compte rendu intégral

Présidence de M. Hervé Marseille

vice-président

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac,

M. Philippe Nachbar.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

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Dépôt de documents

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la contre-expertise de l’évaluation socio-économique du projet de construction du réseau de transport public du Grand Paris pour le tronçon Pont de Sèvres – Saint-Denis Pleyel (ligne 15 ouest), accompagnée de l’avis du commissariat général à l’investissement.

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis à la commission des finances, à la commission des affaires économiques et à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

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Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

situation de la recherche clinique et des biotechnologies en france

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, auteur de la question n° 1133, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Françoise Gatel. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur la situation de la recherche clinique et des biotechnologies en France et ses conséquences sur l’innovation.

Ce secteur stratégique souffre aujourd’hui de nombreuses difficultés qui bloquent toute la filière. Ainsi, la grève des comités de protection des personnes empêche actuellement tout essai clinique depuis plusieurs mois dans la Grand Ouest, avec pour conséquence des retards significatifs dans le développement des projets industriels innovants.

Aujourd’hui, dans un secteur qui est extrêmement compétitif, de nombreux contrats ont été perdus, des dossiers ont été mis en attente et des surcoûts importants ont été engendrés pour les entreprises.

À cela s’ajoute le dysfonctionnement structurel de la recherche clinique française, avec les problèmes rencontrés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM.

En effet, l’ANSM met plus de soixante jours pour autoriser le lancement d’un essai clinique, quand la Grande-Bretagne en met vingt, la Belgique quinze et les Pays-Bas dix, alors que la réglementation est identique pour tous les pays européens. Les délais de réponse, incompatibles avec la réactivité indispensable à la création de dispositifs novateurs, limitent le développement de nouveaux produits de santé.

La rigidité administrative française et sa surenchère normative « tétanisent » l’innovation et encouragent largement la délocalisation des essais à l’étranger.

Il n’est bien sûr nullement question de négliger la sécurité nécessaire pour les patients. Mais en l’occurrence, le principe de précaution poussé ici à l’extrême aboutit à mettre en péril un secteur porteur de développement économique et d’innovation en termes de santé publique.

Madame la secrétaire d'État, quelles solutions le Gouvernement compte-t-il apporter concernant le blocage des essais cliniques engendré par la grève des comités de protection des personnes ? Comment comptez-vous améliorer le fonctionnement de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, afin notamment de parvenir à des délais raisonnables d’obtention d’autorisation d’essais cliniques ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Madame la sénatrice Françoise Gatel, vous m’interrogez sur la grève des comités de protection des patients, ou CPP, et ses conséquences sur la recherche clinique en France.

Comme Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes l’a déjà indiqué à de nombreuses reprises, l’objectif du Gouvernement est de promouvoir la recherche clinique de qualité en France et l’innovation. À cet effet, le projet de loi de modernisation de notre système de santé, que la commission des affaires sociales du Sénat examinera demain 22 juillet, comprend de nombreuses dispositions consacrées à la recherche et à l’innovation au service des malades.

Pour ce qui concerne les CPP, le mouvement de grève était lié à la question de la soumission à cotisations sociales des indemnités versées aux rapporteurs des dossiers examinés par ces comités. De nombreux échanges ont eu lieu entre les services du ministère de la santé et les CPP ; la grève est maintenant terminée et l’examen des dossiers a repris. Certains comités ont d’ailleurs organisé des réunions supplémentaires pour résorber les retards.

Pour ce qui est des délais de rendu par l’ANSM des avis sur les demandes d’autorisation d’essais cliniques, le contrat d’objectifs et de performance de l’ANSM, que Mme la ministre vient de signer, prévoit dans l’orientation stratégique n° 2 intitulée « Favoriser un accès rapide, encadré et large à l’ensemble des produits de santé » une action consacrée à la mise en œuvre du règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain.

Dès la fin du mois de septembre 2015, l’ANSM mettra donc en place une phase pilote pour se préparer aux nouvelles dispositions du règlement européen, dont l’entrée en vigueur devrait intervenir en mai 2016. Madame la sénatrice, ces travaux permettront à la France de réduire les délais d’autorisation des essais cliniques, dans l’intérêt des patients.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel.

