle, sur deux ou trois sujets, notamment sur la réalité du travail accompli par les collaborateurs parlementaires. (Applaudissements sur certaines travées du groupe La République en marche, du groupe socialiste et républicain et du RDSE. – Mme Françoise Gatel et M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 224.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 113 :

Nombre de votants 333
Nombre de suffrages exprimés 314
Pour l’adoption 129
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté.

Monsieur Doligé, l’amendement n° 180 est-il maintenu ?

M. Éric Doligé. Pour ma part, je suis du vieux monde, et donc je respecte le travail de la commission et de son président : ils feront toujours mieux que moi…

J’ai remarqué que M. Patriat, qui nous exhorte à entrer dans le nouveau monde, se raccrochait néanmoins de temps en temps à l’ancien, puisqu’il prenait M. Guillaume comme référence. (Sourires.)

M. Didier Guillaume. Il faut du solide ! (Rires.)

M. Éric Doligé. Monsieur Guillaume, vous nous avez dit qu’il fallait faire des lois que les citoyens comprennent. Je suis tout à fait d’accord, mais qu’avez-vous fait pendant cinq ans ? Ils n’ont rien compris, et on a vu le résultat !

M. Didier Guillaume. C’est bien le problème ! Ils n’ont pas plus compris ce que vous avez fait !

M. Éric Doligé. Nous voudrions que l’intitulé permette aux citoyens de comprendre un peu mieux ce qu’il y a dans la loi. À cet égard, je pense que le président de la commission, dont j’apprécie la profonde humanité, a trouvé le bon libellé. Je me rallie donc à son amendement et je retourne dans mon vieux monde. (M. Marc Laménie applaudit.)

Mme la présidente. L’amendement n° 180 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 16.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 114 :

Nombre de votants 333
Nombre de suffrages exprimés 312
Pour l’adoption 86
Contre 226

Le Sénat n'a pas adopté.

Nous en avons terminé avec l’examen des articles du projet de loi.

Seconde délibération

Intitulé du projet de loi
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Article 4 (supprimé)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Madame la présidente, comme je l’avais annoncé dès la nuit dernière, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement, je demande une seconde délibération de l’article 4 du projet de loi.

M. Jean-Pierre Sueur. Excellente initiative, monsieur le président !

Mme la présidente. La commission des lois demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 4.

Je rappelle que, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, « avant le vote sur l’ensemble d’un texte, tout ou partie de celui-ci peut être renvoyé, sur décision du Sénat, à la commission pour une seconde délibération, à condition que la demande de renvoi ait été formulée ou acceptée par le Gouvernement ».

Le Gouvernement accepte-t-il cette demande de seconde délibération ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement l’accepte très favorablement ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, présentée par la commission et acceptée par le Gouvernement.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 115 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 331
Pour l’adoption 330
Contre 1

Le Sénat a adopté.

En conséquence, la seconde délibération est ordonnée.

Aux termes de l’article 43, alinéa 5, du règlement du Sénat, « lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport ».

Mes chers collègues, madame la garde des sceaux, nous allons donc suspendre la séance pour permettre à la commission de se réunir.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Madame la présidente, je pense que cinq minutes suffiront. Cette réunion se tiendra salle Victor-Hugo, ce qui nous évitera de devoir gravir deux étages. (Sourires.)

M. Yannick Botrel. J’ai une question d’ordre technique, madame la présidente.

Mme la présidente. Vous avez la parole pour la poser, mon cher collègue.

M. Yannick Botrel. L’adoption hier soir de l’amendement de suppression de l’article 4 a rendu sans objet tous les autres amendements. Qu’en adviendra-t-il si le vote qui va intervenir rétablit cet article ?

Mme la présidente. Lors de la seconde délibération, le Sénat statue uniquement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements, et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements.

Je pense que cela répond à votre question, monsieur Botrel.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous allons procéder à la seconde délibération.

Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement : « Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements, et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »

Demande de seconde délibération
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 4

(Supprimé)

Mme la présidente. Le Sénat a précédemment supprimé l’article 4.

L'amendement n° A-1, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 bis ainsi rédigé :

« Art. 8 bis. – I. – Il est interdit à un député ou un sénateur d’employer en tant que collaborateur parlementaire au sens de l’article 8 bis A :

« 1° Son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« 2° Ses parents, enfants, frères et sœurs ainsi que leur conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« 3° Ses grands-parents, ses petits-enfants et les enfants de ses frères et sœurs ;

« 4° Les parents, enfants et frères et sœurs de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

« 5° Son remplaçant et les personnes élues sur la même liste que lui.

« La violation de cette interdiction emporte de plein droit la cessation du contrat. Cette cessation ne donne lieu à aucune restitution entre les parties.

« Le bureau de chaque assemblée détermine les modalités selon lesquelles le député ou le sénateur rembourse les sommes versées en vertu des contrats conclus en violation de l’interdiction mentionnée au présent I.

« Le fait, pour un député ou un sénateur, d’employer un collaborateur en méconnaissance de l’interdiction mentionnée au présent I est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

« II. – Le bureau de chaque assemblée prévoit les conditions dans lesquelles un membre de la famille d’un parlementaire appartenant à l’une des catégories de personnes définies au I, lorsqu’il est employé en tant que collaborateur d’un parlementaire, l’informe sans délai de ce lien familial et informe également le député ou le sénateur dont il est le collaborateur. Cette information est rendue accessible au public »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. La suspension de séance a permis à la commission de se réunir et de délibérer de manière très approfondie. (Rires.)

Au terme de ces délibérations, elle m’a mandaté pour présenter au Sénat l’amendement n° A- 1. Il reprend le texte de la commission des lois qui a été supprimé la nuit dernière, en y intégrant les amendements qui avaient fait l’objet d’un avis favorable de sa part, à savoir l’amendement n° 166 rectifié ter de M. Bonhomme, qui interdit aux parlementaires d’employer leur suppléant en tant que collaborateur, et l’amendement n° 82 de M. Richard, qui impose la publicité des emplois croisés au sein des assemblées.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’émets, au nom du Gouvernement, un avis tout à fait favorable sur cet amendement. Nous nous félicitons qu’il soit proposé au Sénat de rétablir un axe fort du texte présenté par le Gouvernement et de remédier ainsi à une incohérence : du fait du vote intervenu hier soir, les emplois familiaux se trouvaient interdits pour les membres du Gouvernement et pour les responsables des exécutifs locaux, mais pas pour les parlementaires.

Le Gouvernement est également favorable aux deux adjonctions auxquelles la commission a procédé, qui concernent la publicité des emplois croisés au sein des assemblées et l’interdiction pour un parlementaire d’employer son suppléant comme collaborateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Ce qui s’est passé hier n’est pas anodin. M. le président Bas a bien voulu qualifier le vote intervenu d’« accidentel ». L’Assemblée nationale et le Sénat sont des institutions vivantes, constituées d’êtres humains auxquels il arrive d’hésiter, dont peu à peu émanent des choix qui méritent toujours d’être réfléchis, parfois d’être revus. Nous en sommes là.

La situation est étrange, parce que la plupart des groupes avaient pris position contre les emplois familiaux, de même que la commission des lois, à l’unanimité.

Moi-même, en tant que député puis sénateur, je n’ai jamais accepté le principe ni la pratique des emplois familiaux, considérant qu’il s’agit, qu’on le veuille ou non et quelles que soient les circonstances, d’une manière de privilégier des proches. Cela m’est toujours apparu très évident.

Je crois qu’il existe des cas où, d’une certaine façon, l’inconscient s’exprime : on veut que les choses changent, mais on éprouve quelques réticences. Il y a quelquefois des lapsus législatifs, des actes manqués, comme me le souffle Mme Génisson. Après tout, cela montre que le Parlement est vivant et qu’il porte les stigmates du passage parfois difficile de l’ancien monde au nouveau, comme dirait M. Patriat. (Sourires.)

