M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, je souhaite apporter une précision.

M. le ministre a déclaré que le service civique avait été créé sur l’initiative d’un sénateur de droite et mis en œuvre par la gauche. Or la loi de 2010 est issue d’une proposition de loi qui a été déposée le 14 septembre 2009 sur le bureau du Sénat et dont le premier signataire était Yvon Collin, qui, à ma connaissance, n’est pas un sénateur de droite – il est membre du parti radical de gauche –, non plus que la plupart de ses cosignataires, tels Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, Michel Charasse, Jean-Pierre Chevènement, François Fortassin, Françoise Laborde, Jacques Mézard, Jean-Pierre Plancade, Robert Tropeano ou Raymond Vall. Certes, Gilbert Barbier et Aymeri de Montesquiou, qui ne sont pas connus pour être de gauche, ont également signé cette proposition de loi, mais cela est conforme à la nature de notre groupe, qui a la particularité d’être « transcourants », si je puis dire ! Cette précision méritait d’être apportée.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue.

Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Service civil : volontaire ou obligatoire ? »

3

Demande d’inscription à l’ordre du jour d’une proposition de résolution

M. le président. En application de l’article 50 ter de notre règlement, j’informe le Sénat que M. Jean Vincent Placé, président du groupe écologiste, a demandé, ce jour, l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution n° 325 pour un guide de pilotage statistique pour l’emploi, présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Jean Desessard et les membres du groupe écologiste et déposée le 4 mars 2015.

Cette demande a été communiquée au Gouvernement dans la perspective de la prochaine réunion de notre conférence des présidents, qui se tiendra le mercredi 11 mars prochain.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)

PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

4

Questions d’actualité au Gouvernement

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.

risque d’abstention lors des élections départementales et régionales

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vaspart, pour le groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. Michel Vaspart. Ma question s’adresse, ou plutôt s’adressait, à M. le Premier ministre.

D’élection en élection, la montée quasiment inexorable de l’abstention perturbe gravement notre système démocratique. Les causes en sont multiples, tout comme les responsabilités, d’ailleurs. Lorsque, à la mobilisation sincère et spontanée de tout un peuple, en janvier, répond un désaveu du scrutin lors d’une élection partielle, quelques jours après, on ne peut que s’inquiéter !

MM. Roger Karoutchi et Charles Revet. Eh oui !

M. Michel Vaspart. Les élections départementales risquent malheureusement de confirmer cette funeste dynamique. Il est difficile en effet de motiver les électeurs, alors que tout semble fait pour les détourner de l’isoloir, avec d’abord l’improvisation d’une « réforme arbitraire, conçue dans la panique consécutive à la déroute des élections municipales, improvisée sur un coin de table à l’Élysée, en parfaite contradiction avec les déclarations des uns et des autres » !

M. Jean-Louis Carrère. Voilà un homme plein de nuances !

M. Michel Vaspart. Je veux évidemment parler de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, dont Bruno Retailleau, que je viens de citer, avait si justement cerné les motivations. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)

Monsieur le ministre, vous faites cette réforme à l’envers, en ayant commencé par la carte plutôt que par les responsabilités et les compétences, et en oubliant, pour le moment, les financements ! Les candidats font actuellement campagne alors que la loi déterminant les futures compétences des départements n’a pas terminé son parcours législatif : c’est du jamais vu sous la Ve République !

Votre réforme a conduit à un véritable charcutage électoral,…

M. Charles Revet. Exactement !

M. Michel Vaspart. … dont personne ne mesure les conséquences.

Le nouveau mode de scrutin est ubuesque : avec deux élus par territoire,…

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Dont une femme, en plus !

M. Michel Vaspart. … nous nous retrouverons avec plus d’élus qu’auparavant, alors qu’une réforme vertueuse aurait dû aboutir au résultat contraire ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’UDI-UC.)

Vous nous annonciez la disparition des départements pour 2020 ; finalement, vous les maintenez et les renforcez !

