M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous appelez à la précision sur un sujet qui nécessite effectivement d’être traité avec la plus grande rigueur, eu égard à sa gravité.

Une réponse ne pourra être apportée qu’à travers une action et une mobilisation fortes des États de l’Union européenne.

Les drames humains qui se déroulent en Méditerranée résultent de la mise en place de filières de traite des êtres humains. Leurs organisateurs placent sur des embarcations de plus en plus frêles des migrants de plus en plus vulnérables et de plus en plus nombreux, les condamnant à une mort certaine. Ces filières doivent être démantelées et ceux qui les organisent sévèrement punis par la justice.

Dans cette perspective, la première chose à faire est d’aider les pays de provenance des migrants à contrôler leurs frontières. En effet, 70 % de ceux qui arrivent à Lampedusa transitent par la bande sahélienne et relèvent de l’immigration économique irrégulière. À l’occasion de la réunion des ministres de l’intérieur des pays du G5 du Sahel, j’ai proposé de mettre en place des coopérations entre nos services et les leurs pour assurer ce contrôle.

Par ailleurs, nous devons faire travailler ensemble nos services de justice et de police pour procéder au démantèlement de ces filières. Nous le faisons en France, en lien avec les services britanniques. L’an dernier, ce sont 236 filières supplémentaires de l’immigration irrégulière qui ont été démantelées, dont 30 % de plus à Calais.

Nous avons également le devoir de sauver des vies, dans le respect du droit de la mer. C’est l’un des objectifs assignés à l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, ou Frontex, dont l’action se substitue à l’opération Mare Nostrum.

Les migrants qui relèvent du droit d’asile en Europe doivent être accueillis sur la base des critères de celui-ci et répartis équitablement entre les pays de l’Union européenne. Le concept de quotas n’a pas de sens s’agissant de ceux qui ont vocation à obtenir le statut de réfugié : en instaurer signifierait que, au-delà d’un plafond, l’Europe refuse d’accueillir cette catégorie de migrants, ce qui serait contraire à la tradition de la République et aux valeurs de l’Union européenne.

En outre, ce concept n’a pas davantage de sens s’agissant des migrants qui relèvent de l’immigration irrégulière, car ceux-ci n’ont pas vocation à être accueillis en Europe. Ils doivent être reconduits à la frontière et faire l’objet de politiques de maintien dans leur pays, assorties d’actions de codéveloppement associant les pays de la bande sahélo-saharienne.

Telle est la politique de la France. Elle est claire et a inspiré celle de l’Union européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

amiante

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Mme Aline Archimbaud. Ma question, qui concerne la plupart des ministères, eu égard à la gravité du problème de santé publique qui la sous-tend, s'adresse à M. le Premier ministre.

Le drame de l’amiante aura fait, selon la Direction générale de la santé, qui s’appuie sur les travaux de l’Institut national de veille sanitaire, au moins 100 000 morts en 2050.

La commission des affaires sociales du Sénat a créé, en février 2013, un comité de suivi. Après avoir travaillé sur cette question de l’amiante et du désamiantage, il a rendu, en juillet 2014, voilà donc presque un an, ses conclusions.

Les propositions formulées par ce comité ont fait l’objet d’un complet consensus parmi les groupes politiques du Sénat. Nous avons notamment demandé la mise en place d’une structure de coordination interministérielle rattachée au Premier ministre.

Nous alertons régulièrement sur les dangers que représente aujourd’hui l’absence d’une stratégie nationale du désamiantage pilotée par les services du Premier ministre et associant l’ensemble des nombreux ministères concernés. Les médecins nous alertent déjà sur le risque de survenue d’une deuxième épidémie si le désamiantage n’est pas fortement piloté par les pouvoirs publics.

Il est urgent que soient fixées des priorités nationales : amélioration de la réalisation des diagnostics amiante – c’est aujourd’hui un gros point faible –, mise en place de financements pérennes et d’un échéancier, fléchage des crédits vers la recherche-développement sur les thèmes du diagnostic, des techniques du désamiantage et du traitement des déchets, développement d’une formation initiale et continue de tous les acteurs.

