Mme la présidente. Le sous-amendement n° 28, présenté par M. del Picchia et Mme Durrieu, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n°10 rectifié, alinéa 3

Remplacer les mots :

le 1er mars 2014, puis

par le mot :

et

La parole est à M. Robert del Picchia, rapporteur.

M. Robert del Picchia, rapporteur. Cette mesure devrait satisfaire M. Malhuret, puisque ce sous-amendement tend à préciser et à renforcer le sens des amendements identiques nos 10 rectifié et 26. En effet, la date du 1er mars 2014 vise l’autorisation donnée par la Russie de recourir à la force et non le recours à la force. En proposant de supprimer cette date, nous nous concentrons sur le recours à la force, qui est ce que nous voulons condamner.

Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

ait autorisé le recours à la force

par les mots :

ait effectué une intervention militaire

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Il me semblait scandaleux d’écrire « que la Fédération de Russie ait autorisé le recours à la force ». Toutefois, dans la mesure où il est fait état du recours à la force en soi, je retire mon amendement au profit de l’amendement n° 10 rectifié.

Mme la présidente. L’amendement n° 2 est retiré.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Robert del Picchia, rapporteur. Le terme « regrettant » est effectivement trop faible au regard de la gravité des violations commises. Nous sommes donc favorables au terme « condamnant », qui nous paraît plus approprié.

Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement n° 28.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Conformément à la position constante de la France, qui consiste à condamner l’annexion de la Crimée et le recours à la force, car ils constituent des violations du droit international, le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements, ainsi que sur le sous-amendement n° 28.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 28.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 10 rectifié, modifié, ainsi que l’amendement n° 26, considéré comme modifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 3, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

Regrettant l’implication de la Russie et de Russes dans la déstabilisation de certaines régions de l’Est de l’Ukraine qui a conduit à un conflit entre l’armée ukrainienne et des forces se déclarant pro-russes défiant l’autorité de l’État ukrainien et remettant en cause l’intégrité territoriale de l’Ukraine ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Si nous souhaitons contribuer à une résolution de ce conflit, nous devons dire les choses telles qu’elles sont.

M. Poutine l’a reconnu lors d’un entretien télévisé : une intervention russe a eu lieu dans l’est de l’Ukraine. Les troubles du Donbass ont, pour une très grande majorité, été amorcés par des mercenaires qui n’étaient pas issus de cette région, mais qui venaient de Russie. Ces événements ont prolongé l’entreprise d’annexion de la Crimée. Je le répète, ce sont là les propos du président russe lui-même.

En refusant de dresser ce constat, on semble s’accommoder de la situation actuelle, à savoir un conflit gelé.

Or, en la matière, nous sommes face à des risques terroristes. L’Ukraine était une puissance nucléaire jusqu’en 1993. À cette époque, des garanties lui ont été apportées pour ce qui restait de son arsenal.

J’ajoute qu’un conflit gelé en Ukraine ferait courir des risques à l’Europe tout entière. Il fragilise déjà la solidarité européenne.

À cet égard, la France ne saurait dévier de la ligne qu’elle a suivie depuis Yalta. Cette ligne a été fixée par le général de Gaulle et confirmée par François Mitterrand. Elle a également été adoptée par l’Allemagne, en particulier par Willy Brandt dans le cadre de son Ostpolitik. Elle consiste à refuser tout partage de l’Europe.

Aujourd’hui, nous devons exiger que l’ensemble de l’Ukraine soit souveraine. Aussi, nous devons dénoncer les interventions extérieures qui se déroulent sur son territoire !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Josette Durrieu, rapporteur. Monsieur Leconte, j’ai bien entendu vos arguments. Néanmoins, cet amendement tend à déséquilibrer le présent texte. Mieux vaut s’en tenir à la description à laquelle procède l’alinéa 6 dans sa rédaction actuelle.

Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 24, présenté par M. Malhuret, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer les mots :

, au détriment des populations et des entreprises

La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. Avec l’alinéa 7, nous continuons à nous excuser, à nous auto-flageller : « Nous sommes les méchants ! Les sanctions sont prises au détriment des populations et des entreprises ! » Mais cette proposition de résolution n’accorde aucune phrase, aucun mot de compassion aux victimes de ce conflit, aux 9 000 morts déplorés en Ukraine, aux passagers du Boeing malaisien. À aucun moment elle n’évoque la misère absolue dans laquelle vit la population de l’est de l’Ukraine. À aucun moment elle ne rappelle que ce pays est lentement saigné par son voisin.