Mme Françoise Gatel. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Nous serons très attentifs aux délais d’instruction des dossiers, car nous connaissons en Bretagne des débuts de délocalisation des essais, ce qui n’est pas sans incidence pour la compétitivité de la France dans le domaine de la recherche et de l’innovation.

attractivité internationale du système de santé français

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la question n° 1164, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur l’attractivité internationale du système de santé français. Ce que l’on appelle le tourisme médical représente un marché considérable, estimé à 60 milliards d’euros sur le plan mondial, en croissance d’environ 20 % par an. Le nombre de patients qui se rendent à l’étranger pour recevoir des soins aurait doublé en cinq ans, passant de 7,5 millions en 2007 à 16 millions en 2012.

L’accueil de patients étrangers haut de gamme pourrait permettre de créer de 25 000 à 30 000 emplois, avec des retombées directes pour le secteur de la santé, de l’hôtellerie, de la restauration ou encore du BTP. Il contribuerait aussi au financement de notre recherche médicale. Il ne faut pas non plus sous-estimer les retombées en termes de stratégie d’influence, de diplomatie économique, de prestige international et de renforcement des partenariats internationaux dans le domaine médical.

Hélas, force est de constater que la France tarde à se positionner sur ce marché, alors même qu’elle dispose de filières d’excellence réputées au niveau mondial, avec un temps d’attente relativement court et un rapport qualité-prix compétitif. Quelques mois après la remise du rapport de Jean de Kervasdoué, peu de mesures semblent avoir été mises en place pour améliorer l’attractivité internationale de nos services hospitaliers.

Pour structurer une filière de soins haut de gamme de réputation internationale, l’appui des pouvoirs publics est indispensable. Cela passe par exemple par la création de partenariats entre structures hôtelières et structures hospitalières, avec l’élaboration de prestations « tout compris », la formation du personnel aux langues étrangères et la mise en place de structures susceptibles de donner une visibilité internationale aux filières d’excellence, comme cela se fait en Suisse ou au Royaume-Uni.

La création d’un opérateur unique permettrait de rationaliser une offre actuellement dispersée et faciliterait une meilleure gestion de ces patients. Celle-ci est indispensable, comme le prouve la révélation, voilà quatre jours, de la dette de près de 120 millions d’euros accumulée par les caisses de sécurité sociale étrangères à l’égard de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Il faut tout de même prêter attention à ce que les nouvelles mesures ne viennent pas compliquer injustement l’accès aux soins des Français de l’étranger non affiliés à la sécurité sociale française, par exemple toutes les personnes employées en contrat local à l’étranger.

Madame la secrétaire d'État, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour promouvoir l’attractivité de notre système de santé, qui est l’un des meilleurs au monde ? Quel sera le calendrier de mise en œuvre de ces mesures, à l’heure où de nombreux autres États se sont déjà positionnés sur ce marché stratégique ? Attendre revient à se fermer des portes !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Madame la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, le rapport définitif de M. de Kervasdoué a en effet été remis le 12 mars dernier à M. le ministre des affaires étrangères et à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Un groupe de travail a été mandaté par M. Laurent Fabius et Mme Marisol Touraine pour veiller à la concrétisation et à l’appropriation de la dynamique prévue dans ce rapport par la communauté hospitalière et médicale française. Ce groupe, auquel participent notamment la Fédération hospitalière de France, la Fédération de l’hospitalisation privée, la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne et la Fédération Unicancer, travaille actuellement à mieux valoriser l’excellence de l’offre de soins hospitalière française et à la faire connaître à l’international. Il rendra prochainement ses conclusions.

Le Gouvernement est décidé à créer un environnement favorable pour que les établissements de santé français valorisent leurs atouts en matière d’accueil de patients étrangers et se positionnent sur le plan international au titre de l’excellence médicale. En effet, des mesures sont prises pour améliorer les possibilités de formation en France de médecins étrangers, afin d’établir des liens durables avec certains pays et de favoriser ainsi l’orientation de la patientèle étrangère qui nécessite des soins hautement spécialisés vers les équipes médicales françaises.

Dans ce cadre, un amendement a été adopté lors de l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui vise à faciliter l’accueil des praticiens de pays extra-Schengen souhaitant accomplir un troisième cycle d’études médicales ou des formations post-doctorales en France.

Enfin, la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques adoptée le 10 juillet 2015 par le Parlement permettra aux centres hospitaliers universitaires de créer des filiales pour assurer des prestations de services et, ainsi, mieux valoriser leur expertise médicale à l’international.

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces informations. Il me semble indispensable d’aller le plus vite possible dans le sens que vous évoquez.

Je veux rappeler que nous disposons de l’excellence. S’il faut, bien sûr, accueillir chez nous des médecins étrangers en vue de leur apporter une formation – c'est très important –, nous devons aussi offrir un service d’accueil. En Suisse et aux États-Unis, certains hôpitaux offrent un accueil quasiment « cinq étoiles » à des patients haut de gamme, avec des tarifs bien différents de ceux que nous, Français, payons.

