M. Michel Bouvard. J’espère que l’on donnera au moins quitus aux élus savoyards de leur constance. En effet, cet amendement a reçu le soutien de la totalité des sénateurs savoyards – Jean-Pierre Vial, Jean-Claude Carle, Cyril Pellevat et Loïc Hervé – et a été déposé presque dans les mêmes termes – pour des raisons de recevabilité, nous avons dû en restreindre le champ au Sénat – sous forme de proposition de loi à l’Assemblée nationale par six des huit députés savoyards. Ces dispositions ont été présentées devant les deux conseils généraux de Savoie et de Haute-Savoie réunis.

Depuis maintenant plus de cinquante ans, les deux départements ont une volonté constante de mettre en commun un certain nombre de compétences et de se rapprocher. Je rappelle que la Savoie est, avec le comté de Nice, l’un des derniers territoires à avoir été rattaché au territoire national.

En 1860, c’est un sénatus-consulte de l’empereur qui crée les deux départements et leur confie des compétences, avec des centres de décision situés à Chambéry et Annecy.

En 1982, au moment de la décentralisation, nous avons mis en place, avec Michel Barnier et Bernard Pellerin, l’Entente régionale de Savoie, qui a été la première structure de gestion de compétences en commun. En 2001, l’Assemblée des pays de Savoie lui a succédé. Le tourisme, l’agriculture de montagne, le développement économique, l’enseignement supérieur et la recherche – notamment à travers le soutien à l’université de Savoie –, la culture et la lecture publique sont ainsi gérés en commun.

Les chambres de commerce et d’industrie, les chambres d’agriculture et plusieurs chambres professionnelles se sont également regroupées. Les citoyens des deux départements – des sondages récents le démontrent –, les acteurs économiques et sociaux et des élus de toutes sensibilités politiques soutiennent cette volonté de maintenir les centres de décision dans nos deux départements.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement visant à créer une collectivité territoriale à statut particulier sur le fondement de l’article 72 de la Constitution. Cette collectivité regrouperait les deux départements et exercerait les compétences de droit commun dévolues aux départements et les attributions précédemment déléguées à l’Assemblée des pays de Savoie, institution interdépartementale régie par les articles L. 5421-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.

Nous n’avons pas été élus, mes collègues savoyards et moi-même, pour gérer la dissolution de la Savoie dans le cadre de la réforme territoriale. Nos deux départements ont porté le développement économique. Notre amendement n’est pas un amendement de nostalgie ni de repli identitaire, il se fonde sur l’existence d’un modèle économique différent, dans lequel la richesse est créée d'abord par les vallées, où se trouvent l’énergie, les destinations touristiques et une grande partie du potentiel industriel qui alimente les villes, et dans lequel une grande partie de la richesse est créée en dehors du territoire national, l’agglomération genevoise étant la principale métropole du territoire savoyard.

Nous souhaitons pouvoir poursuivre de manière autonome, au sein de la région Rhône-Alpes-Auvergne, le développement économique de nos territoires et continuer à utiliser les outils créés depuis cinquante ans à cette fin.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je félicite notre collègue Bouvard pour cet amendement d’une douzaine de pages.

M. Roger Karoutchi. Mais ils étaient cinq !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il n’y a qu’un seul signataire.

M. Michel Bouvard. Pour des raisons de délai !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d’un amendement intéressant.

M. Philippe Dallier. Ça commence mal…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cependant, vous compliquez les choses. Vos deux départements peuvent fusionner ; aucun texte spécifique n’est nécessaire, puisque les dispositions générales le permettent. Vous voulez intégrer l’Assemblée des pays de Savoie à l’ensemble. C’est cela qui pose problème. Vous voulez aussi créer une conférence territoriale de Savoie Mont-Blanc… Tout cela me paraît compliqué. La commission n’est pas aussi forte que vous : elle n’a pas été en mesure d’émettre un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable. Michel Bouvard le sait bien, puisque nous en avons parlé à plusieurs reprises – j’en ai également parlé récemment avec les deux présidents de conseil général, Hervé Gaymard et Christian Monteil –, la solution qui s’offre aux Savoyards est la fusion des deux départements.