Tout ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine n’est-il pas, beaucoup plus que les sanctions que nous prenons, au détriment des populations et des entreprises ? À défaut de le dire clairement dans le présent texte, abstenons-nous de cette auto-flagellation : supprimons ce membre de phrase qui n’apporte rien, et qui introduit même une restriction !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Robert del Picchia, rapporteur. À notre sens, la précision que cet amendement tend à supprimer ne vise pas uniquement les populations et les entreprises russes : elle concerne tout aussi bien les populations et les entreprises européennes. Elle souligne les dommages causés par les sanctions, des deux côtés.

Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Bien entendu, les sanctions adoptées emportent des conséquences économiques : c’est là leur objet même. Mais, malgré d’indéniables impacts de court terme, tous les acteurs, y compris les acteurs économiques, ont intérêt au respect du droit international et à la mise en œuvre des accords de Minsk.

À ce titre, je rejoins le raisonnement suivi par M. Malhuret : nous devons assumer l’utilisation de cet outil diplomatique que sont les sanctions, pour aboutir à une solution diplomatique et politique.

Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

Observant qu’en réaction aux sanctions européennes, la Fédération de Russie a décidé le 7 août 2014 de mettre en place des sanctions, en particulier en généralisant un embargo sur les produits alimentaires qu’elle avait déjà mis en œuvre dès l’été 2013 pour certains produits et pour certains pays de l’Union européenne ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement tend à rétablir la chronologie des faits mentionnés.

L’embargo dont il est question n’a pas été décidé en réaction aux sanctions européennes : il est antérieur à l’ensemble de la crise ukrainienne. À cet égard, l’alinéa 9 entre en contradiction avec l’alinéa 21, lequel précise bien la chronologie.

À propos de l’embargo qui visait un certain nombre de pays d’Europe avant la crise ukrainienne, la France n’a pas manifesté de solidarité européenne. Au contraire, nous avons profité d’un défaut de solidarité. La Russie ne visait pas tous les pays européens. Elle limitait son embargo à un certain nombre d’États.

Au demeurant, cette proposition de résolution, que le Sénat va sans doute voter, n’est pas non plus un signe de solidarité européenne.

Or, si nous voulons travailler et dialoguer avec la Russie, nous devons avant tout être solidaires entre Européens. C’est faute d’une telle solidarité en 2013 que le problème posé par cet embargo s’est envenimé.

Je le répète, la cause initiale, c’est non pas la crise ukrainienne, mais le manque de solidarité entre Européens, que le vote d’une telle proposition de résolution ne pourra que réaffirmer.

Une fois de plus, on m’opposera qu’une telle rédaction n’est pas équilibrée. Mais on ne peut savoir où l’on va en avançant les yeux fermés !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Josette Durrieu, rapporteur. Monsieur Leconte, le présent amendement tend à introduire une confusion relativement dangereuse.

Dès 2013, soit avant la crise ukrainienne, la Russie a instauré un embargo sur les porcs. Cette décision légitime était une réaction à la découverte de quelques cas de peste porcine africaine au sein des élevages européens.

Ensuite, à l’été 2014, la Russie a décrété un embargo économique en réaction aux sanctions européennes.

Techniquement et juridiquement, ces deux embargos n’ont rien à voir. Or vous mélangez les deux ! Il n’est absolument pas dans notre intérêt d’assimiler le premier au second. Bien au contraire, nos efforts doivent tendre à les dissocier.

M. le secrétaire d’État l’a rappelé : M. le ministre de l’agriculture est allé à Moscou plaider pour que la France soit exemptée de l’embargo sanitaire lié à la peste porcine. Ce dispositif pénalise injustement et fortement la filière française du porc, alors même que nos élevages ne sont pas affectés par cette maladie.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Le présent amendement tend bel et bien à introduire une confusion entre les diverses mesures édictées par la Fédération de Russie. Il ne faut pas mélanger l’embargo sanitaire, antérieur au conflit ukrainien, et les contre-mesures russes.

En conséquence, le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Je me permets d’insister : peut-être les responsables politiques français n’ont-ils seulement pas remarqué que, dès l’été 2013, divers pays européens avaient été visés par un embargo russe !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

Constatant que l’absence de retrait des armes lourdes, les violations de cessez-le-feu provoquant chaque semaine sur le territoire ukrainien la mort de plusieurs soldats ukrainiens, l’incapacité pour les autorités ukrainiennes de se déplacer et d’envisager la mise en place d’un processus électoral dans les régions occupées rendent difficile d’exiger au préalable la mise en œuvre de la partie institutionnelle des accords de Minsk ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. À mon sens, la rédaction de l’alinéa 12 mérite d’être précisée.