M. Jean-Louis Carrère. Sarkozy les supprimera !

M. Michel Vaspart. Où est la cohérence et qui peut comprendre ? Ce ne seront pas les élections régionales de décembre prochain, quand les rigueurs de l’hiver se feront sentir dans beaucoup de départements, qui inciteront les électeurs à aller voter.

M. Jean-Louis Carrère. Ne pleurez pas !

M. Michel Vaspart. Enfin, pas un jour ne passe sans que des pronostics désastreux pour la majorité gouvernementale ne viennent obscurcir votre horizon.

M. Alain Richard. La question, s’il vous plaît !

M. Jean-Louis Carrère. Il n’y a pas de question !

M. Michel Vaspart. Monsieur le ministre, ma question sera donc simple (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.), exempte de tout procès d’intention : souhaitez-vous vraiment donner envie à l’électeur d’aller aux urnes aux mois de mars et de décembre prochains ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question très équilibrée (Rires sur les travées du groupe socialiste.), nuancée, dépourvue de tout esprit polémique et de nature à donner envie aux Français d’aller voter ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Pour renforcer la participation aux élections, trois conditions doivent être réunies.

Tout d’abord, dans un contexte de tensions, d’affrontement et d’éloignement des Français de la chose politique, il faut que nous nous efforcions tous, par des échanges et des débats de qualité, de redonner à nos compatriotes l’envie de se rendre aux urnes. Réaliser cette première condition suppose l’engagement de tous les responsables politiques qui portent une parole publique : cela dépend donc de chacune et de chacun d’entre nous.

Ensuite, nous devons inciter les électeurs à aller voter. Le Gouvernement a décidé d’engager une très forte campagne de communication pour les mobiliser. Animée par le service d’information du Gouvernement, utilisant les réseaux sociaux et internet, cette campagne, intitulée « Oui je vote », me semble répondre à votre préoccupation, monsieur le sénateur, et pourrait être très avantageusement relayée par votre organisation politique et par vous-même.

Enfin, il convient de favoriser l’inscription sur les listes électorales, afin qu’un maximum de Français puissent voter et que ceux qui ont déménagé entre le moment où ils se sont inscrits et la date du scrutin n’en soient pas empêchés. Je vous invite donc à soutenir la proposition de loi inspirée du rapport transpartisan de M. Jean-Luc Warsmann et de Mme Élisabeth Pochon qui sera prochainement soumise au Sénat. Ce texte vise à rendre possible l’inscription sur les listes électorales jusqu’au 30 septembre prochain en vue des élections de 2015, et jusqu’à la dernière minute à l’horizon de 2017.

Pour ce qui concerne la réforme territoriale, très souvent annoncée dans le passé mais jamais faite, nous l’avons entreprise, et nous continuerons à la conduire dans l’intérêt du pays ! (Protestations sur les travées de l’UMP. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

situation d’areva

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin, pour le groupe du RDSE.

M. François Fortassin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Elle concerne la situation et l’avenir de la filière nucléaire française, filière d’excellence à laquelle les membres de mon groupe et la Haute Assemblée sont très attachés, comme l’ont montré nos récents débats sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

M. François Fortassin. Est-il nécessaire de rappeler que cette filière stratégique, qui compte 2 500 entreprises et 220 000 salariés, est un facteur essentiel de la souveraineté et de l’indépendance énergétique de notre pays ?

Monsieur le ministre, le Président de la République a annoncé hier à Madrid, à l’issue d’un sommet consacré aux interconnexions énergétiques entre l’Espagne, le Portugal et la France, qu’il avait demandé aux dirigeants d’AREVA et d’EDF de travailler à un rapprochement. Il les a appelés à coopérer pour définir avec l’État, qui est actionnaire des deux groupes à hauteur de plus de 80 %, une « nouvelle stratégie industrielle » pour « donner un avenir à la filière nucléaire française », afin « qu’aucun licenciement ne puisse être prononcé ». Nous souscrivons pleinement aux propos du chef de l’État.