L’Assemblée des pays de Savoie fonctionne bien, et depuis longtemps. La voie est tracée vers la fusion. De là à créer une nouvelle collectivité à statut particulier, un peu sur le modèle de la Corse, il y a un palier que le Gouvernement ne souhaite pas franchir.

En tant que voisin et ami de la Savoie, je connais bien le particularisme savoyard, pour ne pas dire savoisien, selon le qualificatif qu’utilisent les indépendantistes. J’ignore d'ailleurs si M. Abeille est toujours leur leader.

M. Michel Bouvard. Il est mort !

M. André Vallini, secrétaire d'État. En tout cas, il a sûrement des successeurs…

M. André Vallini, secrétaire d'État. … qui manifestent tous les samedis matins devant la préfecture de Chambéry.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. André Vallini, secrétaire d'État. La coopération entre les deux départements savoyards fonctionne bien. Si vous le souhaitez, il faut aller plus loin, en fusionnant. En revanche, la création d’une collectivité à statut particulier, qui récupérerait en outre des compétences communales, intercommunales et régionales, ne contribuerait pas à la clarification des compétences que souhaite le Gouvernement, en Savoie comme ailleurs.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Vous vous rappelez peut-être que, lors de la discussion générale sur le précédent projet de réforme territoriale, j’ai utilisé le slogan « moins de régions, moins de départements ». Je pense en effet que la fin de l’histoire, ce sera celle-là. Dans un souci de mutualisation, et même pour opérer certains transferts vers les métropoles, il faut des départements plus grands. Aujourd'hui, nous n’avons qu’une mosaïque pas totalement cohérente.

La fusion de certains départements, que nous avons soutenue lors de l’examen du projet de loi précédent, est un élément extrêmement important de la cohérence d’ensemble. Je ne crois pas me tromper en disant que la question va se poser en Alsace si le Conseil constitutionnel valide le redécoupage dans sa forme actuelle. Je rappelle que nous avons été quelques-uns à proposer, dans le cadre de la fusion Bretagne-Pays de la Loire, la création d’un unique département breton, qui aurait peut-être permis de contourner l’opposition d’une partie des Bretons à la constitution d’un ensemble plus grand que la Bretagne historique. La proposition savoyarde s’inscrit dans la même logique ; nous allons donc la soutenir.

Il faut souligner le travail – il s’agit d’un travail complexe, comme l’a souligné M. le rapporteur – réalisé par les promoteurs de la fusion des deux Savoie. Je pense que les projets de ce type sont encore en construction.

Mme Nicole Bricq. Ça, c’est sûr !

M. Ronan Dantec. A-t-on encore besoin aujourd'hui de garder le gros des départements ? N’a-t-on pas intérêt à réduire leur nombre à quarante ou cinquante ? Il y a un véritable enjeu en matière de mutualisation, surtout si on veut éviter que les départements ne soient des périphéries des métropoles ; j’ai cru comprendre que certains ici le craignaient.

La réduction du nombre de départements peut contribuer à l’équilibre territorial. Prenons un exemple. Sans évoquer la fusion complète entre les régions Bretagne et Pays de la Loire, parlons seulement de la fusion entre l’Ille-et-Vilaine et la Loire-Atlantique.

Mme Nicole Bricq. Oh non ! (Rires.)

M. Ronan Dantec. Je sens que les élus parisiens sont impatients de discuter de la métropole du Grand Paris…

M. Philippe Dallier. On attend depuis des lustres ! (Sourires.)

M. le président. Veuillez revenir à l’amendement, mon cher collègue.

M. Ronan Dantec. C’est bien de la question soulevée par l’amendement que je parle. Comment favoriser des dynamiques territoriales cohérentes avec le nouveau découpage et la nouvelle répartition des compétences ? Entre Nantes et Rennes, il y a aujourd'hui un territoire unique ; un unique département pourrait y correspondre.