Il est possible de créer une filière économique du désamiantage à l’échelle nationale – sans doute pour plusieurs décennies –, qui serait, par ailleurs, pourvoyeuse d’emplois !

L’objectif est non de faire peur, mais d’affronter le problème lucidement, en mettant aussi en place un dispositif d’information du grand public.

Dix mois après la publication du rapport, nous n’avons aucune nouvelle du Gouvernement. Des représentants du comité de suivi ont été reçus fin octobre par le cabinet du Premier ministre, pour présenter ledit rapport. À ce jour, aucune réaction ne nous est parvenue.

On me dit qu’une feuille de route interministérielle serait en cours d’élaboration : qu’en est-il ? Quand pouvons-nous espérer que la stratégie nationale tant demandée par de nombreux acteurs soit enfin mise en œuvre, près de vingt ans après l’interdiction de l’amiante dans notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, vous l’avez dit, l’amiante provoque en France, chaque année, la mort de 1 700 personnes, en ne prenant en compte que les seuls cancers liés à l’exercice d’une activité professionnelle. C’est sans doute le plus grand drame de santé publique qu’ait connu notre pays.

Devant la gravité de cette situation, le Gouvernement est déterminé à tout faire pour éviter les expositions à ce polluant cancérigène, interdit dans notre pays depuis 1997 mais encore présent dans certains bâtiments.

Des mesures ont d’ores et déjà été prises pour faciliter l’extraction de l’amiante dans les logements existants. Ainsi, la loi de finances de 2015 a créé un prêt dédié aux travaux de traitement de l’amiante. Ce prêt, qui est délivré par la Caisse des dépôts et consignations, sera mobilisable à hauteur de 2 milliards d'euros. Il permettra vraisemblablement de financer les travaux dans 40 000 logements, avec des taux inférieurs à ceux du livret A.

Les organismes de recherche seront pleinement impliqués dans cet effort de désamiantage, grâce à un plan d’action sur trois ans mis en place par le ministère du logement et qui vise à mobiliser les chercheurs pour sécuriser l’extraction de l’amiante.

Par ailleurs, plusieurs mesures relatives à l’amiante ont été insérées dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé qui sera examiné très prochainement en première lecture par le Sénat.

Ce projet de loi prévoit notamment de renforcer le pouvoir d’intervention des préfets, qui pourront prendre des mesures contraignantes en vue de faire cesser des expositions aux fibres d’amiante. Il permettra également d’assurer une meilleure transmission des informations relatives à l’amiante. À l’avenir, elles devront être communiquées non seulement aux préfets, mais aussi aux ministères chargés de la santé et du logement. Enfin, ce texte renforcera les sanctions encourues par les propriétaires qui refuseraient de répondre aux injonctions en matière de repérage des travaux amiantés.

Cependant, vous avez eu raison de souligner que, au-delà de ces actions sectorielles, nous devons renforcer la coordination interministérielle en matière de lutte contre l’amiante. Les différentes actions que j’ai évoquées montrent bien que plusieurs ministères sont concernés. Dans cette perspective, le ministère de la santé est en train d’établir, en lien étroit avec les ministères chargés du développement durable, du travail et du logement, une feuille de route interministérielle qui viendra très vite coordonner les actions de tous les services compétents.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d'État !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Cette feuille de route devrait permettre de renforcer l’information du public sur les risques liés à l’amiante et d’aider les particuliers et les professionnels à agir. Je pense notamment aux diagnostiqueurs et aux artisans du secteur du bâtiment et des travaux publics. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

réforme du collège

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour le groupe CRC.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la ministre de l'éducation nationale, le jour même de la grève des enseignants contre la réforme du collège, vous avez signé le décret d’application de celle-ci. C’est un passage en force choquant.