Il me paraît très important de dire aux Françaises et aux Français quelle est la décision rationnelle, réfléchie que nous arrêtons aujourd'hui. À l’exception d’une voix contre et d’une abstention, le groupe socialiste et républicain votera l’amendement de la commission visant à interdire les emplois familiaux. Nous pensons en effet qu’il faut faire ce pas en avant, même si on a pu dire qu’il est lié aux circonstances. J’ai dit moi-même hier qu’il ne fallait pas légiférer en fonction des circonstances : celles-ci ont joué, ont pesé, en l’occurrence.

Toujours est-il que c’est un principe clair que nous allons affirmer très nettement en votant cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

M. Rémy Pointereau. Un peu grisonnant, le nouveau monde… (Sourires.)

M. François Patriat. Tout à l’heure, on a parlé de morale à propos de ce texte. Selon moi, ce que le Gouvernement veut faire, c’est créer un choc de confiance, au travers des mesures financières et fiscales qui ont été évoquées notamment par le Premier ministre, mais aussi d’une loi propre à rétablir la confiance dont les trois axes principaux recueilleront l’assentiment du groupe La République en marche.

Comme M. Sueur, je suis élu depuis longtemps –beaucoup trop longtemps au gré de certains. En tout cas, à 32 ans, en 1981, je ne me suis pas posé la question de savoir si je pouvais ou non employer quelqu’un de ma famille. À l’époque, il me paraissait déjà évident qu’un jour ou l’autre cette pratique serait réprouvée.

M. Philippe Bas, rapporteur. Admirable !

M. François Patriat. Je ne me pose pas en donneur de leçons ni en directeur de conscience ! La morale privée relève de l’individu, l’éthique publique est commune à tous.

Le signal donné ici hier soir, dont nous avons entendu ce matin le retentissement, n’honore pas notre assemblée ! Non seulement il va à contre-courant de l’opinion publique, mais il conforte l’idée que les gens se font trop souvent aujourd'hui de la vie publique et des hommes politiques.

J’ai exercé quatre mandats à l’Assemblée nationale, deux au Sénat, j’ai été douze ans président de région, trente-cinq ans conseiller général. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Rémy Pointereau. C’est beaucoup trop !

M. François Patriat. C’est beaucoup trop, en effet !

M. Éric Doligé. C’est le vieux monde !

M. François Patriat. Je suis d’autant plus heureux, chers collègues, d’être passé dans le nouveau monde ! (Rires sur les travées du groupe La République en marche.) Libre à vous de rester dans l’ancien monde, c’est votre droit !

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est une résurrection !

M. François Patriat. La résurrection, je l’ai vécue l’année dernière, ayant eu la chance de survivre à un accident qui aurait pu être mortel !

En conclusion, je regrette que nous soyons obligés de légiférer sur ces sujets, car tout cela devrait être évident. Mais puisque ce ne l’est pas pour tout le monde, votons l’amendement de la commission et les choses seront réglées une bonne fois pour toutes ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. J’ai eu plaisir à entendre François Patriat, qui vient de nous rappeler qu’il vient bien de l’ancien monde, puisqu’il a déjà plus de trois mandats à son actif !

Je voudrais remercier le président de la commission des lois, Philippe Bas, qui nous a indiqué dès hier soir qu’il demanderait une seconde délibération à la suite de ce qui paraissait être une incongruité. En effet, après nous être prononcés très clairement en faveur de l’interdiction des emplois familiaux pour les membres du Gouvernement et les responsables des exécutifs locaux, nous avions refusé de voter la même mesure pour les parlementaires, supprimant l’une des deux dispositions les plus symboliques du texte, l’autre étant la réforme de l’IRFM.

