Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Madame la secrétaire d'État, en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, la forêt représente un taux d’occupation des sols nettement supérieur à la moyenne nationale.

Vous comprendrez, dès lors, l’importance, pour nous, d’une gestion durable, intégrant pleinement les enjeux environnementaux, mais aussi économiques.

C’est pourquoi je vous remercie de cette réponse précise, qui me semble apporter des éléments de nature à rassurer les professionnels de la filière.

traite et migrantes

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur de la question n° 1412, adressée à Mme la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la secrétaire d'État, le récent rapport de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat sur la traite des êtres humains, dont j’ai été corapporteur, a souligné le risque d’amplification du phénomène de traite dans le contexte actuel de crise des migrants.

Selon les statistiques de l’ONU, 70 % des victimes de la traite des êtres humains sont des femmes et de jeunes filles.

Depuis le conflit en Syrie, la proportion de femmes, parmi les migrants, a nettement augmenté. Notre attention a donc été attirée sur les dangers encourus spécifiquement par les femmes dans ces situations tragiques de grande vulnérabilité.

Nous savons que la frontière entre traite et trafic illicite de migrants est extrêmement poreuse.

Dans son rapport du mois de janvier dernier, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, rappelle que « le désir de migrer étant un ressort extrêmement puissant de la traite des êtres humains, l’immigration illégale n’est parfois que “la face cachée de la traite” ».

Human Rights Watch a fait état de cas dans lesquels des migrants avaient versé de l’argent à des passeurs clandestins, puis avaient été remis entre les mains d’individus se livrant à la traite.

La crise actuelle réunit les conditions pour que les réseaux exploitent cette situation. La traite est, d’ailleurs, une réalité tangible au sein des camps de migrants.

À Calais, l’association France Terre d’Asile a mis en place une structure spécifique, fondée sur un projet d’identification, d’information et d’orientation des victimes de la traite des êtres humains dans le Calaisis.

L’identification des victimes est d’une extrême difficulté. Or c’est l’étape indispensable à leur protection.

En situation de vulnérabilité extrême, ces victimes sont toutes sous emprise. Nos interlocuteurs ont rappelé que les exploiteurs mettaient tout en œuvre pour les empêcher de verbaliser leur parcours de vie véritable et leur qualité de victime de la traite.

Dès lors, comment mieux détecter les victimes potentielles de la traite ? Les témoignages entendus par la délégation convergent pour souligner la nécessité de médiateurs culturels. Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de créer les 50 postes de médiateur culturel annoncés dans le cadre du plan d’action national contre la traite des êtres humains 2014-2016.

Le Gouvernement peut agir sur un second plan : il peut compléter le questionnaire annexé à l’arrêté du 23 octobre 2015, afin de prévoir des questions relatives à toutes les situations de vulnérabilité visées à l’article L. 744-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Juliette Méadel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'aide aux victimes. Madame la sénatrice, le Gouvernement s’est engagé avec une détermination absolue dans la lutte contre la traite des êtres humains. Dès 2012, il a développé, à ce sujet, une véritable politique publique, de nature interministérielle.

Ce volontarisme inédit s’est exprimé selon trois axes majeurs : le renforcement de l’arsenal législatif, la création de la mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains, la MIPROF, en 2013, et l’adoption du premier plan d’action national contre la traite des êtres humains, couvrant la période 2014-2016.

La situation des femmes migrantes nous préoccupe, tout particulièrement à Calais. Chacun sait que ces femmes constituent la proie des réseaux. Les témoignages des associations humanitaires en attestent, puisqu’ils évoquent de nombreux cas d’exploitation sexuelle.

Les services de l’État sont pleinement mobilisés aux côtés des associations qui vont à la rencontre des femmes migrantes pour assurer leur suivi médical, comme Gynécologie sans frontières, ou pour prendre en charge celles qui sont victimes de traite, à l’instar de l’Amicale du nid.

Pour ce qui concerne la création des 50 postes de médiateur culturel, il reviendra aux associations, auxquelles seront délégués des moyens nouveaux pour la mise en place du parcours de sortie de la prostitution, de juger si ce recrutement fait partie de leurs priorités d’action.

Le parcours de sortie de la prostitution constitue une avancée majeure, permise par la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Les associations auront toute latitude pour s’organiser au plus près du terrain et pour utiliser ces ressources complémentaires en fonction des besoins qu’elles auront identifiés.

Pour ce qui est de la détection des vulnérabilités des demandeurs d’asile, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, qui octroie la protection internationale, a d’ores et déjà engagé un processus de formation de ses agents à l’identification des besoins de protection liés à la traite, en application du plan d’action qu’il met en œuvre depuis l’été 2013.

Les formations sont délivrées par des officiers de protection référents, spécialisés sur ces thèmes.

L’entretien personnel avec le demandeur d’asile concerné est mené par un officier de protection formé, qui bénéficie de l’appui des référents internes sur les thématiques de la traite et des mineurs isolés : il est l’occasion d’amener l’intéressé, si besoin est, à verbaliser sa situation de victime de traite et son appartenance à une minorité, et à faire état, le cas échéant, de craintes à l’idée de retourner dans son pays d’origine.

Cette identification, dont la verbalisation est le préalable indispensable, est susceptible de justifier l’octroi d’une protection internationale s’il est établi, d’une part, que le demandeur s’est engagé dans un processus de distanciation du réseau de traite qui l’exploitait et, d’autre part, que cette situation fait naître chez lui des craintes de persécution ou d’atteintes graves dans l’hypothèse où il regagnerait son pays d’origine.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.

Je veux simplement insister sur deux aspects.

Premièrement, le questionnaire sur la base duquel l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, réalise ses détections ne lui suffit pas à repérer les situations de vulnérabilité visées dans le CESEDA. Il faut absolument le compléter.

Deuxièmement, je veux revenir sur le rôle des associations que vous avez effleuré. Sur le terrain, celles-ci réalisent un travail extraordinaire, avec beaucoup d’humanité, notamment lorsqu’il s’agit d’accueillir des femmes, parfois très jeunes.

Vous avez renvoyé la création des postes de médiateur aux associations. Le problème tient aux moyens octroyés à celles-ci, notamment à celles qui se consacrent à la lutte contre la traite des êtres humains.

J’appelle donc à une pérennisation et, même, à une augmentation de leur financement, faute de quoi nous ne pourrons pas répondre avec humanité à ces situations de vulnérabilité.

effectifs de la police aux frontières dans les aéroports parisiens

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteur de la question n° 1386, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur les effectifs de la police aux frontières, la PAF, dans les deux aéroports parisiens d’Orly et de Roissy-Charles-de-Gaulle.

En effet, si les conditions d’accueil mises en place dans ces aéroports par la société Paris Aéroport – nouveau nom d’Aéroports de Paris – se sont incontestablement améliorées, notamment pour ce qui concerne l’espace public et l’information des voyageurs, il n’en va pas de même des conditions dans lesquelles s’effectue le contrôle à l’arrivée et au départ des passagers.

Comme beaucoup, je constate, hélas, de longues attentes, qui peuvent aller jusqu’à une demi-heure, notamment lors des arrivées des longs courriers, particulièrement entre 6 heures et 9 heures du matin. Cette situation est d’autant plus regrettable qu’elle semble avoir pour seule origine un nombre insuffisant de fonctionnaires de la police aux frontières à un moment où les besoins peuvent raisonnablement être anticipés.

L’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle représente la plus grosse frontière de France et de l’espace Schengen.

Depuis 2006, le trafic de passagers y a augmenté de 10 %, soit 6 millions de passagers. Cela représente environ 16 500 passagers supplémentaires par jour. S’y ajoute l’ouverture de deux terminaux – 2E et 2G – et de deux nouveaux satellites – S3 et S4.

Malgré cela, il ne semble pas que les effectifs de la PAF aient été revus à la hausse, ce qui a pour effet de pénaliser les passagers qui fréquentent ces aéroports.

Ajoutons que, si cette situation peut porter préjudice à la sécurité des biens et des personnes, elle affecte également la première impression que ces voyageurs ont de notre pays.

En réponse à cette difficulté, on pourrait, par exemple, constituer une instance coprésidée par l’autorité désignée pour assurer la coordination des services de l’État sur les plateformes et, pour Paris Aéroport, les directeurs des aéroports de Roissy et d’Orly, afin notamment de répondre de manière adéquate aux flux de passagers.

Enfin, vous semble-t-il possible, madame la secrétaire d'État, que le ministère de l’intérieur augmente les effectifs de la PAF dans les deux aéroports parisiens, de manière à améliorer les conditions d’accueil et donc de voyage des passagers ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Juliette Méadel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'aide aux victimes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.

Madame Conway-Mouret, vous interrogez le Gouvernement sur le dispositif de sécurité mis en place dans les aéroports, plus spécifiquement à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.

D'abord, le Gouvernement se félicite que, grâce aux efforts conjugués des équipes de Paris Aéroport et du ministère de l’intérieur, de très importants progrès aient été réalisés ces derniers jours en termes d’équipements technologiques au sein des aéroports de Roissy et d’Orly.

Ainsi, sur la base de la convention signée entre le ministère de l’intérieur et Paris Aéroport et à la suite de l’autorisation ministérielle du 10 juin 2016, une expérimentation a été lancée le 13 juin dernier pour tester pendant un an la technologie de reconnaissance faciale. Les premiers sas dotés d’une capacité de reconnaissance faciale ont été ouverts dans l’aéroport de Roissy, conformément au calendrier fixé. Par ailleurs, je vous informe que les sas d’ores et déjà installés à Roissy et à Orly ont désormais un accès automatisé aux bases de données du système Schengen et d’Interpol.

Ces améliorations technologiques sont la traduction, en matière de contrôle aux frontières, du plan de modernisation des systèmes d’information que le ministre de l’intérieur a souhaité pouvoir mettre en œuvre dès le mois de décembre 2014 et qui a naturellement été validé par le Gouvernement et le Président de la République dans le cadre du plan antiterroriste de janvier 2015 et du pacte de sécurité de novembre 2015.

L’utilisation de sas PARAFE modernisés – PARAFE pour passage automatisé rapide aux frontières extérieures - répond, ainsi, à un double objectif de renforcement et de systématisation du contrôle aux frontières, pour l’État, et de fluidification du passage de frontière, pour les usagers, au regard des engagements de qualité de votre groupe, dont je mesure l’importance en termes d’attractivité et d’image de notre pays à l’échelon international.

Au-delà de la modernisation des équipements technologiques, vous avez également appelé mon attention, madame la sénatrice, sur les effectifs de la police aux frontières affectés aux aéroports de Roissy et d’Orly. En particulier, vous avez souligné leur rôle en matière de maîtrise des files d’attente. Vous évoquez notamment un allongement du temps d’attente, parfois au-delà d’une heure.

Sur cette question, je tiens, en premier lieu, à souligner que le contexte de menace accrue et le rétablissement du contrôle aux frontières, le 13 novembre dernier, impliquent un renforcement et une systématisation des contrôles pour des raisons de sécurité nationale. Indépendamment de la hausse du trafic qui n’est pas contestée, la situation sécuritaire est un facteur d’explication de l’augmentation des temps d’attente.

Si ces derniers restent inférieurs à ceux qui sont pratiqués dans certains aéroports, notamment aux États-Unis, la situation des usagers doit être prise en compte.

Je vous confirme, par conséquent, que le ministre de l’intérieur a décidé de renforcer les effectifs de la police aux frontières affectés dans les aéroports de Roissy et d’Orly. Dans le cadre des plans de renfort précités, d’ici à la fin de cette année ou au tout début de l’année prochaine, 73 gardiens de la paix supplémentaires seront affectés à Roissy et 20 à Orly.

En outre, le ministre de l’intérieur a demandé au directeur général de la police nationale d’évaluer l’opportunité d’un recrutement complémentaire d’adjoints de sécurité, pour que 46 agents supplémentaires soient, le cas échéant, affectés à Roissy et 17 à Orly d’ici à la fin de l’année.

Enfin, pour renforcer les divisions immigration de la police aux frontières de Roissy et d’Orly pendant la saison estivale, des personnels issus d’autres divisions seront redéployés, à hauteur de 38 personnels à Roissy et 11 à Orly : ce dispositif permettra de prendre en compte la hausse du trafic aérien pendant cette période.

Enfin, d’autres améliorations pourraient être apportées en termes de répartition des vols entre créneaux horaires et terminaux, de mise en cohérence des flux de passagers avec les horaires des agents de la police aux frontières, dans les limites des règles applicables, ou encore d’évaluation de dispositifs innovants de pré-enregistrement. À cet égard, le ministre de l’intérieur est très favorable à ce que soient réactivées les instances de coordination entre les services du ministère de l’intérieur, Paris Aéroport et les compagnies aériennes qui existaient par le passé.

Des échanges sont d’ailleurs en cours en ce sens avec les différentes parties prenantes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse très complète.

Nous pouvons tous nous réjouir des efforts réalisés en matière de sécurité.

Cependant, la France restant très attractive – elle demeure le pays le plus visité au monde –, il était très important que le ministre de l’intérieur puisse entendre les critiques et les frustrations, que j’ai relayées au travers de ma question, de ceux qui viennent dans notre pays pour des raisons professionnelles ou pour y faire du tourisme. Bien sûr, il faut faire en sorte que ces visiteurs reviennent le plus souvent possible !

À cet égard, toutes les mesures que vous avez décrites vont, me semble-t-il, dans le bon sens.

accès de la police municipale au fichier national des immatriculations

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Gournac, auteur de la question n° 1387, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Alain Gournac. Madame la secrétaire d'État, ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur, mais je suis ravi que vous y répondiez. Elle concerne les policiers municipaux.

Ceux-ci n’ont pas accès au fichier national des immatriculations. Ainsi, face à une voiture qui pose problème, soit parce qu’elle est stationnée depuis longtemps sans être connue dans le quartier, soit parce que son propriétaire n’a pas respecté une interdiction qui entraîne l’enlèvement, le policier municipal doit nécessairement faire appel à la police nationale, qui, seule, a accès à ce fichier. Or la police nationale n’est pas toujours immédiatement joignable. Il faut dire que ses agents sont quelque peu occupés en ce moment…

Par ailleurs, lorsqu’il s’agit de plusieurs véhicules en infraction ou dont la présence est suspecte – récemment, une vingtaine d’automobilistes réunis à l’occasion d’une fête avaient mal garé leur véhicule –, il est souvent demandé au policier municipal de se déplacer au commissariat, muni de la liste de ces voitures. Cela fait perdre un temps précieux à la police municipale, dans l’exercice de son îlotage, comme à la police nationale

À la veille d’un marché ou d’une manifestation culturelle, à l’instar de celle qui a eu lieu ce week-end dans les Yvelines, les maires préfèrent légitimement que la police municipale essaie de contacter les propriétaires des véhicules qui relèvent d’un stationnement gênant. La consultation du fichier n’est donc pas systématique.

Dans la période difficile que nous traversons, où les liens de solidarité doivent être renforcés sur nos territoires, l’officier de police judiciaire qu’est le maire ne devrait pas être contraint de rechercher des informations sur ces véhicules gênants et parfois inquiétants.

Madame la secrétaire d'État, alors que le plan Vigipirate et l’état d’urgence doivent mobiliser les forces de sécurité sur le terrain, au plus près de la population, ne conviendrait-il pas que les polices municipales puissent faire partie de la liste des organismes autorisés à avoir directement accès au fichier national des immatriculations ? Nous y gagnerions beaucoup en efficacité.

M. Louis Nègre. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Juliette Méadel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'aide aux victimes. Monsieur le sénateur, je répondrai à votre question au nom du ministre de l’intérieur, qui ne peut être présent parmi nous ce matin.

Vous évoquez un sujet hautement important et qui nous concerne tous.

Comme vous le savez, le système d’immatriculation des véhicules, le SIV, a remplacé le fichier national des immatriculations, le FNI, à la suite de l’entrée en vigueur de l’arrêté du 9 février 2009 relatif aux modalités d’immatriculation des véhicules.

L’accès au SIV, pour les agents de police municipale ou agents de police judiciaire adjoints, est réalisé actuellement par l’intermédiaire des services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, conformément aux dispositions combinées des articles R. 330-2 et R. 330-3 du code de la route.

La possibilité, pour les polices municipales, d’accéder directement au SIV fait l’objet, depuis plus d’un an, de travaux soutenus au ministère de l’intérieur.

Une modification de l’article R. 330-2 du code précité est requise pour permettre un accès direct des polices municipales à ce fichier. La Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, a été saisie en ce sens et, par une délibération du 17 septembre 2015, a émis un avis favorable aux projets de décrets portant modification des articles R. 225-4 et R. 330-2 du code de la route, afin de permettre aux agents de police municipale d’accéder directement à certaines données des traitements du système national des permis de conduire, le SNPC, et du système d’immatriculation des véhicules, dans le cadre de leurs missions et, naturellement, dans la limite du besoin d’en connaître.

Pour répondre aux exigences du Conseil d’État, un amendement à la proposition de loi dite Savary a été déposé et adopté en commission le 8 décembre 2015. Il s’agissait de modifier plusieurs articles du code de la route relatifs à l’accès aux données contenues dans les traitements de données à caractère personnel ayant pour finalité la gestion des pièces administratives du droit de circuler des véhicules, ainsi que la délivrance et la gestion des permis de conduire – le SNPC. La loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, promulguée le 22 mars 2016, qui en est résultée, modifie les articles L. 330-2, L. 330-3 et L. 330-4 du code de la route, en supprimant les mentions « sur leur demande », lesquelles signifiaient que l’accès n’était qu’indirect. Le soin de définir les modalités d’accès, direct ou indirect, à ces deux fichiers est renvoyé à un décret.

Un nouveau projet de décret est en cours de finalisation et sera soumis à la CNIL et au Conseil d’État dans les meilleurs délais. Ce projet permettra aux agents de police municipale d’accéder directement aux données du SIV utiles à leur mission, dans le cadre d’une habilitation préfectorale.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Gournac.

M. Alain Gournac. Madame la secrétaire d'État, les réponses intéressantes que vous m’avez apportées me laissent penser que j’ai bien fait de vous interroger !

Oui, nous attendons le décret.

Je peux vous dire que, dans les Yvelines, où nous venons de traverser des moments très difficiles, à la suite de l’assassinat d’un couple de policiers dans une commune très proche de la mienne, ce week-end a été terrible.

Une course à pied était organisée. Une vingtaine de voitures qui n’étaient pas immatriculées dans les Yvelines étaient stationnées le long du parcours, leurs passagers visitant peut-être le château de Saint-Germain-en-Laye. Y avait-il un danger ? Nous étions incapables de le dire. Or, pour que je puisse répondre à la requête qui m’a été faite de demander l’enlèvement de ces voitures, il fallait attendre la réponse du commissariat… Imaginez la perte de temps !

Comme les policiers municipaux, j’attends avec impatience la publication du décret. Celui-ci permettra de rendre leur travail plus efficace et libérera la police nationale, qui a bien d’autres choses à faire.

On peut comprendre que les policiers municipaux soient assez remontés : ils ne font tout de même pas n’importe quoi ! De même, le maire, qui est officier de police judiciaire, ne prend pas de décisions à la légère.

Madame la secrétaire d'État, je vous remercie beaucoup de ces réponses. Vous pouvez dire au ministre de l’intérieur, que j’apprécie, que j’espère que le décret paraîtra le plus rapidement possible. Nous en avons besoin !

bilan des mesures incitatives pour lutter contre la désertification médicale

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vaspart, auteur de la question n° 1391, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Michel Vaspart. Madame la secrétaire d'État, si la désertification médicale touche depuis des années et de façon de plus en plus préoccupante les communes rurales mal desservies par les services publics, particulièrement par les transports, elle frappe aussi désormais les villes moyennes, même éventuellement celles qui sont desservies par une ligne ferroviaire à grande vitesse et dotées d’infrastructures permettant à un médecin et à sa famille de s’installer de manière pérenne.

Ainsi, dans la commune de Lamballe, dans les Côtes-d’Armor, où passe le TGV, les six généralistes partent à la retraite les uns après les autres sans être remplacés.

La Bretagne est fortement touchée par le phénomène. C’est tout spécialement le cas du département des Côtes-d’Armor.

Les élus tentent tant bien que mal de s’organiser en créant des maisons de santé susceptibles d’attirer les professionnels de santé.

Depuis leur création, en 2005, sur l’initiative de Xavier Bertrand, ministre de la santé de l’époque, ces maisons constituent une solution qui a contribué à préserver un tissu de professionnels de santé relativement homogène sur notre territoire. Maire d’une commune de 2 500 habitants, j’ai installé une maison de professionnels de santé qui permet de couvrir les besoins de la population de ma commune, mais aussi des deux communes limitrophes.

Toutefois, force est de constater que cela ne suffit pas à répondre à toutes les situations, sans compter que les financements ne suivent pas toujours. Ainsi, il est des zones isolées où personne ne souhaite s’installer. Il est aussi des horaires auxquels les médecins ne veulent plus se soumettre et des déplacements chez les patients qu’ils ne veulent plus faire !

Face à cette situation, le Gouvernement avait annoncé, voilà près de quatre ans, à la fin de l’année 2012, la création, dans le cadre du pacte territoire-santé, d’un statut de praticien territorial de médecine générale.

Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais connaître le bilan coût-efficacité de la création de ce statut, notamment pour mon département.

Je souhaiterais aussi connaître le bilan de l’accueil des médecins étrangers, que l’on nous présente comme une autre solution à la désertification, ainsi que les effets de l’augmentation, depuis 2013, de la proportion, à l’examen classant national, de postes d’internes en médecine générale qui avait été annoncée.

Plus généralement, je souhaiterais connaître l’avis de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et du Gouvernement sur l’efficacité concrète de toutes les mesures incitatives engagées dans le contexte budgétaire très contraint qui prévaut autant à l’échelon national qu’à celui des collectivités locales.

Subsidiairement, quelle est la position du Gouvernement sur la piste de la délégation de soins qui permettrait à d’autres professionnels de santé de réaliser certains actes prédéfinis, en lieu et place des médecins généralistes, dans les zones sous-dotées ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, améliorer l’accès aux soins et réduire les inégalités en termes de santé sont bel et bien des priorités du Gouvernement et du pacte territoire-santé que la ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine, a mis en œuvre dès 2012.

À elle seule, votre question résume l’une des particularités du sujet : pour résoudre le problème de la désertification médicale, une mesure ne suffit pas. Il faut un ensemble de mesures.

Prenons l’exemple, que vous avez cité, du numerus clausus. Voilà un peu plus de vingt ans, dans les années 1990, entre 3 500 et 4 000 étudiants étaient sélectionnés chaque année. Ce chiffre est aujourd'hui passé à 8 000 ! Depuis le début des années 2000, le numerus clausus n’a cessé d’augmenter. Au reste, les étudiants qui ont fait partie des promotions du début des années 2000 ont aujourd'hui terminé leurs études.

Pour autant, on voit bien que de grandes inégalités ont subsisté.

Dès lors, nous avons souhaité, depuis 2013, assouplir le numerus clausus de manière ciblée, dans les régions les plus déficitaires. En effet, de façon générale, les étudiants restent dans la région où ils ont fait leurs études.

Toutefois, j’y insiste, il ne s’agit là que d’une mesure parmi celles qui devaient être prises et que je veux à mon tour évoquer.

Par exemple, à l’échelon national, 1 750 jeunes ont signé le contrat d’engagement de service public, ce qui dépasse l’objectif que nous nous étions fixé. Je vous rappelle que ce dispositif s’adresse aux médecins ou dentistes en formation ; il leur permet de bénéficier d’une bourse, en contrepartie d’une installation dans un territoire manquant de professionnels, pour une durée équivalant à celle de l’aide qu’ils ont reçue pendant leurs études.

Par ailleurs, 600 praticiens territoriaux de médecine générale se sont installés dans des territoires déficitaires, et 800 maisons de santé maillent désormais le territoire national.

En Bretagne, au travers du contrat d’engagement de service public, le CESP, 52 étudiants se sont engagés à exercer dans un territoire manquant de professionnels de santé, 9 d’entre eux ayant exprimé le souhait de s’installer spécifiquement dans les Côtes-d’Armor.

Grâce au dispositif PTMG, Praticien territorial de médecine générale, 35 médecins se sont installés dans la région, dont 5 dans les Côtes-d’Armor.

Par ailleurs, 77 maisons de santé pluridisciplinaires sont actuellement en fonctionnement dans la région, dont 15 dans les Côtes-d’Armor.

Ces données montrent bien que nous pouvons inverser la tendance, avec une implication de tous les acteurs locaux aux côtés de l’agence régionale de santé. Ainsi, 15 communes du département des Côtes-d’Armor ont participé à l’opération Généraliste dating, une manifestation originale organisée par l’ARS avec les facultés de médecine de Rennes et de Brest pour favoriser l’installation des étudiants dans les territoires les plus en difficulté.

Monsieur le sénateur, c’est donc bien la diversité des mesures et la concertation des acteurs qui permettra d’agir efficacement. Bien évidemment, cela prendra plusieurs années, le temps que les étudiants aient achevé leurs études et que les professionnels s’approprient pleinement ces mesures et s’installent dans les territoires sous-dotés.