Oui, il faut une réforme du collège. Toutefois, si son objectif est de favoriser la réussite de tous les élèves, de s’attaquer aux mécanismes de l’échec scolaire pour faire refluer les inégalités, celui-ci ne pourra être atteint sans l’engagement et l’adhésion de la communauté éducative.

Cette réforme devrait constituer une rupture nette avec les politiques menées précédemment par la droite, qui, faisant preuve de beaucoup d’opportunisme, prétend aujourd’hui défendre l’école de la République (Exclamations sur les travées de l'UMP),…

M. Alain Fouché. On l’a toujours défendue, madame ! On n’a pas attendu !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … qu’elle a saccagée en supprimant des milliers de postes et la formation des enseignants. (Très bien ! sur les travées du groupe CRC. – Protestations sur les travées de l'UMP.)

Cela étant, la réforme engagée par le Gouvernement appelle des critiques,…

M. Alain Fouché. Tout de même !

M. le président. Seule Mme Gonthier-Maurin a la parole, mes chers collègues !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … car elle repose sur une diminution globale des temps d’enseignements communs obligatoires au collège.

Madame la ministre, vous affirmez qu’elle permettra de mieux préparer tous les collégiens à « entrer dans le monde de demain ». Or ce monde, caractérisé par des savoirs plus complexes, nécessite une élévation du niveau des connaissances pour tous, donc plus d’école !

Vous invoquez le recours à l’aide personnalisée, aux enseignements pratiques interdisciplinaires. Pourquoi pas, mais l’interdisciplinarité doit non pas se substituer à l’acquisition de fortes bases disciplinaires par tous, mais s’appuyer sur elle.

De quels outils les enseignants disposeront-ils ? Le chantier de la formation continue est toujours en déshérence et dépourvu de moyens suffisants ! Quant à la formation initiale, alors que l’interdisciplinarité est supposée révolutionner le collège, elle n’a même pas été inscrite dans les missions des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République !

Quant à l’autonomie, c’est avant tout celle des établissements, et non celle des enseignants, qui est renforcée, dans un contexte de baisse des dotations globales horaires et de mise en concurrence.

Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas vrai !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La crainte des enseignants d’un renforcement des inégalités est donc légitime.

Parce que tous les élèves n’entrent pas au même rythme dans les apprentissages, quand allez-vous accepter, madame la ministre, d’envisager un allongement de la scolarité obligatoire et de véritables prérecrutements des enseignants, outils essentiels de transformation de l’école, permettant sa véritable démocratisation ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, je vous sais attachée, autant que je le suis, à la réussite scolaire de tous les enfants de France.

M. Alain Fouché. Nous aussi ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. C’est la raison pour laquelle je ne confonds pas l’opposition à cette réforme du collège qui relève d’une justification des inégalités scolaires visant à mieux permettre de dégager une élite (Exclamations sur les travées de l'UMP)

Un sénateur du groupe UMP. C’est inadmissible !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … et la vôtre, qui repose sur un certain nombre d’interrogations sur les modalités pratiques de mise en œuvre.

Oui, le collège a besoin de professeurs aux compétences disciplinaires solides, capables de renforcer l’apprentissage de chaque matière par les élèves. C’est la raison pour laquelle cette réforme ne porte nullement atteinte aux enseignements disciplinaires, dont les horaires ne baissent pas.

Oui, cette réforme introduit de nouveaux temps dits « d’interdisciplinarité ». Plusieurs enseignants seront ainsi amenés à travailler ensemble pour aider les élèves à s’approprier différemment les apprentissages, les cours magistraux, théoriques et cloisonnés ne convenant pas à tous.

En tout état de cause, ces enseignements pratiques interdisciplinaires seront bien assurés par les enseignants des différentes disciplines. Le professeur d’histoire-géographie, le professeur de français, le professeur de mathématiques, tous seront amenés à les prendre en charge, de même que l’accompagnement personnalisé.