En conclusion, comme j’ai eu l’occasion de le dire à Jacques Mézard, c’est une pirouette de l’Histoire assez drôle que ce soit par le département, création de la Révolution, que reviennent les identités régionales, pour ne pas dire les provinces.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est effectivement une pirouette de l’Histoire. Nous sommes en train de reconstituer la France d’Ancien Régime.

M. Philippe Dallier. Un 21 janvier, en plus ! (Rires.)

M. Pierre-Yves Collombat. C’est assez extraordinaire que la modernité nous ramène au passé. On est vraiment loin du millefeuille. Si cela continue, on va arriver au pudding : on changera de règles ou de modes de fonctionnement en changeant d’endroit. Si j’étais en meeting, je dirais en conclusion : « Vive la République ! »

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Oui, la République est une et indivisible, mais elle est diverse ! Quels que soient nos engagements républicains – nous le sommes tous ici, a fortiori dans la période actuelle –, nous pouvons admettre qu’on ne peut pas gérer le pays de la même façon dans un tout petit département rural, à Paris – nous allons bientôt en débattre – ou en Savoie.

Il ne s’agit pas de déstructurer, de déliter la République. La République est plus forte que la fusion de deux départements.

M. Pierre-Yves Collombat. Tant qu’elle vit ! Or on est en train de la faire péter !

M. Didier Guillaume. Elle est plus forte que la fusion de quelques villes ou la création d’une métropole. La République, c’est autre chose.

Organiser la gestion territoriale en fonction d’une histoire, ce n’est pas reconstituer les provinces d’Ancien Régime, c’est seulement reconnaître qu’il existe des dynamiques territoriales et qu’elles doivent se développer.

Ce qu’a dit Michel Bouvard est très important, mais j’entends l’argumentation du Gouvernement. Nous partageons son avis. On n’est pas obligé de passer par la loi pour avancer. On ne va pas reconstituer des provinces d’il y a trois siècles par le subterfuge d’un amendement.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, j’aimerais que, lorsque des collectivités locales décident de travailler ensemble – j’ai cité précédemment l’exemple de la Drôme et de l’Ardèche, mais cela vaut pour la Savoie et la Haute-Savoie et cela vaudra peut-être demain pour le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, et pour d’autres encore –, leurs délibérations soient valables. Aujourd'hui, elles ne le sont pas. Il faudrait que l’État accepte les expérimentations, en permettant aux territoires qui le souhaitent de travailler ensemble. Ce serait une idée moderne de ce qu’est la République : une et indivisible, mais diverse. (Applaudissements sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

M. Michel Bouvard. Je remercie la commission et le Gouvernement de l’intérêt qu’ils ont porté à notre démarche, même s’ils ne la soutiennent pas. Je veux rassurer le rapporteur : il ne s’agit pas de créer une collectivité de plus, mais de fusionner deux départements et une structure commune, l’Assemblée des pays de Savoie, au sein d’une structure unique.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui, mais ce serait une collectivité à statut particulier !

M. Michel Bouvard. Je remercie Didier Guillaume de son intervention. Il ne s’agit pas non plus d’une démarche nostalgique…

M. Didier Guillaume. Bien entendu !

M. Michel Bouvard. … visant à reconstituer les provinces d’Ancien Régime, pour la bonne et simple raison que la Savoie n’était pas une province française sous l’Ancien Régime. (Sourires.) Elle se composait d'ailleurs elle-même de six provinces…. Les Savoyards sont très attachés à la République.