Monsieur le ministre, la situation est en effet très préoccupante : AREVA vient d’annoncer une perte annuelle de près de 5 milliards d’euros ! Déjà endetté à hauteur de 5,8 milliards d’euros, le groupe table sur un cash flow négatif de 1,7 milliard d’euros en 2015 et, en 2016, il devra s’acquitter de près de 1,5 milliard d’euros au titre du remboursement de sa dette financière.

Dans ces conditions, on comprend que la direction d’AREVA ait annoncé hier un plan de sauvetage prévoyant un recentrage des activités, une nette réduction des investissements et d’importantes cessions d’actifs, à concurrence de plus de 450 millions d’euros. Ce ne devrait être là que la première phase d’une thérapie de choc plus importante encore, qui doit permettre à AREVA de trouver plusieurs milliards d’euros.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire part de votre appréciation et de celle du Gouvernement sur la situation d’AREVA et, plus largement, de la filière française du nucléaire, ô combien stratégique ? À combien estimez-vous, à moyen terme, les besoins de financement d’AREVA ? Envisagez-vous de devoir procéder à sa recapitalisation ? Enfin, l’hypothèse d’une entrée d’EDF au capital d’AREVA fait-elle partie des négociations entre les deux groupes ?

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. François Fortassin. Monsieur le ministre, j’apprécie globalement votre action, et pas seulement parce que vous avez de l’affection pour un département qui m’est cher, les Hautes-Pyrénées ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Monsieur le sénateur, votre question revêt une importance particulière compte tenu des annonces faites hier par AREVA, qui ne manquent pas d’inquiéter les salariés du groupe et nombre de territoires.

M. le Premier ministre a eu l’occasion de le dire hier, l’État prendra toutes ses responsabilités dans cette affaire. Les pertes de 4,8 milliards d’euros annoncées ne sont pas récurrentes : elles sont largement dues à des opérations ponctuelles, à la non-conclusion de contrats à l’étranger ou à la nécessité de provisionner les pertes enregistrées pour quelques grands investissements bien connus.

Cette situation financière impliquera la prise d’une série de mesures dans les prochaines semaines.

Tout d’abord, la stratégie du groupe et ses opérations doivent être revues. L’État accompagnera AREVA dans ce travail. Il s’agira avant tout d’une réorganisation du groupe, avec un effort sur les achats. Par ailleurs, dans la mesure où l’État aura défini avec l’entreprise des règles strictes dans le cadre du dialogue social, des efforts pourront être faits sur l’emploi. J’insiste sur ce point : à aucun moment les pouvoirs publics ne laisseront l’emploi devenir la variable d’ajustement dans le traitement de ce dossier. Il ne doit donc pas y avoir d’ambiguïté sur ce sujet : toutes dispositions seront prises pour que les efforts opérationnels de l’entreprise n’amènent pas à sacrifier l’emploi. Telle est la volonté du Gouvernement. La pyramide des âges au sein de l’entreprise est ce qu’elle est, mais les sites productifs extrêmement importants et les emplois du groupe jouent un rôle fondamental pour les territoires. En outre, la sûreté nucléaire doit bien sûr être préservée.

Le deuxième axe de travail consistera à opérer le rapprochement entre AREVA et EDF et à donner une nouvelle ambition à la filière nucléaire.

La situation que nous connaissons aujourd’hui est largement le fruit d’incohérences qui, dans le passé, ont été couvertes par les pouvoirs publics. On a laissé deux groupes publics dysfonctionner, c’est-à-dire ne plus travailler ensemble. Sur le plan commercial, dans le domaine de l’approvisionnement, en particulier, EDF a fait des choix qui ont nui aux équilibres d’AREVA. Pendant trop longtemps, on a laissé ces deux groupes ne plus coopérer à l’export. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.) Ces comportements seront corrigés. Nous avons demandé à EDF et à AREVA de travailler ensemble à la redéfinition de l’avenir de la filière nucléaire, en France et pour la France.