C’est pourquoi, je le redis ici, aucun enseignant n’a à perdre à cette réforme du collège. Au contraire, celle-ci permettra aux élèves de mieux assimiler les différentes matières. Tel est bien l’objectif de cette réforme : que les élèves ne sortent pas du collège sans avoir compris ce qu’ils y ont appris.

Oui, madame la sénatrice, mettre en place la formation continue des enseignants est indéniablement nécessaire pour garantir la bonne mise en œuvre de cette réforme. C’est la raison pour laquelle le décret devait être publié. Il fallait en effet signifier une fois pour toutes que la réforme se fera, pour pouvoir ensuite discuter avec les organisations syndicales de ses modalités d’application,…

M. Jean-Pierre Raffarin. On décide d’abord, on discute après !

M. Alain Fouché. Tout cela n’est pas convenable !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … s’agissant notamment de l’accompagnement, par la formation continue, des établissements et des équipes pédagogiques. Cette démarche sera engagée très prochainement pour les cadres de l’éducation nationale, pour les chefs d’établissement, puis, à l’automne prochain, pour les enseignants de collège, afin que tous les acteurs puissent mettre en œuvre cette réforme dans les meilleures conditions possibles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.)

cop 21 (convention-cadre des nations unies sur les changements climatiques)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Yves Roux. La France présidera la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, qui se tiendra du 30 novembre au 11 décembre prochains. Cette échéance est cruciale : l’objectif est d’aboutir à l’adoption d’un premier accord universel et contraignant sur le climat, pour maintenir l’augmentation de la température globale en deçà de deux degrés Celsius. Il s’agit de prendre des mesures qui permettent de contenir le réchauffement global.

Avec 195 pays impliqués et 47 000 participants attendus, il s’agit là du plus grand événement diplomatique jamais organisé, tant par son ampleur que par l’importance de l’enjeu. La France, sur l’initiative du Président de la République (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP), a eu le courage de s’engager et de se porter candidate à son organisation.

M. Marc Daunis. Il fallait le rappeler !

M. Jean-Yves Roux. Mardi dernier, le Président de la République, François Hollande, et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont donné à Berlin le coup d’envoi de la négociation internationale sur le climat. Le couple franco- allemand a décidé de donner un coup d’accélérateur aux travaux préparatoires de la conférence Paris Climat 2015.

À la fin du mois de février dernier, le Président de la République a lancé « l’appel de Manille » (Nouvelles exclamations ironiques sur les mêmes travées), afin de sensibiliser gouvernants et citoyens à l’urgence de lutter contre le dérèglement climatique par une réponse globale soutenue par tous.

Aujourd’hui même se déroule à Paris, au siège de l’UNESCO, le sommet « Entreprises et climat », forum mondial des entreprises partenaires de la COP 21. Le secteur privé a répondu à l’appel du secrétaire général de l’ONU et assume un rôle plus actif dans le processus mondial de décarbonatation. Des réseaux d’entreprises de première ligne ont décidé d’unir leurs forces et de mobiliser des chefs d’entreprise du monde entier afin de lutter contre le réchauffement climatique.

Toutes les forces doivent être associées afin de permettre la réussite de la COP 21. Nous mesurons cette semaine encore l’engagement du Gouvernement dans la lutte contre le dérèglement climatique.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser quels moyens vous mettez en œuvre pour garantir autant que faire se peut le succès de la COP 21 et la réussite des négociations multilatérales ambitieuses que la France va présider ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Vous avez bien défini l’enjeu de la COP 21. Il faut toujours se méfier des épithètes excessives, mais, si nous réussissons à convaincre les 196 États parties, qui devront se prononcer à l’unanimité,…

M. Alain Fouché. Il y a du boulot !

M. Laurent Fabius, ministre. … ce sera vraiment un succès pour le monde et, bien sûr, pour la France, hôte de cette conférence.

Cette conférence a quatre objectifs majeurs.