Je maintiens cet amendement, d'abord parce qu’il est le fruit d’un travail collectif. Ensuite – je le dis à Mme la ministre et à M. le secrétaire d'État, que je remercie à nouveau de l’intérêt qu’ils portent à notre démarche –, parce que le devenir du département est incertain ; c’est l’une des causes de notre démarche. En effet, cela n’a pas d’intérêt de gérer des départements réunis si leurs compétences ont progressivement été vidées de leur substance, en clair s’ils ne sont plus que des départements croupions. Les possibilités ne seraient pas les mêmes en matière de maîtrise de son destin, de ses centres de décision et de ses projets de développement territorial et économique. C’est bien parce que nous souhaitons que la collectivité qui se substituera aux deux départements possède ces compétences que nous avons déposé notre amendement.

Si l’évolution du projet de loi permet aux départements de conserver des compétences significatives et d’engager des discussions avec les régions pour recevoir des délégations de compétence, en particulier dans les domaines où ils ont soit des spécificités territoriales, soit un poids économique majeur – pour la Savoie, l’agriculture de montagne constitue une spécificité territoriale et le tourisme représente un poids économique majeur –, si, demain, nous pouvons continuer à gérer les parcs d’activités que nous avons créés, comme Archamps Technopole, aux portes de Genève, ou Savoie Technolac, qui abrite l’Institut national de l’énergie solaire – nos départements sont les premiers de France en matière d’énergies renouvelables, notamment grâce à nos ressources hydrauliques et au travail de nos deux cents chercheurs –, alors, bien évidemment, la fusion des départements prendra tout son sens et pourra répondre à l’aspiration des Savoyards.

Je précise d'ailleurs que la moitié des Savoyards sont nés en dehors de Savoie. Cela prouve bien que, si notre amendement comporte un volet culturel et historique, il n’est pas la traduction d’une nostalgie identitaire. Il traduit purement et simplement la carte qu’a publiée la DATAR en 1992, et qu’un certain nombre d'entre vous connaissent puisqu'elle a servi de support pour une partie des travaux de la commission. Il s'agit de cette carte des liens entre les territoires retraçant les flux économiques, les flux d’échanges électroniques ou d’échanges commerciaux, qui montrent bien la cohérence économique du territoire des deux départements savoyards au sein de la région Rhône-Alpes-Auvergne – d’autres territoires présentent aussi cette même cohérence.

Quoi qu’il en soit, l’appel lancé et le soutien apporté par le Gouvernement à une démarche de fusion des deux départements savoyards, pour peu que les départements gardent des compétences significatives et que les régions acceptent des délégations de compétences, peuvent répondre à cette aspiration.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Il est temps de faire preuve d’audace. Il n’y a pas si longtemps, nous avons regroupé d’autorité un certain nombre de régions. Il faut aujourd'hui apprécier la démarche volontariste qu’exprime la Savoie pour être plus efficace demain. En effet, la France n’est pas uniforme, et il convient de s'adapter aux souhaits des territoires. Il en ira de même, je l’espère, pour d’autres territoires – je pense à la Bretagne.

Rien n’explique que l’on puisse adopter aujourd'hui des statuts particuliers pour les métropoles et que ne soit pas pris en compte le souhait de territoires qui veulent travailler ensemble de façon différente. Je soutiens donc totalement la démarche de Michel Bouvard.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 792 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 209 rectifié quater, présenté par M. V. Dubois, Mme Iriti, MM. Kern, Bockel, Guerriau, D. Dubois, Canevet, Vanlerenberghe et Marseille, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l’article 23

I. – Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2573-25 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi rédigé :

« II. – Pour son application en Polynésie française, le premier alinéa de l’article L. 2223-1 est ainsi rédigé :

« Chaque commune ou chaque établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de cimetières dispose d’au moins un cimetière comprenant un terrain consacré à l’inhumation des morts. Les communes de 20 000 habitants et plus ou les établissements publics de coopération intercommunale de 20 000 habitants et plus compétents en matière de cimetières, peuvent décider de la création d’un site cinéraire destiné à l’accueil des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation.