Enfin, à l’export, AREVA devra aller plus loin, là aussi avec EDF, en particulier en s’attaquant au marché chinois ; nous l’y aiderons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

non-recours aux droits

Mme la présidente. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Mme Aline Archimbaud. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

M. Charles Revet. Il n’est pas là !

Mme Aline Archimbaud. Mesdames, messieurs les ministres, vous avez présenté mardi la feuille de route du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, pauvreté qui malheureusement continue à s’intensifier dans notre pays.

Le Gouvernement engage de réelles avancées, et je m’en félicite : il s’agit, par exemple, de l’élargissement du champ de la « Garantie jeunes », du renforcement de l’accompagnement, de la mise en place de la prime d’activité, à condition que celle-ci soit aussi accessible aux jeunes. Il a également tout notre soutien pour la généralisation du tiers payant.

Par ailleurs, un simulateur des droits sera prochainement disponible. Ce dispositif peut certes permettre à des personnes ayant accès à des moyens informatiques de se renseigner sur leurs droits, mais il est largement insuffisant pour diminuer l’extrême complexité des démarches administratives, pour simplifier l’extraordinaire parcours du combattant que doit accomplir celui qui veut faire valoir ses droits et qui explique les taux impressionnants et persistants de non-recours à certains dispositifs. Ainsi, en 2011, 35 % des personnes éligibles au RSA-socle n’en bénéficiaient pas, et, en 2013, 20 % des personnes légalement éligibles à la CMU complémentaire, soit près d’un million de personnes, n’avaient pas ouvert leurs droits !

J’ai remis il y a un an et demi à M. Jean-Marc Ayrault un rapport comportant des propositions simples pour lutter contre le non-recours aux droits et préconisant notamment un choc de simplification. Je ne comprends pas pourquoi ces propositions ont été si peu prises en compte par le Gouvernement depuis lors.

Je ne peux imaginer que l’État table sur un non-recours aux prestations prévues par la loi pour faire des économies. Il est impossible de penser que l’on spécule sur le fait que beaucoup, découragés, perdus dans les méandres administratifs, renoncent à accéder à leurs droits.

Cela a fait « économiser » plus de 6 milliards d’euros au budget de l’État, mais ce serait une grave erreur de penser que ces non-dépenses sont de véritables économies, car les dégâts sanitaires, sociaux engendrent des dépenses bien plus importantes et le non-accès aux droits suscite une désespérance qui brouille les repères républicains et favorise la montée des extrémismes.

Pourquoi ne mettez-vous pas en place dès maintenant des mesures de simplification drastiques pour l’accès aux droits sociaux ? Pourquoi, par exemple, refuser de rendre automatique l’attribution de la CMU complémentaire aux bénéficiaires du RSA-socle, alors que les plafonds sont strictement les mêmes pour les deux dispositifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, je vous prie d’abord de bien vouloir excuser Marisol Touraine, qui ne pouvait pas être présente cet après-midi.

M. Alain Gournac. C’est dommage !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Je vais essayer de vous convaincre qu’il n’y a nulle suspicion à entretenir à l’encontre du Gouvernement, qui considère que le non-recours aux droits est une injustice supplémentaire subie par ceux qui souffrent déjà le plus d’injustices.

Le Premier ministre a présenté cette semaine la feuille de route pour la période 2015-2017 du plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Elle comporte des mesures fortes et efficaces pour limiter le non-recours aux droits.

Tout d’abord, le simulateur de droits permettra à chacun d’identifier les droits sociaux auxquels il peut prétendre, le non-recours étant trop souvent lié à l’ignorance de l’existence de la prestation.

Parallèlement, nous allons lancer une vaste campagne de communication pour mieux faire connaître l’aide à la complémentaire santé.

On constate en effet que ce dispositif reste mal connu, alors même que nous l’améliorons de manière significative au 1er juillet de cette année en supprimant les franchises médicales pour ses bénéficiaires, en mettant en place le tiers payant et en sélectionnant les contrats.

Cette campagne d’information mobilisera notamment tous les réseaux en contact avec les publics concernés : caisses de sécurité sociale, caisses d’allocations familiales, centres d’action sociale.