Le premier, le plus important, qui n’a jusqu’à présent jamais pu être atteint, est d’obtenir « un accord universel, différencié, juridiquement contraignant ». J’ajoute que cet accord devra aussi être durable et être maintenu au-delà de 2030. Les négociations avancent, mais elles sont très difficiles, car la matière elle-même est difficile. En outre, on comprend qu’il est ardu de mettre d’accord 196 pays…

Le deuxième objectif est de dresser le bilan des contributions nationales à la réduction des émissions de gaz à effet de serre que les pays doivent annoncer en principe avant la fin du mois d’octobre prochain. Pour l’heure, les contributions déjà annoncées portent sur 30 % à 40 % de la masse globale des émissions de gaz à effet de serre ; nous espérons avoir atteint, voire dépassé, le seuil de 90 % au moment de la COP 21. Nous aurons alors des indications précises sur les engagements de chacun des pays.

Le troisième objectif a trait aux financements et aux technologies. On peut imaginer qu’aucun pays n’est par principe opposé à la conclusion d’un accord sur le climat. Cependant, de nombreux pays, à commencer par les plus pauvres, s’interrogent sur les financements et les technologies.

Une série d’initiatives ont été prises. Je pense ainsi au Fonds vert, qui, notamment grâce à l’action de l’Allemagne et de la France, est doté d’un peu plus de 10 milliards de dollars, l’objectif étant de mobiliser 100 milliards de dollars à l’horizon de 2020. Un important travail reste à accomplir. Le Dialogue de Petersberg sur le climat, qui s’est achevé à Berlin voilà deux jours, s’inscrit dans cette perspective.

Enfin, le quatrième objectif vous concerne directement, mesdames, messieurs les sénateurs : il est d’associer les parlementaires, les régions, les collectivités locales, les entreprises à l’organisation de la COP 21, pour que celle-ci soit un succès et débouche sur la conclusion d’un accord bénéfique pour l’ensemble de la planète. À cet égard, je compte sur le soutien de chacune et de chacun d’entre vous. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.)

réforme du collège

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe UMP.

Mme Colette Mélot. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Alain Fouché. Mme la ministre est très demandée !

Mme Colette Mélot. Madame la ministre, vous admettrez qu’il n’est pas banal que des syndicats d’enseignants dits « réformistes » dénoncent une provocation du Gouvernement lorsqu’ils apprennent, via la presse, que le décret portant sur la réforme très contestée du collège a paru hier au Journal officiel, alors que de nombreux enseignants ont manifesté la veille.

Malgré le grand émoi suscité chez les enseignants, malgré la pétition de 234 parlementaires de la droite et du centre, malgré les propos très sévères d’intellectuels de tous bords – des intellectuels de grande renommée, et non des « pseudo intellectuels », comme vous les avez désignés –,…

M. Alain Fouché. C’est vrai, ce sont des intellectuels de tous horizons !

Mme Colette Mélot. … vous refusez tout dialogue.

Promouvoir l’idéal politique de la réduction des inégalités est en soi fort estimable, mais, lorsque cela se fait au détriment de la qualité de l’instruction, c’est inacceptable. Or l’objectif que vous vous fixez, c’est bien le nivellement par le bas. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

En cela, madame la ministre, vous faites une terrible erreur d’analyse. Les parents des enfants des classes populaires n’attendent pas de vous que vous sabordiez l’élitisme ; ils attendent de vous que vous donniez à leurs enfants les moyens de l’atteindre.

M. Éric Doligé. Très bien !

Mme Colette Mélot. Pour ce faire, il faut d’abord mettre en place un enseignement rénové de la lecture, qui permette à chaque élève de savoir lire comme nous lisons, vous et moi.

Or vous faites le choix de diminuer le nombre d’heures d’enseignement du français. Vous supprimez le latin et le grec, les classes bilangues et les sections européennes. Vous proposez l’enseignement dès la classe de cinquième d’une seconde langue vivante et vous diminuez l’horaire global de l’enseignement des langues, lequel, de ce fait, sera inefficace. Est-ce ainsi que vous allez restaurer l’égalité scolaire ?