Pour ma part, je ne donnerai de leçons à personne ! Simplement, ce texte a une logique. Je considère que cette logique est d'ailleurs renforcée par l’amendement de la commission des lois, qui intègre l’amendement de François Bonhomme visant à interdire l’embauche par un parlementaire de son suppléant et celui d’Alain Richard tendant à instaurer la plus grande transparence en matière d’emplois croisés.

Très peu de membres du groupe Les Républicains ont voté hier la suppression de l’article 4. C’est de façon déterminée et massive que nous voterons l’amendement présenté par l’excellent président Bas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Dès hier soir, nous nous sommes associés à la démarche du rapporteur, annonçant son intention de demander une seconde délibération sur l’article 4.

Nous n’avons pas d’hésitation sur le sujet. Notre position est constante : nous sommes et nous avons toujours été fermement opposés à la pratique des emplois familiaux. Je réaffirme donc ce soir que l’ensemble du groupe communiste républicain et citoyen votera l’amendement présenté par le président- rapporteur de la commission des lois, tel qu’enrichi des deux dispositions qu’il a exposées tout à l’heure ; elles vont elles aussi dans le bon sens.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

M. Jean-François Longeot. Je voterai moi aussi cet amendement, sans donner de leçons à quiconque. Cela étant, nous devons nous interroger. Pourquoi sommes-nous amenés ce soir à voter un tel amendement ? Parce que, à un moment donné, certaines décisions et certains faits ont dépassé l’entendement !

Je puis parler très librement de ce sujet, car j’ai un fils, titulaire d’un mastère de droit, qui a été demandeur d’emploi pendant un an et demi : je ne l’ai pas embauché, alors que j’aurais pu le faire. Cela étant, comment expliquer à quelqu’un de méritant, qui a fait des études, qui est diplômé, qu’il ne pourra pas travailler avec vous simplement parce qu’il fait partie de vos proches ? C’est tout de même une forme de discrimination ! Ce qui m’ennuie, c’est que nous devions en arriver là parce que nous n’avons pas su, en conscience, mettre fin à certaines dérives. Au-delà du vote de cet amendement, c’est à un examen de conscience que nous devrons nous livrer. Demandons-nous pourquoi nous en sommes arrivés là.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. On a parlé de nouveau monde, d’ancien monde, d’anciens et de modernes… Souvenez-vous : la guerre des Anciens et des Modernes, au Pirée, a débouché sur la dictature des Trente !

S’agissant de l’intitulé du projet de loi, « qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse », dirait-on chez moi, en Bourgogne. Le monde va mal, la France va mal. Je regrette que cette mandature, qui suscite beaucoup d’espoirs, commence par une loi qui tend à rejeter la faute sur les parlementaires.

Les parlementaires ne sont pas responsables de la crise. J’aurais aimé que l’on débute ce quinquennat en s’attaquant au fond du problème, à la falaise qui se dresse devant nous, à cette crise mondiale, humanitaire, économique…

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.

Mme Françoise Laborde. Ayant été un peu à l’origine du vote « accidentel » d’hier soir, je ne pouvais pas ne pas prendre la parole !

Ce soir, au sein de mon groupe, les votes seront divers. Certains d’entre nous ne participeront pas au scrutin. Pour ma part, je ne voudrais pas récidiver ! J’ai voté, au nom de mon groupe, en faveur de la seconde délibération de l’article 4. Je me félicite tout de même de la tenue de ce débat, parce que trop, c’est trop ! J’ai le droit de le penser, bien que je n’emploie pas mes proches.

Je ne sais pas si l’adjonction de l’interdiction d’employer les suppléants est opportune, mais c’est un point important, de même que l’instauration de la publicité des emplois croisés. J’écoute les médias, j’ai lu la presse aujourd'hui ; je me dis que le peuple a ses raisons et qu’on va lui donner raison ce soir.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.

Mme Corinne Bouchoux. Ce soir, nous sommes deux sénateurs écologistes en séance. Nous avons voté en faveur de la seconde délibération et nous voterons cet amendement, parce qu’il n’est plus possible de continuer de la sorte.