En ce qui concerne l’automaticité de l’attribution de certaines prestations, madame la sénatrice, nous la faisons déjà avancer. Ainsi, le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, que vous aurez à examiner les 17, 18 et 19 mars prochains, prévoit la reconduction automatique de l’aide à la complémentaire santé pour les bénéficiaires du minimum vieillesse.

Rendre automatique l’attribution d’autres prestations supposerait de modifier le mode de calcul de celles-ci. Le RSA est recalculé tous les trois mois, avec de nombreuses entrées et sorties du dispositif, alors que la CMU complémentaire est attribuée pour un an : accorder celle-ci de manière automatique aux bénéficiaires du RSA pourrait engendrer un surcroît de complexité, ce que nous veillons à éviter.

Lutter contre le non-recours aux droits, c’est aussi simplifier les prestations. Le Premier ministre a annoncé mardi dernier une réforme majeure : la création de la prime d’activité, qui permettra de remplacer deux prestations complexes, peu lisibles, par une prime unique et simple. Son montant sera stabilisé pour trois mois, afin de mettre un terme aux variations trop fréquentes, qui donnaient lieu à des rappels et à des abus incompréhensibles.

Comme vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement est mobilisé pour lutter contre le non-recours aux droits et faire progresser la justice sociale : c’est l’un des défis que nous entendons relever ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe CRC.

Mme Éliane Assassi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Monsieur le ministre, le 11 décembre dernier, mon ami Pierre Laurent vous avait interrogé de manière très précise sur le texte que le Gouvernement a imposé à l’Assemblée nationale par le biais de la procédure de l’article 49-3, sans le faire voter stricto sensu.

Vous lui aviez répondu en ces termes, avec une certaine violence et un certain mépris : « Je ne sais pas de quoi vous parlez. Je ne sais d'ailleurs pas si vous avez lu le texte qui a été déposé depuis hier en conseil des ministres. »

Peut-être allez-vous reconnaître aujourd’hui le bien-fondé des propos de M. Laurent ? Peut-être est-ce finalement vous, monsieur le ministre, qui n’aviez pas bien lu le texte de votre projet de loi…

M. Laurent avait dénoncé une généralisation du travail de nuit et du dimanche : vrai ou faux, monsieur le ministre ?

M. Alain Gournac. C’est vrai !

Mme Éliane Assassi. Il avait annoncé une libéralisation du secteur des transports en autocar : vrai ou faux ?

MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Philippe Dallier. C’est vrai et c’est très bien !

Mme Éliane Assassi. Il avait alerté sur la privatisation des aéroports de Nice et de Lyon : avait-il mal lu, comme les 35 000 Niçois qui ont signé une pétition contre cette mesure ? (Non ! sur les travées de l’UMP.)

Vendrez-vous, oui ou non, une part du capital de nos entreprises de défense ? Réfutez-vous toute remise en cause des droits des salariés ? Ne vous attaquez-vous pas au droit du licenciement ? Vous régularisez sans doute les choses, mais ne validez-vous pas le principe européen scandaleux du travail détaché ?

Ces mesures, parmi d’autres, vous ont coûté votre majorité à l’Assemblée nationale, car beaucoup de nos collègues députés sont conscients de leur caractère dévastateur pour la société française.

Votre projet de loi a une colonne vertébrale et une vraie cohérence : l’objectif est d’accroître les profits des actionnaires.

Monsieur le ministre, j’en viens à ma question fondamentale : comment osez-vous présenter un projet de loi destiné à favoriser la relance économique sans présenter la moindre mesure contraignant à investir les immenses richesses produites au profit de l’emploi, de la lutte contre la précarité ?

Monsieur le ministre, pourquoi n’avez-vous pas proposé la moindre mesure pour contraindre les banques à orienter leurs moyens phénoménaux vers la production industrielle, plutôt que vers les circuits financiers les plus occultes ?

M. Roger Karoutchi. Alors, monsieur le ministre ?

Mme Éliane Assassi. S’il vous plaît, monsieur le ministre, ne nous opposez pas un discours agressif, selon lequel il y aurait, d’un côté, des modernistes, et, de l’autre, des passéistes !