Nous avons tous sur ces travées le souci des finances publiques. Il faut développer ce tourisme d’accueil médical haut de gamme, pour éviter que des personnalités ne se rendent dans d’autres pays au lieu de venir chez nous. Ce serait bon pour nos finances publiques, pour l’image de notre pays à l’étranger et pour le rayonnement de notre médecine, qui en est l’un des acteurs essentiels.

désertification médicale en zone rurale et zone de montagne

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 1165, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d'État, l’une des questions qui est au cœur des préoccupations des élus locaux, des élus de terrain, est celle de la santé de leurs administrés.

Quand nous constatons en zone rurale et en zone de montagne qu’il n’y aura bientôt plus de médecins, que la pharmacie ferme ses portes et que, dans le meilleur des cas, il ne reste qu’un cabinet infirmier, nous nous inquiétons.

Bon nombre de communes des Alpes de Haute-Provence, comme d’autres départements d’ailleurs, voient leur dernier médecin partir et ne parviennent plus à maintenir en activité un cabinet médical. Certaines communes de mon département n’ont plus de praticien depuis 2008 !

La commune d’Enchastrayes-le Sauze, par exemple, dispose pourtant d’atouts : vastes cabinets médicaux, salle d’urgence et salle d’imagerie radiologique numérique.

Ces communes sont dynamiques et parfois même situées non loin de petites villes dont les cabinets médicaux sont saturés : des médecins installés pourraient ainsi recevoir les patients venant des communes voisines. Elles proposent, de plus en plus souvent, de prendre à leur charge les dépenses afférentes au fonctionnement du cabinet médical dont elles disposent, ainsi que le loyer.

En parallèle de ces difficultés à trouver des médecins, dans ces mêmes territoires, la réorganisation des services de soins de proximité menace les services de nos hôpitaux locaux ; disant cela, je pense à l’hôpital de Barcelonnette sur lequel j’ai déjà attiré votre attention.

Je relaie donc aujourd’hui auprès de vous, madame la secrétaire d’État, les alertes portées par tous ceux qui se battent au quotidien pour faire vivre leur territoire et les inquiétudes de ceux qui appréhendent de ne pas pouvoir recevoir de soins convenables à proximité de leur domicile. De telles situations ne sont plus acceptables dans nos départements.

L’accès de tous les Français à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire national a été annoncé comme une priorité absolue par le Gouvernement.

Alors que la rupture d'égalité dans l'accès aux soins se vit au quotidien, il est nécessaire, madame la secrétaire d’État, de prendre de nouvelles mesures plus qu'incitatives et de donner une ampleur nouvelle au « pacte territoire santé », mis en œuvre dès 2013 et que nous avons tous salué.

Il faut renforcer la présence de médecins sur l'ensemble de nos départements et soutenir les communes, notamment en zone de montagne et en zone rurale. Les chiffres relatifs aux Alpes-de-Haute-Provence sur lesquels certains analystes s'appuient ne doivent pas masquer les inégalités géographiques.

Madame la secrétaire d'État, quelles mesures nouvelles le Gouvernement propose-t-il pour répondre à cette problématique ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur, l’amélioration de l’accès aux soins de proximité et la réduction des inégalités entre les territoires sont bien des objectifs prioritaires du Gouvernement.

Pour y répondre, Mme Marisol Touraine a lancé fin 2012 le « pacte territoire santé » ; je ne reviendrai pas en détail sur ce programme ambitieux et pragmatique, aujourd’hui largement connu et reconnu.

Le bilan du pacte après deux ans montre bien qu’une nouvelle dynamique est maintenant lancée. À titre d’exemple, le contrat de praticien territorial de médecine générale, qui sécurise l’installation de jeunes médecins au cours de leurs deux premières années d’exercice, a permis l’installation de 411 professionnels dans des territoires manquant de médecins.

Aujourd’hui, nous devons conforter ces résultats, aller plus loin dans les mesures déjà prises et rester mobilisés, car l’implication de tous – agences régionales de santé, collectivités territoriales et professionnels de santé – est aussi un élément clef du succès du pacte. Ainsi, pour prolonger celui-ci, des dispositions ont été prises dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 afin de favoriser l’installation et le maintien des professionnels de santé sur les zones en difficulté ; l’une de ces dispositions intéresse en particulier les médecins de montagne.