Quand on regarde la situation de très loin, on observe que la ligne de front n’a globalement pas bougé depuis un peu plus d’un an. On en déduit que la Russie a respecté sa part du contrat. Dans le même temps, on ne retient qu’une seule obligation, incombant à l’Ukraine : la réforme constitutionnelle, au sujet de laquelle M. Porochenko s’est bel et bien engagé à Minsk.

Toutefois, la situation ne peut pas être examinée de manière aussi lointaine ! Dans le détail, elle est plus complexe que cela.

Sur le terrain, des soldats ukrainiens meurent encore chaque semaine. Et je ne parle pas du respect des droits de l’homme, qui, en Crimée, régresse jour après jour ! Or on ne saurait envisager l’organisation d’élections dans un territoire où il est impossible de se déplacer.

Si nous voulons convaincre nos homologues ukrainiens de conduire à son terme la réforme constitutionnelle, d’aller avec confiance vers une loi électorale spécifique aux régions du Donbass, vœu que traduisent les accords de Minsk, alors on ne saurait se contenter de survoler le problème.

Il faut préciser les difficultés existantes et montrer que nous en sommes conscients. De loin, on peut avoir le sentiment que c’est maintenant à l’Ukraine de tout faire. Mais la situation n’est pas si simple !

Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Maurey, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Après le mot :

caractère

insérer les mots :

très

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Cet amendement, très modeste, tend à préciser que le cessez-le-feu est respecté de manière « très partielle » et non simplement « partielle ».

Évoquer un respect « partiel », revient véritablement à verser dans la litote. Je me suis rendu à Marioupol aux côtés de Jacques Legendre, et je le confirme : nous y avons entendu le son du canon.

Des armes lourdes sont déployées sur le terrain, des militaires russes sont présents en Ukraine. La moindre des choses est donc de reconnaître que le cessez-le-feu n’est respecté que de manière « très partielle ».

Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par M. Malhuret, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Après le mot :

caractère

insérer les mots :

seulement très

La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. À quelques nuances sémantiques près, cet amendement a exactement le même objet que le précédent.

Que voulons-nous dire ? Que la situation en Ukraine s’est améliorée ? Dans ce cas, il faut en rester à la rédaction actuelle. Que cette situation s’est détériorée ? Dans ce cas, il faut opter pour une autre formulation.

La situation en Ukraine est en train de se dégrader. Je suis loin d’être seul à dresser ce constat. Ce dernier semble même faire l’unanimité. La consolidation des forces rebelles se poursuit dans la région de Donetsk et dans le Donbass. Tôt ou tard, si nous ne faisons pas preuve de fermeté, les troubles s’étendront jusqu’à Marioupol.

La mention d’un respect « partiel » peut avoir une connotation positive. Nous devons affirmer au contraire que nous sommes très préoccupés par le caractère seulement très partiel de la mise en œuvre des accords de Minsk. C’est là un signal important que nous devons émettre !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Robert del Picchia, rapporteur. Il importe que chacune des parties avance indépendamment des progrès accomplis par l’autre. En justifiant l’inaction de l’une par les insuffisances de l’autre, on ne les incite pas à agir. Au contraire, on contribue à consolider le statu quo. Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 5 rectifié.

L’amendement n° 12 rectifié vise à souligner le caractère « très partiel » des progrès faits dans l’application des accords de Minsk.

Il nous semble hasardeux de vouloir estimer le niveau des progrès accomplis en la matière. Aucun des acteurs engagés dans la mise en œuvre des accords ne s’y risque, que ce soient l’OSCE, qui est présente sur le terrain, l’Union européenne ou encore ses États membres !

Cet alinéa 12 doit donc se borner à constater les avancées accomplies. On peut objectivement citer certaines d’entre elles, sans chercher à les atténuer ou à les valoriser : la réforme constitutionnelle en cours, l’accord relatif au retrait des armes légères, le rétablissement partiel des échanges économiques, les échanges de prisonniers, etc.

Dans ce cadre, l’adjectif « partiel » est le terme le plus neutre, celui qui reflète la réalité objective.

L’amendement n° 12 rectifié appelle donc, de la part de la commission, un avis défavorable.

Pour les mêmes raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 25.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Pour ce qui concerne ces trois amendements, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret, pour explication de vote.

M. Claude Malhuret. Monsieur le rapporteur, je vous ai écouté avec attention.

À propos de l’amendement n° 5 rectifié, vous déclarez que l’on observe de l’inaction d’un côté et des insuffisances de l’autre. En conséquence, il faudrait adopter une ligne médiane. Mais la situation n’est pas symétrique : il y a un agresseur et un agressé ! Nous ne devons pas accréditer l’idée selon laquelle se trouvent, face à face, deux adversaires à égalité.