Il faudra tout de même que, à l’avenir, les livres d’histoire expliquent comment, à partir d’un problème d’emplois supposés fictifs, on en est arrivé à des interdictions professionnelles ! Il faudra s’interroger sur les limites de ce genre de démarche. Afin de positiver, je dirai que, pour une fois, nous allons adopter un dispositif LGBT-gay friendly ! Voilà qui me fait plaisir ! (Rires. – M. Joël Labbé et Mme Françoise Laborde applaudissent.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° A-1.

J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public, émanant l'une de la commission des lois, l'autre du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 116 :

Nombre de votants 325
Nombre de suffrages exprimés 317
Pour l’adoption 306
Contre 11

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 4 est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l'ensemble

Article 4 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Nous sommes à la moitié de l’examen de ces deux projets de loi. Les débats ont été amorcés ; il va falloir continuer, parce que rétablir la confiance ne se décrète pas : ça se prouve, ça se démontre.

Un certain nombre de nos propositions ont été sévèrement frappées par l’application de l’article 45, alinéa 1 de la Constitution sous prétexte qu’elles seraient des cavaliers législatifs. Nous avions déjà subi l’application restrictive de cette disposition, qui précise tout de même que les amendements ayant un lien même indirect avec le texte sont jugés recevables en première lecture.

Je ne répéterai pas l’excellent propos de notre collègue Jean-Yves Leconte, qui a souligné avec raison le caractère problématique de l’application discrétionnaire de cette disposition. De surcroît, en plus de ne pouvoir connaître les critères qui fondent son application, nous n’avons aucune voie de recours. Ce point devra évoluer dans une future réforme de notre règlement : la confiance passe aussi par là !

Nous n’avons donc pu débattre de dispositions essentielles permettant de retrouver la confiance de nos concitoyens. Je veux bien entendu parler du scrutin proportionnel, du droit d’amendement citoyen, de la reconnaissance du vote blanc, de la généralisation des consultations citoyennes et de bien d’autres choses encore.

En revanche, nous avons tout de même pu faire évoluer quelques dispositions de notre droit. Nous avons complété la liste des délits entraînant une peine d’inéligibilité quasi automatique, sauf décision spécialement motivée du juge, en y ajoutant le délit d’abus de biens sociaux, les infractions de grande délinquance économique et financière, ainsi que les infractions pour violences dans le cas de la commission d’un harcèlement sexuel ou moral.

Nous avons également supprimé – enfin ! – le « verrou de Bercy », qui donne à l’administration fiscale la main sur les poursuites pénales en matière fiscale. Nous avons limité le pantouflage des hauts fonctionnaires, ainsi que les conflits d’intérêts des fonctionnaires.

La reconnaissance dans la loi du travail des collaborateurs parlementaires, de leur cadre d’emploi et de la nécessité du dialogue social avec les parlementaires est pour nous tous très importante. La suppression de l’interdiction des emplois familiaux, que nous venons d’adopter, est aussi notable. Je souscris complètement sur ce point aux propos tenus par ma collègue Corinne Bouchoux : il s’agit avant tout de lutter contre les emplois fictifs.

C’est pourquoi, au vu du caractère positif de toutes ces avancées, en tant que sénateur écologiste non inscrit, je voterai ce texte. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Nous voterons ce texte. Nous aurions aimé aller plus loin quant aux conditions d’inéligibilité ; nous nous en sommes longuement expliqués, madame la garde des sceaux, y compris par rapport à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Nous soulignons les avancées accomplies en matière de conflits d’intérêts.

Je tiens à remercier M. le rapporteur pour sa clarté dans la distinction faite entre indemnité parlementaire – avancée importante, nous avons décidé que les indemnités de fonction seraient elles aussi fiscalisées – et remboursements. Ces derniers s’effectueront selon les modalités que vous avez citées – prises en charge, avances des frais réels –, et ce dans la plus totale clarté. Je remercie sur ce point Mme la garde des sceaux d’avoir beaucoup contribué à ce que nous puissions aboutir à une rédaction qui a l’aval tant du Sénat que du Gouvernement. Je pense que c’est un bon présage pour la suite du débat.