En effet, le contrat de praticien isolé à activité fluctuante permet aux médecins généralistes de territoires fragilisés et dont l’activité présente une forte variabilité saisonnière de bénéficier d’une rémunération complémentaire.

Le département des Alpes-de-Haute-Provence s’inscrit dans cette dynamique. Depuis trois ans, on observe un bilan positif des installations de médecins généralistes : en effet, depuis 2013, vingt-quatre médecins se sont installés dans votre département, monsieur le sénateur, dont cinq dans des zones rurales ou de montagne, comme par exemple à Colmars, à La Motte-du-Caire, à Banon et à Allos.

Enfin, parce que l’implication de tous est aussi un facteur de succès du pacte, je tiens à souligner le travail partenarial qui a été mené dans votre région. En effet, le 2 juillet dernier, le prix 2015 de l’innovation de la sécurité sociale a été décerné au projet « Agir pour la démographie médicale dans les Alpes-de-Haute-Provence », résultant de la convention signée entre la caisse primaire d’assurance maladie, l’agence régionale de santé, le conseil départemental, l’ordre des médecins et la faculté de médecine.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, je ne doutais pas que de nouvelles mesures soient inscrites dans le projet de loi que vous venez de citer.

Je suis très attentif, vous le comprenez bien, aux problèmes de l’accès aux soins sur notre département, mais je pense que votre réponse a été claire, et je vous en remercie beaucoup.

gynécologie médicale

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, auteur de la question n° 1176, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Michelle Meunier. Madame la secrétaire d’État, la gynécologie médicale est une spécialité cruciale pour la santé et la qualité de vie des femmes, car elle assure leur prise en charge tout au long de leur vie. Elle les accompagne dans l’éducation à la sexualité et à la contraception, dans la prévention des infections sexuellement transmissibles, mais elle agit aussi en matière d’obstétrique et de dépistage des cancers ; en outre, elle intervient auprès des couples infertiles et en matière de procréation médicalement assistée ; enfin, elle accompagne les femmes au moment de la ménopause. Par ailleurs, ces professionnels, du fait de leur proximité avec les femmes, jouent aussi un rôle important dans la lutte contre les violences.

La gynécologie médicale a contribué, pour une très large part, à l’amélioration des indices de santé pour les femmes. J’en veux pour preuve la division par quatre du nombre de cancers du col de l’utérus en vingt ans. Seulement 6,7 % des femmes de cinquante ans ont subi une hystérectomie en France, alors que ce taux atteint 40 % aux États-Unis et de 20 % à 30 % dans le reste de l’Europe. Ce résultat est principalement dû à un suivi gynécologique personnalisé tout au long de la vie des femmes.

Or, alors que 60 % des femmes françaises consultent régulièrement un gynécologue, le conseil national de l’ordre des médecins a dressé un constat alarmant de la démographie des gynécologues médicaux. La réforme de l’internat de 1984 a supprimé la gynécologie médicale du cursus universitaire pour près de vingt ans ; il a fallu attendre 2003 pour qu’elle soit rétablie par la création d’un diplôme d’études spécialisées.

Cette absence de formation de professionnels pendant le temps d’une génération a provoqué une diminution de près de cinq cents spécialistes entre 2008 et 2013, soit le quart des effectifs. La moyenne d’âge des 1 350 gynécologues médicaux aujourd’hui en exercice est de cinquante-huit ans, et près de 60 % de ces professionnels cesseront leur activité d’ici à 2020.

Chaque année, le nombre de départements sans spécialiste augmente. Malgré les efforts consentis ces dernières années, le nombre de gynécologues récemment formés ne permettra pas de compenser les départs à la retraite envisagés.

Madame la secrétaire d’État, comment le Gouvernement pense-t-il compenser les nombreux départs à la retraite prévus et permettre ainsi à chaque femme, où qu’elle vive sur notre territoire, d’accéder aux services d’un médecin spécialisé en gynécologie médicale ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Madame la sénatrice, la réponse aux inégalités de santé et l’amélioration du parcours de santé des patients et des patientes dans toutes ses composantes – soins, prévention, dépistage, éducation à la santé – représentent des enjeux majeurs pour le Gouvernement.

La ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Mme Marisol Touraine, souhaite donc garantir aux Françaises la possibilité de consulter un gynécologue médical si elles le souhaitent.

Un certain nombre de mesures ont été prises pour consolider la formation des futurs gynécologues médicaux. En particulier, le nombre de postes d’internes en gynécologie médicale a été augmenté régulièrement et substantiellement, en concertation avec l’ensemble des acteurs, pour tenir compte des enjeux démographiques et des capacités de formation.