À propos de l’amendement n° 12 rectifié, vous assurez que l’on ignore ce qui se passe réellement en Ukraine. Aussi, vous plaidez pour le terme « partiel », qui serait à la fois objectif et neutre.

Après tout, j’aurais pu vous proposer un amendement évoquant une régression, plutôt que le caractère « partiel » de l’amélioration. Je me suis contenté d’ajouter « seulement très partiel ».

Je ne suis pas d’accord avec Robert del Picchia quand il affirme qu’aucun des acteurs engagés sur le terrain ne nous permet de connaître la situation.

Une des dernières réunions du Conseil de sécurité de l’ONU a donné lieu à un communiqué qui rend compte ainsi des propos du vice-secrétaire général de l’ONU, M. Eliasson : « Les accords de Minsk, dont la plupart des dispositions sont restées lettre morte, doivent pleinement être mis en œuvre, a-t-il insisté, appuyé en ce sens par la quasi-totalité des intervenants. » Il est ensuite directement cité : « La plupart des dispositions des accords de Minsk sont restées lettre morte […]. Ces difficultés menacent le processus politique dans son ensemble. »

Mon cher collègue, vous avez évoqué l’OSCE, dont le secrétaire général, Lamberto Zannier, a été interviewé il y a quelques semaines par le journal Le Monde. À la question « Quelle est la situation sur le terrain dans l’est de l’Ukraine ? », il répond : « Pas bonne. Les violations du cessez-le-feu sont systématiques et nos personnels se voient entravés dans leur liberté de mouvement, surtout à l’est. […] »

« D’où viennent ces violations ? », demande Le Monde.

Réponse : « Les forces séparatistes procèdent à des exercices militaires assez systématiques. C’était encore le cas la nuit dernière entre Donetsk et la frontière. Ça a duré presque toute la nuit. Nous constatons par ailleurs que des armements lourds sont sortis des zones de dépôt et déployés près de la zone de contact. La situation est donc en train de se détériorer. »

Mon cher collègue, le secrétaire général de l’OSCE estime non seulement que l’amélioration n’est pas « partielle », mais que la situation se détériore !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Je ne peux que confirmer ce que vient de dire notre collègue Claude Malhuret à propos de l’évolution de la situation localement.

Monsieur le rapporteur, c’est une question non pas de rapport de force ou d’équilibre, mais de conviction. Du côté ukrainien, nous cherchons aujourd’hui à mettre en confiance le Conseil suprême d’Ukraine afin de finaliser la réforme constitutionnelle. Il est indispensable que nous y travaillions afin de montrer à ses membres que cette réforme sécurisera l’évolution de leur pays.

Dans cette enceinte, nous savons que ce n’est pas parce que le Président de la République souhaite une réforme constitutionnelle que le Parlement s’exécute ! (Sourires.) Ce qui est vrai pour la France l’est aussi pour l’Ukraine, parce qu’il s’agit d’une démocratie, quoi que l’on pense de son fonctionnement, avec des parlementaires qui ont, autant que les nôtres, besoin d’être convaincus lorsqu’on leur demande de voter une réforme constitutionnelle.

Notre rôle est de les accompagner. Nous avons la conviction que cette réforme est nécessaire, qu’elle sera positive pour eux, pour la stabilité et pour l’Europe, nous devons donc leur donner confiance.

À cette fin, il nous faut leur offrir des garanties. Je crains qu’en ne disant pas les choses, nous ne parvenions pas à obtenir leur confiance et que nous n’échouions à les accompagner dans cette modification constitutionnelle, qu’il leur est difficile d’accepter, même si nous avons la conviction qu’elle est indispensable.

Nous avons besoin que la Russie évolue, parce que, si ce n’était pas le cas, ils ne pourraient pas nous suivre. C’est la raison pour laquelle il me semble important de dire les choses et de montrer à nos partenaires ukrainiens que nous les avons compris et que nous sommes prêts à les accompagner.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Je m’étonne que la commission soit défavorable à ce que l’on souligne que le respect des accords de Minsk est très partiel. Encore une fois, cette formule est une litote ! Claude Malhuret a cité certaines déclarations récentes qui confirment que, malheureusement, ces accords ne sont pas appliqués sur le terrain.

J’ai eu la chance de rencontrer sur le terrain, à Marioupol, des représentants de l’OSCE, lesquels nous ont malheureusement confirmé qu’ils ne parvenaient pas à se rendre dans les zones de combat, qu’ils y rencontraient de très grandes difficultés et s’y sentaient très directement menacés dans leur sécurité et dans leur intégrité.