M. Éric Doligé. Il a raison !

M. Roger Karoutchi. C’est vrai !

Mme Éliane Assassi. Acceptez, monsieur le ministre, que nous ne partagions pas vos recettes libérales…

M. Roger Karoutchi. Libérales, libérales…

Mme Éliane Assassi. … et que nous leur opposions de vraies solutions de gauche lors du débat au Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Madame la sénatrice, le texte qui sera bientôt soumis au Sénat est le fruit de 200 heures de débat à l’Assemblée nationale,…

MM. Alain Gournac et Philippe Mouiller. Le 49-3 !

M. Emmanuel Macron, ministre. … d’un vote sur chacun de ses articles. Le Gouvernement a finalement décidé de recourir à l’article 49-3 de la Constitution, conformément au parlementarisme rationalisé de la VRépublique. En aucun cas il ne s’agit d’un coup de force, en aucun cas je n’ai refusé le débat. (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)

Non, madame la sénatrice, l’esprit du texte n’est pas de contraindre ! Il est de redonner des droits, d’ouvrir des possibilités, tout en protégeant les salariés.

En particulier, le projet de loi vise à mettre fin au monopole bancaire sur le financement des entreprises, en permettant le financement interentreprises, ce qui est une véritable avancée.

Non, madame la sénatrice, ce texte ne généralise pas le travail de nuit et le travail du dimanche. Le travail en soirée est autorisé dans les zones touristiques internationales que j’ai très précisément décrites à l’Assemblée nationale, mais il devra être payé double, ce qui est rarement le cas aujourd’hui.

Le projet de loi tend également à mettre en œuvre l’homogénéisation et la compensation systématique du travail dominical : aujourd'hui, la loi ne prévoit aucune compensation dans 640 zones touristiques de notre pays. L’ouverture sera possible jusqu’à douze dimanches par an en zones commerciales, en zones touristiques et dans les villes dont le maire l’aura décidé, avec pour les salariés concernés une compensation définie par voie d’accord : sans accord, il n’y aura pas d’ouverture ! Il s’agit d’une avancée en termes de protection des salariés.

Non, ce texte ne prévoit pas une libéralisation à tout crin du transport par autocars ! Il vise à simplifier le marché et à permettre, pour le transport privé, l’ouverture de lignes actuellement inexploitées en raison de l’existence de trop nombreuses contraintes.

Je reviendrai, au cours de nos débats à venir, sur la question du droit du licenciement, mais je ne peux laisser dire, à ce stade, que le projet de loi y porte atteinte ! Hier, j’ai répondu en détail sur ce point devant la commission spéciale du Sénat.

Enfin, en matière de travail détaché, le texte renforce les sanctions en cas de fraude : c’est là une autre importante avancée sociale.

Au total, le travail du Gouvernement sur ce projet de loi aura consisté à ouvrir de nouveaux droits, mais aussi à assurer davantage de protection. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

volet « développement économique » de la politique de la ville

Mme la présidente. La parole est à M. René Vandierendonck, pour le groupe socialiste.

M. René Vandierendonck. Ma question s’adresse à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.

Mardi matin, nous avons appris avec une grande tristesse le décès de notre collègue Claude Dilain, qui a, tout au long de son engagement d’élu, incarné les valeurs d’égalité et de fraternité de la République.

Président de l’association « Ville et Banlieue » et de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, Claude Dilain a également été le rapporteur de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. C’est à ce même micro qu’il s’est exprimé à maintes reprises pour regretter que le développement économique soit un « volet négligé » de la politique de la ville.

Inlassablement, Claude Dilain a prôné la mobilisation des pouvoirs publics – État et collectivités territoriales – pour orienter et adapter les crédits de droit commun, comme il les appelait, au bénéfice du développement des quartiers.

Le Président de la République, qui lui rendra samedi hommage à Clichy-sous-Bois, a annoncé, lors de sa conférence de presse du 5 février dernier, sa volonté de créer une agence nationale pour le développement économique des territoires.