Ainsi, alors que, en 2012, le nombre de postes offerts en gynécologie médicale à l’issue des épreuves classantes nationales de médecine s’élevait à trente pour toute la France, Mme la ministre a porté ce nombre à quarante pour 2013, à quarante-huit pour 2014 et à soixante-huit pour 2015. Vous le voyez, le nombre de postes d’internes en gynécologie médicale a plus que doublé en trois ans.

Enfin, madame la sénatrice, vous avez raison d’insister sur la nécessité de permettre à toute femme, où qu’elle vive sur le territoire, d’accéder à un médecin spécialiste. C’est pourquoi le Gouvernement s’est mobilisé très rapidement pour améliorer l’accessibilité aux soins. Cette volonté politique a notamment trouvé sa traduction à travers le « pacte territoire santé ».

L’un des engagements du pacte a ainsi conduit à simplifier, en 2013, le dispositif du contrat d’engagement de service public, bourse versée aux étudiants en médecine en contrepartie d’un engagement à s’installer en zone sous-dense. Ce contrat est désormais ouvert aux étudiants et internes en médecine de toutes spécialités, dont la gynécologie médicale, en fonction des besoins identifiés localement et des projets professionnels des candidats.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Je vous remercie de l’annonce que vous venez de faire, madame la secrétaire d’État : soixante-huit postes ouverts en gynécologie médicale pour l’année 2015-2016, c’est vingt de plus que l’année dernière, ce qui est significatif.

Toutefois, nous le savons, il nous faudra encore revenir à cette question et poursuivre les efforts dans les années à venir pour que, comme vous le dites, chaque femme, là où elle se trouve en France, puisse avoir accès à la gynécologie médicale.

nécessaire développement des maisons d'assistants maternels

M. le président. La parole est à M. André Trillard, auteur de la question n° 1175, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie.

M. André Trillard. Madame la secrétaire d'État, je pense que l’affaire de la maison d’assistantes maternelles, ou MAM, Graine de malice, située à Bouguenais en Loire-Atlantique, contrainte de quitter ses locaux par une décision de justice en raison des « nuisances » subies par les riverains, est bien connue de votre collègue, secrétaire d’État chargée de la famille.

Conduites manu militari à déménager à leur frais et à tout remettre aux normes sans aucune aide – ni du département, ni de la métropole, ni de la région –, ces cinq assistantes maternelles vont toutefois pouvoir rouvrir le 1er septembre prochain leur MAM, en d’autres lieux sur la même commune, grâce à leur ténacité et à leur énergie.

Pourquoi cette affaire a-t-elle fait grand bruit en Loire-Atlantique, où s’ouvrent des MAM, bien qu’à un rythme insuffisant par rapport à la croissance de la population ligérienne et à la demande des parents ? Parce qu’elle a mis en lumière les difficultés de tous ordres que rencontrent la mise en place et le fonctionnement de ces structures d’accueil dont la création a été permise par la loi du 9 juin 2010, qui a pour origine – je tiens à le rappeler ici – une proposition de loi sénatoriale.

Ces difficultés ont pour noms : insuffisance de l’aide juridique, logistique et financière au moment de la création de ces structures et obstacles que celles-ci rencontrent lors de leur mise aux normes. Les MAM n’ont droit qu’à une prime à l’installation et à des prêts préférentiels, c’est tout !

Pourtant, elles présentent plusieurs avantages essentiels. Tout d’abord, elles offrent une amplitude horaire d’accueil inégalable, qu’aucune structure collective ne pourrait, pour des raisons de coût, proposer.

Ensuite, leur coût de fonctionnement est compatible avec les finances de toutes les communes, puisque celui d’une crèche représente, pour la municipalité, une charge financière moyenne par enfant sept fois plus élevée.

En outre, les MAM représentent une augmentation des capacités d’accueil et de la création d’emploi : elles permettent d’ouvrir la profession à des femmes dont le logement est trop exigu, non conforme, ou dont l’habitation est située dans une zone où la demande est trop faible.

Enfin, ces structures représentent une opportunité d’évolution de carrière pour les assistantes maternelles et ont un effet psychologique positif sur certains parents, réticents à l’idée de laisser leur enfant seul avec une assistante maternelle.

Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement a entre les mains un outil d’aménagement du territoire, un instrument de création d’emplois et un moyen d’améliorer la qualité de vie des parents comme des assistantes maternelles. Aussi, qu’entendez-vous faire pour le sécuriser juridiquement, le dynamiser et répondre ainsi au déficit de place de garde d’enfants, criant dans certaines zones ?