Je suis donc étonné et déçu que l’on aille jusqu’à contester l’expression « très partiel ».

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Comme notre collègue Hervé Maurey, je me souviens d’avoir entendu les observateurs de l’OSCE à Marioupol nous expliquer qu’ils n’avaient pas les moyens de passer de l’autre côté de ce qu’il faut bien appeler la ligne de front. Cela s’apparente clairement à une situation de guerre, nous ne pouvons pas considérer que nous assistons au retour à une situation à peu près normale.

Nous devons en être conscients et il est temps, selon moi, de le dire ici. Si nous ne dépeignons pas la situation telle qu’elle est, nous ne saurons pas construire les conditions d’une paix.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voudrais revenir sur les propos de Jacques Legendre et Claude Malhuret. Compte tenu du rapport de force, de l’occupation en Ukraine et de ce qui se passe en Russie, on ne peut pas avoir une position entièrement équilibrée dans l’appréciation de la situation.

Cette assemblée s’oriente vers l’adoption de cette résolution, qui va lever les sanctions,…

M. Robert del Picchia, rapporteur. Elle ne va rien lever du tout !

Mme Nathalie Goulet. … ou tout au moins, suggérer leur levée.

Afin de justifier la position que nous sommes en train d’adopter, compte tenu des votes précédents, il serait selon moi beaucoup plus crédible de décrire la situation.

Dans l’adoption de cette résolution, le Sénat peut considérer que les accords ont été très partiellement mis en œuvre. Le descriptif que propose M. Leconte est peut-être un peu long, mais si nous voulons susciter l’adhésion à notre position, nous devons l’asseoir sur des éléments concrets.

Afin de ne pas complètement perdre la confiance de nos collègues ukrainiens, du Parlement, du président et du peuple de ce pays, notre intérêt est de débattre de cette situation sans nous contenter d’ouvrir le robinet d’eau tiède. La situation locale est loin d’être complètement équilibrée et il faut que cette résolution émanant du Sénat reflète la réalité sur place, même si ses conclusions ne nous conviennent pas complètement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 5 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 6 est présenté par M. Leconte.

L’amendement n° 13 est présenté par M. Maurey.

L’amendement n° 19 est présenté par M. Malhuret.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 6.

M. Jean-Yves Leconte. Par cet amendement, je propose de supprimer l’alinéa 13. En effet, c’est bien l’objet de sanctions que d’emporter des conséquences obligeant la partie sanctionnée à changer de comportement.

Par ailleurs, les échanges entre la Russie et l’Union européenne ont d’abord subi, d’une part, la crise économique en Russie, qui date de 2013, indépendante de la politique des sanctions et aggravée par la chute des revenus pétroliers, qui recouvrent une part importante de l’activité du pays, et, d’autre part, les nécessaires adaptations de l’agriculture européenne aux exigences des marchés mondiaux, en particulier dans le domaine sanitaire. Sur ce point, nous sommes confrontés depuis très longtemps à une difficulté dans nos échanges avec la Fédération de Russie, qui fait valoir des exigences particulières.

Oublier ces deux causes principales de la baisse des échanges et en rendre responsables les sanctions ne conduit qu’à repousser la prise de conscience des difficultés économiques réelles que nous rencontrons, ce qui à moyen et long terme ne peut servir ni nos deux économies ni les échanges commerciaux entre l’Union européenne et la Russie.

Je souhaite la suppression de cet alinéa afin que nous ne fassions pas croire que les difficultés actuelles découlent des sanctions.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey, pour présenter l’amendement n° 13.

M. Hervé Maurey. Cet amendement a le même objectif. Le propre des sanctions est d’emporter des conséquences négatives. Cet alinéa me paraît donc sans objet.

Concernant la question des sanctions, certains orateurs ont affirmé précédemment qu’elles n’avaient pas eu d’effet. Personne ne peut dire cela. S’il n’y en avait pas eu, la situation serait peut-être encore pire !

Ensuite, lorsque l’on met en place des sanctions pour des causes précises, réelles et sérieuses – l’annexion de la Crimée et la présence dans l’est de l’Ukraine sous couvert de pseudo-séparatisme –, elles doivent être maintenues tant que ces causes demeurent ! Il s’agit d’un principe général. Au nom de quoi pourrions-nous dire tout d’un coup que, finalement, les sanctions n’étant pas très efficaces – certains l’on dit ! –, autant les lever ? Ce serait un aveu de faiblesse absolument dramatique.