Les heures d’accompagnement personnalisé seront prises sur le temps d’enseignement et ne correspondent en aucun cas au suivi individuel des élèves en difficulté. Est-ce ainsi que vous permettrez à chacun de progresser en adaptant le soutien à son niveau ?

Votre credo de la réduction des inégalités relève d’une vaste hypocrisie. Vous êtes en train d’abandonner les enfants des classes populaires et de dénaturer profondément notre système éducatif, notamment dans les zones urbaines sensibles.

Madame la ministre, allez-vous enfin écouter, mais surtout entendre et comprendre, ceux qui, d’où qu’ils viennent, pensent un véritable avenir pour notre jeunesse et pour notre pays ?

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Colette Mélot. Allez-vous surseoir à cette réforme du collège et des programmes, ouvrir un vrai dialogue et une véritable concertation, qui seraient la marque d’une recherche sincère des moyens de permettre au collège de viser l’excellence pour le plus grand nombre des élèves ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Didier Guillaume. Il faut recommencer, madame la ministre !

M. Alain Fouché. Il faut inventer quelque chose de neuf !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, voilà plusieurs semaines que j’entends parler de « nivellement par le bas ». Permettez-moi de vous donner ma définition de cette notion.

Le nivellement par le bas, c’est lorsque des familles craignent de mettre leur enfant dans un collège parce qu’elles savent que les difficultés scolaires de quelques élèves y sont si mal prises en charge que leur enfant risque d’en pâtir.

Le nivellement par le bas, c’est quand, pendant dix ans, on assiste sans rien faire, les bras ballants, à la dégradation du niveau de tous les élèves, les plus mauvais comme les meilleurs (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste), et que l’on aggrave même la situation en supprimant des postes d’enseignant et la formation des enseignants, laquelle est pourtant a priori la meilleure garantie d’une bonne transmission du savoir aux élèves.

Le nivellement par le bas, c’est quand le déterminisme social est si bien intériorisé que des enfants de familles populaires considèrent que la réussite n’est pas pour eux et s’autocensurent dans leur parcours scolaire, leurs choix et leurs ambitions.

Voilà ce qu’est le nivellement par le bas. C’est parce que nous ne l’acceptons pas que nous réformons le collège, afin de tirer tout le monde vers le haut.

Pour ce faire, nous renforçons l’acquisition des fondamentaux par les enfants,…

M. Rémy Pointereau. C’est en primaire que ça se joue !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … qu’ils soient en difficulté ou en situation de réussite.

Nous entendons faire en sorte que les connaissances, les compétences et la culture que les enfants doivent avoir acquis à la fin du collège soient non seulement d’un niveau élevé, mais de même niveau pour tous les collégiens, quel que soit le territoire où ils vivent.

Nous entendons faire en sorte que les enfants soient stimulés, encouragés, aidés durant tout leur parcours au collège. Il s’agit de cultiver chez eux le goût du travail, de l’effort et du mérite, qui n’est pas inné, comme vous le prétendez.

Pour ce faire, il est nécessaire de mettre en œuvre des pratiques pédagogiques nouvelles au collège. Nous souhaitons que les enfants travaillent autrement durant les temps d’interdisciplinarité, avec des enseignants qui leur fassent conduire des projets, leur permettent d’exprimer leur potentiel, car chaque élève en a un.

Quand je parle d’égalité, madame la sénatrice, il s’agit de l’égalité des possibles pour tous les enfants : je refuse que l’on ferme des portes à certains en raison de leur milieu social.

Ne doutant pas que nous soyons tous d’accord sur ces questions, je vous remercie par avance, mesdames, messieurs les sénateurs, du soutien que vous apporterez à cette réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Didier Guillaume. Bravo !

régime social des indépendants

M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour le groupe UMP.