Pour ce qui est des emplois familiaux, après un temps de réflexion, voire d’hésitation, il y a eu un vote magnifique. La très large majorité recueillie montre que le Sénat sait parfois réfléchir, peser le pour et le contre avant de s’engager fortement, à une large majorité.

Enfin, je tiens à souligner que figureront dans la loi, pour la première fois, des dispositions relatives aux collaborateurs parlementaires. Grâce à notre travail, à celui de la commission et à celui des collègues qui suivent les questions de l’AGAS, l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs, en particulier Mme Françoise Cartron, nous avons réussi à écrire des dispositions sur cette fonction importante. Il était utile de le faire, en particulier sur les conditions de licenciement ou de rupture. C’est la première fois que cela est fait : c’est une avancée dont nous devons nous réjouir.

Pour toutes ces raisons, notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. J’ai déjà pu exprimer, lors de la discussion générale, tout le bien que nous pensions de certaines mesures contenues dans ce texte. J’ai surtout insisté sur notre préoccupation majeure au sein du groupe CRC : le contexte politique, économique et social que connaissent nos concitoyennes et concitoyens. C’est ce contexte qui, à mon avis, explique en premier lieu la méfiance, voire la défiance, qu’ils manifestent à l’égard du personnel politique et de la politique en général. Quoi qu’il en soit, nous aurons l’occasion de revenir sur ce contexte à l’occasion de débats sur d’autres textes.

Pour en revenir à ce projet de loi, je me félicite que trois de nos amendements ont été adoptés : celui sur le « verrou de Bercy », celui sur la peine complémentaire d’inéligibilité pour abus de bien social, ainsi que celui sur l’accès aux concours internes de la fonction publique pour les collaborateurs parlementaires. Je me félicite aussi d’autres avancées, par exemple celles qui concernent les collaborateurs, grâce aux amendements de M. le rapporteur sur le dialogue social et le licenciement sui generis. Quant aux emplois familiaux, je n’y reviendrai pas : nous en avons débattu voici quelques instants.

S’agissant de l’IRFM et du dispositif qui a été adopté, je dois dire que, malgré notre vote en faveur de l’amendement de M. le rapporteur, je reste dubitative. En effet, je crains ces lourdeurs qui pourraient in fine diminuer les moyens de travail des parlementaires si nous ne sommes pas rigoureux et égalitaires quant à l’utilisation de cette indemnité.

Toutefois, à l’issue du débat, des pans entiers de l’immoralité de notre société ne sont pas pris en compte : le lien entre médias, argent et politique, la question du mode de scrutin et de la représentativité des parlementaires, celle de la dérive monarchique de nos institutions et, bien sûr, la nécessité d’actions contre de détestables pratiques économiques et financières.

Ce texte comporte donc des failles qui, de notre point de vue, empêchent de répondre aux vrais enjeux démocratiques qui conditionnent la confiance. En fin de compte, nous ne nous opposerons pas à ce texte, mais nous ne le voterons pas non plus : nous nous abstiendrons.

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, dans le texte de la commission, modifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 117 :

Nombre de votants 331
Nombre de suffrages exprimés 303
Pour l’adoption 298
Contre 5

Le Sénat a adopté le projet de loi pour la régulation de la vie publique. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et du RDSE – M. le rapporteur, Mme Catherine Troendlé et M. Michel Mercier applaudissent également.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
 

8

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 13 juillet 2017, à neuf heures trente et de quatorze heures trente à seize heures :

Suite du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l’action publique (procédure accélérée) (n° 580, 2016-2017) ;

Rapport de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 607, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 608, 2016-2017) ;

Avis de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n° 602, 2016-2017).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 13 juillet 2017, à zéro heure trente.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD