compte rendu intégral

Présidence de Mme Françoise Cartron

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Corinne Bouchoux,

M. Jean-Pierre Leleux.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Dépôt d’un rapport

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le dixième rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

3

Questions orales

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

fonds d’urgence affecté aux départements par la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Labazée, auteur de la question n° 1373, transmise à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Georges Labazée. J’ai déposé cette question orale il y a un certain temps, mais, en raison des règles internes à cette maison, je ne peux la poser qu’aujourd’hui, tandis que, parallèlement, l’actualité a évolué, tout comme le nombre d’allocataires du revenu de solidarité active, le RSA.

Ce nombre a fortement augmenté, vous le savez, monsieur le ministre, de même que, par voie de conséquence, la charge correspondante pour les départements. Malheureusement, c’est peu dire que la compensation de l’État n’a pas crû selon le même rythme. Vous avez vous-même, comme moi, présidé un conseil général et vous avez pu constater comment la répartition de la charge entre l’État et les départements est passée de 50-50 en 2002 à 28-72. Ainsi, dans les caisses des départements, le trou se creuse inexorablement : après un montant de 3,3 milliards d’euros de reste à charge en 2014, la facture s’est élevée à 4 milliards d’euros en 2015.

Aussi, l’année dernière, l’État a débloqué une aide d’urgence de 50 millions d’euros pour soulager dix départements qui étaient dans le rouge vif. J’avais alors interrogé le Gouvernement sur les conséquences de ce prélèvement pour les réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et sur les moyens de contrôle prévus pour assurer que cette aide accordée aux départements soit utilisée pour la dépense sociale.

Cette année, selon l’Assemblée des départements de France, l’ADF, ce seraient entre trente et quarante départements qui ne disposeraient pas des fonds suffisants. Dans ce contexte, à la fin du mois de février dernier, le Premier ministre a proposé de « renationaliser » le RSA à compter du 1er janvier 2017 ; d’où un soupir de soulagement pour les départements en difficulté, qui, en contrepartie, « s’engagent à renforcer l’accompagnement de ses bénéficiaires vers l’insertion et l’emploi ». D’ici là, le Gouvernement devrait débloquer une nouvelle aide d’urgence pour les budgets de 2016.

Je salue cette proposition du Premier ministre, mais une question demeure quant au choix de l’année de référence pour déterminer le droit à compensation. La proposition faite par le Gouvernement de prendre comme référence l’année n-1 suit la même logique que celle qui a présidé à la décentralisation du revenu minimum d’insertion, le RMI, en 2004 : l’année de référence était l’année 2003 pour une décentralisation effective en 2004.

Je saisis tout à fait l’impératif de maîtrise des comptes publics, mais pourrait-on trouver un meilleur équilibre pour les départements, qui – faut-il le rappeler ? – sont les principaux acteurs de nos territoires en matière d’initiatives et de dépenses sociales ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, votre question est tout à fait d’actualité, puisque, dès que j’en aurai terminé avec cette séance de questions orales, je me rendrai à l’hôtel Matignon, où le Premier ministre et moi-même recevrons une large délégation de l’Assemblée des départements de France pour tenter de trouver une solution à ce problème du RSA.

Vous l’avez rappelé, le Premier ministre a reçu une première délégation de l’ADF le 25 février dernier et a fait droit à sa demande visant à recentraliser le RSA sans toucher aux recettes dynamiques – la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, et les droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, qui augmentent dans des proportions considérables.

Depuis lors, des discussions ont lieu, pas toujours dans la facilité ni dans la tranquillité, car j’observe de grandes contradictions entre les points de vue des uns et des autres au sein de l’ADF ; certains sont favorables à cette recentralisation et d’autres y sont défavorables, droite et gauche confondues. Cela ne simplifie pas le débat…

Quoi qu’il en soit, nous avons proposé de recentraliser le RSA, ce qui conduirait l’État à le financer en 2017 à hauteur de 700 millions d’euros – ce n’est pas rien –, en retenant effectivement l’année 2016 comme référence, par homothétie avec ce qui s’est passé en 2004, lorsque le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin avait décentralisé le RSA.

En effet, ne l’oublions pas, le RSA est une allocation de solidarité nationale, issue du RMI créé par Michel Rocard pour favoriser l’insertion, et il a été décentralisé en 2004 en prenant comme référence l’année 2003. Dès lors, de la même manière, nous nous fondons aussi sur l’année n-1 comme référence.

En outre, entre-temps, le pacte de confiance et de responsabilité a été adopté ; il a tout de même conduit à transférer aux départements la taxe foncière sur les propriétés bâties, soit 865 millions d’euros, et a permis l’augmentation des taux des DMTO.

Vous le constatez, le Gouvernement prend ses responsabilités ; à l’ADF de prendre maintenant les siennes. Oui, il y a un vrai problème de financement du RSA, mais encore faut-il trouver une solution équilibrée et la fonder sur des références objectives. C’est ce que nous proposons.

J’espère que nous parviendrons à un accord dès ce matin.

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Labazée.

M. Georges Labazée. Je partage la position de M. le ministre et je lui souhaite une très bonne chance pour les négociations de tout à l’heure.

transfert à la région de la compétence en matière de transport

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 1404, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le ministre, l’article 15 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, prévoit de transférer les compétences relatives au transport non urbain, régulier ou à la demande, à compter du 1er janvier 2017, ainsi que la compétence relative au transport scolaire, à compter du 1er septembre 2017. Dans l’esprit du législateur, il s’agissait de permettre ainsi aux collectivités territoriales concernées de préparer au mieux les modalités du transfert qui impliquent des services, du personnel et des moyens, tout en prenant en compte la fin de l’année scolaire.

Or, même si l’intention de départ est louable, cette distinction pose dans les faits de nombreux problèmes, notamment dans les départements ruraux. En effet, le trafic des lignes régulières concernant pour une grande part des élèves, il paraît difficile de respecter strictement les deux échéances prévues. Dans mon département par exemple, celui des Alpes-de-Haute-Provence, département rural et montagnard, sur les 5 200 élèves transportés, 1 200 utilisent des lignes régulières.

Dans ce contexte, monsieur le ministre, et dans un but de simplification et de cohérence, serait-il possible d’envisager de retenir une seule date de transfert pour les deux compétences – transport régulier et transport scolaire – qui serait fixée au 1er septembre 2017 ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, la loi NOTRe prévoit en effet le transfert à la région des services de transports non urbains, réguliers ou à la demande au 1er janvier 2017, ainsi que l’organisation des transports scolaires au 1er septembre 2017. Vous souhaitez savoir s’il serait possible de ne retenir qu’une date de transfert de ces deux compétences, date que vous désirez fixer au 1er septembre prochain.

L’entrée en vigueur différée de ces transferts de compétence a été débattue dans cet hémicycle comme à l’Assemblée nationale, et un large consensus – ce n’est pas toujours le cas – s’est dégagé en ce sens, une fois accepté le transfert de ces compétences des départements aux régions. Il s’agit de s’adapter au mieux à l’organisation et à la gestion des services publics de transports, la question du transport scolaire étant le plus souvent spécifique et étroitement liée au calendrier scolaire.

Il est bien entendu possible d’apporter de la souplesse à ce dispositif. Dans les cas où le transfert de ces compétences à deux dates différentes poserait problème – ce qui semble être le cas dans votre circonscription –, la région et le département peuvent très bien conclure une convention de délégation de compétence. Le département continue ainsi à administrer les lignes régulières et les transports à la demande pour le compte de la région jusqu’au transfert effectif de la compétence en matière de transport scolaire.

Régie par le principe de liberté contractuelle, la convention de délégation de compétence offre, vous le savez, des marges de manœuvre aux acteurs locaux, afin d’assurer la continuité du service public jusqu’au transfert effectif de sa gestion.

Aussi, au 1er septembre 2017, la région sera compétente pour l’ensemble des services de transport, et il lui appartiendra de définir le mode de gestion qui lui paraîtra le plus pertinent, en conservant, je le répète, la possibilité de déléguer l’exercice de ses compétences au département ou au bloc communal.

Vous le constatez, monsieur le sénateur, des solutions existent pour faciliter, là où c’est nécessaire, ces transferts de compétence, par le biais de la discussion et de la recherche du compromis, et le Gouvernement y est particulièrement attentif.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. J’aurais préféré, il est vrai, un transfert au 1er septembre prochain, mais la solution retenue prend en compte la réalité des territoires ruraux, et je vous en sais gré.

règles de représentation au sein des conseils communautaires

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 1401, transmise à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Rémy Pointereau. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur, qui est aussi chargé des collectivités territoriales ; elle porte sur les règles de représentation au sein des conseils communautaires.

Conformément à la décision du 20 juin 2014 du Conseil constitutionnel, statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité posée par la commune de Salbris, et à la loi du 9 mars 2015 autorisant l’accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire, les conseils communautaires sont soumis à une répartition stricte des conseillers communautaires à proportion de la population communale.

Ainsi, en cas de démission ou de décès, les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI, perdent la faculté de fixer par accord local le nombre de sièges et leur répartition au conseil communautaire. Cette répartition a lieu sans qu’aucune commune ne puisse disposer de plus de la moitié des sièges ni être totalement dépourvue de représentation.

Toutefois, la loi du 9 mars 2015 permet l’adoption d’un accord local par une majorité qualifiée des deux tiers des conseils municipaux des communes membres représentant plus de la moitié de la population de celles-ci ou de la moitié de ces conseils représentant plus des deux tiers de la population, ce qui est limitatif.

Dans le Cher, des démissions ou des décès d’élus municipaux ont nécessité l’organisation d’élections, qui ont débouché sur des accords locaux de répartition des sièges de conseils communautaires. Or ces accords ont été remis en cause, alors même qu’ils avaient été mis en place à la suite des élections municipales de 2014 ; c’est notamment le cas dans la communauté d’agglomération de Bourges, mais également dans plusieurs communautés de communes du département.

Cela a conduit à démettre de leurs fonctions des conseillers communautaires régulièrement élus au mois de mars 2014, bien que ceux-ci n’aient commis aucun manquement à leurs devoirs d’élus. Pour éviter cette situation, qui est incomprise, contestée et rejetée, il aurait été souhaitable d’attendre le renouvellement des conseillers en 2020, lors des élections municipales et communautaires – c’est d’ailleurs ce que demandent plusieurs conseils municipaux pour éviter que ne soit affaiblie la représentation au sein des intercommunalités des communes les moins peuplées.

Ainsi, monsieur le ministre, je souhaite savoir si, au-delà de la jurisprudence précitée, il serait envisageable de maintenir par tout autre moyen, dans ces cas spécifiques, les règles de représentation librement arrêtées en 2014 lors des précédentes élections municipales, jusqu’à la fin des mandats actuels. Il s’agit simplement de respecter, ce faisant, le choix exprimé par les urnes !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Pointereau, je comprends bien la situation qui se présente dans un certain nombre de communes de votre département, mais la décision du Conseil constitutionnel Commune de Salbris du 20 juin 2014, que vous avez vous-même citée, prévoit explicitement l’impossibilité de maintenir des accords locaux intervenus antérieurement à cette décision.

Vous auriez souhaité maintenir jusqu’au prochain renouvellement général des conseils communautaires les accords locaux de répartition des sièges lorsque des démissions imposent de procéder à une élection.

Dans sa décision de 2014, le Conseil constitutionnel a annulé les dispositions relatives aux accords locaux de répartition des sièges de conseillers communautaires au motif qu’elles ne permettaient pas d’assurer une représentation de la population selon des critères essentiellement démographiques. L’entrée en vigueur immédiate de cette annulation aurait obligé à procéder à une nouvelle répartition des sièges de conseillers communautaires dans l’ensemble des EPCI à fiscalité propre dans lesquels un accord local avait été conclu, c’est-à-dire pratiquement partout, car il y a eu beaucoup d’aménagements de ce type, y compris d’ailleurs chez moi, dans ma communauté de communes.

Afin d’éviter les « conséquences manifestement excessives » d’une telle annulation immédiate, mais tout en préservant l’effet utile de sa déclaration d’inconstitutionnalité, le Conseil constitutionnel a décidé de limiter son application aux seules élections à venir. Le dispositif actuellement en vigueur constitue donc déjà un aménagement par rapport à la situation qui aurait prévalu si le Conseil constitutionnel n’avait pas modulé l’application de sa décision.

Ce qui préexiste est ainsi reconnu par le Conseil, mais dès lors que, pour une raison ou une autre, on est amené à élire de nouveaux conseillers communautaires, il est explicitement prévu que l’on recompose les conseils communautaires. Il n’existe donc pas d’autre choix, en cas d’élection municipale partielle ou totale dans l’une des communes membres, que de procéder à une telle recomposition.

Tel est malheureusement le cas dans les communes que vous citez. Les élus auraient souhaité – je peux le comprendre – que la répartition des sièges soit prorogée, car il n’est jamais simple de dégager un accord qui fonctionne, qui soit équilibré. Hélas, le Conseil constitutionnel a tranché, et sa décision s’impose tant au législateur qu’au représentant de l’État et aux élus concernés.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Merci de votre réponse, monsieur le ministre, qui ne me satisfait toutefois que partiellement. Sachez que cette situation a causé un grand désarroi au sein des conseillers communautaires, qui avaient bien travaillé, mais qui ont dû mettre fin à leurs fonctions.

Je constate par ailleurs qu’il existe une inégalité de traitement puisque l’accord local devient caduc en cas de démission ou de décès dans une communauté existante, alors qu’il peut y avoir un accord local en cas de fusion. Ainsi, ma communauté de communes va fusionner avec une autre communauté et, en l’espèce, l’accord local pourra être décidé par nos conseils communautaires.

En outre, les élus ont besoin de stabilité juridique.

M. Jean-Michel Baylet, ministre. Absolument !

M. Rémy Pointereau. Je souhaite donc que l’on trouve une solution d’ici à 2020.

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à neuf heures cinquante, est reprise à neuf heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

modalités de gestion des autorisations de plantation

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, auteur de la question n° 1407, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Mme Anne Emery-Dumas. Ma question s’adresse au ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, par ailleurs porte-parole du Gouvernement. Elle porte sur les inquiétudes que soulèvent, au sein de la fédération des unions viticoles du Centre-Loire, les modalités d’application du nouveau régime de gestion des autorisations de plantation de vigne.

Ce dispositif, qui remplace le système des droits de plantation depuis le 1er janvier dernier, peut mettre en péril la pérennité et la viabilité des appellations d’origine contrôlée, les AOC ; il inquiète notamment les vignerons de l’aire d’appellation de Pouilly-sur-Loire. Les organismes de défense et de gestion de la fédération des unions viticoles du Centre-Loire craignent notamment le détournement de notoriété, phénomène amplifié par l’augmentation des plantations de cépages d’AOC du Centre-Loire en dehors de ces appellations.

Ils souhaitent donc fixer leurs propres critères d’éligibilité et de priorité, conformément à l’article L. 665-8 du code rural et de la pêche maritime créé par l’ordonnance du 7 octobre 2015 relative aux produits de la vigne. Ils veulent notamment réintroduire le critère permettant aux jeunes de s’installer et celui de la compétence professionnelle, auquel ils sont particulièrement attachés.

Je souhaite que le Gouvernement nous indique les moyens de fixer ces critères et les modalités à mettre en œuvre pour y parvenir.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Juliette Méadel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’aide aux victimes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Stéphane Le Foll, qui est en réunion en ce moment avec le nouveau président des Jeunes agriculteurs, M. Jérémy Decerle.

Madame la sénatrice, vous appelez l’attention du ministre de l’agriculture sur les modalités de mise en œuvre du nouveau régime d’autorisations de plantation de vigne en vigueur depuis le 1er janvier dernier. Ce nouveau système de régulation suscite des inquiétudes concernant la pérennité et la viabilité des appellations françaises, plus particulièrement des appellations de la région Centre-Val-de-Loire.

Alors que de nombreux secteurs agricoles sont aujourd’hui libéralisés ou sur le point de l’être, je tiens tout d’abord à rappeler que, pour la France, l’enjeu des négociations européennes a été de maintenir un système de régulation du potentiel de production permettant aux vignobles qui le souhaitent de croître au regard des perspectives de marché identifiées, tout en garantissant la stabilité des marchés face aux éventuels risques d’offre excédentaire ou de dépréciation des indications géographiques. En 2013, Stéphane Le Foll a ainsi obtenu le maintien d’un tel système, qui n’était pas l’intention première de la Commission.

Pour octroyer les autorisations de plantation et établir les critères d’éligibilité et de priorité, une procédure de gouvernance rénovée de la filière viticole a été définie dans le code rural et de la pêche maritime. Elle prévoit une concertation large des professionnels, à l’échelon tant local que national.

Pour la première année de sa mise en œuvre, les représentants de la filière se sont accordés sur l’activation à l’échelle nationale d’un critère d’éligibilité visant à éviter les risques de détournement de notoriété des appellations d’origine protégée, les AOP, et des indications géographiques protégées, les IGP, et de deux critères de priorité, dont un qui favorise les nouveaux venus avec une condition d’âge.

Au terme de la procédure d’instruction des dossiers pour 2016, un classement des demandes individuelles sera ainsi établi au plan national. Ce travail de définition et de pondération des critères sera reconduit au second semestre 2016 au titre de la campagne de 2017. À ce titre, dans la mesure où le choix de la filière s’orienterait vers une activation des critères par zone du territoire, la pondération des critères telle qu’elle est proposée à l’échelon local déterminera son caractère opérationnel dans la zone considérée.

Enfin, en l’absence de disposition européenne en ce sens, la définition d’une superficie minimale ou maximale à attribuer au producteur dans le cadre du dispositif d’autorisations de plantations nouvelles et de l’activation d’une limitation régionale ne serait pas conforme à la réglementation européenne.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas.

Mme Anne Emery-Dumas. Je veux simplement remercier Mme la secrétaire d’État de sa réponse et me réjouir que l’on ait pu mettre en place cette concertation, qui s’imposait, dans des aires viticoles comme celle de Pouilly, pour conserver la qualité de la production.

avenir de la filière bois

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, auteur de la question n° 1381, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. L’Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes compte quelque 3 millions d’hectares de surfaces boisées qui font de cette grande région, la mienne, la plus vaste forêt de France. Souvent morcelée et privée à hauteur de plus de 90 %, cette forêt se caractérise aussi par sa diversité : elle abrite des feuillus et des pins d’essences diverses.

Si elle constitue bien sûr un atout environnemental considérable, elle joue aussi un rôle économique important. Avec près de 70 000 salariés de l’amont à l’aval, elle représente 20 % des emplois français de ce secteur. C’est sur cet aspect économique que porte ma question.

Pendant des années, des plans de développement de cette filière se sont succédé, créant de multiples structures et échelles d’intervention. Or, dans un secteur de long terme comme celui-ci, les propriétaires forestiers et l’ensemble des professionnels ont naturellement besoin, pour stimuler les investissements porteurs d’avenir, de visibilité sur la durée, d’acteurs bien identifiés, bref de lisibilité et de stabilité.

Leurs préoccupations sont multiples, qu’elles concernent le renouvellement des forêts, l’adaptation de la production forestière aux besoins des marchés, la stratégie industrielle, la gestion des dégâts du gibier, les risques phytosanitaires, ou encore la formation des professionnels de l’exploitation.

M. le ministre de l’agriculture a mandaté quatre personnalités pour lui remettre un rapport, afin de poser les bases d’un plan recherche et innovation 2025 pour la filière forêt-bois. Les conclusions de cette mission, remises le mois dernier, sont-elles susceptibles d’apporter des éléments de réponse aux préoccupations dont je viens de faire état, au plan tant environnemental qu’économique ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Juliette Méadel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'aide aux victimes. Madame la sénatrice, je vous prie de nouveau de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Stéphane Le Foll, qui est actuellement en réunion avec le nouveau président des Jeunes agriculteurs, M. Jérémy Decerle.

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt prévoit la validation, par décret, d’un programme national de la forêt et du bois fixant les orientations de la politique forestière pour les dix prochaines années.

Au terme d’une année de travaux, menés par le ministère chargé de la forêt, en collaboration étroite avec toutes les administrations concernées et la filière dans son ensemble, un projet de programme national a été soumis, le 8 mars dernier, au Conseil supérieur de la forêt et du bois et a reçu un avis positif à la quasi-unanimité. Ce document est désormais soumis à l’Autorité environnementale, qui rendra son avis au mois de juillet prochain. Il fera ensuite l’objet d’une consultation du public, telle que la loi le prévoit.

L’ambition du programme national est de créer de la valeur et de l’emploi à partir de la richesse de la forêt française, en mobilisant cette ressource dans le strict respect d’une gestion durable. Le programme affiche quatre objectifs ambitieux, déclinés et adaptés par le biais d’un grand nombre d’actions concrètes. En outre, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt prévoit qu’il doit faire l’objet d’une adaptation au plan régional, au travers des programmes régionaux de la forêt et du bois. Ces programmes seront élaborés dans le cadre de commissions régionales de la forêt et du bois, coprésidées par le préfet de région et le président du conseil régional, et regroupant l’ensemble de la filière.

L’élaboration des programmes régionaux, en cohérence avec le programme national, sera donc l’occasion, pour chaque région, de décliner la politique forestière pour les dix prochaines années, de l’adapter aux spécificités locales – essences, tissu industriel, tourisme, etc. – et de donner de la visibilité aux acteurs de la filière dans leur ensemble.

Le ministre de l’agriculture a récemment sollicité les préfets pour leur demander une première version de ces programmes régionaux d’ici à la fin de l’année 2016, afin de finaliser les travaux en 2017.

La cohérence de la politique forestière, politique stratégique pour notre pays, dans ses différentes dimensions – productive, à tous les stades de la transformation, environnementale, touristique et d’activités de loisirs –, a été fortement renforcée par le Gouvernement, au travers du programme national, mais également du contrat de filière forêt-bois.

Désormais, nous entrons dans la phase de mise en œuvre de ces avancées majeures pour la filière et dans le temps de la déclinaison régionale de ces orientations stratégiques, afin de pouvoir les adapter au plus près des réalités et des enjeux des territoires.