« Les communes disposent d’un délai courant jusqu’au 31 décembre 2020 pour mettre en œuvre les dispositions prévues par le présent article. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre III

Exercice des compétences communales et intercommunales en Polynésie française

La parole est à Mme Teura Iriti.

Mme Teura Iriti. Pour que chacun comprenne mieux la démarche qui nous a conduits au dépôt des amendements nos 209 rectifié quater, 210 rectifié quater et 211 rectifié quater, j’aimerais rappeler que la Polynésie française compte 118 îles et atolls répartis sur une superficie aussi vaste que l'Europe. Imaginez la campagne électorale que nous avons dû mener… Elle nous a cependant permis de rencontrer un grand nombre de maires, qui nous ont manifesté leur très grande inquiétude quant aux délais qui leur ont été imposés concernant la mise en œuvre des sites cinéraires, la production d’eau potable, l’assainissement des eaux, la collecte et le traitement des déchets – toutes opérations importantes, voire indispensables, surtout s'agissant de la distribution de l’eau potable.

Notre contexte géographique freine considérablement l’accomplissement du respect de ces obligations. Certes, plus d’une dizaine de grosses communes, notamment situées sur l’île de Tahiti, ont bien avancé, mais les atolls et les îles des archipels éloignés ont beaucoup plus de difficulté. Je pourrais citer l’exemple d’une communauté de communes située dans l’archipel des Tuamotu, qui comprend quelques centaines d’habitants dispersés sur plusieurs atolls. Représentez-vous, mes chers collègues, le problème de l’éloignement, qui implique des transports à un coût exorbitant, avec très peu d’habitants susceptibles de l’assumer !

Avec mon ami Vincent Dubois, pour prouver notre bonne volonté, nous ne demandons pas l’annulation, mais simplement le report de la date d’entrée en vigueur de ces obligations. Les amendements nos 210 rectifié quater et 211 rectifié quater, qui concernent respectivement l’eau et les déchets, tendent à repousser l’échéance à 2024. L’amendement n° 209 rectifié quater, qui concerne les sites cinéraires, tend, pour sa part, à repousser l’échéance à 2020. Cet amendement vise en outre à porter de 2 000 à 20 000 habitants le seuil à partir duquel une commune de Polynésie française devra disposer d’un site cinéraire pour accueillir les cendres de personnes décédées, sachant qu’il n’existe à ce jour aucun site de ce type en Polynésie. La crémation se pratique en Nouvelle-Zélande, mais elle reste marginale chez nous. Aujourd'hui encore, nous enterrons nos proches dans des cimetières familiaux ou communaux.

J’espère que vous comprendrez notre démarche et qu’elle recueillera votre soutien. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, de l'UMP, du groupe écologiste et du RDSE.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Même si le nombre de résidents qui demandent à être incinérés est encore marginal, cette pratique peut se développer. C'est du reste ce qui se passe dans nos campagnes. Petit à petit, les mœurs évoluent.

Nous serions favorables à l’amendement n° 209 rectifié quater, à la condition que la modification se cantonne au nombre d’habitants, sans renoncer au caractère impératif de la création des sites cinéraires. Cela ferait trois sites cinéraires pour l’ensemble de la Polynésie française, ce qui me paraît faisable.

Par ailleurs, le recul de la date butoir, à 2020, serait maintenu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, le Gouvernement entend vos demandes d’assouplissement du droit funéraire en Polynésie française, notamment pour ce qui concerne les seuils de création de sites cinéraires. Toutefois, des motifs d’ordre public et de salubrité publique ainsi que le respect de la dignité des défunts justifient tant l’existence de restrictions sur l’inhumation dans les propriétés privées que l’obligation de disposer de sites cinéraires.

Le Gouvernement vous propose, sur ces sujets, la mise en place d’un groupe de travail (Exclamations sur les travées de l'UDI-UC.) en vue d’étudier les pistes d’évolution envisageables permettant d’adapter la réglementation aux situations locales tout en encadrant davantage les inhumations dans les propriétés privées, afin de garantir la salubrité publique et le respect de la dignité du défunt. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. (Protestations sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.) À défaut, il y sera défavorable.

Si le Sénat le souhaite, au lieu d’un groupe de travail, pourquoi pas une mission parlementaire sur place ? Je pense que les candidats pourraient être nombreux… (Exclamations amusées sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. Madame Iriti, l’amendement n° 209 rectifié quater est-il maintenu ?

Mme Teura Iriti. Monsieur le secrétaire d'État, je ne peux répondre positivement à votre demande de retrait. Nous sommes de bonne volonté, mais, s'il vous plaît, laissez-nous le temps de nous approprier la mesure et de la mettre en place.

Vous proposez de créer un groupe de travail. Dès la fin de l’année 2014, notre gouvernement a réuni tous les maires pour que nous parlions de ces sujets au cours de l’année 2015. Nous avons donc commencé cette démarche, et nous sommes conscients des enjeux. Alors, laissez-nous travailler, et faites-nous confiance ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l’UMP.)

Cela étant dit, je rectifie mon amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 209 rectifié quinquies, présenté par M. V. Dubois, Mme Iriti, MM. Kern, Bockel, Guerriau, D. Dubois, Canevet, Vanlerenberghe et Marseille, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, et ainsi libellé :

Après l’article 23

I. – Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article L. 2573-25 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« II. – Pour l’application de l’article L. 2223-1, les mots : “2 000 habitants” sont remplacés par les mots : “20 000 habitants”.

« Les communes disposent d'un délai courant jusqu'au 31 décembre 2020 pour mettre en œuvre le présent II. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre III

Exercice des compétences communales et intercommunales en Polynésie française

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement modifie sa position : il s’en remet à la sagesse du Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 209 rectifié quinquies.

(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23.

L'amendement n° 210 rectifié quater, présenté par M. V. Dubois, Mme Iriti, MM. Kern, Guerriau, D. Dubois, Canevet, Vanlerenberghe et Marseille, Mme Morin-Desailly, M. Bockel et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l’article 23

I. – Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2573-27 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L. 2573-27. - Les communes doivent assurer le service de la distribution d’eau potable et le service de l’assainissement au plus tard le 31 décembre 2024. Les communes présentent un plan prévisionnel d'équipement et de mise à niveau relatif aux services de distribution d'eau potable et d'assainissement au plus tard le 31 décembre 2019. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre III

Exercice des compétences communales et intercommunales en Polynésie française

La parole est à Mme Teura Iriti.

Mme Teura Iriti. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ceux qui, comme moi, connaissent la Polynésie le savent bien, des progrès s'imposent en matière de distribution d’eau potable et d’assainissement. Pour avoir été longtemps rapporteur du budget de l'outre-mer – j’ai de très bons souvenirs de cette période –, j’ai pu le constater sur place.

Faut-il repousser le délai jusqu'en 2024 ? Je pense qu’accorder un délai supplémentaire avant que le délai principal n’ait expiré n’incite pas à l’action. On risque de nous dire, en 2020, que ce ne sera plus pour 2024, mais pour 2027. Voilà ce qui me gêne !

Si un délai doit être accordé, il ne faut pas que ce soit plus tard que 2018. À ce moment-là, nous verrons s’il faut encore le repousser. Quoi qu’il en soit, la commission demande l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable.

Eu égard à la situation actuelle, les difficultés techniques inhérentes à la mise en place d’un réseau effectif d’eau potable ainsi qu’au développement de l’assainissement ne permettent pas, dans la situation spécifique de la Polynésie française, d’atteindre les objectifs fixés de 2015 pour l’eau potable et de 2020 pour l’assainissement.

Afin de tenir compte des impératifs techniques nécessaires pour assurer un niveau de service satisfaisant pour les usagers, le Gouvernement est favorable au report de ces deux échéances et soutient l’élaboration d’un plan prévisionnel, au plus tard le 31 décembre 2019.